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Avril 2012 Interview SKODEN Nous avons interrogé Sophie Ferrandino, consultante sur le projet "Déployer la FOAD dans le réseau des AFB bas-normands". Rédaction : Bonjour Sophie, pouvez-vous vous présenter en quelques mots et nous expliquer votre rôle sur ce projet ? J'ai longtemps travaillé au sein d'organismes de formation positionnés sur la commande publique (dispositifs d'insertion, d'orientation professionnelle, Ateliers de Pédagogie Personnalisée...). Depuis 2006, j'exerce des activités de conseil et de formation en free-lance auprès de ces organismes et de Centres de Formation d’Apprentis. Le plus souvent, j’accompagne les équipes dans la mise en place de la FOAD. J’ai rejoint ce projet en 2009 en tant qu’experte pour l’ANLCI, la première phase du projet FOAD des AFB de Basse-Normandie s’inscrivant dans la démarche nationale du Forum Permanent des Pratiques de lutte contre l’illettrisme. Nous avons alors travaillé en collaboration avec Elie Maroun (chargé de mission national ANLCI). Cette première phase a permis d’expérimenter des modalités de formation à distance. A partir de 2010, les objectifs ont été recentrés sur les compétences de scénarisation pédagogique des formateurs et la production de ressources. Tout au long de ce projet, j’ai eu pour rôle d’aider les formateurs à développer des pratiques de FOAD, les aider individuellement à monter en compétence mais aussi collectivement, dans une perspective de capitalisation et de transfert à d’autres formateurs intervenant auprès de publics en situation d’illettrisme. J'ai joué aussi un rôle d’appui au pilotage du projet : - aider, au fil des besoins émergents, à garder le cap sur les orientations de départ, notamment la prise en compte des spécificités pédagogiques des AFB et la volonté des équipes de favoriser l’autonomie des apprenants à l’occasion de l’intégration de la plateforme dans les dispositifs ; - aider à la mise en place d'actions complémentaires à l'accompagnement de l'équipe projet, comme la formation à la médiatisation de séquences d'apprentissage pour laquelle nous avons collaboré avec Cécile Deruy (Consultante e-learning, Multimédia pédagogique). J'ai toujours pu fonctionner en étroite collaboration avec la chef de projet, Marie-José Lefebvre, qui m'a régulièrement fourni des informations clefs sur l'actualité en région et dans les organismes. Nous avons adopté une démarche de type «formation-action». Des regroupements consacrés à l'analyse des vécus des formateurs, l'apprentissage de nouveaux savoir-faire (outils, méthodes,

Déployer la FOAD dans le réseau des AFB bas-normands

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Interview de Sophie Ferrandino par la rédaction du Portail SKODEN

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Avril 2012

Interview SKODEN

Nous avons interrogé Sophie Ferrandino, consultante sur le projet "Déployer la

FOAD dans le réseau des AFB bas-normands".

Rédaction : Bonjour Sophie, pouvez-vous vous présenter en quelques mots et nous

expliquer votre rôle sur ce projet ?

J'ai longtemps travaillé au sein d'organismes de formation

positionnés sur la commande publique (dispositifs d'insertion,

d'orientation professionnelle, Ateliers de Pédagogie

Personnalisée...). Depuis 2006, j'exerce des activités de conseil

et de formation en free-lance auprès de ces organismes et de

Centres de Formation d’Apprentis. Le plus souvent,

j’accompagne les équipes dans la mise en place de la FOAD.

J’ai rejoint ce projet en 2009 en tant qu’experte pour l’ANLCI, la

première phase du projet FOAD des AFB de Basse-Normandie

s’inscrivant dans la démarche nationale du Forum Permanent des

Pratiques de lutte contre l’illettrisme. Nous avons alors travaillé

en collaboration avec Elie Maroun (chargé de mission national ANLCI). Cette première phase a

permis d’expérimenter des modalités de formation à distance. A partir de 2010, les objectifs ont été

recentrés sur les compétences de scénarisation pédagogique des formateurs et la production de

ressources.

Tout au long de ce projet, j’ai eu pour rôle d’aider les formateurs à développer des pratiques de FOAD, les aider individuellement à monter en compétence mais aussi collectivement, dans une

perspective de capitalisation et de transfert à d’autres formateurs intervenant auprès de publics en situation d’illettrisme.

