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L 1 : S DRUIDES ET LES DIEUX CELTIQUES A FORME D'ANIMAUX PAR H. D'ARBOIS DE JUBAIN VILLE MEMBRE DE E'iNSnïJ T PROFESSEUR AU COLLEGE DE FRANCE 485701 PARIS LIBRAIRIE HONORÉ CHAMPION, ÉDITEUR 9, QUAI VOLTAIRE, 9 1906

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  • L 1 : S

    DRUIDESET

    LES DIEUX CELTIQUESA FORME D'ANIMAUX

    PAR

    H. D'ARBOIS DE JUBAINVILLEMEMBRE DE E'iNSnJ T

    PROFESSEUR AU COLLEGE DE FRANCE

    485701

    PARISLIBRAIRIE HONOR CHAMPION, DITEUR

    9, QUAI VOLTAIRE, 9

    1906

  • Les ouvrages les i^lus rcents de M. d'Arhois di-:JuBAiNViLLE sont ceux dont les titres suivent; lalibrairie Honor Cliampion pourra les fournir :

    Essai d'un catalogue de la liltralure pique derIrlande, un volume in-S*^^ ]888.Les premiers habitants de l'Europe, d'aprs les cri-

    vains (Je l'antiquit et les travaux des linguistes, 2'' di-tion, deux volumes in-8, 1889-1894.

    Uecherches sur Voric/ine de la propriit foncire eldes noms de lieux habits en France (priode celtiqueet priode romaine), un volume in-8, publi avec lacollaboration de G. Dottin, 1890.

    Les noms gaulois chez Csar et llirtius^De hello gai-lico, un volume in-!2, publi avec la collaboration deMM. E. Ernault et G. Dottin, 1891.Deux manires d'crire l'histoire, critique de

    Bossuet, d'Augustin Thierrg etde Eustel de Coulanges.un volume in-12, 1806.Etude sur la langue des Francs l'poque mrovin-

    gienne, un volume in-12, 1900.Elments de la grammaire celtique, dclinaison,

    conjugaison, un volume in-12, 1903.Les Celles depuis les temps les plus anciens jusquen

    Van 1 00 avant noire re, un volume in-12, 1904.La famille celtique, un volume in-12, 1905.Cours de lit leva tare celtique, publi avec des collabo-

    rateurs (le principal est M. J. Loth, doyen de la Facultdes Lettres de Rennes) : douze volumes in-8", 1883-1902.La Revue Celtique, fonde par M. H. Gaidoz en 1870

    et dont les six premiers v^olumes (1870-1885) ont parusous sa direction, a t depuis (1886-1905) dirige parM. d'Arbois de Jul)ain ville, et la dernire livraison duvingt-sixime volume est sous presse.

  • MAON, PROTAT FK1;H1:S, TMPRIMIUR?

  • AVKirnSSKMKXT

    /.// premire purlie de ce volume et le com-mencemenl de la seconde sont le texte deleons faites p/ir Fauteur pendant le deuximesemestre de Fanne scolaire 1904-1905.

    De la premire partie^ Les Druides, unepremire rdaction, depuis dveloppe, a trdige par lui sur le lit o la maladie leretenait. L'Altcellischer Sprachschatz de M. A.

    Ilolder a t le prcieux instrument qui arendu le tr/irail possible dans cette incom-

    mode situation '.

    Le besoin de repos qui s impose un conva-

    lescent a empch de composer un inde.v qui

    1. Je suis aussi le dbiteur de M. l-^inault (jui je doisun dtail iiu[)()rlanl, le rapprochenieiil ciilic ifii/ii,t/ /-os cl

  • V[ii avertissj:mk.m'

    mirait d tre plac la fin du volume et dontl'auteur regrette vivement Vabsence.

    Les doctrines qu'on trouvera exposes dans

    les pages qui suivent sont sur nombre de pointsdiffrentes de celles qu'on admet gnralement.Elles sont fondes sur des textes cits en note.Le dsir de les soumettre Vexamen ds ru-

    dits et en gnral de tous ceux qui s int-

    ressent notre histoire est la cause qui a dcid

    l'auteur faille immdiatement la prsentepublication, peut-tre sans l'avoir suffisam-

    ment mrie et sans se proccuper des critiquesdont elle pourra tre, soit justement, soit tort, l'objet et la victime.

    Paris, le J 5 septembre }9(),'y.

  • PREMIERE PARTIE

    LES DRUIDES

    Chapitre I

    Les Druides compars aux Gutuatriet aux Uafis.

    Les Gaulois ont eu deux principales catgoriesde prtres: les Druides, Druides = dru-uidesu trs savants \ donttoutle monde a entenduparler, et les Gutuatri, qui sont bien moinsconnus. Nous ne disons rien en ce momentdes Lts, c'est--dire des devins de profession,qu'en Irlande saint Patrice n'a pas considrscomme prtres, et qui ont subsist officielle-ment dans cette le pendant le moyen ge, aumilieu de la population christianise, en faceet avec la protection du clerg chrtien.Quand, au premier sicle avant J.-C, Jules

    Csar fit la conqute de la partie de la Gaule

    1. Sur Ttymologie du mot druide, par M. Thurneysen,voir Iloldor, Allceltischer Sprachschatz, t. I, col. 1321, et

    ci-dessous p. 11, 8o.

    Les Druides. 1

  • LES DRUIDES, LES GLTUATRI

    reste jusque-l indpendante du joug romain,les Druides occupaient dans cette contreune situation considrable, sur laquelle lefutur dictateur s'estconsidrablement tendu ^,mais on disait alors que la corporation druidiquetait originaire de Grande-Bretagne

    ,et que

    c'tait de Grande-Bretagne qu'elle avait timporte dans la Gaule septentrionale, centraleet occidentale, GalliQ comata. C'est Jules Csarqui nous l'apprend ^.

    Avant l'tablissement des Druides sur lecontinent, les Gaulois n'avaient point, ct desUfits, d'autres prtres que les Guluatri^ ainsidsigns par un driv du tbme celtiquegutil- ^ en irlandais gutji voix ^.

    1. De hello gallico, livre VI, c. 13 et suivants.2. Disciplina in Britannia reperta atque in Galliam

    translata esse existimatur. De bello gallico, 1, VI, c. 13,

    12. Une opinion diffrente est professe par MM. J. Rhyset David Brenmor-Jones, The welsh People, p. 83, maissans donner aucune preuve.

    3. Holder, Altceltischer Sprachschatz , t. I, col. 2046.Whitley Stokes, Urkeltischer Sprachschatz

    ,p. 115.

    E. Windisch, Irische Texte, t. I, p. 605.Le suffixe -^ro- s'emploie ordinairement au neutre et sert

    former des noms d'instruments (Brugmann, Grundriss,t. II, p. 112-113). Mais il y a des exceptions, tels sont engrec oaitpo (( celui qui partage , la-rpo (( celui qui gurit,

    le mdecin , Holder, Altceltischer Sprachschatz, t. II,col. 1962; sont comparer: le nom d'homme irlandais

  • Leur nom signifiait les parleurs , les

    orateurs , c'est--dire ceux qui adressent laparole aux dieux, ceux qui invoquent les dieux.Ce nom peut tre considr comme le pendant(lu nom germanique de la divinit, god enanglais, gott en allemand, tenant lieu d'unprimitif indo-europen * ghutni^ signifiant

  • 4 LES GUl^JATRI

    g8in\ois*(/utuatros et avec l'orthographe latinegutuater^ auquel Hirtius donne Faccusatif gii-tuatrum et l'ablatif gutuatro i, taient chacunprtre d'un temple ou d^un bois sacr. Telsavaient t probablement les prtres du temple,antisLites templi

    ^chez les i?oi d'Italie, en 216

    avant J.-C, quand du crne d'un gnralromain vaincu, ils avaient fait un vase boire".

    Ily avait des Gi//wa/r en Gaule dansla priodede l'indpendance. Jules Csar, l'ami du druideDviciacos^ condamna mort et ft excuter ungutiiatros ou, comme crivaient les Romains,un gutiiater du pays char train -^

    Les Gutaatri subsistrent en Gaule sousl'empire romain. Une inscription romaine deMcon parle d'un Gaulois romanis nommSalpicius qui avait t la* fois attach au cultede l'empereur, comme l'atteste son titre deflamen Augusti, et au culte d'une divinitlocale, ainsi qu'il rsulte de son titre degutuater Martis 4, c'est--dire prtre d'une

    1. De hello gallico, 1. VIII, c. 38, 3, 5.2. Tite-Live, 1. XXIII, c. 24, 12.3. De hello gallico, 1. VIII, c. 38.4. Holder, Altceltischer Sprachschatz, t. I, col. 2046. Dans

    la mme inscription, Sulpicius est dit fils an du dieuMoltinos, au gnitif primogeniti dei Moltini.

  • LES GUTLATllI D

    des nombreuses divinits celtiques assimiles Mars sous la domination romaine ^ . Deuxinscriptions romaines d'Autun contiennent desddicaces au dieu gaulois A/iti/ilos ou Anualloschacune mane d'un (jutuater ; ces deuxprtres sont appels Tun Gains Secundius VitalisAppa, l'autre NorbaneiusThallus; A/)/)asembletre le nom gaulois du premier, Norbaneius lenom gaulois du second -. Un quatrime cjuta,-ter est mentionn par une inscription duPuy-en-Velay ^ Plus tard, chez Ausone, l'ex-pression Beleni aedituus ^ semble tre unetraduction latine du gaulois Beleni giituatros.

    Le gutuater ou mieux gutuatros de Gauleparat avoir eu la mme fonction que le Upsjhomrique, par exemple : Ghryss, prtre dutemple d'Apollon ^ Ghrysa, ville de Troade ^.

    Dars, prtre du dieu grec Hphaistos qui

    1. Ilolder, Altceltischer Sprachschatz, t. I, col. 444, 445.

    2. Espraiidieu , Revue pigraphique , livraison d'oc-tobre, novembre, dcembre 1902, p. 132, 133, n'^'* 1367,1368, pi. IX, X. Revue celtique^ t. XXII, p. 148. Norbaneiusest driv de Norba, nom d'homme dans une inscriptiond'Autun, Corpus inscriptionum latinarum, XIII, 2747 ;Ilolder, t. II, col. 760.

    3. Ilolder, t. I, col. 2046.

    4. Ausone, Professores^ XI, 24, dition Sclienkl, p. 64.

    5. Xpuir,? 'aux' itpz'jq IxaTrjPoXou 'A;:oXX(ovo;. Iliade, I, 370.

    6. Iliade, I, 37, 451.

  • LES GL'TUATRl

    fut plus lard assimil au dieu romain Uolcanus \Laogonos, prtre du temple lev Zeus^le Jupiter romain, sur le mont Ida '^. Au dbutde Vlliade^ Ghryss, comme les Gutuatri^adresse la parole son dieu. C'est une prire -^

    son dieuTexauce et contraint les Grecs rendre Ghryss la fdle qu'ils lui avaient enleve.'Apr^TYp, surnom ^^ Ghryss dans VIliade, I, il,veut dire celui qui prie ; ce mot a le mmesens que le gaulois gutaatros.

    Les Guluatri gaulois avaient Rome leurquivalent ; c'taient les flamines^ au singulierflamen^ chargs chacun du culte d'un dieu, parexemple le flamen dialis, prtre de Jupiter.hesflaminesne formaient pas une corporation^.De mme probablement les Gutuatri.

    Les Druides au contraire sont une corpo-ration \ mme, si l'on nous permet cette

    tps'JS'HaicJTOio. [Iliade, V, 9, 10).2. Aadyovov paauv, utv 'Ovr]TOpo;, o; At; ps;

    'loa-ou Ittuxto... [Iliade, XVI, 60i, 605).3. Iliade, I, 37-42.

    4. Marquardt, Roemische Staatsverwaltung, t. III, 2" di-tion, p. 326.

    5. Sodaliciis adstricti consorliis, Timagne, cit parAmmien Marcellin, 1. XV, c. 9, 8.

  • I.i;s DIUIDES, LKS l ATIS i

    expression, une sorte de congrgation religieuse.Si on comparait aux curs ou aux pasteursprotestants les Gutiialri, sorte de clerg sculier,sans paroisses il est vrai, on pourrait trouver(|ue les Druides avaient avec les Jsuites unecertaine analogie. Les Druides n'avaient pascomme les Jsuites un gnral, mais ils taientsubordonns comme eux des provinciaux, unen Gaule ', un en Irlande ', probablementaussi un en Grande-Bretagne. Ils avaientchacun pour mission d'abord le culte de tousles dieux \ puis l'tude et l'enseignement de lamythologie et de toutes les sciences. Enfinsachant le pass, ils prtendaient connatreaussi l'avenir '*.

