52
Jérémy Stauffacher Droit Commercial Tutorat Droit Commercial Cas n° 1 Le premier élément est la fondation de la société en nom collectif (art. 552 ss CO). En droit commercial, on distingue société de personnes et société de capitaux. La société en nom collectif est une société de personnes. Dans ce cas, on s’intéressera surtout aux rapports envers les tiers (la banque et l’oncle dans ce cas-ci). L’oncle est un créancier personnel (art. 572 CO) alors que la banque est un créancier de la société (art. 568 CO). Les associés ont une responsabilité solidaire qui porte sur tout leur patrimoine (au contraire d’une SA, société de capitaux). L’art. 568 al. 1 fixe le principe alors que l’al. 3 pose une condition pour rechercher les associés personnellement. Les créanciers doivent donc d’abord rechercher la société avant de rechercher personnellement un associé (principe de subsidiarité). L’art. 570 est clair : les créanciers de la société sont payés sur l’actif social de la société (patrimoine de la société) à l’exclusion des créanciers personnels (l’oncle, qui n’a aucun lien avec la société). Il faut donc procéder à une liquidation hypothétique : - Actifs : 2'000 (débiteurs), 2'500 (stock), installations (3'500) : 8'000. - Passifs : 10'000 (banque). - Perte : 2'000. IUR III 2012-2013 1

Droit Commercial.docx · Web viewL’acte de fondation doit être passé en la forme authentique (art. 629 CO). Des organes doivent ensuite être créés : assemblée générale et

  • Upload
    others

  • View
    1

  • Download
    0

Embed Size (px)

Citation preview

Page 1: Droit Commercial.docx · Web viewL’acte de fondation doit être passé en la forme authentique (art. 629 CO). Des organes doivent ensuite être créés : assemblée générale et

Jérémy Stauffacher Droit Commercial

Tutorat Droit Commercial 

Cas n° 1

Le premier élément est la fondation de la société en nom collectif (art. 552 ss

CO). En droit commercial, on distingue société de personnes et société de

capitaux. La société en nom collectif est une société de personnes. Dans ce

cas, on s’intéressera surtout aux rapports envers les tiers (la banque et l’oncle

dans ce cas-ci). L’oncle est un créancier personnel (art. 572 CO) alors que la

banque est un créancier de la société (art. 568 CO). Les associés ont une

responsabilité solidaire qui porte sur tout leur patrimoine (au contraire d’une

SA, société de capitaux). L’art. 568 al. 1 fixe le principe alors que l’al. 3 pose

une condition pour rechercher les associés personnellement. Les créanciers

doivent donc d’abord rechercher la société avant de rechercher

personnellement un associé (principe de subsidiarité). L’art. 570 est clair : les

créanciers de la société sont payés sur l’actif social de la société (patrimoine

de la société) à l’exclusion des créanciers personnels (l’oncle, qui n’a aucun

lien avec la société). Il faut donc procéder à une liquidation hypothétique :

- Actifs : 2'000 (débiteurs), 2'500 (stock), installations (3'500) : 8'000.

- Passifs : 10'000 (banque).

- Perte : 2'000.

La banque a donc droit a 10'000 francs mais ne reçoit que 8'000 francs après

la liquidation de la société. La banque va donc poursuivre personnellement

les associés pour faire exécuter sa créance de 2'000 francs (art. 568 al. 1). Il

faut donc lister les actifs et les passifs d’Alexandra :

- Actifs : 10'000 (fortune).

- Passifs : 20'000 (dette envers l’oncle), 2'000 (dette envers la banque).

- Perte : 12'000.

La répartition est en principe proportionnelle : Alexandra ne pourra

rembourser que 45% de la dette (10'000 francs sur les 22'000 francs au total).

Ainsi, la banque touchera 900 francs (et donc 8'900 francs au total) alors que

l’oncle touchera 9'000 francs (calcul approximatif).

IUR III 2012-2013 1

Page 2: Droit Commercial.docx · Web viewL’acte de fondation doit être passé en la forme authentique (art. 629 CO). Des organes doivent ensuite être créés : assemblée générale et

Jérémy Stauffacher Droit Commercial

Dans un deuxième temps, on opère une seconde liquidation hypothétique afin

de comparer avec la liquidation établie précédemment. On établit donc un

second bilan pour Alexandra, en considérant que la société n’a jamais existé

et que la vente de chaussettes a donc été

- Actifs : 10'000 (fortune), 8'000 (vente et infrastructures).

- Passifs : 20'000 (dette envers l’oncle), 10'000 (dette envers la banque).

- Perte : 12'000.

Alexandra ne pourra rembourser que 60% de la dette. Ainsi, l’oncle touchera

12'000 francs et la banque touchera 6'000 francs. Au final, on voit que

l’absence de société en nom collectif est bénéfique aux créanciers

personnels, qui touchent plus d’argent. Cela est logique : les banques doivent

avoir confiance pour prêter. Le législateur a donc voulu favoriser les banques

et indirectement favoriser le remboursement des frais bancaires.

Cas n° 2

Il s’agit d’un cas de fondation de SA. Les SA doivent être inscrites du

commerce : dès lors, elle acquiert la personnalité juridique (art. 643 al. 1 CO).

L’al. 2 précise que la personnalité est acquise même si les conditions de

l’inscription ne sont pas remplies (effets guérisseurs de l’inscription). Il existe

ensuite une limite liée au capital-actions, qui ne peut être inférieur à 100'000

francs. L’art. 632 CO précise que le capital-actions doit au moins contenir

50'000 francs disponible et 20% du capital-actions total (conditions

cumulatives). Cet article permet de ne pas exiger l’entier de la somme en

liquide ou en apport. Il faut à présenter déterminer si le menuisier a les fonds

nécessaires pour fonder sa SA et lister les éléments à sa disposition :

- Un atelier chiffré à 30'000 francs (déduction du crédit de 70'000).

- 10'000 francs de liquidité disponible.

- Des machines valant 20'000 francs (déduction du crédit de 30'000).

