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N°51 SUPPLY CHAIN MAGAZINE - JANVIER-FÉVRIER 2011 44 Longtemps pratiquée par des bénévoles armés de leur bonne volonté, la logistique humanitaire se professionnalise et s’inspire du secteur privé. Elle peut même lui servir de modèle, notamment sur les aspects de gestion de crise. Une obligation de réussite Q u’est ce qu’une structure de solidarité ? « On répertorie deux grandes catégories d’acteurs : les ONG (Organisations Non Gouvernementales) humani- taires, représentées par des structures de taille très variable qui mettent en place des programmes d’aide et qui interviennent soit en cas de crise, soit dans le cadre d’un développement à plus long terme et les agences des Nations Unies, dont certaines sont très connues (Unicef, PAM, HCR, etc.), disposant de moyens structurés et qui peuvent intervenir sur de nombreux programmes dans le monde et coor- donner des ONG sur certains projets », pose Domi- nique Le Tainturier, Consultant spécialisé en logistique internationale (réseau Amaxa) et Ani- mateur de la commission maîtrise des risques de l’Aslog. Jean-Philippe Lézeau, Coordinateur pôle logistique & technique de Bioforce (Ecole de réfé- rence pour la formation en logistique humani- taire), précise que « le terme ONG est un abus de langage car peu d’associations fonctionnent à 100 % avec des fonds propres. La plupart sont également financées par des bailleurs de fonds (Communauté Européenne, etc.). Il vaut donc mieux parler d’OSI (Organisations de Solidarité Internationale) ». Les agences des Nations Unies sont des organisations intergouvernementales qui reçoivent majoritairement des dons de gouverne- Les distributions du PAM à Haïti © BRUNO STEVENS/COSMOS POUR LE PAM DOSSIER Logistique humanitaire

DOSSIER-51:Mise en page 1 - Supply Chain Magazine · main. Nous privilégions les fournisseurs locaux ... régulière en mesure de se charger du transport. Il est possible pour une

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Longtemps pratiquée par des bénévoles armés de leur bonne volonté, la logistique humanitaire se professionnalise et s’inspire du secteur privé. Elle peutmême lui servir de modèle, notamment sur lesaspects de gestion de crise.

Uneobligationde réussite Q

u’est ce qu’une structure desolidarité ? « On répertorie deuxgrandes catégories d’acteurs :les ONG (Organisations NonGouvernementales) humani-taires, représentées par desstructures de taille très variable

qui mettent en place des programmes d’aide et quiinterviennent soit en cas de crise, soit dans lecadre d’un développement à plus long terme et lesagences des Nations Unies, dont certaines sonttrès connues (Unicef, PAM, HCR, etc.), disposantde moyens structurés et qui peuvent intervenir surde nombreux programmes dans le monde et coor-donner des ONG sur certains projets », pose Domi-nique Le Tainturier, Consultant spécialisé enlogistique internationale (réseau Amaxa) et Ani-mateur de la commission maîtrise des risques del’Aslog. Jean-Philippe Lézeau, Coordinateur pôlelogistique & technique de Bioforce (Ecole de réfé-rence pour la formation en logistique humani-taire), précise que « le terme ONG est un abus delangage car peu d’associations fonctionnent à 100 % avec des fonds propres. La plupart sontégalement financées par des bailleurs de fonds(Communauté Européenne, etc.). Il vaut doncmieux parler d’OSI (Organisations de SolidaritéInternationale) ». Les agences des Nations Uniessont des organisations intergouvernementales quireçoivent majoritairement des dons de gouverne-

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ments et de quelques donateurs (entreprises etparticuliers). « Les organisations internationalespermettent de diffuser les rapports de pays à payslorsque les relations sont problématiques. Le PAMest une organisation humanitaire, et de ce fait,totalement apolitique », explique Tamara Kummer,Porte-parole du PAM (Programme AlimentaireMondial des Nations Unies) en France. Leur sta-tut quasi diplomatique leur facilite certainsaspects logistiques (douanes, etc.). En outre, ellesdisposent de moyens (humains, matériels....)importants. Toutefois, leur dépendance vis-à-visdes Etats donateurs peut parfois leur faire défautpour intervenir dans des pays peu enclins àaccepter indirectement l’aide d’États étrangers.

Urgence ou développement ?Deux grandes notions sont à distinguer : lesurgences, qui consistent à répondre à une crise etles programmes de développement, dont le but estd’aider durablement les populations. Erland Egi-ziano, Directeur logistique d’ACF (Action contre laFaim), les différencie de la façon suivante : « Onparle d’urgence lorsque la vie humaine est en dan-ger ». D’autres évoquent également une phase de « post-urgence ». Il n’existe pas de règles automa-tiques pour le passage de l’une à l’autre. La CroixRouge propose également sa propre terminologie :première urgence, urgence et développement. « Laréponse aux premières urgences repose sur 100 %

de réactivité. Elle est gérée principalement par lesiège et nos plates-formes. Pour les urgences, leslogisticiens présents sur le terrain ont davantage lamain. Nous privilégions les fournisseurs locauxdans les phases dites d’urgence et de développe-ment que nous traitons davantage en gestion deprojet plus classique », développe Mathieu Gre-nade, Responsable achat et logistique internatio-nal pour la Croix Rouge Française.

