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ANNEE 2018
D.U. d’HISTOIRE DE LA MEDECINE FACULTE DE MEDECINE PARIS DESCARTES
DE LA SCROFULE A LA TUBERCULOSE AU SANATORIUM DE LA MUSSE
PRESENTE PAR LE DR. NABIL ASSIS
DIRECTEURS DU MEMOIRE :
PROFESSEUR JEAN NOËL FABIANI et PROFESSEUR PATRICK
BERCHE
COORDINATEUR PEDAGOGIQUE : Monsieur CLAUDE HAREL
1
Sommaire PREAMBULE : ............................................................................................................................................... 2
INTRODUCTION ............................................................................................................................................ 3
HISTORIQUE Des croyances à l’approche scientifique ................................................................................ 4
La scrofule ou "morbo regio", mal royal ...................................................................................................... 6
Girolamo Fracastoro et la « doctrine de la contagion » ............................................................................... 7
Le XIXe siècle et les débats sur la nature de la tuberculose......................................................................... 9
LES TRAITEMENTS ...................................................................................................................................... 13
La tuberculine de Koch et le pneumothorax de Forlanini .......................................................................... 15
Création des sanatoriums : La montagne magique .................................................................................... 17
L’antibiothérapie : La balle magique .......................................................................................................... 22
La vaccination ............................................................................................................................................. 24
LE SANATORIUM D’ARNIERES SUR ITON (EURE) : L’HOPITAL LA MUSSE Le plus grand sanatorium pour
femmes. (Photos 1-6) .................................................................................................................................. 25
LA RECONVERSION : ................................................................................................................................... 28
L’hôpital de la Musse aujourd’hui : ............................................................................................................ 28
LA FIN DES SANATORIUMS ? ...................................................................................................................... 30
CONCLUSION .............................................................................................................................................. 31
ANNEXE ...................................................................................................................................................... 32
Les stations sanitaires françaises (1915-1920) ....................................................................................... 33
QUELQUES TUBERCULEUX CELEBRES : ................................................................................................... 34
Figure I. SEE Germain : De la Phtisie Bacillaire des poumons 1884 ...................................................... 35
Figure II. Répartition Géographique des entrantes (Femmes) Pendant l’année 1935 .......................... 36
Figure III. Répartition Géographique des entrants (Hommes) Pendant l’année 1935 .......................... 37
Figure IV. DECRET DU 16 AVRIL 1969 ..................................................................................................... 38
Figure V. Conversion totale du Sanatorium de La Musse Sis à Evreux le 10 octobre 1972 ................... 40
Figure VI. Modification de la répartition des lits du Sanatorium de La Musse à Evreux le 9 mai 1975 . 40
Photographie 1 : Sanatorium Emile Roux (La Musse) 1935 ................................................................... 41
Photographie 2 : Pavillons des Hommes et des Femmes....................................................................... 42
Photographie 3 : Pavillons du sanatorium la Musse en 1935 ............................................................... 43
Photographie 4 : Chambre particulière et à 3 lits et Galerie de Cure .................................................... 44
Photographie 5 : Réfectoire et salle de Réunion .................................................................................... 45
Photographie 6 : Salle de soin, Rayons U.V, Dentisterie et Salle de Radiographie ................................ 46
BIBLIOGRAPHIE ........................................................................................................................................... 47
RESUME ...................................................................................................................................................... 50
ABSTRACT ................................................................................................................................................... 50
2
PREAMBULE :
L’histoire de la tuberculose semble remonter à celle du genre humain, tandis que l’unité
nosologique et sa cause effective ne sont connues que depuis le 19ème siècle. La pauvreté, les
mauvaises conditions hygiéniques et sanitaires furent les facteurs sous-jacents du tsunami
épidémique qui affecta l'Europe entre les XVIIe et XIXe siècles, au cours duquel le taux de
mortalité a pu atteindre un pour cent. Lors de la révolution industrielle du 19ème siècle, les grandes
villes européennes furent touchées par la contagion à la faveur des flots de paysans venus à la
recherche de travail. Par la suite, la maladie s'est propagée en Europe de l'est, en Asie, en
Afrique et en Amérique du Sud. La tuberculose a ainsi causé plus de décès que toute autre
maladie. Au cours de la seconde moitié du XIXe siècle, la prise en compte de l’origine
infectieuse de la maladie a permis un renversement marqué du taux de décès grâce à
l'amélioration des conditions de logement et de travail, et par l'application de mesures de santé
publique telles que l’isolement des malades dans les sanatoriums. L'histoire de la tuberculose a
subi un virage majeur avec la découverte du bacille par Robert Koch qui lui a valu le prix Nobel
de médecine en 1905.
L’approche thérapeutique est passée des croyances religieuses et des traitements
charlatanesques jusqu’à la cure d’air et de repos dans les sanatoriums, au pneumothorax
thérapeutique et finalement à l’ère de l’antibiothérapie et de la trithérapie (streptomycine, PAS et
isoniazide). Progressivement cette avancée a entrainé la fermeture des sanatoriums et l’abandon
de certaines interventions chirurgicales. Au milieu des années 1960, l’arrivée de la rifampicine et
du pyrazinamide a permis l'introduction de la thérapie de courte durée. Si cette avancée a
entrainé une réduction considérable de la morbidité et de la mortalité au cours du XXe siècle, la
maladie n’a jamais été éradiquée, et la fin des années 1980 a vu une résurgence marquée de la
tuberculose partout dans le monde en raison de plusieurs facteurs : résistance aux antibiotiques,
co-infection avec le VIH, et augmentation des flux migratoires avec des conditions de vie
défavorisées. Ainsi aujourd’hui dans de nombreux états d'Europe occidentale le nombre total
d'étrangers ayant une tuberculose active dépasse le nombre de cas rencontrés dans la population
autochtone. Ce qui n’est pas sans poser la question à nouveau de l’isolement et de la prise en
charge en milieu sanatorial.
3
INTRODUCTION
La tuberculose est une maladie ancestrale qui accompagne l'histoire de l'humanité depuis
ses premiers jours, tandis que l’unité nosologique et sa cause effective n’ont été connues qu’à
partir du XIX siècle. Le mot "tuberculose" dérive des lésions histologiques, appelées
"tubercules", qui apparaissent dans les différents organes touchés par l'infection. Son traitement
est passé des approches charlatanesques, magiques et des croyances religieuses à la cure d’air et
de repos des sanatoriums, au pneumothorax et finalement à l’ère de l’antibiothérapie.
La tuberculose est l'une des plus grandes causes de décès de l'histoire. Bien que son image soit
moins terrifiante que celle de la peste, elle a tué plus de personnes que la « mort noire ». On
estime que la tuberculose est responsable de 20% des décès au 17ème siècle à Londres, de 30%
de ceux du Paris du 19ème siècle et que 1 milliard de personnes dans le monde en sont décédés
au cours des deux derniers siècles. Le caractère dévastateur de la pathologie a fasciné les
écrivains et les poètes, jusqu'à ce qu'ils transmutent ce mythe infernal en maladie romantique.
4
HISTORIQUE Des croyances à l’approche scientifique
La tuberculose est une maladie présente chez les humains depuis le Néolithique. En effet,
des lésions osseuses tuberculeuses typiques de la maladie de Pott ont été retrouvées dans les
squelettes humains datant d'environ 5000 ans avant JC, ainsi que dans les momies égyptiennes
vieilles de 4500 ans, et des références sont faites à la maladie dans le Deutéronome sous le nom
hébreu de schachepheth (1). Cependant, comme pour la variole, cette maladie n'est pas
mentionnée dans les papyrus égyptiens qui nous sont parvenus.
La tuberculose était également connue dans l'Inde ancienne et en Chine, mais aussi dans
l'Amérique précolombienne, comme en témoignent les anciens traités médicaux et les
observations ostéo-archéologiques (2).
Dans la Grèce antique, la "phtisie" (autre nom donné à la maladie et qui signifie en grec
ancien «Consomption») était connue chez Hérodote (5ème siècle av. JC) et dans les écritures
d'Hippocrate (460-377 av. JC), dans le "Corpus" (III siècle av. JC, Ecole d'Alexandrie),
médecine basée sur l’observation, où la maladie était décrite avec une grande précision
clinique. La progression des lésions tuberculeuses, avec la destruction des tissus pulmonaires, est
un processus souvent chronique qui provoquait le dépérissement progressif du patient.
Hippocrate émettait cependant l'hypothèse d'un autre mode de transmission de la phtisie, puisque
son célèbre aphorisme "Un phtisique naît d'un phtisique" allait affirmer durant près de vingt
siècles le caractère héréditaire de la transmission de ce fléau.
Au 4ème siècle av. JC, bien que la maladie ne fût pas encore considérée comme
contagieuse, Isocrate montrait clairement dans une étape de ses écritures que le doute s'insinuait
dans l'esprit des savants de l’époque. C’est ainsi qu’Isocrate faisait dire à un jeune homme dont
le père venait de mourir de phtisie : « Mes amis m’engageaient à me garantir moi-même, en me
disant que la plupart de ceux avaient soigné cette maladie en étaient devenus les victimes » (3).
Parallèlement Aristote reconnaissait la nature contagieuse des écrouelles (adénite tuberculeuse
chronique abcédée), de la scrofule du cochon et du bœuf et croyait à la transmissibilité par
l’haleine.
Cinq siècles plus tard, Galien (131 – 201 après JC.) fut le premier à soupçonner la nature
contagieuse de la maladie; il parlait de l'isolement des phtisiques ("periculosum est consuescere
cum his qui tabe tenentur" : il est dangereux de fréquenter les phtisiques), mais il restait
néanmoins fidèle aux théories hippocratiques de l’hérédité.
5
Parmi les médecins byzantins Alessandro di Tralles, Aezio d'Amida et Paolo di Egina,
décrivaient dans leurs traités seulement les formes pulmonaires et ganglionnaires (scrofules) de
la tuberculose.
Dans le période romaine la maladie est mentionnée par Celso, Arétée de Cappadoce (200
après JC) et Celio Aureliano. En particulier Arétée décrivit l’aspect caractéristique des
tuberculeux : faiblesse générale, peau pâle, pommettes saillantes et empourprées, poitrine mince,
omoplates ailées, minceur du tronc et des membres (4). Mais les auteurs de l'âge classique ne
sont pas parvenus à comprendre que même la scrofule (tuberculose ganglionnaire cervicale), la
maladie de Pott, le lupus tuberculeux, et toutes les manifestations extra pulmonaires de la
maladie, devaient être attribués à un seul et même agent morbide.