- Un stock de produits finis chiffré à 3'000 francs.

- Un stock de bois valant 7'000 francs.

IUR III 2012-2013 2

Page 3: Droit Commercial.docx · Web viewL’acte de fondation doit être passé en la forme authentique (art. 629 CO). Des organes doivent ensuite être créés : assemblée générale et

Jérémy Stauffacher Droit Commercial

Jean-Paul dispose donc en tout de 70'000 francs (en matériel ou en argent).

La fondation d’une SA nécessite l’écriture des statuts (art. 626). La raison

sociale est Maradan SA et aura son siège à Fribourg. Le but de la société est

l’exploitation d’une scierie / menuiserie. Le montant du capital-actions et des

apports effectués doit également être précisé dans les statuts. Le capital-

actions est fixé à 100'000 francs et les apports seront chiffrés par la suite

dans le bilan. On différencie les apports en nature (matériel divers et autres

installations, art. 628 al. 1 CO) des apports en espèce (argent). Concernant

les apports en nature, la jurisprudence a précisé qu’il s’agissait de tout ce qui

n’est pas de l’argent, qui a une valeur marchande, qui est à la libre disposition

de celui qui l’apporte et qui est transférable et réalisable (4 conditions) :

- Pas de l’argent.

- Valeur marchande.

- A la libre disposition de l’apporteur.

- Transférable et réalisable.

Il faut maintenant faire un bilan :

- Actifs : 10'000 (argent), 100'000 (atelier), 50'000 (machines), 3'000

(produits), 7'000 (bois) : 170'000.

- Passifs : 70'000 (crédit atelier), 30'000 (crédit machines), 100'000

(capital-actions : sécurité pour la SA).

- Perte : 30'000.

Sur la base du bilan, on voit donc que la fondation de la SA est impossible.

Dès lors, Jean-Paul va se faire promettre les 30'000 francs qu’il lui manque

par les fondateurs de la société. Ces personnes débitrices sont appelées

actionnaires (créances de la société). Lors de la fondation de la société, ils

auront une dette (ce qui permet de compenser le manque de 30'000 francs).

Précisons que cela est possible car les deux conditions de l’art. 632 CO sont

remplies (20% minimum et 50'000 francs au minimum d’argent libéré). Avec

ces 30'000 francs, le bilan est équilibré et le capital-actions atteint 100'000

francs. La loi n’impose aucune date limite pour libérer les fonds nécessaires.

IUR III 2012-2013 3

Page 4: Droit Commercial.docx · Web viewL’acte de fondation doit être passé en la forme authentique (art. 629 CO). Des organes doivent ensuite être créés : assemblée générale et

Jérémy Stauffacher Droit Commercial

L’art. 625 CO précise qu’une seule personne est suffisante pour fonder une

SA. L’acte de fondation doit être passé en la forme authentique (art. 629 CO).

Des organes doivent ensuite être créés : assemblée générale et organes

d’administration et de révision (art. 626 ch. 5-6 CO). L’inscription au RdC vise

à assurer la transparence de la SA (statuts, organe, but, capital-actions,

fondateurs, pouvoir de représentation) et permet également à l’État de

contrôler le développement des SA (nombre de SA, développement

économique) et de vérifier le respect des conditions légales.

Par rapport aux apports en nature, l’art. 628 CO définit les conditions. L’art.

635 précise que les fondateurs rendent compte dans un rapport écrit de la

nature et de l’état des apports en nature. Pour éviter la surévaluation des

apports, l’art. 635a CO ajoute l’exigence d’une vérification du rapport sur la

valeur des apports par un réviseur agréé. Il est en effet possible d’utiliser les

apports en nature pour éluder les dispositions sur la valeur minimale du

capital-actions en surévaluant ce type d’apports (contrat d’apport, art. 634).

Cas n° 3

On distingue trois éléments :

- Actif social (actif brut) : tous les actifs, y compris les pertes.

- Fortune sociale (valeur interne ou actif net) : il s’agit de l’actif social,

duquel on déduit les dettes (fonds étrangers présents au passif).

- Fonds propres : il s’agit du CA et des réserves.

Question 1

La décision d’achat de bois sera prise par le Conseil d’administration (art. 716

al. 1 CO). Visiblement, Frédy ne fait pas partie du CdA de Maradan SA. L’art.

645 CO pose le principe : l’al. 1 reprend un principe général de la partie

générale du CO (art. 111 CO, porte-fort). L’application de l’art. 645 al. 1 CO

dépend de la réalisation de trois conditions :

IUR III 2012-2013 4

Page 5: Droit Commercial.docx · Web viewL’acte de fondation doit être passé en la forme authentique (art. 629 CO). Des organes doivent ensuite être créés : assemblée générale et

Jérémy Stauffacher Droit Commercial

- La société n’est pas encore inscrite au RC (pas encore fondée).

- L’acte en cause est fait au nom de la société.

- L’acte doit être conclu par l’un des fondateurs de la société.

Si ces trois conditions sont remplies (et qu’il ne s’agit pas d’un cas

d’application de l’exception de l’al. 2), les fondateurs sont responsables

personnellement et solidairement pour l’acte (les actes) en cause (en lien

avec l’art. 544 CO par rapport à la société simple). L’al. 2 prévoit une

exception, aux conditions suivantes :

- Les obligations doivent avoir été assumées par la société dans un délai

de trois mois à partir de l’inscription (fondation).

- La société doit avoir été valablement fondée et inscrite au RC.

Dans ce cas, les fondateurs sont libérés et c’est la société qui est dès lors liée

et responsable. Pour éviter cette responsabilité lourde, le fondateur pose une

condition suspensive par rapport à la fondation et à la reprise par la société

du contrat passé. Dans le cas d’espèce, Frédy ne peut obliger la société à

assumer cette obligation, lui-même n’étant pas membre du CdA. Par rapport

à la commune, c’est donc lui qui sera responsable de l’achat de bois (art. 645

al. 1). Si Frédy était membre du CdA, il devrait tenter de convaincre les autres

membres (n’étant pas actionnaires majoritaires : il ne détient que 30% des

parts), et ce dans les trois mois qui ont suivi la fondation.

