2

Dok

tor F

aust

et a

utre

s pet

ites p

ièce

s poé

tique

s

Doktor Faust et autres petites pièces

poétiques

Maryse T. Potet

13.76 604228

----------------------------INFORMATION----------------------------Couverture : Classique

[Roman (134x204)] NB Pages : 168 pages

- Tranche : 2 mm + (nb pages x 0,07 mm) = 13.76 ----------------------------------------------------------------------------

Doktor Faust et autres petites pièces poétiques

Maryse T. Potet

Mar

yse

T. P

otet

2 2

2 3

Doktor Faust

2 4

2 5

La Compagnie des Marionnettes Poétiques de

Dijon a présenté à Bayreuth son spectacle « Doktor Faust » les 14 et 15 août 1960 dans le cadre de l’« Internationales Jugendfestspiel » en liaison avec le « Festival Wagner », sur un texte de Maryse Potet, dans une mise en scène de Paul Vasil et avec un accompagnement musical d’André Amellér (opus 133)

L’émission « L’Avenir est à vous », de Françoise Dumayet/Jean-pierre Chartier et Georges Paumier, a consacré le 30 décembre 1961 un de ses reportages à la Compagnie des Marionnettes Poétiques de Dijon et à son spectacle « Doktor Faust ». Cette émission peut être consultée dans son intégralité (27 minutes) sur Internet www.ina.fr/Marionnettes Poétiques de Dijon / et peut être téléchargée. Cette émission comprend les interviews des principaux participants et de larges extraits du spectacle.

2 6

2 7

Prologue

Au ciel

Voix du premier Ange Sonnez trompettes de l’Eternité Car Dieu est grand

Voix du deuxième Ange Sonnez trompettes de l’Eternité Car Dieu est juste

Voix du troisième Ange Sonnez trompettes de l’Eternité Car Dieu est bon

Voix du premier Ange Voici Dieu, mes frères. Inclinez vous.

Apparition de Dieu

2 8

Chœur des Anges Plus belle, plus invincible qu’au premier jour Est la puissance de Dieu. Plus belle, plus incompréhensible qu’au premier jour Est la création de Dieu. Plus belle, plus grande qu’au premier jour Est la clémence de Dieu.

Paraît Méphisto qui s’incline devant Dieu

Dieu Que veux-tu Méphisto ?

Méphisto Je veux l’âme de Faust mon frère.

2 9

Scène I Dans le cabinet de Faust

Premier Tableau

Faust marche de long en large avec beaucoup d’agitation.

Faust

Nuit d’enfer brûlante de détresse. Tout est lu. La mort et la vie se tiennent par la taille et rient. Le secret est bien gardé. Et mon âme s’épuise de désir. Des formes merveilleuses glissent.

(image fugitive et floue d’une ronde de jeunes fillest)

Les saisir, les embrasser, enfin. O mes mains d’éternelle solitude. Le voile ne se déchirera-t-il donc jamais ?

Entrent les diablotins, émissaires de Méphisto.

2 10

Les diablotins

Nous sommes tes obéissants et fidèles serviteurs, Maître.

Faust

Chiens de l’Eternité, oui, vous m’êtes dévoués. Vous avez scellé pour moi le dragon de feu Il m’a transporté parmi les étoiles Que son sabot phosphorescent liait en gerbes Il m’a dévoilé la terre en un unique coup d’œil Et le l’ai vue cette terre Ronde comme une orange Tournant une valse stupide Parmi les étoiles. Ce que nul ne sait encore, moi je le sais. Vous avez mis à nu devant mes yeux étonnés La ridicule petite âme humaine Et les sept péchés capitaux m’ont parlé L’Orgueil avec sa voix trop chargé de désirs L’Avarice aux longs doigts couleur de vieil or La Colère plus rugissante que le lion Et l’Envie avec son visage jauni Et la Paresse belle comme une terre d’été Et la Luxure, la Luxure à la gorge de soleil.

Esprits, ne suis-je pas puissant parmi les puissants ? Moi qui connais les secrets de la Création Les secrets de la Terre Les secrets de l’Homme.

2 11

Esprits, je suis dieu Dieu de Science, dieu de Puissance.

Les diablotins (reprenant en chœur)

Tu es dieu, dieu de Science, dieu de Puissance

Lumière violente qui illumine Faust

Puis tonnerre. Noir. Ricanements off. Apparaît l’image d’une ronde de jeunes filles

Faust

Cette ronde de jeunes filles Qui tourne, tourne Au son de ma jeunesse perdue. Cette ronde des matins d’été Aux cheveux d’algues marines Au corps de soleil. Cette ronde Tourne Chante Pleure Dans mon cœur Le désir des sources fraîches Le regret des mousses douces. O ma jeunesse d’autrefois Tes pas de douceur retentissent sur mon cœur Et ton souvenir dévore mon corps perdu. Que ce soit le Ciel, que ce soit l’Enfer

2 12

Mais que je n’entende plus ce chien de mort qui hurle et me ronge.

O être comblé, comblé Dieu du Ciel, Dieu de l’Enfer, pitié.

Faust tombe évanoui.

