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2012/2013 De la désobéissance à la soumission Rapport d’études de licence ENSAPLV 24 Juin 2013 Professeurs : J-M. CHANTEUX P. HANNEQUIN SAIDALI Nasma n°11596

De la désobéissance à la soumission

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Page 1: De la désobéissance à la soumission

2012/2013

De la désobéissance à la

soumissionRapport d’études de licence

ENSAPLV24 Juin 2013

Professeurs: J-M. CHANTEUXP. HANNEQUIN

SAIDALI Nasman°11596

Page 2: De la désobéissance à la soumission

SOMMAIRE

Mon parcours 3

I-Le Logement 4•Immeuble de 10 logements•Immeuble de 80 logements•Voyage à Amsterdam•Immeuble de 12 logements

II-Les Equipements 8•Couverture de skate-park•Couverture de skate-park, variante; espace public provisoire•Office de tourisme•Equipement culturel•Bureau privé

III-Réflexion 13 1)La Désobéissance

• A l’écoleQui entraine des conséquences négatives…mais pas toujoursA l’école

•Qui entraine des conséquences négatives…mais pas toujours2)L’architecture participative

•L’importance de l’observation et de l’analyse du quartier• Comment intégrer les habitants?

Conclusion 29

Bibliographie 30

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Page 3: De la désobéissance à la soumission

Mon parcours

J’ai effectué la majorité de mon parcours à l’île de la Réunion.L’architecture et le bâtiment s’imposa à moi d’abord à traversla contemplation de maisons individuelles sur l’île puis serévéla lors des différents voyages que j’ai effectué dans lemonde. En effet à travers ces voyages je me suis posée laquestion des différentes manières d’habiter, notamment auxComores. La ville où nous résidions m’a vraiment interpellépar ses bâtiments construits, pour la plupart, de la mêmemanière, suivant la classe sociale à laquelle on appartient. Jem’étais dit sur le moment que c’était vraiment dommage et dene pas tirer parti de la vue que pourrait procurer cette île del’Océan Indien et des vastes terrains presque inexplorésqu’elle pouvait offrir afin de créer des bâtiments un peu plusinnovants et ainsi redonner à la ville un dynamise perdu. Lepotentiel non exploité de cette île était presque révoltant et jedécidai de m’orienter vers des études liées au bâtiment pour,un jour peut être, laisser mon empreinte dans un paysage queje trouvais pour le moment gâché. Ainsi, après trois années declasses préparatoires à la Réunion j’intégrai l’ESTP (Ecoleclasses préparatoires à la Réunion j’intégrai l’ESTP (EcoleSpéciale des Tavaux Publiques et du Bâtiment) puis m’étantrenseignée au préalable sur un double cursus ingénieur-architecte je postulai par la même occasion à l’ENSAPLV(Ecole Normale Supérieure d’Architecture de Paris La Villette).J’y fus admise et me voici trois ans plus tard à dresser le bilande ces années qui n’ont pas toujours été faciles mais qui n’ontjamais cessé d’être intéressantes.

Nous verrons dans un premier temps une partie des projetsque j’ai pu réaliser pendant ces trois années passées àl’ENSAPLV suivant deux axes: les logements et leséquipements. En effet le logement a été une étape marquantedans notre apprentissage. Elle nous a fait prendre consciencede la difficulté d’aménager un espace de vie optimal dans unsite parfois contraignant. Nous avons également étésensibilisés à l’optimisation des performances énergétiques. Leséquipements furent aussi un passage important dans le cursus:ils nous ont permis de mieux laisser libre cours à notreimagination et d’ainsi expérimenter des choses intéressantesau niveau de la forme.Dans un deuxième temps nous étudierons les pratiquesrelatives à l’architecture participative et dans quelle mesured’autres travaux effectués à l’école pourraient servir cettecause. 3

Page 4: De la désobéissance à la soumission

Consigne

Dix logements, du T1 au T4, étaient demandéspour ce projet, sur une parcelle rue Archereaudans le XIXe arrondissement de Paris. Uneventilation naturelle de toutes les pièces desappartements était souhaitée.

Solution choisie

Le projet se constitue de deux corps debâtiment reliés par une bande de circulationouverte. Ces deux parties sont mises à unedistance l’une de l’autre de 3,5m. Ce sont doncles pièces de service qui donnent sur l’espaceentre les deux. Les vues principales se trouventcôté rue ou sont sur la partie dégagée dujardin. La partie du bâtiment côté nord estcomposé d’un empilement de T1, l’autre partie

Immeuble de 10 logements

Plan R+1, R+2, R+3

Plan R+4

jardin. La partie du bâtiment côté nord estcomposé d’un empilement de T1, l’autre partiepossèdent trois niveaux de T3 puis un T4duplex s’emboite avec un T2. Le bâtiment estun R+5. L’attique a été traité de manièredifférente au niveau des matériaux.

Bilan

C’est avec ce projet que nous avons découvertl’importance de la ventilation naturelle.L’orientation des appartements est égalementun point sur lequel il faut être vigilant car nousdevons tirer au maximum parti del’ensoleillement. Lors de la correction, lesprofesseurs ont approuvé le plan desappartements mais m’ont conseillé de mieuxtravailler les façades à l’avenir .

Plan R+5

Elévation rue Archereau

Licence 3– Professeurs: D. HENRY P. HANNEQUIN

Coupe longitudinale, transversale

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Page 5: De la désobéissance à la soumission

Consigne

Nous devions pour ce projet concevoir 80logements, toujours du T1 au T4, sur uneparcelle de 100m de long, rue de Crimée dansle XIXe arrondissement de Paris. Les mêmesrègles que l’exercice précédent sur laventilation des pièces étaient à respecter.

Solution choisie

Pour la typologie du bâtiment j’ai choisid’épouser la rue du côté Sud afin de laisser unjardin conséquent de l’autre côté. Desvolumes (R+6) émergent verticalement ethorizontalement d’une bande (R+5), avec unedistinction au niveau des matériaux, pourqu’on ait vraiment l’impression qu’ils viennentimpacter la bande. Ainsi, un matériau plutôt« chaleureux » a été utilisé pour la bande (lebardage est en bois) et du zinc a été utilisépour les redans. Au dernier niveau la bande seretire pour laisser les volumes jaillir et deux

Immeuble de 80 logements

retire pour laisser les volumes jaillir et deuxterrasses communes sont crées. Ellespermettent d’avoir une vue sur le jardin et surle canal qui se dévoile à travers le bâti. Lespetits logements se retrouvent plutôt sur labande sud-est tandis que les logements plusspacieux sont localisés dans la partie sud-ouestet dans les redans. Les espaces de circulationsont ouverts et peuvent donc servir àl’aération de pièces de service. En plus duRDC, trois niveaux sont différents.