Dans le monde arabe, Avicenne (980-1037) a consacré un chapitre entier de son Canon à la
tuberculose pulmonaire. Il décrivait trois stades: pré-inflammatoire, ulcératif et caverneux, et
exprimait l’idée que la tuberculose était une maladie contagieuse. Il fut le premier à décrire les
hémoptysies massives comme risque majeur des stades avancés de la maladie, et pouvant
entraîner la mort (5). Ces descriptions initiales n’ont guère subi de modifications notables
jusqu’au début du XIXe siècle.
6
La scrofule ou "morbo regio", mal royal
La scrofule ou écrouelle, adénopathie cervicale tuberculeuse chronique, est le nom d’une
maladie d’origine tuberculeuse provoquant des fistules purulentes localisées sur les ganglions
lymphatiques cervicaux. Elle affectait en particulier la population infantile. Connue depuis
l'antiquité comme une maladie similaire à la tuberculose pulmonaire, elle a été traitée pendant
des siècles avec le rite de la "Touche" faite par la main du roi. Pour cette raison, la scrofule était
appelé "morbo regio" (mal royal). Cette appellation lui a été assignée par Gilbertus Anglicus qui
avait étudié à Salerne entre 1180 et 1190, abandonnant plus tard les études à Salerne pour suivre
Richard Cœur de Lion dans les croisades. Dans le chapitre "De scrofolis et glandulis" de son
Compendium Medicinae, il décrit "Morbus regius quia reges hunc morbum curant".
Tillemont (Paris, 1849) décrivait ainsi la cérémonie dans la vie de Saint Louis Roi de
France: "Le Roi, après s'être préparé avec des jeûnes et des prières, après avoir approché le
Saint Sacrement et ayant vénéré l'arche de Saint Marcoult à Corbeny pendant trois jours, a reçu
les malades qui ont défilé devant lui. Puis il posa ses doigts sur la glande scrofuleuse et il la
béni avec le signe de la Sainte Croix, prononçant les paroles de Notre-Seigneur: " Le Roi te
touche et Dieu te guérit (6). A partir de 1722 et le sacre de Louis XV à Reims, la formule devient
« Le roi te touche, que Dieu te guérisse» (7). Louis XIV toucha, tout au long de son règne, près
de 200 000 malades. On disait qu'en 1775 Louis XVI, avait touché 2400 malades, le lendemain
de son sacre et qu'en 1824 le dernier des souverains de France, Charles X, pour célébrer son
couronnement, avait touché lui-même 121 malades, sous conseille des deux illustres chirurgiens
Alibert et Dupuytren.
Mais si nous voulions faire une statistique des cas de tuberculose glandulaire sur la base
de nombre de personnes "touchées" par les différents rois de France depuis François Ier (lequel
de 1528-30 a touché 1806 malades), nous n'aurions pas une image représentative de
l'épidémiologie de cette manifestation morbide, parce que la ruée des malades du roi pour se
faire toucher, a été gâtée en excès par le fait que le "toucher" était suivi d’une aumône royale, et
que le diagnostic restait incertain (8). Louis XIV toucha, tout au long de son règne, près de 200
000 malades (9).
7
Girolamo Fracastoro et la « doctrine de la contagion »
Nous devons attendre le seizième siècle pour avoir une définition claire de la tuberculose
en tant que maladie contagieuse. Ce fut Girolamo Fracastoro de Vérone (1478-1553), père de la
"doctrine de la contagion" dans "De contagione et contagiosis morbis" (Venise 1546) qui
s’engagea à cet égard, jetant les bases de l’épidémiologie en plaçant la phtisie parmi les maladies
infectieuses, et postulant l’existence de « seminaria contagionis », micro-organismes infectants
capables de se reproduire et de se multiplier : « Il est bien connu que la phtisie infecte les gens
qui cohabitent avec ceux qui en sont atteints, sans qu’il y ait eu contact direct, les vêtements
portés par un phtisique peuvent encore communiquer le mal au bout de deux ans et l’on peut en
dire autant de la chambre, du lit et du pavement, là où un phtisique est décédé. Force est donc
d’admettre qu’il subsiste des germes de contagion » (10). Franciscus de La Boe (1614-1672),
communément connu sous le nom de Sylvius, en 1671 a décrit les tubercules pulmonaires, les
reconnaissant comme de même nature que les scrofules et attribuait à la tuberculose la
suppuration des tubercules dans le parenchyme pulmonaire, avec la formation des cavernes, « la
phtisie est la scrofule du poumon » dans opera medica, publié à titre posthume en 1679.
La diffusion de cette notion de la contagion a créé la panique parmi les gens qui ont pris à
considérer les scrofuleux et les tuberculeux de la même manière que les lépreux.
En 1699, l’Ufficio dei Conservatori de la cité de Lucques (Italie) décréta, pour la
première fois dans l’histoire, la déclaration obligatoire des personnes de tout sexe et de toute
condition sociale, atteintes ou même suspectes de cette maladie, et à la destruction des objets leur
ayant appartenu et à la destruction de leurs vêtements (11). En 1737, un nouveau décret incitait à
regrouper et isoler les phtisiques dans un local spécial en leur interdisant l'accès à l'hôpital
général.
En 1753, à Florence, une loi a même été promulguée qui a privé ces pauvres de tous
leurs droits. Il ne faut pas oublier qu’en Italie, dès 1621, la municipalité de Padoue intimait aux
brocanteurs juifs l’interdiction d’acheter des objets, linges et vêtements usés ayant appartenu à
des phtisiques décédés, sans en avoir obtenu licence préalable, et cela sous peine d’une amende
de 50 ducats (12). En 1751 et en 1782 deux édits, l’un espagnol (sous Ferdinand VI), l’autre
italien (sous Philippe IV), promulguaient la phtisie comme maladie à déclaration obligatoire,
obligeant à la destruction de la literie et des vêtements, à la désinfection des locaux et à la mise
en place de règles de quarantaine.
8
En 1733 Pierre Desault (1675-1735) médecin de Bordeaux, publia une dissertation sur la
phtisie affirmant que la lésion fondamentale était le tubercule. Il signalait la parenté entre la
phtisie pulmonaire et les formes extra pulmonaire portant sur les ganglions cervicaux. (13)
Pott à la fin du XVIIIe siècle (1779-1782) décrivit la maladie qui a pris son nom, mais
sans en reconnaître l’exacte étiologie. Enfin en 1783, J.-B.-T Baumes (1756-1828) publia le
"Traité de la phtisie pulmonaire", somme de toutes les connaissances sur la tuberculose jusqu'à
lui.
En Angleterre les études sur la tuberculose suscitèrent un intérêt tout particulier aux
XVIIe et XVIIIe siècles en raison des nombreux cas de la maladie présente sur le territoire, avec
des auteurs comme Tomas Willis (1621-1675) et Richard Morton (1637-1689). Celui-ci fut le
premier à rédiger un traité de phtisiologie en 1685, « Phtisiologia, seu exercitationes de Phtisi
tribus libris comprehensae », où il mettait l’accent sur le tubercule, comme vraie cause de la
tuberculose. Benjamin Marten (1690-1751), dans une publication intitulée « New theory of
comsumptions », émettait pour la première fois l’hypothèse que la tuberculose pût être due à
« d’étonnantes créatures vivantes minuscules » qui pourraient « suivre dans nos sucs et nos
vaisseaux ». Marten proposa que la consomption pût être contractée par une personne saine à
partir de l’air rejeté des poumons du patient tuberculeux, surtout en vivant dans une certaine
promiscuité avec lui, par exemple en dormant dans le même lit. (14)
Il ne faut pas oublier les remarquables contributions de Giovanni Battista Morgagni
(1682-1771), avec la publication de son livre à Venise en 1761 « De sedibus et causis morborum
per anatomen indagatis » (Investigations anatomiques sur les causes et les localisations des
maladies) qui a décrit les lésions tuberculeuses en voie de caséification. Il était convaincu du
danger de contamination par les cadavres des phtisiques et évitait d’en faire l’autopsie.
En 1810, Gaspard Laurent Bayle (1774-1816) publiait son ouvrage intitulé « Recherches
sur la Phtisie Pulmonaire », résultat de l'observation minutieuse de neuf cents autopsies,
chacune comparée aux observations cliniques consignées du vivant du malade (15). Son apport
était de considérer les tubercules, non pas comme le résultat, mais comme la cause de la maladie
(16). Il ne réussit pas à englober dans une seule catégorie nosologique les diverses formes qu'il
avait observées. Il distinguait en effet six types de phtisie, dont une seule méritait à ses yeux
d'être considérée comme véritablement tuberculeuse (17).
9
Le XIXe siècle et les débats sur la nature de la tuberculose
Le dix-neuvième siècle fut riche en débats autour de la nature du tubercule et de
l'encadrement nosographique de la tuberculose. Le français René Théophile H. Laennec (1781-
1826), élève de Bayle, affirmait en 1819 l'unicité de la maladie tant sur le plan anatomique que
sur le plan clinique. Il déclara que la matière tuberculeuse était une, aussi bien dans les poumons
que dans les autre sièges et dans la scrofule. Tubercules, cavernes, granulations, infiltrations,
toutes les lésions de la phtisie pulmonaire sont « univoques et originales dans leur essence »,
correspondant à des stades d’évolution de la maladie, elles sont autant de variantes du même
mal, il n’y a pas d’autre différence entre elles « qu’entre un fruit mûr et un fruit vert » (18). En
1819, il distingue cette maladie des autres affections pulmonaires. Laennec reconnaît le caractère
infectieux de la phtisie. Il en décrit la matière grise et semi-transparente qui devient jaune-
opaque et ensuite purulente, mais il en ignore toujours le caractère contagieux (19). A l’opposé,
son adversaire François Broussais (1772-1838) l’attaquait de façon véhémente, considérant que
la phtisie n’était qu’une inflammation, une « phlegmasie chronique du poumon », dans sa
publication « Histoire des phlegmasies ou inflammations chroniques (1808), en deux volumes de
600 pages chacun » et en 1816, il publie son ouvrage « Examen de la doctrine médicale
généralement adoptée et des systèmes modernes de nosologie » , un pamphlet de 475 pages où il
expose ses idées en critiquant sévèrement celles de Laënnec. Il rééditera son ouvrage plusieurs
fois dans sa vie en le complétant (la dernière édition fait 2 600 pages en 4 volumes) (20), mais
Laennec comme son maître Bayle, adhérait encore à la théorie non contagionniste.
