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D OSSIER LES PHOBIES 2 SANTÉ MENTALE | 151 | OCTOBRE 2010 Jérôme PALAZZOLO Psychiatre libéral (Nice). P rofe sseur au Département Santé de l’Université Internationale Senghor, Opérateur direct de la Francophonie (Alexandrie, Égypte), Chargé de cours à l’Université de Nice-Sophia Antipolis, Chercheur associé au Laboratoire d’Anthropologie et de Sociologie : « Mémoire, Identité et Cognition sociale » (LASMIC), Nice. Si la phobie se définit comme une peur irrationnelle d’un objet, d’une activité ou d’une situation, peur qui amène la personne à éviter la problé- matique anxiogène à tout prix, nous ajou- terons que cette peur irrationnelle inter- fère dans la vie quotidienne de l’individu. Prenons un exemple : Jean-Pierre a la pho- bie du vide (autrement appelée « ver- tige » dans le langage courant). Cela ne lui pose aucun souci dans sa vie per- sonnelle et/ou professionnelle (Jean-Pierre est comptable), si ce n’est qu’il évite de monter aux échelles et habite au rez-de- chaussée. Jean-Pierre ne consultera jamais pour sa phobie. Mais sa démarche serait- elle la même s’il était professeur d’es- calade ? Comme je l’explique régulière- ment à mes patients, « une phobie nécessite d’être prise en charge à part i r du moment où elle vous pourrit la vie ! ». La phobie se manifeste par une anxiété, et souvent une panique disproportion- Plus on prend en charge précocement les phobies meilleur est leur pronostic. L’option pharmacologique reste complémentaire d’une thérapie bien conduite. Traitement pharmacologique des phobies née par rapport à l’objet, l’activité ou la situation qui la causent. La gestion indi- viduelle d’une phobie consiste à apprendre au patient à identifier, non seulement les facteurs anxiogènes auxquels il est c o n f ronté, mais aussi les réponses déve- loppées face à ces facteurs. Le but de la prise en charge est de remplacer les réponses habituelles de l’individu par d’autres plus efficaces (d’ord re physio- logiques, cognitives et comportemen- tales) car réductrices d’angoisse. Plu- sieurs méthodes peuvent alors être proposées, notamment la relaxation et les thérapies cognitivo-comportemen- tales. Dans bon nombre de cas, un trai- tement médicamenteux est prescrit en asso- ciation. Nous allons ici brosser un état des lieux des principales molécules uti- lisées dans l’approche pharmacologique des phobies. L’ARSENAL THÉRAPEUTIQUE • Les benzodiazépines La fonction du cerveau repose sur un équilibre fragile entre signaux d’excita- tion et d’inhibition. Le principal neuro- médiateur inhibiteur est le GABA (acide gamma-amino-butyrique), dont l’action est essentiellement assurée par les récep- teurs de type A (GABA-A). Ces récep- teurs constituent en quelque sorte un sys- tème de freinage du cerveau. Les benzodiazépines sont un groupe de médicaments fréquemment utilisés dans le traitement des troubles anxieux. Ces médicaments se fixent sélectivement sur les récepteurs GABA-A au niveau d’un site de liaison qui leur est propre et renfor- cent ainsi l’action inhibitrice du GABA. Ils jouent donc un rôle facilitateur pour l’action d’inhibition. Ils ne peuvent pas activer eux-mêmes le frein, c’est-à-dire le récepteur GABA-A, mais lorsque les cel- lules nerveuses activent l’inhibition par le GABA, ce freinage est re n f o rcé en pré- sence des benzodiazépines. Ces dernières agissent sur presque tous les récepteurs GABA-A du cerveau et ont de nombreuses autres actions en plus de leur portée anxiolytique : effet sédatif, myorelaxant, anticonvulsivant, amnésiant (entraînant une amnésie essentiellement antéro- grade). Elles entravent par ailleurs la coordination motrice et potentialisent sérieusement l’action sédative de l’al- cool. L’action des benzodiazépines est rapide. Si leur principal effet indésirable est la somnolence, ces molécules peuvent également provoquer une dépendance. Les personnes consommant des benzo- diazépines peuvent constater une réap- parition de leurs symptômes anxieux à l’ar- rêt du médicament (avec parfois même un effet rebond, c’est-à-dire que l’anxiété est encore plus intense) et épro u v e r un s y n d rome de sevrage (avec tremble- ments, voire crise d’épilepsie). Ces pro- blèmes peuvent être réduits si le méde- cin explique bien à son patient qu’il s’agit là d’un traitement ponctuel, qui ne devra pas excéder douze semaines, et SM151_Palazollo2.qxp 5/10/10 11:33 Page 2