    Les Druides, ce point de vue, avaient desconcurrents, les Utis, appels o-jx-^iq par Stra-bon% ;j-avT'.;, u devins par Diodore de Sicile**,

    1. Dobollo gallico, 1. VI, col. 13, 8.2. Voir plus bas, chapitre XII.3. Rbus diviiiis intersunt. De bello gallico, I. VI,

    c. 13, 4.4. Cicron, De divinatione, I, 41, 90; ci-dessous, p. 58.o. OyaTc'.; 0 Upo-otol xal jJiooyo. Strabon, 1. IV, c. 4,

    4; dition Didot, p. 164, 1. 21, 22, Cet auteur les consi-dre comme prtres. C'est aussi, semble-t-il, l'opinion deDiodore de Sicile.

    6. XpivTa'. os /.a-. aavTaiv, rcoBox^; ^z^%Xr^^ ioO'vTs: aroj,

  • 8 LES DRUIDES, LES UATIS

    qui aussi prdisaient les vnements futurs.C'est grce l'alliance de saint Patrice avecles Utis^ en irlandais fthi^ filid^ que lechristianisme en Irlande triompha du drui-disme.

    Les Ut'is celtiques avaient leur quivalent Rome, c'tait le collge des augures.

    Une autre institution romaine offrait unevidente analogie avec les Druides, c'tait lecollge des pontifes. Aux pontifes romainsappartenait une grande partie des attributionsconfres aux Druides celtiques ; mais avantd'en parler, constatons d'abord que les chefsplacs la tte des Druides de Gaule et deceux d'Irlande correspondaient au pontifexmaximus des Romains ^Quant aux attributions, on sait que souvent

    en Gaule les Druides taient pris commearbitres des procs ^ ; les pontifes romains

    otoi 8s 8i XI T^; otovoaxoTita; xal 8t t% tjv ispeitov 0u(Jta; la.[jLX)ovTa ipoXyouai. Diodore de Sicile, 1. V, c. 31, 3 ; d.Didot, t. I, p. 272, 1. 45-48.

    1. His autem omibus druidibus praeest unus qui sum-mam inter eos habet auctoritatem. De hello gallico, 1. VI,c. 13, 8. Sur les Druides d'Irlande et sur leur chef, voirplus bas, chapitre XII.

    2. Csar exagre quand [De bello gallico, 1. VI, c. 13, 7) il prtend que les Druides jugeaient tous les procs.

  • LES DR L IDES 9

    furent l'origine chargs de la conservation dutexte des lois, et unede leurs fonctions tait de lesinterprter. Les Druides enseignaient Thistoire leurs lves * ; les pontifes romains ne profes-saient pas l'histoire, mais ils l'crivaient; rdi-ger les annales de Rome, Annales maximi^ taitune des fonctions du pontifex maximus. L'en-seignement de l'astronomie, une des attributionsdes Druides^, n'tait pas donn parles pontifesromains, mais c'taient eux qui dressaient lecalendrier de chaque anne -^ et certaines con-naissances astronomiques taient ncessaires l'tablissement de ce calendrier.

    Ily avait donc une incontestable ressemblanceentre la corporation druidique et une institutionromaine : le collge des pontifes. On peut aussi,avons-nous dit, comparer les augures romainsaux Ltis ou devins celtiques. Ainsi, en regard

    de trois institutions romaines, les flamines,les pontifes et les augures, la Gaule conquise

    1. Drasidae memorant reuera fuisse populi partem indi-genam, sed alios quidem ab insulis extimis confluxisse ettractibus transrhenanis. Timagne (i^"" sicle avant J.-G.)chez Ammien Marcellin, 1. XV, c. 9, 4.

    2. De hello gallico, 1. V, c. 14, 6.3. Sur les pontifes voir Marquardt, Roemische Staats-

    verwaltung,i. III, 2 dition, p. 281-303.

  • 10 LES DRUIDES, LES L'ATIS, LES GUTUATRI

    par Jules Csar, c'est--dire la Gallia comata,nous offre trois institutions similaires, les

    Gutupdri^ les Druides, les Ualis.Une ressemblance analogue se trouve entre la

    langue latine et celle des Celtes : gnitifsingulieret nominatif pluriel en i pour les thmes eno, passif et dponent en r, futur en i>o, suffixestt et tion^ etc., etc. '. C'est surtout avec le

    dialecte gidlique que la ressemblance estfrappante; or, les Druides sont, semble-t-il,d'origine gidlique et, autre analogie avecRome, la couleur de leur vtement, le blanc,est celle de la toge romaine 2.

    Mais il y a un point sur lequel les Druides sedistinguaient des pontifes romains : ils profes-saient, comme devaient plus tard professer lesJsuites, comme ont profess jadis Pythagoreen Italie dans l'obscure ville de Crolone auVI sicle avant notre re, Socrate au sicle

    suivant, Platon et Aristote au iv sicle, tous trois

    en Grce, dans la capitale littraire de cettecontre illustre, dans la ville d'Athnes. Pytha-

    1. Mmoire d'E. Windisch sur les langues celtiques^ IV, chez Groeber, Grundriss der romanischen Philologie yt. I, 2e dition, p. 390-394.

    2. Marquardt, Das Privatleben der Rmer, 2 dition,p. 554 et suivantes. Cf. ci-dessous, )>. 77, 96.

  • LKS DRUIDES H

    gore, Socrale, Platon, Arislote taient philo-sophes ; donc, pensrent les Grecs, les DruidesTtaient aussi ; voil pourquoi les Druides sontqualifis de philosophes avant notre re, versFan 200 par Sotion, dans la seconde moiti dui^'" sicle par Diodore de Sicile, puis, aprsnotre re, dans la premire moiti du iii^ siclepar Diogne Laerce KDu reste le mot philosophe, c'est--dire

    (( ami de la science et de la sagesse , peut treconsidr comme une traduction grecque duceltique drii-uids a trs savant , littralement fortement voyant , en irlandais dri^ augnitif drad -. Celui qui se croit et qu'on croitsavant aime la science et la confond avec lasagesse. La traduction latine du mot dru-uidsest magister sapientiae matre de la sagesse '^ .

    1. Voir les textes runis par A. Holder, AltceltlscherSprachschafz, t. I, col. 1322, 1325, 1329.

    2. De dri on peut rapprocher si =z su-uids, au gnitifsii(I=: su-uidoa savant, sage , littralement bienvoyant (Thurneysen) : celui qui a bien vu sait ce qu'il avu. Cf. ci-dessous, p. 85.

    3. Habent tamen et facundiam suam magistrosquesapientiae druidas. Mla, 1. III, ch. 2, 18.

  • Chapitre II

    Les Druides ont t Vorigineune institution gidlique.

    Les Druides paraissent avoir t connus

  • LES DRLIDES Vd

    en Grande-Bretagne et ils avaient importcette institution sur le continent : Jules Csarnous l'apprend'. Nous en concluons que lesDruides ont t originairement ime institutiongidlique, propre d'abord aux Gidels l'ex-clusion des Gaulois. Les Gidels sont un groupeceltique qui subsiste encore avec sa langue en

    pat ion. Le premier g-e de fer dbuta deux ou troissicles au moins avaul l'occupation romaine. Or ilexplique (p. 61) que le premier ge de fer dbuta avec Tin-vasion des P. Celtes, c'est--dire des Gaulois. C'est en l'an43 (le notre re que commena l'occupation romaine, doncla concjute gauloise aurait eu lieu au moins entre l'anne157 et l'anne 2'J7 avant J.-C. Cf. J. Rhys, Early Britain,2'' dition, p. 4.

    1. Disciplina in Britannia reperta atque inde in Gal-liam translata esse existimatur, et nunc qui diligentiuseam rem cognoscere uolunt plerumque illo discendi causaproficiscuntur. De bello gallico, 1. VI, c. 13, i: 11 et 12.M. Salomon Reinach parait avoir devin l'.origine gid-li(iue des Druides, Revue celtique, t. XXI, p. 175. Je nevois pas de raison pour croire avec le savant M. J, RhysSfufliex in early Irish History, dans les Proceedings oflifUisii Acaclemy, vol. I, p. 34) que Csar aurait crit parerreur Britannia pour Hihernia. Dans la plus ancienne po-pe irlandaise, la Grande-Bretagne apparat comme le foyerde l'instruction. C'est en Grande-Bretagne que le clbrehros Cchulainn a appris le mtier des armes; de Grande-Bretagne vient la prophtesse qui annonce la reine Medbles rsultats dsastreux du Tain b Cailnrji ; dans le Cop/iurin (In niucrado, ci-dessous, p. 183, un Druide de Grande-Bretagne prdit en Irlande le triomphe des side de Munster.

  • 14 LES DRUIDES

    Irlande et dans les montagnes de FEcosse. Dece groupe, longtemps matre de toutes lesIles Britanniques, le druidisme a t importdans la vaste rgion qui s'tend au sud de laManche entre 1 ocan Atlantique et le Rhin

    ;

    mais il a t inconnu dans la Gaule cisalpine etdans les contres jadis celtiques qui sontsitues Test du Rhin, tant dans le bassin duDanube qu'en Asie Mineure, o le dru-nemeton^c'est--dire soit le grand temple, soit le grandbois sacr, n'a aucun rapport avec les Druides:si l'on soutenait le contraire, autant vaudrait

    dire que grand savant et grand ignorant sont desformules de valeur identique. Il y a en Franceun synonyme de dru-nemeton, ce^i uer-neme-ton^ au pluriel uernemeta :

    Nomine Uernemetis uoluit uocitare uetustasQuod qurfsi fanum ingens gallioa ling-ua refert^.

    1. Fortunat, 1. I, carmen 9, vers 9; dition de FrdricLo, p. iO.

  • ClIAPITI III

    Quelle diffrence y a-t-il entre les Gidelset les Gaulois ?

    Les Gidels, ou, comme on crit aujour-d'hui, les Gaels, sont le rameau le plus septen-

    trional de la famille celtique ; ce rameau s'esttabli dans les Iles Britanniques une datedifficile dterminer, entre Fan 1300 et Fan 800avant notre re ^ Les Gidels taient alors Fge de bronze. Ils ne sortirent pas de cet geavant Fan 300 ou 200 avant J.-C., date approxi-mative laquelle une invasion gauloise apportale fer dans les Iles Britanniques. Plusieurs sicles,mille ans peut-tre avant l'invasion gauloise,

    les Gidels arms de lances avec pointes debronze '^, d'pes et de poignards de bronze 'Kavaient triomph de la race anonyme qui lesavait prcds dans les Iles Britanniques. Cette

    1. Romilly Allen, Celtic Art in pagan and chrUtianTimes, p. 21.

    2. Romilly Allen, ibidem, p. 8, 39.:i. Romilly Allen, ibidem, p. 10, 24, 240.

  • 16 LES GIDLS, LES GAULOIS

    race, dont l'archologie nous apprend l'antiqueexistence mais dont la langue nous est inconnue,ignorait les mtaux, quand elle fut subjuguepar les Gidels. Alors elle tait encore l'gede la pierre polie, l'ge nolithique, commedisent les archologues, qui ainsi s'exprimenten grec pour se distinguer du vulgaire ignorant.Les armes de pierre et d'os dont se servait cette |race taient bien infrieures aux armes mtal-liques des Gidels.

    La conqute des Iles Britanniques par lesGidels n'y avait pas seulement introduitun mtal que les habitants de ces les n avaientpas connu jusque-l, elle y avait fait aussipntrer une langue qu'on n'y avait pas encoreparle et qui allait y dominer en matressependant plusieurs sicles. C'tait un dialecteceltique.

    Puis il s'coula plusieurs centaines d'anneset la conqute gauloise importa dans les IlesBritanniques, avec les armes de fer qui triom-

    phrent des armes gidliques de bronze, undialecte celtique nouveau, le gaulois, qui

    vainquit et remplaa le gidlique en Grande-Bretagne.

    Un des caractres qui distinguent le gauloisdu gidlique est la substitution gauloise de la

  • LES GOIDKLS, LES GALLOIS 17

    lettre p au q et au ku indo-europen. LesGidels, Irlandais, et Gals d'Ecosse, ont gard

    CCS deux lettres depuis longtemps rduites /i,hh crits c, ch. Les Gidels, en conservant

    le^^ et le ku, sont d'accord avecles Romains quiparlaient la langue du Latium, petite provincede ritalie centrale, tandis que leurs voisins ,les Osques et les Ombriens, beaucoup plusnombreux mais domins par eux, changeaienten/), comme les Gaulois, le ku et le indo-europens^.

    Pour le /fiz indo-europen nousnousbornerons un exemple: rindo-europen*e/wo-.s(( cheval ,en sanscrit avas, est devenu en latin equus,en gidlique *equas, puis ec/i, each, mais engaulois epo-s, d'o vient le driv gallois

    ebol, en breton ebeul poulain = *plos. Le

    nom propre osque EjoiV/iw^^ parat aussi drivd'un nom commun osque, *epos cheval ))^.

    1. Brugmann, Grundriss der vergleichenden Grammatik^t. I, 2'' dition, p. 5Ij4 ; cf. p. 604-605.

    2. Sur le nom propre osque Epidius, voyez Planta,

    Gramniatik der oskisch-umbrischen Dialekte, t. II, p. 44,501, 608. Cf. De Vit, Onomasticon, t. II, p. 738.

