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DROIT DE LA RESPONSABILITÉ INTERNATIONALE Séance 1- Mercredi 3 octobre 2012 Salle 139 : CEDIN (centre de droit international de Nanterre), bibliothèque consacrée au droit international. Elle est ouverte dans la limite des places disponibles. -> bureau des enseignants (salle 134 pour le prof). En face de la bibliothèque : panneau d’affichage avec les colloques à venir en droit international + les conférences d’actualité du master 2 de relations internationales (master recherche), des praticiens sont invités à venir faire des conférences. 1 ère remarque : quel est l’objectif de ce cours ? - maitriser le droit de la responsabilité internationale * à peu près connaître ce qu’on trouve dans tous les manuels de droit international : les bases de la matière * les Articles de 2001 de la commission du droit international (codification). C’est un ensemble d’une cinquantaine de projets d’articles. C’est assorti d’un commentaire par la commission du droit international : quelle est la jurisprudence et la doctrine sur ces domaines. Utilité du cours d’amphi : - les vertus de l’explication orale (clarté) - actualisation en temps réel - qu’est ce que concrètement le droit dans la vie de tous les jours : fonctionnement vivant de droit. Démontrer que la pratique du droit est parfois très étrangère à l’enseignement du droit. On doit savoir comment est sanctionnée la règle de droit international. C’est l’objet de ce cours. La responsabilité internationale est au cœur du quotidien du droit international. La plupart des différends sont en rapport avec la responsabilité. 1

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DROIT DE LA RESPONSABILITÉ INTERNATIONALE

Séance 1- Mercredi 3 octobre 2012

Salle 139 : CEDIN (centre de droit international de Nanterre), bibliothèque consacrée au droit international. Elle est ouverte dans la limite des places disponibles.-> bureau des enseignants (salle 134 pour le prof). En face de la bibliothèque : panneau d’affichage avec les colloques à venir en droit international + les conférences d’actualité du master 2 de relations internationales (master recherche), des praticiens sont invités à venir faire des conférences.

1ère remarque : quel est l’objectif de ce cours ?- maitriser le droit de la responsabilité internationale

* à peu près connaître ce qu’on trouve dans tous les manuels de droit international : les bases de la matière

* les Articles de 2001 de la commission du droit international (codification). C’est un ensemble d’une cinquantaine de projets d’articles. C’est assorti d’un commentaire par la commission du droit international : quelle est la jurisprudence et la doctrine sur ces domaines.

Utilité du cours d’amphi :- les vertus de l’explication orale (clarté)- actualisation en temps réel- qu’est ce que concrètement le droit dans la vie de tous les jours : fonctionnement vivant de droit. Démontrer que la pratique du droit est parfois très étrangère à l’enseignement du droit.

On doit savoir comment est sanctionnée la règle de droit international. C’est l’objet de ce cours.La responsabilité internationale est au cœur du quotidien du droit international. La plupart des différends sont en rapport avec la responsabilité.

Ex : le contentieux de la CEDH = responsabilité internationale. Le contentieux devant l’OMC. Le crime de génocide : oui, non ? devant quelle juridiction ?Naufrage d’un pétrolier et marées noires.

- Matière au croisement du droit international et du droit interne : c’est le juge national qu’on va saisir. Pour certaines questions du droit international il faut consulter le droit interne. Ex : quels organes de l’État engagent la responsabilité de l’État ? (Parlement, Cour de cassation ?)

Le droit de la responsabilité international est celui qui a le plus de rapport avec le fait. Il faut prouver les faits, les dégager, avant d’en dégager des conséquences juridiques. Il faut être capable d’appréhender les faits.

Affaire Yamashita : concernait un général japonais durant la 2nde guerre mondiale, qui a conquis pour le compte du Japon les colonies de Malaisie et du Singapour. Les troupes du général Yamashita se sont livrées à la fin de la 2nde guerre mondiale à un certain nombre de crimes internationaux. Et en 1946 un tribunal militaire américain va juger le général Yamashita, et une question juridique va se poser : du fait de l’action des forces alliées, ce général Yamashita avait dans les faits perdu tout contrôle sur ses propres forces militaires. Quelle règle retenir :

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tout général est-il censé contrôler les troupes peu importe les faits, même si impossibilité matérielle de les contrôler ? Ou si ø de contrôle effectif -> ø de responsabilité des crimes de ses subordonnés ?

Dans cette affaire le tribunal américain a décidé que la responsabilité était automatique, même sans contrôle effectif. Conséquence : condamnation à mort du général.

Malgré l’idée reçue, la formation dans le domaine du droit ne vise pas à enseigner le droit. L’objectif est de former des juristes. C’est-à-dire former des personnes qui devront prendre des décisions et en assumer les conséquences.Le droit international de la responsabilité c’est plus un droit jurisprudentiel.

Le droit n’est pas une science ni fondamentale ni appliquée.

Ø une science fondamentale : le but du droit ce n’est pas de trouver la vérité. À ce titre le juriste est très ≠ du philosophe. Le juriste c’est un animal politique. Le juriste n’est pas libre, il est enchaîné à son temps.Nietzsche : quand on est philosophe il faut mettre en question la valeur même des valeurs. Pourquoi la morale des barbares ne serait-elle pas aussi bonne ? Pourquoi la peine de mort ne serait-elle pas une solution juste ?

La responsabilité selon Nietzsche : dans les sociétés occidentales elle trouve son origine dans le christianisme : c’est la morale du faible. Il invente des règles de responsabilité pour rétablir l’équilibre face au fort. À cette morale du faible, Nietzsche oppose la morale de la noblesse, c’est-à-dire la puissance assumée comme telle.

Le juriste lui est l’homme de son temps : des préjugés sociaux et moraux de son temps, on ne peut pas aller à leur encontre.Il doit savoir quelle est la conception dominante. Il doit savoir ce que dit son temps.

Ø une science appliquée :Montesquieu : le juge = bouche de la loi. -> application purement mécanique.La représentation du droit en France est un dogme politique qui remonte à 1789, et l’avènement de la souveraineté du peuple. Le peuple est souverain, et il n’y a à partir de là de légitimé qu’à travers la souveraineté. La légitimé = démocratie. Or les juges n’ont par conséquent pas de légitimité : ils appliquent la loi.Autrement dit, à partir de 1789 une fracture s’est opérée entre l’action et la compétence. Si on est pas légitime, on n’a pas la compétence.

Csq :- Ce qui rend le droit légitime, c’est la caution du souverain.- ø de droit sans loi- défini° du droit : c’est la caution donné par le souverain et non plus l’objectif : la recherche de la justice

La volonté a remplacé la finalité : ce n’est plus la recherche du juste. D’où la question : pourquoi le droit est-il obligatoire ? parce que le souverain a posé la règle de droit.Chez les juristes grecs, romains de l’antiquité, on ne se posait pas la question : le droit était un phénomène naturel. La vraie question était : quelle est la solution juste à un problème donné ?Ce sont des conceptions radicalement différentes du droit.L’enseignant est la bouche de la loi.

Pb : il y a une multitude de pouvoirs qui font du droit. Qui sont également applicables sur le territoire français. Il y a également de + en + des évolutions transfrontières. On doit appliquer des droits d’origine différente. On

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ne veut pas savoir ce que dit le droit français mais savoir appliquer les ≠ règles juridiques. La polyvalence est une compétence recherchée pour un juriste.Pb 2 : cette conception dogmatique ne correspond pas au droit dans la réalité.

Le droit est un art auquel le juriste doit s’exercer.1° Le droit ne se réduit pas à la loi. Toute règle de droit a besoin d’être interprétée. Le juge participe à la formation du droit. Il faut essayer de voir quelle était la finalité de la règle.

2° Le droit c’est l’art du contingent. Ça veut dire que le droit = résolution de conflits concrets. Mais il n’existe jamais de situation parfaite.Il faut trouver la situation la plus juste dans un cas concret. Pour y parvenir, il faut utiliser ses outils :-> la loi. Si ce n’est pas satisfaisant, il faut choisir une autre solution.Idée : le législateur et le juge cherchent les solutions les plus justes, mais chacun le fait à sa manière. Le juge peut avoir recours à autre chose que la situation générale.

3° Le droit a une finalité : la justice.« La jurisprudence est, étant connu les choses divines et humaines, la science du juste et de l’injuste ». (Le DIGESTE, texte ancien…).

Il faut un minimum de connaissances, et sur cette base savoir trouver la solution juste. C’est la définition antique du droit, et c’est ce que fait le juge aujourd’hui.On en trouve la trace dans les textes contemporains. P. ex. le code de procédure pénal français dispose que le procureur développe à l’oral « les conclusions qu’il estime justes ».

Article 1353 C. civ. : « ce qui n’est pas établi par la loi est abandonné aux lumières et à la prudence du magistrat ».Le droit repose sur une logique, mais pas une logique formelle. Le syllogisme judiciaire est un travestissement total de ce qu’est le droit dans la réalité. Le droit ne repose pas sur la vérité, ni sur la démonstration.

Aristote distingue deux types de preuve : les preuves analytiques, qui relèvent de la science et de la vérité, et un autre système de preuve : les preuves dialectiques, qui sont communes au droit et à la morale, dans lesquelles il n’y a rien de vrai ni de nécessaire. On ne déduit pas : on argumente du côté des plaideurs, et on motive du côté des juges.

Il faut peser les opinions et estimer laquelle est la plus juste et la plus convaincante. On cherche à emporter la conviction.Civ. 9 juil. 2003, la Cour de cassation dit qu’en présence de droits qui ont la même valeur normative, en cas de conflit entre ces droits, le juge doit rechercher leur équilibre et le cas échéant privilégier la solution la plus protectrice de l’intérêt le plus légitime.

Le juge tranche des problèmes humains. Il le fait par un jugement dont il sera responsable.

Le droit : c’est un art humain qui vise à appliquer de la manière la plus juste possible les règles juridiques adoptées par le souverain de manière à trouver la solution à un conflit concret.

La jurisprudence : c’est la prudence appliquée au droit. C’est une vertu transversale, complémentaire de la vertu de justice. La prudence est la vertu qui consiste à chercher le juste. On distingue la prudence de l’habileté. -> l’être prudent = vertueux.

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La prudence est sagesse en l’ordre des choses humaines – Saint Thomas d’Acquin.

Ce n’est pas la sagesse absolue car la prudence a pour objet le bien humain et l’homme n’est pas ce qu’il y a de meilleur entre tous les êtres.

La prudence c’est le substitut proprement humain d‘une providence défaillante. …C’est un homme qui n’est ni tout à fait savant ni tout à fait ignorant dans un monde qui n’est ni tout à fait absurde ni tout à fait…en usant des médiations boiteuses qu’il nous offre.— Pierre Aubenque : La prudence chez Aristote.

La raison pratique : elle s’attache aux faits humains et est dépendante des faits humains. Il détaille quelles sont les qualités de la prudence. Ces ≠ parties de la prudence renvoient très directement à ce que sont les qualités du juriste.- la mémoire : savoir ce qui est vrai dans la plupart des cas. ≈ l’expérience- l’intelligence : savoir manier les outils intellectuels, pouvoir développer un raisonnement abstrait- la raison : savoir raisonner quand l’intelligence ne permet pas d’aboutir directement à la solution. L’intelligence concerne les concepts (= les intelligibles). La raison concerne les particularités de l’espèce, d’un cas concret.- la docilité : il faut savoir se laisser instruire, consulter ceux qui ont l’expérience. - la sagacité : savoir trouver soi même : « la droit estimation de ce qu’il faut faire » ≈ intuition- la prévoyance : regarder loin quand on prend sa décision- la circonspection : savoir tenir comptes des circonstances dans son jugement- l’attention précautionneuse : envisager les maux éventuels de sa décision

La prudence est une vertu. Elle s’acquière par l’habitude, par l’expérience. C’est en cherchant à développer cette vertu qu’on l’acquière au fur et à mesure. Article de doctrine de 1929 par un magistrat américain, traduit dans les mélanges (Génie ?) : le raisonnement intuitif dans le raisonnement judiciaire. Il racontait son expérience de magistrat en nous disant la chose suivante : intuition = éclair intuitif de l’entendement.

Séance 2 – mercredi 24 octobre 2012

1) Qu’est-ce que la responsabilité ? La notion de responsabilité est éminemment complexe dans la mesure où selon un système juridique,

selon les branches du droit, elle emprunte des formes tout à fait diverses. En particulier dans des sociétés internes, ce qu’on appelle la responsabilité a plusieurs visages.

En effet quelle est la différence entre la responsabilité juridique et la responsabilité morale, ou la responsabilité religieuse ? P. ex. le pêché est une forme de mise en jeu de la responsabilité. Dans certains systèmes juridiques, la responsabilité religieuse peut être une responsabilité juridique.

La dimension temporelle de la responsabilité : est-on responsabilité du passé ? P. ex. qu’en est-il des lois mémorielles ? P. ex. la France est-elle responsabilité des crimes commis à l’époque de la responsabilité ? forme juridique de responsabilité ? ou forme juridique de la responsabilité ? Quel est le rapport entre l’histoire et le droit ?

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Comment distingue-t-on la responsabilité politique et la responsabilité juridique ? En droit constitutionnel, il existe des mécanismes juridiques de responsabilité politique. La responsabilité politique n’a rien à voir avec la responsabilité du droit civil (cause un dommage -> répara° du préjudice).

Même au sein de la responsabilité proprement juridique, on a des formes très différentes de responsabilité. P. ex. on peut distinguer la responsabilité contractuelle et extracontractuelle. On distingue également la responsabilité pour et sans faute (Exemple : = risque, = rupture de l’égalité devant les charges publiques).

On a deux grand types de responsabilité : une responsabilité purement réparatoire ou une responsabilité de type pénale (= punition de l’individu, ≠ réparation du préjudice).

Responsabilité réparatoire Au plan civil art. 1382 C.Civ. Responsabilité administrative

Quel est le point commun au sein de la responsabilité ? La responsabilité c’est le fait de répondre de quelque chose. Mais la question de savoir de quoi on doit répondre, dans quelles conditions, et avec quelles conséquences (réparatoire, punitif), tout cela va dépendre de chaque système juridique, voire de chaque branche du droit.

2) Quels sont les enjeux de la responsabilité en droit international ? Il y a deux particularités à garder à l’esprit. 1° On a affaire à une société multiculturelle. Par conséquent, au sein de celle-ci, les concepts juridiques vont être plus ou moins influencés par telle ou telle culture juridique nationale. Il n’est pas sûr que le francophone ou l’anglo-saxon y retrouve les concepts qu’il et habitué à maitriser.

Elle tient au contexte dans lequel va se retrouver la responsabilité internationale. La responsabilité internationale concerne en 1er lieu des personnalités morales de droit public, qui sont également souveraines et au dessus desquelles il n’existe pas d’État mondial, en particulier il n’existe pas de juridiction nécessairement compétente.

Ce contexte particulier des sociétés horizontales va avoir trois types d’incidences.- Est-ce qu’une responsabilité de type pénale peut se développer à l’égard de personnes morales qui par ailleurs sont souveraines ? Est-ce qu’on peut châtier un État ?- Une responsabilité sans faute peut-elle se développer en droit international alors même qu’il n’y a pas d’intérêt solidaire en droit international ?- Le fait qu’il n’y ait pas nécessairement de juge compétent ne conduit-il pas à étendre les fondements de la responsabilité de manière à palier l’absence fréquente du juge international ?

3) Les sources du droit de la responsabilité internationaleIl y a deux types de sources possibles :- Les sources conventionnelles (des traités) qui dans un secteur donné vont imposer un régime particulier de responsabilité. Ce régime pourra être différent du régime applicable en droit coutumier. Trois exemples :*Certains traités bilatéraux dans le domaine des investissements étrangers prévoit que la seule forme de réparation est l’indemnisation* Au sein de l’OMC, devant l’organe de règlement des différends de l’OMC, la seule conséquence prévue en cas de violation des accords de l’OMC (p. ex. si l’Europe subventionne Airbus) est de mettre fin à la violation.* La convention 72 des Nations unies relatives au lancement des objets spatiaux organise un mécanisme de responsabilité sans faute (= exception en droit international).

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- Source coutumière (= droit international non écrit qui résulte de la pratique convergente des États lorsqu’elle reflète l’opinio juris des États, cad qu’ils se sentent liés par une obligation lorsqu’il suit cette pratique).

Expression écrite de la coutume : depuis 2001 les Articles de la Commission du droit international sur la responsabilité des États, c’est la codification de la coutume internationale, qui a été opérée par l’organe codificateur de l’ONU : la commission du droit international (CDI), qui a mis quasiment 50 ans à aboutir à ce projet d’articles qui sont aujourd’hui globalement considérés comme reflétant le droit coutumier dans la matière.

La consultation de la jurisprudence permet de préciser, de compléter, voire de corriger ce qui a été codifié en 2001.

4) Quels sont les modes de mise en œuvre de la responsabilité internationale ? Deux types de mise en œuvre : lorsqu’on peut saisir un juge international, on peut lui demander la

mise en œuvre de la responsabilité de tel ou tel État. À défaut, il y a les modes non juridictionnels de règlement des différents.

On peut protester, négocier, se plaindre auprès de l’ONU. Aucun n’aboutit à une décision obligatoire pour l’État qu’on souhaite attaquer.

5) Quelle a été l’évolution du droit de la responsabilité internationale ?