D OSSIER LES PHOBIES Traitement pharmacologique des phobies€¦ · que comme médicaments de seconde ou de troisième intention (après les Inhibi-teurs de la Recapture Spécifique

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D OSSIER LES PHOBIES

2 SANTÉ MENTALE | 151 | OCTOBRE 2010

Jérôme PALAZZOLO

Psychiatre libéral (Nice). P ro fe sseur

au Départ e m e nt Santé de l’Université Internationale

S e n g h o r, Opérateur direct de la Fra n cophonie

( A l exa n d r i e, Égypte), Chargé de cours à l’Université

de Nice -Sophia Ant i p o l i s, Chercheur associé au

La b o ra t o i re d’A nt h ropologie et de Sociologie :

« M é m o i re, Identité et Cognition so c i a l e » (LASMIC), Nice.

Si la phobie se définit comme

une peur irrationnelle d’un objet, d’une

activité ou d’une situation, peur qui

amène la personne à éviter la pro b l é-

matique anxiogène à tout prix, nous ajou-

t e rons que cette peur irrationnelle inter-

f è re dans la vie quotidienne de l’individu.

P renons un exemple : Jean-Pierre a la pho-

bie du vide (autrement appelée « v e r-

t i g e » dans le langage courant). Cela ne

lui pose aucun souci dans sa vie per-

sonnelle et/ou professionnelle (Jean-Pierre

est comptable), si ce n’est qu’il évite de

monter aux échelles et habite au re z - d e -

chaussée. Jean-Pierre ne consultera jamais

pour sa phobie. Mais sa démarche serait-

elle la même s’il était professeur d’es-

c a l a d e ? Comme je l’explique régulière-

ment à mes patients, « une phobie

nécessite d’être prise en charge à part i r

du moment où elle vous pourrit la vie ! » .

La phobie se manifeste par une anxiété,

et souvent une panique dispro p o rt i o n-

Plus on prend en charge précocement les phobies meilleur est leur pronostic. L’optionpharmacologique reste complémentaire d’une thérapie bien conduite.

Traitementpharmacologiquedes phobies

née par rapport à l’objet, l’activité ou la

situation qui la causent. La gestion indi-

viduelle d’une phobie consiste à appre n d re

au patient à identifier, non seulement

les facteurs anxiogènes auxquels il est

c o n f ronté, mais aussi les réponses déve-

loppées face à ces facteurs. Le but de la

prise en charge est de remplacer les

réponses habituelles de l’individu par

d ’ a u t res plus efficaces (d’ord re physio-

logiques, cognitives et comport e m e n-

tales) car réductrices d’angoisse. Plu-

sieurs méthodes peuvent alors être

p roposées, notamment la relaxation et

les thérapies cognitivo-comport e m e n-

tales. Dans bon nombre de cas, un trai-

tement médicamenteux est prescrit en asso-

ciation. Nous allons ici brosser un état

des lieux des principales molécules uti-

lisées dans l’approche pharm a c o l o g i q u e

des phobies.

L’ARSENAL THÉRAPEUTIQUE• Les benzodiazépines La fonction du cerveau repose sur un

é q u i l i b re fragile entre signaux d’excita-

tion et d’inhibition. Le principal neuro-

médiateur inhibiteur est le GABA (acide

gamma-amino-butyrique), dont l’action

est essentiellement assurée par les récep-

teurs de type A (GABA-A). Ces récep-

teurs constituent en quelque sorte un s y s-

tème de freinage du cerv e a u .

