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UNIVERSITE CHEIKH ANTA DIOP DE DAKAR FACULTE DES SCIENCES JURIDIQUES ET POLITIQUES COURS DE DROIT ECONOMIQUE PROFESSEUR MOUSSA SAMB AGREGE DES FACULTES DE DROIT Parmi les cinq (5) objectifs créés par le Traité de l’UEMOA (article 4), figure en première place celui du « renforcement de la compétitivité des activités économiques et financières des Etats membres dans le cadre d’un marché ouvert et concurrentiel et d’un environnement juridique rationalisé et harmonisé ; » ce qui devra conduire à « créer entre les Etats membres un marché commun basé sur la libre circulation des personnes, des biens, des services, des capitaux et le droit d’établissement des personnes exerçant une activité indépendante ou salariée, ainsi que sur un tarif extérieur commun et une politique commerciale commune. » Afin d’atteindre efficacement les objectifs ci-dessus cités, il a été adopté en application des dispositions du Traité, une « législation communautaire sur la concurrence » composée de Règlements et de Directives. La législation communautaire sur la concurrence a instauré des relations de coopération entre la Commission de l’UEMOA, organe de décision de l’Union et les Etats membres à travers les autorités nationales de la concurrence, et la Cour de justice. L’on examinera quelques propos introductifs généraux sur le droit économique (Titre I), avant de s’intéresser au droit de la concurrence dans le cadre de l’UEMOA (Titre II).

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UNIVERSITE CHEIKH ANTA DIOP DE DAKAR

FACULTE DES SCIENCES JURIDIQUES ET POLITIQUES

COURS DE DROIT ECONOMIQUE

PROFESSEUR MOUSSA SAMB

AGREGE DES FACULTES DE DROIT

Parmi les cinq (5) objectifs créés par le Traité de l’UEMOA (article 4), figure en première place celui du « renforcement de la compétitivité des activités économiques et financières des Etats membres dans le cadre d’un marché ouvert et concurrentiel et d’un environnement juridique rationalisé et harmonisé ; » ce qui devra conduire à « créer entre les Etats membres un marché commun basé  sur la libre circulation des personnes, des biens, des services, des capitaux et le droit d’établissement des personnes exerçant une activité indépendante ou salariée, ainsi que sur un tarif extérieur commun et une politique commerciale commune. »

Afin d’atteindre efficacement les objectifs ci-dessus cités, il a été adopté en application des dispositions du Traité, une « législation communautaire sur la concurrence » composée de Règlements et de Directives.

La législation communautaire sur la concurrence a instauré des relations de coopération entre la Commission de l’UEMOA, organe de décision de l’Union et les Etats membres à travers les autorités nationales de la concurrence, et la Cour de justice. L’on examinera quelques propos introductifs généraux sur le droit économique (Titre I), avant de s’intéresser au droit de la concurrence dans le cadre de l’UEMOA (Titre II).

TITRE 1- PROPOS GENERAUX SUR LE DROIT ECONOMIQUE

Dans le « Nouvel Etat Industrie » J.K. Galbraith écrit : « Dans le domaine de l’économie, contrairement à celui du roman et du théâtre, il n’y a pas d’inconvénient à dévoiler prématurément ou l’auteur veut en venir ». Cette affirmation est tout aussi fondée pour le droit économique, le droit du nouvel Etat industriel.

L’itinéraire de ce cours peut donc légitimement être dévoilé : il nous faut d’accord livrer la définition et la diversité des conceptions du droit économique, il nous faut ensuite discuter son autonomie et sa capacité intrinsèque à revendiquer le statut de branche du droit avant

de finir par une note spécifiquement africaine, une interrogation sur les possibilités du droit économique d’apporter des réformes contribuant au développement.

I) Définition et diversité des conceptions

La summa divisio droit public-droit privé a conduit tout naturellement la doctrine académique à distinguer le droit privé économique et le droit public économique. Mais en vérité, la notion de droit économique reste un concept, une discipline sophistiquée, peu reconnue, aux contours divers selon l’approche qu’on en a, pour ne pas dire la langue dans laquelle on la présente (Droit économique, Law of economics , Diritto economico, Wirtschaftsrecht) .

La sémantique oblige à distinguer selon que le droit économique est conçu comme un droit de l’économie ou comme une notion distincte du droit de l’économie mais il faudra d’entrée souligner que la définition est très difficile.

A) Le droit économique est le droit de l’économie

Le droit économique peut être présenté comme le droit applicable à toutes matières qui entrent dans la notion d’économie ; peu important que ces matières, ces parties de l’économie relèvent du droit public et du droit privé. Il serait le droit de l’économie.

Cette acception peut revendiquer l’avantage de la simplicité mais elle comporte l’inconvénient de ne pas dégager des frontières claires et précises.

L’incertitude vient d’abord de la notion même de l’économie. Au sens classique, l’économie recouvre tous les faits de production, répartition, échange, consommation des richesses. On ne peut retenir qu’une discipline peut, elle seule, embrasser tous ces domaines d’activités et revendiquer une autonomie. Peut –on raisonnablement penser que les régimes de la propriété, des sûretés et garanties, des privilèges, des transferts et transports de biens relèvent tous du droit économique parce comportant des aspects économiques et non d’autres branches du droit qui ont déjà acquis droit de cité dans les programmes universitaires ? La réponse doit être négative si elle ne veut pas être taxée d’hérésie scientifique.

L’incertitude, ensuite, porte sur la distinction à devoir faire entre l’économique, le social et le financier. L’économique est, bien souvent, accouplé au social : plan de développement économique et social, conseil économique et social, droits économiques et sociaux sont des expressions qui nous sont familières. Faut il dés lors classer toutes ces institutions et catégories normatives dans le droit économique ? La réponse est assurément non. Si l’on envisage le financier, le risque de confusion devient plus grand. Peut on affirmer que le droit

financier, déjà très vaste lui-même (finances publiques, droit fiscal, droit des marchés financiers) et comportant, à l’évidence des aspects économiques, entre dans le droit économique ? Assurément non.

L’incertitude est, enfin, plus grande lorsqu’on prête attention aux nouveaux développements des rapports entre l’économie et le droit qu’apportent la conception anglo –saxonne de l’économie du droit. Actuellement, l’appellation “analyse économique du droit”, ou “Économie du Droit” représente les branches conjointes des études de droit et d’économie où les recherches portent sur l’analyse par les outils de la science économique des phénomènes juridiques. Par outils de l’économie, il faut comprendre principalement l’analyse coût-avantage, les concepts de coûts moyens et marginaux et plus récemment, les tests économétriques. La gamme des phénomènes juridiques étudiés va du droit civil au droit pénal, de la Constitution à la régulation publique. Principalement développée États-Unis dès les années 1960, puis exportée vers d'autres pays d'expression anglaise dans les années 1970, pays connaissant tous un système juridique de Common Law, l’analyse économique du droit a pu percer dans les pays ayant des Droits de tradition civiliste seulement à partir des années 1980.

B) Le droit économique est distinct du droit de l’économie

Pour éviter toutes les confusions et imprécisions qui peuvent découler de la dualité terminologique, il est proposé de retenir que le droit économique n’est pas synonyme du droit de l’économie. Loin de se réduire à être un carrefour des règles juridiques qui régissent les matières économiques, le droit économique est caractérisé par non pas les objets qu’il porte mais par son contenu, son originalité et la spécificité de ses règles. Il s’agira dés lors d’identifier les aspects du droit de l’économie qui sont marqués par cette spécificité et qui peuvent entrer dans le droit économique. On sera alors poussé à rechercher quelle idée générale serait susceptible de fonder et expliquer la spécificité du droit économique et de fournir ainsi un critère objectif de définition.

Une partie de la doctrine (Hamel) conçoit le droit économique comme une extension du droit commercial qui rentre dans le droit privé comme une discipline de droit des affaires ( ce qui explique la présence de ce cours dans votre programme) . Une autre partie (Jeantet) voit au contraire le droit économique plutôt tourné vers le droit public , étant précisément le droit de l’intervention de l’Etat dans l’économie. D’autres auteurs ( Champaud, Truchet, Farjat) cherchent à préciser la notion autour de laquelle leurs paraissent s’ordonner les règles de droit public ou privé , notion qui, dés lors, fournirait le critère général du droit économique. Plusieurs sont, à cet égard, attirés par la notion d’entreprise, et voient dans le droit économique un droit ayant pour objet fondamental l’entreprise, ses relations avec les autres entreprises et avec la puissance publique se manifestant dans plusieurs formes. Mais, certains non moins influents, trouvent la notion d’entreprise trop étroite, trop précise ou pas assez juridique pour qu’on puisse le retenir comme critère général du droit économique. Ils préfèrent plutôt faire appel à des notions plus larges comme celle d’ « organisation de

l’économie » ou celle « d’intérêt économique général » mais du fait de leur imprécision ces notions sont rejetées par d’autres comme ne pouvant déterminer avec précision ce qui devrait entrer ou rester étranger au droit économique.

C) Le droit économique est diversement et difficilement défini :

Pour Fernand Jeantet, le droit économique est « l’ensemble des règles juridiques ayant pour objet de donner aux pouvoirs publics la possibilité d’agir activement sur l’économie »( économie réglementée et dirigée pensait-il).

Gérard Farjat est très proche de Jeantet, il affirme que le droit économique serait « le droit de la concentration ou de la collectivisation des biens de production et de l’organisation de l’économie par des pouvoirs publics et privés ».

Pour ces deux auteurs, le droit économique ne se rapporterait qu’à la macroéconomie. L’économie des entreprises, l’organisation interne de celles-ci, les relations établies avec les autres entreprises, ne relèveraient pas du droit économique.

Claude Champaud a une vision plus large, le droit économique serait « le droit du développement et de l’organisation de l’économie industrielle entendue comme un système de production et de distribution de masse » Pour lui, c’est l’entreprise et l’organisation de celle-ci qui sont au cœur du droit économique, que cette organisation relève des pouvoirs publics ou des pouvoirs privés

Didier Truchet, quant à lui, estime que le droit économique, étant le droit de tous les agents économiques, aussi bien publics que privés, peut être défini « comme l’ensemble des règles applicables aux relations entre personnes de droit prises en tant qu’unités économiques ». On peut reprocher à cette définition de limiter le droit économique aux agents, alors qu’il est aussi le droit des activités économiques.

Elie Alfandari propose une définition plus large et plus transversale : le droit économique serait le droit qui régit la production, la circulation, mais aussi la consommation des richesses ( le droit de la consommation fait partie du droit économique), en somme tous les actes juridiques accomplis par ceux qui interviennent dans ce circuit, et qui sont les sujets du droit économique, tous les biens et services produits et mis à la disposition du consommateur.

Selon Alfandari, cette vision serait reliée à celle qui permet au droit économique de transcender toutes les disciplines juridiques. Elle permet, de surcroît, d’éviter une modification de la notion de droit économique en fonction de l’évolution de l’économie.

Le droit économique peut alors être défini comme l’ensemble des règles applicables aux personnes du droit dans leur activités économique ou encore l’activité économique des personnes juridiques ou même l’activité économique tout court incluant le circuit production-circulation-consommation.

On peut craindre alors de retomber dans la confusion conceptuelle consistant à prendre le droit économique comme synonyme du droit de l’économie. Ce qui oblige à conclure qu’il n’existe aucune définition généralement acceptée du droit économique mais ce qui ne peut interdire une réflexion sur l’existence de droit économique comme une branche autonome du droit.

II) Evolution du droit économique comme branche autonome du Droit

Evoquer l'autonomie d'une branche du droit est une question délicate car cette notion d'autonomie est imprécise. Il n'existe aucun critère qui permette en réalité d'affirmer de façon péremptoire qu'une branche du droit a une parfaite autonomie. L'autonomie d'une branche du droit se décèle plutôt par l'utilisation de la technique du faisceau d'indices qui met à un moment donné en relief certains aspects du droit où l'on peut remarquer l'émergence d'une spécificité. Selon le Doyen Vedel, une branche du droit supposerait l'existence de principes autonomes ou la combinaison de principes et de méthodes relevant jusqu'à présent de branches différentes.

Cette remarquable définition a le mérite de poser implicitement le problème du moment à partir duquel un droit peut être considéré comme autonome. Comme cette autonomie ne se décide pas par un acte de droit positif, il faut donc observer l'évolution de la matière juridique et décider, avec un souci d'objectivité scientifique, à partir de quel moment un glissement significatif s'est opéré.

La mutation de la teneur du droit dans ses rapports avec l'économie est complexe et échappe en grande partie à l'analyse strictement juridique. Le propos ne prétend donc pas à l'exhaustivité. L'étude de certains concepts, de certains thèmes nous semble cependant bien mettre en relief cette mutation du droit.

Ainsi en est-il des rapports entre service public et droit de la concurrence, du droit de la concurrence et de la notion de régulation comme nouveau paradigme de l'intervention de la puissance publique.

En ce qui concerne les rapports entre service public et droit de la concurrence, il est intéressant d'étudier les rapports existants entre les notions d'intérêt général et les notions de concurrence. Il peut être ainsi remarqué que ces deux notions entretiennent des rapports assez complexes. En effet, il clair que les textes de droit communautaire et de droit interne qui organisent la soumission des personnes morales de droit public au droit de la concurrence dans certains domaines) , leur interdisent dans de nombreux cas de déroger à ce droit au nom de leur mission d'intérêt général. C'est ainsi que l'Etat ne peut empêcher le droit de la concurrence de s'exercer au nom de l'intérêt général sauf, bien sûr, circonstances exceptionnelles. L'Etat créant un service public industriel et commercial doit donc en quelques sortes se justifier lorsqu'il veut déroger au droit de la concurrence au nom de l'intérêt général. Et la conception des juridictions communautaires en ce qui concerne le champ d'application du droit de la concurrence est assez large.

L'intervention directe de l'Etat au nom de l'intérêt général semble donc devoir faire place à une intervention indirecte qui consiste pour la puissance publique à poser le cadre juridique du droit de la concurrence en laissant ensuite le jeu du marché faire son œuvre. Cela ne revient pas à dire que la défense de l'intérêt général par la puissance publique ne se fait plus. Il peut être en effet soutenu que le droit de la concurrence œuvre pour l'intérêt général, mais la notion d'intérêt général n'est plus une justification juridique directe. L'intérêt général se trouve en quelque sorte satisfait par le marché encadré par le droit de la concurrence.