Bilan

C’était la première fois que l’on faisait unprojet d’une telle envergure, c’était doncpresque un défi. Lors de la correction, lesprofesseurs se sont interrogés sur le choix desmatériaux utilisés, ils m’ont averti que le boisne vieillissait pas toujours très bien (qu’il fallaitbeaucoup le traiter). Les professeurs nous ontégalement, pendant l’exercice, rappelél’importance de la vision que le bâtimentpouvait avoir le bâtiment depuis la rue.

Licence 3– Professeurs: D.HENRY, P.HANNEQUIN

Plan R+6

Plan R+5

Exemple de T3

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Page 6: De la désobéissance à la soumission

Voyage à Amsterdam

Au cours de la deuxième année passée àl’ENSAPLV nous avons effectué unvoyage à Amsterdam. Nous avons étudiéles différents types de logements quipouvaient être rencontrés là-bas. Deplus, nous avions formé des groupesavant de partir qui étaient en charge dethèmes à traiter ensuite en exposé à larentrée (le nôtre s’occupait del’emboitement des logements, ainsi quela tripartition fonctionnelle, esthétique).Ce voyage a été très instructif,Amsterdam déborde d’exemples dans lethème du logement.

A notre retour nous devions choisir uneréférence d’appartement découvert auxPays-Bas pour démarrer l’exercicesuivant.

Licence 2– Professeurs: A. PORTNOI, R. SALAZAR

suivant.

J’ai choisi le projet Glattpark HousingComplex, de Von Ballmoos KruckerArchitekten:

Plan d’unT3

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Page 7: De la désobéissance à la soumission

Consigne

En gardant en mémoire la référence choisie àl’issue du voyage à Amsterdam nous devionscréer un immeuble de douze logements dansune parcelle particulièrement étroite (dedouze mètres de large, vingt-cinq mètres delong) pour nous mettre dans une situation deparcelle typiquement parisienne. Lesappartements devaient se décliner du T1 au T4.

Solution choisie

Pour ce projet de logement les professeursnous ont incité à nous concentrer surl’organisation intérieure des appartements.C’était la première fois, que nous réalisions deslogements et j’ai donc voulu leur offrir un peude tout ce que j’aspirais pour un logement: unespace totalement extérieur, un espace semi-

Immeuble de 12 logements

espace totalement extérieur, un espace semi-extérieur (une loggia) et un bel espace à vivre,comme dans la référence étudiée.

Le bâtiment se composait d’un immeuble R+8sur rue et en fond de parcelle desappartements qui montait au R+3 (les T2).

La circulation se faisait en façade et étaitpartiellement ouverte pour permettre unebonne aération.

Bilan

J’ai trouvé cet exercice très compliqué, laparcelle était difficile à appréhender. Lesprofesseurs ont trouvé que le projet que jeproposais ne s’inscrivait pas très bien dans lepaysage urbain (au niveau de la hauteur) maisqu’il y avait eu une progression pendant ladurée du projet sur l’organisation desappartements.

Licence 2– Professeurs: A.PORTNOI, R.SALAZAR

Coupe longitudinale

Exemple de T3

Plan R+1, R+2, R+3

Plan R+4, R+5 R+6

Plan R+8

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Page 8: De la désobéissance à la soumission

Couverture pour skate-park

Consigne

Cet exercice consistait en la réalisation d’unecouverture de skate-park de 400m². Nousdevions respecter une hauteur sous plafondminimale de 8m mais nous n’avions pas decontrainte au niveau de la forme.

Solution choisie

La pratique du skate-board évoque ledéséquilibre, c’est donc ce que j’ai essayé detraduire dans cette couverture de skate-park:

Il est composé de 6 bandes de largeursdifférentes, reliées en coupe par une lignebrisée (qui se traduit donc par une différencede hauteur entre différents poteaux). Undécalage de 2m entre les poteaux arrière etles poteaux avant est perceptible si bien que ledéséquilibre peut se faire dans deux directions.déséquilibre peut se faire dans deux directions.Les poteaux forment un système de « poteauxmoisés ». L’accompagnement du projet par uningénieur structure m’a permis de trouvercette solution, au service de la fragilitérecherchée. En effet, au lieu de d’avoir un seulpoteau très large, le poteau moisé se composede deux poteaux très fins reliés entre euxpour avoir la résistance d’un seul.La toiture est recouverte de panneaux en tôlescolorées (les couleurs retenues sont celles decartes de jeu, pour se référer à la fragilité d’unchâteau de cartes).

Bilan

Les professeurs ont trouvé que le sujet avaitbien été respecté et ont aimé la vue de facequi fonctionnait comme une bouche quiengouffrait les skateurs.

Plan Toiture

Elévation

8Licence 1 – Professeur: S. ROUSSEL A. LAPASSAT

Page 9: De la désobéissance à la soumission

L’histoire de ce skate-park ne s’arrête pas là puisqu’il aensuite été repris à l’ESTP dans un projet deconstruction métallique. Le principe est resté le mêmemais l’utilisation d’une structure à base de treillis l’acomplètement modifié.

Couverture d’un skate-park, variante

Consigne

Le but de cet exercice était de dimensionner la totalitédes éléments de l’édifice (treillis, contreventement, etc.).

Bilan

Ce projet a été important dans mon double-cursus carj’ai vraiment eu l’impression d’allier les deux

Solution choisie

La couverture fonctionne avec des portiques treillis.Elle est remplie d’un côté (où il n’y a donc pas besoinde contreventement), ouverte mais contreventée del’autre.

B2BIA– Professeur: A. QUENELLE

Le skate-park en cours de projet d’architecture devait ensuite êtreintégré dans le dernier exercice du semestre de la Licence 1: lacréation d’un espace public provisoire. Le défi était en effet de créer unespace publique dans un lieu totalement en chantier (sur le futur sited’une ZAC à Ivry-sur-Seine), en tenant ainsi compte de l’ordre dedestruction/construction du site en fonction du temps. Cependant, cen’était pas notre skate-park que nous devions intégrer dans le projet,mais un skate-park tiré au sort parmi ceux de nos camarades. Cetteétape nous a ainsi appris à appréhender un objet sur lequel nousn’avions pas du tout réfléchi, et à essayer d’en tirer les meilleuresqualités. Le projet d’espace provisoire que j’ai décidé de mener étaitrégi par le thème « coin à palabres » (qui, avec du recul aurait du mal àêtre réalisé): des coins sous des arbres (gardés dans la ZAC finale)étaient aménagés sur des buttes ou des creux pour créer des espacesintimes où les gens pourraient se retrouver.