Les benzodiazépines sont un groupe de

médicaments fréquemment utilisés dans

le traitement des troubles anxieux. Ces

médicaments se fixent sélectivement sur

les récepteurs GABA-A au niveau d’un site

de liaison qui leur est pro p re et re n f o r-

cent ainsi l’action inhibitrice du GABA.

Ils jouent donc un rôle facilitateur pour

l’action d’inhibition. Ils ne peuvent pas

activer eux-mêmes le frein, c’est-à-dire

le récepteur GABA-A, mais lorsque les cel-

lules nerveuses activent l’inhibition par

le GABA, ce freinage est re n f o rcé en pré-

sence des benzodiazépines. Ces dern i è re s

agissent sur presque tous les récepteurs

GABA-A du cerveau et ont de nombre u s e s

a u t res actions en plus de leur port é e

a n x i o l y t i q u e : effet sédatif, myore l a x a n t ,

anticonvulsivant, amnésiant (entraînant

une amnésie essentiellement antéro-

grade). Elles entravent par ailleurs la

c o o rdination motrice et potentialisent

sérieusement l’action sédative de l’al-

cool. L’action des benzodiazépines est

rapide. Si leur principal effet indésirable

est la somnolence, ces molécules peuvent

également provoquer une dépendance.

Les personnes consommant des benzo-

diazépines peuvent constater une réap-

parition de leurs symptômes anxieux à l’ar-

rêt du médicament (avec parfois même

un effet rebond, c’est-à-dire que l’anxiété

est encore plus intense) et épro u v e r

u n s y n d rome de sevrage (avec tre m b l e-

ments, voire crise d’épilepsie). Ces pro-

blèmes peuvent être réduits si le méde-

cin explique bien à son patient qu’il

s’agit là d’un traitement ponctuel, qui

ne devra pas excéder douze semaines, et

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dont il faudra envisager l’arrêt pro g re s-

sif le plus rapidement possible. Tout ceci

explique que les benzodiazépines, contrai-

rement à leur étiquette d’« a n x i o l y t i q u e s » ,

ne sont recommandées à l’heure actuelle

que comme médicaments de seconde ou

de troisième intention (après les Inhibi-

teurs de la Recapture Spécifique de la Séro-

tonine – IRSS –, les Inhibiteurs de la

R e c a p t u re de la Sérotonine et de la Nora-

drénaline – IRSNa –, l’hydroxyzine, voire

c e rtains neuroleptiques sédatifs pre s c r i t s

à faible dose) et principalement en tant

qu’adjuvants dans le traitement de l’anxiété.

Si cette dern i è re est durable, on préfé-

rera une benzodiazépine à demi-vie longue

(> 24 h e u res) et si elle est d’intensité et

de durée variables on pourra choisir une

molécule à demi-vie courte (< 8 h e u re s )

ou interm é d i a i re. Les crises d’anxiété

aiguë (survenant par exemple si le sujet

est confronté à l’élément ou à la situa-

tion phobique) peuvent justifier une ben-

zodiazépine par voie injectable.

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• L’hydroxyzine (Atarax©)Indiquée dans le traitement de l’anxiété,

l ’ h y d roxyzine agit sur les récepteurs his-

t a m i n e rgiques H1 (ce qui entraîne une

c e rtaine sédation), mais également sur les

récepteurs séro t o n i n e rgiques 5HT2C

(récepteurs impliqués dans les phéno-

mènes de satiété, ce qui peut être à l’ori-

gine d’une prise de poids non négli-

geable). Parfois utilisée en prémédication

sédative (anesthésie, examens paracli-

niques anxiogènes), l’hydroxyzine est éga-

lement prescrite en allergologie dans le

traitement des rhinites spasmodiques,

de l’urt i c a i re ou de la conjonctivite. C’est

un dérivé de la pipérazine non appare n t é

chimiquement aux phénothiazines. Bien

souvent préférée aux benzodiazépines en

raison de l’absence de dépendance et

de tolérance, elle n’a pas d’effet dépre s-

seur cortical mais inhibe l’activité de

c e rtaines régions subcorticales. Ainsi,

sur le plan clinique, elle est à l’origine

d’un apaisement émotionnel et d’une

l é g è re sédation bien utiles en cas d’anxiété

patente lorsque la personne est amenée

à aff ronter l’objet de sa phobie.