Par ailleurs, Il existe toujours les domaines réservés aux contours jurisprudentiels imprécis correspondant plus ou moins à nos services publics administratifs. Vient ensuite l'intervention, en cas de circonstances exceptionnelles, dans les domaines qui relèvent en temps normal du droit de la concurrence. Il est clair que l'intervention de la puissance publique pour faire respecter l'ordre public se fait dans ce dernier cas au nom de l'intérêt général.

En dehors des domaines réservés à une intervention directe de l'Etat au nom de l'intérêt général, il peut être affirmé que le marché fonctionnant dans le cadre du droit de la concurrence remplit d'une certaine manière une fonction d'intérêt général - il s'agit là d'une intervention indirecte de l'Etat - puisqu'il arrive à satisfaire des millions de consommateurs.

Il peut maintenant être dit que le droit de la concurrence est "la règle" en ce qui concerne les activités industrielles et commerciales. Quant aux interventions directes de la puissance publique au nom de l'intérêt général, elles sont, dans ces domaines économiques, maintenant l'exception. Hors circonstances exceptionnelles, l'intervention directe de l'Etat dans le domaine économique au nom de l'intérêt général ne peut donc être considérée comme étant juridiquement soustraite du droit de la concurrence.

Il résulte de tout ceci que le problème pour bien mesurer la place actuelle du service public comme mode de gestion de la société est d'en donner une définition précise. Le service public - est-il utile de le rappeler - se décèle à partir de trois éléments entrant dans sa définition: Activité d'intérêt général assurée par une personne publique ou privée et soumise à un régime juridique plus ou moins particulier ou la part du droit public est plus ou moins prononcée.

C'est avec cette définition à laquelle on ne peut objectivement donner une plus grande précision qu'il est couramment soutenu que si le service public a reculé dans son œuvre d'intérêt général face au marché, ledit service public existe toujours puisque l'organisation du marché relève d'une mission de service public.

Toute la force du service public est en effet que l'on ne peut en donner une définition précise, ce qui permet toute acrobatie conceptuelle. Mais tout raisonnement a ses limites. La limite à partir de laquelle la conception du service public n'a plus réellement prise sur une activité, c'est au fond quand le marché par le jeu de l'offre et de la demande internationale donne un prix à un produit et à un service. Or, ce prix obtenu dans un environnement concurrentiel fixe à sa manière les normes qui imposent un droit de l'organisation et du fonctionnement du marché , c'est-à-dire les critères qu'un Etat doit respecter pour attirer les

investisseurs sur son territoire et les critères qu'une entreprise doit impérativement respecter pour survivre dans son secteur économique.

En ce sens, le droit s'en remet à l'économie pour fixer la norme et la norme se trouve être le prix fixé dans un environnement concurrentiel international. Cette norme trouve sa source tant sur le plan économique que juridique dans la négociation internationale. on voit donc mal comment il pourrait être soutenu que la notion de service public sous-tend l'organisation et le fonctionnement du marché international.

Il nous semble résulter de ces observations que le service public suppose un Etat juridiquement et économiquement souverain ou des relations entre Etats souverains ayant les mêmes conceptions et pratiques idéologiques en ce qui concerne les rapports entre puissance publique et économie. Or, ce temps est bien révolu.

Il pourrait être objecté que la mutation de la teneur du droit ne l'empêche pas de remplir les mêmes missions. Les moyens changent mais la finalité reste au fond la même. Ainsi, il peut être ainsi soutenu que le principe du respect de l'égalité des administrés devant le service public à pour équivalent le droit de la concurrence, droit sous-tendu par le respect d'une certaine égalité dans la compétition entre professionnels. Quant aux consommateurs, le droit de la consommation assure une sorte d'égalité entre consommateurs.

La règle de continuité du service public trouve elle aussi une équivalence dans le droit commercial des entreprises en difficultés, du redressement judiciaire et des faillites. C'est ainsi qu'un secteur économique ayant un minimum de demande, trouve toujours des entreprises pour vendre un bien et assurer un service. La continuité se trouve donc assurée, mais par d'autres moyens.

Quant à l'adaptation, elle est, dans le secteur concurrentiel, inhérente à la survie de l'entreprise qui doit rester compétitive pour s'inscrire dans la durée.

Ce rapprochement doit cependant être nuancé dans la mesure où l'application de ces trois principes de fonctionnement du service public est justifiée par la satisfaction de l'intérêt général, notion très large et souple qui englobe l'ensemble des problèmes qui peuvent se présenter à la société. Il ne peut en être dit autant du marché.

Les règles du marché ont une finalité première différente. Elles organisent un système juridique où l'idée de profit, de rentabilité est mise en avant, quand bien même et fort paradoxalement le consommateur est considéré comme devant être le bénéficiaire privilégié de ce nouvel ordre juridique et économique. Sans entrer dans ce débat sans fin sur les privilèges respectifs des producteurs, distributeurs ou consommateurs, on s'attachera plutôt à mesurer l'étroitesse de conception consistant à n'envisager toute activité que sous l'angle économique. Il résulte de cette analyse que la teneur actuelle des textes de droit économique correspond bien à la doctrine libérale, voire ultra-libérale qui les a inspirée.

Un autre aspect du droit économique intéressant à étudier est le droit de la concurrence au niveau international. On remarquera en effet que si les droits interne et communautaire ont mis en place un droit de la concurrence homogène, l'étude des règles de concurrence au niveau international soulève de nombreuses questions. Force est de constater en effet qu'il

n'existe pas au niveau international de droit de la concurrence structuré et homogène. Les instances GATT-OMC qui ont largement œuvré pour favoriser le développement du commerce international ne sont pas arrivées pour autant à développer et à imposer au niveau mondial un droit de la concurrence s'appliquant à tous les pays signataires des accords. Cette carence du droit économique qui ne connaît toujours pas au niveau mondial de règles de concurrence est assez paradoxale. Il est en effet piquant de remarquer que le droit de la concurrence est souvent présenté comme le cœur même du droit économique et qu'il n'existe toujours pas à l'heure de la mondialisation de droit international de la concurrence.

Les seules manifestations juridiques que nous pouvons remarquer sont les applications extra-territoriales du droit de la concurrence comme le pratiquent fréquemment les Etats-Unis et l'Union européenne . Mais ces applications relèvent plus de l'entente (ou de la mésentente…) entre grande puissance que d'une démarche juridique rationnelle. On notera enfin que cette absence de droit mondial de la concurrence est en réalité une source de distorsions considérables en ce qui concerne l'efficience du droit interne et communautaire.

Le dernier élément qui peut nous faire douter de la viabilité du droit de la concurrence tel qu'il est conçu actuellement est la quasi absence de dispositions concernant l'excès de concurrence. S'il est très difficile de définir juridiquement la notion d'excès de concurrence, il est pourtant reconnu qu'une concurrence beaucoup trop vive peut parfois être destructrice du tissu économique et porter atteinte par ce biais à l'intérêt public d'une région ou d'un pays.

Or, dans ce nouveau cadre d'une économie de libre échange international telle qu'elle est pratiquée actuellement, il est clair que l'excès de concurrence, sans tomber sous le coup des règlements anti-dumping , peut amener par exemple la fermeture de certaines entreprises au niveau français et européen, la fabrication des produits étant délocalisée vers des pays aux coûts de production plus attractifs .

Il est intéressant d'observer le développement de l'idée de régulation dans le discours politique et la doctrine actuelle. La notion de régulation fort difficile à définir pour un juriste nous apparaît comme consistant à envisager l'ensemble des instruments juridiques comme des moyens destinés à limiter les dysfonctionnements conjoncturels de l'économie par le droit.

On remarquera que cette idée de régulation comme cela est le cas pour le droit de la concurrence signifie implicitement que l'économie libérale ne peut réellement s'autoréguler comme l'ont soutenu nombre d'économistes et d'hommes politiques. Le problème de la régulation telle qu'elle est actuellement envisagée par la doctrine est qu'elle nous apparaît difficilement applicable dans les faits. L'idée de régulation suppose en effet une autorité souveraine d'un système comportant plusieurs moyens juridiques pour limiter les dérèglements ou les excès de l'économie. Or, la perméabilisation par le droit international économique des frontières des Etats a impliqué un très net affaiblissement des moyens juridiques permettant de réguler une économie.

C'est ainsi qu'il nous semble que l'idée de régulation est actuellement employée à des fins idéologiques pour légitimer une désorganisation économique et financière à l'échelle mondiale.

La notion de régulation qui se présente comme un nouveau paradigme du droit économique nous apparaît peu convaincante d'un point de vue scientifique, peu satisfaisante pour relater les nouvelles fonctions du droit dans ses rapports avec l'économie.

Que penser en effet de la régulation au regard des différents krachs boursiers et monétaires que connaissent à l'heure actuelle différentes régions du globe. Il ne peut être question de régulation en tant que démarche rationnelle lorsqu'il y a réalisation d'un risque systémique financier à l'échelle planétaire. Cette analyse critique de la notion de régulation employée à l'échelle planétaire ne doit cependant pas impliquer à contrario qu'il serait souhaitable de revenir à l'ère du protectionnisme et de l'isolationnisme. Cette attitude réactionnaire outre qu'elle est parfaitement inadaptée à l'évolution des sociétés modernes n'est plus dans les possibilités qu'ont les Etats de s'opposer à l'internationalisation de l'économie.

Plus curieuse, dans ce contexte d'internationalisation de l'économie, est l'idée selon laquelle la régulation suppose l'indépendance vis-à-vis du pouvoir politique. Cette idée qui peut apparaître comme légitime sur le plan interne dans le cadre de l'activité de régulation pratiquée par les autorités administratives indépendantes, nous semble très contestables sur le plan international. En effet, il nous semble que la restauration du pouvoir des Etats sur les désordres économiques internationaux ne peut passer que par une initiative politique de représentants politiques ayant un mandat électif.

Pour comprendre l'originalité et la spécificité du droit économique contemporain, il faut d'abord accepter de ne plus raisonner avec certains concepts, du moins dans l'acception que nous leur donnons traditionnellement. Un des défauts bien connu du juriste est souvent de continuer à raisonner sur la base de concepts qui ne correspondent plus à la réalité. C'est ainsi que nombre d'analyses se fondent encore sur une conception trop étatiste du droit économique.

Il nous faut admettre avec Farjat que l’unité et la cohérence du droit économique ne peuvent être reconnues qu’au prix du sacrifice de vision dualiste et dogmatique du droit. S’il n’a pas d’autonomie, on peut soutenir que le droit économique a néanmoins une certaine spécificité : la première est précisément cette transversalité des diverses branches du droit ; on ne peut le cantonner à un secteur économique particulier, car il concerne toute la vie économique. Pour Alfandari, le droit économique n’est plus un carrefour : il est devenu une autoroute où tous les droits se rejoignent

Nos propos qui suivent vont consister maintenant à discuter en quoi cette vision intégrative voire totalisante du droit économique contemporain se prête au contexte spécifique de développement des pays africains.

III) Problématique du droit économique dans les pays en développement

Le débat est bien posée par Mohamed Salah qui se demande les transformations consécutives à la mondialisation technico-économique ne déboucheraient pas fatalement sur la constitution d’une sorte « de droit économique universel » qui rendrait de moins en moins pertinentes les distinctions liées au niveau du développement ou aux particularités culturelles ou politiques.

Les possibilités.

La question se pose car, à première vue, le droit économique ne parait guère appelé à soutenir le développement en Afrique. Comment une branche du droit, ou une discipline, sophistiquée, peu reconnue, notamment par les juristes classique, pourrait-elle apporter quelque chose aux pays en développement?

L’Etat de droit est le plus souvent absent, ce qui pose question quant à l’action des Etats. Il y a quelques exceptions.

Les carences ne concernent pas seulement l’action des pouvoirs politiques, mais les bases mêmes de la société civile , qui ont permis le développement de l’économie. L’économiste péruvien Hernando de Soto le relève dans son ouvrage - Le mystère du capital1- et il le rappelait récemment2 : « L’apport décisif de l‘Occident à l’humanité fut la création d’un système sophistiqué de propriété et de droit…le capitalisme établit…des documents légaux…un système d’information fiable permettant de faire des affaires, du commerce ». Un système d’information, une des rares revendications des économistes les plus libéraux. Le droit économique n’en fait pas fi, mais ce sont les éléments premiers qui font défaut.

Le facteur défavorable le plus préoccupant est que l’économie n’est pas dynamique…Ce qui marche ce sont les ressources fournies par Dieu, qui sont encore parfois(?) aux mains des étrangers…Alors qu’une des particularités du droit économique, est qu’il est apparu dans la mouvance de l’économique. C’est dans la mesure où une société passe sous l’influence de l’économie qu’apparaît un droit économique. …

Enfin, troisième système du lien social dans le jeu du développement, le système politique n’est en général pas particulièrement brillant dans les pays sous-développés. Dans de nombreux pays les décideurs politiques sont issus de l’organisation militaire à la suite, lointaine, de la lutte de libération nationale ou plus récente et bien plus fréquente, d’un coup d’Etat. L’organisation militaire est un des rares instruments de promotion sociale (à peu de frais !) . Même si l’on n’a pas le culte de l’ENA, on a des

1 Hernando de Soto, Le mystère du capital, Flammarion, 2005.

2 Le Monde 2, 8/11/2008

doutes sur la compétence de nombreux responsables politiques issus des troupes à gérer des sociétés complexes. Et les responsabilités politiques sont le plus souvent dues aux seuls rapports de force. Or nous savons l’importance de l’Etat dans la construction du droit économique. .

Tous ces éléments sont à prendre en ligne de compte.

Alors ?

