La marine italienne en Mer Noire

Cinq des six sous-marins de poche CB photographiés à Costanza à la fin du moi de mai 1942.(crédits photo : A. De Toro)

Les forces en présence

La guerre en Mer Noire n'eut pas une grande importance d'un point de vue maritime, puisqu'aucune unité militaire ne pouvait en sortir ou y rentrer par le détroit des Dardanelles, qui était fermé à la navigation. En revanche, l'action des bâtiments de guerre de l'Axe ou russes eut un impact important sur le déroulement des opérations terrestres au sud du front de l'Est.

Du point de vue quantitatif, la flotte soviétique de la Mer Noire était largement en mesure d'exercer le contrôle maritime sur cette mer fermée. Au déclenchement de l'opération Barbarossa, la flotte russe de ce secteur disposait d'un vieux cuirassé modernisé dans les années 1930, le Parijskaya Kommouna de la classe Gangout, de 6

croiseurs (dont les modernes Vorochilov et Molotov de la classe Kirov), d'un "leader de flottille", le Tachkent (construit en Italie), 2 destroyers lourds de classe Leningrad (le Moskva et le Kharkov), en plus d'une douzaine de contre-torpilleurs et torpilleurs et de 44 sous-marins. A cela venaient s'ajouter de nombreux navires auxiliaires et vedettes lance-torpilles.

Le cuirassé Parijskaya Kommouna après sa refonte de 1934-38.

Le "leader" Tachkent, construit à Livourne entre 1935 et 1937. Il préfigure déjà les croiseurs légers de la classe

Capitani Romani.

Dans le camp de l'Axe, la marine roumaine disposait de moyens de loin inférieurs à ceux des Russes. A l'entrée en guerre, le 21 juin 1941, elle ne comptait que 4 destroyers (les Marasti et Marasesti de la classe M et Regele Ferdinand et Regina Maria de la classe R, tous construits en Italie), 3 corvettes, 3 canonnières, 7 mouilleurs de mines, 3 vedettes lance-torpilles et un seul sous-marin, le Delfinul, lui aussi construit en Italie. Quant à la marine bulgare, elle refusa d'opérer en-dehors de ses eaux territoriales.

Le contre-torpilleur roumain Regina Maria, construit à Naples en 1929.

Le NMS Delfinul, lancé à Fiume en mai 1936.

Une requête allemande....

Les premières unités légères allemandes commencèrent à gagner la Mer Noire au début du printemps 1942, en suivant le cours du Danube. Cette petite force composée de vedettes lance-torpilles et de sous-marins côtiers du type IIB devait fournir une escorte aux navires de transports de l'Axe au large de la Crimée puis en mer d'Azov pour appuyer l'offensive contre Sébastopol. Cependant, face à puissance de la flotte russe de la Mer Noire, l'amiral Raeder demanda officiellement l'aide d'unités légères de la marine italienne le 14 janvier 1942, en raison de "la supériorité des embarcations lance-torpilles de surface et sous-marines de la Regia Marina par rapport à celles dont nous disposons". Ce fut la seule

et unique fois que les Allemands demandèrent à leurs alliés transalpins un soutient militaire durant la guerre, et l'amiral Riccardi s'empressa d'y répondre. Pour cela, il décida l'envoi des 4 Mas de la 19a squadriglia Mas, des 6 sous-marins de poche CB de la 1a squadriglia sommergibili CB, des 5 MTSM et des 5 barques explosives MTM de la 101a squadriglia mezzi speciali. La flottille, désignée 4a flottiglia Mas, fut placé sous les ordres du célèbre capitaine de frégate Francesco Mimbelli, décoré de la Medaglia d'Oro al Valor Militare et très apprécié des Allemands pour son action sur le torpilleur Lupo lors des opérations contre la Crête.