    3. La labialisation parat s'tre produite en osque et en

    ombrien postrieurement la date du mme phnomne enceltique et d'une faon indpendante. Planta, Grammatikder oskisch-umbrischen Dialekte, t. 1, p. 331.

    Les Druides. 2

  • 18 LES GIDELS, LES GALLOIS

    Voici galement un exemple pour le q.Le nom de nombre cardinal indo-europen

    qui veut dire quatre a ld'abord certainement*queuores ; il est devenu en \Rlin qualuor, envieil irlandais cethir^ depuis ceathair^ ceilhre

    ;

    mais en gallois moderne pedwar^ en bretonpevar ; les Osques disaient pelora K De ce nomde nombre il y a une variante usite en compo-sition, c'est en latin quadru- qui apparat dansle franais quadrupde venant du latin quadru-pedi^ quadru-pede^ quadru-pedem. La formedu premier terme de ce compos est en irlan-dais ceathar, mais en gaulois petru ^ commel'attestent le nom de nombre ordinal petrii-decametos quatorzime et le nom depeuple Petru-corii Prigueux , dont lesens est quatre bataillons ^. La notation

    ombrienne est petur- dans le compos petur-piirsus a aux quadrupdes , dont le correspon-dant latin est quadrupedibus -^

    On trouvera des exemples plus nombreuxdans la Granimatica celtica ^.

    1. Planta, Grammatik, t. II, p. 590; cf. t. I, p. 37, 332.2. Holder, Altcellischer Sprachschatz, t. II, col. 977.

    3. Planta, Grammatik, t. II, p. 575, 1. 11 ; cf. t. I, p. 114,121, 243,279, 332; t. II, p. 2, 196.

    4. 2 dition, p. 66 ; cf. Brugmann, Grundriss, t. I,

  • LES GIDELS, LES GALLOIS 11)

    Les Gidels n'avaient donc pas comme lesGaulois chang le ku et le q indo-europensen p ; or ils avaient, comme les Gaulois, perdule /j indo-europen avant la date recule o lesdeux groupes Gidels et Gaulois se sparrentl'un de Tautre. En consquence, les Gidelsn'avaient plus la lettre p dans leur alphabet.Dans les vingt lettres dont se compose l'al-

    phabet ogamique primitif, c'est--dire celuides plus anciennes inscriptions d'Irlande, \e pfait dfaut '. Les Gidels avaient perdu lafacult de prononcer cette lettre. Elle n'apparatpas dans leur langue avant le milieu du

    2*= dition, p. 605. Le nom de fleuve Sequana et sondriv Sequani, nom d'un peuple qui habita d'abord surles bords du fleuve, ne sont pas une preuve que certainsGaulois eussent conserv le q indo-europen. Sequana estun nom antrieure la conqute gauloise conserv en Gaule;on peut le comparer Donau, nom antrieur la conqutegermanique et qui cependant subsiste dans les pays delangue allemande ; Donau^Danuuius, Danube.

    1, Ces lettres se divisent en quatre sries de cinq lettreschacune : 1 i, e, u, o, a ; 2 r, s, ng, g, m ; 3 q, c, t, d, h ;4 n, s, f, 1, b. Dans le dictionnaire anglais-irlandais deMac-Curtin, dition de Paris, 1732, p. 714, on trouve lasuite de cet alphabet six lettres supplmentaires dontun p. Mais ces six lettres n'ont dans leur forme aucun rap-port avec les vingt lettres dont nous venons de parler.Elles forment une addition relativement rcente. Cf. Brug-

    mann, Grundriss, t. 1, 2'- dition, p. 515-518.

  • 20 LES GIDELS

    v^ sicle aprs J.-C. o elle leur fut imposepar le triomphe du christianisme. Des mission-naires chrtiens, venus de Grande-Bretagne,eurent cette poque le talent de leur faireprononcer des mots d'origine latine comme ils

    les prononaient eux-mmes quoique ces motscontinssent la lettre p. Le plus remarquableest Patricius.

    Antrieurement, lorsque les Gidels, alorsrejets en Irlande, empruntaient un mot latinqui contenait un jo, ils remplaaient ce p parune.

    Ainsi des marchands venus de Grande-Bretagne leur firent acheter des pices de cette

    toffe pourpre qui distinguait le vtement des em-pereurs de celui des autres citoyens et que durent

    porter en Grande-Bretagne Hadrien, SeptimeSvre au it sicle de notre re, Garausius au iii^.Mais les Gidels, disons, si vous le dsirez, lesIrlandais, ne purent prononcer les deuxjo du latinpurpura qui dans leur langue devint corcur.

    Leur organe rebelle dfigura de mme deuxmots essentiels de la langue des chrtiens : en

    Irlande, pascha Pques devint case etpresbyter prtre , cruimther. Dans ce mot

    il n'y a pas seulement substitution du c au />,on y remarque aussi le changement du b en m

  • LES GIDELS 21

    comme dans le franais samedi pour sabbati dieset dans Yd\\endA\samslag d'ahovsambaz-taff^sambs-tag^ dont le premier terme est le lalinsabbatidL\ec la dsinence germanique du gnitifs tenant lieu de Vi latin.

    Les Irlandais ont d'abord appel Cothraige *

    leur clbre aptre Patricius (prononcezPatriJdus). Mais la victoire des doctrines dece saint personnage a eu un rsultat phontique.La paresse de Torgane vocal des Gidels a tvaincue. La lettre/) s'est introduite chez eux ;ils ont prononc Patrie. Dans le courant duvii^ sicle, cette rvolution linguistique tait

    accomplie. Le christianisme alors tait triom-

    phant.

    \. L'o de Cothraige = *Quairicias z=. Patricius est un a

    primitif dform par l'influence de Vu prcdent. Est com-parer l'e de *quenque cinq , devenu o dans l'irlandaiscic, mme sens. *Quenque a donn en gaulois pempe. L'ade Quatricias a produit dans Cothraige, par action progres-

    sive, Va qui suit Vr, et l'e du mme mot rsulte de l'actionrgressive exerce par l'a qui suit le second i de *Quatricias.

  • Chapitre IV

    Conqute de laGrande-Brelagneparles Gauloiset introduction du druidisme en Gaule.

    Outre un dialecte celtique diffrent de celuique parlaient les Gaulois, les Gidels poss-daient une institution que les Gaulois n'avaientpoint. C'tait le druidisme. Dans le courantdu iii^ sicle avant notre re, ceux des Gauloisqui alors habitaient l'est du Rhin, dans lapartie nord-ouest de l'Allemagne actuelle, enfurent expulss par la conqute germanique.Ils se ddommagrent de cette perte en con-qurant une partie de la rgion situe l'ouestdu Rhin, d'oii ils chassrent d'autres Gauloistablis au nord et o ils subjugurent desLigures installs au midi

    ;puis ils s'emparrent

    de la Grande-Rretagne et d'une partie des ri-vages orientaux de l'Irlande. C'tait entre lesannes 300 et 200 avant J.-C. Ils introduisirentavec leur domination politique et leur languel'usage des armes et des instruments de ferdans la Grande-Rretagne, o alors on ne seservait que d'armes et d'instruments de bronze

  • LES DRUIDES SLR LE CONTINENT 23

    et O Ton parlait gidlique. En compensation,ils y Irouvrent les Druides qui, bien qu'ap-partenant au peuple vaincu, leur imposrentleur domination dans ce que nous pourrionsappeler l'ordre spirituel ; ils firent accepter

    ^leur matrise scientifique et religieuse, non

    seulement aux Gaulois de Grande-Bretagne \mais ceux du continent entre le Rhin Testet l'ocan l'ouest, rgion o une partie desDruides se transporta vers l'an 200 avant l'rechrtienne. Vers le mme temps, un vne-ment analogue se produisait dans le monderomain : Rome dont les armes avaient conquisla Grce fut son tour conquise par la littra-ture et la philosophie grecques, par les

    pdagogues et les artistes de la Grce :

    Gracia capta ferum uictorem cepit et artesIntulit a^resti Latio ^.

    Tels les Franais et les Allemands guerroyanten Italie aux xv^ et xvi^ sicles, et en rap-

    1. De l le druide des Briltons, druid do Bretnuib, quiapparat dans le Cophur in d muccado, une des prfacesdu Tin b Cailngi, Windisch, Irische Texte, 3*^ srie,1" cahier, p. 240, 1. 156.

    2. Horace, Epistolde,\. II, epistola i, vers 155, 156; cf.

    Teuffel-Schwabe, Geschichte der rmischen Literatur,5e dition, 1890, t. I, p. 134.

  • 24 LES DRUIDES SLR LE COlNTINEiNT

    portant rarchitecture italienne, qai bienttdomina en Europe malgr l'effacement politiqueet militaire des Italiens.

    Le succs des Druides, ces professeursgidels en Gaule pendant les deux sicles quiont prcd Tre chrtienne, peut tre compar celui d'autres Gidels, tels que l'IrlandaisClment qui sous Gharlemagne devint direc-teur de l'cole du palais et l'Irlandais ScotErigne qui crivit des vers grecs, et qui pfitune position considrable la cour de Charlesle Chauve ^ Chasss d'Irlande par l'invasionScandinave, ils apportrent dans l'empire francla connaissance du latin classique et du grecque l'invasion barbare en avait expulse. Ondoit eux et d'autres Irlandais moins connusqui les accompagnrent la renaissance destudes classiques qui se produisit en France auix^ sicle et dont un des tmoins est unmanuscrit del bibliothque de la ville de Laon;ce manuscrit, qui date du ix^ sicle, est la copiefaite en France d'un dictionnaire grec-latin

    d'origine irlandaise ^.

    1. llaurau, Histoire de la philosophie scholastique, pre-mire partie, p. 148-175.

    2. Ce ms. de Laon porte le n 444. . Miller en a publiune dition dans le tome XXIX, 2*= partie, des Notices et

  • LES DRUIDES SUR LE CONTINENT 25

    Mais revenons aux Druides.Sur l'origine du druidisme, et sur son influence

    en Gaule au milieu du i^"" sicle avant J. -G., il ya deux passages importants du De bello gallico.Dans celui que nous citerons le premier, Jules-Gsar parle de la principale fonction desDruides : leur enseignement dure vingt ans

    ;

    il traite de la survivance des mes aprs lamort, de l'astronomie, de la gographie, des-sciences naturelles, de la thologie ^ Quelqueslignes plus haut il explique d'o vient l'ins-titution druidique. On pense, dit-il, qu'ellea t trouve en Grande-Bretagne et que del elle a t transporte en Gaule et en gnralaujourd'hui ceux qui veulent mieux connatrel'enseignement des Druides se rendent enGrande-Bretagne pour y faire l'tude de cetenseignement ^

    extraits des manuscrits de la Bibliothque nationale et desautres bibliothques, p. 1-230. Voir aussi un article de M. J^Vendrys, dans la Revue celtique, t. XXV, p. 377-381,

    1. In primis hoc volunt persuadere non interire ani-mas, sed ab aliis post mortem transire ad alios, atque hocmaxime ad virtutem excitari putanl, metu mortis neglecto.Multa praeterea de sideribus atque eorum motu, de mundiac terrarum magnitudine, de rerum nalura, de deorumimmortalium vi ac potestate disputant et iuuentuti tradunt.De bello gallico, 1. VI, c. 14, 5, 6.

    2. Disciplina in Biitannia reperta atque inde in Gai

  • 26 LES GAULOIS EN GRANDE-BRETAGNE

    La conqute de la Grande-Bretagne par lesGaulois du rameau belge est tablie par unautre passage du De bello gallico. En Tan 57avant notre re, Jules Csar se prpare laguerre contre les Gaulois du groupe belge, ilprend des renseignements sur les ennemisqu'il va attaquer; les Rmi lui apprennent entreautres choses qu'ils n'ont pas oubli le tempsOLi Deuiciacos, roi des Suessions, tait le pluspuissant de toute la Gaule et avait soumis sadomination non seulement une grande partiede la Gaule, mais aussi la Grande-Bretagne KAuxi^ sicle de notre re, Guillaume le Conqu-rant ne s'est empar que d'une partie de laGrande-Bretagne

    ; douze sicles plus tt,Deuiciacos Favait soumise tout entire sadomination.

    liam translata existimatur, et nunc qui diligentiuseam remcognoscere volunt plerumque illo discendi causa profiscun-tur. De bello gallico, 1. VI, c. 13, 11, 12.

    1.

  • Chapitre V

    Preuves linguistiques de la conqute f/auloiseen Grande-Bretagne. Premire partie. Lesnoms de peuples qui se retrouvent sur lecontinent.

    L'tablissement des Gaulois en Grande-Bretagne est dmontr par un certain nombrede preuves outre le texte du De bello gallicoque nous venons de citer.Nous signalerons d'abord la prsence dans

    cettegrandele de peuples d'origine videmmentgauloise qui l'habitaient au temps de la domi-nation romaine ^ Ce sont:

    1*^ Les Belgae chez lesquels tait situeUenta Belgarum, aujourd'hui Winchester,comt de Hampshire ~.