Il y a eu évolution de la matière. Mais quelque soit cette évolution, elle reste encore très embryonnaire au sens où en droit international, on n’a pas atteint le même degré de sophistication que dans les ordres juridiques internes. En particulier, la responsabilité internationale reste encore aujourd’hui très largement unitaire. Cela veut dire qu’il y a un régime de responsabilité internationale qui ne s’est pas fragmenté comme ça a pu être le cas dans les ordres juridiques internes.

Il y a principalement un régime de responsabilité internationale, si on met de côté le droit international pénal qui concerne exclusivement aujourd’hui les individus.

Sous cette seule réserve on a un régime largement unitaire sur la scène internationale. Ça n’empêche pas que ce régime a tout de même fait l’objet d’une évolution, évolution qui a conduit depuis le 19ème siècle à une redéfinition de l’objet et des fonctions de la responsabilité internationale, laquelle a entrainé une certaine instabilité de son régime juridique.On peut distinguer l’histoire en trois périodes.

1ère période : 19ème siècle 1945Cette 1ère période va être celle de l’édification par la loi jurisprudentielle et la pratique des États du

régime classique de la responsabilité internationale, qui à cette époque là va se limiter à une conception purement civiliste de la responsabilité internationale, c’est-à-dire que lorsqu’un État viole l’une de ses obligations internationales, la seule conséquence qui en résulte, c’est l’obligation de réparer les dommages qu’il a causés.

Tout au long du 19ème siècle on retrouve cette conception, en particulier dans la jurisprudence des « commissions de réclamation », qui ont opposé les pays occidentaux à des payx latino-américains pour des affaires dans lesquelles des ressortissants occidentaux avaient été spoliés par lesdits États latino-américains.

Cette conception classique va être consacrée dans certains textes. En particulier, dans la convention n°4 de la Haye du 18 oct. 1907, relative au droit des conflits armés, qui dispose en son article 3 : la partie belligérante (qui prend part au conflit armé) qui violerait cette convention sera tenue à indemnités.

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C’est la même conception qu’on retrouve en 1920 dans le statut de la Cour Permanente de Justice Internationale, lequel sera repris en 1945 dans le statut de la Cour Internationale de Justice qui donne compétence à ces juridictions - pour établir s’il y a violation d’une obligation internationale- préciser la nature et l’étendue de la réparation consécutive à cette violation

C’est également ce que dira la CPJI dans une jurisprudence fondatrice (qu’on évoquera souvent) CPJI 13 sept. 1928, Usine Shorzow : c’est un principe de droit international voire une conception générale du droit que toute violation d’un engagement international comporte l’obligation de réparer. (Équivalent de 1382).

2ème période, 1945 Deux nouveautés surviennent.

1° C’est la notion de la Charte des Nations-Unies qui voit émerger sur la scène internationale une organisation véritablement universelle (≠ SDN), qui sera d’autant plus universelle avec la décolonisation et qui est porteuse d’intérêts qui transcendent les souverainetés étatiques : - développement éco- lutte c. la pauvreté- respect des droits de l’H- protection de l’environnement- émergence de « patrimoine commun de l’Humanité »

En quoi les Nations-Unies font émerger une véritable communauté internationale, qui ne peut rester sans incidence sur le droit de la responsabilité internationale. En effet s’il y a des valeurs communes, des biens communs, on ne peut plus se limiter à une responsabilité purement civiliste.

P. ex. lorsqu’un génocide est commis, ce n’est plus la même chose que la violation d’un traité de commerce. On ne peut plus se limiter à la seule réparation.

2° Entre 1945 et 1990, le juge international comparativement à la période précédente, va être très peu souvent saisi. La source jurisprudentielle de la matière va se tarir par rapport à avant.

Par conséquent, c’est la doctrine ou les diplomates qui vont faire entendre leur voix, de nouvelles conceptions de la responsabilité internationale. On va se concentrer sur de grandes problématiques, sur de grandes questions de principe, au détriment de l’aspect technique.

Ce qui va se passer à une époque durant laquelle précisément on va commencer (au début des années 50) à codifier le droit de la responsabilité internationale.C’était un environnement de disputes théoriques, sur des Q de principe, sans que la jurisprudence n’ait fait beaucoup avancer la matière à cette époque.

3ème période, 1990, fin de la guerre froideOn assiste à une prolifération des juridictions internationales, qu’on a créées dans tout un tas de

domaines. Par conséquent, la source jurisprudentielle est redevenue très importante à partir de 1990. Cela fait qu’à l’heure actuelle, on est revenu à des problématiques plus techniques, tout en ayant en même temps « digérer », assimiler certaines évolutions survenues pendant la guerre froide. Tant est si bien qu’aujourd’hui le grand défi est de concilier ces évolutions de la responsabilité internationale et leur mise en œuvre pratique.

On va se demander dans ce cours où en est le droit de la responsabilité internationale concernant la théorie, et leur mise en œuvre pratique.

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PREMIERE PARTIE ASPECTS FONDAMENTAUX DU DROIT

DE LA RESPONSABILITE INTERNATIONALE

SECTION 1. SON ROLE

§1. L’OMNIPRÉSENCE DU CONTENTIEUX DE LA RESPONSABILITÉ DANS LA PRATIQUE DES RELATIONS INTERNATIONALES

A. Au plan international… Les grandes crises internationale ont souvent donné lieu à des litiges relatifs au droit de la

responsabilité internationale. C’est la preuve, en définitive, que pour les États, la responsabilité internationale est un moyen privilégié de régulation de leurs rapports conflictuels.

En 1945, on a assisté à un basculement entre deux principes :- Le principe ancien de l’équilibre des forces (c’est par la force qu’on règle ses différends)Après 1945 : - La paix par le droit, et plus précisément, l’obligation de régler pacifiquement les différends internationaux.

Tant est si bien qu’à l’heure actuelle, très souvent, quand deux États ont un litige, un désaccord, c’est en invoquant la responsabilité internationale qu’ils veulent tenter de régler ce différend.

Ce phénomène ne se limite pas aux grandes crises internationales. On le retrouve également pour des aspects plus quotidiens des relations interétatiques : contentieux économique, contentieux en matière d’expulsion…

Exemples : Les situations où on a eu un règlement politique sans saisie d’une juridiction1° En 1999, lors de la crise du Kosovo, les forces de l’OTAN ont bombarder « par erreur » l’ambassade de Chine à Belgrade. La Chine a protesté. À la suite de cette protestation, les 30 juil. «et 16 déc. 1999, les États membres de l’OTAN et de la Chine ont conclu un accord d’indemnisation pour réparer le préjudice subi.

2° En 11 janv. 2004, l’ambassadeur allemand en Namibie a présenté les excuses officielles de l’Allemagne pour le massacre qui avait été commis entre 1904 et 1907par l’État allemand d’une tribut sud africaine. Ce genre d’excuses est une réparation par « voie de satisfaction ». L’Allemagne n’a pas présenté les excuses spontanément. En effet en 2001, les descendants de la tribut avaient porté plainte devant le juge américain contre l’Allemagne.3° Le 30 aout 2008, l’Italie et la Lybie ont conclu un traité par lequel l’Italie présente ses excuses pour la colonisation de la Lybie, et en guise de compensation, s’engage sur une période de 20 ans à investir 5M$ en Lybie. Pb juridique : c’était à l’époque de la colonisation, quand ce n’était pas prohibé par le droit international.Or en droit de la responsabilité internationale, en principe pour connaître un fait illicite, il faut avoir violé le droit en vigueur au moment du fait illicite. Débat : responsabilité historique // colonisation. Pression de la part d’ex pays colonisés pour être indemnisés.

4° En 2008 le Royaume-Unis a contracté un accord à l’amiable avec des victimes iraquiennes pour des dommages subis lors de leur détention sous contrôle britannique en Iraq. Accord : 3m€ pour 9 détenus iraquiens.

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5° En nov. 2004, un sous-marin nucléaire chinois est entré dans les eaux territoriales du Japon, en réponse le Japon a demandé des explications et des excuses. La Chine y a répondu en annonçant qu’elle allait ouvrir une enquête, c’est une forme possible de satisfaction.

2) Devant les juridictions internationales ? Depuis la fin de la guerre froide, le nombre de juridiction saisies en réclamation en responsabilité a

explosé. Ces juridictions, pour la plupart d’entre elles, ont un champ de compétence qui se limite au contentieux en responsabilité.

Ça couvre toutes les juridictions dans le domaine des droits de l’homme, qu’il s’agisse de la CEDH, de la Cour interaméricaine des droits de l’Homme, ou encore la Cour africaine des droits de l’homme. Elles sont uniquement saisi de demande en responsabilité.

C’est aussi le cas des juridictions d’intégration régionale. Tout d’abord : la CJUE -> recours en manquement, ou encore le Tribunal de MERCOSUR (marché sud-américain) qui peut aussi faire ces recours en manquement. C’est également vrai du CIRDI (centre international pour le règlement des différends liés aux investissements), créé en 1965, saisi de près de 200 affaires.

Également, dans le cadre de l’application des accords OMC sont en rapport en responsabilité. Ça concerne également la CIJ, dont la moitié des affaires qu’elle a connues ou qu’elle connaît sont des affaires en responsabilité internationale (le reste : délimitation frontalière).

Ces juridictions sont saisies très souvent de litiges qui sont sensibles diplomatiquement pour ces États.

Exemples de litiges soumis à la responsabilité internationale :- Crise argentine. Au début des années 2000, l’Argentine a fait faillite. Elle a dévalué sa monnaie. Ce faisant, elle a porté préjudice à des investisseurs étrangers. C’est un problème systémique, macroéconomique, qui a donné lieu à un tas de contentieux microéconomique, à l’heure actuelle, près d’une 40aine d’affaires pendantes devant la CIRDI, où des investisseurs ont attaqué l’Argentine en responsabilité pour réclamer le paiement de dommages-intérêts.

- Crise du Rainbow Warrior : dans les années 80, des agents secrets français détruisent en Nouvelle Zélande un bateau de Green Peace car il essayait d’empêchait les essais nucléaires français dans le Pacifique. Un journaliste portugais en meurt. Les agents secrets vont être dévoilés. 30 avril 1990, sentence arbitrale, par laquelle la France va être condamnée pour cet acte terroriste.

- À la suite de la guerre du Golfe de 1991, ou à la suite en 2002 de la guerre qui a opposé l’Érythrée et l’Éthiopie, à l’issue de ces conflits, des commissions de réclamation ont été chargées de réparer les préjudices du fait de ces conflits armés.

La liste des affaires soumis depuis 1945 à la CIJ traitaient de points sensibles, qu’on a traité sous l’angle de responsabilité :- Affaire Nicaragua, 1986, lutte des USA c. le communisme.- Affaire du génocide, 1993-2007 -> Serbie c. Bosnie Herzégovine- Affaire des activités armées sur le territoire du Congo (début des années 2000) qui a concerné la crise dans la région du grand lac. - Affaire du mur israélien en territoire palestinien occupé , tranché en 2004 (litige éminemment politique)- Avril 2013 : affaire des baleines, Australie c. Japon. - 2008 : Géorgie c. Russie

Pour la France : les affaires étaient du ressort des juridictions internes, mais on l’a transformé en différend interétatique en invoquant la responsabilité internationale.

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- Affaire BORREL, magistrat français retrouvé mort à Djibouti qui a donné lieu à une procédure devant la CIJ. La France a été condamnée pour ne pas avoir coopérer avec les autorités judiciaires de Djibouti. - Le 26 sept. 2012, la Guinée équatoriale a saisi la CIJ afin que la Cour impose à la France de mettre fin aux procédures engagées en France contre le fils du président de la République de Guinée Équatoriale, qui est poursuivi en France pour détournement de fonds pour biens mal acquis. La Guinée Équatoriale l’a nommé vice-président. En tant que tel, il réclame le bénéfice de l’immunité -> la France n’aurait pas respecté les immunités. Pour l’instant la France n’a pas accepté la compétence de la Cour. instrumentalisation du droit international

B. …mais aussi au plan interne On va invoquer le fait devant le juge interne qu’un État a manqué a ses obligations internationales. On est en présence d’une situation hybride. C’est une tendance de plus en plus lourde depuis une quinzaine d’années, qui est une niche pour certains avocats de droit interne. Ce phénomène se manifeste de deux points de vue :

1) La mise en cause de la responsabilité internationale de l’État devant ses propres tribunaux

Ex : on saisit le juge français en se plaignant du fait que la France a violé l’une de ses obligations internationales. Dans ce cas de figure, il n’y a pas de problème de compétences. Il n’y a pas non plus de problème d’immunités. Le juge français est compétent pour juger l’État français. C’est en quelque sorte du contentieux administratif. C’est un cas de responsabilité administrative interne. Mais elle a cette particularité que ce que l’on invoque comme base juridique, c’est la violation d’une règle internationale. Ce phénomène est assez récent, il constitue le point d’aboutissement, en quelque sorte, d’une évolution enregistrée à partir de 1945 qui a vu les normes internationales être applicables dans l’ordre juridique interne. C’est le fruit d’une longue évolution.

a) Le cas de la FranceJusqu’à récemment, en France, on ne tirait que sur le plan du contentieux de la légalité les

conséquences de l’article 55 de la constitution qui dispose que les Traités priment sur les lois française. Il a fallu attendre en 1975, l’arrêt Jacques Vabres, et l’affaire Nicolo en 1989 devant le CE, pour que le juge administratif accepte d’écarter une loi au motif qu’elle est contraire au droit international.

Mais on ne se situait que sur le terrain de la légalité, de la hiérarchie des normes. Il a fallu attendre l’arrêt CE 8 février 2007, GARDEDIEU, pour qu’il se reconnaisse compétent pour réparer l’ensemble des préjudices qui résultent de l’intervention d’une loi adoptée en méconnaissance des engagements internationaux de la France.

Autrement dit, quand le Parlement adopte une loi qui viole le droit international et que l’application de cette loi créé des préjudices, il y a matière à réparation. Cela veut dire que depuis 2007 il y a une imbrication en France de la responsabilité administrative et internationale.

b) Au delà du seul cas français, c’est une évolution qu’on retrouve partout ailleursDeux exemples concernant le contentieux de 2ème génération en droit de l’UE.

Ce contentieux est né de la décision de la CJCE du 19 nov. 1991, FRANCOVICH, dans laquelle la CJCE pose le principe selon lequel les États-membres ont l’obligation de réparer les dommages causés aux particuliers par les violations du droit communautaire qui leur sont imputables.

Concrètement, cela signifie que le juge du droit commun, en cas de violation du droit communautaire, est le juge national. Ce n’est qu’en manquement de l’action du juge qu’il faut recourir à la CJCE.

Pour la CEDH, le juge de droit commun est le juge national : il vérifie si la Conv. EDH a été respectée.

Série d’affaires portées devant le juge néerlandais : Srebrenica, génocide commis par les forces serbes en 1995, devant des forces néerlandaises qui ont aidé à faire le tri. Les descendants des victimes du génocide ont attaqué l’État néerlandais devant le juge néerlandais pour violation du droit international.

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La Cour suprême des Pays-Bas à rendu sa décision le 13 avril 2012. Enjeu de l’affaire : est-ce qu’on devait attribuer la responsabilité à l’État néerlandais ou bien est-ce qu’on doit considérer que les forces militaires néerlandaises agissaient sous commandement des Nations-Unies. Auquel cas, c’était l’ONU qui était responsable. Laquelle, organisation des Nations-Unies, selon la Cour néerlandaise, ne peut pas être poursuivie devant le juge nationale car elle bénéficie d’immunités.

2) Mise en cause de la responsabilité internationale de l’État devant un tribunal étranger1ère difficulté : la compétence du tribunal étranger. Ex : dans quelle mesure le juge thaïlandais est-il compétent pour vérifier que l’État néerlandais est coupable de complicité de génocide dans l’affaire Srebrenica. Est-ce que tout tribunal national est compétent à l’égard de toute question internationale ? Ou bien sa compétence se limite-t-elle aux actes commis par son propre État ?

2ème difficulté : en admettant qu’il soit compétent, il existe un principe d’immunité en droit international classique, au terme duquel un État ne peut pas être jugé par un tribunal étranger (= immunité de juridiction), en raison du principe de l’égalité souveraine des États.

Cependant certains auteurs, certains tribunaux, certains législateurs, ont considéré que la gravité des faits commis pouvait constituer un fondement de compétences et pouvait conduire à autoriser la levée de l’immunité.

On a assisté à des évolutions dans ce sens. Dans les quelques dernières années, on a fait marche arrière.

Sur le terrain de la compétence, certains États revendiquent une compétence universelle pour leurs tribunaux. Ils estiment que leurs tribunaux, pour certains crimes internationaux, sont compétents y compris lorsque l’État est un État étranger, lorsque le crime a été commis à l’étranger, et même si les victimes sont étrangères.

L’Espagne a adopté ce système (T. Const. 26 sept. 2005), la Belgique dans les années 1990, ainsi que les États-Unis, qui dans les années 1980 ont réactivé une vieille législation de 1789 qui leur permet d’exercer cette compétence universelle.

Cependant, dans la pratique récente, le législateur espagnol a restreint les cas de compétence universelle, la Belgique a fait de même en 2003. USA : il y a une intense réflexion de la Cour suprême des États-Unis, sur l’affaire KIOBEL : la compétence universelle est-elle conforme au droit international ? Tout laisse à penser que la Cour va mettre un frein à cette compétence.

