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Concours d’Arbitrage International de Paris 2017 ARBITRAGE entre LA SOCIÉTÉ HYPOCRATES LTD sis DONLON Défenderesse et LA TROMP COMPANY sis NOUGAYORK Demanderesse MÉMOIRE EN DÉFENSE

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Concours d’Arbitrage

International de Paris 2017

ARBITRAGE

entre

LA SOCIÉTÉ HYPOCRATES LTD

sis DONLON

Défenderesse

et

LA TROMP COMPANY

sis NOUGAYORK

Demanderesse

MÉMOIRE EN DÉFENSE

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II

TABLE DES MATIÈRES

TABLE DES MATIÈRES ...................................................................................................... II

TABLE DES ABRÉVIATIONS ........................................................................................... IV

BIBLIOGRAPHIE ................................................................................................................... V

TABLE DE JURISPRUDENCE ........................................................................................... IX

RAPPEL DES FAITS .............................................................................................................. 1

I. SUR LA RÉGULARITÉ DE LA PROCÉDURE .............................................................. 3

A. Le Règlement d’arbitrage de la CCI est applicable à la procédure ........................... 3

B. Sur les droits réservés par TROMP quant à la récusation de l’arbitre ..................... 3

1. Sur le fondement inexact et l’insuffisante justification du droit de soulever à nouveau

un défaut d’indépendance devant la CCI ........................................................................... 4

2. Sur l’éventuelle remise en cause de la sentence arbitrale .............................................. 5

II. SUR LE FOND DU LITIGE .............................................................................................. 7

A. Les Principes d’UNIDROIT et les usages du commerce sont applicables au fond du

litige ....................................................................................................................................... 7

B. La résiliation de l’Accord par TROMP est injustifiée ................................................. 8

1. La résiliation ne peut être fondée sur les retards dans le chantier de modernisation ..... 8

a) Les retards ne sont pas imputables à HYPOCRATES .............................................. 8

b) Les retards ne justifient pas la résiliation .................................................................. 9

2. La non-violation de l’obligation d’obtenir les marquages ........................................... 12

3. La non-réalisation des objectifs du business plan ne constituent pas une obligation à la

charge de HYPOCRATES ............................................................................................... 14

4. La résiliation de l’Accord ne se justifie pas par l’ensemble des prétendues fautes ..... 16

C. Les atteintes de TROMP à la relation commerciale .................................................. 16

1. L’atteinte manifeste de TROMP à son devoir de bonne foi ........................................ 16

a) L’atteinte de TROMP au principe de la force obligatoire du contrat ...................... 17

b) L’atteinte de TROMP à ses devoirs de loyauté et de coopération ........................... 17

i) L’atteinte de TROMP à son devoir de loyauté ..................................................... 18

ii) L’atteinte de TROMP à son devoir de collaboration et de coopération .............. 21

2. TROMP a violé l’obligation de négociation de bonne foi ........................................... 23

3. TROMP a violé l’obligation de respecter un préavis ................................................... 24

D. Sur la force majeure et le hardship .............................................................................. 27

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III

1. TROMP a manqué à son devoir de bonne foi qui est un préalable nécessaire à

l’invocation d’un cas de force majeure ou de hardship ................................................... 27

2. Les conditions requises pour caractériser un cas de force majeure ne sont pas réunies

.......................................................................................................................................... 28

a) La notion de force majeure est inapplicable ............................................................ 28

b) Le critère de l’irrésistibilité de l’événement n’est pas démontré ............................. 30

c) Le défaut de notification empêche TROMP de se prévaloir d’un cas de force

majeure ......................................................................................................................... 31

3. Les conditions requises pour caractériser un cas de hardship ne sont pas réunies ...... 32

a) La notion de hardship comme principe général du droit est d’interprétation très

stricte ............................................................................................................................ 32

b) Le critère primordial de l’altération fondamentale de l’équilibre des prestations fait

défaut ............................................................................................................................ 33

III. LES PRÉTENDUS PRÉJUDICES SUBIS PAR TROMP ET LES DOMMAGES DE

HYPOCRATES ...................................................................................................................... 35

A. Les préjudices non-réparables de TROMP ................................................................ 35

1. Le préjudice financier .................................................................................................. 35

2. Le préjudice moral ....................................................................................................... 36

B. Les dommages subis par HYPOCRATES .................................................................. 37

1. Sur les dommages-intérêts compensatoires ................................................................. 37

2. Sur les dommages et intérêts punitifs .......................................................................... 39

C. Sur les frais d’arbitrage ................................................................................................ 39

PAR CES MOTIFS ................................................................................................................ 40

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IV

TABLE DES ABRÉVIATIONS

APSUE Agence des Produits de Santé de l’UE

ASA Association Suisse de l’Arbitrage Bull. civ Bulletin de la Chambre civile de la Cour de cassation

Bull. CCI Bulletin de la Chambre de commerce internationale c/ Contre

CA Cour d’appel C. Cass. Cour de cassation

Cass. civ. Chambre civile de la Cour de cassation CCI/ICC Chambre de Commerce Internationale/International

Chamber of Commerce cf. Confer

Collection of CCI Arb. Awards Collection of International Chamber of Commerce Arbitral Awards

CPC Code de procédure civile CPJI Cour permanente de justice internationale

E.g. Exemplī grātia Ed. Edition

Gaz. Pal. Gazette du Palais IBA International Bar Association

ibid. Ibidem, source citée sur la même page ICSID International Centre for Settlement of Investment

Disputes JDI Journal du droit international « Clunet »

Obs. Observation Op.cit. Opere citato ; source citée dans une page précédente

Principes Principes d’UNIDROIT Rev. arb. Revue de l’arbitrage

spéc. Spécialement UE Union Éclectique

UNIDROIT Institut international pour l’unification du droit privé v. Versus

YCA Yearbook Commercial Arbitration

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V

BIBLIOGRAPHIE

Ouvrages

- AUDIT (M.), BOLLÉE (S.), CALLE (P.), Droit du commerce international et des

investissements étrangers, LGDJ, 2014

- BONELL (M.J.), International Restatement of Contract Law: The UNIDROIT

Principles of International Commercial Contracts, Transnational Publishers Inc.,U.S.

3e éd., 2009

- BOUT (R.), BRUSCHI (M.), LUBY-GAUCHER (M.), POILLOT-PÉRUZZERRO

(S.), SOLTANO (S.), Lamy Droit économique, 2016, n° 5700

- CARDUCCI (G.), Arbitration in France, OUP, 22 octobre 2015

- CERMOLACCE (A.), « Inexécution » in Regards croisés sur les principes du droit

européen des contrats et sur le droit français, PRIETO (C.), PUAM, 2003

- DEMOGUE (R.), Traité des obligations en général, t. 6, Librairie Arthur Rousseau,

1931, n° 3

- DERAINS (Y.), « Intérêts moratoires, dommages-intérêts compensatoires et

dommages punitifs devant l’arbitre international » in Études offertes à Pierre Bellet,

Litec, 1991, pp. 101-121.

- FOUCHARD (P.), GAILLARD (E.) & GOLDMAN (B), Traité de l’arbitrage

commercial international, Litec, 1996

- GÉLINAS (P-A.), « General characteristics of recoverable damages international

arbitration », in Évaluation des dommages dans l’arbitrage international, Institut du

droit des affaires international d’ICC, 28 novembre 2005, ICC Publication n° 668,

ICC Services, Publications Department, 2006.

- JAMIN (Ch.), « Plaidoyer pour le solidarisme contractuel », in Le contrat au début du

XXIe siècle, Etudes offertes à Jacques Ghestin, LGDJ, Paris 2001

- JAMIN (Ch.) et MAZEAUD (D.), (dirs.) La nouvelle crise du contrat, Dalloz, 2003

- MAZEAUD (D.), « Loyauté, solidarité, fraternité la nouvelle devise contractuelle ? »

in L’avenir du droit, Mélanges en hommage à François Terré, Dalloz, Puf et Éditions

Jurisclasseur, 1999, p. 603

- MCKENDRICK (E.), Contract Law: Texts, Cases and Materials, OUP Oxford, 2012

- MOUSSERON (J-M.), RAYNARD (J.), FABRE (R.), PIERRE (J-L.), Droit du

commerce international, droit international de l’entreprise, 4e éd., LexisNexis, 2012

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VI

- RACINE (J-B.), Droit de l’arbitrage, Puf, 2016

- TREITEL (G.H.), The law of contract, 12th ed. Sweet & Maxwell 2007, n° 20-001s.

- VINEY (G.) et JOURDAIN (P.), Les effets de la responsabilité, L.G.D.J. 2001 - WEBSTER (T.) et Buhler (Dr M.), Handbook of ICC Arbitration, Sweet & Maxwell,

2014

Articles

- BERTROU (G.), DE MARGERIE (Q.), « Obligation de révélation de l’arbitre :

tentative de synthèse après la publication des nouvelles règles de l’IBA », Cahiers de

l’arbitrage, 2015, n° 1, p. 29.

- BOUCHE (N.), FOURTOY (F.), « Cass. civ 2e, 25 mars 1999, n° 94-18976, S.A.

Société industrielle et alimentaire de Bretagne (S.I.A.B.) », Gaz. Pal. 2001, n° 261, p.

18

- CALVO (M.), « La récusation des arbitres CCI », Gaz. Pal. 2000, n° 336 pp. 30-36

- COLORADO (Y.), « Le rôle des dommages-intérêts punitifs dans la moralisation du

procès arbitral international », Journal de l'arbitrage de l'Université de Versailles n°

1, Octobre 2011

- DERAINS (Y.), « Les tendances de la jurisprudence arbitrale », JDI 1993, p. 848.

- DUBISSON (M.), « Les caractères juridiques du contrat de coopération en matière

industrielle et commerciale », DPCI, 1984, p. 10

- HACKING (D.), « Challenges: Theirs is to reason why », GAR, vol.1, Issue 6, p. 26,

2006

- HASCHER (D.), ICC Practice in relation to Appointment, Confirmation, Challenge

and Replacement of Arbitrators, ICC International Court of Arbitration Bulletin, vol.

6, n° 2, p. 4, 1995

- JARVIN (S.), « L’obligation de coopérer de bonne foi ; exemples d’application au

plan de l’arbitrage international, l’apport de la jurisprudence arbitrale » in Les dossiers

de l’Institut, CCI, publication n° 440/1, 196, p. 157

- KAHN (Ph.), « Les principes généraux du droit devant les arbitres du commerce

international », JDI 1989, pp. 313 et s.

- LE GOFFIC (C.), « Procédés de désorganisation – Débauchage de personnel », JCI

Concurrence-consommation, LexisNexis, 2016, fascicule n° 223

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VII

- LOQUIN (E.), « La réalité des usages du commerce international », Revue

internationale de droit économique, 1989, p. 163

- MARICHEZ (N.), Consultante chez Coopers & Lybrand, Le Monde, suppl. éco., 30

oct. 1996, p. II

- MERCADAL (B.), « Les caractéristiques juridiques des contrats internationaux de

coopération industrielle », DPCI 1984, t. 10 n° 3, p. 319

- ORTSCHEIDT (J.), « Les dommages et intérêts punitifs en droit de l'arbitrage

international », Les Petites Affiches, 20 novembre 2002.

- PASSA (J.), « Panorama des droits étrangers », JCI Concurrence-consommation,

LexisNexis, 2014, fasc. 50-20 - PERILLO (J.), « Force majeure and hardship under the Unidroit principles of

international commerce contract », Tulane journal of international and comparative

law, Volume 5, 1997, p. 15

- PICOD (Y), « L’exigence de la bonne foi dans l’exécution du contrat » in Colloque de

l’institut de droit des affaires d’Aix-en-Provence, 28 mai 1993, PUAM, 1993

- ROSCHER, (P.), « Conflits d’intérêts et arbitrage », Journal Spécial des Sociétés, n°

33, avril 2016, p. 8

- SWANTON (J.), « The Convergence of Tort and contract », Sydney law review, vol.

12, 1989, p. 40

- VOGEL (L.), VOGEL (J.), « Panorama de la rupture de relations commerciales

établies : un droit à reformer », Actualité juridique Contrat, novembre 2016

(http://www.editions-dalloz.fr/media/upload_doc_cms/Article6_AJContrat.pdf

consulté le 21/01/2017)

- WERNER (J.), « Punitive and exemplary damages in international arbitration », in

Évaluation des dommages dans l’arbitrage international, Institut du droit des affaires

international d’ICC, 28 novembre 2005, ICC Publication n° 668, ICC Services,

Publications Department, 2006

- http://www.fda.gov/Drugs/DrugSafety/ucm376389.htm, consulté le 02/02/2017

- http://www.ema.europa.eu/ema/index.jsp?curl=pages/medicines/human/medicines/00

0268/human_med_000662.jsp&mid=WC0b01ac058001d124, consulté le 02/02/2017

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VIII

Thèses

- ALMEIDA-PRADO (M.), Le hardship dans le droit du commerce international,

Bruylant, 2003

- CAM QUYEN (C.), Les différends liés à la rupture des contrats internationaux de

distribution dans les sentences arbitrales CCI, Litec, 2002

- CLAY (T.), L’arbitre, Dalloz, 2001, préf. Ph. Fouchard

- HOTTE (S.), La rupture du contrat international : contribution à l’étude du droit

transnational des contrats, Répertoire Defrénois, 2007, préf. J.-M Jacquet

- JALUZOT (B.), La bonne foi dans les contrats, Étude comparative de droit français,

allemand et japonais, Dalloz, 2001

- ORTSCHEIDT (J.), La réparation du dommage dans l’arbitrage commercial

international, Dalloz, 2001, préf. E. Gaillard

- OSMAN (F.), Les principes généraux de la lex mercatoria : contribution à l’étude

d’un ordre juridique national, LGDJ, 1992

- TAOK (M.), La résolution des contrats dans l’arbitrage commercial international,

LGDJ, 2009, préf. Schütz (R.-N.)

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IX

TABLE DE JURISPRUDENCE

Arrêts des juridictions françaises, internationales et étrangères

- CA Paris, 22 sept. 1982, Dalloz 1983, p. 421, obs. Y. Serra

- CA Toulouse, 25 juin 2013, Sté Realis RH c/ Sté SAS Comminges Interim, JurisData

n° 2013-015588, Contrats, conc. consom. 2013, obs. M. Malaurie-Vignal

- CA Paris, Etablissement public économique et autre c/ SARL CTI Group Inc. et

autres, 23 juin 2015, Rev. arb. 1997, p. 959

- Cass. com., 7 mai 1980, Bull. civ. 1980, IV, n° 179, Ann. propr. ind. 1980.392

- Cass. com., 9 mars 1981, Bull. civ. 1981, IV, n° 123

- Cass. com., 8 nov. 1988, Gaz. Pal. 1989

- Cass. 1re civ., 5 mars 1991, n° 89-13.831

- Cass. com., 19 nov. 1991, RJDA 1992, n° 2, p. 156

- Cass. com., 5 nov. 2002, n° 01-03.665

- Cass. 1re civ., 1 déc. 2010, Dalloz 2011, p. 24

- Cass. com., 3 juin 2003, n° 01-02.684

- Cass. com, 15 mai 2012, Bull. civ. 2012, IV, n°101, Dalloz 2012.1403

- Cass. com., 4 déc. 2012, n° 11-25964

- Cass. 1re civ., 16 janvier 2013, n° 12-15.547, Bull. civ. I, n° 4

- Cass. 1re civ., 27 février 2013, no 11-27.751

- Cass. com., 26 mars 2013, n° 09-66.852

- Cass. com., 3 mars 2015, n° 13-18.164, RDC 2015, p. 886, obs. C. Grimaldi

- CPJI, Affaire des concessions Mavrommatis en Palestine, 30 août 1924

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X

Sentences arbitrales

Sentences CCI

- Sent. CCI n° 1990 (1972), Recueil des sentences arbitrales de la CCI 1974-1985, p.