En 1825 Pierre Charles Alexandre LOUIS (1787-1872), dans « Recherches anatomo-
pathologiques sur la phtisie », sur la base de 167 autopsies, montrait que les tubercules étaient
vraiment une production spécifique, où l'inflammation n'avait qu'un rôle accessoire. Toutefois
Rudolph Virchow (1821-1902) réfutait la nature spécifique du tubercule et à cause de l’autorité
scientifique qu’il représentait et de sa crédibilité, il retarda l'acceptation de la conception unitaire
de la tuberculose telle qu'elle était énoncée par Laennec. Il se trouvait encore de nombreux
médecins qui croyaient toujours au caractère héréditaire de la maladie, tels que Carl Linnaeus
(1707-1778) botaniste, médecin suédois, qui a également prétendu que la tuberculose pulmonaire
était causée "par un vrai germe invisible de la contagion ". (1740)
Du point de vue diagnostique, on doit à Joseph Léopold Auenbrugger (1722-1809) la
méthode de la percussion thoracique. En effet en 1761 il publiait sa découverte à Vienne dans un
livre intitulé : "Inventum Novum ex percussione thoracis humani ut signo abstrusos interni
pectoris morbos detegendi" qui ouvrait de nouveaux horizons sur la séméiologie physique du
10
thorax (21). Ce fut Jean Nicolas Corvisart (1755-1821) qui fit connaître l’ouvrage
d’Auenbrugger en France par sa traduction du latin en 1808 « Nouvelle méthode pour
reconnaître les maladies internes de la poitrine par la percussion de cette cavité ». Par la suite
Laennec (1781-1826) perfectionna la méthode de la percussion thoracique. Laennec, au début
des années 1800, divise le thorax en quinze régions permettant une définition plus précise des
organes thoraciques et de leurs pathologies. Un pas de plus dans la sémiologie thoracique fut
réalisé par Laennec quand en 1818 il mit au point l’auscultation indirecte à l’aide du
stéthoscope.
La conviction que la tuberculose était une maladie contagieuse suscitait de plus en plus
de conviction. A Naples, en 1782, Domenico Cotugno (1736-1822) promulgua pour cette raison
une loi sanitaire pour la prophylaxie sociale de la maladie, mais deux ans plus tard, le roi
Ferdinand de Naples, rejetant l'idée de la contagiosité de la phtisie, abrogeait certaines des
mesures de précaution préconisées par Cotugno.
En 1839, le médecin allemand, Johann Lukas Schönlein (1793-1864), professeur de
médecine à Zurich, donnait son nom définitif à la tuberculose en faisant de cette affection
jusqu'alors multiforme, une entité clinique unifiée « Systematik de speziellen pathologie und
thérapie » (22)
Il a fallu attendre la seconde moitié du XIXe siècle pour entrer dans la phase
expérimentale de la maladie afin de comprendre tous les aspects étiopathogéniques et
épidémiologiques. Jean Antoine Villemin (1827-1892), médecin à l’hôpital militaire de Val de
Grace à Paris, en fut le pionnier. Le 5 décembre 1865 Villemin présenta à l’Académie de
Médecine une communication sur la Nature et la cause de la tuberculose on s’appuyant sur ses
expériences pratiquées sur les lapins. Ses conclusions étaient que la tuberculose résultait d’un
agent causal spécifique, d’un virus. Cet agent morbide devait se trouver, comme ses congénères,
dans les éléments morbides qu’il a déterminés par son action directe sur les éléments normaux
des tissus affectés (23). Il a inoculé des lapins de laboratoire avec du matériel provenant d'êtres
humains ou de têtes de bétails contaminés (caséum, crachats, pus de ganglion lymphatique), et il
a observé chez l'animal après quelques semaines, des lésions tuberculeuses dues à l’agent
inoculé. Il en déduisit la spécificité et la transmissibilité de la maladie. Villemin publia à Paris en
1868 les conclusions de ses recherches dans un ouvrage intitulé "Etudes sur la tuberculose.
Preuves rationnelles et expérimentales de sa spécificité et de son inoculabilité » (24). Il
démontrait que la « prétendue hérédité » n’était qu’une contagion précoce survenant en milieu
familial : « Aucun virus ne se multiplie par l’organisme mais seulement dans l’organisme, à la
façon des parasites et des ferments. Ces faits s’appliquent entièrement à la tuberculose. Cette
11
affection, comme toutes ses congénères, n’est pas une création spontanée de l’économie. Pour
naître il lui faut un germe qui ne peut lui venir que du dehors » (25). Dans cette publication,
Villemin ajoutait également des considérations de caractère épidémiologique, notant que la
tuberculose était plus fréquente dans les agglomérations urbaines les plus peuplées et démunies
et dans les régions encore vierges, non infectées telles que la Nouvelle Zélande, l’Australie,
l’Océanie, et qu’elle était apparue avec la colonisation européenne en provocant des véritables
désastres, ouvrant ainsi un nouveau chapitre, celui de l'aspect social de la maladie.
Les conclusions expérimentales de Villemin ont également été confirmées par d'autres
chercheurs, comme Edwin Klebs (1834-1913), Jacques-Joseph Grancher (1843-1907) et Auguste
Chauveau, médecin vétérinaire lyonnais, qui en 1868, réussit pleinement l’inoculation à partir de
bovins malades. « Il faut bien, écrit-il, reconnaître à la tuberculose le caractère de la virulence
ou bien nier la virulence elle-même » (25). Mais il restait le problème, jusqu'à présent non résolu,
de l'isolement de l'agent causal non encore identifié, même s'il était intuitif. A la suite des
preuves expérimentales d’Augustin Chauveau sur des bovins, celles de Cohnheim sur des lapins
(1877) et de Tappeiner sur des chiens (1878) validèrent systématiquement la thèse de Villemin.
Néanmoins les découvertes de Villemin furent réfutées par une partie du corps médical
qui refusait d’abandonner le principe de l’hérédité de la tuberculose et du développement de la
maladie chez des individus de constitution faible. Dans les années 1880, alors la contagion était
largement admise par les médecins, la notion d’hérédité de la tuberculose n’était pas totalement
abandonnée et était entendue dans le sens d’« hérédité parasitaire », c’est à dire d’une contagion
précoce de la mère à l’enfant, soit pendant la grossesse, soit lors de l’accouchement ou encore
lors des premiers contacts après la naissance. Le phtisiologue français Georges Küss montrera au
début du XXe siècle la quasi-inexistence de ce phénomène, désavouant ainsi les derniers
partisans de la transmission héréditaire. Si pour les partisans de la transmission héréditaire, la
médecine ne pouvait qu’atténuer les symptômes de la maladie, pour les adeptes de la
contagiosité, au contraire, la prophylaxie et la préservation des individus sains de la contagion
devaient être privilégiées et ouvraient de nouvelles perspectives en matière d’hygiène sociale.
La prise de conscience que la tuberculose était une maladie acquise dépendait aussi des
conditions environnementales médiocres de la population et de la croyance que l'air sel-iodique
de la mer avait des effets bénéfiques sur l'évolution des formes ganglionnaires tuberculeuses
scrofuleuses. Ce qui amena Giuseppe Barellai (1813-1884) à fonder à Viareggio en 1862 le
premier Hospice italien pour enfants scrofuleux « Palazzo delle Muse ».
12
Une étape importante dans la pathogenèse de la maladie fut faite par Jules Parrot (1829-
1883), qui en 1878 déclarait la loi des adénopathies hilaires dans la primo-infection, selon
laquelle chaque fois qu'un ganglion bronchique était l’objet d'une lésion tuberculose, il lui
correspondait une lésion similaire dans le poumon.
En 1912 l'Autrichien Anton Ghon (1866-1936) décrivit le « complexe primaire»,
association d’un nodule pulmonaire et d’une adénopathie médiastinale satellite caractérisant,
inconstamment, sur le cliché de radiographie thoracique une primo-infection tuberculeuse.
Mais ce fut Robert Koch (1843-1910) qui la premier réussit à isoler le bacille
tuberculeux. En utilisant la coloration avec du bleu de méthylène recommandée par Ehrlich, il l'a
identifié, isolé et cultivé dans du sérum animal; enfin il l’a inoculé à des animaux de laboratoire
reproduisant la maladie, obtenant un résultat incontestable. Le 24 mars 1882, Robert Koch
présentait dans une communication « Über Tuberculose » à la Société de Physiologie de Berlin
la découverte du Mycobacterium tuberculosis, le décrivant comme : «mince, dont la longueur est
un demi-quart du diamètre d'un globule rouge, très semblable au bacille de la lèpre, mais plus
pointu» (26). Désormais, écrivait-il, nous n’avons plus affaire, dans la lutte contre le terrible
fléau, à quelque chose de vague et d’indéterminé. Nous sommes en présence d’un parasite
visible tangible. Nous savons que ce parasite ne trouve de conditions d’existence que dans le
corps de l’homme et des animaux [...]. Il en résulte qu’il faut s’attacher avant tout à tarir les
sources d’où dérive l’infection (27). La découverte de M. tuberculosis ouvrait une nouvelle
perspective, celle du programme pasteurien basé sur l'atténuation en laboratoire du germe et sur
la recherche dans le sérum des personnes malades des anticorps et de leur fonction curative.
13
LES TRAITEMENTS
Traitements empiriques
De la Grèce à la Renaissance, les soins comportaient un traitement hygiéno-diététique
lacté (laits d'ânesse et de chèvre), carné et comportant du vin, avec un changement d'air et une
exposition au soleil, des thérapeutiques adjuvantes végétales (balsamiques, astringentes,
diurétiques, opiacées), minérales (soufre ou arsenic) et animales (broyât de poumon de loup ou
de cerf) et la saignée. Hippocrate conseillait le lait cru de vache coupé d’hydromel et assaisonné
d’origan. Celse 30 av JC interdit le vin et tous les plaisirs « Abstinere a vino, balneo, venere ».
Arétée recommandait les séjours à la campagne, l’exposition au soleil « Sol est remedium
maximum ». Gallien prescrivait le lait de femme à la tétée.
Avenzoar 980 apr. J.-C. prescrivait le broyat de poumon de renard, mariné dans le vin,
infusé dans l’eau de rose et dissous dans du sirop de myrtilles. (28)
Durant le Moyen Âge européen, les écrouelles étaient considérées guérissables par le
toucher des rois de France et d'Angleterre, tandis que les chirurgiens et les barbiers incisaient les
abcès. Les médecins de l'école de Salerne conseillaient en revanche l'application d'emplâtres de
bile de porc ou de figues sur les écrouelles. Dans le cas de la phtisie, cependant, les
recommandations des anciens médecins romains étaient toujours appliquées.
Mais il existait aussi une autre médecine, plus appropriée aux besoins, au moins dans la
mesure où la connaissance scientifique du temps le permettait. Dans l’époque médiévale
occidentale, on retrouve la première proposition d'intervention curative de la scrofule par le
chirurgien français Guy de Chauliac (1363), médecin personnel du roi, auteur d'un traité de
chirurgie « Chirurgia Magna » publié en 1363. Il était favorable à l’ablation chirurgicale de la
glande avec une incision en « feuille de myrte ».