    2^ Les Atrebatii, dont la capitale, Calleua^est aujourd'hui Silchester, dans le comt deSouthampton. Ils sont incontestablement unecolonie des Atrebates dont le nom persisteen France dans celui d'Arras, chef-lieu du

    1. Cf. De bello gallico, 1. V, c. 12, 2, ci-dessous, p. "iG.2. Ptolme, 1. II, c. 3, 13 ; dition Didot, t. I, p. 103,

    1. 1-4.

  • 28 LES GAULOIS EN GRANDE-BRETAGNE

    dpartement du Pas-de-Calais ^ Le nom desAti^ehatessieu un driv, Atrebatensis % qui estdevenu, Artois, nom d'une province de laFrance ancienne.

    3^ Les Catu-uellauni de Grande-Bretagne,tablis aux environs de Cambridge, au nord deLondres, y taient venus des environs deChlons-sur-Marne. Le nom actuel de cetteville est la prononciation franaise d'un primi-tif gaulois identique au septentrional Catu-uellauni ^. Ce nom sur le continent, sous ladomination des rois mrovingiens, est devenuCatalauni ^, dont les cas indirects Catalaunis^Catalaunos ont donn d^abord en franaisChaalons pour aboutir au Chlons moderne.

    1. Holder, Altceltischer Sprachschatz, t. I, col. 96-99.

    2. Longnon, Atlas historique de la France, p. 127.3. Holder, Altceltischer Sprachschatz, t. I, col. 863-865

    ;

    cf. Longnon qui, Atlas historique de la France, p. 5, 14,crit Catuellauni, Catuellaunoruni, leon du ms. latin12097 de la Bibliothque nationale, vi*' sicle, et du ms.de Cologne 212, vii*^ sicle. Les scribes ont supprim losecond u de Catu-uellauni . Dans le texte d'Ammien Mar-cellin, tel que nous le possdons, les deux u ont disparu;Catelauni, 1. XV, c. 11, 10; Catelaunos, 1. XXVII, c. 2,

    4; dition Gardtliausen, 1874, t. I, p. 73 ; t. II, p. 96.

    4. C'est la leon qu'a prfr bien tort Mommsen, Chro-nica minora, t. I, p. 590. Cette leon est celle du plus grandnombre des mss. Mais il ne faut pas prfrer la quantit la qualit, qui est ici dtermine par la date.

  • LKS GAULOIS EN GHANDK-lRETAr.M: 29

    4^^ Plus au nord eiiGrande-Brelagne, dans lecomt d'York, les Parisi portent un nom quiest, quant la finale, une variante ortliogra-phique fr^queute en latin, du nom des /^//r/.s'*tablis dans le continent sur les bordsde la Seine ; c'est de Paris ou des envirous quesont venus, probablement au iii^ sicle avantnotre re, les Parisi qu'on trouve tablis sousl'empire romain l o est aujourd'hui le comtd'York 1.

    o^ On ne peut gure contester l'ori^ne gau-loise desSmertae^ population dont le territoiredoit tre cherch dans l'Ecosse septentrionale '.

    Leur nom est la seconde partie de celui de ladesse Ro-smerta qui se rencontre si souventdans les inscriptions romaines du bassin duRhin \

    Il y avait en Grande-Bretagne, sous l'empireromain, deux peuples dont le nom n'apparatpas dans la gographie du continent gaulois,mais qui vers le commencement du vi^ sicleont t en notable partie s'tablir dans la

    1. Holder, Altceltischer Sprachschatz, t. II, col. 946-947.

    2. Ptolme, t. II, c. 3, 8 ; dition Didot, t. I, p. 95,1. \.

    3. Holder, Altceltischer Sprachschatz. t. II, col. 1230-1231 ; cf. col. lo93, 1594.

  • 30 LES GAULOIS EN GRANDE-BRETAGNE

    pninsule armoricaine et y ont port un dialecteissu du gaulois dont par exemple p = ku et qest un lment caractristique ; ce sont lesDumnonii et les Cornouii.

    Les Dumnonii habitaient la pninsule sud-ouest de la Grande-Bretagne. Sans abandonnercompltement cellepninsule, anglaise aujour-d'hui, dont une partie, le comt de Devon,porte encore leur nom, ils allrent occuper

    tout le nord-ouest de la pninsule armoricaine,c'est--dire en France, la partie septentrionale

    du dpartementd'IUe-et-Vilaine, le dpartementdes Ctes-du-Nord en presque totalit et laportion nord de celui du Finistre. Ce paysprit et conserva pendant plusieurs sicles lenom de Domnonia *.

    Le second peuple tait les Cornouii^ divissdans la Grande-Bretagne en deux rameaux :l'un, l'extrmit septentrionale de l'Ecosse,

    dans les comts de Sutherlandet de Caithness,

    1. Holder, Allceltischer Sprachschatz, t. I, col. 1370-1371.

    Notre opinion ici diffre de celle de M. John Khys, EarlyBritain, 3 dition, p. 44. Suivant ce savant auteur, lesinscriptions gidliques en caractres ogamiques trouvesdans la pninsule en question attestent que les Dumnoniitaient gidels. Mais ces inscriptions sont les traces d'uneoccupation irlandaise temporaire et postrieure l'aban-don del Grande-Bretagne par les lgions romaines.

  • LES GAULOIS EN GHANDE-BRETAGNE 31

    a disparu sans laisser de trace ; l'autre, plus ausud, dans les comts anglais de Gheshire et deShropshire, au nord-est du Pays de Galles, futexpuls de cette rgion par la concpite saxonneet alla prendre en partie la place des Dumnoniidans la pninsule sud-ouest de la Grande-Bretagne, puis, non content de ce domainenouveau, envoya une colonie sur le continent,prs des Z)wmAioA7i7, dans la portion mridionalede ce qui est aujourd'hui le dpartement duFinistre. Le territoire occup parles Cornouiidans la pninsule sud-ouest de la Grande-Bretagne s'appelle aujourd'hui en anglaisCornwall, en gallois Gernyw ; la rgion donts'est empar le mme peuple sur le continent areu au moyen ge le nom de Cornubia(prononcez Cornuvia) ; aujourd'hui on dit enfranais Gornouaille, en breton Kern KLa langue apporte sur le continent par les

    Dumnonii et par les Cornouii tablit clairementl'origine gauloise de ces deux peuples, c'est

    1. Ilolder, AUceltischer Sprachschatz^ t. I, col. Ii30,1131. Cf J. Loth, L'migration bretonne en Armorique,p. 157-191, et la troisime des cartes places par Le Moynede la Borderie la fin du tome I*^^ de son Histoire de Bre-tagne. Sur les Cornouii de Grande-Bretagne, voir JohnRliys, Earbj Britain, 3*^ dition, p. 293.

  • 32 LES GAULOIS ^:N GRANDE-BRETAGNE

    un dialecte celtique, le breton, o, comme en

    gaulois, le ku et le q se changent en p. Lamme observation s'applique au comique,langue des Cor/zoi rests en Grande-Bretagne.

  • Chapitre VI

    Preuves linguistiques de la conqute gauloiseen Grande-Bretagne . Seconde partie. Le pen Grande-Bretagne dans les noms depeuples autres que celui des Parisii, dansceux d'hommes et de lieux.

    1^ Les Picti ,{\x\ sous l'empire romain furentde si redoutables ennemis pour les Bretonsromaniss \ portent un nom qui veut dire(( ceux qui tatouent ; c'est la forme gauloisedu gidlique cicht ^ aujourd'hui ciocht ^ graveur . Le nom des Pictavi, mieuxPichtoiii, Pichtoues de Gaule, a t dfiguren Pictones sous l'empire romain mais seretrouve dans les noms modernes de Poi-

    1. Holder, AUceltischer Sprachschatz, t. II, col. 994-999.

    2. Whitley Stokes, O'Davoren Glossary, n 367, dansArchiv fur celtische Lexicographie, t. II, p. 255; KunoMeyer, Contributions to irish Lexicography, ibid., p, 367 ;Glossaire de Cormac dans deux publications de WhitleyStokes, Three irish Glossaries, p. 13 ; Sanas Chormaic,Cormac's Glossary, p. 40.

    3. Glossaire d'O'Clery publi par Arthur W. K. Miller,Revue celtique, t. IV, p. 385. Dinneen, An irish-englishDictionary, p. 139.

    Les Druides. 3

  • 34 LES GAULOIS EN GRAiNDE-BRETAGNE

    tiers = Pictauos, de Poitou = Piclouom,sous-entendu pcigam\ c^est un driv du thmepichto- d'o Picti ; il signifie probablementaussi ceux qui tatouent ; ceux-l sonttatous eux-mmes ^On peut rapprocher de ces noms de peuples

    un driv, le nom d'homme Pichtilloson Pich-tilos, crit Pictillos^ Pictilos par des graveurs

    l'alphabet desquels le ch faisait dfaut 2. Il a

    t mme dform en Pistillus '^ sous l'influencedu nom commun latin pistillus pilon . Ilsignifie probablement petit tatou .

    Les Piets appelaient, dit Bde (l. I, c. 12),Pean fahel (restituons pennos ualli^ littrale-ment tte , c'est--dire bout du rempart ),l'extrmit occidentale du vallum Antonini^ sisen Ecosse, entre le Firth of Forth l'est, etl'embouchure de la Clyde, Firth of Clyde, l'ouest. L'/" initial de fahel= uallum^ en gallois

    ffivawl^^ tient lieu d'un u consonne initial,

    1. Sur la forme Pictavi voir llolder, Allceltischer Sprach-schatz, t. II, c. 987-993. Sur la variante Pictones, ibidem,col. 1000, 1001.

    2. Holder, AUceltischer Sprachschatz, t. II, col. 999, 1000.3. Rolder, AUceltischer Sprachschatz, col. i009, 1010.4. Grammatica celtica, 2** dition, p. 1069 ; cf. Robert

    William, Lexicon cornu-britannicum, p. 1;J3; Davies, Anti-quae linguae britartnicae dictionariiim duplex, Londres,

  • LES GAULOIS EN GBANDE-BRETAGNE 33

    comme dans le comique freg = * uiracisu femme marie , variante de grueg, en galloisgicraig, comme dans le breton fui mauvais ^,variante de gtculL qui se trouve aussi souscette seconde forme en gallois ^ ; on trouveaussi f = u consonne en breton dans lavariante derf^ de derv chne "^ , en galloisderw, thme deruos. Le mme phnomne seproduit dans le franais fois de uicem, fade deWc^/)/(/t/m, quoiqu'en rgle gnrale le franaisreprsente par v ou g Vu consonne initiallatin, vin de uinum, gaine de uagina.

    La chronique picte, bien que de fabricationirlandaise, comme le prouve le nom de l'ima-ginaire premier roi Cruidne ^, variante deCruithne, nom irlandais des Piets ^, donne

    1632, partie galloise au mot gwawl et partie latine au motvallum. William Owen, A Dictionary of the welsh Lan-guage, Londres, 1803, au mot gwawl. Cf. Whitley Stokes,Urkeltischer Sprachschatz, p. 275, 276.

    1. Troude, A'^OMt'eau dictionnaire pratique breton-fran-ais du dialecte de Lon, p. 200. Maunoir, Le Sacr Collgede Jsus, 2^ partie, p. 77, 147.

    2. Victor Henry, Dictionnaire tymologique du bretonmoderne, p. 140.

    3. Troudc, Nouveau dictionnaire pratique breton-franais,p. 108.

    4. William F. Skene, Chronicles of the Picts, Chroniclesof the Scots, p. 4.

    5. J. Rhys, Early Britain, S'' dition, p. 156, 241. tymo-

  • 36 LES GAULOIS EN GRANDE-BRETAGNE

    une liste de rois piets o plusieurs noms sontvidemment brittoniques. Tels sont :

    1^ Ur-gust^ au gnitif Ur-guist ^, nom

    d'homme identique Gwrgwst chez les Galloisdans les Mabinogion 2, en vieux bretonUuorgost, Uiirgost^ Gurgost '\ le mme motque l'irlandais Fergus dont \f initial caract-rise la prononciation gidlique.

    2^ Un-ust, au gnitif Uii-uist ^, en irlandais

    Oen-gus, Oen-gusa. VU initial oppos au gi-dlique De est videmment brittonique.

    Uur-gust signifie choix suprieur , Un-ust choix unique .Nous citerons encore : 3^ Taran ^, qui,

    comme nom commun, veut dire en gallois et

    en breton tonnerre ; on le rencontre deuxfois en Galles comme nom d'homme dans les.Mabinogion ^.

    logiquement parlant, Cruithne est le mme mot quenptxavia le nom que prit la Grande-Bretagne avant de s'ap-peler IIpeTTavia et Brittania ; cf. Whitley Stokes, Urkelti-scher Sprachschatz, p. 63.

    1. William F. Skene, Chronicles, p. 7 et 8.2. John Rhys et J. Gwenogvryn Evans, The Text of

    the Mabinogion^ p. 134, 1. 9 ; J. Loth, Cours de littratureceltique, t. III, p. 270.