Une logistique complexeLe périmètre de la logistique humanitaire englobedavantage de notions que celui d’une logistique « classique » (achat, stock, transport, gestion deflotte, énergie, télécommunication, informatiqueet système d’information, sécurité, contrôle qua-lité, etc.) et la sphère des responsabilités est beau-coup plus importante. De façon générale, lagrande spécificité de la logistique humanitaire serésume en un mot : imprévisibilité. Parmi lesautres difficultés à surmonter, la transparencetotale vis-à-vis des donateurs, qui s’attendent àvoir leurs fonds immédiatement utilisés, rend par-fois difficiles des investissements à long terme (ex : outils informatiques). Xavier Roussel, Mana-ger chez KYU Associés, évoque une autre problé-matique : « Le monde humanitaire n’échappe auphénomène de concurrence. Elle s’exprime avanttout par la recherche de visibilité médiatique, quiconditionne fortement la mobilisation des dons.

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Handicap International s’engage sur trois à cinq ans en Haïtipour contribuer au relèvement du pays.

Alain Grall,Consultant et forma-teur en Supply Chainet logistique d’urgencechez Syskalys : « L’ONG doit sefier aux canaux decommunication(Internet, presse,Nations Unies,autres ONG,ambassades des pays, centremétéo, etc.). Si les informationsmanquent de précisions, elle envoie surplace une missionexploratoirepour évaluer lapertinence d’uneintervention […] »

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Elle s’applique également au domaine des achatset des approvisionnements, les denrées de pre-mière urgence pouvant être rapidement en pénu-rie suite à une catastrophe majeure ».

Quid des approvisionnements ?A défaut de prévoir, il est nécessaire d’anticiper enréservant des capacités. Les grosses associationsoffrent de la visibilité aux fournisseurs. « Malgréune forte résistance à ce genre de pratiques, si uneONG utilise généralement entre 500 et 1.000 tentespar an, il est raisonnable de réserver en avance unecapacité d’approvisionnement de 500 tentes. Il serabeaucoup plus efficace de procéder ensuite parajustements sur cette base en fonction de lademande réelle », indique Xavier Roussel. Notonsque les approvisionnements sont traités différem-ment selon leur degré d’urgence. Pour les crises, lesagences des Nations Unis et quelques grosses ONGpré-positionnent des stocks d’urgence sur desplates-formes à travers le monde, sur des emplace-ments considérés comme stratégiques (Panama,Hong-Kong, Emirats Arabes Unis, Kuala Lumpur,les Caraïbes, etc.) en termes de facilités douanières,de localisation géographique et de stabilité poli-tique ; ou chez leurs fabricants qui anticipent lesproductions ; ou encore chez des distributeurs.Pour les associations de petite et moyenne taille,limitées par leur trésorerie, l’immobilisation destocks est moins évidente. « Les approvisionne-ments réguliers et récurrents pour nos missions sefont directement depuis les fournisseurs. Enrevanche, pour garantir la réactivité immédiaterequise lors des réponses aux urgences, nous dis-

posons de nos propres stocks, pré-positionnés cheznotre dépositaire localisé à Lyon ou sur l’une desplates-formes mise à disposition par le PAM(Dubaï, Subang, Panama city, Accra). En outre,dans le cadre d’un plan de contingence adapté àchaque contexte, nous possédons des stocks tampondans chacune des capitales des pays où nous inter-venons », confie Erland Egiziano. Afin d’accélérerla cadence, l’utilisation de kits (chirurgicaux, pourle choléra, de cuisine, d’hygiène…) est une pratiqueextrêmement courante dans l’humanitaire. « Lamajorité de nos approvisionnements sont réalisésavec des kits préfabriqués, plus faciles à utiliserpar les équipes sur place », atteste Mathieu Gre-nade. En cas de crise, le mode de transport de pré-dilection est l’aérien. Une fois la phase d’urgenceou de crise passée, le transport bascule sur le mari-time « six fois moins coûteux que l’aérien mais avecun délai d’acheminement jusqu’à 10 fois plus lentpour ce qui concerne les pays enclavés», selon AlainGrall, Consultant et Formateur en Supply Chain etlogistique d’urgence chez Syskalys. Pour les pro-grammes de développement, les organisations neprévoient pas de stocks tampons.