• La buspirone (Buspar©)La buspirone est principalement indi-

quée dans le traitement de l’anxiété géné-

ralisée. Elle est parfois utilisée dans le

traitement des phobies mais son eff e t

est à relativiser en raison d’un effet anxio-

lytique modéré et long à atteindre (2 à

4 semaines). Elle ne provoque quasi-

ment pas de sédation, pas d’atteinte de

la mémoire ou de l’équilibre, ne poten-

tialise pas les effets de l’alcool. Il n’y a

pas d’accoutumance et le traitement peut

ê t re interrompu sans provoquer de symp-

tômes de sevrage. Ce médicament est

généralement bien toléré.

• L’étifoxine (Stresam©)L’etifoxine est indiquée dans les mani-

festations somatiques de l’anxiété, prin-

cipalement pour tout ce qui concerne la

s p h è re card i o v a s c u l a i re (tachycard i e ) .

Cette molécule n’entraîne ni dépendance,

ni accoutumance, ni effet rebond. L’ e ff e t

re c h e rché est une action régulatrice neu-

rovégétative intéressante dans la phobie.

• Les carbamates Le chef de file de cette famille chimique

est le méprobamate (Equanil©), utilisé

depuis 1955. Les carbamates ont tro i s

p ropriétés principales : anxiolytiques,

sédatifs et myore l a x a n t s .

Le méprobamate est prescrit en cas

d’anxiété, mais il peut également être

utilisé en prémédication sédative (anes-

thésie, examens paracliniques anxio-

gènes) et dans le cadre de contracture s

d o u l o u reuses réflexes. Son action s’eff e c t u e

par une inhibition sous-corticale au niveau

de la formation réticulée et du thalamus.

C’est donc un anxiolytique par diminu-

tion de l’excitabilité du système lim-

bique. Il peut entraîner des dépendances,

et à fortes doses il est hépato-toxique.

• Les IRS et les IRSNA Les antidépresseurs inhibiteurs de la

re c a p a t u re de la sérotonine (IRS) (Dero x a t © ,

P rozac©, Séroplex©...) et les antidé-

p resseurs inhibiteurs de la re c a p a t u re

de la sérotonine et de noradrénaline

(IRSNA) (Effexor©, Cymbalta©...) ont

un délai d’action plus long que celui des

benzodiazépines, ils n’agissent qu’au

bout de 15 jours à 3 semaines. En

revanche, leur efficacité dure plus long-

temps que celle des benzodiazépines qui

s ’ a rrête après un ou deux mois. Ces médi-

caments sont aujourd’hui le traitement de

choix des troubles anxieux et donc des

phobies, car ils sont en général bien tolé-

rés (les effets indésirables les plus cou-

rants sont des nausées légères qui ont ten-

dance à s’atténuer en moins d’une

semaine). Ils n’entraînent ni dépendance,

ni accoutumance et ne sont pas sédatifs.

Il faut les considérer comme un traitement

de fond de la phobie.

• Les antidépresseurs tricycliques Bien que ces médicaments aient été

d ’ a b o rd utilisés pour le traitement de

d é p ression, certains d’entre eux sont eff i-

caces dans le traitement des attaques

de panique pouvant survenir lorsque le

sujet se re t rouve face à une situation

p a rt i c u l i è rement anxiogène (Laro x y l © ,

S u rmontil©...). Les antidépresseurs tri-

cycliques ont besoin généralement de

deux à trois semaines pour faire leur

e ffet. Malheureusement, ils comport e n t

de nombreux effets secondaires, ce qui

explique qu’ils sont de moins en moins

p rescrits aujourd’hui. Leurs principaux

e ffets indésirables sont une prise de

poids, une somnolence, une séchere s s e

de la bouche, des vertiges, des tre m b l e-

ments et une atteinte des fonctions

s e x u e l l e s .