    3. J. Loth, Chrestomathie bretonne, p. 178; cf. p. 133.4. William F. Skene, Chronicles, p. 8.5. William F. Skene, Chronicles, p. 7,, John Rhys et Gwenogvryn Evans, The Text of the-

  • LES GAULOIS EN GRANDE-BRETAGiNE 37

    4^ C'est du nom d'homme picte Drust \crit aussi Drest ', que drive Drystau, nomgallois d'un personnage des Mabinogion^devenu clbre sous une forme un peu altre,Tristan^ dans les romans franais de la Tableronde ^.

    5^ Nous terminerons par Mailcon ^ qui porteun nom identique celui des Gallois Mailcun^MaiUjon, dans les Annales Camhriae^ vi^, xii^et xiii^ sicles ^. Donc les Piets sont d'originegauloise ou si l'on veut appartiennent au rameaubrittonique. Un savant minent croit lecontraire et les considre comme trangers la race indo-europenne par la raison qu'auvi^ sicle saint Golumba n'a pu s'entretenir aveceux que par interprte^; mais la diffrence qui

    Mabinogion, p. 40, 1. 7, p. 134,1.9 ; J. Loth, Cours de litt-rature celtique, t. III, p. 270.

    1. William F. Skene, Chronicles, p. 6.2. William F. Skene, Clironicles, p. 7, 8.3. J. Loth, Cours de littrature celtique, t. III, p. 310-

    3H, note ; cf. John Rhys et Gwenogvryn Evans, The textof the Mabinogion, p. lo9, 1. 27; p. 303, 1. 5; p. 304,1. 24

    ; p. 307, 1. 13.

    4. William F. Skene, Chronicles, p. 7.5. dition de J. Williams ab Ithel, p. 4, 57, 81.6. Vie de saint Golumba par Adamnn, 1. I, c. 33; 1. II,

    c. 32, dition Pinkerton-Metcalfe, t. I, p. 107, 153 ; ditionReeves, p. 62, 145. La doctrine oppose la ntre estexpose par John Rhys, Early Britain, 3'" dition, p. 272,273.

  • 38 LES GAULOIS EN GRANDE-BRETAGNE

    existe entre l'irlandais et les dialectes britto-

    niques suffit pour expliquer Timpossibilit oles Piets et leur aptre irlandais taient de secomprendre sans l'intervention d'un interm-diaire bilingue ^,

    2^ Epidii est le nom d'un peuple gauloistabli en Ecosse dans le comt d'Argyle, au norddu uallum Antonini ^. Ce nom, driv d'eposa cheval en gaulois, est par consquentd'origine gauloise ^. On peut en rapprocherEpidius^ gentilice et nom de cours d'eau latin

    d^origine osque^. L'quivalent d'origine latineparat tre le gentilice Equitius ^. Gomme lenom des Cornouii^ comme celui des Smertae,dont nous avons dj parl, comme celui

    1. On peut savoir le franais et ne comprendre ni l'espa-gnol ni l'italien qui cependant sont comme le franais deslangues no-latines.

    2. Holder, Altceltischer Sprachschatz, t.I, col. 445; Pto-

    lme, 1. Il, c. 3, 8 ; cf. c. 2, 10, dition Didot, t. I,

    p. 81, p. 6.

    3. Cette doctrine est rvoque en doute par M. J. Rhys,Early Britain, 3*^ dition, p. 225, qui suppose que ce noma t donn par des voisins gaulois une population quin'tait pas celtique. Mais de cette assertion il ne produitaucune preuve.

    4. Planta, Grammatik der oskish-umbrischen Dialekteyt. II, p. 44, 608, 609.

  • LES GAULOIS EN GUANDE-BRETAGNE 39

    d'Alauna^ dont il sera question page 49, onle trouve au nord du uallum Anfonini. Cestrois noms, comme celui des Epidii attestentrtablissement des Gaulois dans la portion laplus septentrionale de la Grande-Bretagne,rgion o les Romains ne purent jamais tablirleur domination ^

    3^ Kppillos, nom familier ou abrg, tient lieud'un compos tel c^u^Epo-mandiios , Epo-meduosEpo-redi-rix. Une faut pas s'tonner du double

    p ; un doublement de consonne apparatfrquemment dans les noms familiers ~.Eppillos e^i le nom d'un roi qui rgnait dans largion sud-est de la Grande-Bretagne ^. La

    1. Mommsen, Roemische Geschichte, t. V, 2^ dition,p. 169, prtend qu'au ii** sicle de notre re la languedes habitants de la Grande-Bretagne, au nord duuallum Hadriani, tait gidlique ; nous croyons avoirdmontr le contraire.' C'est beaucoup plus tard que lesHighlanders sont arrivs d'Irlande en Ecosse. A comparerla conclusion du mmoire de M. Alexander Macbain, Pto-lemy's geography of Scotland dans les Transactions of thegaelic Society of Inverness^ t. XVIII, p. 388.

    2. Stark, Die Kosenamen der Gernianen, p. 19 et sui-vantes. Cf. Zimmer dans la Zeitschrifl de Kuhn, t. XXXll,p. 158 et suivantes, et Revue celtique^ t. Xlll, p. 294.

    3. Holder, t. 1, col. 1453. J. Rhys, Lectures on welsh Phi-lology, 2e dition, p. 190-192 ; Early Britain, 3" dition,p. 23, 24, 26, 28, 31, 33, 302.

  • 40 LES GAULOIS EN GRANDE-BRETAGNE

    variante Epillos par un senl p nous est offertepar des monnaies recueillies en France dansles dpartements de la Vienne et des Bouches-du-Rhne. Eppillos^ comme Epidii, drive dugaulois epo-s cheval dont un diminutifebeul poulain = * pls existe encore enbreton

    ;le gallois ebol cheval est le mme

    mot qu^ebeul.

    4^ Environ moiti chemin entre les Epidiiet les domaines du roi Eppillos nous trouvonsprs d'York, chez lesParisi, la station romainede Petuaria^ pour parler clairement Petuariauilla, proprit rurale de Petuarios^ c'est--dire du quatrime fils. Quartus quatrime en latin tait prnom et surnom ^ Le gauloispetuarios est la forme primitive du galloispedweryddei du breton pvar quatrime .On trouve le mme mot employ comme

    nom de lieu en Gaule. Pithiviers, Loiret,s'appelait au xii^ sicle Pedveris l'ablatifpluriel, ce qui suppose un nominatif du mmenombre Peduarii ou Peduariae tenant lieud'un plus ancien Petuarii ou Petuariaea\ec un/ au lieu de d comme F tablit le driv

    1. Voir par exemple Corpus inscriptionun latinarum,t. XII, p. 899.

  • LES GAULOIS EN GRANDE-BRETAGNE 41

    Petuarensis dans une charte de l'anne 1025;

    on pourrait corriger Petuariensis. Les Petunrii

    fiindi ou Petnarine uillae de Gaule taient Torigine la proprit d'un Gallo-Romain appell\'Ui;iriiis, homonyme de celui qui en Grande-Bretagne donna son nom la uilla Peluaria \

    o Au sud-ouest de Petuaria^ Penkridge,en Angleterre, dans le comt de StafFord, setrouvait la station romaine de Pennocrucim^mot driv depenno-crouci a tte del butte ,en irlandais Cenn-cruaich '-. Le premier termede ce nom compos est le gaulois penno-s, envieil irlandais cenn = *quennos ^.

    6*^ Dans une partie non dtermine de laGrande-Bretagne, le gographe deRavenne metune localit appele Maponi ^. On suppose

    1. Holder, t. II, col. 981 ; cf. Revue celtique, t. XVIII,

    p. 246; J. Rhys, Lectures on welsh Philology, 2*" dition,

    p. 22, 23 ; Wlitley Stokes, Urkeltischer Sprachschatz,

    p. 58, 59.

    2. Betha Patraic chez Whitlcy Stokes, The tripartite Lifeof st. Patrick, t. 1, p. 90, 1. 18. Le Dinnsenchus offre lavariante Crom-cruaich, dition Whitley Stokes, Revue cel-tique, t. XVI, p. 15, 16; cf. Todd, Saint Patrick, apostle ofIreland, p. 128, note; Holder, t. II, col. 966 ; J. Rhys, Lec-tures on welsh Philology, 2^ dition, p. 184; Early Britain,3e dition, p. 230, 310.

    3. Whitley Stokes, Urkeltischer Sprachschatz, p. 59.4. dition Parthey et Pinder, 436, 20.

  • 42 LES GAULOIS EN GRANDE-BRETAGNE

    qu'il faut sous-entendre fanum et traduirea temple du dieu Maponos . En effet, on atrouv dans le nord de l'Angleterre, dans lescomts de Durham, Cumberland et Northum-berland, des ddicaces au dieu Maponus^assimil parles Romains leur Apollon. Oncorrige en fons Maponus le fons Mabonus^nom d'une source ddie ce dieu et situe prsde Lyon au xi^ sicle *. Maponus drive dugdiXoi^ mapos a fils , en gallois et en bretonmap et mab, en gidlique *maquas 2, gnitifsingulier maqui dans les inscriptions oga-miques 3, plus tard macc^ au gnitif maicc,enfin mac^ au gnitif meic^ puis mie.

    1. Holder, t. II, col. 414 ; Corpus inscriptionum latina-rum, t. VII, no 218, 332, 1345.

    2. R. A. Stewart Macalister, Studies in irish Epigraphy,i^^ partie, p. 6.

    3. R. A. Stewart Macalister, Studies in irish Epigraphy^l^e partie, p. .21, 23, 25, 26, 27, 28, 29, 34, 35, 36, 39, 41,

    46, 47, 48, 49, 51, 53, 55, 59, 60, 67. 71, 72, 79 ; 2^ partie,

    p. 16, 20, 51, 64, 74, 78, 83, 84, 91, 94, 95, 98, 100, 103,

    105, 108, 110, 116, 121, 122, 124, 128, 136 ; cf. Rhys, Lec-tures on welsh Philologij, 2^ dition, p. 388, 394, 395, 401.

  • Chapitre VII

    Preuves linguistiques de lu conqute de laGrnnde-Brelagne pnr^ les Gaulois. Troisimepartie. Noms de villes, de stations romaineset de cours d'eau qu'on trouve la fois en

    Grande-Bretagne et sur le continent gaulois.

    La liste des noms des villes ou des stations

    situes sur les routes de la Grande-Bretagne autemps de l'empire romain porte la trace de laconqute gauloise antrieure : plusieurs de cesnoms se rencontrent dans la partie du con-tinent dont les Gaulois furent matres et ilsparaissent en provenir.

    l"" Un des faits les plus connus de la guerrefaite en Gaule par Jules Csar est le siged' Lxello-dunum, mieux Ouxello-dunon(( Haute forteresse , dans le voisinage deCahors(Lot) ^ ; c'tait en Fan 51 avant J.-C. Or ily avait sous l'empire romain un autre Uxello-

    \. Sur l'emplacement de V Uxellodunum de Jules Csar,voir E. Desjardins, Gographie... de la Gaule romaine,t. II, p. 422, note 9.

  • 44 LES GAULOIS EN GRANDE-BRETAGNE

    du 7ium qui tait situ en Grande-Bretagne*.Kiepert [Atlas Antiquus) met cet Uxellodu-num dans l'Angleterre septentrionale, au comtde Cumberland, en l'identifiant avec la petiteville de Maryport.

    2^ Les textes gographiques du temps del'empire romain placent en Gaule dix Nouio-magus champ neuf . Ce nom compos futport en Angleterre, dans le comt de Kent ^'.

    une station de ce nom tait situe sur la voie

    romaine qui du port de Rutupiae^ aujourd'huiRichborough, au nord-est de Douvres, menaitau rempart construit par ordre de l'empereur

    Hadrien (117-138) et qu'on appelait uallumHadriani ^.

    3"* Outre le fameux Afet/o/a/iwm, aujourd'hui

    i. C'est la localit dont le nom a t crit Axeloduno l'ablatif dans la Noticia dignitatum, dition Bcking, t. II,p. 114 ; cf. Ptrie, Monumenta historica britannicajp. XXIV, col. 2. On lit Uxelludamo chez le gographe deRavenne, dition Pinder et Parthey, p. 433. La notationUxellodunum au nominatif a t adopte par Forbiger,Handbuch der alten Gographie, t. III (1848), p. 300; cf.Kiepert, Atlas antiquus, pi. XI ; Corpus inscriptionumlatinaruni, t. VII, n 1291.