198

- Sent. CCI n° 2478 (1974), JDI 1975, p. 925, obs. Y. Derains

- Sent. CCI n° 2216 (1974), JDI 1975, p. 917, obs. Y. Derains

- Sent. CCI n° 2291 (1975)

- Sent. CCI n° 2443 (1975), JDI 1976, p. 991

- Sent. CCI n° 3093/3100 (1979), JDI 1980, p. 951, obs. Y. Derains

- Sent. CCI n° 3131 Norsolor, (1979), Rev. Arb. 1983, p.525

- Sent. CCI n° 3894 (1981), JDI 1982, p. 987

- Sent. CCI n° 4761 (1987), JDI 1987, p. 1012

- Sent. CCI 5631 (1987), inédite

- Sent. CCI n° 4972 (1989), Recueil des sentences arbitrales de la CCI, Vol. 2, p. 380,

JDI 1989, p. 1100, obs. G. A. Alvarez

- Sent. CCI n° 5904 (1989), Recueil des sentences arbitrales de la CCI, Vol. 2, p. 387,

JDI 1989, p. 1107, obs. G. A. Alvarez

- Sent. CCI n° 5953 (1989), JDI 1990, p. 1056, obs. Y. Derains

- Sent. CCI n° 5946 (1990), YCA 1991, p. 110

- Sent. CCI n° 6219 (1990), JDI 1990

- Sent. CCI n° 6268 (1990), YCA 2001, p. 119

- Sent. CCI n° 6731 (1992), inédite

- Sent. CCI n° 7006 (1992), Bulletin de la Cour internationale d'arbitrage de la CCI,

vol. 4, n° 1, p. 58

- Sent. CCI n° 7189 (1992)

- Sent. CCI n° 5030 (1992), Recueil des sentences arbitrales de la CCI 1991-1995, p.

482

- Sent. CCI n° 7146 (1994)

- Sent. CCI n° 7331 (1994), JDI 1995, p. 1002, obs. D. Hascher

- Sent. CCI n° 8365 (1996), JDI 1997, p. 1078, obs. J.-J. Arnaldez

- Sent. CCI n° 8486 (1996), JDI 1998, p. 1047, obs. Y. Derains

- Sent. CCI n° 8501 (1996), JDI 2001, p. 1164, obs. E. Jolivet

- Sent. CCI n° 8938 (1996), Collection of ICC Arbitration Awards, p. 333

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XI

- Sent. CCI n° 8606 (1997), Lebanese Review of Arab and International Arbitration,

1999, vol. 9, p. 20

- Sent. CCI n° 8817 (1997), Bulletin de la Cour internationale d’arbitrage de la CCI,

vol. 10, n° 2, 1999

- Sent. CCI n° 10274 (1999), YCA 2004, p. 94

- Sent. CCI n° 9797 (2000), Andersen Consulting Business Unit Member Firms v.

Andersen Worldwide Société cooperative et al., Bull. ASA 2000. 514, 531.1996

- Sent. CCI n° 9875 (2000), RDAI 2000, p. 1043

- Sent. CCI n° 10527 (2000), JDI 2004, p. 1263, obs. E. Jolivet

- Sent. CCI n° 10422 (2001), JDI 2003, p. 1142, obs. E. Jolivet

- Sent. CCI n° 12827 (2005), Gaz. Pal. 2009, n° 349, p. 15

- Sent. CCI n° 13295 (2005), Gaz. Pal. 2009, n° 349, p. 15

- Sent. CCI n° 13155 (2006)

- Sent. CCI n° 14861 (2008)

- Sent CCI n° 15812 (2009)

Autres sentences

- Sent. ad hoc du 6 juillet 1983, YCA 1984, p. 69

- International Court of Arbitration of the Chamber of Industry and Commerce of the

Russian Federation, sentence 18/2007 du 8 février 2008

- CIRDI, ARB/12/20, Blue Bank International & Trust v. Venezuela, 12 novembre 2013

- CNUDCI, Décision 331, Handelsgericht des Kantons Zürich, Suisse, 10 février 1999,

Recueil analytique de jurisprudence concernant la Convention des Nations Unies sur

les contrats de vente internationale de marchandises, article 25, p. 83, paragraphe 6

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1

RAPPEL DES FAITS

1. Le 15 avril 2011, la société HYPOCRATES Ltd (ci-après, « HYPOCRATES »), ayant son

siège social en Brexitonie, a conclu l’« Accord de coopération de long terme » (ci-après

l’« Accord »), un contrat portant sur la commercialisation de matériels médicaux et soumis

aux Principes d’UNIDROIT, avec la société TROMP COMPANY (ci-après « TROMP »),

siégeant à Nougayork. En effet, TROMP, spécialisée dans la conception et la production de

matériels médicaux, avait décidé d’étendre la commercialisation de ses produits à l’Union

Éclectique (« UE »), vaste zone de libre-échange. La Brexitonie, État membre de l’UE et dont

la monnaie est le Shillinge, avait été retenue comme tête de pont du réseau de vente.

2. Ce contrat, résolument tourné vers l’avenir, avait pour objectif d’instaurer une coopération

durable entre les parties. En effet, conclu pour une durée de dix ans, il était renouvelable

tacitement pour une durée identique et ne pouvait être rompu sauf dénonciation notifiée par

l’une ou l’autre des parties douze mois avant son échéance. De plus les deux parties devaient

se rapprocher au terme des cinq premières années en vue de l’extension de l’Accord à

d’autres pays de l’UE.

3. Suite à la signature de l’Accord, HYPOCRATES a effectué un investissement considérable de

75 millions de shillinges pour moderniser son site industriel situé à Donlon, capitale de la

Brexitonie, et l’adapter à l’assemblage du matériel médical. En effet, elle était tenue

d’assembler les « TROMP Devices » et de sélectionner des revendeurs dans chaque État de

l’Union, à l’exclusion de la Brexitonie où elle assurait la commercialisation elle-même.

4. En raison des difficultés exclusivement imputables à son constructeur, la modernisation du

site de production, initialement prévue pour le mois d’avril 2012, n’a pu être achevée qu’en

décembre 2012.

5. HYPOCRATES a obtenu pour quatre matériels médicaux le marquage UE nécessaire à leur

commercialisation sur le territoire de l’UE. Indépendamment de sa volonté et malgré tous les

efforts de HYPOCRATES, l’Agence des Produits de Santé (ci-après l’ « APSUE ») n’a pas

délivré lesdits marquages aux autres matériels médicaux.

6. Malgré les meilleurs efforts de ses équipes commerciales, les ventes du matériel médical ont à

peine dépassé 200 millions de dollars, dont 60 millions en Brexitonie, du 15 avril 2015 au 15

avril 2016. Ces résultats ont été décevants au regard des prévisions du business plan annexé à

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l’Accord, qui prévoyait un volume de vente annuel non garanti dans l’UE atteignant 500

millions de dollars. Aussi, HYPOCRATES n’a pas obtenu les revenus espérés de l’Accord

qui lui offraient un retour sur l’investissement réalisé.

7. Par ailleurs, en septembre 2016, un référendum organisé en Brexitonie s’est prononcé en

faveur de sa sortie de l’UE.

8. De façon totalement imprévue, TROMP a notifié le 30 septembre 2016 la résiliation de

l’Accord à HYPOCRATES. Celle-ci n’a pas eu le temps de répondre à cette notification

puisque seulement huit jours plus tard, le 7 octobre 2016, elle a reçu une copie de la

notification par laquelle TROMP a saisi la CCI d’une demande d’arbitrage.

9. Il convient de souligner qu’un communiqué de presse commun à TROMP et à la société

PROZIT A.G. (ci-après « PROZIT A.G. ») a annoncé en novembre 2016, leur rapprochement

pour la commercialisation des matériels médicaux sur le territoire de l’UE, dans le cadre d’un

partenariat à long terme. Cette nouvelle a fortement surpris HYPOCRATES, d’autant plus

que son ancien directeur commercial export, M. Lucas Iscariot, qui avait démissionné en mai

2016 en même temps que le directeur administratif et financier, M. John Cautious, a conclu le

1er juin 2016 un contrat de consultant avec PROZIT A.G., et ce malgré la clause de non-

concurrence insérée dans son contrat de travail.

10. TROMP a introduit une demande de récusation visant l’arbitre désigné par HYPOCRATES

en raison d’un supposé défaut d’indépendance et d’impartialité. L’arbitre en question avait

simplement conseillé HYPOCRATES sur le risque d’un conflit d’intérêts. La fourniture de ce

service, par ailleurs figurant sur la liste verte des règles IBA sur les conflits d’intérêt, ne

compromet aucunement l’indépendance et l’impartialité de l’arbitre, ce qu’a confirmé la Cour

d’arbitrage de la CCI qui n’a pu que rejeter la demande car non fondée.

11. HYPOCRATES demande au Tribunal arbitral de se reconnaître régulièrement constitué, puis

de rejeter la demande de résiliation de TROMP en ce que celle-ci est injustifiée, et enfin de

rejeter les dommages et intérêts demandés par TROMP et octroyer à HYPOCRATES

l’indemnisation des graves préjudices causés par les fautes de son cocontractant.

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I. SUR LA RÉGULARITÉ DE LA PROCÉDURE

12. En vertu de la clause stipulée dans l’Accord, la procédure arbitrale est régie par le Règlement

d’arbitrage de la Chambre de commerce internationale (A). Il convient par ailleurs d’affirmer

que les droits réservés par TROMP quant à la récusation de l’arbitre désigné par

HYPOCRATES sont sans pertinence (B).

A. Le Règlement d’arbitrage de la CCI est applicable à la procédure

13. L’Accord contient une disposition aux termes de laquelle la procédure arbitrale est régie par

le Règlement d’arbitrage de la CCI1. Les parties ont choisi de porter leur litige à la

connaissance d’un tribunal arbitral constitué sous l’égide de la CCI.

14. En conséquence, en vertu de la clause d’arbitrage stipulée dans l’Accord, le Règlement

d’arbitrage de la CCI est applicable à la procédure arbitrale.

B. Sur les droits réservés par TROMP quant à la récusation de l’arbitre

15. TROMP a contesté le choix de l’arbitre désigné par HYPOCRATES en alléguant un défaut

d’indépendance et d’impartialité de ce dernier. La CCI a jugé sa demande de récusation

recevable, mais l’a rejetée comme étant mal-fondée.

16. TROMP a reconnu que le rejet de la demande de récusation par la CCI est insusceptible de

recours selon l’article 11(2)2 du Règlement. Cependant, elle se réserve deux droits3. D’une

part, elle se réserve le droit de soulever à nouveau devant la CCI le défaut d’indépendance et

d’impartialité de l’arbitre en application de l’article 14(2)4 du Règlement. D’autre part, elle

1 Voir cas paragraphe 3, p. 4 : « Tous différends nés du présent contrat seront tranchés définitivement suivant le Règlement d’arbitrage de la Chambre de Commerce Internationale (CCI) par un ou plusieurs arbitres nommés conformément à ce Règlement. La langue de l’arbitrage sera le français ». 2 Article 11 (2) Règlement CCI : « Avant sa nomination ou sa confirmation, l’arbitre pressenti signe une déclaration d’acceptation, de disponibilité, d’impartialité et d’indépendance. L’arbitre pressenti fait connaître par écrit au Secrétariat les faits ou circonstances qui pourraient être de nature à mettre en cause son indépendance dans l’esprit des parties, ainsi que les circonstances qui pourraient faire naître des doutes raisonnables quant à son impartialité. Le Secrétariat communique ces informations par écrit aux parties et leur fixe un délai pour présenter leurs observations éventuelles ». 3 Voir mémoire en demande, pp. 11-12, paragraphes 26 à 29. 4 Article 14 (2) Règlement CCI : « Cette demande doit être soumise par une partie, peine de forclusion, soit dans les trente jours suivant la réception par celle-ci de la notification de la nomination ou de la confirmation de l’arbitre, soit dans les trente jours suivant la date à laquelle la partie introduisant la récusation a été informée

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menace d’éventuellement remettre en cause la sentence rendue par le Tribunal arbitral en

raison d’un défaut d’indépendance et d’impartialité.

17. HYPOCRATES conteste le fondement et la réalité du premier droit réservé par TROMP, à

savoir la possibilité de soulever à nouveau un défaut d’indépendance (1). Quant à la seconde

prétention énoncée, bien que HYPOCRATES ne conteste pas la possibilité de remettre en

cause la sentence arbitrale devant les juridictions étatiques, elle considère une telle menace

hypothétique et insuffisamment étayée (2).

1. Sur le fondement inexact et l’insuffisante justification du droit de soulever à nouveau un

défaut d’indépendance devant la CCI

18. TROMP prétend que l’article 14 (2) du Règlement lui donne le droit de soulever à nouveau un

défaut d’indépendance et d’impartialité de l’arbitre en cours d’instance. Or, cet article ne

consacre nullement un tel droit, et ne fait qu’énoncer le délai dans lequel une demande initiale

de récusation doit être introduite5. Cet article ne peut donc pas servir de fondement pour une

nouvelle demande de récusation ayant trait aux mêmes faits que ceux déjà reprochés par

TROMP dans la demande initiale rejetée.

19. Le devoir d’indépendance et d’impartialité de l’arbitre est certes continu6, mais selon la

doctrine, et en l’absence d’un tel droit consacré expressément dans le Règlement CCI, il est

uniquement possible de réintroduire une demande de récusation sur la base d’un nouveau

fait7. Cette hypothèse est très rare et TROMP n’a cité aucune sentence ni décision des

juridictions françaises attestant de la possibilité effective d’une telle démarche.

20. La possibilité pour TROMP de soulever à nouveau un défaut d’indépendance de l’arbitre

devant la CCI est d’autant plus hypothétique du fait que TROMP n’a nullement précisé sur

quel élément une nouvelle demande serait basée.

des faits et circonstances qu’elle invoque à l’appui de sa demande de récusation, si cette date est postérieure à la réception de la notification susvisée ». 5 Article 14 (2) du Règlement CCI : « Cette demande doit être soumise par une partie, à peine de forclusion, soit dans les trente jours suivant la réception par celle-ci de la notification de la nomination ou de la confirmation de l'arbitre, soit dans les trente jours suivant la date à laquelle la partie introduisant la récusation a été informée des faits et circonstances qu'elle invoque à l'appui de sa demande de récusation, si cette date est postérieure à la réception de la notification susvisée ». 6 Article 11 (4) du Règlement CCI. 7 M. Calvo, « La récusation des arbitres CCI », Gaz. Pal. 2000, n° 336, pp. 30-36.