Des aspects « terrain » essentielsLes interventions sur le terrain présentent aussileurs spécificités et leurs contraintes. Alain Grallévoque le cas où l’ONG n’est pas sur place au moment de la catastrophe : « Elle doit se fier aux canaux de communication (Internet, presse,Nations Unies, autres ONG, ambassades des pays,centre météo, etc.). Si les informations manquentde précisions, elle envoie sur place une missionexploratoire pour évaluer la pertinence d’une inter-vention. Ces experts sont capables de prendre trèsrapidement une décision ». En cas d’intervention,elle sollicite alors son stock pré-positionné dans lespays avoisinants ou chez ses fournisseurs. Une desdifficultés est de trouver une compagnie aériennerégulière en mesure de se charger du transport. Il est possible pour une ONG d’affréter un avion,mais le budget est extrêmement conséquent. Il fautensuite évaluer les conditions d’atterrissage(moyens de déchargement sur place, encombre-ment de l’aéroport, etc.). Il arrive que les ONG choisissent d’atterrir dans l’aéroport d’un pays limi-trophe à celui touché par la crise (ex : SaintDomingue pour Haïti) pour des raisons d’engorge-ment. Au moment d’une crise, les aspects doua-niers sont généralement facilités, même si deslourdeurs peuvent allonger les délais. L’approcheest différente pour la logistique de développementoù les produits importés sont majoritairementtaxés. Une fois sur place, les étapes s’enchaînentméticuleusement. « Au PAM, nous suivons lesétapes d’un plan opérationnel. La première consisteà évaluer les infrastructures logistiques opération-

Jean-PhilippeLézeau, Coordinateur pôlelogistique & techniquede Bioforce :« Le cluster logistique proposeun outil en ligne[…] fournissantdes informationstrès précises sur lasituation des pays(géographiques,politiques, infrastructureslogistiques, etc.) à « risque » »

Dominique Le Tainturier,Consultant spécialiséen logistique internationale (réseau Amaxa) et Animateur de la commissionmaîtrise des risquesde l’Aslog :« On répertoriedeux grandes catégories d’acteurs :les ONG […]et les agences desNations unies »

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Xavier Roussel,Manager chez KYU Associés : « Si une ONG utilise généralemententre 500 et 1.000 tentes par an, il est raisonnable deréserver en avanceune capacité d’approvisionne-ment de 500 tentes »

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Mathieu Grenade, Responsable achat etlogistique international,Croix Rouge Française :« La majorité de nos approvi-sionnements sontréalisés avec deskits préfabriqués,plus faciles à utiliser par leséquipes sur place »

Graan Jaff, Coordinateur LogistiqueRDC au PAM :« Le cluster estune plate-formed’échanges d’informationslogistiques, présentesur un pays, quipeut devenir opérationnelle en étant activéepar le coordinateurrésidant desNations Unies »

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Tamara Kummer, Porte-parole du PAM en France :« Les organisationsinternationalespermettent de diffuser les rapports de pays à payslorsque les relations sont problématiques »

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Erland Egiziano,Directeur Logistiqued’ACF :« On parle d’urgence lorsquela vie humaine est en danger »

nelles sur place (ports, routes, entrepôts, opérateursde vol, etc.) et les moyens étatiques (douanes, etc.).Il s’agit donc de collecter un maximum de données.Si nous sommes déjà implantés dans le pays, nousavons accès à nos études mises à jour annuellement.Nous dessinons alors un réseau (ports d’entrée,dimensionnement et positionnement d’entre- pôts,points d’entrée des camions...) et nous établissonsnotre base et notre personnel », détaille Graan Jaff,Coordinateur Logistique RDC au PAM. L’espacehumanitaire se réduisant de plus en plus, assurer lasécurité des équipes devient un point d’attentionmajeur. La sécurité concerne également les biens. Ilest parfois nécessaire d’escorter les convois ou deplacer les espaces de stockage sous haute sécurité.Par ailleurs, si l’usage de l’énergie, des télécommu-nications, des systèmes d’information… est banalen Occident, leur coupure peut poser de vraies dif-ficultés dans les pays d’intervention.

Le cluster logistique, une aide cibléeFace à la multitude des acteurs de solidarité sur unlieu de crise, les Nations Unies ont mis en place ily a quelques années des « clusters » correspondantà des groupes de travail thématiques dont le butest de coordonner les informations et de limiter lesdoublons. Le cluster logistique est piloté par lePAM mais toutes les ONG sont invitées à y êtrereprésentées. « Le cluster est une plate-formed’échanges d’informations logistiques, présente surun pays, qui peut devenir opérationnelle en étantactivée par le coordonnateur résident des NationsUnies », complète Graan Jaff. Toutefois, certainesONG ne souhaitent pas s’y associer de peur de setrouver sous la tutelle de l’ONU et de perdre leurindépendance. Pourtant, les informations fourniessont précieuses. « Le cluster logistique propose unoutil en ligne (http://www.logcluster.org/) fournis-sant des informations très précises sur la situationdes pays (géographiques, politiques, infrastructureslogistiques, etc.) à « risque ». Pour les opérations encours, un accès aux informations et aux décisionsprises par le cluster est également mis à disposi-tion », résume Jean-Philippe Lézeau.