Question 2

Selon l’art. 659, une société ne peut acquérir ses propres actions qu’aux

conditions suivantes (normalement, cela est interdit) :

- La société doit disposer librement d’un part de ses fonds propres

équivalent au montant de la dépense nécessaire : cela signifie que la

société doit avoir à disposition la somme dans les fonds propres. L’art.

671 précise qu’il est impossible de toucher aux réserves légales (et au

CA). Seules les réserves libres sont donc disponibles : étant donné

qu’elles se montent à 12'000 francs, une dépense de 10'000 francs est

IUR III 2012-2013 5

Page 6: Droit Commercial.docx · Web viewL’acte de fondation doit être passé en la forme authentique (art. 629 CO). Des organes doivent ensuite être créés : assemblée générale et

Jérémy Stauffacher Droit Commercial

possibles (art. 671a CO). Or, la valeur des actions est une valeur

nominale. Ainsi, la valeur des actions une fois la société fonder va

dépendre de la valeur de la société (il est logique que la valeur des

actions fluctue en fonction de la santé financière de la société). Pour

calculer la valeur d’une action, il faut calculer la valeur de la société et

la diviser par le nombre d’action. La valeur de la société correspond à

la fortune sociale (actif net). Dans notre cas, on fait le calcul suivant :

220 – 100 = 120 (actif net), que l’on divise par 100 (par rapport au CA,

100 actions valant chacune 1'000 francs) = 1'200 francs pour chaque

action. De ce fait, le coût de 10 actions et de 12'000 francs, somme

équivalente aux réserves libres. Il faut toujours vérifier que les 12'000

francs à dépenser soit effectivement disponibles, ce qui est le cas ici

puisque la société dispose de 30'000 francs (prêt bancaire).

- La valeur nominale de l’ensemble des actions ne doit pas dépasser

10% du CA (pourcentage différent pour l’al. 2) : dans le cas d’espèce,

cette condition est remplie, la valeur nominale des actions

correspondant à 10'000 francs, ce qui correspond aux 10% du CA.

Les deux conditions sont donc remplies : la société peut racheter les actions

de Frédy. On peut donc établir un nouveau bilan qui comprend les nouvelles

actions achetées :

- Actifs : 18 (banque), 30 (actionnaire), 5 (bois), 5 (stock), machines

(50), atelier (100) et enfin les titres acquis (12).

- Passifs : 30 (banque), 70 (banque), 12 (réserve liée aux actions et

bloquée, art. 659a al. 2 CO), 8 (réserve), 100 (CA).

Question 3

Les conséquences de l’acquisition d’actions sont précisées à l’art. 659a :

- Une réserve liée à la dépense pour les actions doit été créée, ce qui a

été fait avec la « réaffectation » de l’ancienne réserve libre, qui a servi

à financer l’achat des actions (art. 659a al. 1).

IUR III 2012-2013 6

Page 7: Droit Commercial.docx · Web viewL’acte de fondation doit être passé en la forme authentique (art. 629 CO). Des organes doivent ensuite être créés : assemblée générale et

Jérémy Stauffacher Droit Commercial

- Les droits liés aux actions propres sont suspendus (droit de vote et

perception des dividendes). De même, le nombre d’actionnaires ayant

diminué, le versement des dividendes sera réorganisé.

Il faut préciser que la société n’est pas obligée de reprendre ses actions :

Frédy ne peut pas imposer la restitution de l’argent (art. 680 al. 2 CO). La

société peut tout à fait refuser de racheter les actions, auquel cas Frédy se

tournerait vers d’autres acheteurs pour vendre ses actions.

Cas n° 4

La société va perdre de sa valeur. Concrètement, il faut refaire un nouveau

bilan après les nouveaux faits. Nouveau bilan :

- Actifs : 18 (banque / caisse), 5 (bois), 20 (stock : perte d’un tiers), 12

(actions propres), 10 (machines) et atelier (100).

- Passifs : 55 (banque), 50 (hypothèque), 12 (réserve), 8 (réserve) et

100 (capital-actions).

- Perte : 60 (225-165) : dans l’actif.

On établit l’actif net (fortune sociale : actif brut – dettes) : avant les pertes et

l’amortissement, on prend l’actif (225) duquel on déduit les dettes (fonds

étrangers, 105) : on obtient 120. En l’état actuel, l’actif ne vaut plus que 165,

les dettes toujours 105, reste donc 60 (valeur de la société). La valeur de la

société a donc diminué de moitié. Le fait que la société ait acheté ses propres

actions entrainent forcément la diminution des actions propres achetées par

la société. Il est donc nécessaire de modifier le bilan en tenant compte de la

perte de valeur des actions :

- Actifs : 18 (banque / caisse), 5 (bois), 20 (stock : perte d’un tiers), 6

(actions propres), 10 (machines) et atelier (100).

- Passifs : 55 (banque), 50 (hypothèque), 12 (réserve), 8 (réserve) et

100 (capital-actions).

- Perte : 66 (6 supplémentaires dûs à la perte de valeur des actions).

IUR III 2012-2013 7

Page 8: Droit Commercial.docx · Web viewL’acte de fondation doit être passé en la forme authentique (art. 629 CO). Des organes doivent ensuite être créés : assemblée générale et

Jérémy Stauffacher Droit Commercial

Dès lors, on remarque que la valeur de la société était fausse. Il faut donc

recalculer la valeur de la société (159-105=54). Il faut alors recalculer le bilan

en fonction de la nouvelle valeur des actions :

- Actifs : 18 (banque / caisse), 5 (bois), 20 (stock : perte d’un tiers), 5

(actions propres : on arrondit pour éviter de devoir recalculer la valeur

de la société à l’infini), 10 (machines) et atelier (100).

- Passifs : 55 (banque), 50 (hypothèque), 12 (réserve), 8 (réserve) et

100 (capital-actions).

- Perte : 67 (bilan final).