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21. Ainsi, une nouvelle demande serait rejetée encore une fois comme étant irrecevable faute

d’allégation de nouveaux éléments susceptibles de constituer un réel fait nouveau, et mal-

fondée en raison du manque de preuve.

22. Le droit réservé par TROMP de soulever à nouveau le défaut d’indépendance et d’impartialité

en cours d’instance devant le Tribunal arbitral est en conséquence aussi mal-fondé

qu’irréaliste.

2. Sur l’éventuelle remise en cause de la sentence arbitrale

23. TROMP menace HYPOCRATES et la CCI en se réservant le droit de saisir les juridictions

étatiques afin de contester la validité de la sentence arbitrale à venir, en alléguant un défaut

d’indépendance et d’impartialité de l’arbitre.

24. Sans pour autant évoquer la nature de cet éventuel recours, qui serait selon HYPOCRATES

un recours en annulation, TROMP construit ses arguments à l’appui de sources doctrinales et

jurisprudentielles selon lesquelles les décisions d’une institution d’arbitrage sur la récusation

d’arbitre sont de simples décisions de police dépourvues de l’autorité de la chose jugée8.

HYPOCRATES ne conteste pas la possibilité en tant que telle de saisir les juridictions

françaises par application du Code de procédure civile9 afin d’obtenir l’annulation d’une

sentence arbitrale au motif d’un défaut d’indépendance d’un arbitre10, à condition que la

sentence soit rendue en France11. Néanmoins, elle estime que cette possibilité est trop

hypothétique.

25. En effet, un tel recours suppose que TROMP ne soit pas satisfaite du résultat de la sentence

arbitrale sur le fond, car elle serait prête à remettre en cause la totalité de la sentence pour

contester la régularité de constitution du Tribunal arbitral. En se réservant un tel droit,

TROMP admet d’une certaine manière la faiblesse de ses propres arguments au fond, alors

même qu’elle est à l’initiative du recours à l’arbitrage.

26. De plus, afin d’introduire un recours en annulation au motif d’un défaut d’indépendance de

l’arbitre, dont la CCI a accepté la désignation, il faudra nécessairement fournir la preuve d’un

8 Voir mémoire en demande, p. 11, paragraphe 27 9 Article 1484 Code de procédure civile, par renvoi de l’article 1506. 10 Article 1520 2° Code de procédure civile. 11 Article 1518 Code de procédure civile.

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manquement avéré de la part de l’arbitre pour que les juridictions étatiques décident de

l’existence d’un tel défaut, ce qui n’est pas caractérisé par la correspondance litigieuse. En

effet, l’arbitre en question a agi conformément aux règles IBA sur les conflits d’intérêts, qui

sont internationalement reconnues et qui ont vocation à être prises en compte par les arbitres,

comme le démontrent la jurisprudence12 et la doctrine13.

27. Plus spécifiquement, l’article 4.5.1 de la Liste Verte qui figure dans ces règles, énonce que

dans l’hypothèse où « avant sa nomination, l’arbitre a déjà été en contact avec la partie qui

l’anommé ou une affiliée […] ce contact s’étant limité à vérifier la disponibilité et les

compétences de l’arbitre pour agir comme tel » ne doit pas faire l’objet d’une révélation. La

correspondance litigieuse entre HYPOCRATES et l’arbitre qu’elle a désigné, correspondant

exactement à la situation décrite dans la Liste Verte, il est peu probable que TROMP

parviendra à apporter la preuve suffisante pour satisfaire aux exigences des juridictions

françaises relatives au défaut d’indépendance. L’intensité de la charge de la preuve est

précisément illustrée dans l’arrêt cité par la TROMP, où un arbitre qui avait déjà été désigné

deux fois par la partie demanderesse, en plus d’avoir effectué deux consultations pour elle, ne

s’est pas vu opposer un conflit d’intérêts de nature à affecter son indépendance14. En raison du

rejet du recours en annulation faute d’éléments de preuve suffisants dans une telle situation, il

est peu probable qu’une simple correspondance portant sur les conflits d’intérêts satisferait la

lourde charge de preuve d’un défaut d’indépendance qui incombe à TROMP. Il convient de

souligner que la Cour de cassation fait preuve d’une « réticence traditionnelle » quant à

l’annulation d’une sentence arbitrale15.

28. En conclusion, HYPOCRATES considère que les droits réservés par TROMP ne sont pas

suffisamment étayés dans leur justification pour pouvoir permettre l’aboutissement ni d’une

nouvelle demande de récusation devant la CCI, ni d’une contestation de la sentence arbitrale.

En outre, les prétentions de TROMP au fond ne sont pas fondées.

12 CIRDI n° ARB/12/20, Blue Bank international & trust v. Venezuela, 12 novembre 2013 : §62 : « these rules or guidelines may serve as useful references ». 13 G. Bertrou, Q. De Margerie, « Obligation de révélation de l’arbitre : tentative de synthèse après la publication des nouvelles règles de l’IBA », Cahiers de l’arbitrage, 2015, n° 1, p. 29. 14 CA Paris, Etablissement public économique et autre c/ SARL CTI Group Inc. et autres, 23 juin 2015. 15 N. Bouche et F. Fourtoy, note sous Cass. civ 2eme, 25 mars 1999, n° 94-18976, S.A. Société industrielle et alimentaire de Bretagne (S.I.A.B.), Gaz. Pal. 2001, n° 261, p. 18.

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II. SUR LE FOND DU LITIGE

29. En vertu des Principes d’UNIDROIT et des usages du commerce international applicables au

litige (A), la résiliation unilatérale par TROMP constitue une rupture brutale et abusive de

l’Accord (B). En outre, cette dernière a manifestement porté atteinte à la relation commerciale

(C). Enfin, cette rupture ne peut être fondée sur la force majeure ou le hardship (D).

A. Les Principes d’UNIDROIT et les usages du commerce sont applicables au fond du

litige

30. L’article 21 (1) du Règlement CCI prévoit que « les parties sont libres de choisir les règles de

droit que le tribunal arbitral devra appliquer au fond du litige ». En outre, l’article 21 (2)

prévoit la prise en compte par le Tribunal arbitral de « tous les usages du commerce

pertinents ».

31. En l’espèce, les parties à l’Accord ont inséré une disposition qui exprime leur volonté de le

soumettre « aux Principes généraux du droit relatifs aux contrats du commerce international,

tels qu'adoptés par UNIDROIT »16. Par ailleurs, la lex mercatoria a également vocation à être

prise en compte par le Tribunal pour trancher le litige. À ce titre, il est notamment reconnu

dans la pratique arbitrale de la CCI que les dispositions de la Convention de Vienne sur la

vente internationale de marchandises sont applicables en tant qu’usages du commerce

international17.

En vertu de ces dispositions, il est demandé au Tribunal de constater la rupture abusive de

l’Accord par TROMP.

16 Voir cas p. 4, paragraphe 3. 17 Sent. CCI n° 7331 (1994), JDI 1995.1001, obs. D. Hascher, 1002 : « Le tribunal est d’accord avec le défendeur que les principes généraux du droit du commerce international et les usages acceptés dans la pratique commerciale internationale, y compris le principe de bonne foi, devraient régir le différend. Le tribunal estime que pour le présent litige, ces principes et ces usages reconnus sont contenus de la manière la plus complète dans la Convention des Nations unies sur la vente internationale de marchandises ».

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B. La résiliation de l’Accord par TROMP est injustifiée

32. La rupture de l’Accord est clairement infondée en ce que HYPOCRATES n’a commis aucune

des fautes alléguées par TROMP. En effet, outre l’absence de manquement dans la

modernisation du site (1), l’obtention des marquages constitue une obligation de moyens qui a

été honorée par HYPOCRATES (2) et les objectifs du business plan ne constituent pas un

engagement de la part de HYPOCRATES (3). Par ailleurs, la résiliation n’est pas non plus

justifiée par ces prétendues fautes prises dans leur ensemble (4).

1. La résiliation ne peut être fondée sur les retards dans le chantier de modernisation

33. TROMP invoque une faute résultant du retard dans la livraison du site d’assemblage18. Or, il

apparaît que HYPOCRATES n’est pas responsable de cette situation (a) qui ne constitue à

l’évidence pas une inexécution justifiant la résiliation (b).

a) Les retards ne sont pas imputables à HYPOCRATES

34. La modernisation du site d’assemblage a été confiée à un constructeur, une société

indépendante de HYPOCRATES. C’est précisément elle qui était en charge de réaliser les

travaux et elle s’est donc rendue coupable de retards. HYPOCRATES n’est dès lors pas

responsable de ce problème de délais qui ne dépendait pas de sa volonté et qu’elle aurait

souhaité éviter. En effet, ce projet lui a été préjudiciable en ce qu’elle a dû engager

d’importants coûts supplémentaires.

35. Il convient en outre de souligner la diligence dont a fait preuve HYPOCRATES. En effet,

elle n’est pas restée inactive face à cette situation, mais a décidé d’intenter une action à

l’encontre du constructeur, qui est seul responsable du non-respect des délais puisque lui seul

était chargé d’effectuer les travaux.

36. Dans l’hypothèse où le Tribunal devait reconnaître une violation par HYPOCRATES de ses

engagements contractuels, celle-ci ne présenterait à l’évidence pas les caractères de nature à

justifier la résiliation unilatérale.

18 Voir mémoire en demande p. 12, paragraphe 33.

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b) Les retards ne justifient pas la résiliation

37. Tout d’abord, l’article 7.3.1 des Principes d’UNIDROIT19 dispose qu’une partie peut

valablement résilier le contrat en cas d’« inexécution essentielle » de la part de l’autre partie.

38. Il précise en outre que : « 2) Pour déterminer ce qui constitue une inexécution essentielle, on

prend, notamment, en considération les circonstances suivantes : a) l’inexécution prive

substantiellement le créancier de ce qu’il était en droit d’attendre du contrat, à moins que le

débiteur n’ait pas prévu ou n’ait pu raisonnablement prévoir ce résultat ; b) la stricte

exécution de l’obligation est de l’essence du contrat ; c) l’inexécution est intentionnelle ou

téméraire ; d) l’inexécution donne à croire au créancier qu’il ne peut plus compter dans

l’avenir sur l’exécution du contrat ; e) le débiteur subirait, en cas de résolution, une perte

excessive résultant de la préparation ou de l’exécution du contrat ».

39. Plus particulièrement, il est établi qu’« une exécution tardive ne constitue pas en soi une

contravention essentielle au contrat. Ce n’est que lorsque le moment de l’exécution revêt une

importance essentielle [...] qu’un retard en tant que tel vaut contravention essentielle »20.

40. En l’espèce, si par extraordinaire, le Tribunal reconnaissait la faute de HYPOCRATES, celle-

ci n’est certainement pas de nature à fonder la rupture du contrat par TROMP. Un retard de

huit mois dans la modernisation d’un site de production, alors que l’objet du contrat est la

distribution de matériel médical, ne constitue pas une inexécution essentielle dudit contrat.

41. En effet, aucune des circonstances à prendre en considération pour caractériser une obligation

essentielle, indiquées à l’article 7.3.1, ne sont présentes. Tout d’abord, TROMP n’a pas été

substantiellement privée de ce qu’elle était en droit d’attendre du contrat, à savoir la

commercialisation de ces matériels médicaux en UE, celle-ci a simplement été retardée de

quelques mois. Et de toute évidence, HYPOCRATES n’a pu prévoir que la société chargée

d’effectuer les travaux dans son usine ne respecterait pas les délais convenus. De plus,

l’essence même du contrat ne consiste pas en l’aménagement de son site de production par

HYPOCRATES mais en la distribution des « TROMP Devices », qui a été assurée. Tel qu’il a

déjà été explicité, le non-respect du délai n’est pas le fruit de sa volonté et il découle de la

19 Article 7.3.1 des Principes d’UNIDROIT : « 1) Une partie peut résoudre le contrat s’il y a inexécution essentielle de la part de l’autre partie ». 20 CNUDCI, Décision 331, Handelsgericht des Kantons Zürich, Suisse, 10 février 1999, Recueil analytique de jurisprudence concernant la Convention des Nations Unies sur les contrats de vente internationale de marchandises, article 25, p. 83, paragraphe 6.

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nature même du contrat que HYPOCRATES aurait tiré elle-même profit de la modernisation

rapide et sans surcoût de son usine. Par ailleurs, TROMP n’a pu penser, en raison de ce retard,

que le contrat n’allait pas être exécuté. Pour preuve, la distribution des produits, si elle a

débuté quelques mois après la date prévue, ne s’est pas interrompue par la suite pendant cinq

ans.

42. De plus, le moment de l’exécution de la livraison du site d’assemblage ne relève pas de

l’essence de l’Accord qui consiste en l’assemblage et la vente de matériels médicaux. Par

conséquent, il ne peut s’agir de contravention essentielle. Le non-respect du délai de livraison

du site n’est pas une inexécution essentielle, la résiliation est infondée en vertu de l’article

7.3.1.

43. En outre, la pratique arbitrale de la CCI exige le caractère particulièrement grave du

manquement contractuel commis pour fonder la résiliation. Le tribunal dans l’affaire CCI n°

10422 a considéré que constitue un « principe largement reconnu dans le commerce

international » celui selon lequel « un contrat à terme ne peut être résilié avant son échéance

qu’en présence de motifs graves ». Dans la même logique, dans la sentence CCI n° 836521, le

tribunal a considéré comme relevant de la lex mercatoria, le principe selon lequel « une partie

est en droit de se considérer comme déchargée de ses obligations si l’autre partie a commis

une violation du contrat mais seulement si celle-ci est substantielle ». Dans le même sens, le

tribunal arbitral dans l’affaire CCI n° 673122 indique que le manquement reproché doit

toucher à l’essence même du contrat (« root » of the contract). Dans une sentence CCI n°

979723, la limite à l’exercice du principe de la résolution unilatérale a été affirmée de façon

très claire en estimant que seul un « fundamental breach of contract » donnait au créancier le

droit de rompre la relation contractuelle24.

44. Dans une affaire n° 718925, le Tribunal arbitral, constitué sous l’égide de la CCI, a refusé de

valider la résiliation d’un contrat de distribution décidée par le distributeur américain pour

livraison tardive et défectueuse des produits par le concédant italien. Il a considéré que les

21 Sent. CCI n° 8365 (1996), JDI 1997. 1078, obs. J.-J. Arnaldez, 1079-1080. 22 Sent. CCI n° 6731 (1992), inédite. 23 Sent. CCI n° 9797 (2000), Andersen Consulting Business Unit Member Firms v. Andersen Worldwide Société cooperative et al., Bull. ASA 2000. 514, 531. 24 « It is a well established rule of law that a fundamental breach of contract gives the aggrieved party the right to terminate the contractual relationship ». 25 Sent. CCI n° 7189 (1992).