Evolution de la fonction logistiqueLa fonction logistique est reconnue comme une fonc-tion stratégique depuis peu. L’amélioration du niveaude recrutement et de la qualité des formations leprouve. C’est le cas de la formation dispensée par Bio-force. « Depuis quatre/cinq ans, la maîtrise de l’an-glais est un pré-requis pour intégrer la formation.Outre les épreuves écrites en anglais et en français, lescandidats se soumettent à un test d’informatique, unentretien, une épreuve technique (mécanique, télécom,etc.) et une épreuve sportive (course à pied, nata-tion...) », se félicite Jean-Philippe Lézeau. La forma-tion ne prétend pas être exhaustive mais veut fournir

une « boîte à outils » sur le périmètre couvert par lalogistique (maintenance et utilisation d’équipementstechniques, mise en place et conduite de la chaîned’approvisionnement, gestion des équipes et des dif-férents aspects sécuritaires, management de tâchesadministratives et financières, etc.). La polyvalenceest donc le mot d’ordre ! A cela, il ne faut pas oublierd’ajouter les qualités liées au savoir être (bons sens,débrouillardise, efficacité, goût du contact, espritd’équipe, autonomie, humilité et réactivité).

Secteurs humanitaire et privé : quelle complémentarité ?Par rapport au privé, la priorisation des enjeux(coût, qualité, délai) diffère sensiblement puisqueavant tout une association de solidarité se doit demaximiser son taux de service. Une des diver-gences majeures concerne le stock. D’un côté, lesecteur privé tend vers le flux tendu et le « zérostock » et de l’autre, l’humanitaire pallie lesmanques de prévision en en constituant. Lamise en place très rapide d’une logistique tem-poraire performante est propre à la logistiquehumanitaire. « L’Aslog souhaite créer une com-mission « logistique solidaire gestion de crise etdéveloppement » dont l’objectif est de partagerentre les compétences des personnels de l’hu-manitaire qui connaissent parfaitement bien lesréponses à donner en cas de crise dans dessituations délicates et celles des entreprisesindustrielles et commerciales qui sont générale-ment rodées à la gestion de la chaîne logistiqueinternationale (gestion des flux, organisationdes transports, système d’informations, aspectsdouaniers et fiscaux…) », confie Dominique LeTainturier. Deux logistiques bien différentes,mais sources de retours d’expériences très com-plémentaires. ■ Julia Fustier

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De par sa taille et ses activités, MSF jouedans la cour des grandes ONG françaises.Pour ses problématiques logistiques, elles’appuie sur l'entité MSF Logistique. Cettedernière lance actuellement un projet dedéveloppement majeur.

La logistique n’est pas seulement l’affaire desentreprises « classiques » ! Médecins SansFrontières (MSF) le prouve via MSF Logis-

tique qui assure l’approvisionnement des missionsMSF en matériels et médicaments dans le cadredes programmes courants et des interventionsd’urgence. « MSF s’appuie sur une organisationlogistique composée de professionnels. Toute l’an-née et partout dans le monde, nos équipes ontbesoin, pour porter secours aux populations endétresse, de médicaments et de matériels fiablesen quantité suffisante et adaptés, ainsi que depersonnels qualifiés. En moyenne, l’approvision-nement et la logistique représentent 30 % du coûtd’un programme d’intervention », explique FilipeRibeiro, Directeur Général de MSF.

Des moyens à la hauteur des enjeuxCinq centres opérationnels (Paris, Genève, Barce-lone, Bruxelles, Amsterdam) décident des inter-ventions de MSF dans le monde. Ces structuressont épaulées physiquement par trois plates-formesd’approvisionnement (Bordeaux-Mérignac, Bru-xelles, Amsterdam) et par deux relais régionaux(Panama, Dubaï). Ces plates-formes assurent l’ap-provisionnement des produits médicaux et non

MSFUne logistique sans frontières

médicaux, 24h/24 avec des articles répondant à descritères stricts en termes de qualité, de fiabilité et dedisponibilité. A ce propos, Bruno Delouche, Direc-teur général adjoint de MSF Logistique, indiqueque : « Lors du référencement des produits, nousvalidons tous les produits pré-qualifiés par l’OMS.Par ailleurs, nous entérinons les médicaments missur les marchés des pays hautement régulés(Europe, Amérique du Nord, Japon, Australie, parexemple). Pour les autres, nous disposons de notrepropre système de validation ».

Les kits : une réponse aux urgencesDes stocks d’urgence sont disponibles en perma-nence pour répondre aux crises. « 640 tonnes destock d’urgence sont entreposés sur la plate-formede Bordeaux-Mérignac », illustre Filipe Ribeiro. Ilssont constitués en grande partie de kits préala-blement préparés. « Ces kits permettent lors desurgences d’accélérer les processus et de déchargerle terrain de sa « check list ». Notre engagementvis-à-vis du siège est de rendre disponible ce stockd’urgence à n’importe quel moment », complèteBruno Delouche. Ainsi, le site de Bordeaux-Méri-gnac (33) est dédié à deux activités principales :préparer les commandes et produire des kits.