Licence 1 – Professeur: S. ROUSSEL A. LAPASSAT

j’ai vraiment eu l’impression d’allier les deuxcompétences. Il nous a également permis d’avoir un vraicas concret de dimensionnement.

Espace public provisoire

9

Page 10: De la désobéissance à la soumission

Consigne

Après une étude de la rue Saint-honoré et larue du Faubourg-Saint-honoré nous devionstrouver un site sur ce tronçon afin d’yimplanter un office de tourisme. Les consignesétaient les suivantes: l’office devait contenir unaccueil pour le public, une salle de réunion,deux bureaux, des toilettes accessibles auxpersonnes à mobilité réduite au rez-de-chaussée. Le tout devait avoisiner les 90m².

L’office de tourisme

Solution choisie

Le site choisi était la place André Malraux àproximité de la Comédie Française car c’étaitun lieu stratégique (le point de rencontre dedifférentes rues) où il y avait beaucoup depassage.

J’ai voulu opposer les volumes réguliers du

Plan RDC

Plan R+1

J’ai voulu opposer les volumes réguliers ducorps de bâtiments (deux parallélépipèdes quiglissent l’un par rapport à l’autre) à une toitureirrégulière qui reprend le thème du végétal. Latoiture s’inspirait de celle du centre Pompidoude Metz, partait du sol et grimpait à la manièred’un arbre

Bilan

Les professeurs ont regretté la réalisation de lamaquette qui n’était pas à la hauteur de leursespérances (j’ai rencontré des difficultés àtraduire en maquette la toiture comme je levoulais). C’était mon premier équipement etavec du recul j’aurais du prendre un peu plusde risque.

Licence 1– Professeurs: S. ROUSSEL A. LAPASSAT 10

Page 11: De la désobéissance à la soumission

Pour cet exercice nous devions travailler enamont sur des références de bibliothèques oud’espaces d’exposition et s’en inspirer pourconfectionner notre projet. En effet lesprofesseurs nous assuraient que, de toutemanière, tout avait déjà été testé dans ledomaine de l’architecture, il nous fallaitreprendre des éléments qui avaient déjà étécrées pour penser notre propre architecture.Ce point de vue est sans doute vrai mais aumoment où il nous l’a été exposé, j’ai quandmême eu une pointe de déception car celasignifiait que nous ne serions jamais novateursplus tard. Néanmoins le travail avec uneréférence reste très formateur, il nous permetde nous constituer une culture architecturalenécessaire dans la réalisation d’un projet. J’aiainsi étudié le Kirchner Museum à DavosdeGigon et Guyer

A partir de cet exposé, je décidai de reprendre

L’équipement culturel

A partir de cet exposé, je décidai de reprendrepour mon projet le thème du « déboitement ».

Licence 2– Professeurs: A.PORTNOI, R.SALAZAR

Consigne

Un équipement culturel composé de troissalles d’exposition, d’une bibliothèque, debureaux, d’une cafétéria étaient attendus. Nousavions nous-mêmes choisi le site dans le vastedomaine de la cité universitaire de Paris.

Je me suis implantée à la place de ce bâtimentdésaffecté , bordé par une rangée d’arbres

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Solution choisie

Le projet peut se décomposer en trois parties:1)une partie exposition2)une partie bibliothèque à l’étage3)une partie accueil, bureau et cafétéria au rez-de-chaussée

Comme l’œuvre de Gigon et Guyer unevisibilité des espaces d’exposition (et parextension dans mon projet une visibilité dessalles de lecture de la bibliothèque) étaitvoulue. Ces salles se démarquent donc dans lesens vertical et sont reliées par une nappe dedistribution. Cela permet de les éclairer demanière spécifique:

Plan RDC

1

2

3

La lumière du soleil est filtrée en

Licence 2– Professeurs: A. PORTNOI, R. SALAZAR

Bilan:J’ai pris énormément de plaisir à réaliser ceprojet et à en travailler les détails. Lesprofesseurs paraissaient égalemententhousiastes et l’ont trouvé assez abouti.

En plan des parallélépipèdes égalements’échappent sur les côtés. Au centre dudispositif se trouve une terrasse qui peut êtreutilisée par la cafétéria et faire office de salled’exposition ouverte.

Plan R+1

Coupe longitudinale

Coupe transversale

La lumière du soleil est filtrée enpartie haute par du verretranslucide et est redistribuéeaprès être passée dans unplenum par un plancher de verrepour avoir une lumière indirectedans les salles d’exposition.

Dans les salles de lecture ce typed’éclairage est repris, couplé àune lumière plus directe.

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Page 13: De la désobéissance à la soumission

Le bureau privé

C’est avec ce projet que je me suis vraiment questionnéesur le rôle d’un architecte et la responsabilité qu’il avaitvis-à-vis des futurs utilisateurs de son bâtiment. En effetl’idée était de créer un bureau privé « éclaté » (à lamanière de la Moriyama House de SANAA) : un cuberegroupait la partie bureau de travail, un autre la partiebibliothèque et le lieu dans lequel pouvait se dérouler lesréunions et le troisième un espace de détente. Ces troisparties étaient reliées par une sorte de pergola qui laissaitfiltrer la lumière.