Paolo d'Egina (VII siècle) conseillait l'ablation chirurgicale des glandes en prenant soin
de ne pas endommager les vaisseaux ou les nerfs dont la région du cou est riche. Tandis que
l'école de Salerne, qui peut-être n’était pas en mesure d’offrir des interventions chirurgicales
délicates, préférait recommander des traitements locaux à base de bile de porc ou cataplasme de
figue. Le célèbre chirurgien Teodorico da Lucques, de l'école de Bologne (Toscane), était en
faveur de l'ablation chirurgicale des glandes scrofuleuses, mais seulement si suppurées, pour les
traiter ensuite avec du blanc d'œuf, mais il ne recommandait pas l’ablation des glandes non
suppurées en raison de sa dangerosité, à moins d’avoir la main experte.
14
Durant les années 1700 et 1800, la saignée, les sangsues et la purge ont été tour à tour
recommandées (29). Après la Renaissance, s'y ajoutaient l'usage de la digitale, de la ciguë, de
l'ergot de seigle, et, à côté de l'arsenic, celui des sels de mercure, de cuivre, d'or (par Koch)
d'argent, de calcium, etc. L'empirisme de ces méthodes et produits allait de pair avec une
efficacité réduite. On a proposé également l'ingestion de lézards, l'emploi de l'acide salicylique et
de l'acide prussique (cyanhydrique), la vie en atmosphère marine artificielle (Laënnec) à l'aide de
varech et de goémon, le magnétisme, le transfert de médicaments par ionisation, etc. La diversité
de ces propositions reflète l'impuissance de la médecine face à cette maladie. Des thérapies
étranges et dangereuses se sont développées, telles que la consommation de lait de femme
directement à la tétée, ou la prescription de faire coucher les malades avec leurs nourrices ou des
jeunes filles bien fraiches et bien saines. L'effet bénéfique était attribué à une émanation du corps
de ces jeunes filles qui devait s'insinuer par les pores, absorbants le mal dans le corps du malade
épuisé et le ranimer, au détriment de la jeune personne qui dépérissait insensiblement (30).
Le XIXe siècle a vu se développer l'anatomie pathologique, la bactériologie, la
radiologie, et le traitement sanatorial avec une cure diététique et divers médicaments : solutions
de sirop de codéine et de sirop d'éther pour lutter contre la toux qui aggravait les lésions
pulmonaires ; terpine pour l'expectoration ; inhalation d'oxygène contre la dyspnée ; théophylline
contre le spasme bronchique ; frictions à l'alcool, injection d'atropine ou ingestion de 4 à 5 g de
phosphate de calcium contre les frissons de la fièvre. Lorsque cette dernière devenait chronique,
elle était traitée par la phénacétine par voie buccale, les boissons glacées et alcoolisées réputées
hypo-thermisantes, la teinture de cannelle, les extraits de quinquina. La constipation était
soulagée par les lavements, l'huile de ricin, les régimes purgatifs tandis que la diarrhée était
combattue par l'opium et le sous-nitrate de bismuth. Le traitement des hémoptysies mettait en
œuvre le froid (glace sur les poumons, boissons glacées), les dérivés de l'ergot de seigle et là
encore l'opium. La calcithérapie, appliquée jusque dans les années 1950, par voie veineuse puis
per os pendant plusieurs mois, semblait s'appuyer sur des bases empiriques plus que
scientifiques (31).
15
La tuberculine de Koch et le pneumothorax de Forlanini
L'Italien Angiolo Maria Maffucci (anatomopathologiste Italien 1847-1903) a mené de 1886
à 1889, des études sur le bacille tuberculeux découvert par Koch et a observé que les toxines
tuberculeuses (endo et exotoxines) étaient contenues dans le protoplasme des bacilles.
En 1890, Koch croyait avoir trouvé les moyens de prévention de la tuberculose dans les
substances qu'il appelait "tuberculine". Publiant sa base scientifique en 1891, il décidait
finalement de décrire son produit : « Mon nouveau remède contre la tuberculose n’est rien
d’autre qu’un extrait de bacille dans de la glycérine ». Il avait préparé la substance par des
cultures de bouillon de glycérine de six semaines, stérilisées à 100°C, filtrées, évaporées et
employées à une concentration à 1/10ème. Ces cultures pouvaient être injectées chez l’homme
jusqu'à 0,25 ml, ce qui entraînait des réactions inflammatoires au point d’inoculation, une
réaction intense dans le foyer tuberculeux et une réaction fébrile élevée. Mais l’espoir de Koch
que sa tuberculine pourrait déclencher une réponse immunitaire valide fut rapidement déçu. En
fait, l'expérience clinique a montré que son utilisation n'était pas sans danger, susceptible de
provoquer des réactions violentes et même mortelles. Ce qui était également vrai pour la
tuberculine purifiée. Cependant il a été observé que l'injection sous-cutanée de la tuberculine à
une personne en bonne santé ne provoquait aucun type de réaction, alors que si elle était injectée
à un sujet déjà atteint par l'infection, cela provoquait une réaction intense. Schick et Von Pirquet
appelé cette réaction "allergie". La réaction à la tuberculine a ainsi permis de révéler la contagion
même chez les individus qui ne montraient aucun signe de la maladie ou qui paraissaient
cliniquement guéris.
Koch a donc montré, sinon une valeur préventive de l'infection, au moins une valeur
diagnostique élevée pour comprendre que les personnes qui ont présenté cliniquement les
symptômes de la maladie n'étaient que la pointe émergée de l'iceberg. La réaction à la
tuberculine est ainsi devenue le principal outil de la recherche épidémiologique au niveau
vétérinaire et humain et a permis de découvrir que 34% des enfants âgés de 5-6 ans et 91% des
personnes âgées de 13-14 ans présentaient un test positif.
Avec cette découverte dira plus tard en 1884, le phtisiologue Germain Sée (1818-1896)
jusqu’alors partisan invétéré de la transmission héréditaire de la maladie : « A la place d’un mot,
on a aujourd’hui le corps du délit : c’est plus qu’un progrès, c’est une véritable prise sur le fait ;
la spécificité vaguement établie et longtemps mise en discussion, repose maintenant sur des
preuves qu’on peut appeler "vivantes" »(32) et (fig. I)
16
Alors que Koch était occupé par ses recherches, dans le même temps, l'italien Carlo
Forlanini (1847-1918) était engagé sur un autre front, celui de l'intervention thérapeutique chez
le patient tuberculeux avec une technique qui a d'abord semblé paradoxale, celle du
pneumothorax thérapeutique, alors que le pneumothorax spontané avait été vu jusque-là comme
complication de la tuberculose pulmonaire. Les tentatives d'excision chirurgicale de la partie du
poumon malade faites par Giuseppe Ruggi (1844-1925) chirurgien de Bologne, s’étaient avérées
inefficaces. Carlo Forlanini, fils et neveu des médecins, est né à Milan en 1847. Diplômé de
Pavie, il pratiqua d’abord l'ophtalmologie puis la dermatologie. D’abord à Milan puis à Turin, il
poursuivit des recherches dans le domaine des maladies de l'appareil respiratoire. Ce fut à Turin
qu'il réalisa pour la première fois le pneumothorax artificiel, qui fit sa renommée. Carlo Forlanini
proposa le 23 août 1882 le pneumothorax artificiel comme moyen thérapeutique, soit la même
année que celle de la découverte par Koch du bacille pathogène, bien avant l’ère de la radiologie
que Roentgen devait inaugurer en 1895.
L’absence de cet instrument de contrôle qu’est la radiographie pulmonaire était donc un
obstacle à une plus grande visibilité scientifique. Néanmoins, Forlanini exécuta une série
ininterrompue d’interventions sur les animaux avec des injections intra pleurales de différentes
substances liquides et gazeuses, effectuant des investigations anatomopathologiques et
microscopiques sur les lésions pleurales. Parallèlement il réalisa de nombreuses modifications
des instruments pour les rendre parfaits et simples à l’utilisation. Forlanini exposa les résultats de
sa nouvelle méthode de traitement de la tuberculose pulmonaire au Congrès de médecine interne
à Rome en 1894, consistant à provoquer un pneumothorax artificiel par injection d’air dans la
cavité thoracique créant ainsi une rétraction du poumon infecté. A partir de 1906 son élève
Frédéric Dumarest (1870-1951) avait commencé à pratiquer en France cette technique
thérapeutique, qui se répandit rapidement dans tout le pays. Mais ce fut seulement en 1912, lors
du Congrès International de la Tuberculose à Rome qu’il obtint la pleine reconnaissance de sa
méthode par les phtisiologues de l'ensemble du monde.
17
Création des sanatoriums : La montagne magique
Le mot « sanatorium » dérive du verbe latin sanare (soigner, guérir) et fut employé à
partir du VIe siècle dans les textes de Cassiodore (485-580), homme politique, érudit et historien
latin, ancien ministre de Théodore le Grand, sous la forme sanatorius. Oublié pendant des
siècles, le nom fut vraisemblablement réintroduit par les médecins anglais, notamment Georges
Bodington (1799-1882), vers 1842, pour désigner une « station de plein air » à vocation
thérapeutique. A la fin du XIXe siècle, le mot « sanatorium » était couramment utilisé pour
désigner les établissements de soins qui se distinguaient de l’hôpital par une méthode de cure
spécifique, et notamment climatique, en montagne ou à la mer. En France, il s’appliquait plus
particulièrement aux hôpitaux maritimes et, en Suisse et en Allemagne, aux établissements pour
phtisiques. En Allemagne, on distinguait en général les établissements pour malades payants,
pour lesquels était utilité le terme latin Sanatorium, des établissements populaires, désignés par
le terme germanique Volksheilstätte (établissement populaire), Lungenheilstätte ou
Lungenheilanstalt (établissement pour malades pulmonaires), (33).
En 1854, le naturaliste et médecin allemand Hermann Brehmer (1826-1889), guéri d'une
tuberculose après un séjour dans l'Himalaya, publia une dissertation intitulée « La tuberculose
est un mal curable ». Il fonda le premier sanatorium à Gorbersdorf en Silésie, où il commença à
traiter systématiquement les tuberculeux comme on traite aujourd’hui les neurasthéniques, par le
repos physique et moral, l’aération continue et la suralimentation. Il disposait de 300 lits. Grâce à
ses soins minutieux, à sa persévérance, et aussi à la stricte discipline qu’il savait imposer à ses
malades, Brehmer obtint des succès éclatants et montra que, dans la première période de la
tuberculose pulmonaire, très peu de cas étaient réfractaires au traitement, la plupart pouvant être
guéris si on les soignait pendant le temps nécessaire.