Sur le terrain des immunités, c’est la même évolution qu’on va enregistrer. En effet, un certain nombre de juridictions nationales ont estimé qu’en cas de crime international, il fallait écarter l’immunité et qu’on pouvait donc juger l’État. Ce fut le cas en 1999, par la ߺ, dans l’affaire PINOCHET où on a écarté l’immunité de l’ancien chef d’État chilien. C’est également le cas de plusieurs jurisprudences de l’Italie. Notamment dans l’affaire FERRINI qui a donné lieu à une décision de la C. const. Italienne du 11 mars 2004, qui a décidé qu’en cas de crime international, il n’y a plus d’immunité.

France : Cass. 16 déc. 2003, BUCHERON c. Allemagne, la Cour de cassation a décidé que les crimes commis par l’Allemagne pendant la GM2 relevaient de l’exercice de la puissance publique et étaient ainsi couverts par l’immunité de l’État allemand.

CIJ, 3 fév. 2012, FERRINI : elle a condamné l’Italie pour avoir écarté l’immunité de l’État allemand dans l’affaire immunité. Peu importe la gravité de l’affaire, l’immunité reste applicable.= jurisprudence très conservatrice.

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§2. LES LIENS ÉTROITS ENTRE LA RESPONSABILITÉ INTERNATIONALE ET LA THÉORIE GÉNÉRALE DU DROIT INTERNATIONAL

On va comprendre pourquoi la responsabilité est omniprésente. La responsabilité est au centre du système international. Cela explique par ricochet que la responsabilité subisse de plein fouet les mutations enregistrée depuis 1945 par le droit international, et que par conséquent elle soit au cœur des nouveaux enjeux du droit international contemporain.

A. La responsabilité internationale est au centre du système juridique international

1) Comme dans tout système juridique, la responsabilité joue un rôle fondamental à la fois au plan social et au plan juridiqueAu plan social, la responsabilité est le corollaire de la liberté. En droit international, on dira qu’elle est

le corollaire de la souveraineté. En quelque sorte, sans responsabilité il n’y a pas de vie en commun possible. C’est parce que je suis libre que je dois répondre de mes actes, et c’est parce que les autres sont souverains aussi que ma liberté ne doit pas nuire à autrui. Cette conception très libérale de la responsabilité correspond en quelque sorte à une conception très moderne de la chose politique.

On a pu dire que la responsabilité était la nouvelle idéologie des sociétés contemporaines. En effet dans nos sociétés laïques, matérialistes, techniques et industrielles, le hasard, la main de dieu ne sont plus des explications satisfaisantes quand un problème survient. Lorsqu’il y a un problème social, c’est qu’il y a forcément un responsable.

On retrouve cette idéologie très souvent dans la presse. Ex : les séismes, responsabilité -> les scientifiques qui ne l’ont pas prévu. Grippe aviaire responsabilité des politiques…

Cette nouvelle idéologie a des fondements légitimes. P. ex. en droit interne, elle a permis au 19ème siècle d’en finir avec ce qu’on appelait « le fait du prince ». Le roi n’était jamais responsable, avec un arrêt TC 1873, BLANCOT, qui reconnaît la responsabilité de la puissance publique.

Mais parallèlement, ça a produit certaines déviances problématiques : la recherche de responsables, qui sont introuvables en réalité du point de vue de la technique juridique.

Deux exemples : Hans JONAS a inventé le concept philosophique de la responsabilité envers les générations futures. Ça permet de protéger l’environnement. Mais comment construire une responsabilité juridique dont les victimes ne sont pas encore nées ? Qui sera le bénéficiaire de la réparation ? Qui sera légitime à la demander ?

La responsabilité de protéger. Elle est apparue en 2005 dans la résolution 60A1 de l’AG des Nations-Unies, dont le fonctionnement est le suivant : Il appartient à chaque État de protéger sa population des crimes internationaux (génocides, crimes c. l’H, crimes de guerre…)Si l’État n’exerce pas cette responsabilité, alors celle-ci est transférée au niveau international -> c’est à la communauté internationale d’exercer cette responsabilité en lieu et place de l’État défaillant.∆ responsabilité de protéger = droit d’ingérence.

Il y a de nombreuses incertitudes : la responsabilité de protéger est-elle une obligation ? Est-ce qu’on a l’obligation d‘intervenir militairement dans un pays qui n’assume pas cette responsabilité ? Qui est la communauté international ? Une majorité d’État ? Le Conseil de l’ONU ? Tous les États ? -> incertitudes sur ces questions.

En juillet dernier, la conseillère juridique de l’ONU a admis que la responsabilité de protéger était une obligation morale, politique, mais non juridique.

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La responsabilité est au centre du système parce que, comme l’a rappelé en 1970 la CIJ, l’affaire de BARCELON TRACTION, la Cour rappelle que la responsabilité est le corollaire nécessaire du droit. En effet, une obligation dont la violation n’est pas sanctionnée n’est plus vraiment une obligation. Mais cette citation est incomplète. De quel droit parle-t-on ?Est-ce qu’on vise :- le droit Subjectif de la personne qui subit le dommage ?- le droit Objectif (la légalité que l’on protège). Qui est la victime ? L’État ? La victime ? Tous les États, qui ont intérêt au respect de l’interdiction du génocide ? (= intérêt général que doit protéger le droit de la responsabilité -> la société est victime).

2) Dans l’ordre international, la responsabilité joue un rôle encore plus important que dans l’ordre interneCe rôle a conduit l’ancien président de la CIJ à parler d’une hypertrophie de responsabilité.

En droit international, au fond la responsabilité était le droit de tout (law of everything) : elle ordonne quasiment tout le droit international.

1ère raison de l’hypertrophie : Dans le droit international il n’existe pas de contentieux de la légalité au sens où un traité vaut un autre traité, la coutume en vaut une autre. Quand un État conclue un traité avec un État A, un autre traité avec un État B, et que ces deux traités sont contradictoires, il n’est pas possible d’annuler un traité car l’un est contraire à l’autre.

Que dit le droit international ? art. 30 Conv. Sur le droit des traités : dans ce cas de figure, l’État doit choisir quel traité il va respecter et il engage sa responsabilité pour la violation de l’autre côté.Exemple : 12 sept. 2012, la CEDH a rempli une décision NADA c. SUISSE. Dans cette affaire, la Suisse était poursuivie pour avoir appliquer une résolution du Conseil de sécurité qui avait ordonné des sanctions contre M. NADA présumé terroriste, qui lui interdisait de quitter le territoire suisse, et qui avait gelé ses avoirs financiers.

M. Nada contestait ces sanctions comme contraire à la Conv. EDH, en particulier car on ne peut pas contester devant un juge les résolutions du Conseil de sécurité (≠ droit au juge, art. 6 Conv. EDH). La CEDH constate que les résolutions du Conseil de sécurité sont contraires à la Conv. EDH, la Suisse aurait dû essayer de concilier les deux obligations contradictoires, et comme elle ne l’a pas fait, elle engage sa responsabilité internationale. La Suisse est déclarée coupable.

C’est très fréquent en droit international.

2nde raison d’hypertrophie : Il n’existe de voie d’exécution en droit international. On ne connaît pas le découpage entre le droit de la responsabilité. Par conséquent, le seul recours c’est le droit de l responsabilité. Exemple : on va devant la CIJ, qui dit qu’on a droit à réparation, on peut ressaisir la Cour pour réengager la responsabilité. On obtient un 2ème jugement. Tant qu’on n’a pas de voie d’exécution, on est condamné à une chaine normative illimitée.

La CIJ en 1986, dans l’affaire du Sud-Ouest Africain, a rappelé que la procédure d’exécution des obligations n’a jamais constitué que l’exception en droit international public. Ça n’existe que dans quelques conventions, mais pas en droit international coutumier.

En raison de cette carence fondamentale, on a inclus dans le droit de la responsabilité un mécanisme particulier de sanction : les contre-mesures.

Ça correspond à l’ancien système des représailles. On autorise l’État dont les droits sont violés à violer à son tour les droits de l’État responsable. Difficulté : tant qu’aucun juge ne s’est pas prononcé, on ne sait pas qui a tord, qui a raison.

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Séance 3 – mercredi 31 octobre 2012

B. La responsabilité internationale subit l’effet des mutations contemporaines du droit international La responsabilité internationale subit l’effet des mutations du droit international. C’est un « phénomène d’éponge ». La responsabilité internationale, comme elle est centre du système de droit, elle va absorber les différentes mutations du droit international. Ces mutations vont modifier et le régime et la définition de la responsabilité internationale.

Avant 1945 -> cinq caractéristiques :- Régime unitaire de responsabilité (≠ avec le droit interne de la responsabilité)- La responsabilité internationale concerne seulement la responsabilité de l’État. - Le fait générateur de la responsabilité est de nature purement civiliste (si on compare avec ce qu’on connaît en droit interne), au sens où il se constitue de deux éléments :

* La violation d’une obligation* Un dommage

- La seule conséquence de la responsabilité -> obligation de réparer le dommageSi il n’y a pas de dommage, on n’engage pas sa responsabilité.- La responsabilité internationale se traduit par un rapport juridique qui est de nature purement « intersubjective ». Cela signifie que la responsabilité ne concerne que le responsable et la victime du dommage. Le but de la responsabilité est de restaurer l’équilibre des prestations entre la victime et le créancier de l’obligation.

Après 1945, quatre révolutions vont bouleverser, interpeler le droit de la responsabilité internationale.

1) Émergence de nouveaux sujets du droit international.

Dès 1949, la CIJ (organe J de l’ONU) va rendre un avis consultatif, le 11 avril 1949, dans l’affaire des réparations des dommages subis au service des Nations-Unies. Cette affaire concerne le comte Bernadotte, agent de l’ONU, employé en 1948 en Palestine pour trouver une solution à un problème israélien et palestinien. Il va être tué sur le territoire palestinien.Q : qui est victime de la violation du droit international ? Qui a le pouvoir de réclamer réparation ? -> Les États membres de l’ONU ?-> l’ONU elle-même en tant que personne juridique à part entière ?R : les États ne sont pas les seuls sujets en droit international. En particulier, les organisations internationales sont désormais des sujets de droit international.C’est donc l’ONU et non pas ses États membres qui a le pouvoir de demander réparation.

1) L’émergence de nouveaux sujets de droit international

Désormais le droit de la responsabilité international qui était essentiellement interétatique avant 1945 va pouvoir se décliner en plusieurs régimes différents selon la nature du sujet qui est impliquée par le problème de responsabilité.

La personnalité de ces nouveaux sujets n’est pas nécessairement de même mesure que celle des États. Ça veut dire qu’il faut adapter le régime de responsabilité, le paramétrer, en fonction des caractéristiques propres à chaque sujet concerné. Cf. avis consultatif du comité international du droit de la mer, du 2011, qui concerne le droit de la responsabilité des entreprises qui exploitent le territoire marin au delà des zones de juridictions nationales.

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2) L’émergence de valeurs impératives

Avant 1945, au fond le droit international était un droit de coexistence entre des entités égales en souveraineté (conception civiliste de la responsabilité).

Ensuite émergent des valeurs communes qui vont transcender les égoïsmes étatiques. Qui vont connaître une traduction juridique à travers deux véhicules techniques : le jus cogens (droit impératif) qui en 1969 est consacré par la convention de Vienne sur le droit des traités et qui signifie qu’il y a des normes dont la valeur est si importante qu’on ne peut pas y déroger par la voie conventionnelle.

Autrement dit il y a des limites à ce qu’on peut mettre dans un traité international : on bride la volonté des États. Ex : interdiction du génocide, interdiction de la torture.

Ensuite il y a les obligations erga omnes (CIJ, 5 fév. 1970, BARCELON ATTRACTION), dans lequel la Cour va dire qu’il existe certaines obligations au respect desquelles tous les États ont un intérêt juridique. REUTER (?) : « à partir de 1945 le droit international à certains égards bascule de l’univers du contrat vers l’univers de la loi ».

L’une des applications de cette évolution tient particulièrement au fait que désormais les relations entre l’État et sa population vont être prises en compte par le droit international.

Ex : avant 1945, si génocide, ça n’intéressait pas le droit international. Ainsi peut-on parler de génocide arménien ? La notion n’existait pas en droit international. En revanche, à partir de 1945, ça devient une part du droit international.

3)L’émergence d’intérêts solidaires

On prend conscience qu’il existe certains espaces ou certains biens qui doivent être considérés comme la chose de tous. Ce sera notamment concrétisé pour d’une part, les fonds marins, au delà des zones de juridiction nationale, ce qu’on appelle aujourd’hui la ZONE, qui en 1970 est déclarée patrimoine commun de l’humanité. Cela veut dire que son exploitation doit se faire dans l’intérêt de la communauté internationale.

En 1979, ce même régime va être déclaré applicable à la lune et aux autres corps célestes. En 1972 se tient la 1ère grande conférence sur l’environnement à Stockholm, où on va voir émerger un vrai droit international de l’environnement.

Ces intérêts solidaires interviennent à deux égards le droit de la responsabilité :-> doit-on toujours considérer que les seules parties impliquées sont le responsable et la victime du dommage ?P. ex. si pollution massive de l’océan, qui n’affecte que les côtés d’un seul État. Qui est victime ? L’État côtier ? Ou tout le monde ?

De plus si les États mènent des activités dangereuses, est-ce que ça ne devrait pas mener à introduire une responsabilité sans faute ? Ex : extraction de gaz de schiste / activité nucléaire.

4) La fragmentation du droit international

Terminologie derrière laquelle on vise un phénomène particulier qui trouve sa source dans le développement du droit international qui s’est fait à partir d’une spécialisation de celui-ci. En se spécialisant de deux manières principalement :- En voyant se créer des branches particulières du droit international, qui vont créer leurs propres institutions et leurs propres juridictions. C’est le cas en particulier droit international des droits de l’homme, ou encore du commerce international.

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- Le régionalisme, avec la mise en place de toute une série d’organisation d’intégration régionale, au 1er rang, les communautés européennes (l’UE), ou encore leur propre juridiction.

Le problème que pose cette fragmentation : dans un grand nombre de cas, ces branches particulières du droit international ou ces organisations régionales vont revendiquer l’application de règles spéciales en matière de responsabilité. Autrement dit, là où avant 1945 il n’y avait que le droit international coutumier de la responsabilité, ensuite il y a des droits.

Trois exemples : - CJCE 25 nov. 1979, n°232/78, VIANDE BOVINE. La CJCE a considéré que le mécanisme des contre-mesures à l’intérieur des communautés européennes est interdit. On ne peut se faire justice soit même dans l’ordre juridique de l’UE.- La Cour interaméricaine des droits de l’H, a retenu une conception très généreuse de la réparation qui s’assimile presque à une réparation punitive voire préventive. Ex : si on viole les droits de l’H, il faut mettre en place des programmes éducatifs sur la TV, de la formation des militaires, des policiers…Toute une série de mesure pour garantir qu’à l’avenir les violations ne se répètent pas.- Dans le domaine du droit des investissements étrangers, on a considéré p. ex. dans une sentence UPS c. Canada, 24 mai 2007, que dans le cadre des accords ALENA, par exception au droit coutumier, les actes des entreprises d’État ne sont pas attribuables à l’État donc n’engage pas sa responsabilité internationale.

Paradoxalement, c’est plus compliqué d’autant plus qu’en 1945 on a voulu codifier la matière. Or ce faisant on s’est enfermé dans des débats théoriques, politiques, qui ont considérablement compliqués la définition du droit de la responsabilité internationale post-1945.

SECTION 2. SA CODIFICATION C’est la mise par écrit des règles coutumières de la responsabilité internationale. On souhaite mettre par écrit au même moment le droit de la responsabilité. Cela va supposer qu’on prenne partie, position, sur un certain nombre de points de principe. C’est d’autant plus vrai que depuis le 19ème siècle il y a eu un débat idéologique autours du droit de la responsabilité internationale qui s’est construit au 19ème siècle dans sa version classique, pour l’essentiel sur la base d’une pratique qui mettait aux prises des entreprises occidentales et des États latino-américains accusant de mettre en jeu leurs intérêts économiques du capitalisme international.

Le droit de la responsabilité internationale s’est construit dans une structure inégalitaire. Certains auteurs, p. ex. JESSUP a considéré que le droit de la responsabilité internationale était l’un des aspects de ce qu’on appelait à l’époque la « diplomatie du dollar ». Autrement dit, le droit de la responsabilité internationale était un moyen pour les grandes entreprises de voir leur intérêt protégé.

§1. LES OPTIONS DOCTRINALES EN PRÉSENCE Elles sont de trois type. Elles ont comme point commun que la responsabilité veut dire qu’il faut

répondre de ses actes. Que son déclenchement suppose au moins une violation du droit international et que son contenu contient au moins l’obligation de réparer.

A. La conception classique Une seule obligation : réparation.La fonction de la responsabilité est purement réparatoire. Elle n’implique que la responsable et la victime du dommage. Pour qu’il y ait engagement de la responsabilité, il faut un acte illicite et un dommage.

Elle a été défendue par ANZILOTTI. Aujourd’hui encore, elle est chez COMBACAU. ET un État qui considère que la responsabilité se limite à l’obligation de réparer, comme la France.

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B. La conception normativiste Cette conception se retrouve chez KELSEN et chez GUGGENHEIM. Ils défendent une conception

étonnante de la responsabilité : la seule conséquence pour eux de la responsabilité internationale c’est l’habilitation donnée à la victime d’exercer un acte de contrainte contre le responsable. On ne sait cependant pas s’il s’agit d’une sanction-punition, ou simplement un moyen de pression pour pousser l’État à respecter ses obligations. Sur ce point il y a une certaine ambiguïté.