J'ai joué aussi un rôle d’appui au pilotage du projet :

- aider, au fil des besoins émergents, à garder le cap sur les orientations de départ, notamment la

prise en compte des spécificités pédagogiques des AFB et la volonté des équipes de favoriser

l’autonomie des apprenants à l’occasion de l’intégration de la plateforme dans les dispositifs ;

- aider à la mise en place d'actions complémentaires à l'accompagnement de l'équipe projet, comme

la formation à la médiatisation de séquences d'apprentissage pour laquelle nous avons collaboré

avec Cécile Deruy (Consultante e-learning, Multimédia pédagogique).

J'ai toujours pu fonctionner en étroite collaboration avec la chef de projet, Marie-José Lefebvre, qui

m'a régulièrement fourni des informations clefs sur l'actualité en région et dans les organismes.

Nous avons adopté une démarche de type «formation-action». Des regroupements consacrés à

l'analyse des vécus des formateurs, l'apprentissage de nouveaux savoir-faire (outils, méthodes,

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repères théoriques...) alternaient avec des temps d'accompagnement individuel par structure (réalisés

à distance le plus souvent).

Rédaction : Dans quelle mesure le programme mis en œuvre a –t-il atteint ses

objectifs ?

Les formateurs ont tous développé des compétences d’ingénierie FOAD et aujourd’hui ils peuvent être

« personnes ressources » auprès de pairs si on les sollicite !

Ils ont expérimenté concrètement toutes les étapes de la scénarisation et de la médiatisation de

ressources pédagogiques pour la FOAD.

Le projet n’avait cependant pas vocation à les transformer en concepteur multimédia mais à leur

donner des clefs pour :

- scénariser des apprentissages autonomes en ligne, adapter leurs modalités de médiation,

- comprendre « comment ça marche la médiatisation » de façon à être capable de

communiquer leurs besoins à un concepteur multimédia, d’analyser des ressources en ligne,

savoir les intégrer opportunément dans une séquence, les compléter selon besoins,…

Au terme de cette 2ème phase du projet, il me semble que les formateurs ont vraiment dépassé ce

qui leur posait problème au départ : la remédiation des apprentissages à distance.

Les AFB sont des dispositifs ouverts et les équipes ont déjà des postures de médiateur mais ce n’était

pas pour autant évident de projeter dans les ressources l’accompagnement qui serait adapté. Les

formateurs ont dû revenir sur les divers besoins de régulation traités en présentiel, tout en intégrant

les besoins liés à l’environnement virtuel de la formation, aux outils multimédias… La fiche

« méthodo » pour construire le scénario d’une séquence qu’ils ont produite après retour sur

expérience, rend compte de leur cheminement.

Concernant l’offre, comme prévu on a défini sa structure et des éléments pour cadrer sa production

mais à ce jour il manque les ressources ! Celles qui ont été produites au cours du projet sont

opérationnelles (et en service actuellement) mais restent des « prototypes », et de toute façon, elles

sont insuffisantes pour couvrir les besoins.

Rédaction : Vous avez réalisé une carte heuristique qui nous offre une approche

très concrète du projet, on découvre notamment des fiches et des démos de

modules elearning créés.

Concernant le choix des outils : plateforme en ligne, création de ressources

médiatisées, utilisation de UDUTU, comment le choix a-t-il été fait par les acteurs

du projet?

Le choix de la plateforme elearning d’e-doceo a été motivé par le fait que les ressources sur étagère

louées la première année du projet étaient livrées sur ce LMS (Learning Management System). Ce

choix a été maintenu car l'environnement simple, facile à prendre en main, convient bien aux

utilisateurs et par ailleurs, la plateforme offre la possibilité de composer des parcours individualisés.

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Pour la création de ressources nous avions décidé de former les formateurs à un outil auteur gratuit :

le même pour tous afin de donner un cadre commun aux productions. Ce type de logiciel guide les

démarches de conception, facilite l'intégration de divers médias et génère des ressources à la norme

SCORM (donc utilisables sur divers LMS).

Nous avons opté pour UDUTU bien qu’il soit en en anglais parce qu'il fonctionnait aussi bien avec

Windows que Mac, qu'il permettait de proposer des activités d'apprentissage variées et d'intégrer

facilement du multimédia – du son en particulier.