Paradoxalement, c’est peut-être la formation marginale du droit économique qui peut permettre son rôle dans le développement. La discipline de droit économique part des faits. Ses constructions, ses innovations sont effectuées à partir des faits et particulièrement des faits économiques. Par ailleurs elle doit répondre souvent à des objectifs. Or les pays sous-développés ont une économie, des intérêts, des pratiques de cette nature. Enfin la branche de droit économique s’est construite en rupture avec le droit traditionnel. Elle connait des sources du droit d’origine privée et elle est plus généralement, en rupture avec la distinction droit public/droit privé. Avec des modes de procéder nouveaux : la régulation et des autorités de régulation. Le droit économique marque une rupture culturelle avec le droit traditionnel, notamment en Europe continentale. Une certaine rupture s’est déjà produite avec le droit des affaires. Elle est plus radicale avec le droit économique, même s’il est bien souvent dans son prolongement en raison de la place des hommes d’affaires dans le développement du droit. Mais la rupture est due surtout aux objectifs poursuivis, à l’éloignement entre les faits et le droit, beaucoup plus considérable qu’en droit des affaires, et à l’importance des innovations et de la recherche. A ces égards la discipline de droit économique recouvre les recherches du droit du développement. Les méthodes sont les mêmes.

La mondialisation confirme l’opportunité d’une approche de droit économique pour le développement. Les pays sous-développés subissent, parfois avec plus d’ampleur que les autres, les effets néfastes de l’évolution économique mondiale. D’un autre coté une certaine solidarité commence à se faire sentir. Joue également une relative uniformisation des idéologies, les pouvoirs économiques de la communication influencent l’opinion des pays sous-développés. Ce qui crée par ailleurs d’une façon générale, des motivations assez semblables à celles des pays développés (notamment la consommation…). Si l’on peut qualifier les sociétés développées de « sociétés économiques », en raison du rôle dominant de l’économie, les sociétés sous-développées aspirent à le devenir. Le droit du développement est essentiellement une branche du droit économique. La crise apporte une confirmation à la parenté car elle crée chez les pays développés des problèmes comparables à ceux des pays sous-développés. Nous y reviendrons..

Ce qui justifie la référence au développement, c’est évidemment l’état des sociétés sous-développées. Pour diverses raisons, parfois, tout est à faire et dans des conditions

qui ne cessent d’être inégalitaires entre pays riches et pays pauvres.. Quels qu’aient été les aspects odieux du colonialisme, on ne peut faire abstractions de blocages culturels. Ce seraient d’ailleurs des valeurs culturelles qui expliqueraient pour une large part la croissance. C’est la thèse d’un livre qui a suscité bien des polémiques : « Richesses et pauvreté des nations » de David Landes, paru aux US en 1998, en France en 2001 (Albin Michel). Cette thèse n’émane pas d’un auteur raciste. Il écrit notamment que la révolution industrielle a fragmenté le monde « en séparant gagnants et perdants. Elle a enfanté des mondes multiples ». En ce qui concerne certains pays sous-développés, notamment en Afrique, on peut se demander s’ils ne sont pas dans une compétition entre des nains et des géants, compétition qu’évoquait Rousseau: même s’ils progressent tous , la différence augmente entre eux…

Cependant même si des facteurs culturels sont en jeu, il convient de ne pas tomber dans le type d’analyse auquel a fait écho le Président Sarkozy à Dakar. L’Afrique ne serait pas assez rentré dans l’histoire et il n’y aurait place dans l’imaginaire africain ni pour l’aventure ni pour l’idée de progrès ». « La nature commanderait tout et l’homme africain échapperait à l’angoisse de l’homme moderne et ne serait pas capable de s’inventer un destin ». C’est vraiment ignorer beaucoup de choses. Entre autres: l’apport de l’esclavage aux Etats-Unis, à l’époque de la première phase de la révolution industrielle3 . Et s’agissant d’histoire comment oublier que dans l’histoire des arts, presque tous les arts ont été bouleversé par l’ « art nègre ». Le jazz, la musique de la modernité…

Et quel est le sort de ceux qui, au péril de leur vie, veulent entrer dans la modernité ?Comment ne pas opposer l’attitude de l’Occident à l’époque ou il s’emparait d’eux violemment et l’époque contemporaine ou il les exclut, souvent non moins violemment, de la modernité. Dans le même temps où la Chine investit en Afrique.

Ceci dit, on ne saurait ignorer l’état des « masses » et, n’y revenons pas, des pouvoirs. Et la fuite des élites. Immense gaspillage qui nous amène aux stratégies du développement.

Les stratégies

Auprès de qui ? Telle est peut-être la question fondamentale. Trois réponses: c’est la société toute entière qui est concernée par le développement (a), le statut des femmes est sans doute déterminant(b), et l’on doit se soucier de l’intégration des pauvres ( c).

3 « Le charbon, le blé et les esclaves », un des points relevé par D.Cohen dans sa tentative de répondre à la question « pourquoi l’Occident » a t -il triomphé? In La prosperité du vice, p.80.

La société toute entière est concernée.

Plusieurs stratégies ont été suivies.

Un économiste en a dressé le bilan pour l’Argentine, le Brésil et le Mexique4. Les trois pays ont connu de 1930 au début des années 80, une croissance parfois substantielle tirée par la marché intérieur. En revanche, au cours de la période qui suit, dans le cadre du consensus de Washington et de ses 10 commandements on n’observe pas de croissance conséquente, ni de recul de la pauvreté absolue. Dans le Chili de Pinochet et en Argentine s’opère une spécialisation vers l’abondance relative des ressources naturelles. Enfin, malgré le maintien d’une stratégie libérale vigoureuse, une nouvelle version du consensus de Washington est élaborée, ainsi qu’un nouveau texte des 10 commandements dont le dernier proclame que la lutte contre la pauvreté est à l’origine des objectifs du millénaire : réduction drastique de la pauvreté extrême, santé, éducation, environnement, bonne gouvernance, diminution du protectionnisme des pays riches et ouverture de leur marché aux pays les plus pauvres.

Les résultats sont mitigés, on le sait. Et sont apparues de nouvelles vulnérabilités. Notamment une emprise de la finance. Sortie considérable de capitaux, pratiques des banques peu favorables à l’investissement. De toute façon, les pays d’Amérique latine ne présentent pas le même type de sous-développement que la plupart des pays d’Afrique. Il conviendrait de changer de stratégie ou du moins d’appliquer réellement certains des commandements retenus .

La première règle de conduite nous paraît être que les stratégies doivent viser la société toute entière. Sur ce point nous évoquerons les dires de J.Stiglitz,. Dans un rapport sur un « nouveau paradigme pour le développement » il insiste sur le fait que le développement doit être considéré comme une « transformation de la société ». L’idée d’ « accompagnement social et environnemental » avancée dans la problématique du colloque évoque l’idée d’une sauce qui peut donner l’impression aux sujets des pays en développement qu’elle adoucit une cuisine dont ils seraient l’objet.

L’histoire des pays développés nous montre bien que tous les systèmes qui composent le lien social ont été concernés par le développement économique. Jusqu’au système religieux. Il suffit d’évoquer le rôle du protestantisme en Europe . Ce n’est pas un hasard si ça a bougé dans la religion musulman sur le prêt à intérêt pour le développement en Islam du plus haut niveau du capitalisme. Il ne serait pas inconvenant qu’un groupe ou un groupement capitaliste subventionne un colloque sur un sujet religieux.

Deuxième raison de la recherche d’une globalité du développement: non seulement ce développement concerne le pays considéré, mais il se place dans la perspective de la mondialisation. Avec un obstacle considérable, qui n’est pas d’ordre territorial mais temporel : une bonne partie des populations d’Afrique ne vit pas à la même époque que

4 Pierre Salama L’éco po, n°32, Octobre 2006

les populations des pays développés. Alors que c’est bien l’ordre économique des pays développés qui constitue le modèle désiré de développement. C’est la réponse à la question « quel développement ? ». On le conteste parfois en vertu d’une critique du monde développé. Ce n’est pas sérieux. Dans les domaines de la santé, de la formation, de la connaissance, comment les pays développés ne seraient-ils pas enviés ? Enfin, - et ces constatations sont à certains égards moins réjouissantes -, la consommation développe ses tentations en pays du tiers monde, et parmi les individus qui ont une formation suffisante nombreux sont ceux qui souhaitent s’établir en pays développés.

La question du développement est une question qui concerne tous les aspects sociaux d’un pays. Et singulièrement la société civile. Notamment la question démographique et celle du statut des femmes.

Le statut des femmes est déterminant

La « transition démographique » est un indice de développement. On sait quelles réponses violentes ont été données à l’excès de natalité en Chine, au Japon, en Inde (stérilisation clandestine) ? Il n’est pas évident que l’Etat doive dispenser ses aides aux familles sans se soucier de la responsabilité des pères et des impératifs de formation. L’Afrique est au dernier rang des régions du monde, mais elle s’améliore.

Quant au statut de la femme, la problématique de nos travaux vise parmi les impératifs « la dignité de l’homme » qui concerne essentiellement dans la plupart des pays sous-développés les femmes.. La libération de la femme des statuts moyenâgeux qui subsistent en certains pays est un élément fort du développement économique.

L’économie libérale a joué un rôle important dans la libération de la femme. Portalis a noté en son temps que les codifications napoléoniennes avaient libéré économiquement la femme et l’enfant. Ce n’était qu’un début…Il est remarquable qu’en droit économique européen on envisage l’obligation d’un quota de participation féminine dans les sociétés et les groupes. On a observé de meilleurs résultats dans les organismes dotés de présence féminine.

Il y a pratiquement concordance entre la promotion de la femme et le développement. Surtout si l’on ne compte pas dans le développement les résultats qu’obtiennent des pays en raison de leurs ressources pétrolières . Sans tomber dans l’économisme, on peut soutenir que l’indépendance des femmes est un facteur profond d’émulation entre les hommes. Pas de développement dans ces pays ou vous voyez les hommes attablés ou affalés pendant que les femmes accomplissent les tâches nécessaires à la vie. Sans parler de ces pays étouffés par les luttes tribales dont les femmes et les enfants sont les principales victimes. Immense tristesse de ces pays où les femmes sont pratiquement absentes des foules , et que fuie une partie des élites. Les pactes de famille en vertu desquels les filles sont livrées aux mâles sont des obstacles au développement.

Bien entendu, le statut de la femme auquel nous attribuons une large part de responsabilité est limité à certains pays. Il existe même des femmes heureuses …qui font du commerce avec un certain succès. Commerce de pauvres eu égard aux normes occidentales, mais un droit économique du développement doit-il s’en désintéresser?

La nécessaire intégration des pauvres.

Hernando de Soto, parle d’un véritable apartheid économique: « Aujourd’hui, quatre milliards d’individus, soit la majorité de la population mondiale, sont privés de l’opportunité d’améliorer leur vie parce qu’ils sont exclus de l’Etat de droit ». Mais il pose une question stratégique fondamentale lorsqu’il affirme5: « Les pauvres ne sont pas le problème, ils sont la solution ».

L’expérience, l’itinéraire des pays développés, le prouve. L’intégration des pauvres au système capitaliste a permis la réussite du système! Non seulement du fait de l’Etat providence, du welfare state, mais surtout de l’investissement considérable dans l’éducation et la formation. Ces politiques ont permis la formation d’une population relativement homogène. On doit même observer que la menace du communisme à l’époque de sa vigueur a continué à permettre un relatif équilibre dans la distribution des richesses en pays développés.

La trentaine d’années que nous venons de vivre en pays développé – caractérisées par la libéralisation et la réduction du salariat - n’est absolument pas pertinente comme modèle pour le développement, d’autant plus que cette gestion sociale ou plutôt asociale par des décideurs économiques et leurs alliés politiques est au fondement de la crise du capitalisme même si c’est une crise financière qui a éclatée.

L’intégration des pauvres au système économique tend à redevenir un thème d’actualité en pays développé en raison de la crise. On évoque la création de la sécurité sociale par Bismarck pour contrecarrer le vote socialiste. On parle même d’un retour de Marx. Pour des raisons évidentes. La crise a éclaté pour des raisons financières mais ses causes profondes sont sociales comme l’ont vu un certain nombre d’analystes. Depuis un certain nombre d’années le système fonctionne largement à crédit et la sortie provisoire de crise s’accompagne d’une montée effarante de l’endettement des Etats. La cause profonde - dénoncée par quelques uns de l’économiste Aglietta à Michel Rocard – est le déséquilibre entre les offres de biens et les possibilités d’achat. Le capitalisme n’a (relativement) bien marché qu’aux périodes ou les salariés, les pauvres étaient à même d’acheter.

On commence à envisager le rôle des pauvres dans le système capitaliste des pays développés du fait de la crise. Hernando de Soto le signifie aux décideurs politiques et économiques : « S’agissant du système financier vous vous retrouvez dans la situation

5 Op.cit.

exacte des pays du sud pour tout leur système économique »6 . La crise aura au moins cet effet qu’il est désormais difficile de prôner à l’égard des pays sous-développés des méthodes ultra libérales qu’on a abandonné en pays développés. Mais surtout de populariser des méthodes qu’on pouvait penser appropriées aux pays sous-développés.

Les méthodes, les moyens d’action

Le retour des actions étatiques peut connaitre une certaine faveur. Nous faisons peu confiance au système politique dans la plupart des pays sous-développés. Même à d’éventuelles démocraties. La démocratie et le peuple : dans certains pays d’Afrique, c’est l’excision pour les filles. L’itinéraire du développement nous parait devoir être en réduction celui qu’ont connu les pays développés. Et qu’il faut donc compter largement sur l’économie privée et prioritairement sur les éléments qui aspirent au développement. La première conséquence en est que le droit économique du développement est un droit basé sur des volontés. Seulement cette exigence n’en entraîne -t-elle pas une autre: la prise en compte de l’informel, ce qui nous amènera à évoquer le financement.

Un droit correspondant à des volontés.

Quelles que soient les critiques qu’on puisse formuler à l’égard de la Tunisie, elle n’en donne pas moins l’exemple d’un développement efficace. Le peuple a été associé au développement. 80% des familles tunisiennes sont propriétaires de leur logement. Et surtout, la place de l’enseignement est considérable.

L’adhésion populaire au développement est sans doute un point essentiel. Il est notamment mis en évidence par le prix Nobel Joseph Stiglitz, ancien vice-président et économiste en chef de la Banque mondiale7, qui insiste sur la nécessité de l’appropriation et de la participation du développement par le pays aidé. Là encore si on envisage l’expérience des pays développés, on peut penser qu’il n’y a de développement véritable que volontaire. Là ou il s’est réalisé, il n’était pas seulement du aux décideurs économiques et politiques, mais il était aussi le fruit de la volonté populaire, qu’elle se soit manifestée par le marché ou le vote .