Une politique de standardisation des produitsLes produits utilisés (80 % médicaux et 20 % nonmédicaux) proviennent de 450 fournisseurs detoute origine. Du cachet de paracétamol auxseringues, en passant par la nourrice d’eau, les

Site de Bordeaux-Mérignac :reconstitutiondes conditionsterrain pour la formation

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16.000 articles référencés se caractérisent par leurtrès forte hétérogénéité. L’ONG s’efforce d’appli-quer un principe de standardisation. « Nos pro-duits doivent être adaptés à des terrains d’inter-vention précaires, à des conditions extrêmes entermes de sécurité, de température, de transportet de stockage », détaille Filipe Ribeiro. Cette poli-tique simplifie la comptabilité, facilite l’utilisationet la maintenance.

Bordeaux-Mérignac : un centre de formation...Le site de Bordeaux-Mérignac, le plus important deMSF, est opérationnel depuis 1992. Ses 35.000 m2

de surface regroupent deux activités principales :une centrale d’approvisionnement et un centre deformation (Ceforlog). 90 personnes travaillent à plein temps sur le site (acheteur, pharmacien,responsable qualité, exploitant fret, électricien,logisticien, responsable d’entrepôt, magasinier,informaticien, responsable de formation, métierssupports et administratifs …). Le centre de forma-tion dispense les méthodes et les outils aux volon-taires pour l’exercice de leur mission sur le terrain.« Ces formations vont au-delà de l’aspect théo-rique puisque des situations terrain sont mises enscène afin de familiariser les stagiaires avec lematériel utilisé sur place (ex : cellules d’hôpitalmobile) », commente Bruno Delouche.

… et une centrale d’approvisionnementLe bâtiment dédié à la logistique, agréé établisse-ment pharmaceutique sous douane, occupeaujourd’hui 5.000 m2 sur le site. Les produitsmédicaux y sont réceptionnés, stockés, préparéspuis expédiés. Par ailleurs, 3.000 m2 supplémen-taires sont loués à quelques kilomètres du site, àHaillan, pour traiter le matériel non médical. Lescontrôles qualité à la réception sont effectués avecle plus grand soin. « Certains produits sont livrésdirectement du fournisseur à la destination finale(environ 26 % des volumes), souvent pour desproduits « autonomes » (seringues et vaccins pourune campagne de vaccination) ou pour des pro-duits non sensibles et en quantité importante (ex : 5.000 tentes.) dans le cas d’opérations d’ur-gence. Pour les produits médicaux, c’est extrême-ment rare », développe Bruno Delouche. L’ERPNodhos, de l’éditeur SEI Fagor, couvre les activi-tés de Supply Chain en interne (entrepôt, trans-port, approvisionnement, planification, relationclient). C’est lui qui génère les propositions derangement dans les palettiers. Suivent ensuite lesétapes de préparation de commandes et/ou la pro-duction de kits. « La partie emballage/étiquetageest un point d’attention à ne pas négliger. En effet,nous expédions régulièrement des produits ditsréglementés et/ou sous température contrôlée.

BrunoDelouche,Directeur GénéralAdjoint de MSF Logistique : « Ces kits permettent lorsdes urgences d’accélérer les processus et de décharger le terrain de sa « check list ».Notre engagementvis-à-vis du siègeest de rendre disponible ce stockd’urgence à n’importe quelmoment »

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C’est pourquoi, nous avons à disposition desexperts qui maîtrisent les réglementations inter-nationales et les normes à respecter », ajouteBruno Delouche.

Une gestion soignée des produits non standardsLes produits dangereux, les stupéfiants et les psy-chotropes sont rangés et préparés à part. Certainsproduits sont stockés dans des chambres froides

MSF en quelques motsCréée en France en 1971, Médecins Sans Fron-tières (MSF) est une organisation non gouver-nementale (ONG) qui apporte une assistancemédicale aux populations en détresse dans le casde catastrophes naturelles (tremblement deterre, cyclone, inondation…), conflits (réfugiésdéplacés…), épidémies/endémies (choléra, palu-disme, méningite, sida …),malnutritions, etc. MSFintervient dans 75 pays pour répondre auxbesoins des populations en déployant des activi-tés médico-chirurgicales et nutritionnelles (hôpi-taux, dispensaires, camps de réfugiés, traitementdes déchets, approvisionnement en eau potable,distribution d’abris et de matériel de premièrenécessité). ■ JF

Déchargementd’un bateau

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(2 à 8°C) puis préparés séparément dans des « Ice Packs ». Des enregistreurs de température ysont intégrés afin de suivre à distance la tempé-rature et de mettre en quarantaine si nécessaire.Les produits « froids » sont approvisionnés systé-matiquement en avion. Ceux avec un degré d’ur-gence également. En revanche, pour les missionsà moyen terme, le transport se pratique par voiemaritime par conteneurs « reefer » maintenant latempérature interne à 25°C. « Concernant les expé-ditions aériennes, nos produits quittent Bordeauxsur des lignes régulières et transitent ensuite parles hubs européens (Paris, Londres, Francfort, etc.).Pour les urgences, il arrive que nous affrétionsnous-mêmes un avion pour expédier directementles marchandises sur le terrain. Dans ce cas, nouschoisissons des appareils adaptés aux conditionsd’atterrissage », ponctue Bruno Delouche.