Point étonnant : la réparation a disparu, alors que dans toute la jurisprudence du 19ème, c’est ça qu’ordonnent les juridictions.

Selon KELSEN, la réparation n’est pas un droit de la victime mais simplement un moyen d’éviter la contrainte. Autrement dit, si l’État ne veut pas être sanctionné, il doit payer. Mais ce n’est pas un droit ni une obligation.

Selon GUGGENHEIM, la réparation est une obligation mais qui pèse sur la victime. La victime a le droit d’utiliser la contrainte, uniquement si au préalable la victime a cherché à obtenir réparation.

KELSEN va avoir une influence décisive pour plus tard, s’agissant des obligations secondaires, au cœur du droit de la responsabilité internationale.

C. La conception « moderne » Elle doit beaucoup aux réflexions de Roberto AGO (entre 18 et 39) et notamment son cours à

l’académie du droit international de la Haye de 1939 sur le délit international. Une profonde influence sur le L. de codification dont AGO sera le maitre d’œuvre.Pensée juridique allemande de l’entre deux guerres va notamment développer une théorie du droit international.

Ensuite, la pensée soviétique : ils sont défenseurs de l’idée d’une responsabilité pénale de l’État -> crime international de l’État.

Idée centrale : la responsabilité depuis 1945, depuis le début du 20ème siècle, ne se limite pas à la réparation. Elle peut inclure également la sanction. La notion de sanction ici n’est pas décrite comme une voie d’exécution mais au sens de châtiment. Ça sert à punir le responsable dans un certain nombre de cas.

Si on part de ce postulat doctrinal, il y a plusieurs conséquences.-> Les fonctions de la responsabilité sont à la fois civiles et pénales.-> L’extension du contenu de la responsabilité : il faut épurer le fait générateur de responsabilité en excluant le dommage des conditions d’engagement de la responsabilité. En effet s’il s’agit de punir, il n’est pas nécessaire qu’un dommage se soit produit.

4ème conséquence : il y a un élargissement des personnes concernées. S’il y a une violation, est concernée la victime, mais également tous les autres États.

§2. LES CHOIX OPÉRÉS PAR LE CODIFICATEUR A. La codification du droit de la responsabilité des États pour fait

internationalement illicite Dans les années 20 il y a eu une 1ère tentative de codification de la matière de droit international puisque la l’AG de la SDN va décider en 1927 de convoquer une conférence de codification sur le sujet de la responsabilité des États, laquelle va se réunir du 13 mars au 12 avril 1930 pour rapidement constater qu’il était impossible

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d’aboutir à quoique ce soit en raison de l’opposition trop forte entre deux groupes d’États : les États européens d’un côté, défenseurs du système classique, et de l’autre côté les États latino-américains qui souhaitaient faire évoluer le droit de la responsabilité internationale.

Il va falloir attendre 1945 pour qu’une deuxième tentative voit le jour, du fait de la commission du droit international, organe subsidiaire de l’AG de l’ONU, crée en 1947 afin de développer progressivement le droit international et le codifier. Il y a 34 experts qui doivent représenter les grandes formes de civilisation et les principaux systèmes juridiques du monde. Ils sont élus pour un mandat de cinq ans renouvelable indéfiniment. Ils sont élus par l’AG de l’ONU. C’est un processus diplomatique : il faut faire campagne à New-York.

La commission fonctionne de la manière suivante : elle va inscrire tel ou tel thème à son ordre du jour, elle va nommer un rapporteur spécial sur ce thème, lequel va être chargé de synthétisé la pratique, la jurisprudence, la doctrine, et sur cette base proposer des projets d’articles. Lesquels, vont être discutés au sein de la Commission internationale, qui va adopter un projet complet de l’ensemble des articles en 1ère lecture. Cela va être renvoyé à l’AG de l’ONU qui va donner son avis.

Ensuite ça revient devant la Commission qui va analyser la position des États, avant d’adopter en 2ème lecture et de manière définitive un ensemble de projets d’articles. Ce projet est renvoyé à l’AG de l’ONU qui en fait ce qu’elle veut. Elle peut, p. ex. en prendre note. Ou bien elle peut décider de convoquer une conférence diplomatique afin d’en faire une convention internationale.

Deux exemples : * Convention de Vienne sur le droit des traités de 1969 est le fruit d’une conférence diplomatique qui a fait suite à un projet d’articles par la commission du droit international.* Le statut qui a créé la Cour pénale internationale en 1998 a fait suite aux travaux de la commission.

Précisions : * Le travail de la Commission repose sur un dialogue perpétuel entre les États et la Commission. Ça a un impact sur son travail.* En principe la codification du droit international vise simplement à mettre par écrit les règles coutumières du droit international. Ça n’a rien à voir avec la codification telle qu’on la connaît en droit interne, où il s’agit de rassembler dans un code des textes écrits épars. En droit international ce sont des règles non écrites qu’on met par écrit. En effet, une règle non écrite, on peut lui faire dire ce qu’on veut.* Le rôle de la Commission est la codification + le développement progressif du droit. Cela signifie que la Commission peut proposer des évolutions qu’elle estime souhaitable.

1. Historique d’une codification houleuse Notamment en raison des enjeux de la matière et en raison de la personnalité des rapporteurs

spéciaux au sein de la Commission qui ont été chargés de préparer le travail de codification. Il y a eu 5 rapporteurs spéciaux différents, dont les conceptions doctrinales, les tempéraments étaient différents.

En 1949, la première cession de la commission droit international (CDI). Elle estime que la codification de l’ensemble du droit international est le but à atteindre. Cela traduit un culte de l’écrit (il faut tout mettre par écrit) et une méfiance à l’égard du droit coutumier.

Il faut cependant bien placer des priorités. La CDI va sélectionner quelques matières. Parmi celle-ci, la CDI retient la responsabilité des États, qu’elle place après trois autres matières : le droit des traités, le droit de la procédure arbitrale, le régime de la Haute Mer.

En 1953, l’AG des Nations-Unies va demander à la commission de procéder immédiatement à la codification du droit de la responsabilité au motif que c’est nécessaire pour maintenir et développer les relations pacifiques entre États.

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On retrouve ici une idée de la paix par le droit. À ce titre, la responsabilité mérite d’être codifiée. Sur cette demande, en 1955, la CDI va débuter ses travaux sur la responsabilité des États. Ils vont aboutir 46 ans plus tard, en 2001, avec l’adoption des Articles sur la responsabilité des États.

Si on décompose ces 46 ans, on se rend compte que c’est le travail en 1ère lecture qui a duré le plus longtemps, puisqu’il a fallu atteindre 1996 pour que la CDI adopte un 1er ensemble de projets d’articles. La 2ème lecture n’a duré « que » quatre ans.

Il y a eu cinq rapporteurs spéciaux (ils sont au cœur du travail de codification). Le 1er : Francisco Garcia Amador, de nationalité cubaine, et qui entre 1956 et 1961 a rendu six rapports qui n’ont pas été véritablement examinés par la CDI en raison de la manière dont Amador avait configuré le sujet. Par ailleurs, en 1961 il n’est pas réélu à la CDI. Il a fallu nommer un corapporteur spécial. Le 2nd : Roberto AGO, qui va rendre huit rapports entre 1969 et 1980 qui vont balayer l’ensemble de la première partie du projet d’articles consacrés aux conditions d’engagement de la responsabilité. Ça va contenir 35 dispositions. Le 3ème : William RIPHAGEN (Pays-Bas), qui va rendre lui sept rapports entre 1980 et 1986 et qui vont porter sur le contenu de la responsabilité. Il n’est pas réélu. Le 4ème : ARANGIO-RUIZ (italien). En 1996, il va théâtralement démissionner au motif que la CDI ne souhaite pas le suivre dans ses propositions. À lui seul, il va rendre 8 rapports entre 88 et 96, est l’incarnation même du débat au sein de la CDI puisque dans un 1er temps, il va être un farouche opposant de la notion de « crime de l’État » avant de changer d’avis et de considérer que le crime d’État est utile au sein de la société internationale pour une raison qui est qu’à partir des années 90, le conseil de sécurité des Nations-Unies va commencer à adopter des sanctions à tout va (c. l’Iraq, c. la Lybie…) et cela en violation de la Charte des Nations-Unies.

L’idée de Arangio-Ruiz est de codifier le crime de l’État, l’enserrer dans des limites étroites de manière à lier les mains du conseil de sécurité. Il démissionne car la CDI ne le suit pas. Le 5ème James CRAWFORD, australien, universitaire, praticien du droit international. Il va entre 1998 et 2001 faire preuve d’un esprit très pragmatique qui va permettre d’aboutir à un projet final, qui, on le reverra va mettre sous le tapis les questions qui fâchent. Il permet d’arrondir les angles, il fait aboutir à un projet satisfaisant.

Qu’en est-il des évolutions ? Elles sont pour l’essentiel de trois types :1° La distinction des règles primaires et des règles secondaires

En 1956, AMADOR limite le domaine à un domaine particulier : la responsabilité pour les dommages causés à la personne ou aux biens des étrangers. Autrement dit, le 1er rapporteur spécial considère qu’on ne peut pas codifier tout le droit de la responsabilité, qu’il faut donc commencer par codifier un domaine seulement du droit de la responsabilité.

Ça inclut p. ex. l’expropriation des biens des étrangers, ça inclut le traitement arbitraire des étrangers…Position qui était d’une part conforme à la jurisprudence du 19ème siècle et d’autre part ça tenait compte du fait que si on codifiait l’ensemble du droit de la responsabilité, on courait le risque de devoir codifier l’ensemble du droit international. P. ex. si on codifie la responsabilité en cas de conflit armé, alors il faudra déterminer dans quel cas on peut avoir recours à la force, et dans quels cas non.

Il y avait une sorte de non-sens en se limitant à un secteur particulier. Le problème c’est que si choix il fallait faire, le choix retenu n’était pas le meilleur. Pour deux raisons : - C’est dans le domaine de la protection des étrangers qu’on avait l’opposition très forte entre pays européens et latino-américains, qui avait fait échouer la codification de 1930.

C’est ce que vont dire rapidement les États du tiers monde et ceux du bloc soviétique. Ils vont considérer que ce domaine de la responsabilité internationale est trop favorable aux intérêts économiques privés.- Beaucoup d’États vont dire : vous n’avez pas tenu compte du fait qu’en 1945 a été adoptée la Charte des Nations-Unies, qui a introduit de nouvelles valeurs, de nouveaux objectifs : respect des droits de l’H, maintien de la paix…Choses qui méritent d’être prises en compte dans le travail de codification.

Autrement dit, on reproche d’être tourné trop vers le passé. L’urgence n’est pas de codifier les anciennes pratiques.

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Ça va conduire, en 1962, l’AG des Nations-Unies dans une résolution 1765 de demander à la Commission du droit international de prendre en compte les buts et principes de la Charte des Nations-Unies.

Si bien qu’en 1963, la CDI créé une sous-commission sous la présidence de Roberto Ago, qui sera chargée de réfléchir à la manière dont le projet doit être réorienté en vue de le sortir de l’ornière de ces débats idéologiques.

C’est là que la Commission va avoir l’idée de dire qu’il faut distinguer les obligations primaires et les obligations secondaires, codifier la responsabilité internationale ce n’est pas codifier les obligations primaires, c’est uniquement codifier les obligations secondaires qui valent pour l’ensemble des obligations primaires.

Deux types d’obligation en droit international : Les obligations que s’imposent les États dans tous les domaines de la vie sociale internationale comme l’interdiction de faire usage de la force, d’exproprier, de torturer, les règles du droit aérien international. obligations primaires.

Que se passe-t-il quand une obligation primaire est enfreinte ? Une obligation secondaire va naître. C’est-à-dire, dira KELSEN, une obligation qui se substitue à l’obligation primaire en vue de corriger la violation de l’obligation primaire. P. ex. l’obligation de réparer. C’est pas une obligation qui existe de manière spontanée, elle n’a d’intérêt que lorsqu’on a violé une obligation primaire.

Secondaire au sens d’accessoire.

Le droit de la responsabilité c’est uniquement l’ensemble des règles secondaires qui établissent à quelles conditions un État engage sa responsabilité lorsqu’il viole une obligation primaire et qui établissent quelles sont les conséquences qui en découlent.

En se polarisant sur les règles secondaires, la CDI se place dans l’après obligation primaire en disant qu’elle n’a pas à prendre position sur ce que dit l’obligation primaire.

Avantage : On peut codifier tout le droit de la responsabilité d’un seul coup. De plus on n’a pas à entrer dans les débats idéologiques, qui concernent la définition des obligations primaires.Ex : on a essayé de définir l’agression. On n’y est pas parvenu. Mais on a pu définir la responsabilité.

Cette distinction elle est importante car elle a permis depuis de mettre de l’ordre dans l’articulation entre plusieurs branches du droit international. C’est très utile pour clarifier des problématiques juridiques.Exemple : 1 -> distinction entre compensation et réparation.

On reconnaît en droit international que l’État a le droit d’exproprier ou de nationaliser. Simplement ce droit est soumis à certaines conditions. On peut le faire que pour un motif d’intérêt public. Et on ne peut le faire que si on verse une compensation financière. Celle-ci, ce n’est pas une conséquence de la responsabilité. On ne viole aucune loi en expropriant. Il faut admettre maintenant qu’on exproprie une entreprise sans verser de compensation. Dans ce cas de figure, on a violé le droit international. On est tenu à une obligation de réparation.Distinction : - le montant du préjudice est différent- il existe p. ex. des traités qui donnent compétence pour des arbitres en excluant ce qui concerne la compensation2 -> responsabilité de protéger, responsabilité au sens du Droit international : obligation primaire. État a l’obligation de protéger sa population contre tel ou tel crime. Et si il ne le fait pas, la communauté internationale a l’obligation de protéger sa population. Autre question : si l’État ne protège pas sa population : est-ce qu’il responsabilité ? Peut-on attaquer les autres pays pour ne pas avoir compléter cette obligation ? c’est douteux.

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3->Relation entre la responsabilité et le droit des traités. CIJ 25 sept. 1997, GAPCIKOVO, concernant un système de barrage qui devait être construit conjointement entre la Hongrie et la Slovaquie. Ils se mettent d’accord par un traité en 1977.Les travaux commencent, mais la Hongrie suspend les travaux au motif que ce système de barrage risque de porter atteinte à l’environnement. Hors, disait la Hongrie, depuis les années 80/90, le droit de l’environnement a évolué. Par conséquent le traité de 1977 n’est plus applicable aujourd’hui.HONGRIE : état de nécessité écologique qui autorise à mettre fin au traité. Pb : la nécessité ≠ motif valable de suspension d’un traité. La convention de Vienne sur le droit des traités ne mentionne pas la nécessité comme cause d’extension.

En revanche le droit de la responsabilité fait de l’état de nécessité une circonstance exonératoire de responsabilité.Raisonnement de la Cour :-> est-ce que le traité de 77 est-il encore en vigueur -> ça relève du droit des traités, du droit primaire. Elle va constater qu’on ne peut pas invoquer l’État de nécessité pour mettre fin à un traité. On conclue que le traité est toujours en vigueur.-> Puisque le traité est en vigueur, il est susceptible d’être violé. Q : peut on invoquer la nécessité pour s’exonérer de sa responsabilité d’avoir violer le traité ?en l’espèce : ø d’état de nécessité.

4-> Distinction entre la responsabilité pour fait illicite et la responsabilité sans fait illicite.CDI cohérente a constater en 69 que puisque la RI pour fait illicite relève des règles secondaires relève d’un genre tout à fait différent de la responsabilité sans fait illicite. En 69, projet d’articles scindé en deux : R pour fait illicite et R pour risque.

b) L’exclusion du dommage des conditions d’engagement de la responsabilité Nous sommes en 1969, on a codifié que les règles secondaires. Qui va être nommé rapporteur

spécial ? Roberto AGO, qui est au plan doctrinal défenseur d’une conception moderne de la responsabilité. La responsabilité ça doit être réparatoire et punitif. Il faut exclure le dommage des conditions d’engagement de la responsabilité. C’est la métaphore du feu rouge. Il n’y a pas besoin de dommage.

La conception punitive suppose de se débarrasser du dommage. C’est la position de Roberto Ago. Dans le même temps il sait qu’il n’est pas majoritaire. Il sait que dans la conception classique, cad dans les 150 années de jurisprudence qui précèdent, le dommage = condition d’engagement de la responsabilité.

R. Ago va avoir l’idée de dire que dans toute violation du droit international il y a un préjudice. C’est le préjudice juridique.

Le dommage n’est pas une condition autonome d’engagement de la responsabilité puisque le dommage est, à certains égards, inhérents à la violation du droit. Donc ce n’est pas la peine de la mentionner. Il suffit de dire que toute violation du droit international engage la responsabilité. Ça va convaincre la commission ; les juges internationaux. Ça va aboutir à ce que désormais on considère que pour engager la responsabilité, il suffit qu’on ait violer le droit international. Cela veut dire que désormais, la responsabilité internationale a vocation à défendre les droits subjectifs des États mais également le droit objectif.