Le problème du transport Pour gagner la Mer Noire, les 4 Mas de la 19a squadriglia furent montés sur des semi-remorques qui partirent de Mestre le 22 avril 1942. Les navires rejoignirent Vienne par la route, non sans difficultés. Les soldats du génie qui accompagnaient le convoi devaient faire preuve d'ingéniosité pour faire passer les navires sous les ponts, et parfois même détruire et reconstruire quelques ouvrages d'art. Une fois arrivés dans le capitale autrichienne, tous les navires furent mis à l'eau et suivirent le cours du Danube jusqu'au port roumain de Costanza, qu'ils gagnèrent le 4 mai. Les sous-marins CB effectuèrent ce voyage par voie ferrée, et arrivèrent à Costanza le 2 mai. Quant aux MTSM et MTM, ils furent regroupés dans la colonne baptisée Comandante Moccagatta qui quitta La Spezia le 5 mai et gagna le port de Foros (Crimée) par la route entre le 22 et le 23 mai. Toutes les unités italiennes étaient finalement en Mer Noire.

Manoeuvre délicate de passage sous un pont à Oberaudorf, en

Autriche, le 25 avril 1942.

Le Mas 570 arrivant dans les faubourgs de Vienne, le 26 avril

1942.

Ce MTSM est mis à l'eau à Foros, en juin 1942.

Le port de Yalta, situé sur la côte sud de la péninsule de Crimée, fut la première base opérationnelle des sous-marins et Mas italiens. Le rôle confié à la 4ème flottille était de s'attaquer aux navires russes de transport ou de guerre dans une zone délimitée par la forteresse de Sébastopol, le détroit de Kerch et les bases navales de Novorossiysk et de Tuapse.

Premiers succès et premières pertes

Les trois premiers CB à gagner Yalta le 5 juin furent les CB 1 du lieutenant de vaisseau Enrico Lesen d'Aston, CB 2 du sous-lieutenant de vaisseau Attilio Russo et

CB 3 du sous-lieutenant de vaisseau Giovanni Sorrentino. Les 3 autres sous marins, commandés respectivement par les sous-lieutenants de vaisseau Ennio Suriano, Alberto Farolfi et Francesco Gallinaro, les rejoignirent le 11 juin.

Le 10 juin, les Italiens revendiquèrent leur premier succès en Mer Noire lorsque le Mas 571 torpilla le cargo russe de 5000 tonnes Abkhaziya au large de Sébastopol, coulé ensuite par des bombardiers allemands dans le port. Cette attaque n'est pas confirmée par les sources russes, qui mentionnent uniquement l'action des Ju.88 allemands.

Remise à l'eau d'un CB à Costanza, durant l'été 1942.

Sous-marins CB à quai dans une base de la mer Noire.

(crédits photo : E. Ando)

Le commandement soviétique fut rapidement informé de la présence des CB dans le port de Yalta, et ordonna une attaque aéronavale pour le 13 juin. Les chasseurs, chasseurs bombardiers et vedettes lance-torpilles russes coulèrent ce jour là le CB 5, et endommagèrent quelques autres unités qui purent être rapidement réparées. Ce fut la première perte de la marine italienne en Mer Noire.

Pour des raisons de sécurités, les unités italiennes avaient été réparties entre les ports de Yalta et Foros. Les MTSM et MTM de la 101a squadriglia aux ordres du capitaine de corvette Todaro opérèrent depuis Foros, à 30 milles (50 km environ) seulement de Sébastopol. Le plus gros succès obtenu par cette escadrille fut l'endommagement du cargo russe Gruziya de 10000 tonnes le soir du 12 juin 1942, torpillé par le MTSM 210 au large de Sébastopol. Le Gruziya fut achevé le lendemain matin par des avions allemands.

Duels entre sous-marins L'activité des CB fut particulièrement intense au moment du siège de Sébastopol. Le 13 juin 1942, le CB 3 de Giovanni Sorrentino repéra un croiseur de la classe Kirov dans une position idéale pour l'attaque, à une distance de 1800 mètres. Sorrentino ordonna le lancement de deux torpilles contre cette belle cible, mais les deux armes coulèrent peu après leur sortie des tubes. Selon Mimbelli, ce disfonctionnement serait dû à l'absence de révision après le transfert de Costanza à Yalta.