• Les bêta-bloquants Les bêta-bloquants sont principalement

utilisés pour réduire certains symptômes

physiques de l’anxiété liée à la phobie,

comme la tachycardie, la transpiration et

les tremblements, et pour contrôler l’anxiété

dans des situations de stress social. Ils

sont souvent prescrits chez des individus

atteints de phobie sociale. Les bêta-blo-

quants réduisent la tension artérielle et

ralentissent les pulsations card i a q u e s .

• Autres D ’ a u t res médicaments, tels les antipsy-

chotiques ou les neuroleptiques sédatifs

(à faibles doses) sont parfois utilisés

dans le traitement de l’anxiété sévère, mais

on ne dispose pas de données suff i s a n t e s

quant à leur efficacité, notamment à

l o n g t e rme. Ces molécules présentent en

o u t re un risque élevé d’effets indési-

rables tels que sédation, dyskinésies

aiguës et akathisie. Ils représentent cepen-

dant une alternative intéressante dans l e

traitement des phobies graves et résistantes

(cf. tableau ci-contre).

P R ÉCAUTIONS D’UTILISATION Avant de pre s c r i re un traitement anxioly-

tique, il faut s’assurer de certaines précautions,

en fonction de l’âge et du terr a i n :

– la prescription de benzodiazépines est

courante chez le sujet âgé, ce qui repré-

sente un réel souci sur le plan cognitif et/ou

moteur (risque de chute, et de fracture du

col du fémur). Il est important de garder

Réfé re n ces médicales opposables (RMO) des anxiolyt i q u e s ( 1 9 97 )

– Il n’y a pas lieu dans le traitement de l’anxiété d’associer deux anxiolytiques.– Il n’y a pas lieu de prescrire des anxiolytiques sans tenir compte des durées de prescriptionmaximales réglementaires (incluant la période de sevrage) : 12 semaines pour lesbenzodiazépines.– Il n’y a pas lieu de prescrire un anxiolytique sans débuter par la posologie la plus faible, sansrechercher la posologie minimale efficace pour chaque patient, ni de dépasser les posologiesmaximales recommandées.– Il n’y a pas lieu de reconduire systématiquement et sans réévaluation une prescriptiond’anxiolytiques.

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PRINCIPAUX ANXIOLYTIQUES COMMERCIALISÉS EN FRANCE

Demi-vie Délai d’apparition du pic Délai d’apparition de l’état d’équilibreplasmatique (administration orale)

BENZODIAZÉPINIQUES

Loflazépate (Victan®) 10 et 40 mg 77 heures 2 heures –

Prazépam (Lysanxia®) 10 et 40 mg 65 heures 4 – 6 heures –

Nordazépam (Nordaz®) 7,5 – 15 mg 55 heures 1 heure 30 5 jours

Clorazépate (Tranxène®) 5 –10 – 50 mg 40 heures 1 heure –

Diazépam (Valium®) 2 – 5 –10 mg 32 heures 30 minutes à 1 heure 30 5 jours à la dose de 10 mg/jour

Bromazépam (Lexomil®) 6 mg 20 heures 2 – 4 heures 3 4 jours

Clobazam (Urbanyl®) 5 – 10 – 20 mg 20 heures 2 heures 4 à 5 jours après administration répétée

Alprazolam (Xanax®) 0,25 – 0,50 mg 12 – 15 heures 20 minutes –

Lorazépam (Témesta®) 1 – 2,5 mg 12 heures 2 – 4 heures –

Oxazépam (Séresta®) 10 – 50 mg 8 heures 1 – 4 heures –

Clotiazépam (Vératran®) 5 – 10 mg 4 heures 30 à 90 minutes 3e jour à raison de 2 prises de 10 mg/jour