Dans cette perspective, Stiglitzl émet des réserves sur la « conditionnalité excessive » qui « renforce les relations hiérarchiques traditionnelles ». Il estime même que « le développement ne doit jamais être seulement une question de négociation

6 Art.préc.

7 Dans un discours prononcé à la CNUCED en 1998, rapporté pour l’essentiel dans L’économie politique, n°5, Janvier 2.OOO, p.6 à 39.

entre le bailleur de fonds et le gouvernement : il doit pénétrer plus profondément et s’appuyer dans la société civile , sur des groupes qui contribuent au nécessaire renforcement des compétences collectives, qui sont les porte-paroles des couches sociales souvent exclues, facilitant leur participation et augmentant l’appropriation du processus de développement » 8.

L’appui de la société civile nous parait effectivement important .. Le pouvoir économique commence à être perçu comme un successeur du pouvoir politique, d’autant plus que le peuple n’ignore pas ou qu’il suppute la complicité du pouvoir politique avec celui-ci. Les aides, les investissements étrangers doivent aussi bénéficier de la volonté populaire. Il en est particulièrement ainsi dans le domaine de la protection de l’environnement. Rarement elle sera l’objet de groupements constitués, mais l’objet d’un sentiment diffus qui doit être pris en compte.

Il faut se placer à la fois dans les perspectives de la mondialisation , c’est à dire s’intégrer dans les processus généraux du système économique positif mondial, et s’appuyer sur les possibilités locales . Non seulement parce que l’accusation d’ingérence menace, mais parce que l’efficacité du développement est liée à l’effectivité d’une réceptivité, d’une prise en charge locale. C’est déjà vrai pour l’intégration des pays développés dans la mondialisation. Cela l’est a fortiori pour les pays émergents.

Le développement implique aussi un lien avec la révolution scientifique et technologique permanente. Compte tenu de la diffusion rapide des innovations et des incidences que cela comporte, il est opportun que les unités économiques des pays émergents soient rattachées à ce processus là. Avec une conséquence importante. L’innovation a un coût important : la plupart du temps elle est le fait de monopoles. Pour une raison simple : ils ont, en raison de leur position, la possibilité de diffuser et d’amortir leur innovation. Donc, contrairement aux dénonciations du passé, ce sont les monopoles qui sont la source la plus abondante d’innovations. C’est Daniel Cohen qui nous le rappelle et qui rappelle que Schumpeter avait le premier révélé le fait : les monopoles, en l’absence de concurrence peuvent amortir leur coûts, alors que les dépenses initiales de recherche sont considérables.

Aussi bien ce sont déjà presque toujours des groupes multinationaux qui sont les acteurs étrangers du développement. Est-ce un facteur négatif ? Pas nécessairement. Il se peut que de plus en plus les pouvoirs économiques transnationaux prennent conscience des impératifs de la vie satisfaisante de l’ordre mondial, leur domaine d’action. Dès avant leur retraite généreuse et désintéressée –on pense et les prostituées de Bombay – les vrais maîtres des groupes peuvent prendre souci des pauvres et conscients des vraies causes des crises faire en sorte que ceux-ci ne soient plus seulement les objets d’un marchés de producteurs à bas prix mais sujets de leurs marchés de consommation.

8 Art. préc.., p.23

Ces pouvoirs économiques de la volonté desquels dépend le développement dans une large mesure sont sur le terrain. Ce sont eux qui passent les marchés publics et qui fournissent parfois des aides. Mais que deviennent une bonne partie des fonds, quelle que soit d’ailleurs la nature de l’aide ? Il faut considérer l’informel.

Prendre en considération l’informel

La question de la corruption mérite d’être posée. C’est un processus souvent considéré comme « naturel » dans les pays sous-développés. Et pourtant condamnable, et même souvent odieux. Mais son importance n’appelle-t-elle pas des distinctions, des études scientifiques: une économie de la corruption. Alors que nous prônions, lors du présent colloque, une attitude prudente du droit, - que nous semble avoir préconisé Michel Rocard -, des protestations se manifestèrent. L’un d’entre eux affirma qu’il s’était bien gardé de participer à une modeste opération de corruption alors qu’elle faisait vivre 70% de la population d’une ville. Mais comment ne pas agir avec prudence contre un processus qui permet de vivre à une telle proportion de la population? Ce qui est en jeu c’est une incurie totale de l’Etat dans des situations de cette nature. De même , il va sans dire que l’appropriation en pratique par des dirigeants des ressources de l’Etat appellerait des sanctions radicales. Ou encore le fait que la circulation routière entre deux villes distantes de deux cents kilomètres soit soumise à quatre contrôles policiers, prétextes à concussion.

Mais la question qui mérite d’être posée nous paraît être : comment intégrer la concussion dans les mécanismes économiques du développement ? Elle mérite d’être posée an la mesure ou des phénomènes comparables sont observables en pays développés et a fortiori dans certains pays émergents, comme les anciens pays socialistes. Qu’en est-il des 30 % d’économie au noir que l’on attribue généralement à l’économie italienne ? Qu’en est-il des rétributions phénoménales de certains financiers ? Qu’en est-il de la pratique de l’achat des politiques par fourniture des capitaux nécessaires à l’élection ? Des scandales qui éclatent régulièrement au point qu’on peut les considérer, ainsi que les crises, comme des charges inhérentes à l’économie capitaliste ? Comment dans les pays socialistes comme l’ex URSS ou la Chine se sont révélés subitement des capitalistes? Nous posons la question.

La gravité du phénomène est telle qu’un d’interventionnisme informel nous paraît opportun. Nous pensons à l’interventionnisme informel des Etats. Pourquoi cet interventionnisme est-il informel? Parce qu’il est contraire aux accords de libre échange, aux principes du libre marché international peu à peu établis par les pays développés.

L’exemple de la Tunisie est remarquable. La pression de l’Etat demeure considérable .Mais elle est largement dissimulée. Encore que le plan occupe toujours une place centrale et que les entreprises prennent soin de s’y référer. La presion fiscale est faible: moins de 20% du PIB. Les autorités publiques redoutent une remise en cause du

« miracle tunisien » par une asphyxie fiscale des entreprises. Mais ce qui est intéressant pour notre propos c’est la façon dont est établie la faiblesse de la pression fiscale: par une fraude fiscale tolérée par l’Etat. 50% du montant des recette fiscales légales ne sont tout simplement pas perçues. Mais cela n’empêche pas des redressements qui peuvent être très lourds et de nombreuses négociations. Une chercheuse9 mentionne « des négociations permanentes, le flou des règles et des décisions, l’indistinction entre public et privé, entre légal et illégal, des compromis… ». Par ailleurs la demande de l’Etat demeure puissante. Cette demande, - les marchés publics, les subventions, les programmes d’aide à l’investissement ont permis la création de groupes économiques.

Souvent en raison de la primauté sur le marché de réseaux de toute nature: tribus, communautés, régions, familles, amitiés avec le pouvoir.

Le commerce extérieur est fortement contrôlé mais par des méthodes opaques pour respecter formellement les accords de libre échange. Ces pratiques ont heurté les bailleurs de fonds étrangers et les Etats, mais ils ont passé outre…Il n’y a pratiquement pas de terrorisme en Tunisie. Faut-il préciser qu’à l’époque actuelle, en période de crise, alors que même les pays développés sont tentés par un protectionnisme et un interventionnisme discrets, il est douteux que la légitimité des pratiques soi mise en cause.

Nous nous posons la question encore plus subversive d’un interventionnisme non seulement informel mais parfaitement opaque d’entreprises privées fortement intéressées au développement d’un pays dans lequel elles ont fortement investi. Notamment dans le financement d’entreprises locales.

Le financement.

Toujours dans la ligne qui a été la notre dans la présente communication, celle de la levée d’un peuple économique dans les pays sous-développés, nous évoquerons deux financements « populaires », le microcrédit, qui connait un certain succès et les « monnaies locales », qui ont eu dans les années qui ont suivi la crise de 29 un étonnant succès et qui demeurent peu connues aujourd’hui.

Le microcrédit n’a pas eu à notre connaissance d’application en suite de la crise de 29. Le promoteur, on le sait puisque sa découverte lui a valu le Prix Nobel de la pais, est Muhammad Yunus. Les résultats obtenus par le promoteur au Bengladesh sont remarquables. La Grameen Bank, créée à l’époque, dite « banque du village », ouverte aux pauvres s’est peu à peu dédiée aux femmes (7,5 millions d’emprunteurs dont 97 % de femmes) est devenue la première banque au monde gérée par des femmes. Elle a permis la création de 26 entreprises. Dont la Grameen télécom qui couvre plus de 60 % du marché du téléphone mobile au Bengladesh.9 Béatrice Hibou, Le libéralisme réformiste, où comment perpétuer l’étatisme tunisien, revue L’économe politique, n°32, Oct.2006.

Ce qui montre tout l’avenir possible du microcrédit, c’est son succès en Occident. En France l’Association pour le Droit à l’Initiative Economique (ADIE) pratique le microcrédit depuis 1989 suivant les principes posés par son fondateur. Dans le cadre du thème « les pauvres pourraient nous soutenir de la crise « qui connait un certain succès. Des banques commenceraient à s’y intéreser sans jouer tout à fait le jeu.Le procédé serait financiarisé en Asie. Ce qui nous paraît également intéressant c’est l’intérêt porté par des entreprises ou des responsables à la création d’entreprises ajoutant un but social à leur activité. Le Crédit agricole a investit 50 millions dans une fondation pour le microcrédit.

Enfin le microcrédit peut compléter utilement les dispositions du droit français sur la micro entreprise et l’autoentreprise. Le droit du développement devrait comprendre des mesures de cette nature allégeant la pression fiscale et les règles éventuelles de comptabilité, sans parler des exigences bureaucratiques. La création d’entreprises devrait être un but important du droit du développement.

Les monnaies locales sont presque une curiosité aujourd’hui. Ce sont des monnaies créées par des communautés, -un village, une ville, une association- qui vont en user entre elles. « Pour qu’une devise locale ait un avenir, il faut qu’elle s’installe sur un terreau de souffrance économique…il faut également qu’elle soit créée dans une communauté très intégrée, fière de son identité et méfiante à l’égard des gouvernements centraux », suivant un analyste.

Elles ont connu un brillant succès aux Etats-Unis dans les années 30. On en comptait prés de 5.000.10 Leur succès a été tel que Roosevelt a fini par les interdire parce qu’il craignait qu’elles ne déstabilisent encre davantage les banques. Elles sont également apparues en Allemagne, en Europe centrale. L‘une subsiste en Suisse, le Wir, largement utilisé par les PME. Elles répondent à une double logique: 1) se passer des banques auxquelles on ne fait pas confiance ou, plus souvent, qui ne vous font pas confiance 2) développer l‘économie locale..Il est à peine besoin de souligner combien les monnaies locales paraissent coïncider avec les besoins en pays d’Afrique. On en connait aujourd’hui quelques rares créations en Europe, notamment en Grande-Bretagne.

TITRE II - DROIT DE LA CONCURRENCE UEMOA

L’on examinera d’abord le cadre normatif (Section I), avant de s’intéresser à sa mise en œuvre (Section II).

SECTION I : LE CADRE NORMATIF Quelle est la législation communautaire de la concurrence (§.1) et quel est son champ d’application (§.2) ? Telles sont les questions auxquelles il importe de répondre ici.

§.1- La législation communautaire de la concurrence 10 Le Monde, 18 Septembre 2009.

Après avoir précisé le corpus normatif (A), on s’intéressera à la notion de concurrence (B).

A)- L’ADOPTION PAR L’UEMOA D’UN « CODE » COMMUNAUTAIRE DE LA CONCURRENCE

Dans la suite logique des objectifs proclamés, le Traité indique en son article 76, alinéa c, que, pour la mise en place du marché commun, l’Union œuvre pour l’institution de règles communes de concurrence applicables aux entreprises publiques et privées ainsi qu’aux aides publiques.

Ces dispositions sont complétées par celles des articles 88 à 90 portant sur les règles de concurrence. Plus précisément, l’article 88 dudit Traité dispose que sont interdits de plein droit :

a) les accords, associations et pratiques concertées entre entreprises, ayant pour objet ou pour effet de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence à l’intérieur de l’Union ;b) toutes pratiques d’une ou de plusieurs entreprises, assimilables à un abus de position dominante sur le marché commun ou dans une partie significative de celui-ci ;c) les aides publiques susceptibles de fausser la concurrence en favorisant certaines entreprises ou certaines productions. L’article 89 ajoute que le Conseil, statuant à la majorité des deux tiers (2/3) de ses membres et sur proposition de la Commission, arrête par voie de règlements les dispositions utiles pour faciliter l’application des interdictions énoncées à l’article 88. Il fixe, selon cette procédure, les règles à suivre par la Commission dans l’exercice du mandat que lui confère l’article 90 ainsi que les amendes et astreintes destinées à sanctionner les violations des interdictions énoncées dans l’article 88. Il peut également édicter des règles précisant les interdictions énoncées dans l’article 88 ou prévoyant des exceptions limitées à ces règles afin de tenir compte de situations spécifiques. L’article 90 poursuit en indiquant que la Commission est chargée, sous le contrôle de la Cour de Justice, de l’application des règles de concurrence prescrites par les articles 88 et 89.

Si le Traité est effectivement entré en vigueur dès le 1er août 1994, il a fallu attendre le 23 mai 2002, soit plus de sept ans après, pour assister à la mise en place du droit dérivé en matière de concurrence sous forme de règlements et de directives du Conseil des ministres.