Ce projet a été un échec, lors de la correction le jury asouligné le fait que je créais des espaces servants quin’étaient pas nécessaires pour ce type d’équipement etpas agréables. La personne qui m’a corrigé a mêmeenchéri en disant que si « elle avait été le client, ellen’aurait pas signé ».C’est donc à partir de ce moment que je me suis posée laquestion du rôle du client dans la conception d’un espace.En école nous pouvons dans une certaine mesureconsidérer que les clients sont les professeurs qui, avecleur expérience, sont là pour nous reprendre s’ils estimentleur expérience, sont là pour nous reprendre s’ils estimentqu’une idée que nous proposons ne marchera pas maiscela ne nous apprend pas à travailler avec l’avis depersonnes extérieures, avec des clients potentiels. En effet,les professeurs nous donnent les consignes à respecter etsont ensuite là pour nous guider vers ce que noussouhaitons entreprendre mais pas vers ce qu’ils désirent.Ils nous conseillent, nous orientent vers des solutions maisnous sommes libres de décider et de créer l’architecturequi nous plait.Cette possibilité de désobéissance fait que nous nousinvestissons beaucoup dans les projets que nous réalisons,nous les considérons comme très personnels et lamoindre remarque négative nous atteint. Avec les annéesj’ai appris qu’il fallait prendre un peu de recul par rapportaux projets que l’on présentait aux professeurs, que lesremarques qui nous semblent parfois cruelles n’étaient pascontre nous. Lorsque je suis arrivée à l’école j’ai tout demême senti une différence avec les études que j’avaisentreprises auparavant : en classe préparatoire nous étionségalement jugés sur notre capacité à raisonner mais lescritiques étaient basées sur des exercices totalementimpersonnels donc les commentaires parfois désobligeantsde certains professeurs semblaient plus faciles à encaisser(et nous étions nombreux à y être confrontés). 13

Page 14: De la désobéissance à la soumission

Ici j’avais l’impression qu’à travers notre projet et à traversles innombrables solutions qui s’offraient à nous lors de sonélaboration (ce qui changeait également par rapport à laprépa, où nous aboutissions en général à un seul résultatlors de la résolution d’un exercice) je dévoilais ce quej’étais réellement et j’en étais presque effrayée. Parexemple, un des tout premiers exercices auquel j’ai étéconfronté et qui m’avait un peu déconcerté sur le momentétait un projet d’arts plastiques : la création d’une amulette.L’amulette est un objet presque intime car il est un peul’expression de ce que nous ressentons, de ce que noussommes. La liberté de créer ce petit objet totalementsubjectif s’offrait à moi et je n’avais aucune idée decomment est-ce que j’allais m’y prendre.

Ainsi, dans notre apprentissage, on nous apprend enquelque sorte à être dans la « désobéissance » et à poussernos propres réflexions jusqu’au bout. Cette étape est sansdoute nécessaire à notre accomplissement en tantqu’architecte car elle permet de cibler quels typesd’architecture nous attire. Nous nous constituons notrepropre style, nous avons toutes les clefs en main pour êtreentreprenant, pour pouvoir proposer des projetsintéressants à nos clients.Cependant nous devons prendre conscience que cette

Licence 1, Professeur : L. GODART

intéressants à nos clients.Cependant nous devons prendre conscience que cettepériode de désobéissance ne doit pas conduire à unégocentrisme démesuré et à état d’entêtement injustifiédans le travail que l’on produira plus tard.En effet, le fait de réfléchir à un projet sans avoir mené uneenquête au préalable sur la population susceptible defréquenter les lieux ainsi que sur les pratiques qu’elleentretient peut conduire à des problèmes d’usage.

Pendant le stage dans la maîtrise d'ouvrage publique que j’aieffectué à la fin de la deuxième année (à la Direction desBâtiments et Architecture [DBA], sur l’île de la Réunion), j'aiété confrontée à ce cas, dans le cadre d’une mission demaintenance d’un de leurs bâtiments :Les travaux de rénovation et d’extension du lycéeprofessionnel Julien de Rontaunay à Saint-Denis ont étéachevés en 2011. Au premier coup d’œil la nouvellejeunesse du lycée lui confère un air de bâtiment a priorifonctionnel. Les principes qui ont été appliqués sur le projetsemblent parfaitement efficaces : circulation d’airmajoritairement traversante avec la mise en place dejalousies, brise-soleils sur les parties du bâtiment orientéesau sud.

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Page 15: De la désobéissance à la soumission

La pratique du bâtiment montre que la réalité n’est pas enaccord avec ces préceptes. En effet, certains professeursont interpellé le service technique de la DBA car ils seplaignaient de certains aspects défaillants du bâtiment, une« mauvaise réalisation » de certaines parties du lycée quiporterait même atteinte à leur santé.

Les locaux qui posaient problème étaient pour la plupartsitués au rez-de-chaussée du lycée et les professeurs leurreprochaient principalement une mauvaise ventilation (cequi, en été, devenait d’après eux rapidementinsupportable), doublée dans certains cas d’un manque deluminosité.

Les salles mises en cause, utilisées par des élèves en CAPMaintenance et Hygiène des Locaux ou en BAC PROHygiène et Environnement étaient pour la majorité dessalles de travaux pratiques.

En arrivant sur le site la première chose qui m’a frappéeété le fait que l’utilisation de ces salles n’était pasoptimale : meubles devant les jalousies qui empêchaient lacirculation traversante de l’air, salle transformée enstockage de produits ménagers ce qui n’avait pas été définidans le programme (une forte odeur de produitsdans le programme (une forte odeur de produitschimiques pesait donc dans l’air). Les professeurs ontégalement pointé du doigt certains conduits d’écoulementdes eaux, qui étaient pour eux mal placés, et qui causaientdes soucis d’eau stagnante lors de leurs séances pratiques.Tous ces petits détails incommodaient fortement lesprofesseurs qui exigeaient des modifications rapides (ilsmilitaient entre autres pour la mise en place d’uneextraction d’air mécanique et de climatiseurs).

A mon sens, si un responsable avait, lors de la conception,était en contact avec certains professeurs, il aurait puexpliquer précisément aux futurs utilisateurs commentdevait être utilisé le bâtiment et aurait eu des retours surce que ces derniers souhaitaient. Cela aurait empêché laDBA de faire appel à un contrôleur technique extérieur,qui statuerait sur la nécessité de refaire des travaux, etcela aurait ainsi permis d’éviter des frais supplémentaires.

Faire respecter les principes qui ont été pensés par unarchitecte se révèle donc difficile et je crois qu’avant toutil est vraiment important d’être à l’écoute des besoinsénoncés par les utilisateurs.

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Page 16: De la désobéissance à la soumission

Par exemple dans Nemausus 1 de Jean NOUVEL,l’architecte voulait que son bâtiment garde une texturede béton brut, sans finition pour rappeler l’aspect d’unbâtiment industriel. Il a tenté de faire respecter sesdesseins en faisant signer un document aux habitants quileur interdisait l’utilisation de tapisseries pour habiller lesmurs de son appartement. Cela n’a pas duré, les habitantsse sont appropriés ces espaces comme ils le voulaient.

Ce qui est délicat dans le métier d’architecte est qu’onne peut imposer aux autres un mode de vie qu’on auraitchoisi mais il faut faire en sorte que ces personnes sesentent le mieux possible dans l’espace qu’on leurpropose.