NON BENZODIAZÉPINIQUES

Méprobamate (Equanil®) 200 – 400 mg 6 – 16 heures 1 – 3 heures –

Buspirone (Buspar®) 10 mg 10 heures 1 – 1 heure 30 2 jours

Hydroxyzine (Atarax®) 25 – 100 mg 19 – 39 heures 2 heures 30

Etifoxine (Stresam®) 50 mg 20 heures 4 heures

LES ANTIDÉPRESSEURS DISPONIBLES ACTUELLEMENT ( d ’a p rès Vidal, 201 0 )

Effet Famille chimique Nom commercial Dénomination commune internationale (DCI)

IMAO (Inhibiteurs Marsilid© Iproniazide

Stimulantde la Mono-Amine-Oxydase) Moclamine© Moclobémide

Tricycliques Tofranil© Imipramine

Autres Vivalan© Viloxazine

Tricycliques Anafranil© ClomipramineProthiaden© Dosulépine

Sérotoninergiques Deroxat© ParoxétineDivarius© Paroxétine mésilateFloxyfral© FluvoxamineProzac© Fluoxétine

Intermédiaire Séroplex© EscitalopramSéropram© CitalopramZoloft© Sertraline

Sérotoninergiques Ixel© Milnacipranet noradrénergiques Effexor© Venlafaxine

Cymbalta© Duloxétine

Autres Stablon© TianeptineValdoxan© Agomélatine

Tricycliques Elavil© AmitriptylineLaroxyl© AmitriptylineQuitaxon© DoxépineSurmontil© Trimipramine

Sédatif Défanyl© Amoxapine

Tétracycliques Athymil© MiansérineLudiomil© MaprotilineNorset© Mirtazapine

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D OSSIER LES PHOBIES

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à l’esprit que si une telle prescription est

n é c e s s a i re, les posologies doivent être

réduites de moitié et les substances à

demi-vie courte préférées (ainsi, le Te m e s t a © ,

le Seresta© ou le Xanax© seront privilé-

giés, le Tranxène©, le Lexomil©, le Ly s a n x i a ©

ou le Valium© seront évités) ;

– chez l’enfant, il n’y a pas vraiment de

consensus concernant la prescription d’un

traitement anxiolytique. Les effets secon-

d a i res sont d’ailleurs plus fréquents, qu’il

s’agisse d’un rebond d’anxiété ou d’une séda-

tion handicapante, ce qui est probléma-

tique au niveau de l’apprentissage sco-

laire. Peu d’études ont été réalisées chez

l’enfant, mais la plupart des auteurs s’ac-

c o rdent à dire qu’une prescription pré-

coce d’anxiolytique est un facteur favori-

sant un comportement addictif ultérieur.

La médication anxiolytique, quelle que soit

sa forme (en sachant que les benzodia-

zépines sont ici à éviter en priorité), doit

donc être réservée aux formes les plus résis-

tantes de l’anxiété liée à la phobie ;

– dans le cadre d’une personnalité addic-

t i v e, lorsqu’on re t rouve des antécédents

de consommation de toxiques, il s’agit

de rester vigilant. Si les benzodiazé-

pines peuvent être utilisées par cert a i n s

toxicomanes de manière désadaptée,

consommées alors en fortes quantités,

elles agissent en synergie avec la métha-

done et les opiacés. Les conséquences

cognitives délétères et l’impact négatif

sur la vigilance sont ici majeurs, et le

risque de passage à l’acte (auto et hétéro -

a g ressif) est majoré (effet désinhibiteur

non négligeable) ;

– concernant la femme enceinte, il est

préconisé d’arrêter tout anxiolytique lors

de la grossesse. Mais ce n’est pas tou-

jours évident, un nombre non négligeable

de femmes enceintes bénéficiant de ce

type de médication dans les mois pré-

cédant leur grossesse. Aucun risque mal-

f o rmatif n’a été mis en évidence pour les

benzodiazépines, mais une prise régulière

au cours de la grossesse peut être à l’ori-

gine d’un syndrome de sevrage chez le

nouveau-né (hyperexcitabilité, troubles du

sommeil, voire crises comitiales) ;

– en cas de surd o s a g e, il est rare que le p ro-

nostic vital soit en jeu lorsque l’anxio-

lytique n’est pas associé à d’autres sub-

stances. L’util isation d’un pro d u i t

a n t i d o t e comme le flumazenil

( A n e x a t e © ) a m é l i o re rapidement l’état

de conscience.