Le 15 juin, Sorrentino eut plus de chance. Peu après midi, il aperçu un sous-marin russe évoluant en surface à faible vitesse. Le CB 3 commença alors à se rapprocher de sa cible, jusqu'à arriver à une distance de 1200 mètres, à 12h26. Le CB 3 lança alors ses deux torpilles puis s'immergea pour se désengager. Le sous-marin russe S.32 de la série IX bis de la classe Stalinetz déplaçant 1090 tonnes fut ainsi envoyé par le fond. Les sources russes ne confirment pas cette version, puisqu'elles mentionnent la perte du sous-marin le 26 juin 1942, perte due à l'aviation allemande.

Les sous-marins italiens connurent un autre succès peu de temps après. Au petit matin du 18 juin 1942, le CB 2 émergea pour avoir une vision complète de la zone dans laquelle il se trouvait. A 5h00, lorsque le commandant Russo sortit sur la tourelle, il aperçu à 1800 seulement un sous-marin arrêté. Deux minutes plus tard, le CB 2 lança sa torpille tribord qui se perdit après une course de 60 mètres à peine. Le sous-marin italien lança alors sa deuxième arme et plongea. Il avait atteint une profondeur de 17 mètres lorsque retentit une forte explosion. Le CB 2 revendiqua alors la destruction du sous-marin Shch-213 appartenant à la série X de la classe Schuka. Mais selon les sources russes, le sous-marin attaqué et manqué fut le vieux A-4 de la classe AG (pour Amerikanski Golland, Holland américain).

Le 18 juin, Les Mas eurent également l'occasion de se distinguer. Deux d'entre eux attaquèrent un convoi de transports de troupes russes, escortés par 6 canonnières, en route pour Sébastopol. Les Italiens revendiquèrent à cette occasion la destruction d'un navire de transport russe, qui n'est cependant pas confirmée par les archives soviétiques. Le sous-lieutenant de vaisseau Bisagno, à bord du Mas 571, fut mortellement blessé au cours de l'action.

Le 19 juin, le Mas 571 coula le sous-marin russe Shch-214 de la série X de la classe Schuka au large du cap Ai-Todor. Il n'y eut que deux rescapés de l'équipage de 40 hommes du submersible soviétique. Cette action est confirmée par les sources russes.

Le Shch-214, victime du Mas 571 le 19 juin 1942 alors qu'il effectuait une mission de transport en direction de Sébastopol.

Le 29 juin, l'amiral allemand Schuster, commandant en chef du groupe sud de la Kriegsmarine, envoya à l'amiral Riccardi une lettre de félicitations pour l'action menée par la flottille italienne en mer Noire. Dans ce secteur, la marine italienne réussit donc à gagner rapidement l'estime de l'allié allemand.

Pour renforcer la 4a flottiglia Mas, la 18a squadriglia Mas du lieutenant de vaisseau De Giorgi sur quatre Mas gagna la mer Noire en deux fois : le transfert des Mas 568 et 569 débuta le 18 juin pour s'achever le 30, et celui des Mas 566 et 567 eut lieu entre le 7 et le 19 juillet.

A l'assaut des citadelles

Entre la fin du mois de juin et le début du mois de juillet 1942, les unités italiennes participèrent à la prise des forteresses de Sébastopol et de Balaklava aux côtés des forces allemandes et roumaines. Le capitaine de corvette Todaro se distingua particulièrement durant les missions qu'il effectua avec son unité contre le trafic maritime soviétique, qui cherchait à évacuer des officiers et commissaires politiques de l'Armée Rouge et à ravitailler les places fortes assiégées. Les MTSM de la 101a squadriglia furent les premières unités de l'Axe à entrer dans le port de Balaklava, au sud de Sébastopol, le 2 juillet vers 12h30. C'est Todaro en personne qui fut à l'origine de cette action, qui survint alors que Baklava était en cours d'occupation par les troupes roumaines. Il entendait ainsi affirmer le rôle prépondérant qu'avaient joué la flottille italienne dans la chute de bastion, privé de ses ravitaillements par la mer.

Un MTSM de la 101a squadriglia Mezzi Speciali entre Sébastopol et Balaklava le 2 juillet 1942.