Le droit communautaire de la concurrence issu de l’UEMOA comprend à l’heure actuelle trois règlements et deux directives, qui sont:

Le Règlement n° 02/2002/CM/UEMOA relatif aux pratiques anticoncurrentielles àl’intérieur de l’Union économique et monétaire ouest africaine ;

le Règlement n° 03/2002/CM/UEMOA relatif aux procédures applicables aux ententes

et aux abus de position dominante à l’intérieur de l’Union économique et monétaire ouest africaine ;

le Règlement n° 04/2002/CM/UEMOA relatif aux aides d’État à l’intérieur de l’Union économique et monétaire ouest africaine et aux modalités d’application de l’article 88 du Traité ;

la directive n° 01/2002/CM/UEMOA. Relative à la transparence des relations financières entre d’une part les Etats membres et les entreprises publiques, et d’autre part entre les Etats membres et les organisations internationales ou étrangères. Et enfin

la directive n° 02/2002/CM/UEMOA relative à la coopération entre la Commission et les structures nationales de concurrence des États membres pour l’application des articles 88, 89 et 90 du Traité de l’UEMOA. L’entrée en vigueur des trois règlements a eu lieu le 1 er janvier 2003 tandis que celle des deux directives l’avait été le 1er juillet 2002, étant entendu qu’un délai de six mois jusqu’au 31 décembre 2002 avait été laissé aux États membres pour conformer leur législation interne à ces deux directives.

B)- LA NOTION DE CONCURRENCE A l’instar de la plupart des législations des Etats et des organisations internationales, les textes de l’UEMOA ne définissent pas directement les notions de concurrence, de politiques de la concurrence et, subséquemment, les concepts de pratiques portant atteinte à la concurrence, probablement en raison du fait que ces notions ont déjà été définies dans le cadre d’organisations auxquelles adhèrent les Etats membres de l’UEMOA, telle que la CNUCED ,( Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement), et qu’elles sont partagées par la plupart de ces acteurs.

Malgré l’absence de définitions directes, il ressort que «  conformément à l’option libérale prise par l’UEMOA, le concept de concurrence repose sur le principe de liberté laissée à chacun des opérateurs économiques, la possibilité de produire, de vendre ce qu’il veut, aux conditions qu’il choisit. ».11

Ainsi, un marché où le jeu de la concurrence est libre est un marché où les entreprises, indépendantes les unes des autres, exerçant la même activité rivalisent pour attirer les consommateurs. Autrement dit, c’est un marché où chaque entreprise est soumise à la pression concurrentielle des autres.

Dans la suite logique de cette approche, des actes peuvent porter gravement atteinte à la concurrence. Il est ainsi des accords horizontaux tels que les cartels, les abus de positions dominantes.

Face à l’existence ou à la menace permanente des pratiques portant atteinte à la concurrence, il s’avère nécessaire d’élaborer et de mettre en oeuvre un corps de règles les réprimant, un ensemble de règles régulant ou disciplinant la concurrence, ou, en d’autres termes, un droit de la concurrence s’inscrivant dans une politique de la concurrence.

La politique de la concurrence Quant à elle, peut être définie comme la gamme de mesures gouvernementales qui peuvent être employées pour promouvoir des structures et un comportement concurrentiel sur les marchés, y compris et sans exclure d’autres éléments, les lois de portée générale qui s’appliquent aux pratiques anticoncurrentielles des entreprises.

§.2- Le champ d’application du droit communautaire de la concurrenceLe champ d’application peut être pour l’essentiel appréhendé sous deux angles : d’abord, sous l’angle de la problématique du droit applicable découlant de la coexistence de plusieurs droits et politiques de la concurrence dans l’espace UEMOA (A), et sous l’angle des règles matérielles, c’est-à-dire des pratiques visées par la dite règlementation (B).

11 Voy Rapport intégral sur l’examen de la politique de la concurrence de l’UEMOA, du Bénin et du Sénégal (CNUCED juillet 2007)

A)- LE DROIT APPLICABLEA part le droit communautaire de la concurrence de l’UEMOA, il existe d’autres droits de la concurrence applicables au sein de cet espace communautaire, dont principalement les droits des différents États membres de l’UEMOA et certains droits « transnationaux », qu’il s’agisse de ceux émanant d’organisations d’intégration régionale ou d’harmonisation juridique que sont en particulier l’OHADA et la CEDEAO ou, dans une certaine mesure, de ceux provenant de l’OMC et de la CNUCED.

L’existence de plusieurs droits de la concurrence dans l’espace UEMOA soulève un certain nombre de questions : quels sont les rapports de conformité, de compatibilité, de hiérarchie entre le droit communautaire de la concurrence de l’UEMOA et ces différents droits

1°)- L’exclusivité du droit communautaire par rapport aux droits nationauxA la faveur d’un mouvement généralisé de libéralisation durant les années 1990 dans les pays africains, l’espace UEMOA a connu une émergence ou une consolidation de véritables droits nationaux de la concurrence, à travers l’adoption par la plupart des États membres d’une législation plus ou moins étoffée.

La Commission de l’UEMOA, après une étude menée dans 07 des Etats membres a noté l’existence dans trois pays, à savoir le Burkina Faso, la Côte d’Ivoire, et le Sénégal, d’une législation nationale sur la concurrence12, « complète, élaborée et au champ d’application large », les autres États étant engagés dans un processus d’élaboration ou d’adoption d’une législation nationale complète en matière de concurrence.

Dès lors, avec l’adoption des règles de concurrence de l’UEMOA, coexistent dans chacun de ces pays un droit national et un droit communautaire de la concurrence issu de l’UEMOA.

Cette situation pose des problèmes de compatibilité entre les deux règles.

Plus précisément, les aspects visés par les droits nationaux de la concurrence peuvent, en partie, différer de ceux visés par le droit communautaire de la concurrence ou les recouper sur certains points, aussi bien au niveau des règles de fond, que dans la mise en oeuvre de celles-ci.

Ainsi par exemple, la loi burkinabé du 5 mai 1994 s’intéresse à la quasi-totalité des aspects courants du droit de la concurrence, aussi bien les pratiques anticoncurrentielles des entreprises (ententes et abus de position dominante) et des États (réglementation des prix) que les pratiques restrictives de concurrence des entreprises (comme par exemple le refus de vente ou l’imposition de prix de revente).13

Deux thèses se sont opposées dès la phase d’élaboration des textes de l’UEMOA sur le droit de la concurrence.

Pour les uns (des experts des Etats membres), les législations nationales doivent continuer à coexister avec la législation communautaire, en particulier dans le domaine des ententes et des

12Le droit interne de la concurrence est principalement régi au Burkina Faso par la loi n° 15/94/ADP du 5 mai 1994 portant organisation de la concurrence au Burkina Faso, en Côte-d’Ivoire par la loi n° 91-999 du 27 décembre 1991 relative à la concurrence, au Niger par l’ordonnance n° 92-025 du 7 juillet 1992 portant réglementation des prix et de la concurrence, au Sénégal par la loi n° 94-63 du 22 août 1994 sur les prix, la concurrence et le contentieux économique.

13 Voir notamment le titre III « Des ententes et des abus de position dominante » (articles 5 à 8) de la loi n° 15/94/ADP du 5 mai 1994 portant organisation de la concurrence au Burkina Faso.

abus de position dominante, en veillant à ce que les dispositions de ces législations nationales soient conformes au droit communautaire et que ce dernier prime en cas de conflit.

Pour les autres dont la Commission, l’UEMOA doit avoir une compétence exclusive pour légiférer dans le domaine des ententes, des abus de position dominante et des aides d’État, afin d’éviter les conflits de normes et de procédures, les législations nationales ne pouvant porter que sur les autres domaines du droit de la concurrence qui appartiennent à la compétence résiduelle des États, telle que la concurrence déloyale.

Saisie à titre consultatif par la Commission de l’UEMOA de la divergence de vues, la Cour de Justice de l’UEMOA a tranché en faveur de la Commission dans son avis du 27 juin 2000.

Cet avis de la Cour de justice de l’UEMOA a été pris en compte dans son principe par le législateur de l’UEMOA dans les règles de concurrence édictées le 23 mai 2002, plus particulièrement par la directive n° 02/2002/CM/UEMOA relative à la coopération entre la Commission et les structures nationales de concurrence des États membres dans la lutte contre les pratiques anticoncurrentielles.

2°)- La prise en compte des autres droits régionaux (OHADA, CEDEAO)

Actuellement dans l’espace UEMOA la CEDEAO et l’OHADA, projettent également de se doter chacune d’un droit de la concurrence applicable dans l’espace UEMOA.

a)- La CEDEAO

La CEDEAO a été créée par un traité signé à Lagos (Nigeria) le 28 mai 1975.

Le Traité initial de la CEDEAO a été révisé par le sommet des chefs d’État tenu à Cotonou en juillet 1993.

Aux termes de ce Traité révisé, la CEDEAO se fixe comme but de réaliser l’intégration entre les pays d’Afrique de l’ouest, en priorité sur le plan économique, mais également dans les autres domaines de la vie sociale, afin de parvenir à un plus grand développement, pour le plus grand bien des populations.

L’examen des dispositions de ces différents textes nous montre que la CEDEAO poursuit à l’heure actuelle deux grands objectifs : d’abord et avant tout la mise en place d’un marché commun en tant qu’objectif fondamental, et ensuite et à terme, la mise en place d’une union économique et monétaire en tant qu’objectif ultime.

C’est dans la recherche de cet objectif fondamental de la mise en place d’un marché commun qu’est envisagée l’adoption d’un droit et d’une politique de concurrence, même si le Traité révisé ne le prévoit pas clairement.

Les seules dispositions concernant la concurrence sont contenues dans le Traité révisé et sont uniquement destinées aux Etats. Il s’agit des dispositions sur les restrictions quantitatives et sur le dumping.

Aux termes de l’article 41 du Traité révisé, “ …chaque Etat membre s’engage à assouplir progressivement et à éliminer totalement dans un délai maximum de quatre (4) ans après le démarrage du schéma visé à l’article 54 [schéma de libéralisation des échanges commerciaux mis en oeuvre en 1990], toutes restrictions ou interdictions de nature contingentaire, quantitative et assimilée qui s’appliquent à l’importation dans cet Etat

membre de marchandises originaires des autres Etats membres et à ne pas imposer plus tard d’autres restrictions ou interdictions ”.

Malgré l’absence de base juridique consistante, la CEDEAO a entrepris de se doter d’un droit de la concurrence et des projets de textes ont été élaborés.

Plus précisément, il s’agit respectivement du projet de document cadre présentant la politique et de l’avant-projet de texte réglementaire sur lesdites politiques.

b)- L’OHADA

Pour sa part, l’Organisation pour l’harmonisation en Afrique du droit des affaires l’OHADA a pour objectif global de favoriser, au plan économique, le développement et l’intégration régionale ainsi que la sécurité juridique et judiciaire dans les affaires au niveau de ses seize (16) États membres que sont les huit (08) États de l’espace UEMOA, les six (06) de la CEMAC plus, les Comores, et la Guinée.

Concrètement, l’OHADA a mis en place une série d’actes uniformes dans divers domaines dont notamment ceux relatifs au droit commercial général, au droit des sociétés commerciales et du groupement d’intérêt économique,…… Mais surtout, l’OHADA envisage d’autres harmonisations juridiques, en particulier dans le domaine du droit de la concurrence.

Ainsi, il y a des risques de recoupement des droits de la concurrence de l’UEMOA et de l’OHADA, et en particulier des règles de fond émanant de ces deux organisations.

Certes, le Traité de Dakar contient des dispositions favorisant la coopération et la concertation entre ces différentes organisations par rapport aux risques d’incompatibilité entre les droits de la concurrence de ces deux organisations et celui de l’UEMOA, comme d’ailleurs le montrent celles déjà mises en oeuvre entre l’UEMOA et la CEDEAO. Ces dispositions organisent un mécanisme apte à éliminer les incompatibilités ou les doubles emplois.

En effet, l’article 13 du Traité de l’UEMOA dispose que l’Union établit toute coopération utile avec les organisations régionales ou sous-régionales existantes;

L’article 14 dudit traité ajoute que dès l’entrée en vigueur du présent Traité, les Etats membres se concertent au sein du Conseil afin de prendre toutes mesures destinées à éliminer les incompatibilités ou les doubles emplois entre le droit et les compétences de l’Union d’une part, et les conventions conclues par un ou plusieurs Etats membres d’autre part, en particulier celles instituant des organisations économiques internationales spécialisées.

De même, l’article 60 du Traité de Dakar indique que dans l’exercice de ses fonctions, la Conférence tient compte des progrès réalisés en matière de rapprochement des législations des Etats de la région, dans le cadre d’organismes poursuivant les mêmes objectifs que l’Union.

Toutefois, malgré l’existence de ces dispositions favorisant la coopération et de nature à empêcher les risques d’incompatibilités, l’émergence effective d’un droit de la concurrence au niveau de la CEDEAO et de l’OHADA pourrait poser de sérieux problèmes au niveau du contentieux du fait de l’existence de mécanismes différents de mise en oeuvre des règles de fond.

3°)- La conformité avec les principes édictés par les organisations internationales (OMC, CNUCED)

Le droit communautaire de la concurrence de l’UEMOA se caractérise par ailleurs par sa conformité avec les principes et les règles édictés par les organisations internationales que sont l’OMC et la CNUCED, Cela résulte d’abord de l’adhésion du législateur de l’UEMOA

aux règles de l’Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce (ou General Agreement on Tarrifs and Ttrade, communément appelé GATT) à laquelle succèdera l’Organisation mondiale du commerce (OMC). (article 83 du Traité)

Par ailleurs, les principes et règles énoncés dans la législation communautaire de la concurrence de l’UEMOA sont conformes à ceux de la CNUCED, comme le confirme, non seulement la participation de l’UEMOA et de ses Etats membres aux réunions du Groupe intergouvernemental d’experts du droit et de la politique de concurrence de la CNUCED, mais également l’assistance que cette organisation apporte à la première.

Créée en 1964, la CNUCED vise à intégrer les pays en développement dans l´économie mondiale de façon à favoriser leur essor et leur développement durable.

S’agissant en particulier de la concurrence, son mandat dans ce domaine découle de la résolution 35/63 adoptées par l’Assemblée générale des Nations Unies en 1980 sur « l’Ensemble des principes et des règles équitables convenus au niveau multilatéral pour le contrôle des pratiques commerciales restrictives ».

B)- LES RÈGLES MATERIELLES DU DROIT COMMUNAUTAIRE DE LA CONCURRENCE

En termes de pratiques ou de comportements visés, le droit communautaire de la concurrence de l’UEMOA s’intéresse exclusivement aux pratiques anticoncurrentielles que sont les ententes anticoncurrentielles, les abus de position dominante, et les interventions publiques.