La France va s’opposer à cette révolution, en 1998. Elle va dire que l’exclusion du dommage n’est pas acceptable car elle reflète la volonté d’instituer une sorte d’ordre public international et de défendre la légalité objective et non pas les droits subjectifs de l’État alors que pour la France c’est la fonction de la responsabilité internationale.

Lorsqu’un État viole une obligation ordinaire du droit international, on admet toujours que seule conséquence est l’obligation de réparer. Si on suit la CDI, si on suit cela il n’y aura pas d’obligation de réparer.

C’est ce qu’on appelle en doctrine un « engagement purement platonique » de responsabilité.

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On retrouve ce genre de situation devant le CIRDI.

Certains tribunaux arbitraux réintroduisent la condition du dommage au niveau de la compétence du tribunal. Dans le cadre du CIRDI. Ils vont dire que pour pouvoir connaître la réclamation en responsabilité, il faut prouver au stade de la compétence qu’il y a un préjudice.

Désormais l’article 1er des articles de 2001 dit que tout fait internationalement illicite de l’État engage sa responsabilité internationale : dès qu’on viole le droit on engage sa responsabilité.

Séance 4 – mercredi 7 novembre 2012

c) Élargissement du contenu et des fonctions de la responsabilitéRoberto Ago a exclu le dommage des conditions d’engagement de la responsabilité avec l’artifice du

préjudice juridique. Dès lors, que seule la violation droit international engage la responsabilité, il est désormais possible d’élargir la responsabilité dans son contenu et dans ses destinataires.

En supprimant le dommage, on a levé un verrou. Ça permet de moderniser la responsabilité.

Exemple : Vision classique. En 1990, l’Iraq envahit le Koweït. Si on raisonne en termes classiques, alors pour qu’il y ait responsabilité il faut un dommage, il n’y a donc qu’une seule victime (le Koweït), la seule conséquence sera la réparation du préjudice subi.Vision moderne. Le seul fait que l’Iraq a commis une faute engage sa responsabilité. Sa responsabilité est engagée à l’égard tous les États. Elle n’implique pas seulement la réparation. La communauté internationale est en droit de punir l’Iraq pour la violation du droit international.

R. Ago va suivre ce cheminement en :- 1973 : Ago et la Commission vont considérer qu’à ce stade de la codification, puisqu’on ne connaît pas les conséquences d’engagement de la responsabilité, alors il faut adopter une définition large de la responsabilité de manière à envisager toutes les conséquences potentielles. La Commission va adopter une définition de la responsabilité internationale :

La responsabilité internationale désigne toutes les sortes de relations nouvelles qui peuvent naitre en droit international du fait illicite d’un État, que ces relations se limitent à un rapport entre l’État responsable et l’État directement lésé ou qu’elle s’étendent aussi à d’autres sujet de droit international et qu’elles soient centrées sur l’obligation de réparer le préjudice ou qu’elles portent aussi sur la faculté pour l’État lésé lui même ou pour d’autres sujets d’infliger à l’État coupable une sanction admise par le droit international.

À côté de la conception classique, on élargit la responsabilité. Ça peut inclure d’autres personnes que la victime, ça peut inclure la sanction du responsable.

- 1976 : Roberto Ago et la Commission du droit internationale vont concrétiser l’ouverture de 1973 en considérant qu’il existe dans le droit contemporain deux grands types de faits internationalement illicites auxquels s’attachent des conséquences distinctes. On a le délit international et le crime international.

Délit international : régime classique de la responsabilité. Pour les faits illicites ordinaires, comme quand on viole l’OMC.

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Crimes internationaux : violations graves des règles internationales. Pour lesquels on va compléter le régime classique de responsabilité, en y ajoutant d’autres conséquences et en élargissant le cercle des sujets intéressés par l’engagement de la responsabilité.

Reprise de l’exemple de l’Iraq : le Koweït a toujours droit à réparation. Mais par ailleurs les autres pays ont un intérêt juridique à ce que l’Iraq cesse donc rime envers le Koweït.Difficulté en 1976 : cette distinction entre crime et délit fait couler beaucoup d’encre. Difficulté c’est que techniquement, c’est une proposition qui ne repose que sur une intuition, et qui ne repose en revanche sur aucune pratique, ni sur aucune jurisprudence. Intuition de 1976 : en cas de génocide, agression armée, on ne peut pas considérer que la seule conséquence est la réparation du préjudice. La violation du traité de commerce ≠ génocide.

Nécessairement, puis qu’il y a deux natures, il devrait y avoir deux régimes de responsabilité.

Cela explique d’ailleurs que les successeurs de R. Ago à la CDI qui vont être chargés à partir de 1980, lorsque AGO va à la CIJ, de codifier les conséquences de l’engagement de la responsabilité, ils vont faire face à de grandes difficultés puisqu’il va s’agir de codifier quelque chose qui n’existe pas et qui par ailleurs est révolutionnaire en droit international à commencer par le fait qu’il y aurait désormais un crime de l’État. Le premier rapporteur qui succède à R. Ago, William Riphagem, qui durant six ans va tenter, proposer des solutions concrètes à ce problème. Mais va le faire de façon trop théorique et aussi trop complexe ce qui fait qu’en réalité la CDI ne retiendra aucune de ses propositions. Même chose pour le rapporteur qui lui succède, qui va changer son fusil d’épaule qui va être un farouche partisan du crime de l’État à un point tel qu’il va verser dans une utopie totale, un « angélisme irresponsable », puisqu’il va proposer deux choses suivantes :- en cas de crime international, on aurait un juge qui serait automatiquement compétent, ce qui est concrètement impraticable puisqu’on ne voit pas les États souscrire à une convention qui donnerait automatiquement compétence à un juge pour les cas de crimes internationaux.

2ème proposition : elle consistait à accoler le système des Nations Unies au droit de la responsabilité internationale. Le système aurait fonctionné de la manière suivante : en cas de crime international allégué, tout État aurait pu saisir le Conseil de sécurité des N-U ou l’AG des N-U qui auraient jouer le rôle de procureur et auraient renvoyé l’affaire à la CIJ pour qu’elle décide si oui ou non il y avait un crime international, étant entendu qu’en cas de réponse positive, alors tous les États auraient eu le pouvoir de sanctionner l’État coupable.

L’idée de ce projet était de stopper le crime international : la sanction n’était pas une sanction punitive mais une sanction de type « mesure de police » : on intervient pour arrêter le bain de sang.

Là encore, c’était un projet irréaliste. Si on prend p. ex. l’affaire du génocide entre la Bosnie et la Serbie, la Cour a été saisie en 1993, elle a rendu son arrêt au fond en 2007 soit 14 ans plus tard. Le génocide avait pris fin. L4idée même de mixer et de mélanger un régime de police (= mesure urgente pour faire cesser le crime) avec une procédure judiciaire était contradictoire, incohérente, paradoxale. Le temps de la justice est un temps long. Alors qu’il faut une réaction rapide pour faire cesser le crime. Ce projet a été abandonné.

En définitive, c’est le dernier rapporteur spécial, J. Crawford qui a proposé la version finale où a retenu en 2001 des conséquences très modestes en termes de crime international, alors qu’on s’est débarrassé de la notion même de crime international qui était beaucoup trop polémique. On le reverra plus tard, on parle désormais des violations graves des obligations découlant d’une norme impérative du droit international général -> bref une violation grave du jus cogens.

2. La montagne a-t-elle accouché d’une souris ?

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On a aboutit aux articles de 2001 -> c’est le projet d’articles adoptés par la Commission de droit international en août 2001. Ces articles se composent de 59 articles qui sont divisés en quatre parties :

1° Faits générateur de la responsabilité :

Responsabilité à raison du fait d’un autre État Violation de l’obligation Circonstances excluant l’illicéité Attribution du comportement

2° Contenu de la responsabilité

Réparation du préjudice Conséquences du fait illicite Conséquences particulières, supplémentaires, découlant d’une violation du jus cogens

3° Mise en œuvre de la responsabilité

Invocation de la responsabilité (en particulier l’intérêt à agir) Les contre-mesures, c’est-à-dire les mesures de pression que l’on peut appliquer pour forcer l’État

responsable à exécuter ses obligations. Ces sanctions ne sont pas punitives, elles n’ont qu’un caractère instrumental, procédural.

4° Dispositions générales : les clauses sans préjudice. On a pas su où les mettre.

Ces articles de 2001 ont été relativement bien accueillis au sens où les États ont considéré que c’était un produit final acceptable. Le projet était suffisamment conservateur pour être acceptable.

Trois grandes critiques : - abandon de l’idée de crime de l’État au profit d’une terminologie difficile à manier et qui sont relativement anodines. La seule nouveauté : en cas de violation grave, au delà de la réparation, il existe une obligation de non-assistance à l’État criminel et non reconnaissance du crime commis.- les articles de 2001 sont décevants à l’égard des conséquences classiques de la responsabilité. En particulier, le régime de la réparation qui pose des Q techniques tout à fait redoutables : en particulier qu’est ce que le lien de causalité ? Comment évalue-t-on le préjudice ? Et l’évaluation de l’indemnisation ? Pas traitées dans le projet. Ce projet d’articles se limite à des standards très généreux qui n’éclairent pas nécessairement le praticien. En droit interne, on le sait un régime de la réparation très casuistique, formé au cas par cas. Et il était p-e illusoire de vouloir le codifier.- Les articles de 2001 avaient procédé à une codification par élimination au sens où on a écarté du projet d’articles, systématiquement, les questions qui posaient difficultés, pour ne codifier que ce qui ne posait pas difficulté. De fait on trouve dans le projet d’articles pas moins de 8 clauses en préjudices (qui dit qu’on écarte qqch de la codification).

Ce sont :* art. 55 sans préjudice de la lex specialis, des régimes spéciaux qui pourraient s’appliquer. Cela veut dire que les articles de 2001 ne sont d’application qu’en cas d’absence de règles spéciales. Ex : recours en manquement, au sein de la jurisprudence du recours en manquement : on applique des règles spécifiques à l’ordre juridique européen.

* art 57 : sans préjudice des règles applicables à la responsabilité des organisations internationales qui pourtant est étroitement liée à la responsabilité des États. Lorsque les États membres qui siègent au Conseil général des

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Nations Unies, qui impose des sanctions à un État. Qui est responsable des préjudices que ça pourrait occasionner ?

L’ONU en tant qu’organisation internationale ? Aussi les États membres qui ont voté ?

Lorsqu’une organisation internationale est responsable d’un préjudice, qu’elle doit réparer un dommage mais son budget n’est pas suffisant pour s’acquitter de la réparation. Est-ce que les États membres sont subsidiairement responsables ?

* art. 58 : sans préjudice de la responsabilité internationale des individus.Autrement dit on aurait une étanchéité entre la responsabilité de l’État comme PM et la responsabilité individuelle des agents de l’État. Ex : un chef d’État est condamné individuellement pour avoir conduit, ordonné un génocide ou des crimes contre l’humanité, ça n’aurait pas d’effet sur la responsabilité de l’État. Mais en vrai il y a une affinité très forte entre la responsabilité des agents et de l’État, mais la commission l’exclue du projet d’articles.

* art. 59 : sans préjudice de la Charte des Nations-Unies. En particulier, des sanctions que peut prendre le Conseil de sécurité qui pourtant peuvent avoir un effet sur la responsabilité d’un État. Ex : en 2003, une coalition menée par les USA et le UK ont envahit l’Iraq au faux motif que l’Iraq s’apprêtait à faire usage d’armes de destruction massive.Pourtant quelque mois plus tard le Conseil de l’ONU adopte une résolution où il confie à ces deux États la mission d’administrer le territoire iraquien en vue de la conduire vers un gouvernement démocratique.Q : quel est l’effet de cette résolution ? Est-ce que ça légalise a posteriori l’action de la force armée c. l’Iraq ? Peut-on engager la responsabilité de ces deux États aujourd’hui ? Est-ce que la résolution de l’ONU ne s’y oppose pas ?

*art. 56 : « Les règles de droit international applicables continuent de régir les questions concernant la responsabilité de l’État pour faits illicites dans la mesure où ces questions ne sont pas régies par les présents articles ». Ça ne couvre pas les règles spéciales (car art. 55). Cela signifie que ça couvre les règles coutumières. Donc il admet ne pas avoir tout codifier.

* art. 33§2 : Les articles de 2001 sont sans préjudice des droits que la responsabilité internationale peut faire naître directement au profit d’une personne ou d’une entité autre qu’un État. Cela signifie que le projet d’articles ne codifie que la responsabilité interétatique.

99% du contentieux de la responsabilité concerne les relations entre un individu et un État.

Or malgré cette clause, les juges internationaux considèrent que ces textes s’appliquent aussi dans les relations entre un État et un individu.

* art. 41§3. Qui est consacré aux conséquences de violation grave du droit international : les articles sont sans préjudice de toute conséquence supplémentaire que peut entrainer, d’après le droit international, une violation grave d’une obligation découlant du jus cogens.

* art. 54. Concerne le cœur de l’histoire du crime. En cas de violation de crime international, est-ce que tous les États ont le droit de prendre des contre-mesures ? Articles sans préjudice « Des mesures licites que tous les États pourraient prendre en cas de violation grave… ». La CDI n’a pas pris position sur ce qui est licite ou non. C’est pourtant important dans la pratique. Ex : depuis 20 ans, l’UE a pris l’habitude d’adopter des sanctions contre des États tiers en cas de violation grave du droit international : c. La Tunisie, la Lybie, l’Iraq. Est-ce licite // au droit international ? On ne le sait pas. La pratique se situe dans une zone grise.

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Le travail opéré reste cependant fondamental, et sur les points qui ont été codifiés, le travail de la CDI reste d’une importance fondamentale et aujourd’hui qui fait autorité auprès des juridictions internationales au point d’avoir acquis un statut quasi conventionnel (instrument contraignant).

3. Le statut juridique des « Articles de 2001 » En règle générale les articles de la CDI sont transformés en convention. On s’est demandé : est-ce qu’il faut convoquer une conférence diplomatique afin de négocier une convention internationale sur la responsabilité sur la base du projet de la CDI. Cette option conventionnelle est restée longtemps sur la table, et elle était toujours d’actualité en 1996 lorsque le projet a été adopté en 1ère lecture. Dans le projet de 1996 on trouvait à la fin du projet des dispositions relatives au règlement des différends, pour les différends liés à la mise en œuvre du projet d’article. Ce genre de clause est utiles pour les convention internationale. Ça n’a aucun intérêt pour un ensemble d’articles qui sont purement académiques, juste recommandés à l’intention des États.

Durant la 2ème lecture du projet d’articles, les choses ont évoluer en sens inverse au sein de la CDI pour deux raisons :- le rapporteur spécial Crawford va considérer que pas utile que soit une convention dès lors que les juges ont déjà pris l’habitude de se référer aux travaux de la CDI dans le domaine de la responsabilité. Ex : sentence arbitraleEx2 : sentence CIRDI, 1990Ex3 : 1997, CIJ, affaire CIKOVO où la CIJ va utiliser les travaux de la commission à propos d’une Q qui était pourtant très controversée à l’époque : existence de l’état de nécessité comme une cause exonératoire de responsabilité ?- Il n’était pas opportun d’invoquer une conférence diplomatique puisqu’on était péniblement arrivé après 50 ans à un projet acceptable. Si on le convoquait, on risquait de repartir pour des années et des années.

En 2001, la CDI a demandé à l’AG de prendre acte de son projet d’articles tout en lui recommandant d’envisager la possibilité à un stade ultérieur de convoquer une conférence internationale de négociation d’une convention.

Le 12 déc. 2001, résolution 56/83, l’AG va faire trois choses : * Elle prend note des articles de 2001* Elle les annexe à la résolution, et elle les recommande à l’intention des gouvernements (soft law)* Elle décide de se ressaisir de la question en 2004.

2004 est reporté à 2007.La question de savoir ce qu’il convient de faire des projets d’articles. En 2004 ; le secrétaire doit faire une compilation des jurisprudences qui se sont servi des articles de 2001. Si on constate que les juges s’en servent déjà, ce n’est pas nécessaire de faire plus.Q reportée à 2010. En 2010, l’AG a reporté à 2013 la question.

Certains États voudraient une conférence diplomatique, ce fut le cas jusqu’en 2010 du Royaume-Unis, c’est toujours le cas de la France. Pourquoi ? Pour détricoter ce qu’a réalisé la CDI. Elle pense que la CDI est allée trop loin.

En tout cas : le dommage ≠ condition d’engagement de la responsabilité. De plus, dans son avis consultatif du 9 juil. 2004, dans l’affaire du mur israélien en territoire palestinien occupé, la Cour a mis en œuvre le régime particulier de responsabilité qui s’applique en cas de violation grave d’une obligation découlant du jus cogens.

La Cour a, en particulier, considéré que tous les États avaient l’obligation de ne pas prêter assistance à l’État israélien dans la construction du mur, l’obligation de ne pas reconnaître la situation créée par l’existence de ce mur. Également : les États ont l’obligation de coopérer pour mettre fin à cette violation grave du droit international.

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Cette affaire a des prolongements concrets. Tout d’abord, la France a participé à la construction du tramway israélien qui empiète sur le territoire palestinien occupé. Il y a une procédure contre l’entreprise en cause pour violation des obligations du jus cogens.

L’UE importe une grande quantité de produits fabriqués par des colons en territoire palestinien occupé. C’est importé alors qu’on en connaît la provenance. C’est une violation de l’obligation de non-assistance.