Deuxième Tableau

Grand éclat de rire off. Méphisto en habit de simple voyageur, mais suivi d’une petite flamme « démoniaque » apparaît

Méphisto (aux démons)

Beau travail, démons.

(Il les libère d’un geste. Puis il s’avance vers Faust toujours évanoui et le contemple)

Le voilà donc mûr pour traiter Ce pot de science Tout ébréché de travail et d’insomnie. Gris non pas même de vin, mais de poussière.

(se parlant à lui-même) Et moi qui suis ignorant comme un péché S’il me parle latin, je suis perdu. La messe m’est plus inconnue que le petit orteil

de Dieu.

(à la flamme)

2 13

Quant à toi flammèche qui me poursuit comme un bienfait

Je t’en conjure Au nom de tous les Maudits de l’Enfer Ne te montre pas. J’entre ici sans carte de visite. L’Enfer ? Fumée sans feux ! La Damnation ? Mort éternelle ! Le Diable ? Mythe ! Mystification ! Bref, pour me résumer, signes particuliers, néant ! Tu as compris, signes particuliers, néant !

Il fait danser la flamme à la manière d’un chien à qui on veut faire attraper un morceau de sucre. Mouvement de Faust. Méphisto ouvre son manteau. La flamme court s’y cacher

Méphisto Chut. Le voilà qui s’éveille.

(Méphisto s’incline profondément devant Faust) Je suis ton serviteur, très savantissime Docteur.

Ta renommée m’a chatouillé les oreilles Et cela m’a fait bondir jusqu’à tes pieds.

Méphisto tombe aux pieds de Faust. Ce faisant, la flamme est découverte. Elle essaie vainement de rentrer dans le manteau.

Faust (tendant les bras vers cette flamme qu’il aperçoit) Cette flamme d’enfer !

2 14

Méphisto Quel Enfer est sans flamme, très savantissime

Docteur.

Faust cherche à attraper la flamme qui se dérobe. La flamme et lui tournent tous deux autour de Méphisto.

Faust Flamme d’enfer Dans mon bocal vert Parmi mes panacées d’outre-tombe Comme tu seras belle.

Méphisto (tiraillé) Arrêtez, Arrêtez donc ! Vous me secouez comme un goupillon. Par l’Enfer, je me sens devenir eau bénite. Ah ! Faust, je vais bien te calmer !

Grand geste. Entre un merveilleux papillon. Il vient chatouiller le nez de Faust qui le suit extasié

Faust Papillon Papillon Papillon de mon enfance Léger comme un souffle de Mai Fluide comme une eau douce Papillon de mes rêves Papillon de mes désirs

Faust cherche à attraper le papillon. Mais celui-ci

2 15

s’échappe et c’est Méphisto qui vient se mettre entre les mains tendues de Faust.

Faust

Encore toi, Que le diable t’emporte !

Méphisto

Attention qui parle du Diable, en voit la queue.

(Brève apparition d’une queue fourchue)

Faust

L’ami, ta compagnie sent le soufre Je préfère l’odeur de rose des jeunes filles au

printemps.

Faust chasse Méphisto qui disparaît. Mais celui-ci avant de disparaître fait un geste et on entend off une voix de femme sensuelle et tentatrice.

Voix de femme (off)

Cette grande force qui me pousse vers toi, Faust Cette grande force qui me tire du fonds des temps Vers ton regard plus étoilé qu’un ciel des Tropiques Faust, cette grande force, c’est l’Amour Et ta bouche m’attire comme un fruit trop mûr

Faust (cherchant d’où provient la voix)

Le rêve.

2 16

Le rêve de mes nuits crevées d’espoir.

Il tombe à genoux, les mains levées en prière

Troisième Tableau

Méphisto réapparaît, cette fois en grand costume de Diable.

Faust (apercevant Méphisto)

Toi ?

Méphisto (moqueur)

Toujours moi, toujours, Faust L’Enfer est partout, partout. Je frappe dans mes mains Et l’or plus chaud qu’un sang d’athlète Rutile sur ton corps ébloui.

(une pluie d’or tombe sur Faust)

Méphisto (maintenant tentateur)

Et la jeunesse, Faust, la jeunesse Légère comme une ombre de Jeune fille Souple comme la pousse nouvelle Douce comme le souvenir d’un jour heureux.

Faust Le rêve Le rêve de mes années trop lourdes.

2 17

Méphisto

Tant de rêves, Faust, tant de rêves ! L’homme est une machine à rêves. Il rêve les diamants de la Terre Il rêve la Femme Il rêve l’or Il rêve la jeunesse Puis il pleure ces étoiles une à une éteintes Mais le ciel reste vide et muet Et seul le Diable pleure avec lui. L’homme qui ne jouit pas, Faust L’homme qui ne vit pas N’est pas assez homme pour être digne de l’Enfer.

Faust (suppliant)

Seigneur Lucifer Donne moi ta puissance Donne moi la puissance de l’Homme.

Méphisto

Faust, mon frère…

Tonnerre. Fumigène…

Méphisto (prenant la main de Faust)

Je te donne la richesse, Faust Je te donne la science, Faust Que veux-tu encore ?