Un projet de développement majeurAvec en moyenne 5.000 tonnes expédiées par andans 75 pays, 16.000 articles référencés, un volumed’affaires de 63 M€ prévu pour 2010 et 180 stagiairesformés par an, MSF Logistique constate depuis 2006une saturation du stockage et un besoin croissantde formation pour les stagiaires. Ces raisons ontpoussé l’ONG à lancer un projet d’extension du site.A terme, il devrait atteindre 67.000 m2. « Le projet dedéveloppement consiste à créer un nouvel entrepôtpharmaceutique grâce auquel la capacité totale destockage atteindra les 11.000 m2, soit 4.000 palettesde médicaments supplémentaires. Les deux entre-pôts (l’actuel et le nouveau) seront reliés par une

Entrepôt de Bordeaux-Mérignac : stockage

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Quelques chiffres clefs de MSF (2009)

■665 M€ de recettes financées par :- Fonds privés (86 %)- Fonds institutionnels (12 %)- Autres (2 %)

■22.462 postes sur le terrain dont :- 57 % médical- 43 % non médical

■7.509.512 consultations externes■292.347 patients hospitalisés

MSF Logistique : le bras armé de MSF !

■Association à but non lucratif (loi 1901)créée en 1986 à Bordeaux-Mérignac

■Assure la fourniture de produits et servicesnécessaires au fonctionnement des missions,dans le cadre de la politiqued’approvisionnement du mouvement MSF

● Pour les opérations d’urgence- Produits de type « kits »- Utilisation de stocks réservés« stock d’urgence »

- Mise à disposition pour expédition sous 24 heures

● Pour les programmes courants- Produits de type « article (vrac) »- Utilisation du stock « général »- Mise à disposition pour expéditionsous quatre semaines

zone couverte de manœuvre. En outre, le site seraréaménagé afin de rationaliser les flux. Par ailleurs,les surfaces de formation seront également agran-dies pour accueillir sur le site plus de stagiaires etd’experts jusque-là basés au siège parisien », résumeBruno Delouche. 12,6 M€ d’inves- tissement sontnécessaires. 6 M€ sont pris en charge par la fonda-tion MSF, 3,6 M€ le seront par les collectivités ter-ritoriales et les 3 M€ restants, par des entreprisesmécènes.

Appel aux dons !MSF Logistique lance donc un appel aux entre-prises souhaitant participer à cette belle aventure.L’action est très concrète puisqu’un don de 800 € (soit un coût de 320 € grâce à la fiscalitéattractive) permet de financer un emplacementmécène. Les travaux pour la partie entreposagedébuteront à la fin du premier trimestre 2011.N’hési tez pas à vous rendre sur le s i tewww.msf.fr/plateforme-logistique pour plus derenseignements ! ■ Julia Fustier

Filipe Ribeiro,Directeur Général de MSF : « MSF s’appuie surune organisationlogistique composée de professionnels […].En moyenne, l’approvisionne-ment et la logistique représentent 30 %du coût d’un programmed’intervention »

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Les images du séisme d’Haïti ont fait le tourde la planète et ont mobilisé une myriaded’associations et d’ONG. On connaissaitHandicap International pour ses interven-tions liées à la santé et à la protection despopulations handicapées et vulnérables. Sup-ply Chain Magazine vous fait découvrir uneautre facette de cette association : son orga-nisation logistique.

janvier 2010, 16 h 53. Haïti est frappée parun tremblement de terre de magnitudesept sur l’échelle de Richter. Son

épicentre est situé à 15 kilomètres de la capi-tale Port-au-Prince. Responsable de près de 230.000 morts et de plus de 300.000 blessés, ceséisme est le plus violent enregistré dans la régiondepuis 200 ans. L’équipe d’Handicap International,déjà présente, sort indemne de cette catastrophe. « Nous étions sur place depuis les cyclones de2008 et menions un projet (plate-forme inter-agence) en partenariat avec le PAM (ProgrammeAlimentaire Mondial) dans le cadre du clusterlogistique (système de coordination humanitaire,qui rassemble par thématique les partenaires del'aide humanitaire, afin d'organiser la réponse defaçon pratique et opérationnelle). Il s’agissait d’as-surer le transport de marchandises (alimentation,

hygiène, assainissement, etc.) dans les zones difficilement accessibles grâce à une flotte de 50 camions de type 6x6 tout-terrain pouvanttransporter chacun 3,5 tonnes. Le PAM était lebailleur qui finançait le projet et nous étions char-gés de sa gestion », raconte Benoît Aurenche,Coordinateur de la plate-forme inter-agence pourHandicap International et présent en Haïti entreavril 2009 et juillet 2010. Dans les heures qui sui-vent le séisme, le siège lyonnais de l’associationdécide de débloquer des fonds d’urgence et de ren-forcer son équipe en Haïti en envoyant dès le 14janvier un Chef de projet spécialiste de la prise encharge des blessés, puis des professionnels de laréadaptation physique et des logisticiens. Il s’agitde la plus importante mission de l’histoire d’Han-dicap International. La réponse de l’association àla catastrophe repose sur trois volets principaux :l’assistance aux blessés et aux personnes vulnéra-bles, l’aide aux besoins de logement des popula-tions et la gestion d’une plate-forme logistique detransport et d’aide humanitaire.