B. La codification des autres branches du droit de la responsabilité internationale

On retrouve la codification par élimination. Au fur et à mesure qu’on a avancé sur la codification de la responsabilité de l’État pour fait illicite, on a buté sur certaines difficultés.

Ce phénomène qui sépare un projet en plusieurs s’est manifesté pour quatre thèmes.

1. La « responsabilité » pour dommage Thématique importante du droit international, notamment à la suite de plusieurs catastrophes

environnementales, qui ont fait prendre conscience que les dommages à l’environnement méritent sans doute un régime particulier de responsabilité. En 1974, la CDI inscrit à son ordre du jour un nouveau thème de codification : celui de la responsabilité pour les conséquences préjudiciables découlant d’activités qui sont pas interdites par le droit international.

Ici responsabilité sans faute. Responsabilité pour risque Ce sont des activités dangereuses. En cas d’accident les conséquences préjudiciables peuvent être importantes et peuvent, de ce seul fait, mériter réparation.En 74, la CDI prétendait codifier quelque chose qui n’était pas connu de la pratique, ni de la jurisprudence.Ça va être scindé en deux projets :1° Projet qui aboutit en 2001. Il porte sur la prévention des dommages transfrontières, résultant d’activités dangereuses. 2° Un 2ème projet d’articles, qui va aboutir, en 2006. Il porte sur la répartition des pertes en cas de dommage transfrontière découlant d’activités dangereuses.

Ces deux projets ne concernent pas la responsabilité de l’État. Le 1er ne concerne pas la responsabilité, et le 2nd ne concerne pas l’État. Le 1er se contente de prévoir un certain nombre d’obligations primaires qui pèsent sur l’État sur le territoire duquel survient des dommages transfrontières. Quand le dommage survient, il y a obligation d’informer les autres États qu’il y a eut dommage.

Le 2ème projet concerne la réparation, la responsabilité sans faute, mais en définitive ils n’imposent à l’État aucune obligation de réparation puisqu’il se contente au conditionnel de demander aux États de faire en sorte que la personne privée responsable du dommage indemnise les victimes principe du pollueur payeur.

L’article 4§1 dit que « chaque État devrait prendre toutes les mesures nécessaires pour veiller à ce qu’une indemnisation prompte et adéquate soit accordée aux victimes de dommages transfrontaliers causés par des activités dangereuses se déroulant sur son territoire ou placée sous sa juridiction ou son contrôle.C’est un projet qui vise à généraliser ce que beaucoup de conventions internationales sectorielles prévoient en matière environnementale.

Ex : convention de 1969 sur la pollution par hydrocarbure : c’est l’affréteur qui est responsable des dommages causés à l’environnement. Certains disent que c’est un projet insipide qui ne consacre en rien une responsabilité sans faute de l’État. De ce point de vue, le projet initial n’a pas été rempli.

Puisqu’il n’existe qu’une seule convention aujourd’hui qui prévoit un régime de responsabilité sans faute de l’État : convention du 29 mars 1972, // lancement des objets spatiaux.

2. La responsabilité pénale internationale des individus

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En 1947, l’AG de l’ONU avait demandé à la CDI de proposer à la suite des jugements de Nuremberg et de Tokyo, une mission de proposer un code des crimes internationaux, ce que la CDI fera en 1954, en soumettant à l’AG un code des crimes dont l’AG reportera l’examen en attendant que l’on s’accorde sur une définition de l’agression.

L’AG prend en 1974 une résolution célèbre portant définition de l’agression (résolution 33/14). En 1978 l’AG décide de soumettre pour observation cette fois-ci aux États le code de 1954.

À la suite de celles-ci, l’AG demande à la CDI de reprendre ses travaux qui vont aboutir en 1996 à l’adoption de deux projets d’articles, un 1er qui porte « Code des crimes contre la paix et la sécurité » qui codifie le crime de guerre, le crime contre l’humanité, le crime de génocide, et crime d’agression.

Dans un 2ème projet, elle propose la création d’une Cour criminelle internationale en vue d’universaliser et de généraliser l’expérience déjà concluante des deux tribunaux pénaux internationaux que le Conseil de sécurité de l’ONU avaient créer en 1993, des tribunaux, un pour le Rwanda, et l’autre pour la Yougoslavie. Ça aboutit à la convention de Rome qui crée la Cour Pénale internationale, laquelle ne juge que des individus.

3. La protection diplomatique La protection diplomatique concerne les situations dans lesquelles une personne privée subit un

préjudice résultant d’une violation du droit international commis par un État, et ne disposant pas d’un droit de recours devant une juridiction internationale. Elle va demander à son État de nationalité d’endosser sa réclamation et de transformer le différend entre la personne privée et l’État responsable en un différend entre l’État responsable, et l’État de nationalité de la victime.

En 1996, la CDI a décidé d’en faire un sujet à part de codifications. Ça a aboutit en 2006 à la rédaction d’un article final sur la protection diplomatique.

4. La responsabilité des organisations internationales La CDI a inscrit ce sujet à l’ordre du jour en 2002. En 2011, la CDI a adopté un projet d’articles définitifs, ce qui est en grande partie d’inspiration du projet de 2001. Ça adapte, sur des points particuliers, le droit de la responsabilité international à la nature particulière des organisations internationales.

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SECTION 3. SON REGIME

§1. L’ENGAGEMENT DE LA RESPONSABILITÉ INTERNATIONALE L’engagement de la responsabilité internationale de l’État. Rappel : ø besoin de dommage.

Ø besoin de faute. L’intention n’est pas déterminante. Pour qu’il y ait engagement de la responsabilité, il suffit que trois conditions soient remplies :- Il faut que le comportement litigieux soit attribuable à un État - Ce comportement ne doit pas ê conforme à une obligation internationale qui pèse sur l’État.- Il ne faut pas qu’il existe une circonstance qui exclue l’illicéité du dit comportement.

A) La condition d’attributionL’État est une personne morale, comprenant la réunion d’un territoire, d’une population et d’un

gouvernement. Ces deux acceptions de l’État ne reflètent pas la même chose. Au sens où la 1ère notion est plus restrictive que la 2nde. Ainsi si une PP nationale de l’État commet un acte répréhensible, cet acte n’est pas attribuable à l’État. C’est-à-dire qu’on va considérer que l’État ne peut pas être considéré comme l’auteur de cet acte. Au regard du droit international, l’État n’est réputé responsable que pour les actes commis par l’appareil gouvernemental.Appareil gouvernemental : ce sont des individus. Un solda, un ministre, un militaire, un fonctionnaire. Dans un litige, il faut déterminer si un acte commis par une PP, est un acte commis par l’État ou par une PP agissant comme personne privée.

Trois hypothèses :1) Acte commis par un organe de l’État -> acte commis par une personne qui dans le droit interne de l’État est considéré comme représentant de l’État. État responsable.

2) Acte commis par une personne privée à titre privée. Ex : en vacances, un fonctionnaire tue le chef de l’État. Ça n’engage pas la responsabilité de l’État.

3) Des personnes privées, non organes de l’État, mais qui néanmoins ont une certaine affiliation à l’État. Les personnes privées exercent des prérogatives de puissance publique. Pour ces personnes, tout acte qu’elles commettent dans l’exercice de ces prérogatives de puissance publique engage la responsabilité de l’État.

Ex : la Banque centrale dans un État est parfois une personne de droit privé, elle dispose à la fois de compétences purement commerciales, et qui par ailleurs a un acte non marchande : émission de la monnaie. À quel titre agit-elle ?

Ex 2 : la SNCF = entreprise commerciale. Elle est partie financée par des subventions. Il y a des cas où la SNCF a renfloué ses filiales apparemment à perte. Pendant longtemps, la SNCF a soutenu cette filiale. Est-ce qu’elle a agit en investisseur prudent et avisé ? Ou a-t-elle agit pour sauver les emplois dans un secteur sensible politiquement ? -> enquête de l’autorité européenne de la concurrence.

Hypothèse de contrôle, directives, ou instructions. On a affaire à une entité privée, mais qui agit sous le contrôle effectif de l’État. L’État sera responsable au titre de ce contrôle des actes remplis par cette entité privée. Ex : les entités paramilitaires, officieuses, qui ne sont pas rattachées à l’État. Mais si elles sont contrôlées par l’État, l’État est donneur d’ordre, donc État est responsable.

-Ex des ≠ hypothèses : CIJ, 24 mai 1980, USA c. IRAN, affaire du personnel diplomatique et consulaire des USA à Téhéran. Les membres de l’ambassade américaine à Téhéran font l’objet en 1979, lors de la révolution

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iranienne, prise d’assaut et prise d’otage. Ça conduit les USA à attaquer l’Iran devant la CIJ. En disant que l’État iranien a engagé sa responsabilité internationale du fait de cette situation.Distinction de deux périodes :À l’origine de l’affaire, une manifestation d’étudiants iraniens a dégénéré, elle a conduit les étudiants à prendre d’assaut l’ambassade américaine, et a prendre en otage les membres de la mission diplomatique. La Cour va dire que les actes commis dans cette 1ère période consistant à envahir l’ambassade sont attribuables à des personnes privées et aucunement à l’État iranien. La Cour dit qu’est attribuable à l’État iranien un autre comportement que la prise de l’ambassade et la prise d’otage : les policiers iraniens qui ont assistés à la scène sont restés passifs alors que la Convention de Vienne exige des États qu’ils protègent les missions diplomatiques présentes sur leur territoire. L’omission à protéger l’ambassade = faute.

Les autorités iraniennes vont reprendre à leur compte les actes commis. En particulier, des déclarations seront faites par l’Ayatollah Khomeiny qui va dire que ces étudiants preneurs d’otage sont des agents de l’État iranien, qu’ils agissent en son nom. La prise d’otage ne prendra fin qu’à la fin des années 80. Passée un certain moment, l’acte de ces personnes privées est devenu un acte de l’État iranien.

Ex 2 : Dans l’affaire du génocide en 2007, la Bosnie attaque la Serbie pour le génocide des années 1990. La Cour a été confrontée à une situation dans laquelle où l’État serbe n’avait pas commis les actes en question, mais ils avaient été commis par une entité autoproclamée, qui étaient les serbes de Bosnie ainsi que par toute une série d’entités paramilitaires. La Cour a soigneusement, dans un arrêt du 26 fév. 2007 examiner si ces ≠ entités ont agi ou non sous le contrôle, les directives ou les instructions de l’État Serbe. La Cour a dit que l’État serbe n’est pas responsable du génocide : on n’a pas pu prouver qu’elle avait contrôlé les actes des entités paramilitaires.

Séance 6 – mercredi 14 novembre 2012

B- La condition de violation Il faut mais il suffit que le comportement litigieux soi non conforme à une obligation qui pèse sur cet État. C’est un examen purement objectif au sens en particulier ou l’intention de l’État n’entre pas en jeu. Peu importe que l’État ait voulu ou non de violer l’obligation. Ce qui compte, c’est le décalage entre ce que veut l’obligation et ce que l’État a concrètement fait.

L’obligation doit être en vigueur au moment où a eu lieu la violation. Il faut se placer au moment de l’acte, et regarder quel était à ce moment là le droit en vigueur. Ex : responsabilité historique des États. Est-ce que les États aujourd’hui sont responsables au sens du droit international pour les crimes contre l’humanité commis à l’époque de la colonisation. Lorsqu’on se pose ce genre de questions, il ne s’agit pas de se demander si les actes commis à l’époque sont aujourd’hui des crimes contre l’humanité. Il faut se demander si à l’époque, le droit international prohibait ce genre de comportements. Ex : le génocide arménien de 1915. En 1915, l’Empire Ottoman a massacré de manière quasi systématique la population arménienne qui vivait sur le territoire de l’Empire. Certains disent aujourd’hui que la Turquie serait responsable d’un génocide contre le peuple arménien et qu’on pourrait à ce titre invoquer la convention de 1948 contre le génocide, ou encore le droit coutumier international qui prohibe le génocide. Cependant, en 1915, il est discutable qu’il existe une prohibition du génocide.

Ne serait-ce que par le mot même de génocide n’est apparu que 20 ans plus tard à la veille de la seconde guerre mondiale. On peut considérer qu’historiquement c’est un génocide. Mais sur le terrain du droit international, il faut que la règle soit en vigueur au moment où le fait s’est produit. Pour que l’engagement de la responsabilité déclenche une forme aggravée de responsabilité, il faut que la violation de l’obligation

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présente un double élément de gravité. Il faudra qu’il existe une violation grave d’une obligation découlant d’une norme impérative du droit international général.

C) L’absence de circonstances excluant l’illicéitéIl existe certaines circonstances qui ont pour effet de conduire à exclure le caractère illicite d’un acte

qui par ailleurs constitue un fait internationalement illicite. L’effet de ces circonstances est d’exclure l’illicéité, ce n’est pas de rendre licite l’acte qui a été commis. Cela signifie que le comportement de l’État reste contraire à ses obligations. Il a violé le droit international, simplement, on ne va pas en tirer de conséquences sur le terrain de la responsabilité. Autrement dit, les circonstances excluant l’illicéité sont des circonstances exonératoires. À l’heure actuelle, il existe 6 circonstances excluant l’illicéité. 1) Le consentement de la victime

La victime a consenti à la commission du fait illicite, l’État n’engage pas sa responsabilité.

2) La forme majeure, la détresse et l’état de nécessité. Elles se distinguent de la manière suivante :La force majeure, par opposition aux deux autres, suppose que l’État auteur du fait illicite, n’a pas eu le choix. Il a été contraint par une force que l’on va qualifier d’irrésistible, et imprévisible de commettre l’acte illicite. Ex : si un avion militaire est pris dans une tempête, qui va le conduire malgré lui à pénétrer dans l’espace aérien d’un autre État, sans son consentement, c’est une violation du droit international, mais il y a cas de force majeure.

Par contraste, la détresse et l’état de nécessité placent l’État dans une situation extrême qui va le conduire à devoir choisir entre deux issues également insatisfaisantes : violer le droit international ou affronter un certain danger.

La détresse vise le cas particulier où des vies sont en danger. Ex : un navire militaire qui connaitrait une avarie mettant en danger la vie des marins, et qui a le choix soit « je coule en haute mer » soit « je décide de rentrer dans le Port d’un État étranger sans son consentement ».

État de nécessité : fonctionne de la même manière. Ex : risque d’atteinte à l’environnement. Ex2 : crise économique. Ces périples là sont moins grave que dans le cas de la détresse.

Quand les périls sont moins graves, les conditions d’invocation de l’état de nécessité sont plus fortes que pour l’état de la détresse.

3) Deux autres circonstances : elles ont un point commun -> celui de réagir à une violation préalable du droit international. C’est cette violation préalable du droit international qui constitue la circonstance excluant l’illicéité. légitime défense / contre-mesures. Ça couvre l’usage e la force armée, qui vient en réaction à une agression préalable. Du coup, l’usage illicite de la force n’engage pas la responsabilité parce qu’il vient repousser l’agresseur.

C’est le même mécanisme pour les contre-mesures, à la différence près que les contre-mesures ne recouvrent pas le recours à la force. Elles vont exonérer les responsabilités la violation du droit international qui vient en riposte à une autre violation du droit international. Ex : un embargo économique. On augmente les dts de douane, parce que l’autre État détient en otage des ressortissants. -> la réaction est légitime.

§2. LE CONTENU DE LA RESPONSABILITÉ INTERNATIONALE La responsabilité n’est invoquée que par l’État parce qu’elle vise à obtenir quelque chose. Définition

de ce quelque chose : à quoi sert d’engager la responsabilité internationale ? Plusieurs objectifs, dans l’abstrait : - symbolique, qui est simplement une condamnation de principe du responsable- objectif préventif : contenir la violation, empêcher le déroulement- objectif matériel- objectif afflictif : viser à punir le responsable

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La responsabilité englobe ces objectifs, mais au fond elle les aménage à sa manière.

A) En cas de fait illicite ordinaire-> régime qui s’applique à n’importe quel fait illiciteDeux séries d’obligations.

1) La réparationElle existera dès lors que le fait illicite aura causé un dommage, autrement dit avec l’obligation de

réparation, on envisage les effets concrets de la responsabilité. Arrêt de 1928, Usine de CHORZOW, par la CPIJ. La réparation doit autant que possible effacer toutes les conséquences de l’acte illicite et rétablir l’état qui aurait vraisemblablement existé si le dit acte n’avait pas été commis.Remarques : 1) On exclue clairement les dommages et intérêts punitifs. Autrement dit la réparation n’est pas punitive. Elle vise uniquement à revenir à la situation antérieure au fait illicite. La réparation est uniquement compensatrice -> on compense le déséquilibre causé par le fait illicite. Parce qu’on est dans l’ordre de la compensation, la réparation ne peut pas être une science exacte. il s’est passé quelque chose, un événement s’est produit, un fait illicite a été commis. Du coup, on ne pourra pas refaire totalement l’histoire.

La réparation doit réparer « autant que possible » et rétablir ce qui se serait passé sans cet événement.

Ex : bombardement d’une usine. Réparation : couvre le manque à gagner. Il faut évaluer quels profits l’entreprise aurait pu faire si elle n’avait pas été bombardé. On est nécessairement dans une forme de spéculation.

La réparation doit être intégrale, elle doit effacer toutes les conséquences de l’acte illicite.Comment s’y prend-t-on pour réparer ? Dans un arrêt récent, de la CIJ du 19 juin 2012, DIALO. Arrêt

très important car c’est le 1er arrêt dans lequel la Cour internationale de justice est conduite à fixer la réparation dans un litige en responsabilité. Dans toutes les affaires antérieures, la Cour avait dit qu’il y avait une obligation de réparer, mais les parties avaient elles même décider du montant de la réparation.