Il faut dès lors analyser les pertes par rapport au CA (art. 725 CO). On

compte donc le CA (100) et les réserves (20), divisé par 2 (60 au total) que

l’on compare à l’actif net, ce qui donne 53 de couverture restante (actif brut  :

158 – les dettes : 105). De ce fait, la moitié du CA (60) n’est plus couverte (il

ne reste que 53 de couverture). On peut également calculer de manière

beaucoup plus simple en soustrayant les pertes du CA et des réserves (ainsi,

cela donne 120 – 67 = 53). Il s’agit donc bien d’un cas d’application de l’art.

725 al. 1 CO : le conseil d’administration convoque immédiatement une

assemblée générale et lui propose des mesures d’assainissement. On voit

qu’il faudra tendre à faire baisser le CA ainsi que les réserves (chiffre 120). La

réserve légale peut ainsi être utilisée (art. 671 al. 3 CO) : elle est utile pour

couvrir les pertes. Dès lors, on établit un nouveau bilan :

- Actifs : 18 (banque / caisse), 5 (bois), 20 (stock : perte d’un tiers), 5

(actions), 10 (machines) et atelier (100).

- Passifs : 55 (banque), 50 (hypothèque), 12 (réserve), 0 (réserve légale

utilisée) et 100 (capital-actions).

- Perte : 59 (bilan final) : 217 des deux côtés.

On recalcule donc la couverture de la moitié du CA (ce qui donne 112 divisé

par 2 = 56) par rapport à l’ensemble des pertes (112 – 59 = 53). Il ne serait

donc possible de couvrir que 53, et non pas 56, comme cela serait

nécessaire : l’art. 725 al. 1 CO. Il faut donc procéder à l’utilisation des

réserves pour actions propres (art. 671a CO). En effet, il faut que le CA soit

égal à 106 au maximum (106 divisé par 2 = 53, soit la valeur des pertes).

IUR III 2012-2013 8

Page 9: Droit Commercial.docx · Web viewL’acte de fondation doit être passé en la forme authentique (art. 629 CO). Des organes doivent ensuite être créés : assemblée générale et

Jérémy Stauffacher Droit Commercial

Pour utiliser la réserve pour actions propres, il est nécessaire de vendre les

actions (à un prix préférentiel, 5 par rapport à 5,4). On calcule… le bilan !

- Actifs : 23 (banque / caisse : vente des actions), 5 (bois), 20 (stock :

perte d’un tiers), 10 (machines) et atelier (100).

- Passifs : 55 (banque), 50 (hypothèque), 0 (réserve : utilisation de la

réserve pour actions propres) et 100 (capital-actions).

- Perte : 47 (bilan final) : 205 des deux côtés.

On recalcule donc la couverture : 100 divisé par 2 = 50, que l’on met en

rapport avec les 53 (100 – 47 = 53). Ainsi, on voit que la moitié du CA (et des

réserves, qui n’existent plus), à savoir 50, est couvert par les 53 à

disposition : on n’est plus dans un cas d’application de l’art. 725 CO. On voit

donc que le fait de détenir ses propres actions est dangereux : en cas de

baisse de valeur, la conséquence est double (valeur et valeur des actions).

Dès lors, l’utilité de la réserve pour actions propres est fixée.

Cas n° 5

L’augmentation du CA est décidée par l’AG (art. 650 CO), à la majorité simple

(art. 703 CO). Dans ce cas, il s’agit d’un cas d’augmentation ordinaire (art.

650) et non pas autorisée (art. 651) ou conditionnelle (art. 653), qui

nécessitent toutes deux une majorité qualifiée au sens de l’art. 704 ch. 4 CO.

La majorité qualifiée est également nécessaire en cas d’augmentation du CA

au moyen des fonds propres (art. 704 ch. 5 CO). La différence entre la

majorité simple nécessite la moitié des votants alors que la majorité qualifiée

nécessite les deux tiers (la minorité représentant plus d’un tiers est alors

nommée minorité de blocage).

En l’espèce, Frédy a seulement 2 titres (20 sur 100, 2 sur 10) et ne peut donc

pas s’opposer à l’augmentation du CA (il ne représente que 20% de la

société : il n’atteindrait même pas la minorité de blocage). Frédy pourrait

attaquer en justice la décision au sens de l’art. 706 CO (voie de droit).

Toutefois, il n’y a apparemment aucune violation de la loi ou des statuts.

IUR III 2012-2013 9

Page 10: Droit Commercial.docx · Web viewL’acte de fondation doit être passé en la forme authentique (art. 629 CO). Des organes doivent ensuite être créés : assemblée générale et

Jérémy Stauffacher Droit Commercial

En tant qu’actionnaire, Frédy dispose de certains droits en lien avec

l’augmentation du CA. Il bénéficie ainsi d’un droit de souscription préférentiel.

En effet, l’augmentation du CA entraîne l’émission de nouvelles actions. De

ce fait, les parts pourraient changer. Pour éviter cela, on permet aux

actionnaires d’acheter les actions émises jusqu’à concurrence de leur

ancienne participation : ils conservent ainsi, s’il le souhaite, leur poids au sein

de la société (art. 652b CO). Pour supprimer ce droit de souscription

préférentiel, il est nécessaire de prouver qu’il existe un juste motif de

restriction (art. 652b al. 2 CO).

Par rapport au prix des actions, il faut déterminer la valeur actuelle de la

société. On prend donc les actifs bruts, desquels on soustrait les fonds

étrangers (240 – 100 = 140) que l’on divise par 10 (nombre d’actions) pour

connaître la valeur de chaque action. L’art. 672c renvoie aux règles sur la

fondation (art. 620 ss CO) et notamment à l’art. 624 CO. En principe les

actions ne peuvent être émises qu’au pair ou à un cours supérieur (à savoir

au minimum 100, valeur nominale en fonction du CA). On va donc faire un

nouveau bilan en prenant en compte l’émission des nouvelles actions :

- Passifs : 30 (banque), 70 (hypothèque), 10 (réserve libre), 30 (réserve

légale) et CA (200), soit 340 au total

- Actifs : 125 (caisse + vente des actions), 15 (bois), 10 (stock), 70

(machines), 120 (atelier), soit, là-aussi, 340 au total.