Des moyens logistiques renforcés au moment de l’urgenceLa « plate-forme logistique » était constituée avantle séisme de quatre bases opérationnelles situéesà Port-au-Prince, Cap-Haïtien, Jacmel et aux

Handicap InternationalUne crise après l’autre

Un soutien aux personnesblessées, amputéeset handicapéesen Haïti :82.000 séancesde rééducationphysique et desoins de base

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Gonaïves qui géraient la flotte de camions inter-agences. Suite à la catastrophe, le PAM a mis àdisposition d’Handicap International deux entre-pôts de 2.500 et 3.000 m2. Handicap Internationalen a assuré la gestion. Ces espaces de stockageétaient proposés aux acteurs humanitaires defaçon temporaire. Le premier a été repris par lePAM en juin pour être transformé en abri-anticy-clonique. Le second a été fermé en septembre. Enoutre, la fondation Clinton a mis à disposition unevingtaine de camions-plateaux, capables detransporter huit tonnes de fret et principalementutilisés dans les zones urbaines. Ils ont été trèsutilisés pour désengorger l’aéroport les premiersjours. Au cours des trois premiers mois, l’achemi-nement concernait essentiellement de la nourri-ture, du matériel de première nécessité, des tentes,des kits d’hygiène et de santé, des semences et desoutils. A partir de mi-avril, il s’agissait plutôt dematériel concernant le logement ou le relogementdes sans-abris, comme des équipements deconstruction d’abris temporaires.

Chronologie d’une criseSelon Benoît Aurenche, « les premières heuresaprès le séisme ont été mises à contribution pourretrouver sa famille ». « La première prérogativeétait de répondre aux besoins des équipesdéployées sur le terrain en leur assurant desmoyens de transport, des logements et de la nour-riture », explique Benoît Darrieux, présent à Haïtidans la première équipe d’intervention en janvieret février 2010 en qualité de Logisticien pour Han-dicap International, puis comme Coordinateur dela plate-forme inter-agence de mi-juin à fin sep-tembre 2010. Les tâches se sont ensuite enchaî-nées par ordre de priorité. Le fret arrivait surl’aéroport de façon désorganisée et sans nécessai-rement d’informations au préalable. La prioriténuméro un était donc de le désengorger. « Lecontexte était extrêmement complexe car Port-au-Prince était complètement détruit. Notre maisondes expatriés était démolie. Il a fallu s’organiserrapidement et dimensionner la logistique en fonc-tion de la situation sur place », évoque BenoîtDarrieux. Les systèmes de communication sonthors d’usage la première semaine, obligeant lesintervenants d’Handicap International à commu-niquer par téléphone satellite. Rapidement, ladécision d’ouvrir les deux entrepôts est prise. Larecherche de ces bâtiments mobilise quelquesjours supplémentaires. Idem pour leur sécurisa-tion. Les entrepôts sont opérationnels fin janvier2010. Le personnel est alors recruté. Les manu-tentionnaires et la gestion sont confiés à desexpatriés de l’association. Près de 65 personnestravaillent sur ces deux sites. Heureusement, lePAM déjà sur place avant le séisme, possède des

Handicap Internationalen bref

« Handicap international est une association desolidarité internationale indépendante, qui inter-vient dans les situations de pauvreté et d'exclu-sion, de conflits et de catastrophes. Œuvrant auxcôtés des personnes handicapées et des per-sonnes vulnérables, elle agit et témoigne, pourrépondre à leurs besoins essentiels, pour amé-liorer leurs conditions de vie ». ■(Source : Handicap International)

Un soutien aux personnesblessées, amputées

et handicapées en Haïti■ Intervention d’une équipe de 540 personnes,

dont 60 expatriés■ 82.000 séances de rééducation physique

et de soins de base■ 10.000 blessés bénéficiaires de soins

de réadaptation fonctionnelle■ Participation de 25.000 personnes

aux séances de soutien psychosocial

Benoît Darrieux, présent à Haïti dans la premièreéquipe d’intervention en janvier et février 2010 en qualité de Logisticien pour Handicap International, puis comme Coordinateur de la plate-forme inter-agence de mi-juin à fin septembre 2010 :« La première prérogative était de répondre aux besoinsdes équipes déployées sur le terrain en leur assurantdes moyens de transport, des logements et de la nourriture » © S. SOMMELA /HANDICAP INTERNATIONAL

Anne-Sophie Le Mouel, Coordinatrice de la plate-formeinter-agence de débutoctobre à mi décembre 2010 : « Dès que l’épidémie de choléra a étédéclarée, nousavons positionnédes camions dansles zones touchéesafin d’être disponibles pour le transport du matériel despartenaires »