POUR CONCLURELa phobie, quand elle devient trop impor-

tante, peut entraver la vie quotidienne.

Il faut alors proposer un traitement médi-

camenteux adapté. De plus, l’anxiété

contribue dans certains cas à faire le lit

d’une dépression. Un argument supplé-

m e n t a i re pour la traiter. L’anxiété, nous

la connaissons tous, elle est d’ailleurs

n é c e s s a i re et peut être bénéfique en

nous permettant d’augmenter notre vigi-

lance et de réagir de façon adaptée à

c e rtains événements. En revanche, quand

elle devient une gêne réelle dans la vie

quotidienne, elle peut être néfaste : les

personnes atteintes de ce trouble ont

dans bien des cas des difficultés d’insert i o n

sociale ou professionnelle et une ten-

dance à s’isoler. C’est alors un réel motif

de prise en charge. Dans tous les cas, une

seule directive doit être re s p e c t é e : plus

on prend en charge précocement et

meilleur est le pronostic. L’option phar-

macologique, qui doit être réfléchie et dis-

cutée avec le patient, reste de toute

m a n i è re complémentaire d’une thérapie

bien conduite.

Ré s u m é : La prise en charge d’une phobie consiste avant tout à permettre au patient d’identifier non seulement les facteurs anxiogènes auxquelsil est co nf ro nt é, mais aussi les ré p o n ses qu’il développe fa ce à ces fa c t e u r s. L’objectif est de re m p l a cer les ré p o n ses habituelles de l’individu par d’a u t res ré p o n se sphysiologiques, cognitives et comportementales plus adaptées.Lorsqu’une médication associée est nécessaire, mieux vaut réfléchir à deux fois avant de prescrire une classique benzodiazépine, cette classe pharmacolo-gique pouvant être à l’origine d’effets secondaires problématiques. Des alternatives pharmacologiques existent…

M o t s- c l é s : Phobies – Prise en charge – Thérapeutique médica m e nt e u se – Benzo d i a zépine – Inhibiteur spécifique de la re ca p-t u re de la sé rotonine – Ant i d é p re sseur tricyclique – Méprobamate bêt a - b l o q u a nt .

Re commandations et réfé re n ce pour la pre sc r i ption d’un tra i t e m e nt ant i d é p re sse u rDiffusées par l’Agence Française de Sécurité Sanitaire des Produits de Santé (2006) elles sedéclinent comme suit (nous ne retiendrons ici que les recommandations pouvant s’appliqueraux troubles anxieux et aux phobies) :– un traitement antidépresseur ne doit pas être changé pour cause d’inefficacité avant unedurée de prescription de deux à trois semaines à posologie dite efficace (sauf en casd’aggravation) ;– un traitement antidépresseur doit être interrompu progressivement afin de prévenir toutrisque de syndrome d’arrêt brutal ;– chez le sujet de plus de 70 ans, la posologie initiale recommandée pour la plupart desantidépresseurs est en moyenne de la moitié de celle préconisée chez l’adulte. La posologiedevra être réévaluée régulièrement au cours du traitement.• www.afssaps.fr

B I B L I O G RA P H I E

– André C, Muzo, Petites angoisses et grosses

phobies. Seuil, Paris, 2002.

– Palazzolo J. Dépression et anxiété – Mieux les

comprendre pour mieux les prendre en charge.

Masson, Collection Abrégés de Médecine, Paris,

2007.

– Palazzolo J. Cas cliniques en thérapies

c o m p o rtementales et cognitives. 2e édition. Masson,

Collection Pratiques en Psychothérapie, Paris, 2006.

– Servant D. Gestion du stress et de l’anxiété.

Concepts médicaux et psychologiques, diagnostic,

prise en charge et traitements. Masson,

Paris, 2007.

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