1°)- Les ententes anticoncurrentielles

Le Traité de l’UEMOA se limite pour l’essentiel à indiquer en son article 88, alinéa a, que les accords, les associations et les pratiques concertées entre entreprises sont interdits de plein droit, lorsque ceux-ci ont pour objet ou pour effet de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence à l’intérieur de l’Union, et à disposer en son article 89 que le Conseil des ministres arrête par voie de règlement dès l’entrée en vigueur du traité la procédure, les sanctions et les exceptions applicables à cette interdiction.

Les dispositions susmentionnées consistent en réalité à poser le principe d’interdiction des ententes, à l’image notamment du droit européen et de différents droits nationaux de la concurrence, puisque l’entente est classiquement définie comme un concours de volonté entre entreprises autonomes, tel un accord, une décision d’association, ou une pratique concertée, qui a pour objet ou pour effet de fausser ou d’entraver le jeu de la concurrence. Les textes de l’UEMOA admettent l’existence d’exceptions au principe d’interdiction des ententes.

A l’inverse des ententes prohibées, d’autres ententes peuvent être autorisées ou exemptées par L’article 89, § 3, du Traité de l’UEMOA laisse au Conseil des ministres la possibilité de prévoir des exceptions limitées à l’interdiction de principe des ententes afin de tenir compte de situations spécifiques.

Mais c’est surtout le règlement n° 02/2002/CM/UEMOA qui précise le contenu de ces dispositions.

L’exemption est une procédure par laquelle la Commission reconnaît explicitement que l’accord considéré comme restrictif peut néanmoins être autorisé compte tenu du contexte et du caractère nécessaire de l’accord malgré la restriction qu’il entraîne.

2°)- Les abus de position dominanteLe Traité de l’UEMOA se limite à poser de façon très succincte le principe d’interdiction des abus de position dominante. A cet égard, l’article 88, alinéa b, dudit Traité dispose que sont interdits de plein droit toutes pratiques d’une ou de plusieurs entreprises, assimilables à un abus de position dominante sur le marché commun ou dans une partie significative de celui-ci.A première vue, l’interprétation littérale des dispositions de l’article 88 b du Traité de l’UEMOA ne permet pas de poursuivre les abus de position dominante en tant que tels dans la mesure où il n’est visé ici que les pratiques assimilables aux abus de position dominante.

Toutefois, les dispositions des règlements n° 02/2002/CM/UEMOA et n° 03/2002/CM/UEMOA qui viennent poser clairement l’interdiction des abus de position dominante et préciser le contenu de celle-ci.

A travers de telles dispositions, la législation de l’UEMOA sur le droit de la concurrence met en exergue le fait que pour qu’il y ait abus de position dominante, il faut d’abord que l’entreprise en question soit en position dominante, et qu’ensuite cette entreprise exploite de façon abusive une telle position.

De nombreux critères sont prévus pour déterminer l’existence d’une position dominante. Le critère le plus déterminant pour évaluer l’existence d’une telle position est la part de marché qu’occupe une entreprise sur le marché en cause. Cette part de marché se calcule en tenant compte des ventes réalisées par l’entreprise concernée et de celles réalisées par ses concurrents.

Lorsque la part de marché ne suffit pas à elle seule pour établir l’existence d’une position dominante, les instances communautaires doivent recourir à des critères supplémentaires pour juger de celle-ci, tel le degré d’intégration verticale de l’entreprise, la puissance financière de l’entreprise ou du groupe auquel elle appartient, l’existence de barrières à l’entrée. La seule existence de ces comportements abusifs ne suffit pas pour qu’il y ait abus de position dominante prohibé par le droit de la concurrence de l’UEMOA. Encore faut-il, en second lieu, que de tels comportements aient pour objet ou pour effet d’entraver de manière significative une concurrence effective à l’intérieur du marché commun.

3°)- Les interventions publiques (pratiques imputables aux Etats)Le Code communautaire de la concurrence de l’UEMOA contient des dispositions relatives aux interventions publiques.

Par le terme générique d’interventions publiques sont désignés deux groupes d’actes des personnes publiques : les aides publiques et les pratiques anticoncurrentielles imputables aux États.

a)- L’incompatibilité de principe des aides publiques avec le marché commun.Aux termes de l’article 88, alinéa c, du Traité de l’UEMOA, sont interdites de plein droit les aides publiques susceptibles de fausser la concurrence en favorisant certaines entreprises ou certaines productions, sous réserve d’exceptions limitées pouvant être prévues par le Conseil des ministres en vertu de l’article 89 du même traité.

Le traité a proclamé l’incompatibilité de la plupart des aides publiques avec le marché commun, puisque rares sont les aides susceptibles de favoriser toutes les entreprises ou toutes les productions. Poursuivant dans la voie tracée par le Traité de l’UEMOA, le règlement n° 04/2002/CM/UEMOA réitère une telle interdiction tout en apportant plus de précisions sur son contenu et sa portée.

Au regard de ce dernier texte, la notion d’aide publique doit être entendue de la façon la plus large, aussi bien en ce qui concerne la forme de l’aide que la personne publique qui fournit l’aide.

Ainsi, il apparaît que constitue une aide publique toute mesure qui entraîne un coût direct ou indirect, ou une diminution des recettes pour l’État, ses démembrements ou pour tout organisme public ou privé que l’État institue ou désigne en vue de gérer l’aide, et confère ainsi un avantage sur certaines entreprises ou sur certaines productions.

S’inspirant apparemment du droit communautaire européen, le législateur de l’UEMOA accepte, à travers l’article 89, alinéa c, du Traité de Dakar et le règlement n° 04/2002/CM/UEMOA, l’idée de quelques dérogations à ce principe d’interdiction de la plupart des aides.

A cet égard, il ressort que dans le cadre de son examen de l’impact des aides publiques sur le jeu de la concurrence, la Commission doit tenir compte des besoins des États membres en ce qui concerne leur développement économique et social, dans la mesure où les échanges entre les États membres et l’intérêt de la Communauté d’atteindre son objectif d’intégration ne sont pas mis en échec. Ainsi, les six catégories suivantes d’aides sont considérées comme compatibles avec le marché commun, sans qu’un examen préalable par la Commission ne soit nécessaire :

les aides à caractère social octroyées aux consommateurs individuels, à condition qu’elles soient accordées sans discrimination liée à l’origine des produits ;

les aides destinées à remédier aux dommages causés par les calamités naturelles ou par d’autres événements extraordinaires ;

les aides destinées à promouvoir la réalisation d’un projet important d’intérêt communautaire ou à remédier à une perturbation grave de l’économie d’un État membre ;

les aides à des activités de recherche menées par des entreprises ou par des établissements d’enseignement supérieur ou de recherche ayant passé des contratsavec des entreprises, si l’aide couvre au maximum 75 % des coûts de la recherche industrielle ou 50 % des coûts de l’activité de développement pré concurrentielle ;

les aides visant à promouvoir l’adaptation d’installations existantes à de nouvelles prescriptions environnementales imposées par la législation et/ou la réglementationqui se traduisent pour les entreprises par des contraintes plus importantes et une charge financière plus lourde, à condition que cette aide soit une mesure ponctuelle, non récurrente, et soit limitée à 20 % du coût de l’adaptation ;

et, enfin, les aides destinées à promouvoir la culture et la conservation du patrimoine, quand elles ne restreignent pas la concurrence dans une partie significative du marché commun.

De même, la Commission peut, après consultation du Comité consultatif en matière d’aides, définir par voie de règlement d’exécution (conformément au pouvoir qui lui est accordé en vertu de l’article 24 du Traité de l’UEMOA) d’autres catégories d’aides publiques susceptibles d’être autorisées de plein droit.

b)- L’interdiction des pratiques anticoncurrentielles imputables aux Etats

Le droit communautaire de la concurrence de l’UEMOA semble introduire une innovation dans la définition classique des pratiques anticoncurrentielles en qualifiant certaines interventions des personnes publiques de pratiques anticoncurrentielles imputables aux États.L’article 6 du Règlement n° 02/2002/CM/UEMOA du 23 mai 2002 qui institue cette catégorie dépasse le cadre tracé par l’article 88 du Traité dont les interdictions concernent les ententes, les abus de position dominante et les aides publiques. Cependant, les interventions publiques interdites dans le texte sont pour la plupart connexes à des pratiques anticoncurrentielles commises par des entreprises privées ou publiques, soit en les favorisant ou en les validant.La volonté de supprimer toutes les mesures administratives de nature à restreindre les échanges intracommunautaires et le libre jeu de la concurrence est clairement affirmée à travers ces dispositions du règlement n° 02/2002/CM/UEMOA.Les prescriptions de l’article portent sur les pratiques interdites, les dérogations aux principes de l’interdiction et le régime juridique des pratiques anticoncurrentielles imputables aux États membres.

SECTION II : LA MISE EN ŒUVREOutre le cadre institutionnel (§.1), la procédure de mise en œuvre (§.2) et l’état d’application (§.3) du droit de la concurrence seront examinés.

§.1- Le cadre institutionnelLe cadre institutionnel est constitué par l’ensemble des structures tant communautaires que nationales qui concourent à la conception et à la mise en oeuvre de la législation communautaire de la concurrence. Les activités de ces structures reposent sur une coopération qui soulève des questions complexes dont on se bornera à rappeler ici les grandes lignes.

A)- LES ORGANES COMMUNAUTAIRESSur le plan communautaire, quatre organes interviennent dans l’élaboration et l’application du droit communautaire de la concurrence, à savoir le Conseil des ministres, la Commission, la Cour de justice et, dans une certaine mesure, le Comité consultatif de la concurrence.

1°)- Le Conseil des ministresLe Conseil des ministres joue un rôle directeur ou en d’autres termes une fonction de réglementation en matière de concurrence.En effet, l’article 89 du Traité de l’UEMOA dispose que le Conseil, statuant à la majorité des deux tiers (2/3) de ses membres et sur proposition de la Commission, arrête dès l’entrée en vigueur du Traité, par voie de règlements, les dispositions utiles pour faciliter l’application des interdictions énoncées à l’article 88 dudit Traité. De même, il appartient au Conseil de fixer, selon la même procédure, les règles à suivre par la Commission dans sa mission d’application des règles de concurrence, ainsi que les amendes et astreintes destinées à sanctionner les violations des interdictions énoncées, en ce qui

concerne en particulier les ententes, les abus de position dominante et les aides publiques susceptibles de fausser le jeu de la concurrence.

2°)- La Commission de l’UEMOALa Commission joue un rôle essentiel dans la conception et dans l’application du droit communautaire de la concurrence dans la mesure où, en tant que gardienne du Traité de l’Union, elle exerce une triple fonction dans le domaine de la concurrence : une fonction de réglementation ; En second lieu, la Commission joue un rôle de définition de la politique de la concurrence de l’Union ; En troisième lieu, elle est principalement chargée de la mise en oeuvre du droit communautaire de la concurrence.L’action de la Commission se manifeste par des décisions, des avis ou des recommandations qu’elle adresse aux entreprises ou aux États membres. .Il est à noter que c’est le Département des politiques fiscales, douanières et commerciales (DPFDC) qui était chargé de la conduite de l’harmonisation des politiques fiscales, douanières et commerciales, notamment dans le domaine de la concurrence.Mais depuis la nouvelle organisation des services intervenue après la nomination des actuels membres par l’Acte additionnel n° 0 1/2007/CCGE/UEMOA du 20 janvier 2007 c’est le Département du marché régional, du commerce, de la concurrence et de la coopération (DMRC), qui est, entre autres missions, chargé de « la stimulation de la concurrence en vue de la réduction des prix et de l’élargissement du choix proposé aux consommateurs et, plus globalement, de « la concurrence et (de) la gestion du code antidumping ».La Direction de la concurrence ne regroupe que deux cades chargés de concurrence.

3°)- La Cour de Justice de l’UEMOALa Cour de justice joue en matière de concurrence un rôle très important dans la mesure où l’article 90 du Traité dispose qu’elle contrôle l’application des règles par la Commission.En ce qui concerne les questions de concurrence, la Cour de justice apprécie la légalité des décisions prises par la Commission en matière d’ententes et d’abus de position dominante, sur recours d’un Etat membre ou du Conseil, ou de toute personne physique ou morale intéressée. De même, la Cour de justice statue, avec compétence de pleine juridiction, sur les recours intentés contre les décisions par lesquelles la Commission fixe une amende ou une astreinte, en ayant la possibilité de modifier ou d’annuler les décisions prises, de réduire ou d’augmenter le montant des amendes et des astreintes ou d’imposer des obligations particulières.En outre, relativement à la libéralisation des monopoles et entreprises publiques, la Cour de justice peut être saisie par la Commission lorsqu’un Etat membre ne se conforme pas à un avis ou une recommandation de cette dernière proposant des modifications à un projet de législation nationale susceptible d’affecter la concurrence à l’intérieur de l’Union, par le recours en manquement.

4°)- Le Comité consultatif de la concurrenceLe Comité consultatif de la concurrence a été créé par l’article 28, paragraphe 28.3, du règlement n° 03/2002/CM/UEMOA du 23 mai 2002. Ce comité est composé de fonctionnaires compétents en matière de concurrence, à raison de deux représentants par État membre. Le Comité consultatif de la concurrence est consulté par la Commission de l’UEMOA pour avis, préalablement à toute décision en matière d’entente et d’abus de position dominante et avant certaines décisions en matières d’aides publiques dont, en particulier, les décisions conditionnelles et les décisions négatives.

B)- DANS LES ETATS MEMBRESIl s’agit essentiellement au niveau des structures nationales de concurrence et les juridictions nationales.

1°)- Les structures nationalesAux termes de l’article 1er in fine de la directive n° 02/2002/CM/UEMOA, il faut entendre par structure nationale de concurrence « toute institution nationale, à compétence générale ou sectorielle, intervenant dans le domaine du contrôle de la concurrence ».Selon l’article 3, paragraphe 3, de la directive précitée, les autorités nationales administratives se chargent de : mener, sur mandat exprès de la Commission, de leur propre initiative, des investigations

afin de déceler les dysfonctionnements du marché ; élaborer et transmettre périodiquement à la Commission des rapports ou des notes

d’information sur la situation de la concurrence dans les secteurs ayant fait l’objet d’enquêtes ;

recevoir et transmettre à la Commission, les demandes d’attestation négative, les notifications pour exemption et les plaintes des personnes physiques ou morales ;

suivre, en collaboration avec toute autre administration habilitée, l’exécution des décisions qui comportent à la charge des personnes autres que l’État, une obligation pécuniaire et en faire un rapport périodique à la Commission ;

procéder au recensement des aides d’État et en faire trimestriellement rapport à la Commission

faire un rapport annuel sur l’état de la concurrence dans le pays.