    2. Holder, Altceltischer Sprachschatz, t. II, col. 790-792.

    3. Itinraire d'Antonin, dition Parthey et Pinder,472, 1.

  • LES GAULOIS i:.N GRANDE-BRETAGNE 45

    en franais Milan, fond par les Gaulois dans^ritalie septentrionale, il y en avait dans l'em-pire romain plusieurs autres. Les documentscontemporains de cet empire en mentionnentquatre en Gaule et un en Grande-Bretagne

    ;

    celui-ci parait tre aujourd'hui Clawddcoch foss rouge , dans le comt appel Shropshire^voisin du pays de Galles et situ l'est de cettecontre no-celtique L

    4^ Sur la route de Londres, au uiillumILidriani, se trouvait une station appele,Cambo-ritum ^ gu courbe . C'est le nomprimitif de Cliambourg (Indre-et-Loire), deGhambord (Loir-et-Gher), et peut-tre encorede deux localits homonymes situes enFrance 'K

    6^ Un nom de lieu frquent dans la Gauleromaine est Condate confluent ; il y avait unCondate en Grande-Bretagne sous l'empire

    1. Holder, Altceltischer Sprachschatz, t. II, col. 518-521.^

    2. C'est la leon de deux manuscrits que citent Par-they et Pinder dans leur dition de l'itinraire d'Antonin,474, 7, note. Cette leon a t adopte par Kiepert, Atlasanfiquus, XI, et par Holder, Altceltischer Sprachschatz,

    t. I, col. 715.

    3. Holder, ibid., col. 715, 716 ; Longnon, Atlas histo-rique, p. 172.

  • 46 LES GAULOIS EN GRANDE-BRETAGNE

    romain : c'est, pense-t-on, aujourd'hui, Norlh-wich, au comt de Ghester K

    6^ Le second terme diu^us a forteresse , sifrquent dans la Gaule romaine ^, se retrouveen Grande-Bretagne, sous l'empire romain, dansle compos Lacto-darus, aujourd'hui Towces-ter, comt de Northampton ^.

    7^ Briua pont , expression si connue deceux qui ont tudi la gographie de la Gauleromaine^, est le second terme du composDuro-brivae ponts de la forteresse , nom dedeux stations sur les voies romaines de Grande-Bretagne. Elles appartiennent, l'une l'itin-

    raire de Londres Douvres, l'autre celui quide Londres menait au rempart d'Hadrien,uallum Hadriani. La premire parat treRochester, comt de Kent, la seconde Castor,comt de Northampton ^.

    1. B.o\der, Altceltischer Sprachschatz,t. I, col. 1902-1904;Itinraire d'Antonin, dition Parthey et Pinder, 469, 1 ;482, 3 ; cf. Whitley Stokes, Urkeltischer Sprachschatz,p. 139.

    2. Holder, Altceltischer Sprachschatz, t. I, col. 1383.3. Holder, ihid., t. Il, col. 117. Kiepert, Atlas antlquus

    croit que c'est Kinderton ; cf. Whitley Stokes, Urkelti-scher Sprachschatz, p. i50.

    4. Holder, Altceltischer Sprachschatz, t. I, col. 610-611.5. Holder, ibid., t. I, col. 1384 ; Rhys, Early Britain,

  • 8'' Uernemelum, sur Titinraire d'York Londres, est le nominatif-accusatif singulierd'un nom de lieu qui apparat Tablatif plu-riel en Gaule dans un pome de F'ortunat :

    Xomine Uernemetis uoluit uocitare uetustasQuofI quasi fanum ing-ens ^allicalingua refert '.

    Vernantes (Maine-et-Loire), appel Vernimp-tas l'poque carolingienne '^^ est un antiqueVernemeta.

    9^ Le thme gaulois manda^

    qui est l'lmentfondamental du nom des Mandubii^ peuplegaulois si connu grce au sige par Jules Csard'Alesia, leur forteresse, se retrouve aussi en

    Gaule dans le driv manduo qui forme lesecond terme du nom de peuple Ueromanduiet du nom d'homme Epo-mandiios, conservpar le nom de lieu Epo-manduo-durum ^. Ce

    S*' dition, p. 300; cf. Whitley Stokes, Urkeltischer Sprach-schatz, p. 184.

    1. Caimina, 1. I, c. 9, vers 9-10; dition de FrdricLo, p. 42. Cf. Itinraire d'Antonin, dition Partliey etPinder, 477, 5.

    2. Longnon, Atlas historique de la France, p. 297, col. 2 ;cf. C. Port, Dictionnaire historique, gographique et bio-graphique de Maine-et-Loire, t. III, p. 691.

    3. Ejiain.uiduoduruni dans Vhinraire d'Antonia, ditionParthey et Pinder, 386, 4 ; cf. Holdcr, AltceltischerSprachschatz, t. I, col. 1446.

  • 48 LES GAULOIS EN GRANDE-BRETAGNE

    thme mandu- apparat en Grande-Bretagnedans le compos Mandu-essedum ^ nom d'unestation sur l'itinraire allant du rempartd'Hadrien, uallum Hadriani^ Rutupiaeaujourd'hui Richborough, dans le comt deKent ; Mandu-essedum parat tre aujourd'huiMancesler, dans le comt de Kent ^

    iO^Secfo-dunum est, au temps de l'empire,romain, le nom de la ville de Rodez (Aveyron).On doit corriger en Segodunum le Segedunumde l'itinraire d'Antonin, aujourd'hui Walls-end au comt de Northumberland. Un autreSegodunum se trouvait dans la partie de laGermanie jadis occupe par les Gaulois prsdu Main ; son emplacement est aujourd'huicompris dans le royaume de Bavire ^.

    11** Egalement l'est du Rhin, les Gauloisont possd une ville appele Cambo-dunum^(( forteresse courbe ; c'est aujourd'hui Kemp-ten, en Bavire. Il y avait en Grande-Bretagne,sous l'empire romain, un autre Cambo-dunum^

    4. Itinraire d'Antonin, dition Parthey et Pinder, 470,3 ; Holder, Altcelthcher Sprachschatz, t. I, col. 405.

    2. Ilolder, Altceltischer Sprachschatz, t. II, col. 1446^4447.

  • Li:s (1 AL LOIS EN GRANDE-BRETAGNE 49

    son emplacement tait situ dans le comld'York.

    12^ LesGaLdois avaient une divinit mascu-line appele A loiinos ou, avec l'orthographeromaine, Alaiinus^ que sur le continent gauloison trouve identifie Mercure par une inscrip-

    tion de Mannheim sur la rive droite du Rhin,dans le grand-duch de Bade". Au fminin A /ou-nae ou Alaunae, tait le nom de desses adoresaux environs de Salzburg\ Vdnlique luuauu

    m

    dans Lin pays gaulois le Noricum . Ce nom de divi-nits tait aussi lenom d'un peuple : les Alauni^mieux Alouni^ taient une population du Nori-cum. Gomme nom de lieu ce vocable fut porten Gaule : Alleaume-les-Valognes (Manche)et AUonne (Sarthe) sont d'antiques Alauna^.Les Gaulois introduisirent ce nom en Grande-Bretagne. Le petit fleuve Ain, dans le comt deNorthumberland, s'appelle Alaunos chezPlolme. Ce gographe nomme Alauna uneville situe l'embouchure du mme cours d'eau

    1. lloXev ^ Altceltlscher Sprachschatz, t. I. col. 714-715.

    2. Holder, ibidem, t. I, col. 78.

    3. Holder, ibidem, t. I, col. 107.

    4. Longnon, Atlas historique de la France, p. 25, 165;

    Ilolder, Altceltischer Sprachschatz, t. I, col. 76.

    Les Druides. 4

  • SO LES GAULOIS EN GRANDE-BRETAGNE

    et appele aujourd'hui Alnwick ^ Une autre villeappele Alauna parat avoir t situe enEcosse au nord du rempart d'Antonin, uallumAiitonini 2, dans une partie de la Grande-Bretagne dont les Romains n'ont jamais pufaire la conqute, mais dont les Gaulois s'taientempars au temps de leur grande puissance.

    1. llolev ^ Altceltischer Sprachschatz, t. I, col. 76, 77.2. Holder, ibidem, t. I, col. 76 ; cf. Kiepert, Atlas

    antiquiis, Tab. XI.

  • Chapitre VIII

    Preuves li/)(/iiis/i(/iies de Li conqute de laGrniule-lh'ehKjiiepur les (inulois. Quatrimepartie. Le roi belge et gaulois Commios enGrande-Bretagne. Les Belges sont desGaulois.

    Un fait dont nous n'avons rien dit jusqu'icisuffirait pour dmontrer que la langue parleen Grande-Bretagne en l'an 5o avant notrere tait identique la langue dont les Gauloisfaisaient usage la mme date. Un passage duDe bello gallico nous montre Commios, roi desAtrebates de Gaule, envoy par Jules Csar enGrande-Bretagne. Cet ambassadeur expose auxhabitants, dans un discours, oratoris modo^ lescommunications que le gnral romain l'avaitcharg de transmettre. Jules Csar ne dit pasqu'en cette circonstance Commios ait eu besoind'un interprte ^ quoique dans d'autres circon-stances il parle des interprtes employs par

    1. Commius Atrebas, queni supra demonstraiieram aCaesare in Britanniam praemissum. Hune illi e naui egres-sum, cum ad cos oratoris modo Caesaris mandata defer-ret De bello gallico, 1. IV, c. 27, 2, 3.

  • 52 LE ROI COMMIOS

    lui-mme ^ et par son lieutenant TituriusSabinus -.

    On dira peut-tre que Commios tait belgeet que, suivant Jules Csar, il parat y avoir euentre la langue et les institutions politiques desBelges et celles des habitants de la Gaule cel-tique, spars d'eux par la Seine et la Marne,autant de diffrence qu^entre la langue et lesinstitutions des habitants de la Gaule celtiqueet celles des Aquitains ^. C'est l'assertiond'un homme qui ne connaissait pas plus lalangue des Belges que celle des autres Gaulois.Les Ibres d'Aquitaine parlaient une langue quin'tait pas indo-europenne et qui n'avaitavec les langues celtiques aucune affmit.

    Entre la langue des Belges et celles des autres

    Gaulois, il ne pouvait exister que des diff-

    1. (( Deuiciacum ad se uocari iubet, cotidianis interpre-tibus remotis, perC. Valerium Troucillum... cum eo conlo-quitur. De bello gallico, 1. I, c. 19, 3.

    2. u Quintus Titurius Sabinus, cum procul Ambiorigemsuos cohortantem conspexisset, interpretem sum GnaeumPompeium ad eum mittit. De bello gallico, 1. V, c. 36, 1-

    3. Gallia est omnis diuisa in partes trs, quarum unamincolunt Belg-ae, aliam Aquitani, tertiam qui ipsorum lin-gua Geltae nostra Galli ap'pellantur. Hi omnes lingua, insti-tutis, legibus inter se differunt. De bello gallico, 1. I,cl, 1,2.

  • LES BELGES SONT GAULOIS 53

    rences dialectales insignifiantes ; nous ne pou-vons les saisir *. Entre eux, la seule diffrenceimportante consistait dans les institutions poli-tiques ; au nord-est de la Seine et de la Marne,la royaut subsistait au temps o Jules Csarconquit la partie de la Gaule situe l'ouestdu Rhin (58-50 avant J. -G.) ; au sud-ouest dela Seine et de la Marne, les monarchies taientalors, quoique depuis peu de temps, rempla-ces par des rpubliques. Du reste, Jules Gsaraprs avoir, au dbut de son livre P^, distingules Belges des Galli ou Gaulois, a supprimcette distinction dans la dernire partie de sonouvrage.

    Ainsi, par exemple, dans son livre V, ilqualifie de Gaulois les Eburons, que prcdem-ment il avait classs parmi les Belges - ; lesCarnutes ont tu le roi que Jules Gsar leuravait impos ^ ; de concert avec les Treueri^ ilsont organis un soulvement gnral de laGaule, et les burons, tant Gaulois, n'ont pu

    1. Strabon est moins affirma tif que Jules Csar. Suivantlui, il ne faut pas dire que les KsXra; soient tous oaoyXw-r-TOj;, mais svi'ou; [xapv TrapaXX-CTOvxa; TaT yXoSiTat, 1. IV,c. 1, 1, dition Didot, p. 176, 1. 28, 29.

    2. De bello gallico, 1. II, c. 4, 10.3. De bello gallico, 1. V, c. 25.

  • 54 LES BELGES SONT GAULOIS

    opposer aux Gaulois un refus K Le nom des

    Belges apparat de temps en temps dans leslivres I IV du De bello gallico ; partirdu cinquime inclus qui raconte les v-nements di Tanne 54 avant notre re,Csar, en Gaule depuis quatre ans, connatmieux le pays : les peuples du Belgium sontGaulois, Glli, comme ceux qui habitent ausud-ouest del Seine et de la Marne ; de Belgaeil n'est plus.question. Les Belgae reparaissentchez Hirtius, esclave des premires lignescrites par son chef et plus royaliste que le

    roi , comme c'est Fhabitude des subordonns.Ainsi les conqurants venus en Grande-Bre-

    tagne taient Gaulois, comme nous l'avons dit.

    La langue que parlaient les Gaulois deGrande-Bretagne ne pouvait diffrer de celledes Gaulois continentaux que par de lgresvarits dialectales.