Ici, par exception, les parties ne s’étaient pas mises d’accord. La Cour a dû fixer, concrètement, la réparation. On y trouve des éléments très précis. Notamment, la Cour précise que la réparation suppose de procéder en trois temps déterminer l’existence du préjudice établir un lien de causalité entre le préjudice subi et le fait illicite qui engage la responsabilité évaluer le préjudice

1ère étape : prouver que l’usine a été bombardée et qu’elle a été détruite. Prouver que c’est un bombardement qui l’a détruit. Qu’elle a été détruite du fait illicite.3ème étape : trouver le montant du préjudice.

a) Quelques précisions sur les modalités de la réparationLa réparation peut épouser plusieurs formes. En droit international elle épouse trois formes

principalement :- la restitution naturelle, la remise des choses en l’étatex : invasion d’un territoire, il faut se retirer du territoireCette obligation ne s’applique que si elle n’est pas matériellement impossible et si par ailleurs elle n’impose une charge hors de proportion pour l’État.Ex : si un État est contraint de spolier des investisseurs, et qu’on pourrait l’obliger à restituer aux investisseurs l’ensemble des entreprises nationalisées

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- la réparation par indemnisation, par équivalent -> ça couvre tout dommage susceptible d’évaluation financière. Dans ce cas de figure, la réparation passera par le versement d’une somme financière.- la réparation par satisfaction : reconnaissance officielle de la violation ou l’expression de regrets ou d’excuses. Dans la pratique, ça se manifeste le plus souvent par un constat judiciaire d’illicéité. Le juge international dira que le fait de constater la violation du droit international suffit à réparer le préjudice causé.Ex : 15 juin 2008, Djibouti réparation par voie de satisfaction.CIJ, fév. 2007, réparation du génocide : la Cour a estimé que la Serbie n’était pas coupable de génocide à Srebenica mais tout de même, était coupable d’un manquement à l’obligation de prévention et de répression du crime de génocide.En revanche, le juge international n’a pas le droit d’enjoindre à l’État responsable de faire quelque chose qui relève du pouvoir interne de l’État.

CIJ, 14 fév. 2002 Congo c. Belgique, la Cour a estimé que la Belgique avait violé les immunités d’un ministre congolais en délivrant un mandat d’arrêt contre lui. La Cour a considéré ne pas avoir le pouvoir d’annuler un acte interne. Elle avait seulement le pouvoir d’obliger la Belgique à mettre fin au mandat d’arrêt, par le moyen de son choix.Affaire AVENA du 31 mars 2004, dans laquelle le Mexique a obtenu la condamnation des USA pour avoir violer la convention de 1963 sur les relations consulaires en ne donnant pas la possibilité à des ressortissants mexicains poursuivis au pénal aux USA d’obtenir l’aie des autorités consulaires. Le Mexique a demandé que la Cour ordonne la révision des jugements rendus par les juridictions américaines. La Cour s’y est refusée en estimant qu’elle n’avait pas ce pouvoir. Elle a considéré que les USA avaient seulement l’obligation de réparer le préjudice causé par le moyen de leur choix.

b) Quels sont les dommages réparablesen principe tous les dommages sont réparables. En 1923, la CPIJ dans l’affaire Lusitania, a rappelé que le dommage matériel comme le dommage moral étaient réparables. Rappel de cette règle dans l’affaire DIALLO 2012.

Le dommage doit être uni par un lien de causalité au fait illicite. Il faut qu’il existe une relation de cause à effets entre le fait illicite et le dommage, qui peut emprunter la forme de plusieurs maillons. On parlera alors de causalité transitive. Il y aura un lien de causalité, dès lors que chaque maillon de la chaîne est relié au précédent par une relation de cause à effet. Ex : on participe à un conflit armé, on est blessé par balles. Balle, qui relève de la catégorie des armes interdites dans le droit des conflits armés.

On se demande s’il y a causalité entre le décès et la balle impliquée.Causalité : - le fait de la victime rompt la chaîne de causalitéAbondante jurisprudence : notamment // à la guerre du Golfe. Beaucoup avaient estimé que du fait de l’invasion du Koweït, elles avaient dû fuir le territoire koweitien. Dans sa jurisprudence, la Commission d’indemnisation a regardé si le départ de la personne a été contraint ou volontaire. Elle a constaté p. ex. que certaines personnes avaient quitté le territoire koweitien parce qu’elles devaient participer à des fêtes d’anniversaire en Jordanie. Même chose pour le fait du tiers : si le dommage a été causé par le fait d’une personne tiers.

Ex : dommages causés par les bombardements des forces alliées, qui ne sont pas réparables par l’État Iraquien (dans l’affaire Iraq / Koweït). - les causes parallèles : un même préjudice trouve deux causes en même temps. Dans ce cas de figure, il y aura une ventilation de la réparation, c’est-à-dire qu’on ne devra réparer que la part du dommage qui correspond à ce qui a été causé par le fait illicite. Cette appréciation de la causalité, elle est très approximative.

Prévisibilité et proximité : sont réparables les préjudices qu’on pouvait raisonnablement s’attendre à résulter du fait illicite. Commission Érythrée Éthiopie du 27 juil. 2007 (n°7) -> quel est le régime applicable au droit

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c) L’évaluation du quantum

(valeur du préjudice)Qu’en cas de réparation.Ce qui pose deux difficultés.

Réparation par équivalent. Or l’équivalent se mesure mal et en particuliers car mesure en termes monétaires ou financiers.

L’argent est il la mesure ou encore la bonne mesure de toute chose ?Combien coutent les séquelles d’actes de tortures ? …

Cette évaluation du quantum se fait sur la durée, de manière rétrospective, le dommage a été subit, plusieurs années plus tard on va fixer le montant. Pdt cette durée, les données économiques ont pu évoluer.

6 difficultés au titre de l’évaluation du quantum :

Comment évaluer le préjudice immatériel, moral ?

La CIJ dans son arrêt de Dialo (2012) a apporté plusieurs éléments sur ce point, en considérant tout d’abord que le préjudice immatériel peut être établis même en l’absence d’éléments de preuves précis.Elle a précisé qu’il peut exister des facteurs qui aggravent le préjudice immatériel.Elle considère tenant compte de la jurisprudence arbitrale et en matière des droits de l’homme, « que la détermination du montant de l’indemnité du à raison d’un préjudice immatériel repose nécessairement sur des considérations d’équité ».=> le juge fait ce qu’il veut.

L’évaluation de la perte effective : le dommage immergent

Ex de la destruction d’une usine. Comment évaluer ?En jurisprudence, en général est d’évaluer la perte par rapport à la valeur loyale et marchande du bien. Si c’est un bien courant, valeur sur les marchés. Si entreprise, on prendra en compte la valeur de l’actif ou dans d’autres situations la valeur comptable nette. Cad l’actif – le passif.Difficulté lorsque cela concerne un état développé et en développement.Quel marché de référence ?Et pas toujours de marché de référence pour les entreprises non cotées en bourse. => Valeur fiscale ou encore assurée ou de remplacement.

Evaluation du manque à gagner :

Profit que vous auriez pu tirer d’un bien ou d’une activité si le fait illicite n’avait pas été commis.On estime la valeur du préjudice, forcément approximatif.

Dépenses accessoires :

Ex de stocker ou de vendre à perte à cause d’un fait illicite, la jurisprudence : ces dépenses sont réparables.

Y’a t il lieu à verser des intérêts qui viendraient augmenter l’indemnisation pour tenir compte du décalage dans le temps entre le moment du dommage et la réparation payée ?

Tenir compte de l’inflation ?La jurisprudence accepte que l’on puisse ajouter des intérêts mais (depuis Dialo) des intérêts moratoires ne sont dus qu’en cas de paiement tardif. En cas de paiement tardif, si l’E responsable a rechigné à réparer.

Connaît on en DI la condamnation aux dépens ?

Es ce que le perdant est tenu de payer les frais de justice engagés par l’Etat qui gagne le procès ? Dans le

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contentieux interétatique, principe : chaque partis supporte ses propres couts de procédure.Dans le contentieux entre un individu et un E c’est le même principe que l’on retient auquel on ajoute une exception « lorsque les circonstances le justifie ».Il faudra alors évaluer le bien fondé des frais de justice engagés par la victime.

Dans quelle devise doit on libeller la réparation ?

Règle général à défaut de prévisions des partis : dollars. Nouveau problème d’évaluation, cours au moment du préjudice ou de la réparation ?La CEDH avait jusqu’à maintenant retenue le taux Libor pour les taux d’intérêts…

1. La cessation et les garanties de non répétition

L’Etat responsable = mettre fin aux faits illicites si celui ci est de nature continu et d’offrir des assurances et des garanties de non répétition appropriées si les circonstances l’exigent.Très discuté lors des Commissions du DI au motif qu’elles ne relevaient pas vraiment du DdelaR, et qu’en réalité elles n’ajoutaient rien à l’obligation primaire.Dire qu’obligation de cesser le fait illicite = même chose que de dire que l’on doit respecter l’obligation primaire.Pourquoi ces obligations dans le projet de R ?On retrouve une considération qui tient aux lacunes de l’ordre juridique international dans lequel il n’y a pas de gendarme ni d’autorité de police universelle, à ce titre la la cessation et la non répétition peuvent servir de moyens de pression pour faire respecter le DI.

La CIJ s’est montré confuse quand à la nature de l’obligation de cessation. Dans un arrêt du 13 juillet 2009, Costa Rica c/ Nicaragua affaire du fleuve san juan :Elle a considéré que l’obligation de cessation ne relevait pas du droit de la R, elle l’a prononcé que lorsqu’au titre de sa fonction judiciaire elle l’estimait opportun une cessation de ?

Le 3 Fevr 2012 All c/ Italie : La C a cette fois ci semblé réintégrer la cessation dans le droit de la R mais en mélangeant avec la restitution.

Le 20 Juillet 2012 affaire Belgique c/ Sénégal : la C dit que la cessation est une conséquence du droit de la responsabilité, revirement de l’affaire costa rica, obligation qui s’impose automatiquement, mais précise qu’il n’est pas toujours opportun de mentionner cette obligation dans le dispositif de l’arrêt.

La cour a estimé qu’elle pouvait prononcer des garanties de non répétition si circonstances spéciales l’exige.La cour l’a prononcé en 2001 dans l’affaire Lagrand lorsqu’elle a pour la première fois condamnée les USA sur la convention de Vienne (consulaire) que les USA avaient déjà violé auparavant. Ils récidivent, de nouveaux condamnés en 2004, donc garanties de non répétition pas tellement efficaces, Cour désormais très prudente dans leurs prononcés ( si circonstances spéciales l’exigent).

Régime technique encore peu fluctuant dans la jurisprudence.

B – Régime de responsabilité pour violation grave découlant d’une norme impérative

On n’a pas retenu les dommages et intérêts punitifs. En particuliers, il est symptomatique de relever qu’en 1991 lorsque le Conseil de Sécurité des NU, par sa résolution 687 a décidé de mettre en place une commission d’indemnisation des dommages causés par l’Irak du fait de l’invasion et de l’occupation illicite du Koweït.Unanimité du Conseil permanent de Sécurité, mise en œuvre autoritaire, on est en présence d’une violation grave, on est en pleine codification du DdelaR = c’était une occasion rêvée de consacrer le crime de l’Etat et le Conseil décide de mettre en place un régime de R civile de l’Irak simplement tenu de réparer les préjudices qu’il a pu causer y compris pour les atteintes à l’environnement sans que l’on retienne l’idée de dommages et intérêts punitifs.

On a retenu : en définitive pas grand chose, la Commission du DI a évacué tout aspect punitif pour mettre l’accent sur l’aspect préventif et plus exactement la Commission a introduit dans le droit de la R un régime de police internationale dont l’objectif n’est pas de sanctionner ce qui a été fait mais de contenir ce qui est en

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train de se dérouler.

On peut voir cela de deux façons :- optimiste : prévenir plutôt que de sanctionner par la suite- pessimiste : limitation à la prévention car pas capable en DI d’instaurer une véritable punition. Idée de punition pas incompatible avec l’ordre international, on a connu dans le passé des formes de punition :- l’Allemagne et l’Ottoman après la WWI.

???

1. Obligations d’abstention dont le point commun est qu’elles s’imposent non pas à l’E responsable mais à tous les autres E :

- non reconnaissance de la situation créée par le fait illicite- obligation de non assistance au maintien de cette situationObligations purement défensives. Elles ont été imposées dans 4 affaires jusqu’à aujourd’hui :

Années 70Imposées contre l’Afrique du Sud concernant le régime d’Apartheid et l’occupation illicite du ..

1974A l’égard de la Turquie à la suite de l’invasion du Nord de l’Ile de Chypre

Koweït Irak Avis consultatif du Mur

2. Obligation de coopérer pour mettre fin aux faits illicites

Art 41 du projet de la C : « les E doivent coopérer pour mettre fin par des moyens licites à toute violation grave d’une obligation découlant du jus cogins ».La commission précise que cette obligation relève sans doute d’avantage du développement progressif du droit que de la codification au sens strict. Cette obligation impose un devoir, il faut coopérer pour mettre fin, mais la difficulté = moyens licites. Autrement dit, relativement désarmé.Ex du cas syrien :Les E ne peuvent user de la force, pas licite.Les E peuvent ils prendre des contre mesures ? douteux.Les E peuvent ils décider d’exercer une compétence universelle en décidant que tous leurs tribunaux pourraient se déclarer compétent ? DébatEtats peuvent seulement coopérer pour cesser violation grave, les crimes, interdire les sportifs syriens de participer aux Jeux olympiques.

Invention en 2005 la R de protéger, et NU = droit du Conseil de sécurité des NU d’exercer ces pouvoirs (de sanctions) du chap. 7 en cas de crime international.

Séance 7 – mercredi 21 novembre 2012

SECTION 3. LA MISE EN ŒUVRE DE LA RESPONSABILITÉ INTERNATIONALE Comment la victime, comment les États intéressés à l’engagement de la responsabilité peuvent-ils s’y prendre pour concrétiser cet engagement de la responsabilité ? Il existe trois modes de mise en œuvre.

A) Le recours à une procédure internationale de mise en œuvre Il constitue en droit international l’exception. Il faudra, par convention internationale que les États

concernés aient consenti à cette procédure.

1° Saisine de la juridiction

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On demande à la juridiction de constater objectivement et avec la res medicata (= force de la chose jugée) que l’État a – engagé sa responsabilité – que certaines obligations en découlent.

La saisine repose sur le consentement de l’État responsable, puisqu’en droit international un État ne peut pas être jugé sans son consentement, qu’il peut donner au cas par cas, affaire par affaire, ou il peut le donner pour une catégorie de différends, particulièrement dans un traité multilatéral comme la convention contre le génocide. On peut inclure une clause compromissoire par laquelle les parties au traité acceptent pas avance la compétence d’une juridiction internationale.

Par ailleurs, pour saisir un juge international, il peut être nécessaire au préalable d’épuiser les voies de recours internes, c’est-à-dire de tenter au préalable d’obtenir gain de cause devant le juge interne de l’État responsable.

Cette exigence s’applique lorsque l’État qui porte l’affaire devant le juge exerce la protection diplomatique, c’est-à-dire lorsque c’est un individu qui est victime du fait illicite et que son État de nationalité décide d’endosser sa réclamation.

Dans ce cas, un différend interne va se transformer en différend interétatique. La saisine d’une Cour reste exceptionnelle.

Les mécanismes d’exécution internationaux, en admettant qu’on ait obtenu un jugement international, existe-t-il des procédures internationales qui permettent de faire respecter ce jugement ?

En principe, la réponse est négative. Par convention, les États doivent avoir préalablement mis en place une procédure internationale d’exécution.

Exceptions Ça n’existe que dans trois cas de figure- art. 96 Chartes ONU : si une partie n’exécute pas un arrêt de la CIJ, alors elle peut en référer au Conseil de sécurité des nations-unies, qui peut prendre les sanctions qui s’imposent.

Jamais exécuté car en général les arrêts de la CIJ sont spontanément exécutés par les parties. 2ème raison : lorsque le mécanisme aurait dû être sollicité, l’État responsable était membre permanent du conseil de sécurité et le mécanisme était paralysé. Ex : 1986, Affaire Nicaragua c. USA. - Article 260 du TFUE : la CJUE peut, en cas d’inexécution d’un arrêt en manquement, imposer une astreinte ou une amende forfaitaire. Dans l’affaire C304/02, 12 juil. 2005, Commission c. France, la CJUE a considéré que lorsque l’art. 260 vise l’imposition d’une astreinte ou d’une amende, le « ou » peut signifier « et » -> on peut donner une astreinte ET une amende.- Elle concerne l’OMC. Il est en effet prévu que lorsqu’un État ne respecte pas une décision de l’organe de règlement des différends, qui est le juge de l’OMC, alors le même OR(organe de règlement des différends) peut autoriser l’État plaignant à prendre des contre-mesures (= sanctions) contre l’État responsable sous la forme de suspension de concessions commerciales.

C’est une fausse exception car le mécanisme de l’ORD fonctionne sur la base du consensus négatif, c’est-à-dire que l’État qui demande la sanction obtiendra l’autorisation s’il n’y a pas un consensus contre l’autorisation. Donc si l’État qui demande l’autorisation est pour l’autorisation, elle sera accordée.