Les nouvelles fonctions des autorités administratives nationales définies par la directive n°02/2002/CM/UEMOA, permettent ainsi d’établir des rapportsentre elles et la Commission des rapports de coopération utiles dans la mise en oeuvre des règles communautaires de la concurrence. A coté de ces structures nationales existent d’autres chargées de la mise en œuvre de la législation de la concurrence. Ce sont les autorités sectorielles de régulation.

Dans l’espace UEMOA, ces autorités sectorielles de régulation existent essentiellement dans les secteurs en réseaux faisant l’objet des réglementations spécifiques, à savoir le domaine des télécommunications, de l’électricité, de l’eau et des médias et communication...

Les agences de régulation sectorielle sont nées dans le cadre du processus de privatisation des secteurs économiques d’intérêt général tels que les télécommunications, l’eau, l’électricité, etc.

À l’origine, leur rôle était plus technique et limité à la fixation des interfaces techniques et des normes compatibles avec les systèmes d’exploitation en vigueur.Mais, de plus en plus, elles interviennent dans le règlement des litiges relatifs aux contrats commerciaux. Aussi, dans le cadre de leurs attributions, ces agences de régulation sectorielle effectuent des enquêtes dans les secteurs d’activités relevant de leur compétence et prennent des décisions ayant parfois trait au problème de fonctionnement du marché lié aux ententes et aux abus de position dominante.

Ces autorités nationales à compétence éprouvée en matière de concurrence peuvent être d’un apport appréciable dans la mise en oeuvre de la législation communautaire.Dans le domaine des télécommunications qui semble le plus avancé, avec celui des médias et de la communication en matière d’existence de ce type d’autorité, chacun des pays membres de l’UEMOA possède le sien.

Par exemple, au Burkina Faso, dans un contexte marqué par la libéralisation du secteur, notamment en matière de téléphonie mobile, et par la récente privatisation de l’Office national de téléphone (ONATEL), existe une autorité de régulation sectorielle dénommée ARTEL.Il est à remarquer que les autorités de régulation sectorielle disposent de moyens matériels et financiers conséquents pour l’accomplissement de leurs missions tandis que les structures à compétence générale n’ont que de faibles moyens.

2°)- Les juridictions administratives, civiles ou commerciales

La législation communautaire de la concurrence prévoit dans ses dispositions l’intervention des juridictions civiles ou commerciales soit pour prononcer la nullité de plein droit, soit pour allouer des dommages et intérêts à la victime de l’accord illicite.

La question de la nullité est importante puisqu’elle concerne la protection de la sécurité juridique des entreprises. Elle est prévue par l’article 2 du règlement 02/2002/CM/UEMOA du 23 mai 2002.

Toute personne intéressée peut s’en prévaloir et la nullité peut être soulevée d’office par le juge.

Le droit communautaire reconnaît la possibilité à la victime d’une violation de l’article 88 un droit à réparation à l’encontre des auteurs de la violation.

Le choix du législateur UEMOA de confier la mission de constatation et de sanction des pratiques anticoncurrentielles à la Commission sous le contrôle de la Cour de Justice n’a pas pour conséquence d’écarter totalement le juge national de la mise en œuvre du droit communautaire de la concurrence.

Les pouvoirs du juge national dans ce domaine sont prévus et s’exercent à deux niveaux : la constatation des nullités et les actions en réparation.

* La constatation des nullités

De l’article 2 du Règlement n° 02/2002/CM/UEMOA relatif aux pratiques anticoncurrentielles à l’intérieur de l’UEMOA, il résulte que les pratiques qualifiées anticoncurrentielles par application de l’article 88 du Traité et visées aux articles 3, 4, 5 et 6 sont interdites sans qu’aucune décision

préalable ne soit nécessaire. En conséquence, le paragraphe 2 de l’article 2 déclare nuls de plein droit, les accords ou décisions dont elles sont l’objet.

Le juge national a, à partir de ce moment et compte tenu de ce que les accords et décisions portant sur des pratiques anticoncurrentielles sont nuls de plein droit, le pouvoir de constater ou de prononcer cette nullité dont le caractère absolu fait qu’elle peut être soulevée d’office.

* Les actions en réparation

Elles sont également de la compétence du juge national et ont pour fondement l’article 22 du Règlement n° 03/2002/CM/UEMOA relatif aux procédures applicables aux ententes et abus de position dominante à l’intérieur de l’UEMOA qui fixe les montants et les conditions dans lesquelles les amendes sont infligées aux entreprises.

Le paragraphe 4 de cet article dispose que « . . . les sanctions prononcées par la Commission sont sans préjudice des recours devant les juridictions nationales relatifs à la réparation des dommages subis. . . »

La réparation des dommages subis par les victimes suppose, en général, que celle-ci rapporte la preuve d’une faute imputable à la personne poursuivie (le problème ne se pose pas s’il y a une décision de la Commission retenant l’existence de pratiques anticoncurrentielles), mais il faut surtout établir le lien entre cette faute et le dommage subi par le demandeur.

A coté des juridictions civiles et commerciales, l’environnement institutionnel des États membres de l’UEMOA est caractérisé par l’existence de structures participant à l’application des législations nationales.

L’association de ces structures à la mise en oeuvre de la législation communautaire s’avère d’autant plus nécessaire que les moyens de la Commission sont limités.De plus, les structures nationales ont une meilleure connaissance des marchés locauxet une expertise dans le traitement du contentieux des pratiques anticoncurrentielles.

§.2- Les règles de procédureL’efficacité tant pour la Commission que pour les entreprises ou les associations et les consommateurs repose pour une grande part sur un mécanisme procédural qui facilitel’application de la législation communautaire de la concurrence.

Ce mécanisme permet également d’assurer la sécurité juridique et la protection des assujettis.

A)- LES DIFFERENTS TYPES DE PROCEDURES

La législation communautaire de la concurrence prévoit différents types de procédures d’adoption des décisions selon leur nature et leurs effets. Outre la procédure gracieuse il y a la procédure contentieuse relative aux cas d’ententes et d’abus de position dominante.

1°)- Procédures gracieuses Ces procédures se rapportent essentiellement à :

a)- La procédure d’adoption de l’attestation négative et de l’exemption individuelle.La demande d’attestation négative vise à faire constater par la Commission qu’il n’y a pas lieu pour elle d’intervenir à l’égard des pratiques mises en oeuvre tandis que la notification a pour objet d’exonérer une pratique illicite de l’application des dispositions de l’article 88 a du Traité du fait de ses effets

Lorsque la Commission, après réception de la notification ou de la demande d’attestation négative, émet des doutes quant à la compatibilité d’une pratique avec le Marché commun, elle engage la procédure contradictoire. Dans ce cas, la Commission communique aux parties intéressées les griefs mis à leur charge, les met en mesure de faire connaître leurs observations avant d’adopter une décision définitive dans un délai de 12 mois. Si aucune décision n’est prise au-delà de ce délai, à compter de l’ouverture de la procédure contradictoire, ce silence des autorités communautaires équivaut à une décision implicite d’attestation négative ou d’exemption.

b)- La procédure d’adoption des règlements d’exécution aux fins d’exemption. L’article 6, paragraphe 7, du règlement de procédure prévoit que, lorsque la Commission se propose d’arrêter un règlement d’exécution aux fins d’exemption, elle doit publier le projet afin de permettre à toutes les personnes et organisations intéressées de lui faire connaître leurs observations.

Avant cette publication, la Commission doit consulter le Comité consultatif de la concurrence. Elle doit également consulter le Comité avant d’adopter définitivement le règlement d’exécution.

2°)- Les procédures de traitement des aides publiques.En matière d’aides publiques, les textes de l’UEMOA sur la concurrence envisagent quatre sortes de procédures :

- la procédure concernant les aides notifiées ;- la procédure en matière d’aides illégales ;- la procédure en cas d’application abusive d’une aide ;- et enfin la procédure relative aux régimes d’aides existantes.

Dans la procédure concernant les aides notifiées, tout projet d’octroi d’une aide nouvelle doit être notifié à la Commission par l’État membre concerné. Le projet en question n’est mis à exécution que si la Commission a pris ou est réputée avoir pris une décision l’autorisant.

La procédure en matière d’aides illégales est déclenchée lorsque la Commission a en sa possession des informations concernant une aide prétendue illégale. Pour clôturer la procédure, la Commission peut décider que l’État membre concerné doit prendre toutes les mesures nécessaires pour récupérer l’aide auprès de son bénéficiaire.

La procédure en cas d’application abusive d’une aide se ramène à la possibilité pour la

Commission d’ouvrir une procédure semblable notamment à celle relative aux aides illégales.

Dans la procédure relative aux régimes d’aides existants, la Commission procède avec les États membres à l’examen permanent de ces régimes, avec la possibilité de faire des recommandations proposant l’adoption de mesures utiles. Si l’État membre concerné ne se conforme pas à une décision conditionnelle ou à une décision négative ou à une injonction de suspension ou à une injonction de récupération ou à une décision de récupération ou aux arrêts de justice y afférents, la Commission peut, après avoir invité l’État membre à faire ses observations, prendre des mesures graduelles.

B)- LA PROCEDURE CONTENTIEUSELa procédure contentieuse de la législation communautaire de la concurrence s’applique aux ententes et abus de position dominante. Cette procédure s’analyse à travers ses différentes étapes que sont la saisine, les pouvoirs d’enquête, d’instruction et de décision de la Commission, sans oublier l’étape de la consultation du Comité consultatif de la concurrence.

1°)- La saisine de la CommissionLa procédure contradictoire est initiée sur décision de la Commission de l’UEMOA avec communication de griefs, suite à une plainte86, une notification émanant d’une ou plusieurs personnes intéressées, ou de sa propre initiative, en vue de l’obtention d’une décision d’attestation négative, d’exemption individuelle, ou de condamnation pour infraction à l’interdiction des ententes et des abus de position dominante. La communication des griefs est faite par la Commission de l’UEMOA qui transmet par écrit, à chacune des entreprises et associations d’entreprises ou à leur mandataire commun, les griefs retenus contre elles88, en leur laissant la possibilité effective de présenter leur défense par écrit ou oralement lors d’auditions.

2°)- Les pouvoirs d’enquête de la CommissionPour recueillir les informations relatives au fonctionnement des marchés dont elle a besoin pour l’exécution de sa mission, la Commission dispose, en vertu du règlement n° 03/2002/CM/UEMOA du Conseil des ministres du 23 mai 2003, d’un triple pouvoir d’enquête. Elle peut soit demander des renseignements aux entreprises, soit opérer des vérifications, soit encore effectuer des enquêtes sectorielles.La demande de renseignements est prévue par l’article 18 du règlement susvisé. De telles demandes peuvent être adressées aux États membres ou aux entreprises et associations d’entreprises. En l’absence de réponse à une première demande de la part d’une entreprise ou association d’entreprises, la Commission sollicite les renseignements demandés par voie de décision.

La vérification s’effectue en collaboration avec l’autorité compétente de l’État membre sur le territoire duquel elle s’effectue.

3°)- La procédure d’instruction devant la CommissionLa procédure d’instruction devant la Commission revêt trois caractères :

- elle est contradictoire ;- elle garantit le respect des secrets d’affaires ;- elle est menée en étroite collaboration entre les États membres.

En vertu de l’article 16 du règlement n°03/2002/CM/UEMOA du 23 mai 2002, la Commission peut se saisir d’office ou être saisie par un plaignant. Les plaignants peuvent être soit des États membres soit des personnes physiques ou morales. Pour que la procédure puisse être considérée comme engagée par la Commission, il est nécessaire qu’il existe un acte d’instruction qui puisse être analysé comme un acte d’autorité manifestant sa volonté de prendre une décision. Aussi, cette procédure débute-t-elle par la communication de griefs. La procédure contradictoire comporte deux phases : la phase écrite (communication de griefs) et la phase orale.

Cette phase comporte entre autres la communication des griefs, le problème de l’accès au dossier et les observations écrites des parties.

Après la réunion par la Commission des éléments qui lui permettent d’établir les indices suffisants de l’existence d’une infraction, elle ouvre le débat écrit en communiquant aux entreprises les griefs qu’elle retient contre elles.

Le respect des droits de la défense exige que les personnes intéressées soient en mesure de faire connaître utilement leur point de vue sur les documents retenus par la Commission dans les constatations qui sont à la base de sa décision. La faculté de prendre connaissance du dossier est prévue par l’article 17, paragraphe 8, du règlement n° 03/2002/CM/UEMOA du 23 mai 2002.

4. La consultation des Etats membres (le Comité consultatif)Le comité consultatif de la concurrence est obligatoirement consulté avant toute décision d’interdiction concernant les ententes et les abus de position dominante.

La consultation a lieu au cours d’une réunion sur invitation de la Commission. À la lettre d’invitation sont annexés l’exposé de l’affaire avec indication des pièces les plus importantes et un avant-projet de décision pour chaque cas à examiner. La Commission émet un avis à condition qu’au moins la moitié des membres, au nombre de seize, soit présente. Cet avis est consigné par écrit et joint au projet de décision. L’avis du Comité ne lie pas la Commission dans sa prise de décision.

5. La décision de la CommissionAprès consultation du Comité consultatif de la concurrence, la Commission est en mesure de prendre des décisions, dans le cadre du contentieux des ententes et des abus de position dominante, à savoir la cessation des infractions et les sanctions pécuniaires.

De même, la Commission peut décider de prendre des mesures provisoires après l’audition des personnes intéressées sans consultation du Comité.Si la Commission constate, sur demande ou d’office, une infraction aux dispositions de l’article 88 du Traité, elle peut obliger par voie de décision les entreprises intéressées à mettre fin à l’infraction constatée.