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stocks de nourriture dans tout le pays qui sontutilisés les deux premières semaines. « C’est lapremière fois que je pilotais un projet de cetteenvergure. Les premiers jours, nos heures de som-meil étaient comptées », se souvient BenoîtAurenche. Pas facile de tenir le coup dans cesconditions de fatigue et de stress. Une fois les clefsdes entrepôts en main, une formation du personnelest nécessaire. Au démarrage, l’informatique esttotalement absente. Mais rapidement, HandicapInternational met en œuvre son logiciel « maison »de gestion des stocks. « Il permet de suivre lesentrées et les sorties. Il gère par lot (lot de 10 palet-tes pour une ONG par exemple) et non au détail. Leparamétrage est simple. Sa prise en main estrapide », développe Benoît Darrieux. Il n’est pasutile de complexifier davantage les solutions cartoutes les palettes sont stockées au sol, il n’y a pasde rack et chaque lot prend suffisamment de placepour être identifiable visuellement. A ce stade,Handicap International gère donc l’acheminementd’aide humanitaire ainsi que le stockage tempo-raire pour le compte d’une centaine d’organisations

(Agences onusiennes, Action Contre la Faim, Cari-tas, Croix-Rouge, Food for the Poor, Médecins duMonde, Mercy Corps, Oxfam, etc.).

Une nouvelle contrainte : le choléraMais un malheur n’arrivant jamais seul, la crise ducholéra a pris le relais et sévit depuis mi-octobre2010. « La sortie de crise humanitaire, initialementprévue à l’automne, a été retardée par une succes-sion d’événements dramatiques pour le pays : lesintempéries, le climat de violence et le choléra »,observe Jean-Marc Boivin, Directeur général deHandicap International France. 400 tonnes de maté-riel (kits d’hygiène, solutions orales de réhydrata-tion, médicaments, nourriture, etc.) dans le cadre dela crise du choléra ont été transportées depuis le 22 octobre 2010, grâce à la plate-forme de transport,pour une vingtaine de partenaires (ONG internatio-nales, Agences Nations Unies, Protection civile haï-tienne, Direction de l’eau et de l’assainissementhaïtienne, etc.). « Dès que l’épidémie de choléra a étédéclarée, nous avons positionné des camions dansles zones touchées afin d’être disponibles pour letransport du matériel des partenaires. Ces camionssont retournés dans leurs bases respectives ennovembre et font des rotations régulières à lademande des partenaires. Nous avons également misen place un système de roulement des chauffeursafin d’être opérationnels 7 jours sur 7, sur une basede libre consentement, pour conduire dans les zonescontaminées. […] Nous avons également mis enplace des mesures de protection des équipes : sensi-bilisation sur les mesures et les consignes, puisremise à jour hebdomadaire, mise à disposition dematériel dans les camions (eau potable pour la bois-son et l’hygiène corporelle, savon, gel liquide désin-fectant, pastilles de purification d’eau, solutionsorales de réhydratation…) », raconte Anne-SophieLe Mouel, Coordinatrice de la plate-forme inter-agence de début octobre à mi-décembre 2010.

Une action sur la duréeL’urgence n’a donc jamais cessé au cours de l’an-née 2010. Handicap International s’engage surtrois à cinq ans en Haïti pour contribuer au relè-vement du pays. L’action de l’association évoluerapar paliers successifs vers des activités à plus longterme. La mise en place d’un habitat temporairedigne pour les populations sinistrées isolées ouvulnérables deviendra un axe majeur. L’accompa-gnement et la rééducation des blessés continue-ront, en se concentrant sur les cas les plus graveset les personnes handicapées. Début 2011, l’asso-ciation proposera des formations diplômantes aupersonnel haïtien de rééducation et d’appareillage.L’objectif est de renforcer les capacités des pro-fessionnels haïtiens et de leur transférer à terme lagestion de ces projets. ■ Julia Fustier

Chiffres clefs de la logistique■ 20.000 tonnes d’aides humanitaires

acheminées depuis le 14/01/10, pour le compte d’une centaine d’organisations

■ 400 tonnes d’aides spécifiques contre le choléra transportées depuis le 22/10/10

■ 5.000 tentes distribuées à plus de 26.000 personnes et 30.000 matériels diversà plus de 43.000 bénéficiaires

■ 36 tonnes de nourriture pour plus de 10.000 personnes

■ 4.000 bénéficiaires des projets de travailcontre rémunération (« Cash to Work »)

■ 80 habitats transitoires, pour 330 bénéficiaires

Benoît Aurenche, Coordinateur de la plate-forme

inter-agence pour Handicap International et présent en Haïtientre avril 2009 et juillet 2010 :

« Nous étions sur placedepuis les cyclones de 2008

et menions un projet (plate-forme inter-agence)

en partenariat avec le PAM(Programme Alimentaire

Mondial) dans le cadre ducluster logistique […]»

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DOSSIERLogistique humanitaire

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