Par ailleurs quand nous sommes vraiment convaincus dufonctionnement de quelque chose, il faut essayer d’allerau bout de son idée en apportant des preuves tangiblesde la réussite du projet et des explications détaillés auxclients.C’est ce qu’a entrepris Frank LLOYD WRIGHT lorsqu’ila réalisé l’Imperial Hôtel de Tokyo. Personne ne croyaiten la solidité de ce bâtiment car il reposait sur desfondations peu profondes : Wright était convaincu que

…Mais pas tous !

Certains l’ont respecté…

Nemausus 1:

fondations peu profondes : Wright était convaincu queces fondations résisteraient mieux à un séisme que desfondations profondes comme il était l’usage d’en faire carmises en relation avec le sol vaseux sur lequel lebâtiment était construit elles suivraient mieux lesondulations provenant du sol.« Cette fondation économisa des centaines de milliers dedollars par rapport aux fondations qu’on utilisait alors àTokyo. Mais, si les propriétaires de l’Imperial avaient su cequi était envisagé, il aurait pu se produire quelque chosepour l’empêcher. » Frank LLOYD WRIGHT,Autobiographie.Wright continue dans l’ouvrage d’expliquer point parpoint les solutions qu’il a envisagé pour la réalisation dece bâtiment puis il nous expose les difficultés auxquellesil a été confronté :« Les plans finirent par être prêts. Il fut impossible d’avoirun devis. Tout était si peu familier qu’aucune entreprisecommerciale ne voulut s’en mêler. Il ne restait plus qu’àabandonner le tout, ou à prendre des dispositions pour leconstruire nous-mêmes. »

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Page 17: De la désobéissance à la soumission

Henry Ford renchéri en énonçant le fait que s’il avaitdemandé à ses clients ce qu’ils voulaient, ils lui auraient dit« un cheval plus rapide » et nous n’aurions peut être pasconnu les progrès énormes qui se sont effectués dans lemilieu automobile à cette époque. En effet, en général lespersonnes ne sont pas très friandes de changement et seréfèrent toujours à ce qu’elles connaissent. Ainsi, le rôle del’architecte est aussi de prendre des initiatives, debousculer les mœurs. Il lui faut en quelque sorte prédiregrâce à une réflexion aboutie que son bâtiment seraaccepté et utilisé comme il a été pensé même si au départil ne faisait pas l’unanimité.

De plus, des détails qui paraissent au premier abord futilestels que la présence d’un bassin dans le projet de Wrightétaient en fait des éléments murement réfléchis :«Pourquoi ne pas supprimer le bassin et économiserquarante mille yen ? Je lui dis par le truchementd’interprètes, que c’était la dernière ressource contre letremblement de terre. L’édifice pourrait être atteint parl’incendie, même s’il résistait au séisme. »Comme le propriétaire résistait, Wright posa un ultimatumet menaça d’abandonner le chantier si le bassin n’était pasréalisé. Son obstination paya car deux ans plus tard unréalisé. Son obstination paya car deux ans plus tard unséisme s’abattit sur Tokyo, un incendie se déclara et lebassin permit effectivement de repousser les flammes.

A la fin de son ouvrage Wright conclut sur le fait qu’il fautpersévérer en ce qu’on croit car là se trouve la vraieliberté :« L’évasion n’est pas la liberté. La seule liberté que nousayons le droit de demander la liberté de chercher, d’être,de croire et d’aimer le beau comme notre âme le conçoit,le perçoit, ou comme nous pouvons le sentir. »Je garderai toujours en tête ce conseil dans les démarchesque j’entreprendrai dans le futur. D’ailleurs, ces étudesd’architecture m’ont apprises à assumer les choix que jepouvais faire. Cependant cette désobéissance devra à monsens prendre fin une fois que des cas concrets seprésenteront et qu’il faudra composer avec des personnesqui seront préoccupées en priorité par la réponse à leursbesoins, qu’on sera prêt à leur fournir.

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Page 18: De la désobéissance à la soumission

L’architecte considère souvent que son œuvre luiappartient totalement parce qu’il est en le créateur. Pourma part je considère que le bâtiment va réellement serévéler à travers la pratique que les personnes quil’utilisent au quotidien vont en faire et que c’est elles quiseront les réels détenteurs. Il faut donc faire preuved’humilité et d’écoute auprès d’eux. Je me suis ainsidemandé en tant qu’architecte dans quelle mesure devait-on être attentif aux besoins de ces futurs utilisateurs. Et sion les laisse entièrement décider pourrait-on encore avoirdes œuvres novatrices comme nous l’avons vu plus haut ?

Pour anticiper cette gestion de l’humain à laquelle je serainécessairement confrontée plus tard, je me suis intéresséeà l’architecture participative.

L’ouverture vers l’architecture participative s’est faiteprogressivement à partir de 1967-1968 avec notammentl’association des sciences humaines à l’enseignementd’architecture dans certaines écoles. Dans les années 1970on assiste à la création du CAUE (Conseil En ArchitectureUrbanisme et Environnement) constitué d’architectes quis’investissent d’une mission de conseil auprès descollectivités locales et des particuliers. En 1977 une loi surcollectivités locales et des particuliers. En 1977 une loi surl’architecture la définit comme étant d’ « intérêt public ».Aujourd’hui elle se retrouve principalement dans lesprojets d’éco-quartiers, car les architectes ont besoin queles futurs habitants intègrent ces nouvelles pratiquesécologiques.

Au fond, on assiste à une lutte de pouvoir entre deshabitants concernés par un projet qui déclarent « ne pasvouloir admettre que les décisions qui ont une influencedirecte sur leur cadre de vie puissent être prises par des« ils » lointains et inaccessibles » et les autorités, lesarchitectes qui pensent être les détenteurs d’une« esthétique architecturale » ou d’une « rationalitétechnico-économique ».

Ces deux revendications sont à mon sens légitime mais ilfaut prendre le temps d’écouter et de respecter chacundes partis.

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Page 19: De la désobéissance à la soumission

D’après Franck FAUCHEUX, ingénieur architecte, nouspouvons distinguer différents niveaux d’architectureparticipative :

· L’information : on impose à la population le projet, maison prend quand même la peine de leur expliquer ce dont ilen découle (c’est tout de même le minimum !).