La décision peut consister en une injonction positive aussi bien qu’en une interdiction. Bien que le règlement n°03/2002/CM/UEMOA n’accorde explicitement à la Commission que le pouvoir de prendre des décisions ordonnant la cessation d’une infraction, ce pouvoir implique celui de constater l’infraction dont il s’agit, même si celle-ci a pris fin.

La décision d’interdiction est obligatoire pour les entreprises destinataires, sous réserve de leur recours devant la Cour de Justice. Elle est immédiatement exécutoire.Les sanctions pécuniaires prennent généralement deux formes : les amendes et les astreintes.

Le règlement n° 03/2002/CM/UEMOA prévoit deux catégories d’amendes, à savoir les amendes pour infraction à des dispositions de procédures et les amendes pour infraction aux règles de fond.

Les amendes pour infraction à des infractions de procédures peuvent être infligées dans les cas suivants, pour un montant forfaitaire de 500 000 francs CFA : indications inexactes ou dénaturées à l’occasion d’une demande de renseignements ; absence de réponse dans le délai fixé lorsque le renseignement est demandé par voie de

décision ; présentation incomplète, lors d’une vérification, des livres ou autres documents

professionnels requis ; refus de se soumettre à une vérification ordonnée par voie de décision.

Les amendes pour infraction à des règles de fond ont des montants sensiblement élevés :de 500 000 à 100 000 000 francs CFA, il peut être porté à 10 % du chiffre d’affaires réalisé au cours de l’exercice précédent ou 10 % des actifs de ces entreprises. Ces amendes sont infligées lorsqu’une entreprise enfreint les dispositions de l’article 88 du Traité.

La Commission peut infliger aux entreprises des astreintes à raison de 50 000 à 1 000 000 francs CFA par jour de retard à compter de la date qu’elle fixe dans sa décision, pour les contraindre à : mettre fin à une infraction aux dispositions des articles 88 a ou b du Traité ; fournir de manière complète et exacte un renseignement qu’elle a demandé par voie de

décision prise en application de l’article 1 du Règlement n° 03/2002/CM/UEMOA ; se soumettre à une vérification qu’elle a ordonnée par voie de décision.

La fixation des astreintes présente deux caractéristiques : celle d’être forfaitaire, dans la mesure où elle ne tient compte ni de la gravité de

l’infraction, ni de sa durée, ni d’éventuels dommages causés aux tiers ; celle de ne pas être définitive puisque, dès que les intéressés ont mis fin à l’activité

illicite, la Commission peut fixer le montant à payer à un chiffre inférieur à celui prévu dans un premier temps.

C. LE CONTROLE DE L’ACTION DE LA COMMISSION PAR LA COUR DE JUSTICELe contrôle de l’action de la Commission est institué par l’article 90 du Traité précité.À cet égard, il sera précisé, d’une part, les conditions dans lesquelles le recours peutêtre formé devant le juge communautaire et, d’autre part, les modalités de ce recours.

1°)- Les conditions d’introduction de recoursTous les actes adoptés par la Commission à l’occasion de l’instruction d’une affaire nene peuvent pas faire l’objet d’un recours. Un tel recours n’est possible que si l’acte attaquéest susceptible de produire des effets juridiques et de modifier la situation juridique ou matérielle des requérants.

Le demandeur ne peut saisir le juge communautaire d’un recours contre une décision de la Commission que si cette décision lui fait grief (s’il a un intérêt à agir). Dans le cas contraire, la demande sera rejetée comme irrecevable.

Les actes susceptibles de recours peuvent être repartis en deux catégories, à savoir, les actes mettant fin à une procédure et les actes pris en cours d’instruction.

Les entreprises qui sont destinataires d’une décision de la Commission peuvent se pourvoir contre une décision d’exemption. Il en est de même pour les opérations de concentration constituant une pratique assimilable à un abus de position dominante.

Dans ce cas, les entreprises concernées ont la possibilité de former un recours à l’encontre d’une décision d’injonction de rétablissement de la situation de droit antérieur, de modification de l’opération.

En outre, il va de soi qu’une décision ordonnant qu’il soit mis fin à une pratique puisse faire l’objet de recours.

Le recours est également ouvert à l’encontre d’un certain nombre d’actes de la Commission qui peuvent intervenir au cours de l’instruction d’une affaire, dès lors qu’ils sont susceptibles de produire des effets juridiques.

Aussi, un tel recours, n’est possible ni contre la décision de la Commission d’engager la procédure, ni contre la communication à l’entreprise des griefs retenus contre elle.

Ces actes présentent un caractère purement préparatoire.

Ce recours est possible à l’encontre d’une décision visant à demander des renseignements ou à procéder à une vérification dans les conditions prévues respectivement par les articles 18, 19 et 21 du règlement n°03/2002/CM/UEMOA du 23 mai 2002……..Enfin, les mesures provisoires, prises dans les cas de préjudices graves et irréparables ou d’une atteinte intolérable à l’intérêt général sont susceptibles de recours suivant l’article 5, paragraphe 9, du règlement 03/2002/CM/UEMOA du 23 mai 2002.

2°)- Les modalités de recoursLes recours contre les décisions de la Commission sont exercés selon trois modalités : le recours de la légalité ; le recours de pleine juridiction ; le recours en manquement. Et dans une moindre mesure le recours préjudiciel

En règle générale, le juge communautaire statue en tant que juge de la légalité. Il statue donc sur des conclusions tendant à l’annulation totale ou, le cas échéant, partielle de la décision de la Commission, auxquelles il fait droit ou qu’il rejette. Dans ce cadre, l’exercice des pouvoirs de la Commission peut porter sur des appréciations complexes en matière économique. Le contrôle juridictionnel respecte ce caractère en se limitant à l’examen de la matérialité des faits et des qualifications juridiques que la Commission en déduit. Aussi, la nature du contrôle juridictionnel susceptible d’être exercée sur la décision de la Commission portera-t-elle essentiellement sur les formes substantielles et les problèmes de fond.

S’agissant du respect des formes substantielles, le contrôle s’exerce en premier lieu sur la motivation des décisions. Il convient de préciser que le moyen tiré de la violation de l’obligation de motivation est un moyen d’ordre public qui peut être soulevé d’office par le juge.

Au titre du respect des formes substantielles, peut, en outre, être discutée devant le juge, toute question relative à la régularité de la procédure devant la Commission.

Dans ce cadre, le juge peut se prononcer sur la régularité de la communication des griefs, le déroulement régulier de l’audition, et, plus généralement, le respect des droits de la défense, la régularité de la consultation du Comité consultatif de la concurrence.

En ce qui concerne le fond du litige, le contrôle juridictionnel consiste à s’assurer que la décision ne repose pas sur une erreur de droit, c’est-à-dire, pour l’essentiel, qu’elle est conforme aux principes généraux du droit communautaire ou sur des faits matériellement inexacts ou encore sur des appréciations économiques entachées d’une erreur manifeste.Si les pouvoirs du juge communautaire sont, en principe, ceux d’un juge de la légalité, il dispose toutefois d’un pouvoir plus étendu lorsqu’une sanction financière a été infligée.

Dans une telle situation, le juge dispose d’un pouvoir de réformation de la décision quant au montant de l’amende ou de l’astreinte, de réduction de leur montant ou de l’augmentation ou de l’imposition des obligations.

Dans le cadre de l’application de la législation communautaire de la concurrence, le recours en manquement se situe dans le domaine du contrôle des pratiques anticoncurrentielles imputables aux États membres et des aides publiques. À cet effet, l’article 6, paragraphe 4, du règlement n° 02/2002/CM/UEMOA dispose que si l’État membre concerné ne se conforme pas à une décision de la Commission, celle-ci peut saisir la Cour de Justice suivant les articles 5 et 6 du Protocole additionnel n° 1 du Traité.

Il en est de même pour les aides publiques. Dans ce cas, lorsqu’un État membre ne respecte pas les décisions prises selon les dispositions du règlement n°04/2002/CM/UEMOA du 23 mai 2002, la Commission saisit la Cour de Justice. Ainsi, le recours en manquement appartient à la Commission. Si elle estime qu’un État membre ne s’est pas conformé aux obligations communautaires, elle adresse à cet État un avis motivé, après l’avoir mis en mesure de présenter ses observations. Au cas où l’État en cause ne se conformerait pas à cet avis dans le délai imparti par la Commission, elle peut saisir la Cour de Justice d’un recours en manquement.

Cette procédure est également ouverte à chaque État membre après saisine préalable de la Commission. Celle-ci a l’obligation d’émettre un avis motivé, après avoir permis à l’État concerné de faire ses observations.

Si la Commission n’émet pas d’avis dans un délai de trois mois à compter de la demande, l’affaire peut être directement portée devant la Cour de Justice.Par contre, si la Cour estime le recours fondé, elle constate le manquement. Tous les organes de l’État membre concerné doivent assurer, dans les domaines de leurs pouvoirs respectifs, l’exécution de l’arrêt.

En cas d’abstention de l’État membre dont le manquement a été constaté, la Commission à la faculté de saisir la Conférence des Chefs d’État et de Gouvernement afin qu’elle invite l’État membre défaillant à s’exécuter sans préjudice des sanctions prévues à l’article 7 du Traité de l’Union relatif à l’exercice de la surveillance multilatérale.Les conclusions principales en annulation ou en réformation de la décision de la Commission peuvent être assorties de demandes de mesures de référé. Les conclusions en référé peuvent consister soit en une demande de sursis à l’exécution de la décision, soit en une demande de mesures provisoires.

L’octroi des mesures provisoires est subordonné à l’existence d’un préjudice grave et irréparable ou d’une atteinte intolérable à l’intérêt général, auquel il convient de remédier d’urgence.

Dans ce cadre, l’entreprise peut demander à la Cour tout aménagement relatif aux conditions d’exécution de la décision de la Commission, dès lors que les mesures présentent un caractère intérimaire et ne remettent pas en cause la solution susceptible d’être acquise au principal.

Le recours préjudiciel : Le choix du législateur UEMOA de confier la mission de constatation et de sanction des pratiques anticoncurrentielles à la Commission sous le contrôle de la Cour de Justice n’a pas pour conséquence d’écarter totalement le juge national de la mise en œuvre du droit communautaire de la concurrence.

Les pouvoirs du juge national dans ce domaine sont prévus et s’exercent à deux niveaux : la constatation des nullités et les actions en réparation.

* La Compétence consultative de la Cour de Justice

La compétence consultative de la Cour de Justice découle de l’article 27 de l’Acte additionnel n°10/96 portant Statuts de la Cour de Justice et de l’article 15 du Règlement n° 01/96/CM portant règlement de procédures de la Cour de Justice.

Cette compétence s’exerce sans aucun doute dans le domaine de la concurrence où l’occasion a été donnée à la Cour de Justice d’interpréter les articles 88, 89 et 90 du Traité de l’UEMOA qui sont relatifs aux règles de concurrence.

Dans son Avis n° 003/2002 du 27 juin 2000, la Cour de Justice, à qui il avait été demandé de dire le droit sur la portée des articles 88, 89 et 90 précités, a retenu que :

- les dispositions des articles 88, 89, et 90 du Traité consacrent une compétence exclusive de l’Union ;

- « les Etats membres ne sont compétents que pour prendre les dispositions pénales réprimant les pratiques anticoncurrentielles, les infractions aux règles de transparence du marché et à l’organisation de la concurrence. »

Cet avis a fait l’objet de critiques conjointes par les professeurs Joseph Issa-Sayegh et Michel Filiga Sawadogo, Professeurs agrégés de droit (voir site www.ohada.com ).

§.3- La mise en oeuvre effective de la politique de la concurrenceA ce stade, pour multiples raisons, peu d’affaires ont été traitées.

Selon un bilan présenté par les services de la Concurrence de l’UEMOA, sept affaires ont été identifiées depuis 200114, auxquelles s’ajoutent celles dont a été saisie la Cour de Justice.

A)- DEVANT LA COMMISSIONUne affaire concerne une « concentration » par prise de participation. Trois affaires sont relatives à des aides d’Etat, respectivement en 2001, 2003 et 2004. Deux concernent des « pratiques imputables aux Etats », en 2006.Une a trait à une pratique de fraude.

Il peut être remarqué qu’aucune affaire ne concerne les pratiques d’ententes et les abus de position dominante.

En termes de secteurs d’activité, les dossiers ont concerné l’énergie (pétrole et gaz) le ciment, l’agro-alimentaire et le tabac.

Il convient de remarquer le manque de pratique et, de ce fait, les hésitations dans la qualification des transmissions de dossiers à la Commission par les autorités nationales :simple information ou transmission formelle.

Un exemple a été débattu lors de la troisième session du comité consultatif relatif à une plainte de la société Malitel contre la société Orange. Cette plainte a été déposée dans un premier temps auprès des autorités maliennes (le Conseil de la concurrence) ; selon la procédure nationale, une demande d’examen a été transmise à l’administration malienne qui, à son tour a communiqué le dossier auprès des services de la Commission. La question se pose en un tel cas de savoir si le dossier est transmis pour simple information, pour avis ou pour transmission formelle en vue d’une décision sur le fondement de l’article 88 du traité et des règlements de 2002, en vertu de principe d’exclusivité décisionnelle confiée à la Commission.

B)- DEVANT LA COUR DE JUSTICEEn dehors du recours préjudiciel et des avis rendus aucune saisine de la cour n’a eu lieu depuis l’entrée en vigueur de la législation UEMOA sur la concurrence.

Conclusion

Dans le Traité de l’UEMOA, tout comme dans celui de l’Union européenne, le principe de la libre concurrence est un des principes cardinaux qui sous tendent l’instauration d’un marché commun basé sur la libre circulation des personnes, des biens, des services et le droit d’établissement.

La maîtrise de ces principes par les acteurs au développement sera d’un grand apport à la consolidation de l’Etat de droit et de la bonne gouvernance dans les Etats membres de l’UEMOA.

14 Statistiques de 2007

La participation active de la Cour de justice à cette session de formations et aux autres à venir, est le témoignage vivant de notre souci permanent d’améliorer les connaissances des praticiens du droit et d’ouvrir un peu plus leurs horizons en matière de droit de la concurrence parce que la Cour doit assurer son rôle de régulateur juridique des actions des différents organes de l’Union afin d’être le principal acteur de la construction du droit communautaire de l’UEMOA.