Ça a revient à un mécanisme de contre-mesure. Mais on peut plutôt le qualifier de représailles.

B) Le recours aux procédures internes de mise en œuvre

Exécution interne d’une décision internationale. Lorsqu’il existe un jugement international, dans quelle mesure peut-on en obtenir l’exécution dans l’ordre juridique interne de l’État responsable ?

Elle n’est pas possible sans le consentement de l’État concerné qui a le choix des moyens par lesquels en droit interne il peut exécuter ses obligations internationale.

Les jugements internationaux n’ont normalement pas de force exécutoire interne. Par exemple, le 31 mars 2004, les USA ont été condamnés par la CIJ, dans l’affaire AVENA pour violation de la convention de 1963

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sur les relations consulaires qui concernaient cette violation des ressortissants mexicains dont certains droits individuels avaient été violés au cours de procédures pénales. Ces ressortissants mexicains se sont prévalus des jugements de la Cour devant les juges américains, lesquels ont considéré que l’arrêt n’avait pas d’effet direct devant le juge américain.

Le Mexique a ressaisit la CIJ afin qu’elle détermine si son arrêt de 2004 était ou non directement exécutoire en droit américain. CIJ, 19 janv. 2009, la CIJ a considéré que son arrêt de 2004 n’était pas directement exécutoire dans l’ordre juridique interne américain et que les USA avaient les choix des moyens quant à la manière d’exécuter l’arrêt de la Cour.

La force exécutoire n’existe qu’à titre exceptionnelle, lorsqu’elle est prévue par convention internationale, c’est ce que prévoit l’art. 54 de la Convention de 1965 qui créé le CIRDI, qui prévoit que toute sentence arbitrale rendue dans le cadre du CIRDI sera exécuté par les États parties à la convention dans leur ordre interne comme s’il s’agissait d’une décision rendue par leurs propres tribunaux.

Cela signifie que les États acceptent par avance l’effet interne des décisions.

2) La saisine d’une juridiction internecf. S1 §2-B

C) Par défaut, le recours à la justice privée internationaleLorsque ø procédure internationale ou interne d’exécution, alors le seul mécanisme qui reste pour

l’État victime est de se faire justice lui-même à travers le recours aux contre-mesures. Rq : c. mesure = frôle l’illicéité + mise en œuvre de la responsabilité internationale.

Dans la plupart des situations on n’a pas d’autres choix que d’autoriser l’État victime à violer à son tour le droit international.C. mesure ≠ Les mesures de rétorsion : qui sont des réactions intrinsèquement licite au droit international. Ex : on peut décider de boycotter les produits d’un État, ou les jeux olympiques.

Les contre-mesures sont intrinsèquement illicites mais qui bénéficie de circonstances excluant l’illicéité. Il repose sur une auto appréciation par l’État victime du bien-fondé de sa cause. On a besoin de contre-mesures lorsque ø procédure internationale d’exécution. L’usage des contre-mesures, du coup, échappera à tout contrôle de ce fait même.

Pb : pas de juge pour dire qui a raison et qui a tord.De plus ce mécanisme est inégalitaire, car par nature c’est l’arme des forts contre les faibles. Ex : les

USA et le Bénin, le Bénin n’aurait pas de contre-mesures efficaces contre les USA. Ça profite aux États puissants qui ont les moyens de sanctionner les autres. Ce sont les raisons pour lesquelles la commission du droit international a été très hésitante à codifier les contre-mesures.

Elle ne l’a finalement fait, en 1996 et en 2001 que parce qu’elle a constaté que la pratique internationale consacrait ces mécanismes. Mais la Commission a pris soin d’encadrer fortement le recours aux contre-mesures. Cette codification opérée en 2001 a été consacrée par la jurisprudence, notamment dans l’affaire Gabciocoro Nagymaros( ?) de 1997 par la CIJ, les conditions reflétaient le droit international coutumier.

Art. 49 à 54 des articles de 2001.Ils tiennent aux éléments suivants :

La fonction des contre-mesures vise uniquement à contraindre l’État responsable à s’acquitter des obligations qui lui incombent en vertu du droit de la responsabilité. En particulier, l’obligation de cessation et de réparation.

On exclue par principe toute contre-mesure à finalité punitive. L’État responsable doit respecter certaines obligations formelles :

1- il doit préalablement demander à l’État responsable de s’acquitter spontanément de ses obligations2- il faut notifier l’État responsable la décision de prendre des contre-mesures et lui offrir de négocier.

= mécanisme de freinage -> ces obligations visent à baisser le recours aux c. mesures.

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L’État responsable doit se limiter à l’inexécution temporaire d’obligations, parce que les c. mesures = voies d’exécution qui visent à pousser l’État responsable à respecter ses obligations.

Les c. mesures doivent autant que possible être prises de manière qui permette la reprise de l’exécution des obligations en question -> pas de situation définitive.

Ex de c. mesures réversibles : expulsion d’une personne, gel des avoir financiers. Contre-exemple : destructions de biens…

-> C’est l’exigence de proportionnalité.* Les dommages de la c. mesure doivent ê proportionnels aux dommages subis du fait de l’inaction de

l’État responsable.* Les c. mesures doivent prendre fin dès qu’elles ont perdu leur raison d’être.

-> Si l’État s’acquitte de ses obligations-> Si saisine d’une juridiction internationale habilitée à prendre des décisions obligatoires

pour les parties.

∆ ! Il existe certaines obligations qui ne peuvent pas faire l’objet de c. mesure qui ne pourront pas bénéficier du mécanisme d’exclusion de l’illicéité.Exemple : le recours à la force / les obligations qui concernent la protection des droits fondamentaux/ les obligations de caractère humanitaire qui excluent les représailles/ les autres obligations impératives du droit international général / l’inviolabilité des agents, des locaux, des archives et des documents diplomatiques ou consulaires.

Il faut ménager une possibilité de dialogue entre les deux États -> les représentants diplomatiques des deux États doivent pouvoir se parler. Il faut donc protéger leurs représentants des États.

2ème partieLes aspects économiques de la responsabilité internationale

SECTION 1. LES VOIES DE RECOURS OUVERTES DANS LE DOMAINE ÉCONOMIQUE

Juridiction compétentes dans le domaine de la responsabilité des États sont à caractère économique, c’est-à-dire que leur champ de compétence est l’économie internationale.

Cadre régional : on trouve dans les organisations d’intégration économique des juridictions chargées de vérifier que les États membres respectent les libertés de circulation économique, les règles monétaires régionales, les règles en matière de concurrence et d’investissement étranger.

La CJUE est concernée. Le tribunal du MERCOSUR. Les tribunaux arbitraux dans le cadre de l’’ALENA, les cours du Benelux, plusieurs organisations africaines…

Au plan bilatéral, des juridictions ont été constituées pour des réclamations économiques en responsabilité. Très nb exemples au 19ème siècle avec des commissions de réclamation.Ex : tribunal Irano-américain, qui depuis 1983 est chargé de régler le contentieux contractuel qui a résulté de la révolution iranienne de 1979.

Il existe deux grandes juridictions à caractère économique :- dans le cadre de l’OMC, en 1994, l’organe de règlement des différends a été institué. Il est compétent sur les litiges entre les États qui sont parties à l’OMC (et l’UE, qui est membre). Nb considérable de décisions rendues depuis 1994.

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- CIRDI (centre international des différends liés aux investissements). N’est pas à proprement parler un tribunal. Mais c’est un centre dans le cadre duquel pour chaque affaire, un tribunal arbitral va être établi.Depuis les années 1990, des sentences ont un impact très fort sur le droit des investissements étrangers.

Dans le domaine monétaire et financier, il est question depuis plus d’un siècle de mettre un tribunal des faillites internationales qui serait chargé de résoudre les crises d’endettement souverain. La SDN avait proposé la création d’un tribunal des faillites internationales qui n’a pas abouti.

Le FMI a fait une proposition équivalente en 2000, qui n’a pas abouti.

D’autres juridictions dont le champ de compétence n’est pas l’économie en tant que tel mais qui peuvent ponctuellement connaître de contentieux économique en responsabilité. Deux exemples : certaines juridictions de droit de l’homme sont compétentes en matière de droit de propriété. Cas de la CEDH. Ou encore la CIJ peut connaître de contentieux éco, ex. 1999 DIALLO.

Il faut distinguer deux grands types de contentieux : certains sont interétatiques. Ils ont une dimension macro-étatique. Ça implique toute une branche de production. Le contentieux oppose un individu à un État. L’objet de la réparation sera un droit individuel comme l’expropriation illicite. Le contentieux de la responsabilité va épouser certaines formes particulières. dans la quasi totalité de ces cas ce sera un contentieux de l’indemnisation. Seule conséquence de la responsabilité ce sera la réparation. La seule forme de réparation = DI. => conception restrictive de la responsabilité.Contentieux interétatique : autre particularité (du fait de la nature macroéconomique de la réparation) -> dans le cadre de l’OMC, la seule conséquence de l’engagement de la responsabilité = cessation de la violation.

La seule chose qu’on cherche à obtenir, la seule chose qu’on peut obtenir, c’est le retour au respect de l’obligation par l’État responsable. En revanche, toute réparation est exclue, même si on a fermé le territoire à certains produits, même si on a illicitement subventionné des producteurs nationaux, et même si ça a causé des dommages, l’objectif de ce contentieux n’est pas la réparation, l’objectif est le retour au respect de la règle commerciale.

SECTION 2. L’ÉTABLISSEMENT DU FAIT ILLICITE DANS LE DOMAINE ÉCONOMIQUE

Le domaine économique a son propre langage, son propre mode de fonctionnement. Établir la violation du droit international dans ce domaine suppose d’en passer par une expertise économique. Dans le droit de la concurrence on peut attaquer un État ou une entreprise pour abus de position dominante. Si un fabriquant veut produire une poupée de type Barbie, l’entreprise Matel est en position dominante. Quel est le marché pertinent ? Le marché des jouets ?

Il n’y a que les économistes qui peuvent dire quel est le marché pertinent. Dans le contentieux de l’OMC , le dumping est interdit (= fait de vendre à perte à l’étranger // au prix pratiqué sur le marché national). Dans le contentieux des investissements -> Pour savoir si l’investisseur à un intérêt à agir c. l’État responsable, il faut savoir qui est l’investisseur. C’est compliqué si l’investisseur est un actionnaire dans une entreprise.

Dans le contentieux de l’OMC, il faut établir très souvent si un État a manqué son obligation d’ouvrir son marché à tel ou tel produit.

Ça pose un problème institutionnel de savoir quand le juge international se positionne en tant que juge par rapport à cette expertise économique. Quel crédit doit-il donner aux experts ? Dans quelle mesure est-il lié par les expertises économiques ? Et puis, a-t-il la compétence d’apprécier d’un point de vue juridique la signification de ces expertises ? S’il n’a pas cette compétence, n’est-il pas tenu de s’en remettre à un expert qu’il désignerait ?

Pour certaines de ces juridictions économiques, la solution a consisté à créer des juridictions mixtes de composition, au sens où elles sont composées à la fois de juristes et d’économistes.

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Les juges juristes vont considérer qu’ils ont la compétence pour évaluer la portée juridique des expertises économiques qui leur sont soumises. C’est conforme à l’idée que n’importe quelle juridiction a la pouvoir d’apprécier la valeur de tout élément factuel.

La question a été posée à la CIJ dans l’affaire des usines de pâte à papier, tranchée par la Cour le 20 avril 2010. Les parties avaient dit à la Cour : vous devriez nommer un expert pour qu’il tranche la question car vous n’avez pas assez de connaissances pour comprendre les faits (techniques). Réponse de la Cour : toute juridiction a par nature le pouvoir d’examiner la valeur probatoire des éléments soumis par les parties.

SECTION 3. LES CIRCONSTANCES EXCLUANT L’ILLICÉITÉ DANS LE DOMAINE ÉCONOMIQUE

Art. 25 des articles de 2001 : état de nécessité. Au terme du paragraphe 1, l’état de nécessité peut être invoqué comme circonstance excluant l’illicéité à deux conditions :1° Si ce fait constitue pour l’État le seul moyen de protéger un intérêt essentiel contre un péril grave et éminent.2° Si par ailleurs il ne porte pas gravement atteinte à un intérêt essentiel de l’État ou des États à l’égard desquels l’obligation existe ou de la communauté internationale dans son ensemble.

L’état de nécessité de ne peut pas être invoqué dans deux cas de figure :1° Si l’obligation internationale en question (dont on cherche à s’exonérer de la violation) exclue la possibilité d’invoquer la nécessité. 2° Si l’État a contribué à la survenance de la situation.

Jusqu’en 2001, l’état de nécessité n’avait été invoqué sur la scène internationale que de manière très exceptionnelle. Aucun juge international n’avait jamais admis dans une affaire qu’il existait un état de nécessité. Va alors survenir la crise argentine vers 2000 durant laquelle l’état argentin fait face à une grave crise économique qui conduit à abolir la parité monétaire entre sa monnaie et le dollar américain. Ça va entrainer une dépréciation considérable de la valeur des investissements réalisés en Argentine par des investisseurs étrangers avant la crise de 2001.

Réclamation devant le CIRDI pour violation par l’Argentine du traitement qu’elle doit aux investisseurs étrangers, notamment pour expropriation indirecte des ses investissements.

Plus d’une quarantaine d’affaires sont pendantes devant le CIRDI. On a un tribunal arbitral par affaire. Pour ces mêmes décisions, il y a un tribunal arbitral par affaire.

L’Argentine va invoquer à titre de défense d’un état de nécessité du fait de la crise économique. Argument à double tranchant : il est légitime qu’en crise économique, un État puisse subvenir aux besoins de la population. Si on répond à ce genre d’argument, ça veut dire que p. ex. tous les créanciers privés de la Grèce, on va leur dire que leur dette est annulée du fait de la crise alors ils feront faillite.

Derrière la défense de l’Argentine, il faut faire un choix entre des considérations très différentes. Il ne fait pas de doute qu’une crise économique peut constituer une crise internationale constituant un péril grave et imminent. En particulier, en 1992, le Conseil de sécurité des Nations-Unies a décidé que l’instabilité économique pouvait donner naissance à une menace contre la paix et la sécurité internationale. Rapport de 2004 sur les menaces, les défis et les changements.

En 1997, le Conseil de sécurité des Nations-Unies a déployé une opération d’administration internationale de l’Albanie à la suite de l’effondrement économique de ce pays. En 1999, un des rôles de l’administration internationale mise en place par le Conseil de sécurité était de stabiliser économiquement le Kosovo. Est ce que ça suffit pour qu’il y ait un état de nécessité ?

-> sentence arbitrale dans le cadre de la cour permanente d’arbitrage, 11 nov. 1912, dans l’affaire de l’indemnité russe. L’empire OTTOMAN avait plaidé que sa situation économique ne lui permettait pas de s’acquitter d’une dette envers l’État russe. Selon le tribunal, il y a une possibilité de crise économique peut être

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exonératoire de responsabilité, mais avec une définition restrictive de cette possibilité. Selon le tribunal, pour qu’il y ait exonération, l’exécution de l’obligation doit être autodestructive pour l’État.

Tribunal CIRDI : CMS c. argentine 12 mai 2005 : refus d’accepter de l’argument d’état de nécessité. Engagement de la responsabilité de l’Argentine, mais en revanche sur le terrain de la réparation, il va atténuer le montant de la réparation qui est due.L’un des éléments qui a joué à leur jugement a sans toute tenu au fait que le tribunal a jugé difficile de déterminer si les causes de la crise argentine : endogènes ou exogènes ?

Dans cette affaire, le tribunal va estimer qu’en définitive, la crise argentine a principalement trouver sa cause dans les politiques menées par l’état argentin depuis les années 1980, les facteurs externes n’ayant joué qu’un rôle aggravant.Si l’État a contribué à la survenance de la crise internationale, il ne peut pas invoquer l’état de nécessité.On a considéré que pour l’Argentine , c(était endogène.

CIRDI, 3 oct. 2006 ,NGE, va admettre que l’Argentine, en 2001, était menacée d’un effondrement total, qui aurait eu de graves impacts sociaux et politiques, qui d’après le tribunal, aurait équivalu à un cas d’invasion militaire. Le tribunal accepte l’argument de l’état de nécessité et exonère l’Argentine de toute responsabilité à l’égard de NGE.

CIRDI, Affaire ENRON c. Argentine, 22 mai 2007 -> dans cette affaire les deux parties avaient soumises quantité d’analyses économiques au tribunal pour démontrer ou contester la gravité de la crise économique. Il s’agissait bien d’une crise sévère, mais qui cependant n’a pas affecté l’existence même de l’État argentin et son indépendance. CIRDI, SEMPRA c. Argentine, 28 sept. 2007CIRDI, 5 déc. 2008, CCC c. ArgentineLe tribunal constate que la crise éco était sévère, et que la sécurité d’un État peut être atteinte sur le plan économique comme sur le plan politique et militaire, pourtant, on considère pas qu’on a atteint l’état de nécessité.

Le choix a été fait dans la jurisprudence de privilégier plutôt l’intérêt des investisseurs.Théorie économique : il faut pousser au maximum les États à être vertueux au plan économique (= un des moyens d’endiguer la crise). En conséquence, il faut fermer toute échappatoire possible. Il faut éviter toute circonstance exonératoire de responsabilité.

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