L'équipage de ce MTSM récupère un soldat russe au large du cap Kersoneso le 9 juillet 1942.

Après la reddition de Sébastopol le 2 juillet, les forces de l'Axe devaient encore éliminer de nombreux foyers de résistance aux alentours de la ville. L'un d'eux, le fort M. Gorki du cap Kersoneso, fut encerclés par des Mas et MTSM italiens pour couper toute fuite aux défenseurs durant l'attaque des fantassins allemands.

Entre mai et juillet 1942, les Mas effectuèrent 65 missions au large de la Crimée, contre 56 pour les MTSM et 24 pour les CB.

Cap à l'Est Avec l'avancée des armées allemandes dans sud de la Russie, la flottille italienne de la mer Noire transféra ses bases logistiques à Feodosia et Iwan Baba. Au mois d'août 1942, les Mas italiens furent employés à l'escorte des navires allemands convoyant des hommes et des armes depuis la côte occidentale de la Crimée à la rive occidentale de la mer d'Azov pour alimenter la nouvelle offensive en direction du Caucase.

Dans la nuit du 2 au 3 août 1942, les Mas 573, 568 et 569, commandés respectivement par le capitaine de corvette Castagnacci et les sous-lieutenants Legnani et Ferrari, attaquèrent le croiseur Molotov de la classe Kirov et le contre-torpilleur Kharkov de la classe Leningrad en mission contre les navires de transport allemands au sud de Kertch. Les deux unités russes, commandées par le contre-amiral N.E. Basisty, s'étaient

approchés de la côte et avaient ouvert le feu contre des objectifs terrestres situés entre Iwan Baba et Feodosia. Vu le danger que cette attaque représentait pour les forces de l'Axe, les commandants des Mas 573 et 568 décidèrent d'attaquer les deux navires de la flotte russe. Très vite, les pièces d'artillerie légères du croiseur et du contre-torpilleur se déchaînèrent sur les attaquants. Les torpilles lancées par le Mas 573 ratèrent leur cible, mais l'une de celles du Mas 568 explosa contre la poupe du Molotov. Après ce coup au but, le Mas 568 chercha à se soustraire à la réaction ennemie, mais il fut immédiatement pris en chasse par le Kharkhov. Legnani décida alors de larguer les 10 petites bombes sous-marines situées à la poupe de son embarcation, en réglant leur explosion à la profondeur minimale. L'entreprise réussi pleinement, puisque les bombes explosèrent devant la proue du contre-torpilleur et lui causèrent suffisamment de dégâts pour le contraindre à arrêter sa poursuite. Les unités russes quittèrent alors la zone pour rejoindre au plus vite leur base. L'action avait duré un quart d'heure. Bien que légèrement endommagés, les Mas purent regagnés leur base de Yalta (pour le Mas 568) et Feodosia. Cette action courageuse de la part des équipages italiens mis le croiseur lourd Molotov hors d'état de nuire pour deux ans (qu'il passa en cale sèche à Bathumi) et coûta au Kharkhov quelques semaines de réparation. Cela dit, de source soviétique, seul les dégâts du Molotov sont confirmés.

Le croiseur Molotov, de la classe Kirov, déplaçant 11500

tonnes à pleine charge.

Le contre-torpilleur (ou destroyer lourd) Kharkhov, de

la classe Leningrad.

Le Mas 568, protagoniste de l'action contre le Molotov,

photographié fin septembre 1942 à Yalta.

Le 5 (ou 6 ?) septembre, le Mas 568 récidiva en endommageant un cargo de 3000 tonnes au large du cap Utrich, au sud d'Anapa. Cette action n'est pas confirmée par les sources russes, qui mentionnent toutefois la perte du Burevestnik coulé au large de Kertch par des navires de l'Axe le 4 septembre. Ces deux évènements n'en sont peut-être qu'un seul...