Son travail fut poursuivi par l'un de ses patients, son élève, Peter Dettweiler (1837-1904),
qui ouvrit son propre sanatorium à Falkenstein dans le Taunus en 1876; il y développa la
méthode de Brehmer en y ajoutant l’entraînement musculaire graduel et l’endurcissement de la
peau par l’hydrothérapie. En même temps il s’appliquait à rendre impossible toute contamination
des malades entre eux ; à cet effet, il faisait régner dans son établissement une hygiène aussi
raisonnée que minutieuse : pour éviter la dissémination des germes, il généralisait l’usage du
crachoir de poche ; il organisait en même temps la discipline de la toux et donnait à ses malades
la meilleure leçon de prophylaxie en leur imposant l’obligation de mettre la main ou le mouchoir
devant la bouche en toussant, de façon à éviter les projections de mucus bacillifère. Dettweiler au
congrès de Berlin en 1899, résumait ainsi sa méthode de cure :
18
« Nous ne possédons pas encore de traitement étiologique de la tuberculose ; la
supériorité du traitement hygiénique, diététique et physique est aujourd’hui reconnue. Ce
traitement comporte un facteur psychique réalisé par la direction, la surveillance continuelle et
l’éducation du malade. Il comprend comme moyens essentiels la cure de repos, une cure d’air
continuée même pendant la nuit, toutes deux pouvant être réalisées partout, dans tous les pays,
sous tous les climats. Viennent ensuite l’entraînement, l’endurcissement du malade qu’on obtient
par une application rationnelle de l’air libre, de la lumière, de l’hydrothérapie, de la
gymnastique, en particulier de celle des muscles respiratoires [muscles thoraciques et
diaphragme]. Il faut y adjoindre une alimentation rationnelle appropriée à chaque cas, pouvant
aller jusqu’à la suralimentation et l’emploi de l’alcool. L’hygiène du logement, du vêtement, les
mesures contre les crachats, la médication pharmaceutique complète le traitement, qui ne peut
être appliqué rigoureusement que dans des sanatoriums dirigés par un médecin habile » (34).
Un grand nombre d’établissements analogues à ceux de Gœrbersdorf et de Falkenstein
furent créés d’abord en Allemagne, puis en Suisse, en Autriche et enfin en France, c’est-à-dire
dans les climats les plus divers : les uns dans la haute montagne, les autres à une faible altitude,
quelques-uns au milieu des forêts, d’autres à peu de distance de la mer. Quand l’épouse anglaise
du Dr Otto Walther, Hope Bridges Adams, contracta la tuberculose, Dettweiler recommanda au
couple de se rendre dans la Forêt Noire, et ce fut à Nordrach que Walther (1853-1919) la ramena
à la santé. En 1888, il commença à accepter d'autres patients, passant à environ 50 lits. Nordrach
a été considéré par certains comme le meilleur développement du traitement de sanatorium
continental.
En France, le premier sanatorium fut celui de Sainte Marie de Villepinte, achevé en 1881,
sur initiative de l’«Œuvre des jeunes filles poitrinaires» créée en 1878. Un second hôpital de
phtisiques fut achevé 8 ans plus tard (en 1888) à Ormesson-sur-Marne (Val-de-Marne) « premier
hôpital gratuit ouvert en France pour le traitement hygiénique des enfants », uniquement destiné
à soigner de jeunes garçons de 2 à 16 ans, géré par l’«Œuvre des enfants tuberculeux» également
créé en 1888. L’Œuvre fonda en 1894, à Champrosay (Essonne), un second établissement, le
sanatorium Minoret, qui disposait de 100 lits ouverts aux enfants et aux jeunes filles ; puis un
troisième, le sanatorium Alice Fagniez, ouvert à Hyères (Var) en 1895 (35).
Le sanatorium du Canigou, établissement fondé en 1890 par le médecin Charles Sabourin
(1849-1920) dans la station de Vernet-les-Bains (Pyrénées-Orientales), fut pendant presque une
décennie le seul établissement français accessible aux tuberculeux pulmonaires adultes ; encore
s’agissait-il d’un sanatorium payant.
19
Frédéric Dumarest (1870-1951), ouvrit le 23 août 1900 le Sanatorium Félix Mangini à
Hauteville (Ain) , sous l’égide de « L'œuvre Lyonnaise des Tuberculeux Indigents », premier
sanatorium populaire d’altitude en France réservé aux indigents, sans inauguration, en effet le
Président de la république LOUBET qui devait l’inaugurer manquait de temps, tandis que le
centre Nestor Pirotte, premier Sanatorium de l'Assistance Publique, voyait le jour à Angicourt
cette même année, puis le sanatorium de Bligny le 8 août 1903, construit en Seine-et-Oise, par
l’œuvre des sanatoriums populaires de Paris, il accueille cent vingt-cinq malades.
La vie au sanatorium ne ressemblait pas du tout à celle de l’hôpital : les malades, levés
dès le matin, passaient une partie de leur journée à se reposer dans les galeries de cure ou même
en plein air quand le temps le permettait ; ils faisaient des promenades graduées selon leurs
forces ; les plus vigoureux, réunis par groupes, se livraient à quelques travaux peu fatigants et
des heures de récréation étaient réservées dans les salles de jeux. Les repas étaient pris en
commun au réfectoire. La discipline intérieure était très stricte : un malade qui crachait ailleurs
que dans son crachoir de poche ou qui n’exécutait pas à la lettre les prescriptions du médecin,
était impitoyablement renvoyé. Chaque malade était obligé de faire lui-même son lit et de
brosser ses effets. La surveillance était confiée à des chefs de groupe, choisis parmi les
pensionnaires, avec pour mission de participer aux soins de propreté. Sauf exception, les visites
étaient interdites et les familles étaient invitées à écrire le moins possible, car on avait observé
que ces lettres avaient toujours un effet déprimant sur les malades, qu’elles portaient à s’attendrir
sur leur état. La préoccupation constante du médecin-directeur était, au contraire, de relever leur
moral, de leur montrer la guérison prochaine comme prix de leurs efforts et de leur volonté (36).
Comme dans les sanatoriums et les stations sanitaires, le règlement intérieur s’apparentait
à une longue liste d’interdits (37) :
« Pendant les heures de cure et de repos obligatoire, fixées par l’horaire journalier :
1°Les malades doivent être constamment étendus sur leurs chaises longues respectives;
2° Les chaussons et espadrilles sont de rigueur, à l’exclusion de toute autre chaussure ;
3° Les jeux sont interdits;
4° Les chants, les cris, les rires bruyants qui troublent le repos général sont interdits; les
conversations mêmes doivent être très modérées, la parole provoquant la toux; après les repas
principaux le silence est de rigueur;
5° Les malades ne doivent pas changer de place sans autorisation ;
20
6° Les chaises longues ne doivent être ni traînées, ni déplacées, ni renversées et ne
doivent servir qu’à la cure de repos;
7° L’usage de l’encre est prohibé sur les galeries;
8° Il est interdit de fumer ».
Dans les sanatoriums mixtes les horaires des pavillons des femmes sont décalés de
manière à ce que les promenades des hommes coïncident avec les séances de cure de repos chez
les femmes et vice-versa. Cette disposition était prise afin de réduire le plus possible les chances
de rencontre entre hommes et femmes, déjà séparés par un grillage dans le parc de deux mètres
de haut dont le règlement interdisait de s’approcher à moins de vingt-cinq mètres.
Cette séparation absolue était voulue afin de préserver le repos complet, le calme et la régularité
de la vie sanatoriale. L’idée ne vint jamais de réunir un jour, pour quelque motif que ce soit,
l’ensemble des pensionnaires des sanatoriums des deux sexes. Alors que certains pensaient avec
erreur que les tuberculeux présentaient une exaspération de la libido, Louis Guinard (directeur de
1903 au 1933) répétait toujours qu’il ne croyait pas à la fable disant que les tuberculeux étaient «
des embrasés ». Néanmoins, il prônait la séparation rigoureuse des sexes : L’existence
journalière du malade doit être soumise à une grande régularité, dans le plus grand calme et toute
préoccupation autre que celle de se soigner est un inconvénient, parfois un danger. L’article 8 du
décret du 10 août 1920 a d’ailleurs consacré ce principe sur la séparation des sexes dans les
sanatoriums. Le docteur Dumarest (Hauteville) partageait la même opinion (38).
Les résultats acquis alors se révélèrent très satisfaisants : plus des deux tiers des malades,
après trois mois de séjour au sanatorium présentaient toutes les apparences d’une guérison
complète et étaient en état de reprendre leur travail. Parmi ceux qui étaient soignés depuis plus
de trois ans, un quart à peine voyaient leur mal reparaître (39). Le sanatorium se révélait être un
lieu de soins certainement par le réconfort et la tranquillité d'esprit apportés à de nombreux
malades.
En 1907, le British Journal of Tuberculosis, l'antécédent de la Médecine Respiratoire, a
publié son premier numéro avec un éditorial, vraisemblablement écrit par l'éditeur, TM Kelynack
« ...Les manies et les fantaisies ont rassemblé ce qu'on appelle le traitement «en plein air», et
des prétentions impossibles ont été faites par des enthousiastes inexpérimentés quant à
l'efficacité presque miraculeuse de la résidence du sanatorium. Malgré toutes les exagérations et
21
les échecs, il ne fait aucun doute que le maintien d'un mode de vie strictement hygiénique offre à
la science médicale moderne les meilleurs moyens de traiter efficacement la tuberculose » (40).
En France, la loi Honnorat du 7 Septembre 1919, faisant suite à la loi Léon Bourgeois du
15 avril 1916 qui instituait des dispensaires d'hygiène sociale, imposa la création d'un sanatorium
par département (41). La mission Rockefeller, financée par la fondation du même nom, s’assigna
pour objectif en 1917 de stimuler cet effort public avant de passer la main au Comité national de
Défense contre la Tuberculose (CNDT) créé en 1er janvier 1923 (42).
Cependant on peut dire que le nombre d'établissements était resté limité jusqu'en 1918.
Ce fut en 1932 qu’on assista à l’ouverture des plus grands sanatoriums départementaux jamais
construits en France : les sanatoriums d’Helfaut (Pas-de-Calais, 500 lits), Paul-Doumer (Oise,
338 lits), Franconville (Val-d’Oise, nouvelle aile de 210 lits), ouverture des premiers pavillons
du sanatorium de la Musse (Eure, 830 lits), achèvement du sanatorium de Villiers-sur-Marne
(Aisne, 730 lits), hôpital-sanatorium Laënnec de Dreux (Eure-et-Loir, 400 lits), Parigné-Lévêque
(Sarthe, 240 lits), Cauneille (Landes, 120 lits), etc. L’année 1933 fut également importante avec
l’ouverture des sanatoriums du Rhône (646 lits) et des étudiants (140 lits) à Saint-Hilaire-du-
Touvet (Isère), d’Aincourt (Val-d’Oise, 500 lits), de Bodiffé (Côtes-d’Armor, 200 lits), de la cité
sanitaire de Clairvivre (Dordogne, 500 lits), des sanatoriums Etienne Clémentel (Puy-de-Dôme,
210 lits), du Perron (Rhône, 300 lits), Marie Mercier (Allier, 100 lits), etc. En 1939, on comptait
230 sanatoriums, dont 189 pour le traitement de la tuberculose pulmonaire regroupant 41300 lits.