    Les bras de mer qui les sparait de leurs

    compatriotes tablis au sud de la Manchen'avait pas d produire plus d'effet linguis-tique que l'ocan Atlantique qui spare des

    1. Non facile Gallos Gallis negare potuisse. De bellogallico, 1. V, c. 27, 6. Sur les Neruii, belges au 1. II, c. 4,

    8, cf. 1. V, c. 45, 2, 4, o un Neruius devient Gallus.

  • ij:s (.mi.ois i;.\ i.i; \M)i:-iuii:rA(iM-: riS

    Iles Britanniques les KlaLs-Unis d'Amrique.Je reois VAmerican Journal of Philology^qui parat Baltimore, et la Classical Revieu\dont l'diteur habite Londres, et je ne m'aper-ois pas que la langue de l'un diffre de cellede l'autre. A Paris, on comprend sans diffi-cult la langue que parlent les Franais de laGuadeloupe et de la Martinique, mme ceuxde la Nouvelle-Orlans et du Canada qui ontdepuis longtemps chang de nationalit.

    Evidemment les Gaulois dominant enGrande-Bretagne n'avaient ni extermin niexpuls les populations qui les avaient prc-ds dans le pays. Il y avait encore en Grande-Bretagne, au milieu du i^^ sicle avant notrere, d'importants dbris de la populationgidlique sur laquelle les Gaulois avaientconquis cette le, et mme de la populationantrieure l'arrive des premiers Indo-Europens, c'est--dire des Gidels; mais cettepopulation avait eu rapidement le sort qu'onteu sur le continent les Gaulois aprs la con-qute romaine ^ ; comme les Gidels, elle s'taitassimile aux conqurants.

    1. Jules Csar est assez mal inform, cependant on nepeut rejeter compltement son tmoignage: Britanniae

  • 56 LliS GAULOIS EN GRANDE-URETAGNE

    pars interior ab his incolitur, quos natos in insula ipsimemoria proditum dicunt, marituma pars ab iis qui prae-dae ac belli inferendi causa ex Belgio transierunt (quiomnes fere iis nominibus civitatum appellantur, quibusorti ex ciuitaLibus eo peruenerunl) et bello inlato ibi per-manserunt atque agros colre coeperunt. De bello gallico,1. V, c. 12, 1, 2. Jules Csar connat fort mal la partie dela Grande-Bretag-ne qui s'loigne de la Manche et il setrompe quand il avance que les conqurants belges ontintroduit l'agriculture en Grande-Bretagne.

  • Chapitre IX

    Les Druides dans la Gaule indpendante^pendant la guerre faitepar Jules Csar.

    La conqute de la Grande-Bretagne par lesGaulois n'est pas seulement affirme par JulesCsar, elle rsulte des preuves runies dansnos chapitres V VIII. Les Druides gidelsde Grande-Bretagne parvinrent, malgr ladfaite de leurs compatriotes, se faire accepter

    comme savants et comme prtres par les vain-queurs. Les Juifs et les Chrtiens ont un livre,la Bible ; les Mahomtans ont un livre, leCoran; les Druides avaient aussi un livre, seu-lement il n'tait pas crit, c'tait un recueil devers, et ce recueil avait un tel dveloppementque pour arriver le bien savoir, peut-tre lecomprendre plus ou moins, il fallait vingt ansd'tude un certainnombre d'lves', seulement

    1. Multi in disciplinam conueniunt et a parentibus-propiiiquisque mittuntur. Magnum ibi numernm uersuumediscere dicunlur. Itaque annos nonnulli uicenos in disci-plina permanent, neque fas esse existimant ea litterismandare. De bello galUco, 1. VI, c. 14. 2, 3.

  • 58 LES DRUIDES SUR LE CONTINENT

    nous ignorons si ces lves taient les meil-leurs ou les moins intelligents. Peu importe.

    Le livre des Druides avait une puissanceanalogue celle de la Bible et du Coran.Gomme la Bible et le Coran, il s'est imposaux populations.

    Jules Csar, pendant la guerre des Gaules,eut le talent de se mnager l'appui du druideDeuiciacos dont il vante le zle pour les intrtsdu peuple romain, la bonne volont Tgarddu conqurant lui-mme ^ En effet, Deuiciacostenait sincrement Falliance des Aedui^ sescompatriotes, avec les Romains^.

    Jules Csar ne dit pas que Deuiciacos ftdruide, nous le savons par Cicron qui avaitconnu Rome FAuen Deuiciacos ^, envoy en

    1. Summum in populum Romanum studium, summamin se voluntatem. De hello gallico, 1. I, c. 19, 2. Holder,Altceltischer Sprachschatz, l. I, col. 1260-1262, a runi lestextes du De bello gallico, concernant Deuiciacos.

    2. (( Aeduos, fratres consanguineosque sepe numro asenatu appellatos. De hello gallico, 1. I, c. 33, 2. Cf.Cicron, Ad Atticum, I, 19, 2. (60 ans avant J.-C). Sousl'empire romain, les Aedui eurent le titre de foederati.

    3. (( In Gallia druidae sunt e quibus ipse DeuiciacumAeduum... cognovi, qui et naturae rationem, quam cpuaio-Xoyi'av Graeci appellant, notam esse sibi profitebatur, et par-tira auguriis parlim coniectura, quae essent futura, dice-bat. De divinatione, I, 41, 90.

  • LES DRUIDES SLR LE COMLNENT 59

    ambassade prs du Snat par ses concitoyens *.En consquence de ses bonnes relations avec

    Deuicicos, on vit vers la fin de la guerre, enTan 52 avant notre re, Jules Csar, s'rigeanten juge entre les deux magistrats suprmes lusconcurremment par les Aediii^ dclarer valable

    celle des deux lections qui avait t faite avecle concours des prtres ^, videmment desDruides, comme un texte pique irlandais nousen montre intervenant au nombre de quatre dansl'lection d'un roi suprme d'Irlande '\ Labonne volont du druide Deuiciacos et lapuissance des Druides facilita les succs deJules Csar en Gaule.

    1. u Deuiciacusauxilii petendi causa Romam ad senatumprofectus. De bello gallico, 1. VI, c. 12, 5.

    2. (c Conuictolitauem, qui per sacerdotes more civitatisintermissis magistratibus esset creatus, potestateiii opti-nere iussit. De bello gallico, 1. VII, c. 33, 3.

    3. Serjlige Conculainn, 23. Windisch, Irische Texte,t. I, p. 213.

  • Chapitre X

    Les Druides en Gaule sous Vempire romain.

    Quand l'empereur Auguste eut organis enGaule le gouvernement romain, tout changea.La prtention des magistrats envoys deRome enGaule fut de transformer les Gaulois enRomains et ils y russirent. La preuve en estnotre langue qui est un dialecte du latin. Surnotre sol, cinq siclesde domination romaine ontsuffi pour assurer la langue latine un triompheque n'ont pu lui obtenir en Grande-Bretagneenviron trois sicles et demi d'une occupationincomplte et alternativement interrompue parles rvoltes des sujets ou trouble par les incur-sions des peuples voisins du territoire romain,par les incursions des Piets et des Irlandais.

    Les Druides, par leur enseignement indpen-dant de la tradition grco-romaine et par leurjuridiction arbitrale, taient le principal obs-tacle la romanisation de la Gaule. La luttecontre eux apparat dj sous Auguste. Le1^^ aot de l'an 12 avant J.-G., Drusus runit

  • LES DRUIDES SUR LE CONTLNENT 61

    dans la ville de Lyon, prs de l'autel de Romeet d'Auguste, une assemble des dputs de laGaule ' ; cette assemble se tint depuis tousles ans la mme date et fut une des institu-tions principales de l'empire romain ~. C'taitune concurrence redoutable l'assembleannuelle runie par les Druides aux environsde Chartres et dans laquelle, au temps del'indpendance gauloise, ils jugeaient les procsque la bonne volont des parties soumettait leur arbitrage ^. Si on prenait la lettre letexte de Jules Csar, tous les procs auraientt jugs par les Druides. Il y a l unevidente exagration. Les Commentaires deJules Csar mentionnent bien des contestationsentre Gaulois et ne donnent aucun exemplede jugement, ou, plus exactement, de sentencearbitrale qui ait t l'uvre des Druides.

    1. Voir les textes runis par M. Hirschfeld, Corpus ins-criptionum latinarum, t. XIII, p. 237 ; cf. Ernest Desjar-dins, Gographie historique... de la Gaule romaine, t. III,p. 186 et suivantes.

    2. Mommsen, Roemische Geschichte, t. V, 2 dition,p. 84-89.

    3. Hi certo anni tempore in fnibus Carnutum, quaeregio totius Galliae mdia habetur, considunt in lococonse-crato. Hue omnes, qui controuersias habent, conueniunteorumque decretis iudiciisque parent. De bello gallico,1. VI, c. 13, 10. Cf. Mommsen, Roemische Geschichte,t. V, 2 dition, p. 95, 96.

  • 62 LES DRUIDES SUR LE CONTINENT

    Mais cette juridiction arbitrale indpendantedu gouvernement romain ne pouvait, quellequ'en ft l'importance, se concilier avec la

    conqute. Les magistrats impriaux ne pou-vaient pas l'admettre.

    Les plus importants des procs soumis l'arbitrage des Druides taient ceux que descrimes, surtout des meurtres, faisaient entre-prendre 1. Le rle des Druides comme arbitrestait de fixer le montant, de la composition quele coupable serait tenu de payer, faute de quoiil devait subir la loi du talion, moins qu'iln'et l'heureuse chance de s'y soustraire par lafuite. Mais la loi romaine n'admettait ni le droitpour les familles de tuer les meurtriers de leursmembres, ni le droit pour le meurtrier d'chap-per la peine capitale en payant la familledu mort la composition fixe par arbitre con-formment la coutume locale.La juridiction sur les sujets de Rome qui

    n'taient pas citoyens appartenait aux lgatsimpriaux. Quant aux citoyens romains,Auguste leur avait interdit la religion des

    Druides ~, par consquent aussi les accessoires

    1. Si quod admissum facinus, si caedes facta. Debello galliro^ 1. VI, c. 13, y.

    2. Druidarum religionem... tantiim ciuibus ab Augusteinterdictam . Sutone, Divus Claudius, 2'i.

  • LES DRUIDES SLIl M: (OM INENT 63

    de cette religion, parmi lesquels tait comprisl'arbitrage druidique. Les Gaulois qui n'avaientpas obtenu le droit de cit pouvaient alorsconserver leur ancien culte, mais n'avaientpas plus d'indpendance que les citoyensromains quand il s'agissait de procs criminels.

    S'ils s'taient obstins porter leurs procscriminels devant la juridiction arbitrale exercepar les Druides, une des consquences aurait tla condamnation mort et l'excution deshommes coupables de meurtre ou de vol et quin'auraient pu payer la composition fixe parla sentence arbitrale. Ces hommes auraient tmis mort par le feu et leurs supplices auraientt considrs comme un sacrifice agrable auxdieux K Les sacrifices humains sont d'un usagregnral un certain degr de civilisation ^.

    \.

  • 64 LES DRUIDES SUR LE CONTINENT

    Mais un snatus-consulte de l'anne 97 avantJ.-G. avait interdit les sacrifices humains *.Une autre loi de la rpublique romaine, la lexCornelia de sicariis, punissait le meurtre dela peine de mort ^ Cette loi aurait t appliqueaux Druides sous Fempire romain, s'ils avaientos faire prir par le feu, non seulement des

    innocents, mais des coupables condamns pareux mort faute d'avoir pu payer la composi-tion.

    Il y avait donc, au point de vue du droit cri-minel, incompatibilit entre le druidisme et lacivilisation romaine. Ce n'tait pas tout : lesDruides taient professeurs, ils enseignaient lathologie et toutes les autres sciences : astrono-

    mie, gographie, sciences naturelles ^, his-

    1. DCLVII demum anno Urbis, Cn. Cornelio Lentulo,P. Licinio Casso consulibus, senatus consultum factum est,ne homo immolaretur. Pline, 1. XXX, 12.

    2. Digeste, 1. XLVIII, titre 8, loi 1. Lege Cornelia desicariis et ueneficiis tenetur qui hominem occident. Enl'an 66 avant notre re cette loi est cite par Cicron, ProCluentio, XX, 55. On l'attribue Sylla.

    3. In primis hoc uolunt persuadere, non interire ani-mas, sed ab aliis post mortem transire ad alios... Multapraeterea de sideribus atque eorum motu, de mundi acterrarum magnitudine, de rerum natura , de deorumimmortalium ui ac potestate disputant et iuuentuti tra-

  • LES DRUIDES SUR LE CONTINENT 6.")

    toire ^ Cet enseignement n'tait pas celui quedonnaient aux jeunes Romains les pdagoguesgrecs et leurs lves.

    Prenons comme exemple la mythologie. JulesCsar pose en principe l'identit du panthonceltique et du panthon romain, saufcette seulediffrence que, chez les Gaulois, Mercure, dit-il, tenaitle premier rang et qu'aprs lui venaientApollon, Mars, Jupiter et Minerve '. Mais cesnoms divins taient inconnus aux Gaulois. Il yavait videmment autant de diffrence eijtre lamythologie celtique et celle des Romains qu'entre

    dunt. De hello gallico,\. VI, c. 14, 5, 6; cf. Mla, 1. III,c. 2, 19; Mommsen, Roemische Geschichte, t. V, 2^ di-tion, p. 102.