Accès à la carte en ligne

Rédaction : L’accompagnement réalisé par la Région au travers de ce projet a

préconisé des actions de mutualisation de la part des organismes de formation,

comment cela a-t-il été mis en œuvre et accepté par les différents organismes?

Les organismes de formation participants au projet étaient demandeurs pour se lancer en FOAD : tous

ceux qui ont manifesté leur intérêt pour la démarche régionale y ont été associés.

Au démarrage, les actions de mutualisation préconisées concernaient : le partenariat des AFB avec le

réseau des P@T (Point d’accès à la téléformation), les financeurs en région (Conseil Régional et

DIRRECTE) souhaitant le développement de réponses de formation de proximité, via les P@T ; la

formalisation et le partage de bonnes pratiques sous la forme d'un kit du praticien à produire pour le

Forum Permanent des Pratiques.

Le partenariat avec les P@T préconisé en région répondait aux difficultés que les organismes

rencontraient pour maintenir leurs interventions dans les zones rurales. De plus, sur toute cette phase

du projet, nous avons bénéficié du soutien opérationnel du chargé de mission P@T en région,

Christophe Jourdain. La mise en relation des structures a pour beaucoup été facilitée par ce

portage institutionnel.

Quant à l’analyse des pratiques qui nous était demandée par l’ANLCI, les formateurs ont plutôt

apprécié la démarche après coup car elle leur a permis de valoriser les spécificités des dispositifs AFB.

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Dans le feu de l’action, ils étaient plus demandeurs de conseils opérationnels pour développer les

modalités de formation à distance.

Par contre la production de ressources mutualisées a été le choix des organismes, nous avons pris la

décision ensemble, à la suite du bilan fin 2009.

En fait, l’utilisation de la plateforme - une seule plateforme pour tous, louée par l’ERREFOM - avait mis

les formateurs en situation de travailler en toute transparence (chacun pouvant voir l’activité des

autres à tout moment), et, petit à petit, de co-construire des parcours combinant les ressources sur

étagère communes avec leurs propres ressources. Ces parcours profitaient à tous et étaient enrichis

par les uns et les autres indifféremment, suite aux retours des utilisateurs. Cette expérience a montré

concrètement à tous l’intérêt du partage des ressources.

Rédaction : Le projet arrive à son terme, pensez-vous qu’il puisse dorénavant se

déployer à plus grande échelle ?

Le déploiement de la FOAD dans les organisations est le principal objectif de la 3ème et dernière

phase du projet. Je pense qu’il est en bonne voie pour ceux qui restent mobilisés, malheureusement,

depuis février le projet ne regroupe plus que quatre organismes (contre 7 en 2009 et 5 en 2011).

Les premières années, nous avons eu du mal à obtenir de la part de toutes les directions qu’elles

projettent le développement de la FOAD dans leur organisation et qu’elles s’impliquent avec les

formateurs mobilisés sur le projet régional.

Les quatre directions qui ont maintenu leur participation se sont toutes fortement impliquées dans la

poursuite du projet régional ces derniers mois. Leur investissement financier est plus important (elles

compensent la baisse des financements régionaux) et elles ont toutes commencé à positionner des

moyens humains également plus importants : l’augmentation constante des effectifs d’apprenants

inscrits sur la plateforme depuis janvier l’atteste.

Concernant l’offre en ligne mutualisée, difficile de dire quelle tournure son développement va prendre.

Pour cette année encore, Marie-José Lefebvre a négocié pour le groupe projet la location de

(nouvelles) ressources sur étagère. Par ailleurs, une recherche de partenariats pour développer des

contenus en ligne est en cours: des contacts ont été pris avec l’équipe du projet DALIA (Rouen), une

proposition a été communiquée lors des journées du numérique organisées par l’ANLCI en février

dernier à Lyon.

On constate que les besoins des organismes de formation impliqués dans la lutte contre l’illettrisme

convergent. Il y aurait matière pour des projets de mutualisation à une plus large échelle que celle de

la région, des projets qui permettraient de pouvoir disposer pour des publics en situation d’illettrisme

de ressources (autres que disciplinaires et de type scolaire), facilement accessibles, dans l’esprit des

logiciels libres …

Rédaction : Merci Sophie, d’avoir bien voulu répondre à ces questions !