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manquements reprochés n’étaient pas de nature à créer un véritable préjudice au distributeur,

l’exécution fondamentale, normale du contrat n’ayant pas été remise en cause.

45. La condition de gravité, exigée par les arbitres CCI au titre de lex mercatoria, n’est pas

caractérisée en l’espèce. Il ne s’agit pas d’une inexécution substantielle, ni d’un manquement

touchant à l’essence même du contrat, comme démontré précédemment. En effet, ce retard est

insignifiant au regard de la durée du contrat, huit mois ne représentant pas une durée

déterminante à l’échelle d’une relation établie pour une décennie. Cette inexécution ne rend

pas impossible le maintien de l’Accord car son objet demeure réalisable. Pour preuve, le

contrat a été maintenu durant quatre longues années. Ce n’est qu’à l’issue de cette période que

TROMP a prétendu qu’il s’agissait d’une faute, ce qui dénote une mauvaise foi patente de sa

part.

46. Il convient de souligner que les Principes d’UNIDROIT et la jurisprudence arbitrale exigent

le respect d’un délai raisonnable pour se prévaloir d’un droit à la résiliation. L’article 7.3.2

prévoit que « lorsque l'offre d'exécution est tardive ou que l'exécution n'est pas conforme, le

créancier perd le droit de résoudre le contrat s'il ne fait pas parvenir à l’autre partie une

notification dans un délai raisonnable à partir du moment où il a eu, ou aurait dû avoir

connaissance de l'offre ou de la non-conformité ». Aussi, dans la sentence CCI n° 1042226,

l’arbitre estime que « le principe de bonne foi impose à une partie, qui entend résilier le

contrat à cause d'un manquement de l'autre partie, d'informer l’autre partie de son intention

de résilier dans un terme raisonnablement bref à partir du moment où il a eu connaissance du

manquement ».

47. En l’espèce, TROMP avait connaissance de ces retards depuis 2012 mais ne les a invoqués

qu’en 2016, pour résilier l’Accord. Or, quatre années sont constitutives d’un délai

déraisonnable. Aussi, en vertu de l’article 7.3.2 des Principes et du devoir de bonne foi qui lui

incombe, TROMP a perdu son droit de résilier l’Accord sur ce fondement.

48. Au vu de ces développements, le retard dans la modernisation du site d’assemblage, s’il était

constitutif d’un manquement, n’est à l’évidence pas de nature à fonder la rupture du contrat.

26 Sent. CCI n° 10422 (2001), JDI 2003, p. 1142.

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2. La non-violation de l’obligation d’obtenir les marquages

49. TROMP prétend que HYPOCRATES a violé son obligation de moyens qui consistait à

obtenir les autorisations de commercialisation des « TROMP Devices » en UE27.

50. Or, cette stipulation est indubitablement, et par essence même, une obligation de moyens

honorée par HYPOCRATES qui a consacré ses meilleurs efforts.

51. L’article 6.1.14 des Principes28 précise que la partie tenue de demander des autorisations

publiques pour l’exécution du contrat doit prendre « les mesures nécessaires pour y

parvenir ». Le commentaire de cet article précise que le débiteur de cette obligation, qualifiée

d’obligation de moyens, « n’est pas responsable du résultat de la demande »29.

52. Par ailleurs, il est clairement établi que le débiteur d’une obligation de moyens ne saurait être

tenu pour responsable si le résultat souhaité par le créancier n’est pas atteint. Sa responsabilité

ne saurait être engagée qu’en cas de faute prouvée30 et non par le fait que le cocontractant soit

déçu des résultats, s’il a fait preuve de diligence tout au long du contrat pour introduire et

maintenir le produit sur le marché concédé.

53. Il est stipulé dans l’Accord que l’obtention des marquages est une « obligation à laquelle

HYPOCRATES consacrera ses meilleurs efforts ». Ainsi, les termes du contrat indiquent très

clairement que cet engagement est une obligation de moyens. Elle consiste pour

HYPOCRATES à tout mettre en œuvre pour tenter d’atteindre le résultat escompté, autrement

dit, les marquages pour la commercialisation des « TROMP Devices ». Il n’est aucunement

question d’un engagement ferme et de l’assurance certaine d’y parvenir, engagement, qui, en

toute hypothèse, serait impossible.

54. Or aucune preuve du manque de diligence de la part de HYPOCRATES n’a été apportée par

TROMP. De toute évidence, HYPOCRATES a réellement mis en œuvre tous les moyens dont

elle disposait pour obtenir ces marquages. Il est logique que pour son propre intérêt, elle

aurait souhaité que l’Agence lui octroie ces autorisations. En effet, elle profite directement

27 Voir mémoire en demande, p. 14, paragraphe 46. 28 Article 6.1.14 des Principes d’UNIDROIT : « A moins de dispositions ou de circonstances contraires, lorsqu’une autorisation publique touchant la validité ou l’exécution du contrat est exigée par la loi d’un Etat, il revient : a) à la partie qui a seule son établissement dans cet Etat de prendre les mesures nécessaires à l’obtention d’une telle autorisation ; b) dans tout autre cas, à la partie dont l’exécution de l’obligation exige une autorisation, de prendre les mesures nécessaires ». 29 Commentaire de l’article 6.1.14 des Principes : « La partie qui est tenue de demander l’autorisation doit prendre les “mesures nécessaires” à l’obtention de celle-ci mais n’est pas responsable du résultat de la demande ». 30 R. Bout, M. Bruschi, M. Luby-Gaucher, S. Poillot-Péruzzerro, S. Soltano, Lamy Droit économique, 2016, n° 5700.

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des ventes qu’elle effectue en Brexitonie mais également des ventes opérées par les autres

revendeurs dans les autres États de l’UE.

55. Comme le rappelle TROMP31, le personnel de HYPOCRATES entretenait des relations

professionnelles et personnelles avec certains des membres de l’Agence. En dépit de ces

relations, certains des marquages n’ont pu être obtenus, ce qui témoigne de l’indépendance

dans laquelle travaille l’APSUE. Le comportement de HYPOCRATES ne pouvait donc pas

influer la décision de celle-ci concernant la délivrance des marquages.

56. TROMP prétend que « le matériel médial était aisément commercialisable dans l’Union

Éclectique »32. Il s’agit d’une pure allégation qui se trouve contredite en l’espèce par le refus

d’octroyer les marquages aux « TROMP Devices » par l’APSUE. Selon TROMP, les

matériels médicaux ont obtenu les autorisations nécessaires à leur commercialisation ailleurs

que dans l’UE. Elle estime que la non-délivrance des marquages par l’APSUE témoigne d’un

comportement déraisonnable de la part de HYPOCRATES. Or, il convient de rappeler que

chaque État ou Union d’États dispose d’une réglementation propre et de normes spécifiques.

À titre d’exemple la Food and Drug Administration, l‘Agence américaine des produits

alimentaires et médicamenteux, autorise la commercialisation du médicament Avandia aux

États-Unis33, alors que l’Agence européenne des médicaments l’interdit formellement sur le

territoire de l’Union européenne34. Il n’est donc pas surprenant que les matériels médicaux

soient autorisés à la commercialisation dans certains États et pas dans l’Union Éclectique.

57. Enfin, HYPOCRATES a obtenu les autorisations de mise sur le marché pour quatre matériels

médicaux. Elle a donc effectué des démarches auprès de l’Agence afin de les obtenir.

Tous ces éléments démontrent qu’elle a réellement fait preuve de diligence et qu’elle a honoré

son obligation de moyens d’obtenir les marquages pour les « TROMP Devices ».

Malheureusement, elle n’a pu raisonnablement prévoir que certains matériels ne recevraient

pas les marquages nécessaires à leur distribution, cette situation étant due à des circonstances

qui lui sont totalement extérieures et sur lesquelles elle n’a aucun contrôle.

58. En toute hypothèse, c’est au concepteur de ces produits, TROMP, de connaître l’étendue des

règles applicables en UE pour pouvoir les commercialiser. Ces normes sont publiques et

connues de tous ; TROMP est un professionnel, elle aurait donc dû connaitre les exigences et 31 Voir mémoire en demande, p. 16, paragraphe 55. 32 Voir mémoire en demande, p. 16, paragraphe 53. 33http://www.fda.gov/Drugs/DrugSafety/ucm376389.htm, consulté le 02/02/2017. 34http://www.ema.europa.eu/ema/index.jsp?curl=pages/medicines/human/medicines/000268/human_med_000662.jsp&mid=WC0b01ac058001d124, consulté le 02/02/2017.

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les procédures des autorités publiques, car ses produits sont commercialisés dans d’autres

États. En qualité de conceptrice des matériels médicaux, elle était la plus compétente pour

analyser les standards de l’UE et fabriquer des produits conformément à ceux-ci. Ainsi, la

non-délivrance des marquages par l’APSUE ne résulte que de la négligence de TROMP.

59. Dès lors, il convient de retenir que HYPOCRATES a respecté ses obligations contractuelles

vis-à-vis de l’obtention des marquages UE et ne s’est pas rendue coupable de manquement

justifiant la résiliation de l’Accord.

3. La non-réalisation des objectifs du business plan ne constituent pas une obligation à la

charge de HYPOCRATES

60. TROMP allègue une faute de HYPOCRATES résultant de la non-réalisation des résultats, soit

500 millions de dollars de vente du matériel médical, fixés dans le business plan annexé à

l’Accord35.

61. Or, il est clairement énoncé que cette annexe contractuelle présentait « un volume de vente

non garanti »36. Aussi, l’expression « non garanti » témoigne de l’absence d’obligation

incombant à HYPOCRATES qui n’a dès lors pas commis de manquement à cet égard.

62. Le tribunal CCI dans l’affaire n° 1042237 a en effet considéré que « la non-réalisation des

chiffres d'affaires prévus ne peut justifier la résiliation que dans la mesure où elle constitue

une infraction grave à une clause contractuelle ». Il précise en outre que « la clause, qui se

limite à dire que les parties ont convenu certains objectifs de vente, ne contient pas une

obligation pour [le distributeur] de garantir que ce résultat soit atteint [...]. Dans ces

conditions, la non-réalisation des objectifs d'achat ne constitue pas en tant que telle une

inexécution contractuelle et ne peut pas être par conséquent considérée en elle-même comme

un juste motif de résiliation anticipée ». Selon les arbitres, aucune preuve que la non-

réalisation des objectifs soit dû à des raisons imputables au distributeur plutôt qu’à des

conditions de marché n’est rapportée, ce qui rend la résiliation non motivée.

63. Dans l’affaire CCI n° 673138, le tribunal a eu à se prononcer sur la validité de la résiliation

d’un contrat de distribution décidée par le concédant à l’encontre de son distributeur qui

n’avait pas réalisé un chiffre d’affaires satisfaisant sur le marché. L’arbitre en a conclu que la 35 Voir mémoire en demande, p. 17, paragraphe 59. 36 Voir cas, p. 3, paragraphe 3. 37 Sent. CCI n° 10422 (2001), JDI 2003, 1142. 38 Sent. CCI n° 6731 (1992).

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baisse du chiffre d’affaires alléguée ne constitue pas un juste motif de rupture à l’égard du

distributeur qui ne s’est pas montré négligent.

64. Par ailleurs, les arbitres CCI retiennent comme contraire au principe de bonne foi, le fait

qu’un concédant exige de son distributeur une progression annuelle régulière en raison de son

engagement à exécuter son obligation de développer le marché en fournissant ses « best

efforts ». Aussi, dans la sentence n° 563139, le tribunal a sanctionné un concédant pour avoir

rompu prématurément, au bout de quatre ans, un contrat de matériels médicaux conclu pour

sept ans, alors que le distributeur a employé tous les moyens pour y parvenir. En constatant

que les efforts fournis par le distributeur étaient constants et qu’il n’avait commis aucune

faute particulière, il en a conclu que le concédant ne pouvait exiger une progression annuelle

extraordinaire de la couverture du marché. La rupture du contrat n’était dès lors pas justifiée.

65. En toute hypothèse, si par extraordinaire, le Tribunal retenait le caractère contraignant de ce

business plan, la non-réalisation des objectifs ne résulte pas d’une faute d’HYPOCRATES et

n’est alors pas de nature à justifier la rupture de l’Accord. En effet, TROMP ne rapporte la

preuve d’aucune négligence dans l’exécution du contrat par HYPOCRATES. Cette dernière a

exécuté l’Accord de bonne foi mais il apparaît que les prix imposés par TROMP étaient

vraisemblablement supérieurs aux prix des produits concurrents40, ce qui explique les résultats

enregistrés. En outre, si HYPOCRATES doit utiliser toutes les ressources dont elle dispose

pour tenter de parvenir à un certain niveau de performance, elle n’est pas pour autant tenue

d’atteindre ce niveau. En vertu de la pratique arbitrale, HYPOCRATES n’ayant commis

aucune faute, elle n’est pas responsable de la non-réalisation des objectifs envisagés dans le

business plan.

66. Ainsi, en suivant la logique d’un nombre très important de tribunaux arbitraux CCI, les

objectifs de vente du business plan non atteints, en supposant qu’ils puissent lier

HYPOCRATES, ce qui n’est pas le cas, ne constituent pas un juste motif de rupture car aucun

manquement n’a été commis.

39 Sent. CCI n° 5631 (1987), inédite. 40 Voir cas, p. 4, paragraphe 5.

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4. La résiliation de l’Accord ne se justifie pas par l’ensemble des prétendues fautes

67. TROMP motive sa décision de mettre fin au contrat de manière assez confuse. En effet, elle

invoque d’abord41 l’article 7.3.1 1) des Principes qui subordonne la résiliation à l’existence

d’une inexécution essentielle, sans toutefois rapporter la preuve d’une telle inexécution.

68. Il a été démontré qu’aucune des fautes alléguées n’a été commise. Dans le cas où il était

reconnu un manquement dans la modernisation du site, celui-ci ne revêtait pas le caractère

requis pour justifier la rupture comme cela a été explicité précédemment.

69. Ensuite, elle invoque « la théorie du contrat d’intérêt commun »42 sans toutefois justifier cette

qualification. Il est en réalité question d’un contrat de distribution43. De surcroit, elle se fonde

exclusivement sur la jurisprudence française44. Or celle-ci ne trouve pas à s’appliquer à titre

principal, le litige étant soumis aux Principes d’UNIDROIT.

70. TROMP tente de justifier son comportement par la gravité des prétendus manquements pris

dans leur ensemble, sans rapporter la preuve de ce caractère grave. Il convient de rappeler que

HYPOCRATES a honoré toutes les obligations qui lui incombaient en vertu de l’Accord, dès

lors, il est impossible d’invoquer un ensemble de fautes pour justifier la résiliation. Si

toutefois HYPOCRATES n’a pas manqué à ses obligations, TROMP, de par son

comportement, a porté atteinte à la relation commerciale.