Le mirage de la mer Caspienne Au début du mois d'octobre, les Mas 566, 568, 570 et 572 furent transférés à Feodosia dans l'attente de leur départ pour la mer Caspienne, qui était prévu dès que le front aurait atteint ses rives. Les moyens de transport avaient déjà été préparés et l'itinéraire à suivre étudié en détail. Mais l'inversement du cours de la guerre empêcha ce transfert d'être mené à bien. L'ordre fut suspendu le 9 octobre, puis annulé par la

suite.

Alignement de Mas à quai à Feodosia, le 5 octobre 1942, dans l'attente de leur éventuel transfert en Mer Caspienne.

(crédits photo : USMM)

Le début de la fin Le 9 septembre, le grand amiral Erich Raeder en personne vint visiter les équipages italiens à la base de Yalta. Quelques heures plus tard, le port fut attaqué par des chasseurs bombardiers russes, qui coulèrent les Mas 571 et 573 et endommagèrent sérieusement les Mas 567, 569 et 572. Pour remplacer les deux unités perdues, les Mas 574 et 575 quittèrent La Spezia dans le courant du mois pour rejoindre la mer Noire en octobre.

Yalta, 9 septembre 1942 : le Mas 571 vient d'être coulé par une bombe russe.

Entre octobre 1942 et janvier 1943, l'activité des forces navales italiennes en Mer Noire fut très sensiblement diminuée, à cause de la raréfaction du trafic soviétique consécutif à la prise de Sébastopol, du manque de carburant et de la nouvelle tournure des évènements sur le front terrestre, défavorable aux forces de l'Axe. Le commandement de la marine italienne décida alors de commencer à rapatrier ses équipages, laissant aux Allemands le soin d'armer les navires qui restaient quant à eux en Mer Noire. Cependant, l'activité des marins italiens dans ce secteur se poursuivit entre janvier et mai 1943. Le 17 avril, 7 Mas accompagnés de vedettes lance-torpilles allemandes furent transférés à Anapa, au nord de Novorossisk, pour contrer le cabotage russe. Mais après quelques infructueuses missions, les opérations dans ce secteur cessèrent le 26 avril. Les Mas italiens effectuèrent leur dernière mission en mer Noire le 13 mai, au large de Yalta, après avoir abandonné les bases de Feodosia et Iwan Baba, menacées

par l'avancée des Russes. La cérémonie officielle de remise des 7 Mas restant (à savoir les Mas 566, 567, 568, 569, 570, 574 et 575) à la marine allemande se tint le 20 mai. Ils furent rebaptisés S.501 à S.507 par leurs nouveaux propriétaires et utilisés jusqu'en été 1944. Les unités restantes furent sabordées en août 1944 pour éviter de tomber aux mains des russes.

Mas 567 et 570 à quai à Sébastopol, le 30janvier 1943.

Mas 568, 572 et 570 photographiés à Anapa le 26 avril 1943.

En ce qui concerne les sous-marins de poche, les CB 1, 2, 4 et 6 furent transférés de Sébastopol à Costanza en décembre 1942. Le CB 3 s'y trouvait déjà en réparation suite à un accident survenu en octobre. Au début de l'année 1943, un accord fut passé avec l'Allemagne pour rapatrier les sous-mariniers italiens qui laisseraient leurs submersibles à des équipages allemands. Mais entre temps, la Kriegsmarine envoya en mer Noire de nouveaux sous-marins côtiers plus performants, et se désintéressa des CB italiens. La Regia Marina décida donc de les réarmer avec du personnel italien dans la seconde moitié de juin 1943. Les CB repartirent pour Sébastopol fin juillet et entamèrent ainsi leur deuxième cycle d'opérations en mer Noire.

Les sous-marins CB 1, 6, 4 et 2 au mouillage à Sébastopol fin octobre 1942.

Un CB en maintenance dans la base roumaine de Costanza, en juillet 1943.

(crédits photo : G. Radogna)

Les sous-marins CB furent donc les dernières unités à combattre avec leur équipage national en mer Noire. Ils effectuèrent un total de 21 missions entre juin et août 1943. Le seul succès remporté durant cette deuxième phase opérationnelle fut celui du CB 4 du lieutenant de vaisseau Armando Sibille, qui coula le 26 août 1943 au large du cap Uret le sous marin Shch-203 appartenant à la série V bis de la classe Schuka.