· La consultation : on demande le point de vue deshabitants sans engagement de prise en compte desobservations formulées, ce qui permet néanmoins d’avoirune connaissance des attentes des habitants ;·La concertation, qui repose sur le principe suivant : les

acteurs proposent des modes d’organisation de l’espace ens’efforçant d’intégrer les attentes de chacun. Il faut doncposer clairement les règles du jeu (ce qui est négociable,pour éviter de créer des déceptions) ;

· La coopération : l'idée est d’avoir des ateliersd’urbanisme qui vont coproduire pour partie ;

· La coproduction sur la totalité du projet.

Cependant la première des choses à faire avant d’impliquerles habitants est évidemment de bien analyser le quartiersur lequel on souhaite implanter le projet. Cette étapepasse d’abord par l’observation.

En cours de sociologie un des projets consistait enl’observation d’un quartier près du bassin de la villette, surplusieurs semaines et à différentes heures de la journée.Nous devions ensuite commenter ce qu’on voyait. Cetravail a été très intéressant car souvent dans la vie de tousles jours nous croisons beaucoup de personnes chaque jourmais nous ne nous arrêtons jamais pour observer leurcomportement. De plus, l’espace peut être appréhendé enprêtant attention aux personnes ou aux objets quifréquentent le lieu: l’identification d’un groupe d’étudiant etla direction qu’ils prennent nous renseignent sur laprésence d’une cité internationale étudiante, un camion depompier qui stationne nous dévoile la caserne qui se tientnon loin derrière, etc.

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OBSERVATIONS COMMENTAIRES

Extrait du carnetd’observation réaliséen L2. Professeur :

L. LOPEZ

En L3 nous avons poussé cette observation plus loin entravaillant, en cours de projet d’architecture, sur une analyseurbaine. Cette étude concernait l’axe Nord-Sud de Paris : del’île de la Cité à la limite dressée par le boulevard périphériqueavant Aubervilliers. Le fragment dont mon groupe était encharge concernait le quartier Château d’Eau-Gare de l’Est, dansle Xe arrondissement de Paris (nous nous occupions dans cequartier de ce qui se passait autour de la rue du Faubourg-Saint-Denis, du Boulevard de Strasbourg et de la rue duFaubourg-Saint-Martin). Ce travail s’est déroulé en utilisantdifférents outils : la photographie, le dessin, le film, l’étudehistorique, la cartographie. Les professeurs nous ont beaucoupappris car à travers ces différentes étapes la ville se révélait àchaque fois sous un nouveau jour. Nous comprenions lequartier, ainsi que les personnes qui le fréquentaient, de mieuxen mieux, au fur et à mesure que l’exercice avançait.

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Le reportage photographiquepermettait de retranscrire les« évènements » phares duquartier, au fil de la journée(de 8h30 à 23h30)

23h30

Photographie:

8h30

Par le dessin, nous devionscréer différentes séquencesqui montrerait commentl’espace est cadré par le bâti.

Dessins :

Le film devait lui traduire lesdifférents mouvements de fluxqui pouvaient être observésdans le quartier.

Film :

Nous avons décidé de menerl’analyse historique d’un pointde vue cartographique maiségalement en regardantl’évolution des personnagesqui se sont succédés dans lesite qu’on étudiant pourcomprendre la populationactuelle.

Etude historique :

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Enfin, le travail decartographie était unrésumé de notre manièrede voir le quartier. Nousavons donc inséré danscette carte les différentesactivités qui étaientclairement différenciéessuivant les rues étudiéesainsi que l’occupation del’espace public qu’ellesgénéraient.

Cartographie:

En effet, ce quartierétait vraimentparticulier parce quel’occupation de l’espacepublic y était atypique :les rues que nousétudions regorgeaientétudions regorgeaientde salons de coiffureafros et des groupes derabatteurs sepositionnaient auxendroits stratégiques(sorties de métro, etc.)afin de dégoter desclients pour les salonsde coiffure. De plus surla rue du Faubourg-Saint-Denis, denombreux bars et caféss’alignaient et sur leursterrasses nous voyionsapparaitre un nouveautype de population.Pour finir la rue duFaubourg-Saint-Martinétait une rue oùbeaucoup de grossistesse sont établis doncl’espace public étaitrythmé par le balai descartons de livraison.

Carte de perception.Professeurs :

M. NORDSTRÖM,

P. MARTIN

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Si l’on veut dans un deuxième tempsque les habitants puissent donnerleur avis il faut qu’on leur donne lesmoyens de s’exprimer, de nousrévéler leur vision des choses.Je pense que les cartes de perceptioncomme celle faite au dessus peuventêtre accessibles à tous et pourraientêtre un point départ lorsqu’onsouhaite collaborer avec desutilisateurs.

Il est en effet important d’étudierleur réalité des choses. Leurs gestes,leurs habitudes leur donne unsentiment d’appropriation des lieuxqu’ils fréquentent. La transformationd’un quartier remet en cause ces« microritualisations » (d’après PierreSansot) mais le fait de les impliquerdans le projet leur redonne uneforme d’appartenance au quartier.L’appropriation du projet précède et

Exemple avec la ville de Boston :

L’appropriation du projet précède etfacilite l’appropriation de l’espace àtransformer.

D’ailleurs l’architecte Kevin LYNCH atravaillé sur ce que les gensressentaient dans leurenvironnement. Il s’inspirait deschémas faits par des usagers pourconstituer des propres cartes« mentales » de la ville. Ainsi, il voyaitréellement comment elle étaitperçue. On peut, en tantqu’architecte, beaucoup apprendre detels points de vue.

L’observation des personnes et lacompréhension de ce qu’ellesperçoivent du quartier actuel estdonc fondamental avec decommencer un projet.

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J’ai toujours vécu dans un cadre où la solidaritéavait une place. Que ce soit dans mon cursusscolaire ou au sein de la famille je me suistoujours sentie entourée et j’aimerais que cesqualités de générosité se retrouvent plus tard dansle métier que j’exercerai. Je me souviens encorede la classe préparatoire où, contrairement àl’idée que l’on se fait d’elle, était dans mon cas unlieu où l’on s’entraidait volontiers quand survenaitune incompréhension, une baisse de moral.

D’ailleurs en école d’architecture cela s’est denouveau vérifié: à chaque nouveau projetd’architecture je soumet mon idée à mes amispour voir ce qu’ils en pensent, avant de leconfronter à l’ « instance supérieure », lesprofesseurs. Le fait de demander l’avis d’uncamarade peut débloquer un point sur lequel onne voyait à première vue aucune issue.