    1.

  • 66 LES DRUIDES SUR LE CONTINENT

    celle-ci et celle des Germains, qu'entre lamythologie romaine primitive et celle desGrecs avant le triomphe de la littrature desGrecs et par consquent de leur mythologie Rome, triomphe d'o vint, par exemple, laconfusion de Mars avec Ares, de Diane avecArlmis, de Mercure avec Herms.Du moment o l'on admettaitla ralit objec-

    tive de conceptions mythologiques subjectives,il fallait arriver une srie d'identifications qui

    en Gaule commence chez Jules Csar et quiaprs lui est devenue la loi du monde gallo-romain. Mars, identifi avec le dieu grec Ares,l'a t aussi avec le dieu gaulois Toutatis ;Minerve, confondue avec la desse grecqueAthna, l'a t aussi aussi avec la desse gau-loise Belisama^

    ^etc. Mais, comme ces identifi-

    cations taient arbitraires, elles ont pu trecontradictoires ; ainsi Esus et Toutatis sont

    chacun, tantt un Mars, tantt un Mercure 2,

    les Suleuiae sont des lunones dans une inscrip-tion, des Mineruae dans une autre ^

    1. Holder, Allceltischer Sprachschatz, t. I, col. 386.2. Voyez les textes runis par Holder, l'article Esus^

    t. I, col. 1479, Varlicle Belisama t. I, col. 386, aux articlesTeutates, Toutalis, Totatis, Tutatis, t. II, col. 1805, 1806,

    1895, 1896, 1897, 2022.

    3. Holder, ibidem, t. H, col. 1664.

  • LES DRUIDES SUR LE CONTLNENT 67

    Enfin, laissant de ct les croyance religieuses,passons l'aspect politique des questions. Les

    Gaulois devenus Romains devaient tre dsignspar les trois dnominations usites Rome,prnom, gentilice et surnom : ainsi Trogostait devenu Cn. Pompeius Trogus * ; Caniu-Uilos, G. Valerius Gamulatus ^ ; Licinos^ G.Iulius Licinus -^ ; Sagro-uiros^ G. (?) IuliusSacrouir ^. Les Burros^ prirent des gentilicesdivers, G. Yarius Burrus, L. Valerius Bur-rus, L. Antistius Burrus ^. Le nom d'hommegaulois fut par l rduit Ttat de surnom.Les noms des dieux gaulois eurent le mme sort,de l les ddicaces deo Apollini Boruoni ^

    et Apollini Granno ^\ qui des noms de deuxdivinits gauloises d'eaux thermales font desimples surnoms d'une divinit grco-romaine.Tel a t aussi sous l'empire romain le nomdu dieu gaulois de la lumire, Belenos ouBelinos^ qui devient un surnom du mme Apol-lon dans les ddicaces Apollini Beleno ^.

    1. Holder, Altceltischer Sprachsahctz, t. II, col. 1967, 1968.2. Holder, ibidem, t. I, col. 724.

    3. Holder, ibidem, t. II, col. 209.4. Holder, ibidem, t. H, col. 1282.

    o. Holder, ibidem, t. I, col. 642.

    6. Holder, ibidem, t. I, col. 494.

    7. Holder, ibidem, t. I, col. 2037-2039.

    8. Holder, ibidem, 3. I, col. 71, 372.

  • 68 LES DRUIDES SUR LE CONTINENT

    On se tromperait grandement si l'on croyaitqu'il y eut entre le dieu gaulois Belenos d'unepart, et les dieux gaulois Grannos et Boruod'autre part, une analogie quelconque, mmesuperficielle.

    Les Gaulois avaient un dieu, Moccos^ c'est--dire (( cochon, et un dieu ourson, Artaios;pour les romaniser, on a imagin de dire Mercu-rius Moccus \ Mercurius Artaios - ; il ne s'en-suit pas del que les Gaulois considrassentle cochon et le petit ours comme la mme espced'animaux. Le dieu Maponus jeune fils n'avait probablement de commun avec Apollonque la jeunesse ternelle ; cela a suffi pour faireimaginer un Apollo Maponus ^. Il n'y avaitpas du reste plus de ressemblance entre le dieuMaponos et Apollon qu'entre Cn. PompeiusTrogus et le grand Pompe, Cn, PompeiusMagnus^ ou qu'entre C. Iulius Licinus et G.Iulius Qaesar^ le conqurant de la Gaule. Laconfusion des dieux gaulois avec les dieux del'empire romain est un des procds par l'em-

    1. YioldeY, Altceltischer Sprachschatz, t. II, col. 603.

    2. Ilolder, ibid., t. I, col. 224.

    3. Holder, ibid., t. II, col. 414; cf. Roscher, Ausfiihr-

    liches Lexicon der griechischen und rmischen Mytho-logie, t. I, col. 442.

  • LES DRUIDES SLR LE CONTINENT 69

    ploi desquels s'est accomplie rassimilationdes populations gauloises vaincues avec lesRomains conqurants.

    Cepen dant la mythologie enseigne par lesDruides et dont la plus vieille littrature piquede l'Irlande nous conserve des dbris tait vi-demment tout autre que la mythologie grco-romaine. Les doctrines des Druides, en faitd'astronomie, de sciences nalurelles, de gogra-phie et d'histoire, devaient aussi diffrer beau-coup de l'enseignement donn tant Rome qu'enGrce aux jeunes Romains.En tous cas, les lves des Druides sortaient

    de l'cole sans rien savoir ni de la languelatine, ni de la langue grecque.

    Nous avons dj parl de rassemble poli-tique annuelle de Lyon cre en l'an 12 avantnotre re et oppose l'assemble galementpolitique que les Druides tenaient chaqueanne aux environs de Chartres. Vers le mmetemps ou peu aprs les Romains opposrent l'enseignement celtique des Druides un ensei-gnement rival dont le sige fut d'abord Autun,Augusto-dununi fort d'Auguste , a de l'em-pereur Auguste , construit pour remplacerla vieille forteresse gauloise de Bibrate, capi-

  • 70 LES DRUIDES SUR LE CONTINENT

    taie des Aedui. Cette rivalit pdagogiqueamena une rvolte en l'an 21 de notre re. Unpassage de Tacite nous apprend deux faitscorrlatifs : l'un est l'existence de l'cole d'Au-tun o les jeunes gens des plus nobles famillesde la Gaule recevaient, probablement malgreux, l'enseignement grco-romain ; l'autre fait,consquence du premier, est l'occupation d'Au-tun parl'Eduen lulius Sagrouiros^ le Sacrouirdes textes latins, auquel le gouvernementimprial avait donn le titre de citoyenromain,mais qui considrait ce titre, soi-disant glo-rieux, comme un joug humiliant. Les jeuneslves de l'cole d'Autun, aussi mcontentsque lui, se laissrent sans peineentraner dansl'arme del rvolte, si nous parlonscommelesRomains, ou mieux, comme pensaient les Gau-lois, dans les rangs des amis de la libert etde l'antique indpendance ^

    Les lves en trs grande majorit sontpresque toujours les ennemis des matres.

    4. Augustodunum, caput g-entis, armatis cohortibusSacrouir occiipauerat, ut nobilissimam Galliarum subolemliberalibus studiis ibi operatam, et eo pignore parentespropinquosque eorum adiungeret, simul arma occultefabricata iuuentuti dispersit. Tacite, Ah excess.u Augustin1. III, c. 43.

  • LES DRUIDES SLR LE CONTINENT 71

    C'est une loi psychologique. Les conventionnelsqui ont fait conduire tant de prtres la guil-lotine taient tous lves du clerg, les lvesde l'Universit im[)riale se montrrent engnral franchement royalistes en 1814, et en1830 les lves de l'Universit royale applau-dirent la chute de Charles X. Notreennemi, c'est notre matre , a dit le grandfabuliste franais K

    La rvolte de Sacrouir fut rprime. Elle eutpour principal rsultat un snatus-consultepropos par l'empereur romain Tibre et quidclara les Druides supprims^. Tibre mouruten Tan 37 de notre re. Claude, son secondsuccesseur (41-54), renouvela cette prescriptionet proclama la complte abolition de la reli-gion des Druides'^. Le but de cette mesure nou-

    1. La Fontaine, Fables, 1. VI, fable 8.2. Tiberii principatus sustulit Druidas eorum et hoc

    ^'enus uatum medicorumque persenatusconsultum. Pline,1. XXX, i; 13. Mommsen, Roemische Geschichte^i. V, 2*^ di-tion, p. 90. Duruy, Histoire des Romains, t. VI, p. 675,suppose que le snatus-consulte dont il s'agit ici est celuique mentionne le Digeste, 1. XLVIII, t. 8, 1. 13. '( Ex sena-tus consulto eius legis poena damnari iubetur qui malasacrificia fecerit, habuerit. Une partie seulement desdispositions du snatus-consulte serait mentionne ici.

    3. Druidarum religionem apud Gallos dirae immanitatis,tantum civibus sub Augusto interdictam, penitus abole-uit. Sutone, Diuus Claudius, 25.

  • 72 LES DRUIDES SUR LE CONTINENT

    velle tait, en confirmant la dcision de Tibre,de l'tendre la Grande-Bretagne dont laconqute avait t commence en l'anne 42par A. Plautius. L'empereur Claude en per-sonne y avait fait un sjour de seize jours ; enconsquence, ce fut lui Claude, et non Plau-tius, qui obtint les honneurs du triomphe K

    En Gaule, l'effet immdiat de la suppres-sion officielle du druidisme par Tibre etde son abolition galement officielle parClaude peut tre compar au rsultat de larvocation de l'dit de Nantes prononce parLouis XIV en 1685. Le protestantisme,supprim ou aboli, comme on voudra, par legrand roi, persista : des temples dmolis lespasteurs gagnrent le dsert ^ ; ce fut le termeconsacr. Rfugis dans des lieux inhabits oils runissaient autour d'eux leurs troupeaux,ils chappaient souvent par l aux violentesmesures de rpression prescrites par le souve-rain franais.

    1. Dion Cassius, 1. LX, c. 19-23 ; Tacite, Agricola, c. 13;cf. Mommsen, Roemische Geschichte, t. V, 2'^ dition, p. 159et suivantes.

    2. Henri Martin, Histoire de France, 4 dition, t. XV,p. 441 ; Charles Coquerel a publi en 1841 YHistoire desglises du dsert ; en 1842 a paru VHistoire des pasteurs dudsert, par Nap. Peyrat.

  • LES DRUIDES SLR LE CONLNEN 73

    Un peu plus de seize sicles plus tt lesDruides en Gaule eurent recours au mmeprocd. Depuis longtemps, respectant le sna-tus-consulte de l'anne 97 avant J.-C, et lalex Cornelia de sicariis^ ils ne brlaient plus niles coupables condamns par eux, ni surtoutles innocents, ils se bornaient tirer quelquesgouttes de sang aux hommes de bonne volontqui s'offraient eux comme victimes apparentes.Mais ce chanfjement aux usao^es rituels nesuffisait pas aux magistrats romains. LesDruides durent aller chercher l'impunit dansdes cavernes au fond des forts '. C'tait ensecret (c/am), en se cachant dans les cavernesou les bois qu'ils donnaient leur enseignementsi vari, et c'tait l que des lves appartenantaux familles les plus nobles de la Gaule etrefusant l'enseignement grco-romain tu-diaient les doctrines proscrites des Druides "^

    1. ... nemora alla remotis.

    Incolitis siluis.

    Lucain, Pharsale, 1. I, vers 453, 454. Ces vers ont tcrits entre Fan 60 et l'an 65 de notre re. Martin Schanz,Geschichte der rmischen Litteratur, 2^ partie, 2^ dition,

    p. 85.

    2. Docent multa nobilissimos gentis clam et diu uicenisannis aut in specu aut in abditis saltibus. Mla, III, 2,19.

  • 74 LES DRUIDES SUR LE CONTINENT

    Mla a crit cela peu aprs le triomphe deClaude qui eut lieu en Tan 43 de notre re ^

    Quelle diffrence entre cette situation desDruides et celle que Jules Csar avait dcritemoins d'un sicle avant la date oii crivaitMla ?On ne s'tonnera pas de voir ensuite les

    Druides montrer avec clat leur haine pour lesRomains. Ils le firent hors de Gaule quar^d, enl'an 58 de notre re, Suetonius Paulinus, la tte d'une arme romaine, alla conqurirl'le d'Anglesey. x\utour des troupes celtiquesopposes aux Romains, on voyait des Druidesqui, les mains leves vers le ciel, adressaient leurs dieux des prires accompagnes d'im-prcations contre les soldats romains. Quandceux-ci commencrent l'attaque, les Druidesrestrent immobiles comme des statues, rece-vant des blessures sans fuir ni