C. Les atteintes de TROMP à la relation commerciale

71. Contrairement à ce qu’allègue TROMP, HYPOCRATES n’a jamais failli à son obligation de

bonne foi mais a, au contraire, fait preuve de patience à l’égard d’un cocontractant de

mauvaise foi, déloyal et non coopératif (1). De plus, TROMP n’a pas respecté son obligation

de négocier de bonne foi (2), ni celle de respecter un délai de préavis (3).

1. L’atteinte manifeste de TROMP à son devoir de bonne foi

72. TROMP a non seulement porté atteinte au principe de la force obligatoire du contrat (a), mais

également à ses devoirs de loyauté et de coopération (b).

41 Voir mémoire en demande, p. 19, paragraphe 70. 42 Voir mémoire en demande, p. 19, paragraphe 72. 43 Voir cas, paragraphe 3 : « schéma de distribution ». 44 Voir mémoire en demande, pp. 17-18, paragraphes 63-64 et p. 19, paragraphes 72-73.

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a) L’atteinte de TROMP au principe de la force obligatoire du contrat

73. L’article 1.3 des Principes d’UNIDROIT dispose que « le contrat valablement formé lie ceux

qui l’ont conclu. Les parties ne peuvent le modifier ou y mettre fin que selon ses dispositions,

d’un commun accord ou encore pour les causes énoncées dans ces Principes. »

74. Selon les commentaires de cet article, il pose un autre principe essentiel du droit des

contrats qui est celui du pacta sunt servanda. La force obligatoire du contrat présuppose

évidemment qu’un accord ait été effectivement conclu par les parties et que l’accord auquel

elles sont parvenues ne soit pas affecté par une clause d’invalidité. La modification ou la

résolution sans accord ne peuvent être admises, que lorsqu’elles sont conformes aux

dispositions du contrat ou lorsque cela est expressément prévu dans les Principes.

75. L’Accord conclu entre TROMP et HYPOCRATES était prévu pour une durée de dix ans et

devait donc se terminer en 2021. TROMP, en rompant le contrat cinq années après sa

conclusion, n’a pas respecté les dispositions de cet article, puisqu’il a décidé de manière

unilatérale de résilier le contrat, sans l’accord de HYPOCRATES.

b) L’atteinte de TROMP à ses devoirs de loyauté et de coopération

76. En outre, l’article 1.7 des Principes précise que « 1) Les parties sont tenues de se conformer

aux exigences de la bonne foi dans le commerce international. 2) Elles ne peuvent exclure

cette obligation ni en limiter la portée. »

77. Selon les commentaires de cet article, « en indiquant que chaque partie est tenue de se

conformer aux exigences de la bonne foi, le paragraphe 1 du présent article énonce

clairement que même en l’absence de dispositions particulières dans les Principes, les parties

doivent, pendant toute la durée du contrat, y compris pendant les négociations, agir de bonne

foi ».

78. De nombreuses décisions arbitrales rendues sous l’égide de la CCI ont mis en avant le

principe de la bonne foi contractuelle comme un principe primordial. Ainsi dans l’affaire

Valenciana45, la CCI a considéré que « la bonne foi doit présider à la négociation des

contrats et à leur interprétation comme à leur exécution ». De même, dans une sentence

arbitrale, la International Court of Arbitration of the Chamber of Industry and Commerce of

the Russian Federation a posé le principe selon lequel : « the arbitral tribunal is persuaded

45 Sent. CCI n° 5953 (1989), JDI, 1990, p. 1056, obs. Y. Derains.

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that the principle of good faith and fair dealing being interpreted in international economic

relations as a fundamental principle of mandatory nature (items 1.3 of the Comment on

Article 1.7 of the UNIDROIT Principles) is to be extended to cover the parties’ conduct all

the way through development of contract relations, starting from the holding of negotiations

on making a contract and ending with steps on settlement of disagreements that arose in

fulfillment of the contract, i.e. at the pre-arbitral stage »46.

79. Ainsi, TROMP était tenue à un devoir de bonne foi tout au long de la relation contractuelle

avec HYPOCRATES, or il a porté atteinte à celui-ci, puisqu’il n’a pas respecté son devoir de

loyauté et de collaboration.

i) L’atteinte de TROMP à son devoir de loyauté

80. La CCI considère qu’« appartenant au fond commun des droits nationaux, l’obligation de se

comporter loyalement dans les relations contractuelles constitue naturellement un principe

des rapports économiques nationaux »47.

81. Or, courant mai 2016, deux salariés, liés par une clause de non-concurrence et qui occupaient

des postes à haute responsabilité au sein de la société HYPOCRATES, M. Cautious et M.

Iscariot, ont démissionné de leurs fonctions. Ces départs très inattendus ont fortement

désorganisé le fonctionnement de la société puisque ces salariés étaient tous les deux

hautement qualifiés. La surprise de HYPOCRATES a été d’autant plus grande lorsqu’elle

s’est rendue compte que PROZIT A.G, revendeur agréé des matériels médicaux « TROMP

Devices » en Teutonie, avait embauché en juin 2016, M. Iscariot en qualité de consultant. Les

doutes de HYPOCRATES concernant une concurrence déloyale s’intensifièrent lorsqu’elle a

appris en novembre 2016 le rapprochement entre PROZIT A.G et TROMP en vue d’une

coopération à long terme.

82. En effet, il convient de rappeler que la pratique de débauchage massif ou stratégique

contribue à amputer son adversaire de ses atouts principaux et à acquérir sans coût excessif un

savoir-faire. Lorsqu’il s’agit de rechercher des profils très spécialisés, très pointus, difficiles à

46 Sent. 18/2007 rendue le 8 février 2008 par « International Court of Arbitration of the Chamber of Industry and Commerce of the Russian Federation », http://www.unilex.info/case.cfm?pid=1&do=case&id=1497&step= FullText. 47 Sent. CCI n° 5030 (1992), Recueil des sentences arbitrales de la CCI 1991-1995, p. 482.

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trouver sur le marché du travail, « c’est toujours vers les concurrents ou dans les entreprises

qui opèrent dans des domaines connexes que l’on s’oriente »48. Le salarié, comme le dirigeant

social, est tenu d’une obligation de fidélité envers l’employeur ou la société et ne peut leur

faire concurrence. Il ne peut être embauché, en cours de contrat, par un autre employeur.

83. Selon le droit français, l’employeur qui emploie un salarié encore lié par les liens du travail,

commet une faute constitutive de concurrence déloyale49. La responsabilité du nouvel

employeur, qui embauche un salarié lié à son précédent employeur par une clause de non-

concurrence, est engagée s'il méconnaît sciemment la clause car il est alors complice de la

violation de l'engagement de non-concurrence50. La preuve de la connaissance de la clause de

non-concurrence par l'employeur est rapportée lorsque celle-ci figure sur le certificat de

travail du salarié51.

84. A cet égard, la Cour de cassation a indiqué que « constitue un acte de concurrence déloyale le

débauchage massif du personnel d'une société, entraînant sa désorganisation »52. Tel est le

cas lorsque le cessionnaire d'un fonds de commerce réembauche dans un délai réduit trois

salariées du cédant, constituant l'intégralité de l'équipe technique du fonds cédé et ayant

régulièrement bénéficié de formation spécifique à leur domaine d’activité. En effet, le cédant

s'est trouvé ainsi privé de la totalité de son personnel en moins d'un an, et ce au profit du

cessionnaire dont l'activité concurrente s'exerçait à quelques centaines de mètres de la

sienne53. Cette jurisprudence peut trouver à s’appliquer à une relation entre un fournisseur et

un distributeur puisque ces deux types de relation contractuelle sont exposés aux effets

néfastes de la concurrence déloyale.

85. De nombreux droits nationaux sanctionnent le débauchage du personnel, en tant qu’acte de

concurrence déloyale, comme le droit chinois, le droit italien54 ou encore le droit français. En

effet, la jurisprudence française est abondante sur ce point55. Le départ d’un nombre important

48 N. Marichez, Consultante chez Coopers & Lybrand : Le Monde, suppl. éco. 30 oct. 1996, p. II. 49 Cass. com., 8 nov. 1988 : Gaz. Pal. 1989, 1, pan. jurispr. p. 7. 50 CA Toulouse, 25 juin 2013, Sté Realis RH c/ Sté SAS Comminges Interim, JurisData n° 2013-015588, Contrats, conc. consom. 2013, obs. M. Malaurie-Vignal. 51 CA Paris, 22 sept. 1982, Dalloz 1983, p. 421, obs. Y. Serra. 52 Cass. com., 5 nov. 2002, n° 01-03.665. 53 Cass. com., 3 mars 2015, n° 13-18.164, RDC 2015, p. 886, obs. C. Grimaldi. 54 J. Passa, « Panorama des droits étrangers », JCI Concurrence-consommation, LexisNexis, 2014, fasc. 50-20. 55 Cass. com., 7 mai 1980, Bull. civ. 1980, IV, n° 179, Ann. propr. ind. 1980, 392.

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de responsables56 mais aussi le débauchage massif et sélectif de personnel57 constituent des

indices pour caractériser le comportement déloyal de l’entreprise concurrente.

86. Dès lors que le débauchage porte sur des personnes influentes ou qualifiées, fussent-elles en

nombre peu important, il devient déloyal car il déstabilise l’entreprise. Ainsi a été cassé un

arrêt qui n’a pas recherché, comme il lui était demandé, « si le départ simultané de deux

salariés assurant 60% du chiffre d’affaires n’avait pas eu pour objet ou pour effet de

désorganiser la société, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision »58. Les

faits retenus peuvent en eux-mêmes être insuffisants mais leur regroupement caractérise la

déloyauté59.

87. En outre, dans l’affaire CCI n° 8817 de 199760, le demandeur contestait la résiliation avec

effet immédiat d’un contrat de distribution exclusive conclu avec le défendeur. Le défendeur

avait motivé sa décision de résiliation en se référant à la modification intervenue dans la

direction générale de la société demanderesse. D’après le demandeur, ces motifs cachaient la

concurrence déloyale, la modification en question étant le licenciement du directeur général

qui aurait créé une entreprise concurrente à celle du demandeur et avec laquelle le défendeur

aurait établi des relations commerciales faisant concurrence à celles existant entre le

demandeur et le défendeur. Le tribunal arbitral, en se fondant sur la Convention de vente

internationale de marchandises et tout en s’appuyant sur les Principes d’UNIDROIT a décidé

que la résiliation du contrat dans ces conditions était injustifiée et a accordé au demandeur des

dommages-intérêts pour le préjudice causé par la rupture du contrat ainsi que par les actes de

concurrence déloyale commis à son égard. Par cette décision, la pratique arbitrale condamne

la complicité de débauchage et la désorganisation par personne interposée.

88. HYPOCRATES estime que TROMP a été un cocontractant déloyal puisqu’il a entrepris des

manœuvres de débauchage, par personne interposée, pour la déstabiliser. En effet, John

Cautious, qui était le directeur administratif et financier de cette dernière et Lucas Iscariot, qui

était le directeur commercial export, ont démissionné tous les deux de leurs fonctions courant

mai 2016 à des dates rapprochées. M. Iscariot a, quelques jours plus tard, conclu un contrat de

consultant avec PROZIT A.G. Or, HYPOCRATES a appris en novembre 2016 par un

communiqué de presse, que peu de temps après la résiliation de l’Accord, TROMP et 56 Cass. com., 9 mars 1981, Bull. civ. 1981, IV, n° 123. 57 Cass. com., 19 nov. 1991, RJDA 1992, n° 2, p. 156. 58 Cass. com., 3 juin 2003, n° 01-02.684. 59 C. Le Goffic, « Procédés de désorganisation », JCI Concurrence-consommation, LexisNexis, 2016, fasc. 223. 60 Sent. CCI n° 8817 (1997), publiée au Bulletin de la Cour internationale de la CCI, vol. 10, n°2, 1999.

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PROZIT A.G s’étaient rapprochées afin de commercialiser les « TROMP Devices » dans le

cadre d’un partenariat à long terme. Il est donc évident que TROMP a souhaité remplacer

HYPOCRATES par PROZIT A.G dans cette relation contractuelle et a procédé à des

manœuvres de débauchage pour désorganiser HYPOCRATES puisque cela a porté sur des

personnes influentes et qualifiées. En effet, les deux salariés occupaient des postes à haute

responsabilité dans la société et M. Iscariot avait, en outre, travaillé sur l’Accord de

coopération entre HYPOCRATES et TROMP.

89. De surcroît, la désorganisation d’une société entraîne une diminution de sa compétitivité sur

un marché concurrentiel. Cette volonté de désorganisation avait pour objectif d’écarter

HYPOCRATES du marché des matériels médicaux et permettre ainsi à PROZIT A.G et

TROMP de ne pas subir le jeu de la concurrence.

90. Par ailleurs, ce salarié était connu de TROMP, puisqu’il avait travaillé sur l’Accord, et on

peut légitimement penser qu’elle avait connaissance de la présence d’une clause de non-

concurrence dans son contrat de travail. Tous ces faits regroupés prouvent la volonté de nuire

et le comportement manifestement déloyal de TROMP.

91. Il convient de souligner également que le rapprochement effectué, dès novembre 2016, entre

TROMP et PROZIT A.G, un concurrent de HYPOCRATES, en vue d’entreprendre une

coopération de long terme, alors même que la résiliation de l’Accord n’a pas été validée,

révèle un comportement déloyal.

ii) L’atteinte de TROMP à son devoir de collaboration et de coopération

92. Tout au long de la relation contractuelle, TROMP a assisté aux mauvais résultats de vente des

matériels médicaux par HYPOCRATES, sans intervenir. En effet, elle n’a promulgué aucun

conseil à cette dernière et ne l’a pas contactée pour lui venir en aide ou pallier les difficultés

qu’elle a rencontrées. TROMP a préféré résilier de façon unilatérale l’Accord et ne s’est pas

préoccupée des conséquences qu’aurait cette rupture sur HYPOCRATES.

93. Or, l’exécution de bonne foi du contrat fait également apparaître un devoir de coopération qui

implique l’obligation pour chacune des parties d’avoir à l’égard de l’autre un comportement

qui ne puisse pas lui nuire. Cette obligation se retrouve à l’article 5.1.3 des Principes qui

dispose que « les parties ont entre elles un devoir de coopération lorsque l’on peut

raisonnablement s’y attendre dans l’exécution de leurs obligations ».

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94. Comme l’affirment dans leur ouvrage, les professeurs Fouchard, Gaillard et Goldman61, « les

parties devaient être parfaitement conscientes que seule une collaboration loyale, totale, et

constante entre elles pouvait éventuellement permettre de résoudre, au-delà des difficultés

inhérentes à l’exécution de tout contrat, les nombreux problèmes résultant de l’extrême

complexité dans la formulation et l’enchevêtrement des engagements litigieux. Cette

obligation de coopération, qu’à juste titre la doctrine moderne retrouve dans la bonne foi qui

doit gouverner l’exécution de toute convention, s’impose ».