De plus, une étape dans ma scolarité qui m’aclairement fait gagner en humilité a été le stageouvrier de cinq semaines que j’ai fait en premièreannée. Le fait de débuter en tant qu’ouvrier m’aannée. Le fait de débuter en tant qu’ouvrier m’amontré quelles sont les difficultés de leur métieret j’espère avoir toujours cela en tête plus tard.C’est peut être à partir de ces principes simplesqu’il faut puiser les ressources qui nouspermettrons de développer le côté humain denotre profession. C’est d’ailleurs comme cela queLucien Kroll a débuté dans l’architectureparticipative.

En effet en 1968, alors qu’il avait pour habituded’aider de temps en temps des étudiants enarchitecture à préparer leur jury, des élèves demédecine se sont intéressés à lui pour ses qualitésd’écoute et de conseil. Leur université(l’Université Catholique de Louvain) voulaitdéménager et s’installer à Bruxelles.

L’autorité universitaire souhaitait un bâtimentpour la faculté de médecine type XIXe siècle,pour glorifier l’institution. Les étudiants enmédecine n’ont pas accepté, ils trouvaient que cetype d’architecture allait façonner des médecinsqui ne s’intéressent pas au social, et qui seraientconvaincus d’être des privilégiés. 24

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Lucien Kroll s’est tout d’abord posé la questionde « comment l’architecte et les moyens durs dela construction aident ou bien massacrent lesréseaux de groupes sociaux ? ». Il décida alors detravailler pendant dix ans à une réponse quipourrait contenter le maximum de personnes :les étudiants et l’Université. Il avoua que ce ne futpas sans difficulté : « nous avons tâtonné, essayé,persuadé […] nous avons vécu tout le cycle :lune de miel, coopération extraordinaire,énervements, rupture de contrat et enfinréconciliation sans illusion. Il semble fatal quepour s’écarter de l’ordinaire, on viveinévitablement des psychodrames… »« Et pendant des années, nous avons discuté avecles étudiants, au hasard, ou de façon trèsorganisée, à quelques uns, parfois personne…ouà plusieurs centaines nous liant d’amitié, ou parrelations éphémères. Ils nous ont dit des chosesparfois très vagues, parfois très précises et passeulement ce qu’ils n’aimaient pas. Sans trop ycroire, ils ont travaillé sur le chantier, avec nous[…] Ils nous ont soutenu dans les conflits quis’étaient ouverts, discutant pied à pied avec less’étaient ouverts, discutant pied à pied avec lesautorités, organisant des manifestations publiquespour bloquer le contre-projet de l’université etc’est grâce à eux que la réconciliation a pus’amorcer… »Même si les épreuves ont été rudes, ce projetmontre que le métier d’architecte est un métieroù l’humain ne peut être ignoré.

L’architecte conclut de la sorte : « nous avonsappris qu’il est facile et passionnant de tisser unmilieu diversifié avec les habitants, mais aussi queles autorités, même si parfois elles veulent fairesemblant, ne suivent jamais ces processussincèrement. Peut être que finalement ce ne sontpas les architectes qui sont fermés à ce genre depratiques mais plutôt les administrations qui neveulent pas se lancer dans des démarches qu’ilstrouvent compliquées ?

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Derrière cette belle initiative se pose une question :est-ce que tout le monde peut faire de l’architecture ?Les habitants du quartier de l’Alma-Gare à Roubaixvous diront sûrement que oui.

Ce projet a été l’un des pionniers dans l’initiativecitoyenne. Il a pris forme dans des quartiers ouvriersde Roubaix, le quartier de l’Alma-Gare en 1974. Suiteà la loi Vivien sur l’habitant insalubre en 1969,beaucoup de quartiers en France sont menacés dedestruction. C’était le cas de celui-ci qui abritait des« courées ». Un point d’eau au fond de la cour et unsanitaire était commun à l’ensemble desappartements qui s’organisaient autour de la cour. Lamunicipalité souhaitait raser tout le quartier et lereconstruire mais les habitants se sont élevés contrecette volonté. En effet ils disaient qu’en détruisant lequartier on retirerait son âme, son histoire et celledes habitants. Ils ont pris en exemple un quartiervoisin qui a subi ce sort et où les habitants ont étécontraints de s’installer ailleurs : eux ne voulaient pasêtre déracinés de la même manière. Ils refusaientégalement les « cellules, les boites, les cages » qui leurétaient proposées. Ils ont donc un jour manifesté leurmécontentement en faisant une apparition dans le

Les courées

mécontentement en faisant une apparition dans leconseil municipal. Celui-ci accepta que les habitantsproposent leurs idées. Ils ont ainsi pu conserver 40%des anciens logements puis, grâce à des visitesd’Amsterdam, de Bruxelles et de logements àBoulogne et à « un atelier populaire d’urbanisme »accessible à tous (personnes âgées, jeunes, populationimmigrée, etc.), ils se sont mis d’accord sur unprogramme nouveau qui plaisait aux deux partis.Ils ont tout de même été assistés par des architecteset des techniciens, nous pouvons être soulagés, notremétier reste indispensable ! Avec les cours qui nousont été dispensés nous voyons que le métierd’architecte n’est pas inné, il s’apprend et se cultive.Avec les différents cours d’histoire de l’architecturenous apprenons à connaître d’une part ce qui a déjàété fait, ce qui n’a pas fonctionné. Nous serons avecde l’expérience (je l’espère) aptes à conseiller lesgens, à corriger certaines de leurs idées qui serontsûrement naïves et hésitantes (comme les miennesont pu l’être au début de mon cursus). Les habitantsn’ont parfois pas le recul nécessaire à l’élaboration detout un programme mais ils peuvent beaucoup nousapporter en proposant un regard neuf sur le quartier,leur regard.

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Projet final

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Le fait de solliciter l’aide de personne extérieure nedoit pas non plus être une manière de se décharger denos responsabilités. Il est possible d’allier notre rôle deconcepteur à une écoute approfondie des besoins desutilisateurs.

Sur le projet de la ZAC Claudel à Amiens, c’est ce quel’on retrouve. Sur une des tranches, des ateliersthématiques ont été organisés. L’architecte proposaitdes cas de figures totalement différents qu’ilsoumettait à l’avis des habitants (constitués depersonnes du quartier mais aussi d’ailleurs dans laville).