- Le bilan est équilibré.

Précisons que l’art. 632 CO s’applique aussi par rapport à l’exigence des 20%

libérés : Julie doit donc au moins avoir libérer 20'000 francs sur ce qu’elle

promet, le reste pouvant être inscrit au bilan comme créance. On analyse

donc l’impact de l’augmentation du CA sur la valeur de la société (fortune

sociale de la société : 340 – 100 = 240) la valeur de la société a augmenté de

100. De même, dès à présent, la société dispose de 20 actions. Pour calculer

la valeur de chaque action, on divise la valeur de la société par le nombre

d’actions (avant 140 / 10 = 14 et maintenant 240 / 20 = 12) : la valeur des

actions a donc diminué. De ce fait, les actionnaires déjà propriétaires des

actionnaires sont lésés (leurs actions valaient 14, et désormais elles valent

IUR III 2012-2013 10

Page 11: Droit Commercial.docx · Web viewL’acte de fondation doit être passé en la forme authentique (art. 629 CO). Des organes doivent ensuite être créés : assemblée générale et

Jérémy Stauffacher Droit Commercial

12). Par contre, les nouveaux actionnaires ont acheté leurs actions au pair (à

10) et se retrouvent directement avec une action valant 12. Les anciens

actionnaires sont donc lésés au profit des nouveaux : la valeur des actions a

été nivelée vers le bas (moyenne). Il paraît donc intéressant d’émettre les

actions à la valeur de 14 (valeur de chaque action par rapport à la fortune).

Dans le bilan, on va donc intégrer les 40 supplémentaires à la réserve légale,

sur la base de l’art. 671 al. 2 ch. 1 CO. On ne peut en effet pas augmenter le

CA à plus de 200. Le produit de l’émission des actions dépassant la valeur

nominale (agio) est donc ajouté aux réserves :

- Passifs : 30 (banque), 70 (hypothèque), 10 (réserve libre), 70 (réserve

légale au total) et CA (200), soit 400 au total

- Actifs : 165 (caisse + vente des actions), 15 (bois), 10 (stock), 70

(machines), 120 (atelier), soit, là-aussi, 400 au total.

- Le bilan est équilibré.

Si l’on recalcule la valeur des actions : (380 – 100 = 280, divisé par 20 = 14).

Dans cette situation, personne n’est lésé, ni les anciens actionnaires, ni les

nouveaux : la valeur de l’action reste la même. On constate ainsi que si on

émet les actions en dessous de la valeur vénale, la valeur des actions va

baisser (effet de dilution). Si on les émet à la valeur vénale, la valeur reste la

même. Enfin, si on les émet au-dessus de la valeur vénale, la valeur va

augmenter. Comme on l’a dit, si Frédy n’exerce pas de son droit de

souscription préférentiel, sa part va baisser dans la société (il passera de 20 à

10%). Si l’AG conclut à l’émission d’actions au pair, l’art. 706 CO pourrait être

utilisé : en effet, le droit des actionnaires serait violé. De même, l’art. 717 CO

précise qu’il est interdit de discriminer les actionnaires (sans quoi il s’agit d’un

cas de 706 CO, permettant à l’actionnaire de faire reconnaître ses droits

devant la justice). Le principe d’égalité de traitement s’applique donc dans ce

cas. De même, les anciens actionnaires n’ont pas toujours les fonds

nécessaires à l’exercice du droit de souscription : les actionnaires risquent

d’être lésés. Doctrine et jurisprudence sont partagés quant au fait de savoir

s’il est nécessaire d’accorder une voie de droit aux actionnaires.

IUR III 2012-2013 11

Page 12: Droit Commercial.docx · Web viewL’acte de fondation doit être passé en la forme authentique (art. 629 CO). Des organes doivent ensuite être créés : assemblée générale et

Jérémy Stauffacher Droit Commercial

Cas n° 6

Il y a augmentation du CA sur la base de la dette de la tante. Dès lors, on

augmente le CA de 80, on ajoute 80 aux actifs et on peut dès lors supprimer

la dette avec les 80 au passif. Le CA ayant été augmenté à 280, il faut

recalculer la valeur des actions. Nous avons 20 actions et la valeur nominale

était de 10 (valeur fixe). Selon l’art. 624 CO, les actions ne peuvent être

émises en dessous du pair. On calcule dès lors la valeur de la société sur la

base du nouveau bilan :

- Actifs : 40, 40, 50, 150, 100 (perte).

- Passifs : 30, 70, 280.

On fait le calcul suivant (280 – 100 = 180). On divise ensuite par le nombre

d’actions (28), ce qui nous donne 6,43 (avant l’émission des nouvelles

actions, elles valaient 5). La tante, nouvelle actionnaire, est donc lésée : elle a

payé chaque action 10 et n’obtient que 6,43. Il faut donc trouver un autre

système pour éviter que les nouveaux actionnaires ne perdent trop d’argent.

Ainsi, il paraît possible de réduire le CA selon l’art. 735 CO pour réduire la

dette. Normalement, en cas de diminution du CA, il faut avertir les créanciers.

Or, il est dans ce cas possible de diminuer le CA sans prévenir les créanciers

pour mettre le bilan à niveau avec la réalité. Une fois l’art. 735 appliqué, sur la

base du premier bilan (la tante n’ayant pas accepté la transaction) :

- Actifs : 40, 40, 50, 150.

- Passifs : 30, 70, 80, 100.

Il existe tout de même un problème : la réduction du CA suppose une

réduction de la valeur des actions ou une suppression d’action (ce qui paraît

totalement impossible). Dès lors, on garde le même nombre d’actions mais

leur valeur va sensiblement baisser. Précision importante : ce sera la valeur

nominale qui va baisser et qui sera réajustée. Cela est logique : dans un cas

de réduction déclarative du CA, le CA est modifié en fonction des pertes. De

ce fait, le CA change mais les actifs restent les mêmes : la proportion est

donc modifiée. A l’inverse, en cas d’augmentation du CA, le CA est augmenté

et les actifs augmentent également : la proportion reste dès lors la même.