Une petite moitié de ces établissements dépendait de l'Assistance Publique, les autres l'étant
d'œuvres privées.
22
L’antibiothérapie : La balle magique
La découverte de la pénicilline et des sulfamides a déclenché une multitude d'enquêtes,
non seulement pour voir quelles maladies guérissaient ces balles magiques, mais aussi pour
rechercher de nouvelles balles magiques. Cependant, aucun médicament miracle n'était efficace
contre M. tuberculosis. Depuis 1914, Selman Waksman dépistait des bactéries et des
champignons pour des composés antibiotiques. En 1939, il découvrit que les champignons
Actinomycètes avaient un effet inhibiteur marqué sur la croissance bactérienne. L'actinomycine a
été isolée en 1940 et se révéla efficace contre la tuberculose in vitro, mais trop toxique pour
l'homme ou l'animal. La streptomycine, isolée à partir de Streptomyces griseus, fut la solution
miracle que les chercheurs recherchaient depuis longtemps. Elle combinait une faible toxicité et
un effet inhibiteur élevé et, le 20 novembre 1944, le premier patient tuberculeux gravement
malade fut traité avec des résultats spectaculairement gratifiants. Le bacille de Koch semble
vaincu.
Cependant les complications liées au traitement, notamment sur l’appareil auditif, et le
développement de souches résistantes, nécessitaient de poursuivre les recherches et d’associer
les produits. C’est ainsi que se succédaient les découvertes de l’acide paraminosalicylique
(P.A.S) par Lehman en 1945, la Néomycine en 1949 par Waksman, la Viomycine en 1951, le
Pyrazinamide par Kushner en 1952, la Cyclosérine par Harned et Kropp en 1955, l’Ethionamide
par Liberman et Moyeux en 1956, la Kanamycine en 1957 par Kumazawa et Yagisawa,
l’Ethambutol par Wilkinson en 1961, la Capréomycine en 1962, la Prothionamide par
Grumbach, Rist et Brouet en 1963.
Mais après la streptomycine, les deux autres révolutions majeures de l’antibiothérapie
antituberculeuse furent la découverte d’une part de l’isoniazide par Bernstein et Robizek en
1952, puis de la Rifampicine par Maggi, Sensi, Furesz et Nitti en 1966.
La polychimiothérapie aurait dû marquer la fin de l'histoire. Dans la seconde moitié du
XXe siècle, les taux d'infection tuberculeuse ont chuté dans le monde développé. En 1987, le
Conseil consultatif pour l'élimination de la tuberculose de l'American Medical Association
prévoyait qu'en 2010, la maladie disparaîtrait dans le monde entier, comme l'un des autres grands
fléaux de l'humanité, la variole. Pourtant, les signes avant-coureurs d’une évolution contraire
étaient déjà là. En 1985, pour la première fois, le nombre de nouveaux cas de tuberculose ont
commencé à augmenter. L'Organisation mondiale de la santé appelle maintenant la tuberculose
un «feu qui fait rage» dans les pays en développement, parmi les pauvres, dans les prisons et
23
chez les personnes vivant avec le VIH. Dans le monde entier, une personne est infectée par la
tuberculose chaque seconde. Qu'est-il arrivé?
Le schéma multi drogue qui a été développé peu de temps après la découverte de la
streptomycine (1943) était efficace s'il était pris continuellement, à doses régulières, pendant 6-8
mois, et c'est là que résidait le problème. Pour diverses raisons, de nombreux patients n’étaient
pas observants. Certains arrêtaient le traitement quand ils se sentaient mieux, d'autres s'arrêtaient
à cause du coût, ou des effets indésirables ou parce qu'ils ne s’accommodaient pas de
l'établissement médical. Puis s’est développé le phénomène classique de résistance aux
antibiotiques. On estime que plus de la moitié des isolats provenant de cas de tuberculose
récidivante sont résistants à au moins un médicament. Il faut en moyenne trois ans pour
développer un nouvel antibiotique; il faut trois mois pour développer un germe résistant.
Particulièrement troublant est le fait que la tuberculose et le VIH ont formé une nouvelle
combinaison mortelle. Chez les personnes immunodéprimées, M. tuberculosis est beaucoup plus
susceptible de causer une infection, créant un plus grand nombre de cas de tuberculose active et
plus de personnes qui propagent la maladie. L'OMS estime que le VIH produit chaque année 1,4
million de cas de tuberculose qui, autrement, n'apparaîtraient pas. En outre, l'augmentation de
l'immigration du monde en développement vers les pays développés, combinée à la pauvreté
existante dans de nombreuses régions où les nouveaux immigrants ont tendance à s'établir,
constitue un réservoir de tuberculose. Pour le VIH et la tuberculose, les erreurs de diagnostic et
la non-conformité compliquent le problème.
Pour ajouter l'insulte à la blessure, M. bovis est de retour et provoque la tuberculose chez
les humains, en particulier ceux qui sont séropositifs. Et M. bovis aussi développe une multi
résistance aux médicaments. Les souches de M. bovis vues avec le VIH sont souvent résistantes
à de nombreux médicaments, de sorte que les souches qui se propagent sont beaucoup plus
difficiles à traiter.
24
La vaccination
La mise au point du vaccin antituberculeux par Albert Calmette (1863-1933) et Camille
Guérin (1872-1961) en ensemençant une souche bovine virulente sur une pomme de terre
imprégnée de bile de bœuf, n'altérait aucun des caractères principaux du bacille sauf son pouvoir
pathogène. La première vaccination eut lieu le 18 juillet 1921, à la crèche de la maternité de
l’hôpital de la Charité à Paris. Ce jour-là, deux pédiatres, Benjamin Weil-Hallé et Raymond
Turpin, vaccinèrent un nouveau-né dont la mère était morte de tuberculose quelques heures après
l’accouchement et dont la grand-mère était elle aussi tuberculeuse. Ce fut un succès. À la suite
de cette première vaccination, 121 nourrissons recevront par voie buccale, au cours des 10
premiers jours de la vie, 3 doses successives (10 mg chacune) à 48 heures d’intervalle, sans
aucun effet indésirable (43). L'efficacité de la vaccination s'affirme cependant malgré le drame
de Lubeck en mai 1930 où sont morts 71 enfants sur 252 après la vaccination à cause d’une
erreur de manipulation. Elle devient obligatoire en France par la loi du 5 janvier 1950, complétée
par le décret du 5 mai 1964.
25
LE SANATORIUM D’ARNIERES SUR ITON (EURE) : L’HOPITAL LA MUSSE Le plus grand sanatorium pour femmes. (Photos 1-6)
La Musse appartient à une fondation « LA RENAISSANCE SANITAIRE » créé en 1928
par Almire BRETEAU entre autre député de 1924 à 1927 où il siégeait à la Commission de
l’Hygiène. Marqué par la perte de deux de ses enfants atteints de la tuberculose, il se battit pour
une action massive des pouvoirs publics en faveur de la santé populaire. Il s’engagea
personnellement, orientant ses efforts vers la création de sanatoriums dont l’insuffisance faisait
cruellement défaut. Le 2 mars 1928 la Renaissance Sanitaire était déclarée comme association à
but non lucratif et fut reconnue d’utilité publique le 8 juillet 1928.
La Renaissance Sanitaire, association privée reconnue d’utilité publique, fit usage de ce
dispositif dans ses deux grands sanatoriums de Villiers-sur-Marne (Aisne, 1930) et de la Musse
(Eure, 1932) lesquels, avec respectivement 730 et 830 lits, était alors les plus grands de France à
destination des malades des départements parisiens (Seine, Seine-et-Oise, Seine-et-Marne).
Construit par les architectes Faviers, Bardin et Thiers, le sanatorium de Villiers-sur-Marne
comprenait trois grands pavillons (hommes, femmes, enfants) de 200 lits composés chacun de
deux ailes d’hospitalisation encadrant une aile de cure, disposition proche de celle du sanatorium
Despeaux-Rubod à Bligny (1903) mais strictement rectiligne. Les services généraux sont
reportés à l’arrière dans une aile transversale. Un quatrième pavillon d'une centaine de lits fut
ajouté en 1930 pour la mise en observation des malades avant leur répartition dans les différents
services de l'établissement. Ce premier établissement à peine achevé, l’association décida de le
réserver aux seuls hommes et de créer un second sanatorium, plus vaste encore, réservé aux
femmes. Ce second sanatorium fut construit à partir de 1930 à Arnières-sur-Iton (Eure) par les
mêmes architectes et selon un plan très similaire.
Le domaine de La Musse est situé sur 2 communes Saint Sébastien de Morsent et
Arnières sur Iton. Il s’étend sur 54 hectares. Il s’agit d’un ancien domaine de chasse appartenant
à la Monsieur Martin, oncle de Thérèse Martin, la Ste Thérèse de Lisieux. Le domaine doit son
nom à un terme de chasse, « se musser » ou se mucher », c’est à dire se cacher pour les
animaux.
La Fondation fait construire ce qui devait être le plus grand sanatorium pour femmes (830
lits). La première malade entre le 3 novembre 1932 avait 27 ans et elle s’appelait Fernande M.,
couturière. Parallèlement la Fondation ouvrait le sanatorium de Villiers Saint Denis (Aisne)
réservé aux hommes. La structure de l’hôpital est pavillonnaire, comportant quatre pavillons
construits sur le même modèle. La conception des pavillons est la suivante :
26
- Des chambres toutes orientées vers le sud.
- Une partie centrale comportant des galeries de cure avec des chaises longues alignées côte à
côte pour les plages de repos.
- Une grande salle à manger commune.
La demande pour le traitement des femmes s’avérant bien inférieure à celle concernant
les hommes, un pavillon de 200 lits est reconverti en 1934 pour recevoir des hommes et en 1939
ce sont trois pavillons qui accueillent des hommes, un seul étant réservé aux femmes.
L’origine des patients était multiple : région parisienne, provinces, mais aussi d’Afrique
du nord. Les patients étaient accueillis pour une « CURE SANATORIALE » dont le principe
était « du grand air, du repos et de la nourriture ». Le programme de la journée était
minutieusement établi et le personnel veillait à le faire respecter avec rigueur (44) :
7 h : lever, toilette, petit déjeuner et soit promenade soit distraction à l’intérieur
9h30 - 11h00 : première plage de repos puis déjeuner
13h30 - 15h30 : deuxième plage de repos
15h30 - 16h30 : temps libre
16h30 : goûter
17h - 18h30 : troisième plage de repos
19h00 : diner et après un court entracte, extinction des feux.