95. Le devoir de collaboration impose de prendre en compte les intérêts de l’autre partie, de les

respecter et d’agir en vue de leur développement62. En effet, Demogue avait estimé que « les

contrats forment une sorte de microcosme ; c’est une petite société où chacun doit travailler

pour un but commun qui est la somme des buts individuels poursuivis par chacun, absolument

comme dans la société civile ou commerciale. Alors, à l’opposition entre le droit du créancier

et l’intérêt du débiteur, tend à se substituer une certaine union »63. Entendu comme l’union

des cocontractants en vue d’atteindre un but commun, le solidarisme implique un certain

altruisme de l’un, qui doit prendre en considération, voire en charge, les intérêts de l’autre, lui

consentant au besoin quelques sacrifices64. Ainsi le solidarisme contractuel peut-il permettre

de « tenter de caractériser certains développements actuels et spectaculaires du droit des

contrats propres à favoriser la collaboration entre les parties »65.

96. Il est donc essentiel que les parties se concertent pour rechercher les moyens de surmonter les

difficultés auxquelles se heurte l’exécution du contrat, avant de le rompre. Un contrat n’est

pas seulement le point de rencontre entre des intérêts divergents mais doit aussi être

considéré, dans une certaine mesure, comme un projet commun auquel chaque partie doit

coopérer. Cela est évidemment lié au principe de bonne foi.

61 Ph. Fouchard, E. Gaillard, B. Goldman, Traité de l’arbitrage commercial international, Litec, 1996, n°619 p. 439 ; voir également S. Jarvin, « L’obligation de coopérer de bonne foi ; exemples d’application au plan de l’arbitrage international, l’apport de la jurisprudence arbitrale » in Les dossiers de l’Institut, CCI, publication n°440/1, 196, p. 157 ; E. Loquin, « La réalité des usages du commerce international », Revue internationale de droit économique, 1989.163 ; Y. Derains, « Les tendances de la jurisprudence arbitrale », JDI, 1993.848. 62 B. Mercadal, « Les caractéristiques juridiques des contrats internationaux de coopération industrielle », DPCI 1984, t. 10 n° 3, p. 319. 63 R. Demogue, Traité des obligations en général, t. 6, 1931, n°3. 64 D. Mazeaud, « Loyauté, solidarité, fraternité la nouvelle devise contractuelle ? » in L’avenir du droit, Mélanges en hommage à François Terré, Dalloz, Puf et Éditions Jurisclasseur, 1999, p. 603 ; Ch. Jamin et D. Mazeaud, (dirs.) La nouvelle crise du contrat, Dalloz, 2003. 65 Ch. Jamin, « Plaidoyer pour le solidarisme contractuel », in Le contrat au début du XXIe siècle, Etudes offertes à Jacques Ghestin, LGDJ, Paris 2001.

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97. En outre, l’article 7.1.566 des Principes dispose que le créancier peut accorder un délai

supplémentaire pour l’exécution de ses obligations. Or, concernant les retards dans la

modernisation du site de production, TROMP n’a accordé aucun délai supplémentaire à

HYPOCRATES. Cela démontre indubitablement l’absence de volonté de collaborer et de

coopérer de TROMP.

98. Il est donc demandé au Tribunal arbitral de constater la grave violation par TROMP de son

obligation de coopération et de bonne foi contractuelle, puisque les faits précités attestent

qu’elle ne s’est pas comportée en partenaire adhérant à la réalisation d’un projet commun

dans ses relations contractuelles avec HYPOCRATES.

2. TROMP a violé l’obligation de négociation de bonne foi

99. TROMP a notifié à HYPOCRATES le 30 septembre 2016 la résiliation avec effet immédiat

de l’Accord, en proposant l’ouverture d’une discussion pour en aménager

conventionnellement les conséquences. Mais face à cette nouvelle tant étourdissante

qu’inattendue, HYPOCRATES n’a même pas eu le temps de préparer les discussions

puisqu’elle a reçu huit jours plus tard, le 7 octobre 2016, une copie de la notification par

laquelle TROMP saisissait la Cour d'Arbitrage CCI d'une demande d'arbitrage aux fins de

validation de cette résiliation et d'indemnisation de ses préjudices.

100. Or, le principe de bonne foi s’applique également lors de la liquidation des relations

contractuelles entre les parties. En effet, il existe un principe de droit international découlant

de celui de bonne foi qui est l’obligation de mener des négociations de bonne foi, avec la

réelle intention d’aboutir à une solution à l’amiable. Selon la sentence n° 621967 rendue sous

l’égide de la CCI, « cette obligation découle en outre des principes généraux du droit du

commerce international [...]qui imposent aux parties, lorsque l’exécution du contrat se heurte

à de graves difficultés, de se concerter et de coopérer activement pour rechercher les moyens

de les surmonter ». Cette obligation est considérée comme un usage du commerce

66 Article 7.1.5 des Principes d’UNIDROIT : « 1) En cas d’inexécution, le créancier peut notifier au débiteur qu’il lui impartit un délai supplémentaire pour l’exécution de ses obligations ». 67 Sent. CCI n° 6219 (1990), JDI 1990.

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international par de nombreuses juridictions internationales mais également dans la pratique

arbitrale, notamment dans la sentence CCI n° 229168.

101. Il est évident que TROMP avait prévu une stratégie puisque aucune négociation n’a été

menée. En effet, TROMP n’a même pas attendu la réponse de HYPOCRATES, ce qui prouve

qu’elle n’avait aucune réelle volonté de négocier.

102. On remarquera d’ailleurs la mauvaise foi patente de TROMP qui a allégué que c’était « faute

d’accord sur les modalités et les conséquences de la résiliation »69 qu’elle a été contrainte

d’introduire la demande en arbitrage. Or, comme précédemment mentionné, aucune tentative

de négociation n’a été amorcée. La volonté de résilier et de remplacer HYPOCRATES dans

cette relation contractuelle était indubitablement présente depuis un certain moment, et la

saisine de la Cour relevait d’une stratégie. En effet, comment expliquer la rapidité avec

laquelle un rapprochement, officialisé, avec PROZIT A. G. se soit opéré en novembre, soit

environ un mois après l’initiation de la procédure arbitrale ?

3. TROMP a violé l’obligation de respecter un préavis

103. Outre le fait qu’elle revêt indubitablement un caractère abusif, la rupture des relations par

TROMP, est également brutale.

104. En effet, l’article 5.1.8 des Principes d’UNIDROIT dispose que : « Chacune des parties peut

résilier un contrat à durée indéterminée en notifiant un préavis d’une durée raisonnable ».

Il convient de souligner que cet article s’applique aux contrats à durée indéterminée.

Néanmoins la jurisprudence française, à titre d’exemple, estime que comme pour les contrats

à durée indéterminée, les contrats à durée déterminée lorsqu’ils sont rompus de manière

brutale et abusive, doivent faire l’objet d’un délai de préavis70. En outre, il était stipulé dans

l’Accord que le contrat était conclu pour une durée de dix ans, renouvelable tacitement pour

une durée identique, sauf dénonciation par l’une ou l’autre des parties douze mois avant son

échéance. Aussi, il est légitime de se demander pourquoi le délai de préavis qui devait

s’appliquer à l’échéance du contrat, n’avait pas lieu de s’appliquer en cas de résiliation

anticipée.

68 Sent. CCI n° 2291 (1975). 69 Voir mémoire en demande, p. 9, paragraphe 20. 70 Cass. com., 4 déc. 2012, n° 11-25964.

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105. Par ailleurs, les tribunaux arbitraux réalisent une appréciation objective du délai de préavis en

tenant compte notamment de la durée de la collaboration entre les parties, de l’importance de

leurs investissements dans cette relation et du temps nécessaire pour trouver de nouveaux

partenaires71. En effet, le caractère coopératif qui marque une relation commerciale exige que

la cessation de cette relation ne surprenne pas l’autre partie.

106. En outre, on assiste à une généralisation de cette obligation à travers les différents systèmes

juridiques, mais également dans la pratique arbitrale. En effet, dans la sentence CCI n°714672,

les arbitres avaient considéré que le préavis devait être de 21 mois pour être raisonnable suite

à la résiliation d’une relation contractuelle d’une durée de 26 ans. Le tribunal s’est fondé sur

le fait qu’une relation contractuelle se consolide avec l’écoulement du temps, rendant plus

difficile la séparation, et sur la difficulté de trouver un débouché pour des produits très

spécifiques.

107. De même, une décision arbitrale CCI73 a estimé qu’un délai de préavis de trois mois pour

résilier une relation commerciale de douze ans n’est pas considéré comme un délai suffisant et

raisonnable. Le tribunal, qui s’est fondé sur la jurisprudence française et japonaise, a estimé

qu’un délai raisonnable pour cette de relation était de 18 mois.

108. La durée du préavis est appréciée au regard de la durée totale de la relation commerciale mais

aussi du degré de dépendance économique du partenaire commercial, des difficultés

d’écoulement des stocks, des perspectives de reconversion, ou encore de la nature des

produits. La moyenne du préavis accordé est d’un mois par année d’ancienneté des

relations74.

109. En l’espèce, TROMP a envoyé une lettre le 30 septembre 2016 notifiant à HYPOCRATES la

résiliation à effet immédiat de l’Accord. Sans attendre la réponse d’HYPOCRATES, huit

jours plus tard, HYPOCRATES a reçu la copie de la notification de saisine de la Cour par

TROMP.

110. Il est évident que huit jours ne constituent pas une durée raisonnable de préavis en prenant en

considération la durée, en l’espèce cinq ans, de la relation commerciale ainsi que la difficulté

71 Voir S. Hotte, La rupture du contrat international : contribution à l’étude du droit transnational des contrats, Répertoire Defrénois, 2007, p. 231. 72 Sent. CCI n° 7146 (1994). 73 Sent. CCI n° 13155 (2006). 74 L. Vogel et J. Vogel, « Panorama de la rupture de relations commerciales établies : un droit à reformer », Actualité juridique Contrat, novembre 2016, (http://www.editions-dalloz.fr/media/upload_doc_cms/Article6_AJContrat.pdf, consulté le 21/01/2017).

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de trouver un débouché pour des produits aussi spécifiques que des matériels médicaux.

HYPOCRATES était dans une situation de dépendance économique puisque, avant la

conclusion de l’Accord, ses résultats déclinaient depuis une décennie, et ses produits n’étaient

plus parmi les plus performants du marché. La résiliation de l’Accord, effectuée de manière

brutale, l’a ainsi mise en grande difficulté car elle avait réalisé de lourds investissements afin

de moderniser son site de production et assembler les « TROMP Devices ».

111. Par ailleurs, dans l’affaire CCI n° 860675, un concédant français a été condamné à verser des

dommages-intérêts à son distributeur libanais pour avoir décidé de mettre un terme, avec un

effet immédiat, au contrat de distribution en cours. L’arbitre a pris en compte le fait que le

concédant n’avait pas, pendant près de quinze ans, formulé de grief vis-à-vis du distributeur

en ce qui concerne les manquements allégués. La résiliation a été jugée brutale dans la mesure

où le concédant était au courant de ces faits depuis au moins un an. Les manquements

rapportés ne revêtaient donc plus une acuité telle qu’ils étaient de nature à justifier une

résiliation du contrat avec effet immédiat. Le concédant aurait dû respecter un préavis avant

de rompre. Cette obligation s’imposait d’autant plus que le contrat ne contenait aucune clause

résolutoire de plein droit dans les hypothèses visées. L’arbitre a conclu que le concédant, en

voulant conférer à sa résiliation un effet immédiat, a « sciemment pris le risque d’une rupture

intempestive et brutale de ses relations contractuelles en violation des stipulations

contractuelles ». À ce titre, et malgré les fautes du distributeur, l’arbitre unique a décidé de lui

octroyer une indemnité pour une période égale au moins à six mois de préavis « non pas en

raison des motifs ayant justifié la rupture puisque celle-ci apparaît en tout état de cause

fondée mais des conditions dans lesquelles elle a été prononcée ».

112. De surcroît, la perte de l’exclusivité pour HYPOCRATES et l’absence de délai de préavis

l’ont privée de la possibilité de se réorganiser et de fournir à ses clients des produits similaires

d’un autre fournisseur.

113. Pour toutes ces raisons, il est donc demandé au Tribunal arbitral de constater les graves

violations que TROMP a commises et de voir sa responsabilité engagée, mais également de

rejeter ses arguments fondés sur la force majeure et le hardship.

75 Sent. n° 8606 (1997), Lebanese Review of Arab and International Arbitration, 1999, vol. 9, p. 20.

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D. Sur la force majeure et le hardship

114. TROMP invoque dans ses conclusions un cas de force majeure et un cas de hardship76

résultant de la sortie de la Brexitonie de l’UE pour justifier la résiliation unilatérale du contrat.

Ces arguments ne sauraient prospérer en cela qu’un cas de force majeure ou de hardship, fût-

il avéré, ne permet pas à une partie de se soustraire à ses obligations ou de résilier le contrat si

celle-ci a manqué à son devoir de bonne foi (1). En outre, la sortie de la Brexitonie de l’Union

Éclectique ne remplit ni les critères requis pour qualifier l’événement de force majeure (2), ni

ceux requis pour caractériser le cas de hardship (3).

1. TROMP a manqué à son devoir de bonne foi qui est un préalable nécessaire à l’invocation

d’un cas de force majeure ou de hardship

115. La pratique arbitrale a pu établir une obligation de comportement de bonne foi qui pèse sur

une partie qui souhaite se prévaloir d’une situation de force majeure ou de hardship. Ainsi,

concernant la notion de hardship, un tribunal arbitral sous l’égide de la CCI a pu établir, que :

« la lex mercatoria donne effet à la théorie de l'imprévision77, qui procède du principe que la

règle pacta sunt servanda trouve sa limite dans le principe supérieur de la bonne foi »78. Dès

lors, la bonne foi étant le fondement même de la théorie de l’imprévision, une partie ne saurait

invoquer un cas de hardship si son propre comportement est entaché de mauvaise foi.

116. Plus généralement, dans la sentence CCI n° 2443, le tribunal a pu établir que : « les parties

devaient être parfaitement conscientes que seule une collaboration loyale, totale et constante

entre elles pouvait éventuellement permettre de résoudre […] des difficultés liées à

l’exécution de tout contrat »79.

117. En l’espèce, le comportement de TROMP est entaché de mauvaise foi. En effet, le courrier

notifiant la résiliation unilatérale du contrat et invitant à négocier les conditions de sa rupture

76 Voir mémoire en demande, pp. 20-26, paragraphes 80-113. 77 Les expressions « théorie de l’imprévision » et « hardship » sont utilisés comme synonymes par les principes d’UNIDROIT comme le précise le commentaire n°2 sous l’article 6.2.1 : « Le phénomène du hardship a été reconnu par divers systèmes juridiques sous l’apparence d’autres concepts comme “frustration of purpose”, “Wegfall der Geschäftsgrundlage”, imprévision, “eccessiva onerosità sopravvenuta”, etc. Le terme “hardship” a été retenu dans la version française parce que largement adopté dans la pratique commerciale internationale ». 78 Sent. CCI n° 4761 (1987). 79 Sent. CCI n° 2443 (1975).