IUR III 2012-2013 12

Page 13: Droit Commercial.docx · Web viewL’acte de fondation doit être passé en la forme authentique (art. 629 CO). Des organes doivent ensuite être créés : assemblée générale et

Jérémy Stauffacher Droit Commercial

Ainsi, par ce procédé, la valeur nominale va diminuer (et donc l’application de

l’art. 624 CO sera simplifiée). Dans notre cas, la valeur nominale sera dès lors

de 5. Il faut donc à présent émettre les nouvelles actions. On procède de

nouveau à une augmentation du CA par compensation (art. 652c, 634 ch. 2,

635 ch. 2) :

- Actifs : 40, 40, 50, 150.

- Passifs : 30, 70, 180.

On a donc supprimé la dette de la tante (80) par l’apport des fonds servant à

l’augmentation du CA. La valeur de la société est dès lors de 280 – 100

(fonds étrangers) = 180. La valeur des actions est de 180 divisé par 36 (nous

avons en effet le 20 actions de base, auxquelles on rajoute 80

d’investissement à 5 l’action, soit 16 actions) = 5. Dès lors, la tante achète les

actions au pair, à la valeur nominale, à 5 et leur valeur est de 5 : personne

n’est gagnant, personne n’est perdant.

Il reste un problème, la tante obtient 16 des 36 actions et dispose donc de la

minorité de blocage (plus d’un tiers : majorité qualifiée). Le pouvoir de Julie

est donc diminué.

Cas n° 7

Le premier problème dans ce cas concerne l’évaluation des machines. Le

principe général est fixé par l’art. 662a CO : la prudence (art. 662a al. 2 ch. 3).

En l’espèce, les machines sont chiffrées aux actifs à 105 (et la troisième

tranche de remboursement de 35 n’a pas encore été payée). Les art. 664 ss

précisent directement les règles d’évaluation. L’art. 665 concerne les actifs

immobilisés, dont les machines. En l’occurrence, le principe veut que l’on

prenne en considération au plus le prix d’acquisition ou au coût de revient.

Dans notre cas, le coût d’acquisition est trop haut :

- Actifs : 40, 30, 30, 80, 45, 35 (machines à 1/3), 150, 70 (perte).

- Passifs : 30, 65, 35, 70, 280.

IUR III 2012-2013 13

Page 14: Droit Commercial.docx · Web viewL’acte de fondation doit être passé en la forme authentique (art. 629 CO). Des organes doivent ensuite être créés : assemblée générale et

Jérémy Stauffacher Droit Commercial

On voit donc qu’on prend en compte la valeur vénale des machines, celle-ci

étant inférieure au coût d’acquisition. Si la valeur vénale était supérieure à la

valeur d’acquisition, on ne pourrait inscrire ce chiffre au passif à cause de

l’art. 665 CO. Dès lors, on remarque donc que la qualité des machines n’est

pas très bonne : il en résulte une perte de 70 à l’actif. Dans l’actif, les 80

correspondent à la dette de Pierre : celui-ci a amené seulement 20% des 100

et doit dès lors encore 80. Or, il n’est pas solvable : on applique à nouveau le

principe de prudence, ce qui a les conséquences suivantes sur le bilan :

- Actifs : 40, 30, 30, 0 (suppression de la dette : on n’imagine que Pierre

ne payera pas du tout), 45, 35 (machines à 1/3), 150, 150 (perte).

- Passifs : 30, 65, 35, 70, 280.

On vérifie donc si l’on se trouve en situation de sous-bilan : la perte se monte

à 150 et la moitié du CA et des réserves et de 140 : il y a donc sous-bilan au

sens des art. 670 et 725 al. 1 CO. Il est donc nécessaire de convoquer l’AG.

Ainsi, en appliquant le principe de prudence, on crée une responsabilité

envers l’AG, qui doit être au courant que la situation pourrait se dégrader. Si

cette prudence n’était pas appliquée, on ne serait pas en sous-bilan et l’AG

ne saurait rien de la situation économique de la société.

Cas n° 8

On voit qu’il y a eu une réduction avec augmentation du CA. De même, la

valeur nominale des actions a baissé de 5’000 à 2’000. Avant, il existait 100

actions. Ensuite, le CA a été réduit à 200’000 pour éponger les pertes puis

remonté à 500’000. Une fois cela fait, la valeur nominale des actions a été

modifiée à 2’000 à cause de la réduction. Le nombre de 100 actions a donc

été maintenu par la réduction. Ensuite, par l’augmentation, la valeur nominale

n’a pas été touchée par l’augmentation : dès lors, le nombre d’action a

augmenté. Pour connaître le nombre d’actions, on fait 500'000 divisé par

2'000 et l’on obtient ainsi 250 (nombre d’actions au total). Pour déterminer le

nombre de nouvelles actions, on divise 300'000 (fonds supplémentaires) par

2'000 (valeur nominale) et l’on obtient 150 (nouvelles actions B), par

IUR III 2012-2013 14

Page 15: Droit Commercial.docx · Web viewL’acte de fondation doit être passé en la forme authentique (art. 629 CO). Des organes doivent ensuite être créés : assemblée générale et