Les plages de repos se déroulaient dans les galeries prévues à cet effet, dans les pavillons
eux-mêmes, orientées au Sud de sorte à bénéficier du maximum d’ensoleillement et équipées de
chaises longues et de couvertures. Il est servi quatre repas par jour aux malades :
Petit déjeuner : café au lait, pain et beurre
Déjeuner : potage, entrée, viande, légumes, fromage ou dessert
Goûter : thé au lait, pain et chocolat
Dîner : potage, viande, légumes et dessert
Après 8 ans de fonctionnement survint la seconde guerre mondiale. La Musse dut être
évacuée le 6 juin 1940 après le bombardement d’Evreux. Mais à la mi-juillet l’établissement
rouvrait ses portes et accueillit 300 malades. En janvier 1941 la Préfecture réquisitionna un
pavillon pour l’armée Allemande. En mars 1944 la totalité de La Musse fut réquisitionnée. Les
allemands abandonnèrent l’établissement qui fut rouvert dans un état piteux le 27 novembre
27
1944 pour être de nouveau réquisitionné au début de 1945 par l’armée américaine. Ce ne fut
qu’en 1947 que la Fondation récupéra la totalité de l’établissement mais dans un état de
délabrement important avec une estimation de travaux à réaliser évaluée (en euros) à 2.7
millions. Ces travaux ne débuteront qu’en 1953.
En même temps, la chirurgie thoracique se développait, la vieille et mutilante
thoracoplastie faisait place à la chirurgie d’exérèse. Un bloc opératoire est crée à la Musse,
inauguré en 1956 par le président Mendes France. Les interventions sont assurées par des
chirurgiens venant de Paris avec leurs équipes, tels que le Pr Lebrigand. Mais le fonctionnement
sera de courte durée, sur quelques années en raison de la diminution des indications
chirurgicales avec l’arrivée des antibiotiques antituberculeux majeurs, d’abord le Rimifon puis la
Rifampicine. Pour la même raison, dès 1960, grâce à l’antibiothérapie les indications de séjour
en sanatorium devenaient moins fréquentes et à partir de 1962 l’établissement dut élargir son
recrutement dans la prise en charge de patients de pneumologie générale (BPCO, Asthme,
insuffisance respiratoire, cancer du poumon et toute affection pulmonaire). (45)
Les conséquences psychologiques et sociales après les mois voir les années de séjour en
sanatorium étaient loin d’être négligeables. En plus du retentissement psychique de la maladie et
de son image négative, le rythme de vie très ralenti imposé aux patients tout au long de leur
séjour les rendait difficilement récupérables sur le plan social. L’hospitalisation prolongée
associée à la vision de la maladie tuberculeuse et de ses séquelles en faisait des handicapés
incapables de se réinsérer. Ainsi se développa une reconversion sur place, formant le personnel
soignant à partir des malades qui avaient acquis toute l’expérience nécessaire. Les étudiants en
médecine devenaient phtisiologues, les malades restaient comme aides-soignants et infirmiers.
Une possibilité de vie et de carrière et vie se faisait jour sur place et il se développa un système
de vie en quasi autarcie (tous corps de métier présents, magasin d’alimentation, station
service…).
28
LA RECONVERSION :
La diminution du taux de tuberculose et de la chirurgie liée à la maladie imposa une
nécessaire reconversion de l’établissement. Le Décret du 16 Avril 1969 (Figure IV) autorisait les
sanatoriums à recevoir des patients autres que tuberculeux. La Musse étendit alors ses
compétences à la prise en charge des pathologies cardiaques à partir de la fin des années 60, puis
de diverses spécialités : diabétologie, neurologie, oncologie, gériatrie… L’expérience en
kinésithérapie et en réadaptation et malheureusement les nombreux accidentés de la route ont vu
ainsi déboucher la création de la rééducation fonctionnelle motrice dernière étape de la
conversion dans les années 70. Cette reconversion a nécessité la modernisation des pavillons, des
plateaux techniques, mais aussi le recrutement de personnel qualifié et spécialisé. La conversion
de l’établissement a été reconnue officiellement dans l’arrêté ministériel du 19 mai 1975 (Figures
V-VI).
L’hôpital de la Musse aujourd’hui :
Reconnue d’utilité publique par décret du 8 juillet 1928 et selon ses statuts approuvés par
arrêté du 6 novembre 2000, la Fondation La Renaissance Sanitaire avait pour mission : « La lutte
contre la tuberculose, la prévention et le traitement de toute pathologie médicale notamment par
l'acquisition, la construction, la gestion, l'administration de sanatoriums, de préventoriums et de
tous établissements de santé à but non lucratif participant ou non au service public hospitalier ».
Ses missions (décret n° 2008-376 du 17 avril 2008)
• La limitation des handicaps physiques
• La restauration somatique et psychologique
• L’éducation de son patient et de son entourage
• La poursuite et le suivi des soins et du traitement
• La préparation de la sortie et la réinsertion
Son action s'étend à l'exercice de toute activité au caractère préventif ou curatif
complémentaire ou accessoire, à des actes ou pratiques thérapeutiques et à toute contribution à
l'amélioration de la distribution des soins, au progrès, à la vulgarisation des techniques
médicales.
29
Mais depuis les débuts de la reconversion, à aucun moment le recrutement de tuberculeux
n'a atteint le zéro. Bien qu’en sensible diminution, il persistait un noyau d’une cinquantaine de
malades tuberculeux jusque dans les années 90.
30
LA FIN DES SANATORIUMS ?
Leurs dimensions, leur situation géographique et bientôt leur vétusté, tout concourut à
l'abandon de ces structures. Il est heureux que certains aient pu être reconvertis en structures de
moyen séjour (Lay-saint-Christophe) ou en instituts de rééducation (Saint-Hilaire-du-Touvet).
D’autres grands sanatoriums en France ont dû fermer leurs portes et être laissés à l’abandon tel
que le sanatorium Simone Weber (Lorraine), Eugène Aram (Aquitaine), Michel Peiry
(Languedoc), Mary Bell (Bourgogne), Julia Fazekas (Côte d’Azur), Inez Palmer (Val d’Oise),
Sanatorium de Dreux, Nestor Pirotte (Picardie),
Est-ce une bonne politique que d’abandonner ces établissements cinquante ans après la
Loi Honorat de 1919 ? La tuberculose est loin d’être éradiquée : formes résistantes, association à
d’autres pathologies chroniques (HIV), arrivés de migrants contaminées, logés dans des centres
surpeuplés insalubres et fermés, la population carcérale, l’augmentation de la pauvreté en France,
tous facteurs entretenant la maladie et faisant de la tuberculose un problème de santé non résolu.
Les patients tuberculeux sont maintenant hospitalisés principalement dans les services de
maladies infectieuses qui ne peuvent présenter les conditions favorables de prise en charge
offertes par les anciennes installations de sanatorium. La tuberculose est l’une des 10 premières
causes de mortalité dans le monde. En 2016, 10,4 millions de personnes ont contracté cette
maladie et 1,7 million en sont mortes (dont 0,4 million ayant aussi le VIH). Plus de 95% des
décès dus à la tuberculose surviennent dans les pays à revenu faible ou intermédiaire. Sept pays
totalisent 64% des cas, avec l’Inde en tête, suivie de l’Indonésie, de la Chine, des Philippines, du
Nigéria, du Pakistan et de l’Afrique du Sud. En 2016, on estime que 1 million d’enfants ont
développé la tuberculose et 250 000 en sont morts (à l’exclusion de ceux ayant le VIH). La
tuberculose est le premier facteur de mortalité chez personnes VIH-positives: en 2016, 40% des
décès de séropositifs ont été dus à la tuberculose. La tuberculose multi résistante demeure une
crise de santé publique et une menace pour la sécurité sanitaire. L’OMS estime à 600 000 le
nombre de nouveaux cas présentant une résistance à la rifampicine – le médicament de première
intention le plus efficace – dont 490 000 sont des cas de tuberculose multi résistante. On estime
que le diagnostic et le traitement de la tuberculose ont permis de sauver 53 millions de vies entre
2000 et 2016.
Mettre un terme à l’épidémie de tuberculose d’ici à 2030 fait partie des objectifs de
l’Organisation Mondiale de la Santé adoptés en 2015 (46).
31
CONCLUSION
La tuberculose est historiquement une des principales maladies infectieuses et
contagieuses, due à des bactéries appartenant au genre Mycobactérium. Elle a sévi de deux
manières : sous forme endémique et sous forme d'épidémies meurtrières. La régression de la
tuberculose est assez régulière depuis 1950 suite aux gros efforts de recherche entre 1945 et
1970. Le succès de l'antibiothérapie a conduit par la suite à l'abandon quasi total de ces
recherches. Actuellement, on se trouve placé malheureusement, devant un fardeau énorme
consécutif à des années de négligence, à l'existence d'une interaction entre infection VIH et
tuberculose et à l'émergence de souches de bacilles tuberculeux multi-résistants. Tout ceci se
combine pour faire de la tuberculose l'une des toutes premières priorités d'action et de
recherche en matière de santé internationale.
Dr Nabil Assis – Juillet 2018
32
ANNEXE
33
Les stations sanitaires françaises (1915-1920) (En majuscules les établissements qui accueillaient avant la guerre des tuberculeux, en gras ceux construits ex nihilo ou
constitués principalement par des extensions, avec astérisque ceux qui conserveront après la guerre une affectation sanatoriale) 47
Département-Lieu Nombre de lits ouverture Usage avant la guerre Usage après la guerre
01) BELLECOMBE * 34 1918 Sanatorium (1909) sanatorium départemental
03) Le Montet * 150 ? - sanatorium départemental
06) Menton (établ ; russe) 67 mars 1916 ? ?
06) Menton (Les Rosiers) 45 mars 1917 ? ?
12) Engayresque * 80 1918 ? sanatorium départemental
15) Le Begut 100 août 1916 ? Incendié en 1919
17) Montlieu 62 mai 1916 séminaire désaffectée après la guerre
19) Boulou les Roses * 1918 château école de rééducation (1920-26) sanatorium départemental (1927)
24) Vanxains 25 janvier 1916 ? désaffectée après la guerre
24) La Meynardie * 100 février 1917 château sanatorium départemental
25) Villeneuve d’Amont * 80 1918 colonie de vacances sanatorium privé agrée
26) Porte les Valence 80 juin 1916 ? désaffectée après la guerre
27) Frileuse 75 février 1916 ? désaffectée après la guerre
29) Huelgoat * 60 janvier 1916 ? ?