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a été reçu par HYPOCRATES le 30 septembre 2016, tandis que la copie de notification dans

laquelle TROMP envoie à la CCI une demande d’arbitrage est arrivée le 7 octobre 2016, soit

après un délai de huit jours. Ce délai ne saurait être considéré comme raisonnable, eu égard

aux sommes concernées par le contrat et à l’ampleur du lien contractuel entre les deux

sociétés (un contrat sur le long terme incluant un échange de brevet et une production

s’étalant sur une décennie, a minima). Par ailleurs, en novembre 2016, HYPOCRATES a pris

connaissance d’un communiqué de TROMP dans lequel cette dernière présentait un

partenariat de long terme concernant la commercialisation des « TROMP Devices » sur le

territoire de l’UE avec la société PROZIT A.G. La brièveté des négociations de partenariat

avec cette dernière laisse suggérer que TROMP avait depuis longtemps décidé l’interruption

des relations contractuelles avec HYPOCRATES, au point d’avoir négocié avec une autre

société un contrat dans le but de substituer celle-ci à HYPOCRATES.

118. Par conséquent, en manquant à son devoir de bonne foi, TROMP ne peut se prévaloir d’un cas

de force majeure ou de hardship. Cela étant, si le Tribunal devait ne pas reconnaître l’absence

de bonne foi dans le comportement de TROMP, une analyse des faits permet de conclure

que les conditions requises pour qualifier un événement de cas de force majeure ou de

hardship ne sont pas réunies en l’espèce.

2. Les conditions requises pour caractériser un cas de force majeure ne sont pas réunies

119. La notion de force majeure dans les principes d’UNIDROIT permet à une partie de s’exonérer

de sa responsabilité née du manquement à l’une de ses obligations. Cependant, l’article 7.3.3

invoqué par la demanderesse dans ses conclusions pour justifier la résiliation du contrat sur le

fondement de la force majeure n’est pas relatif à celle-ci et ne saurait servir de base légale à

une résiliation du contrat (a). De plus, le critère de l’irrésistibilité de l’événement, critère

principal requis pour caractériser une situation de force majeure, fait défaut (b). Enfin,

l’absence de notification préalable de TROMP empêche cette dernière de se prévaloir d’un

cas de force majeure (c).

a) La notion de force majeure est inapplicable

120. La pratique arbitrale autant que les Principes d’UNIDROIT démontrent que l’invocation d’un

cas de force majeure est un argument que le débiteur d’une obligation contractuelle peut

invoquer pour justifier l’inexécution de celle-ci et ne pas être déclaré responsable de cette

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inexécution80. En l’espèce, TROMP n’avance aucun manquement à ses obligations qu’elle

souhaiterait justifier par un cas de force majeure et elle ne se présente pas comme débitrice.

Ainsi, l’invocation d’un cas de force majeure est inadaptée à la situation.

121. Par ailleurs, TROMP invoque, pour justifier la résiliation du contrat en vertu d’un cas de force

majeure, les dispositions de l’article 7.3.3 des Principes d’UNIDROIT. Cependant l’article en

question se réfère non pas à la force majeure mais bien à l’inexécution anticipée d’une

obligation essentielle ; il ne peut donc servir de base légale à une résiliation du contrat sur le

fondement de la force majeure. HYPOCRATES s’interroge ainsi sur la pertinence d’invoquer

ces deux articles concomitamment.

122. D’une part, concernant la force majeure, l’article 7.1.7 ne permet pas la résiliation unilatérale

du contrat mais uniquement la justification du manquement à une obligation ; d’autre part,

concernant l’inexécution anticipée, le commentaire sous l’article 7.3.3 précise bien que : « il

est nécessaire qu’il soit manifeste qu’il y aura inexécution ; un soupçon, même bien fondé,

n’est pas suffisant » et en l’espèce la sortie de la Brexitonie de l’UE ne saurait être considérée

comme suffisante pour affirmer que les obligations de HYPOCRATES seront inexécutées

avec certitude. Bien au contraire, l’annonce des résultats du référendum ainsi que la

notification par le premier ministre de la sortie de l’UE ouvrent une période d’incertitude. En

effet, TROMP n’est pas en mesure de présager des traités, relatifs au commerce entre la

Brexitonie et l’Union, qui remplaceront les traités actuels. Affirmer que HYPOCRATES ne

remplira pas ses obligations avec certitude est impossible et relève du spéculatif, ce qui exclut

l’application de l’article 7.3.3.

123. Dès lors, les dispositions invoquées pour fonder la résiliation du contrat ne permettent pas

l’invocation de la force majeure. Ces erreurs de droit et d’appréciation des faits rendent

l’argument inopérant.

124. Cela étant, dans l’hypothèse où le Tribunal ne déclarerait pas la notion de force majeure non

invocable en l’espèce, il apparaît que le critère de l’irrésistibilité de l’événement fait défaut.

80 Commentaire n° 2 sous l’article 7.1.7 des Principes d’UNIDROIT : « Son but, lorsqu’il s’applique, est d’exonérer le débiteur de responsabilité de la réparation des dommages » ; e.g. sent. CCI n° 3093/3100 (1979) ; sent. CCI n° 2478 (1974).

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b) Le critère de l’irrésistibilité de l’événement n’est pas démontré

125. Pour qu’une situation soit qualifiée d’événement de force majeure, trois critères doivent être

réunis cumulativement : l’événement doit être irrésistible, extérieur à la partie qui l’invoque,

et insurmontable81.

126. Le critère de l’irrésistibilité implique que l’exécution devienne impossible, au sens strict

d’une « impossibilité absolue d’exécuter le contrat »82. Aucun autre opérateur, placé dans la

même situation, ne saurait surmonter l’événement ou ses conséquences et « rien d’autre

qu’une impossibilité totale ne suffira à avoir une exonération »83.

127. En l’espèce, TROMP ne précise pas quelle obligation non exécutée elle entend justifier en

invoquant un cas de force majeure et il apparaît qu’aucun des éléments du contrat liant les

deux sociétés ne relève d’une impossibilité absolue d’exécution. En effet, il est impossible

d’affirmer que les relations commerciales entre la Brexitonie et l’Union cesseront à la sortie

de l’Etat de l’organisation et dès lors il sera toujours possible, tant pour TROMP que pour

HYPOCRATES, de remplir leurs obligations respectives, bien qu’elles deviennent plus

onéreuses. Or comme le rappelle la jurisprudence arbitrale, on ne peut parler de force majeure

« lorsque l’événement ne rend l’exécution que simplement plus onéreuse »84.

De plus, dans la sentence CCI n° 8501, le tribunal arbitral a rejeté la qualification de force

majeure en soulignant que : « le vocabulaire employé par le défendeur montre qu’il ne

considérait pas comme impossible l’exécution de ses obligations mais simplement plus

lourdes, onéreuses ou retardées »85

128. En l’espèce, le vocabulaire employé par TROMP souligne indubitablement que la société ne

considère l’exécution du contrat que comme plus onéreuse, et non impossible, puisqu’elle

précise que : « Si avant l'évènement de force majeure, la Défenderesse ne supportait pas de

droits de douane, ces droits apparaissent à l'issue de la sortie de la Brexitonie de l'UE dans

la mesure où le transport se fera toujours entre la Brexitonie et les autres Etats de l'UE. Dès

lors, si le contrat devait perdurer, ce serait à la Défenderesse d'assumer le paiement de ces 81 Article 7.1.7 des Principes d’UNIDROIT : « un empêchement qui échappe à son contrôle et que l’on ne pouvait raisonnablement attendre de lui qu’il le prenne en considération au moment de la conclusion du contrat, qu’il le prévienne ou le surmonte ou qu’il en prévienne ou surmonte les conséquences ». 82 Sent. CCI n° 2216 (1974). 83 J. Perillo, « Force majeure and hardship under the UNIDROIT Principles of International Commercial Contracts », in Tulane journal of international and comparative law, Volume 5, 1997, p. 15. 84 Sent. CCI n° 1990 (1972). 85 Sent. CCI n° 8501 (1996).

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droits de douane »86. Cette formulation amène à conclure que TROMP elle-même n’estime

pas le contrat comme impossible à exécuter mais simplement plus onéreux, ce qui permet

d’exclure avec certitude la qualification d’événement de force majeure.

129. En outre, nonobstant ces développements sur le défaut d’irrésistibilité de l’événement,

TROMP ne saurait se prévaloir d’un cas de force majeure en raison du fait qu’elle n’a pas

notifié cette prétention à HYPOCRATES, une condition nécessaire pour se voir reconnaitre le

bénéfice d’un événement de force majeure.

c) Le défaut de notification empêche TROMP de se prévaloir d’un cas de force majeure

130. L’alinéa 3 de l’article 7.1.7 des Principes d’UNIDROIT prévoit que : « Le débiteur doit

notifier au créancier l’existence de l’empêchement et les conséquences sur son aptitude à

exécuter. Si la notification n’arrive pas à destination dans un délai raisonnable à partir du

moment où il a eu, ou aurait dû avoir, connaissance de l’empêchement, le débiteur est tenu à

des dommages-intérêts pour le préjudice résultant du défaut de réception ».

131. En l’espèce, TROMP se présentant comme un débiteur souhaitant se prévaloir d’un cas de

force majeure, les règles relatives à l’obligation de notifier trouvent à s’appliquer, et aucune

notification n’est parvenue à HYPOCRATES, TROMP s’étant contenté de notifier la

résiliation de l’accord puis d’envoyer sa demande d’arbitrage au secrétariat de la CCI. La

conséquence de ce défaut de notification est d’abord, selon la lettre de l’article 7.1.787, de

donner droit à des dommages et intérêts en faveur d’HYPOCRATES. Au demeurant, les

arbitres ont pu affirmer dans la sentence n° 10527 que la notion de force majeure, envisagée

comme usage du commerce international, ne peut pas être invoquée par une partie qui

manque à son devoir de notification88. Cette sentence a été rendue en application du droit

français, et il serait envisageable pour le Tribunal d’étendre cette solution aux Principes

d’UNIDROIT, tant cette interprétation est profitable au commerce international, domaine

dans lequel le devoir de bonne foi est un préalable primordial.

86 Voir mémoire en demande, p. 24, paragraphe 99. 87 Voir l’article 7.1.7 3) des Principes d’UNIDROIT : « Si la notification n’arrive pas à destination dans un délai raisonnable à partir du moment où il a eu, ou aurait dû avoir, connaissance de l’empêchement, le débiteur est tenu à des dommages-intérêts pour le préjudice résultant du défaut de réception ». 88 Sent. CCI n° 10527 (2000) : « afin de produire ses effets […], la force majeure doit être portée à la connaissance du créancier de l’obligation non exécutée par le débiteur de celle-ci ».

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132. Ainsi, il apparaît que le raisonnement de la demanderesse est d’abord entaché d’une erreur de

droit et d’appréciation des faits rendant l’invocation d’un cas de force majeure inopérante.

Ensuite, le défaut d’irrésistibilité de l’événement empêche de qualifier ce dernier de cas de

force majeure. Enfin, il serait profitable au commerce international que l’interprétation stricte

du devoir de notification soit retenue par le Tribunal et qu’une partie qui manquerait à cette

obligation ne puisse pas se prévaloir d’un cas de force majeure.

133. Par la suite, TROMP invoque dans ses conclusions un cas de hardship résultant du même

événement. Une allégation qui ne saurait prospérer car le critère principal requis pour

caractériser le cas de hardship, l’altération fondamentale de l’équilibre des prestations, fait

défaut.

3. Les conditions requises pour caractériser un cas de hardship ne sont pas réunies

134. HYPOCRATES s’interroge sur la pertinence d’accorder à la notion de hardship des

développements conséquents89 pour conclure in fine que : « Dès lors, la Demanderesse ne

souhaite pas se prévaloir du hardship »90. HYPOCRATES pourrait donc rester silencieuse à

cet égard.

135. Cela étant, dans l’hypothèse où le Tribunal souhaiterait envisager la sortie de la Brexitonie à

travers la notion de hardship, il convient de rappeler que cette notion est d’interprétation très

stricte et rarement admise en dehors d’une clause contractuelle spécifique, au regard de

l’impact qu’elle engendre sur le commerce international (a). Par ailleurs, la sortie de la

Brexitonie de l’UE ne pourrait se voir reconnaître cette qualification eu égard au fait que son

critère principal, l’altération fondamentale de l’équilibre des prestations91, fait défaut (b).

a) La notion de hardship comme principe général du droit est d’interprétation très stricte

136. Avant que les Principes d’UNIDROIT ne viennent consacrer la notion de hardship comme un

principe général du droit, invocable en dehors de toute stipulation contractuelle, cette

hypothèse était très peu reconnue en dehors d’une clause contractuelle spécifique, au point 89 Voir mémoire en demande, pp. 24-26, paragraphes 102-113. 90 Voir mémoire en demande, p. 26, paragraphe 113. 91Voir l’article 6.2.2 des Principes d’UNIDROIT : « Il y a hardship lorsque surviennent des événements qui altèrent fondamentalement l’équilibre des prestations ».

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que la pratique arbitrale a pu dire que : « dans l'exécution de contrats à long terme dont le

prix est fixé, il est fréquent de prévoir une renégociation dans le cas où les conditions

économiques viendraient à évoluer de telle sorte que l'équilibre du contrat initialement

conclu par les parties se trouverait bouleversé. Mais, en l'absence d'une telle clause, il est au

contraire à présumer que les parties, familières du commerce international, n'ont pas voulu

de renégociation »92.Selon cette interprétation, TROMP n’est pas en mesure d’invoquer un

cas de hardship caractérisé par la baisse de la valeur du Shillinge de 15% par rapport au

Grisbi et au Dollar. En effet, il appartient aux entreprises souhaitant se prémunir d’une

modification de la valeur d’une monnaie, d’insérer dans leur contrat une clause s’y rapportant.

En l’absence d’une telle clause, il n’est pas à présumer que les parties souhaiteraient

renégocier leur engagement à chaque modification de la valeur de la monnaie.

137. Si cette interprétation doit être nuancée au regard de l’article 6.2.2 des Principes

d’UNIDROIT, il n’en demeure pas moins vrai que l’hypothèse du cas de hardship découlant

d’un événement doit rester cantonnée aux cas les plus exceptionnels93. Cette stricte

interprétation de la notion de hardship doit prévaloir concernant la sortie de la Brexitonie de

l’Union eu égard au fait que les parties au contrat sont toutes deux familières du commerce

international94.

b) Le critère primordial de l’altération fondamentale de l’équilibre des prestations fait défaut

138. TROMP allègue que la baisse de la valeur du Shillinge de 15% par rapport au Grisbi et au

Dollar suffit à elle-seule à caractériser cette altération fondamentale, en raison de la

diminution de la valeur de la contre-prestation qu’elle entraîne. Cependant, dans la sentence

n°848695 le tribunal arbitral a fait remarquer : « qu’une baisse de prix dramatique, ainsi que

les imparités de devises ne constituent pas à elles seules des circonstances imprévisibles et

qu’elles ne justifient donc pas la résolution du contrat ». Ainsi, cette baisse de la valeur du

Shillinge ne saurait être suffisante pour caractériser un cas de hardship, ce que la lettre de

92 Sent. CCI n° 5953 (1989). 93 Voir commentaire n°2 sous l’article 6.2.2 des Principes d’UNIDROIT : « Le principe général étant qu’un changement de circonstances ne porte pas atteinte à l’obligation de remplir ses obligations, il s’ensuit que le hardship ne peut être invoqué à moins que l’altération de l’équilibre des prestations ne soit fondamentale ». 94 Voir cas p. 2, paragraphe 2 : TROMP, particulièrement, commercialise ses équipements dans « plusieurs régions du monde ». 95 Sent. CCI n° 8486 (1996).