Jérémy Stauffacher Droit Commercial

opposition aux 100 autres actions (action A). L’art. 660 al. 3 précise que des

privilèges existent. Ensuite, les art. 654 ss CO traitent plus précisément des

actions privilégiées. Dans ce cas, ce sont les anciennes actions qui sont

converties en actions privilégiées (certainement pour palier la perte de valeur

des anciens actions). Les dividendes sont des parts de bénéfice reversées

aux actionnaires (art. 660 CO). En l’occurrence, un bénéfice existe et une

répartition des bénéfices existe également. Le CdA aimerait modifier cette

répartition en octroyant 3% du bénéfice de manière uniforme, sans distinction

de catégories. En la matière, l’art. 698 al. 2 ch. 4, par rapport à la fixation du

dividende, précise que c’est l’AG qui décide. Dans ce cas, cette mesure va

très certainement être adoptée par l’AG. En effet, les nouveaux actionnaires

représentants 150 actions (soit plus de la moitié : majorité simple, art. 703 CO

et art. 704 CO a contrario) ont intérêt à bénéficier d’un pourcentage des

dividendes de 3%. Sans cette mesure, les actionnaires B ne toucheraient rien

(0% pour les actionnaires B et 5% pour les actionnaires A selon l’ancienne

répartition). Le dividende par action sera donc de 3% des 2'000 de valeur

nominale, à savoir 60 francs (15'000 au total) : chaque actionnaire touchera

60 francs par action possédée. Le bénéfice n’est donc que la condition

d’octroi d’un dividende, qui se calcule par rapport à la valeur nominale. Il faut

donc vérifier si la société a les moyens pour verser 15'000 francs aux

actionnaires, en fonction de l’art. 660 CO. On part du principe que la part du

bénéfice qui doit être affectée aux réserves est déjà intégrée dans les 40’000

du bilan. Le bénéfice étant de 60'000, il est possible de verser 15'000 francs

aux actionnaires de ce bénéfice.

Naturellement, les anciens actionnaires n’acceptent pas ces modifications.

Dès lors, ils peuvent attaquer en justice les décisions de l’AG qui viole la loi

ou les statuts (art. 706 CO). Logiquement, les actionnaires A auraient voulu

conserver leur droit à percevoir 5% supplémentaire (ils recevraient donc 8%

par action, à savoir 160 francs). En tout, la société devrait donc verser 25'000

francs au total (150 x 60 + 100 x 160 = 25'000 francs). Encore une fois, par

rapport aux 60'000 de bénéfice, il est possible pour la société de verser

25'000 francs. L’AG décide des statuts : elle (les actionnaires B, majoritaires)

aurait donc pu décider de modifier les statuts et donc de supprimer le

IUR III 2012-2013 15

Page 16: Droit Commercial.docx · Web viewL’acte de fondation doit être passé en la forme authentique (art. 629 CO). Des organes doivent ensuite être créés : assemblée générale et

Jérémy Stauffacher Droit Commercial

privilège octroyé aux actionnaires A. Or, cela léserait trop grandement les

anciens actionnaires. Dès lors, l’art. 654 al. 3 précise que l’AG ne peut

supprimer les privilèges sans l’accord des participants concernés. Très

logiquement, les actionnaires A ne seront pas d’accord de supprimer leur

privilège. L’art. 654 al. 2 protège également les actionnaires ayant un droit

privilégié lors de l’émission de nouvelles actions qui les primeraient. Dès lors,

on voit qu’il est possible d’attaquer la décision qui viole les statuts (l’art. 654f

interdit à l’AG seule de supprimer le privilège : dès lors, le privilège des titres

A doit être maintenu dans les statuts).

Le deuxième problème du cas concerne la plainte de sous-estimation du

bénéfice. En effet, les actionnaires estiment que le brevet a été sous-évalué.

Dès lors, les actifs sont diminués et le bénéfice s’en retrouve affecté. Ainsi,

plus le bénéfice est élevé, plus le CdA proposera un bénéfice élevé. De plus,

il existe un problème par rapport aux provisions (risque en cas d’action en

dommages-intérêts). L’art. 669 al. 1 2ème phrase CO concerne directement ces

provisions. L’art. 669 présente 4 alinéas :

- L’al. 1 : réserves latentes nécessaires.

- L’al. 2 : réserves latentes autorisées.

- L’al. 3 : réserves latentes arbitraires.

- L’al. 4 : communication à l’organe de révision.

Le CdA a donc une grande marge de manœuvre en matière de réserve

latente. Ces réserves sont cachées au bilan et ne sont donc pas visibles par

les actionnaires. Elles n’apparaissent donc pas en tant que réserves légales

au bilan (comme pour le cas des provisions, qui sont nécessaires au bilan).

Par contre, pour le cas du brevet sous-évalué, ces réserves n’apparaissent

pas du tout au bilan. Ces réserves latentes sont donc une concrétisation du

principe de prudence. L’art. 663b ch. 8 CO prévoit que l’annexe doit contenir

le montant total de la dissolution des réserves latentes. En effet, si une

réserve latente devient inutile (trop de prudence), elle sera dissoute. Dès lors,

en tant qu’actionnaire, on constatera cette dissolution pour demander une

augmentation des pourcentages. Malgré tout, les actionnaires n’ont aucun

droit vis-à-vis des réserves latentes : c’est le CdA qui s’en occupe (prudence).

IUR III 2012-2013 16

Page 17: Droit Commercial.docx · Web viewL’acte de fondation doit être passé en la forme authentique (art. 629 CO). Des organes doivent ensuite être créés : assemblée générale et

Jérémy Stauffacher Droit Commercial

Cas n° 9

La structure du CA est la suivante :

- 4000 actions nominatives, valant 50 (200'000 au total).

- 4000 actions au porteur, valant 200 (800'000 au total).

Ainsi, on voit dans la répartition du CA qu’il existe autant d’actions

nominatives que d’actions au porteur. Les personnes titulaires des actions au

porteur disposent de la moitié de la société uniquement, malgré l’apport 4 fois

(dans ce cas, chaque action vaut une voix). La famille n’a donc pas la

majorité (moitié + un). Tout de même, seule la moitié des actionnaires publics

fréquentent l’AG. Ainsi, la famille, en tenant compte de cette affirmation et de

l’art. 703 CO (actions représentées), dispose de la majorité simple (et

presque de la majorité qualifiée). Pour instaurer l’action unique demandée par

le CdA, 4 étapes sont nécessaires :

- Transformer les actions au porteur en actions nominatives : l’art. 622

prévoit que les deux types d’actions peuvent coexister. Plus encore,

l’art. 622 al. 3 précise que la conversion est tout à fait possible. Cette

conversion nécessite le changement des statuts sur la base d’une

décision de l’AG prise à la majorité simple (art. 703 CO).