Le sous-marin russe Shch-203 de la classe Schuka.

Le CB 4 du retour d'une mission au début de l'été 1943.

Au moment de l'armistice du 8 septembre 1943, les 5 CB de la se trouvaient donc à Sébastopol. Ils continuèrent à combattre aux côtés des Allemands jusqu'en novembre, avant de regagner Costanza. Ils y furent capturés par les forces roumaines le 30 novembre. A partir de cette date, les sources italiennes et roumaines divergent. La version italienne affirme que, suite à un accord entre Mussolini et Antonescu, les CB furent cédés le 30 janvier 1944 à la marine de la RSI qui les arma avec son propre personnel. Ils constituèrent le gruppo sommergibili CB "M.O. Livio Piomarta" qui débuta son activité opérationnelle au cours du printemps pour l'interrompre brutalement le 25 août 1944, date à laquelle les 5 CB furent sabordés à Costanza par les Italiens pour éviter qu'ils ne tombent aux mains des Russes. De source roumaine, les 5 CB récupérés le 30 novembre étaient en mauvais état et seulement deux d'entre eux purent être remis en état et reprirent du service à partir du 1er juillet 1944. L'un d'eux aurait été coulé le 20 août par des avions russes.

Voilà qui clôt l'histoire encore trouble de la flottille italienne de la mer Noire, à propos de laquelle beaucoup a déjà été écrit. Comme vous l'aurez compris à la lecture de cet article, le problème principal est que la plupart des textes que j'ai pu consulter sont basés sur les sources d'un seul pays, qui ne sont pas recoupées avec d'autres archives. Le résultat est qu'il est très difficile de donner avec certitude le déroulement des évènements, et j'ai ainsi laissé de nombreuses questions en suspend, en prenant soin de donner les versions de plusieurs sources lorsque celà était possible.

Pour finir, j'ai dressé une liste sommaire des victoires italiennes, confirmées ou non. Elle n'est donc pas définitive, et je suis naturellement preneur de toute information complémentaire qui puisse m'aider à la clore définitivement, ou au moins à la corriger si nécessaire.

Navires russes coulés par les ItaliensDate Navire coulé Tonnage Coulé par Remarques

15/06/1942 sous-marin S.32 708 CB 3 Perte non confirmée par la marine russe

18/06/1942 sous-marin Shch-213 1090 CB 2 Perte non confirmée par la marine

russe

18/06/1942 navire de transport ? MasLe sous-lieutenant de vaisseau

Bisagno, à bord du Mas 571, fut tué durant l'action.

19/06/1942 sous-marin Shch-214 708 Mas 571 Perte confirmée par la marine russe

26/08/1943 sous-marin Shch-203 749 CB 4 Perte confirmée par la marine russe

Navires russes endommagés par les Italiens

Date Navire endommagé Tonnage Endommagé

par Remarques

10/06/1942 cargo Abkhaziya 5000 Mas 571 le cargo sera coulé en suite par des bombardiers allemands

13/06/1942 cargo Gruziya 10000 MTSM 210 le cargo sera coulé ensuite par des Stuka

nuit du 02 au

03/08/1942

crosieur lourd Molotov 11500 Mas 568 le navire fut indisponible durant 2 ans

pour réparations

nuit du 02 au

03/08/1942

contre-torpilleur Kharkov 2582 Mas 568 le navire fut indisponible durant

quelques semaines pour réparations

05/09/1942 cargo 3000 Mas 568 Perte non confirmée par la marine russe

Bibliographie & webographie :- Uomini sul fondo, Storia del sommergiblismo italiano dalle origine a oggi, Oscar Mondadori, Giorgio Giorgierini, 1994- Navi e Marinai Italiani nella Seconda Guerra Mondiale, Albertelli, Elio Ando & Erminio Bagnasco, 1999- http://www.regiamarina.net/others/blacksea/blacksea_I_us.htm- http://www.worldwar2.ro/arme/?section=21- http://forummarine.forumactif.com/viewtopic.forum?t=38

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