Les questions qui ont été abordées sont les suivantes :-Trajet de «la « coulée verte » : fallait-il en avoir unesur la tranche qui serait autonome ou fallait-il la relierà celle des autres ?-Comment les déplacements et les stationnementsdevaient être pensés ?Fallait-il choisir entre des voies partagées par lesvoitures, piétons, vélos ou bien des voies à sens uniqueou encore fallait-il favoriser le cheminement piéton ?Les habitants ont préféré la troisième solution mais la

Scénario 1 : coulée verte autonome

Scénario 2 : coulée verte liée aux autres

Scénario2 : «Ilot à cœur ouvert » et son évolution.

Les habitants ont préféré la troisième solution mais lamunicipalité a rappelé que la circulation automobileétait nécessaire dans le quartier et que sur ce point ilsne pourraient pas satisfaire totalement la population.-Quelle forme urbaine était à favoriser : une forme en« ruban » avec des barres segmentées ou bien des îlotsà cœur ouvert (donc qui se replient quand même sureux-mêmes) avec des cheminements piétonssecondaires ?-Quels équipements étaient à prévoir ? Quelleambiance était souhaitée dans les espaces publics ?Quelle proportion de vide et où devaient-ils êtreinstallés ?

Cet exemple est un modèle dans l’architectureparticipative, il ne néglige ni l’architecte ou l’urbaniste(même s’ils doivent produire deux fois plus de travailpour proposer leurs scénarios) ni les habitants. Et cetype d’ateliers, ciblés, semblent être plus efficaces pouridentifier leurs attentes plutôt que de mettre en placeune « boîte à idée » où ils ne sauraient pas forcémentquoi mettre.

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Scénario 1 : « Ruban » et son évolution après une première réunion

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Peut être que pour mieux interpeller les étudiants enarchitecture sur l’importance de la place de l’habitantdans un projet on devrait multiplier à l’école lesconférences sur ce sujet. En effet comme nous l’avonsvu plus haut, à l’école nous vivons un peu à l’écart detoutes ces préoccupations qui feront pourtant partiesde notre réalité.

Au deuxième semestre de la troisième année nousavons néanmoins eu la chance de nous rendre comptede toutes ces difficultés grâce à l’intervention depersonnes qui faisaient parties d’une association dequartier (l’association Cactus) qui défendait les droitsdes habitants sur le projet de la ZAC Pajol, située dansle XVIIIe arrondissement de Paris. Ils nous ont expliquéqu’au départ, en 1990 il était prévu de ne réaliser quedu logement dans cette zone. Les habitants s’y sontopposés car ils trouvaient que le quartier de laChapelle débordait de logements mais que leséquipements publics manquaient cruellement. Ils ontalors récolté les voix de la population sur les placespubliques, etc. puis en ont retiré des avis dominants.

Qui sait ce que le quartier serait devenu si laQui sait ce que le quartier serait devenu si lapopulation n’avait pas protesté ? Surement un autreendroit où l’on ne se sentirait pas totalementépanouie, pas totalement « chez soi ».

Le problème qui a longtemps subsisté était quebeaucoup de communes et autres voyaient les besoinsde la population comme quelque chose de statique.D’après Jean-Paul Lacaze,, le besoin est « l’expressiondune dynamique sociale contingente et aléatoire,dépendant finalement des types de rapportsparticuliers qu’une microsociété locale a noué oudésire nouer avec l’espace urbain dans lequel elle vit».Il est lié à « la dynamique de la vie locale, d’initiativesindividuelles ou de groupes par rapport auxquellesaucune anticipation ne saurait être légitime ».

Par ailleurs, il semblerait qu’aujourd’hui l’architectureparticipative est un domaine en expansion. Parexemple, l’actuel candidat de EELV (Europe Ecologie lesVerts) à la mairie de Paris, Christophe Najdovskisuggère que 10% du budget de la ville soit réservé à la« démocratie participative », qui englobe évidemmentles questions d’urbanisme participatif.

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En conclusion l’avis de la population me semble être unedonnée importante dans l’élaboration d’un projet.Cependant, il faut être vigilant à ne pas prendre l’avis depersonnes militantes qui ne seraient pas représentatives del’ensemble de la population. Sur certaines opérations leshabitants sont des volontaires tirés au hasard quand dansd’autres ils sont élus par le reste de la population duquartier ce qui peut être une solution pour avoir unmeilleur retour. Par ailleurs, les opérations de ZAC quenous avons étudié sont longues (elles durent en moyenneune quinzaine d’années, même si des lots sont livrésprogressivement), il y a donc toujours un risque que l’étudede la population soit désuet : la société évolue à une vitesseconsidérable et leurs attentes peuvent évoluer. Dans tousles cas même si une remise en question de notre métier està faire afin d’être moins fermé aux habitants, il ne faut pasoublier que nous sommes les professionnels, nous devonsproposer des solutions pertinentes : la mission de servir lapopulation nous incombe réellement.

Entre la désobéissance et le fait de faire des concessions àla population l’idéal serait d’allier les deux : de proposer dessolutions innovantes qui ravissent des habitants qui auraientquand même suivi le projet et réussi à glisser leur avisquand même suivi le projet et réussi à glisser leur avisparmi les choses qu’on leur propose. La difficulté restequand même de motiver les habitants car finalement ilapparait que peu sont prêts à prendre part au processus.

Pour le master je souhaiterais m’orienter vers le cours deprojet architecture et environnement « du territoire àl’édifice » car il traite de manière précise des usages enarchitecture, ce qui rejoint un peu le thème que j’ai traité.Comme séminaire je serais intéressée par « architecture,environnement et développement durable » qui nousapostrophe sur une autre problématique tout aussiimportante, celle d’une architecture qui serait respectueusede l’environnement.

Si je devais me projeter encore plus loin, je pense quetravailler dans la maîtrise d’ouvrage serait un boncompromis entre mes deux formations, le stage que j’aieffectué en deuxième année m’a ouvert à cette possibilité,mais seul l’avenir nous le dira!

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BIBLIOGRAPHIE

Livres:

-Autobiographie, Frank LLOYD WRIGT

-L’image de la Cité, Kevin LYNCH

-Monographie, Lucien KROLL,

-Les Méthodes de l’urbanisme, Jean-Paul LACAZE

Films:

-« Quand les habitants prennent l’initiative » Société CoopérativeOuvrière de Production / Hubert Knapp

- « Jean Nouvel, Nemausus 1 » (documentaire ARTE)

Sources internet:

-www.legifrance.com

-Actions pédagogiques et participatives en architecture, Elise Macaire

- L’implication des habitants dans les projets d’écoquartiers en France:quelles pratiques, quelles perspectives? Résumé d’un colloque.

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