29) Plougonven * 200 mai 1920 - sanatorium départemental
33) PESSAC * 100 novembre 1915 sanatorium (1902) sanatorium départemental
33) Lège * 180 1918 - sanatorium départemental
36) Touvent 60 décembre 1915 désaffectée après la guerre
37) Les Brandelles 40 février 1916 orphelinat désaffectée après la guerre
38) Les Membrole (Bel Air) * ? - sanatorium privé assimilé
38) La Tronche * 180 février 1917 asile de vieillards hôpital – sanatorium
38) La Tronche (Taillefer) * 120 1920 - hôpital – sanatorium
38) Seyssuel * 250 ? château sanatorium départemental
41) LES PINS * 150 janvier 1916 sanatorium 1900 sanatorium privé
42) Saint – Jodard * 350 novembre 1915 séminaire sanatorium d’Etat puis
départemental (1935-1937)
45) Chapelle St. Mesemin * 60 mai 1916 séminaire sanatorium départemental
46) Montfaucon * 300 juin 1917 séminaire sanatorium des PTT (1921)
47) Monbran * 80 septembre 1917 château sanatorium départemental (1923)
53) Clavières * 120 mars 1916 château appartenant au
séminaire de Laval
sanatorium d’Etat (1925)
sanatorium départemental (1932)
58) Pignelin * 200 mai 1916 séminaire sanatorium départemental
63) Les Roches 75 novembre 1916 château prévention départemental
64) CAMBO * 120 novembre 1915 sanatorium ?
64) TRESPOEY * 50 mars 1916 sanatorium (1896) sanatorium privé
69) Alix 300 novembre 1915 séminaire désaffectée après la guerre
69) Bayère château sanatorium privé assimilé
71) Semur en Brionnais 80 février 1916 asile de vieillards désaffectée après la guerre
71) La Guiche * 250 1918 - sanatorium départemental
75) Maison de cure 26 décembre 1915 ? ?
76) Canteleu 1918 - désaffectée après la guerre
76) St-Etienne-du-Rouveray * 65 décembre 1915 ? désaffectée après la guerre
76) OISSEL * ? sanatorium (1903) sanatorium départemental
78) Ris-Orangis (cheminot) * ? sanatorium des cheminots
83) TAXIL * 50 mai 1916 sana. des PTT (1906) école de rééducation
34
QUELQUES TUBERCULEUX CELEBRES :
Balzac, Honoré de (1799-1850)
Barthes, Roland (1915-1980)
Camus, Albert (1913-1960)
Charles IX, Roi de France (1550-1574)
Chopin, Frédéric (1810- 1849)
Gauguin, Paul (1848-1903)
Goethe, Wolfgang (1749-1832)
Henri VIII, Roi d’Angleterre (1491-1547)
Kafka, Franz (1883-1924)
Leopardi, Giacomo (1798-1837)
Maupassant, Guy (1850-1893)
Modigliani, Amedeo (1884-1920)
Poquelin Jean-Baptiste dit Molière, (1622-1673)
Musset, Alfred (1810-1857)
Paganini, Niccolo (1782-1840)
Poisson Jeanne-Antoinette (Madame de Pompadour) (1721-1764)
Rousseau, Jean-Jacques (1712-1778)
Watteau Antoine (1684-1721)
35
Figure I. SEE Germain : De la Phtisie Bacillaire des poumons 1884
36
Figure II. Répartition Géographique des entrantes (Femmes) Pendant l’année 1935
37
Figure III. Répartition Géographique des entrants (Hommes) Pendant l’année 1935
38
Figure IV. DECRET DU 16 AVRIL 1969
39
40
Figure V. Conversion totale du Sanatorium de La Musse Sis à Evreux le 10 octobre 1972
Figure VI. Modification de la répartition des lits du Sanatorium de La Musse à Evreux le 9 mai 1975
41
Photographie 1 : Sanatorium Emile Roux (La Musse) 1935
42
Photographie 2 : Pavillons des Hommes et des Femmes
43
Photographie 3 : Pavillons du sanatorium la Musse en 1935
44
Photographie 4 : Chambre particulière et à 3 lits et Galerie de Cure
45
Photographie 5 : Réfectoire et salle de Réunion
46
Photographie 6 : Salle de soin, Rayons U.V, Dentisterie et Salle de Radiographie
47
BIBLIOGRAPHIE
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octobre 2007, 483 p. (ISBN 9782213620978)
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Marc Fumaroli, éd. Perrin, Paris 2012, p. 100.
10. Frascator, Les trois livres de J Frascator sur la contagion, les maladies infectieuses et
leur traitement (traduction L. Meunier). Société d'édition scientifique Paris, 1893
11. Romagnoli G., l’evoluzione de concetto della contagiosita della profilassidella
tubercolosi polmonare attraverso i secoli Giorn, Batt, Virol., 61, 1968.
12. Morpugo E., Lo studio di Padoua, le epidemie ed i contagi durante il Governo della
Republica Veneta (1405-1797), Venise, 1922, cité par Ch. Coury, op.cit
13. Dezeimeris Jean-Eugène, Ollivier Charles Prosper, Raige-Delorme Jacques, biographie
de Pierre Desault dans le Dictionnaire historique de la médecine ancienne et moderne...
[archive], volume 2, Béchet Jeune, 1834, p. 54
14. Berche Patrick, une histoire des microbes, éd John Libbey, 2007, p.68
15. Duffin J.M « Caspard Laurent Bayle (1774-1816) et son legs scientifique: au-delà de
l'anatomie pathologique », Bulletin canadien d'histoire de la médecine, vol. 3, no 2, 1985,
p. 167-184 (lire en ligne).
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correspondance, vie et œuvre, Association des amis du Musée du pays de Dinard, 1988, p
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sur books.google.fr (consulté le 16 juillet 2010).
23. Grellet I et Kruse C, histoire de la tuberculose, éd Ramsey 1983, p.85
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spécificité et de son inoculabilité, Paris, J.B. Baillière et fils, 1868.
25. Grellet I. Kruse C, histoire de la tuberculose, éd Ramsey 1983, p.87
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bacilli-della-tubercolosi/
27. R. Koch, Mémoire présenté le 24 mars 1882 à la Société de physiologie de Berlin, cité
par Grellet & Kruse 1983, p. 92.
28. Cité par Grellet et Kruse 1983, p 37.
29. Riva Michele, « From milk to rifampicin and back again: history of failures and
successes in the treatment for tuberculosis », J Antibiot, Nature Publishing Group, vol.
67, no 9. 6 août 2014, p. 661-665
30. Coury Charles, la tuberculose au cours des âges, grandeur et déclin d’une maladie, éd
Lepetit à Suresnes, 1972
31. Pradalié Pierre, Histoire du traitement curatif de la tuberculose pulmonaire au xxe siècle,
Th. Dr Médecine, Univ. Nancy 1, 2000, n° 30, 109 f., ill., 66 réf.)
32. Sée Germain, De la Phtisi bacillaire des poumons, Ed. Delahaye et Lecrosnier, Paris
1884, p3.
33. Condrau F. « Lungenheilanstalt und Patientenschicksal: Sozialgeschichte der
Tuberkulose in Deutschland und England im späten 19. Und frühen 20. Jahrhundert ».
Vandenhoeck & Ruprecht, Göttingen, 2000.p57
34. Dettweiler, « Le traitement hygiénique et diététique de la tuberculose pulmonaire et le
traitement dans les sanatoriums. Congrès de la tuberculose, Berlin, 1899 », in Revue
d’hygiène et de police san., 1899, n°21, p. 738.
35. Congrès international de la tuberculose, Paris, Masson, 1905, p. 377
36. Barth Henri, La Tuberculose à Paris et les Sanatoriums populaires, Revue des Deux
mondes, 5e période, tome 2, 1901, p 916.
49
37. J.O. 20 juillet 1917, p. 702
38. Bligny et son histoire, du sanatorium au centre hospitalier p17-18-19
http://www.chbligny.fr/uploads/media/Bligny_historique_edition_2015.pdf,
39. Barth H. La Tuberculose à Paris et les Sanatoriums populaires Revue des Deux Mondes,
5e période, tome 2, 1901, p 918
40. British J Tuberculosis, 1 (1907), pp. 1 – 4
41. Knibiehle Yvonne « La « lutte antituberculeuse » instrument de la médicalisation des
classes populaires (1870-1930) », Annales de Bretagne et des pays de l'Ouest, vol. 86, no
2, 1979, p. 325-329).
42. Lion Murard et Patrick Zilbermann, « La mission Rockefeller en France et la création du
Comité national de défense contre la tuberculose (1917-1923) », Revue d’histoire
moderne et contemporaine, no 34-2, 1987, p. 200)
43. Weil-Hallé B, Turpin R. Sur la vaccination antituberculeuse de l’enfant par le BCG. Ann
Inst Pasteur 1927, 41 (no 3) : 254-270
44. Leroy Roger, du sanatorium aux défis du futur, ed La Renaissance sanitaire, p.83
45. Marion Louis, La Musse, un peu d’histoire, 1986, p 9
46. Organisation mondiale de la santé, Rapport sur la lutte contre la tuberculose dans le
monde 2017,
47. Philippe Grandvoinnet, Histoire des sanatoriums en France (1915-1945), 29.6.2010, p
157.
48. Iconographies, archives La Musse, rapport annuel, La Renaissance Sanitaire, 1935.
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RESUME
L'objectif de ce travail est de retracer l'histoire de la tuberculose à travers les
siècles de l'Antiquité à nos jours, depuis les croyances irrationnelles et religieuses, et les
traitements empiriques du passé jusqu'au pneumothorax et à l'ère de l'antibiothérapie.
Nous insistons sur le rôle important joué par les sanatoriums dans le traitement de la
maladie, en particulier le Sanatorium La Musse, à Arnières/ Iton (Eure) qui fut l'un des
plus grands d'entre eux. .Aujourd'hui la plupart de ces établissements ont fermé ou se sont
reconvertis. Mais malheureusement, nous n'avons pas abouti à l'éradication de la
tuberculose en raison de nombreux facteurs: émergence de souches résistantes aux
antibiotiques, co-infection avec le HIV, pauvreté et grandes migrations des populations.
L'objectif de l'OMS est de mettre un terme à cette épidémie d'ici à 2030. Il est possible
que les sanatoriums retrouvent leur utilité dans les temps à venir.
ABSTRACT
The purpose of this work is to pass in review the history of tuberculosis across the
centuries from Antiquity until nowadays, from irrational, religious beliefs and empirical
treatments of the past until pneumothorax and antibiotic therapy era. We insist on the
important part realized by the sanatoriums in treatment of tuberculosis, especially the
Sanatorium La Musse, on Arnières/Iton (Eure), one of the biggest of them. Today most of
these establishments are closed or reconverted. But unfortunately, tuberculosis is not yet
extinguished because many factors: emergence of strains of multi-drugs resistant
tuberculosis, co-infection with HIV, poverty and large migrating people. The goal of
WHO is to end this epidemic here at 2030. Maybe sanatoriums could be again useful in
the next times.