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l’article 6.2.1 des Principes d’UNIDROIT corrobore : « Les parties sont tenues de remplir

leurs obligations, quand bien même l’exécution en serait devenue plus onéreuse »96.

139. Plus largement, le cas de hardship exige un « événement de caractère général et ayant un

impact catastrophique sur la majorité de la population et qui change fondamentalement les

conditions sociales comme la guerre, les inondations, un tremblement de terre… »97. En

l’espèce, la sortie de la Brexitonie de l’UE, ne peut pas être assimilée aux exemples

mentionnés ci-dessus car elle ne change pas fondamentalement les conditions sociales de la

majorité de la population. Ainsi l’argument invoqué d’un cas de hardship découlant de la

sortir de la Brexitonie de l’UE ne saurait prospérer.

96Voir également M. Almeida-Prado, Le hardship dans le droit du commerce international, Bruylant, 2003, p. 234, paragraphe 356. 97 Sentence ad hoc du 6 juillet 1983, YCA 1984, p. 69.

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III. LES PRÉTENDUS PRÉJUDICES SUBIS PAR TROMP ET LES DOMMAGES DE

HYPOCRATES

140. TROMP prétend avoir subi des préjudices de nature financière et morale, mais les

caractéristiques de ces préjudices n’ouvrent pas droit à réparation (A). Par ailleurs, en tant que

victime d’une rupture brutale et abusive, HYPOCRATES est en droit de demander réparation

des dommages qu’elle a subis (B).

A. Les préjudices non-réparables de TROMP

141. L'article 7.4.1 des Principes d’UNIDROIT pose le principe d’un droit à réparation, mais tous

les préjudices ne permettent pas un tel droit (1). De même, si l’existence d’un préjudice moral

est souvent associée à un préjudice financier, les arbitres restent prudents face à une telle

allocation98 (2).

1. Le préjudice financier

142. Pour être réparé, le préjudice doit revêtir certains caractères. Les articles 7.4.399 et 7.4.4100

des Principes d’UNIDROIT prévoient qu’il doit être certain et prévisible101.

143. TROMP estime avoir subi un préjudice financier qui résulte du retard dans la modernisation

du site d’assemblage, de la défaillance dans l’obtention des autorisations requises auprès de

l’APSUE et du défaut de réalisation des objectifs imposés102.

144. Or, HYPOCRATES n’est pas responsable des différents manquements soulevés par TROMP

puisqu’elle n’a commis aucune violation du contrat. De surcroît, TROMP n’a prouvé aucun

lien de causalité entre les faits qui se sont produits et les différents préjudices allégués.

98 C. Truong-Nguyen, Les différends liés à la rupture des contrats internationaux de distribution dans les sentences arbitrales CCI, Litec, 2002, pp 253-300. 99 L’article 7.4.3 des Principes d’UNIDROIT : « 1) N'est réparable que le préjudice, même futur, qui est établi avec un degré raisonnable de certitude ». 100 L’article 7.4.4 des Principes d’UNIDROIT : « Le débiteur est tenu du seul préjudice qu’il a prévu, ou qu’il aurait pu raisonnablement prévoir, au moment de la conclusion du contrat comme une conséquence probable de l’inexécution ». 101 Sent. CCI n° 3894 (1981). 102 Mémoire en demande, pp. 26-30, paragraphes 114-136.

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145. En effet, comme expliqué précédemment, le retard de huit mois dans la modernisation du site

d’assemblage ne constitue pas un manquement essentiel au contrat. HYPOCRATES ne peut

pas être responsable d’une éventuelle perte de chiffre d’affaires ou d’un gain manqué. Le prix

excessif des matériels médicaux, n’a pas séduit la clientèle de l’UE.

146. Par ailleurs, concernant l’obtention des autorisations, nécessaires pour la commercialisation

des « TROMP Devices », HYPOCRATES n’a pas commis de faute, ainsi elle ne peut voir sa

responsabilité engagée. Néanmoins, si par extraordinaire le Tribunal retenait la responsabilité

de HYPOCRATES, il convient de souligner que le préjudice subi par cette non-obtention

n’est absolument pas certain. Le caractère certain du préjudice doit pouvoir se fonder sur des

« éléments de fait solides »103.

147. Or, même avec l’obtention de tous les marquages, il n’est pas certain que les résultats de

vente du matériel médical auraient été meilleurs. Peu de revendeurs se sont intéressés aux

« TROMP Devices » dans l’UE, ce qui laisse à penser que les produits ne proposaient pas les

caractéristiques recherchées par la clientèle sur ce territoire. Ainsi, le prétendu préjudice dont

TROMP s’estime victime n’est pas établi avec certitude.

2. Le préjudice moral

148. TROMP prétend être victime d’un préjudice moral causé par HYPOCRATES104. Elle exige à

cet effet des dommages et intérêts et une publication, aux frais de HYPOCRATES, annonçant

leur rupture contractuelle.

149. Le préjudice moral dont TROMP s’estime victime n’est précisément pas certain. En effet, elle

allègue la non-obtention des autorisations et l’atteinte à son image et sa réputation suite à un

« scandale international »105 visant des actionnaires de HYPOCRATES. Or, il n’y aucun

élément probant que ce scandale ait causé un quelconque préjudice à TROMP.

150. En effet, ce « scandale » a été révélé par des articles de presse et non pas par une enquête

judiciaire, aussi ce n’est pas un fait établi juridiquement. De plus, TROMP ne démontre pas

de lien entre ces faits et une diminution de son chiffre d’affaires ou une atteinte à sa

crédibilité auprès des autres acteurs du marché. En effet, un rapprochement a été officialisé

103 Sent. CCI n° 5946 (1990). 104 Voir mémoire en demande, pp. 29 et s, paragraphes 129 et s. 105 Voir mémoire en demande, p. 30, paragraphe 133.

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postérieurement à la survenance de ces faits, en novembre 2016, entre TROMP et PROZIT

A.G. afin de réaliser une coopération de long terme. Il apparait ainsi que les différents

manquements allégués n’ont pas d’influence sur l’image et la réputation de TROMP.

151. Dès lors, il appartient au Tribunal de ne pas reconnaître ce préjudice moral.

B. Les dommages subis par HYPOCRATES

HYPOCRATES a subi des dommages matériels et moraux (1). Aussi, elle demande des

dommages et intérêts punitifs du fait du comportement déloyal de TROMP (2).

1. Sur les dommages-intérêts compensatoires

150. Le montant des dommages et intérêts accordé par les arbitres se rapproche dans la mesure du

possible des bénéfices que la partie lésée était en droit d’attendre de l’exécution du contrat106.

151. HYPOCRATES a réalisé un investissement de 75 millions de shillinges pour permettre la

modernisation de son site de production. De plus, elle pensait réaliser un retour sur son

investissement : le business plan prévoyait un objectif de 500 millions de dollars de vente

pour la cinquième année et 805 million de dollars107 à la fin du contrat.

152. Or, les résultats ont été nettement inférieurs à ceux espérés : en l’espèce, le volume de vente a

atteint 200 millions de dollars, dont 60 millions de dollars en Brexitonie, au terme des cinq

premières années. De surcroît, la rupture brutale et abusive des relations commerciales par

TROMP a, de façon indéniable, mis HYPOCRATES en grande difficulté financière. De plus,

les retards et les coûts supplémentaires engendrés par la modernisation du chantier lui ont

causé un grave préjudice de l’ordre de 15 millions de shillinges108.

153. De plus, contrairement aux allégations de TROMP, cette rupture a causé à HYPOCRATES

une perte de chance de réaliser les profits escomptés109. La consécration par la jurisprudence

arbitrale de la réparation du gain manqué (lucrum cessans) comme règle de la lex mercatoria

106 M. Taok, op. cit., p. 125. 107 Voir cas, p. 4, paragraphe 3 : « 500 millions de dollars pour la cinquième année et une progression de 10 % annuellement sur les cinq années suivantes ». 108 Voir cas, p. 4, paragraphe 4. 109 Voir Y. Derains, « Intérêts moratoires, dommages-intérêts compensatoires et dommages punitifs devant l’arbitre international » in Études offertes à Pierre Bellet, Litec, 1991, pp. 101-121.

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est aujourd’hui incontestable110. De nombreuses sentences l’affirment expressément en se

fondant sur les Principes d’UNIDROIT111.

154. HYPOCRATES demande ainsi l’attribution d’un montant de 90 millions de dollars112 en

réparation du préjudice matériel qu’elle a subi, et environ 28 millions dollars en réparation du

gain manqué113.

155. Par ailleurs, le dommage subi à l’occasion de la résiliation du contrat n’est pas limité aux

préjudices matériels. En effet, le préjudice peut être de nature morale (e.g. : l’atteinte à la

réputation ou à l’image commerciale de l’une des parties)114, ce que l'article 7.4.2 des

Principes d’UNIDROIT115 mais aussi la pratique arbitrale116 corroborent. La réparation de ce

préjudice peut revêtir différentes formes comme le versement de dommage-intérêts117 mais

aussi la publication d’une annonce118. Aussi, un tribunal arbitral statuant sur la rupture d’un

contrat de distribution dans la sentence CCI n° 4972119, a accordé au demandeur une

indemnité comprenant une somme allouée à titre de préjudice moral subi par ce dernier du fait

de la rupture brutale du contrat.

156. HYPOCRATES a subi un préjudice moral puisqu’elle vendait et assurait l’assemblage des

« TROMP Devices » depuis 2011, ce qui a indéniablement participé à l’associer à ces produits

dans l’esprit des consommateurs. HYPOCRATES demande à ce que lui soient alloués des

dommages et intérêts en réparation du préjudice moral subi du fait du comportement de

TROMP, soit un montant de 2 millions de dollars.

110 Ph. Fouchard, E. Gaillard, B. Goldman, op. cit., p. 845, n° 1492. 111 Sent. CCI n° 9875 (2000), RDAI, 2000, p. 1043. 112 75 000 000 + 15 000 000 = 90 000 000. 113 805 255 000 x 3,5 % (moyenne de la valeur des commissions perçues par HYPOCRATES) = 28 183 935. 114 J. Ortscheidt, La réparation du dommage dans l’arbitrage commercial international, Dalloz, 2001, p. 39. 115 Article 7.4.2 2) des Principes d’UNIDROIT : « Le préjudice peut être non pécuniaire et résulter, notamment, de la souffrance physique ou morale ». 116 Sent. CCI n° 3131 (Norsolor), (1979), Rev. Arb. 1983 117 Cass. 1re civ. 27 février 2013, n° 11-27.751 ; Cass. 1re civ., 16 janvier 2013, n° 12-15.547, Bull. Civ. I, n° 4 ; Cass. com., 26 mars 2013, n° 09-66.852 ; Cass. 1 re civ., 5 mars 1991, n° 89-13.831. 118 Cass. com., 15 mai 2012, Bull. Civ 2012. IV, n°101 ; Dalloz 2012, 1403. 119 Sent. CCI n° 4972 (1989), Recueil des sentences arbitrales de la CCI, Vol. 2, p. 380 ; JDI 1989, p. 1100, obs. G. A. Alvarez.

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2. Sur les dommages et intérêts punitifs

157. L'objectif des dommages et intérêts punitifs est de moraliser le comportement des opérateurs

du commerce international lors de l'exécution du contrat. Cette forme de réparation est de plus

en plus acceptée par un grand nombre de droits nationaux120. Les arbitres disposent d’une plus

grande souplesse, ils peuvent notamment ajuster le montant des dommages et intérêts punitifs

en fonction de la gravité de la faute, mais ils peuvent aussi prendre en compte le

comportement des parties. Ce type de sanction est plus efficace et plus dissuasif121. Il convient

de souligner que les principaux instruments internationaux122 ne prohibent pas les dommages

et intérêts punitifs.

158. HYPOCRATES demande ainsi le versement de 3 millions de dollars de dommages et intérêts

punitifs afin de sanctionner la mauvaise foi et les manœuvres déloyales de TROMP.

C. Sur les frais d’arbitrage

159. L'article 37 (4) du Règlement d'arbitrage CCI prévoit que le tribunal a le pouvoir

discrétionnaire de répartir les frais d'arbitrage entre les parties. En outre, il peut prendre en

compte le comportement des parties pendant la procédure mais aussi lors de l’exécution du

contrat123.

160. Au vu du comportement de TROMP dont la mauvaise foi a été démontrée à plusieurs reprises,

il est demandé au Tribunal de lui faire supporter la totalité des frais de l'arbitrage.

120 Cass. 1er civ., 1 décembre 2010, Dalloz 2011, p. 24 ; G. Viney et P. Jourdain, Les effets de la responsabilité, LGDJ, 2001, note 38, spéc. n°5, p.6 ; J.Ortscheidt, « Les dommages et intérêts punitifs en droit de l’arbitrage international », Les Petites Affiches, 20 novembre 2001, n°232, pp. 17 et s. 121 Y. Colorado, « Le rôle des dommages-intérêts punitifs dans la moralisation du procès arbitral international », Journal de l'arbitrage de l'Université de Versailles, n° 1, Octobre 2011. 122 La Convention de Vienne pour la vente internationale de marchandises ; les Principes d’UNIDROIT relatifs aux contrats de commerce international et les Principes du droit européen des contrats. 123Sent. CCI n° 12827 (2005), Gaz. Pal. 2009, n° 349, p. 15 ; Sent. CCI n° 13295 (2005), Gaz. Pal. 2009, n° 349, p. 15.

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PAR CES MOTIFS

Vu le Règlement d’arbitrage de la CCI

PLAISE AU TRIBUNAL DE DIRE ET JUGER

Sur la régularité de la procédure :

- De se reconnaître régulièrement constitué

Sur le fond :

- De CONSTATER que la résiliation de l’Accord par TROMP est une rupture brutale et

abusive

- De CONSTATER que HYPOCRATES n’a pas violé ses obligations contractuelles

- De CONDAMNER TROMP au versement de 90 000 000 dollars de dommages et intérêts

au titre du préjudice matériel subi par HYPOCRATES

- De CONDAMNER TROMP au versement de 28 183 925 dollars de dommages et intérêts

au titre du gain manqué subi par HYPOCRATES

- De CONDAMNER TROMP au versement de 2 000 000 dollars de dommages et intérêts

au titre du préjudice moral subi par HYPOCRATES

- De CONDAMNER TROMP au versement de 3 000 000 dollars de dommages et intérêts

punitifs à HYPOCRATES

- De CONDAMNER TROMP à supporter l’ensemble des frais d’arbitrage y compris les

honoraires des arbitres