- Convertir des actions de 200 en actions de 50 : selon l’art. 623 CO, il

est possible de diviser ou réunir les actions, avec les conséquences

sur leur valeur que cela entraîne, le CA devant rester inchangé. Dans

notre cas, chaque action de 200 (au porteur) sera divisée en 4 actions

nominatives à 50. Au final, il existerait alors 16'000 actions nominatives

supplémentaires à 50 (soit 20'000 actions au total). Pour ce faire, les

statuts doivent être modifiés, par une décision de l’AG prise à la

majorité simple (art. 703 CO, 704 CO a contrario). De plus, le montant

du CA ne doit pas subir de changement. L’art. 623 prévoit aussi la

réunion d’actions (processus inverse). Naturellement, cela pose

problème : les actionnaires doivent s’arranger entre eux pour réunir

leurs actions, ce qui est extrêmement rares (qui plus parce que la

société n’a pas le droit de forcer les actionnaires de vendre).

IUR III 2012-2013 17

Page 18: Droit Commercial.docx · Web viewL’acte de fondation doit être passé en la forme authentique (art. 629 CO). Des organes doivent ensuite être créés : assemblée générale et

Jérémy Stauffacher Droit Commercial

- Supprimer le privilège patrimonial (dividende préférentiel de 5) : sur la

base de l’art. 654 al. 3 (et non pas 656f qui ne concerne que le capital-

participation), une double majorité est requise : l’assemblée spéciale

des actionnaires atteints (les actionnaires publics, titulaires des actions

au porteur privilégiées) et l’assemblée générale ordinaire (comme

toujours, pour les deux décisions : majorité simple, art. 703 CO).

- Résoudre la question du droit de vote : en principe, selon l’art. 692 CO,

les actionnaires exercent leur droit de vote en fonction de la valeur

nominale des actions possédées. Malgré tout, les statuts peuvent

prévoir que le droit de vote dépend du nombre d’action, sans égard à

la valeur nominale (art. 693 CO). Le nouveau système prévoit la

suppression des privilèges (patrimoniaux et sociaux) : dès lors, une

décision de l’AG est nécessaire pour la suppression du privilège social,

prise à la majorité simple (art. 703 CO). Actuellement, ce sont les

actionnaires disposant d’une action privilégiée, à savoir les

actionnaires ayant dépensé le moins pour acquérir leurs actions et

donc les actionnaires titulaires d’une action nominative. Dès lors, on

estime qu’il n’est pas nécessaire de favoriser plus encore ces

actionnaires : la décision sera prise à la majorité simple (art. 703 CO).

Ces 4 étapes sont donc possibles, il convient maintenant de se demander si

elles sont probables, au vu des motivations et des intérêts de chacun :

- 4000 pour la famille (1600 oui, 1600 non, 800 indécis).

- 2000 pour les autres actionnaires.

- 3001 voies sont nécessaires au total (majorité simple). Si l’on part du

principe qu’il est possible de convaincre le frère indécis, on réunirait

dès lors 2400. Malgré tout, il est nécessaire de réunir une double

majorité : dès lors, il est au moins nécessaire de réunir la majorité des

actionnaires disposant d’un privilège patrimonial (il s’agit des

actionnaires publics). Ainsi, il est nécessaire de réunir au moins 1001

actionnaires publics pour faire passer le projet.

Il faut préciser que si l’une des décisions est refusée, tout le package tombe à

l’eau et ne pourra être adopté. Il faut donc accepter toutes les mesures.

IUR III 2012-2013 18

Page 19: Droit Commercial.docx · Web viewL’acte de fondation doit être passé en la forme authentique (art. 629 CO). Des organes doivent ensuite être créés : assemblée générale et

Jérémy Stauffacher Droit Commercial

Cas n° 10

Il s’agit d’un cas d’actions nominatives non cotées en bourse. On peut

restreindre la transmissibilité des actions nominatives (exception), qui sont en

principe librement transmissibles (art. 684 CO). Il existe des exceptions

légales, prévues pour les actions non libérées (art. 685) et des exceptions

statutaires (art. 685a ss CO). Les deux justes motifs admis sont la

composition du cercle des actionnaires (le but social est un but lucratif) et

l’indépendance économique de la société (art. 685b al. 2 CO). Dans ce cas, le

motif est une question de domicile légal : en fonction de ce lieu, la clause

statutaire permet d’accepter ou de refuser la personne comme actionnaire.

Dans ce cas, ce motif de domicile ne semble pas pertinent : en effet, la

jurisprudence n’admet en général pas les raisonnements géographiques pour

fonder une restriction d’actionnariat. Le domicile n’a pas un rôle suffisamment

important dans les rapports entre société et actionnaire pour exclure un

actionnaire. Le deuxième juste motif prévu par l’art. 685b al. 2 CO est

l’indépendance économique : ce motif permet de refuser un actionnaire

concurrent. Cela est logique : on veut éviter qu’une société concurrente avec

une autre puisse la gérer. Dans notre cas, ce motif n’a aucune importance :

non seulement l’acheteur n’est pas concurrent mais en plus il n’achète que 60

actions sur les 800 au total. Ainsi, la clause d’exclusion ne va pas être

considérée comme un juste motif.

Si l’on représente la société (le CdA, qui accepte ou refuse les actionnaires,

art. 716 CO, au contraire des compétences de l’AG, prévues par l’art. 698),

on utilisera l’art. 685b al. 1 pour proposer à l’acheteur (l’aliénateur) de

racheter les actions (clause échappatoire). Ce type de clause n’a pas à être

prévue dans les statuts, il suffit que ceux-ci contiennent une clause instituant

une restriction de la transmissibilité des actions nominatives (actions

nominatives liées). Les actions doivent être rachetées à leur valeur réelle au

moment de la requête (le nouvel actionnaire demande à être inscrit). Pour

déterminer cette valeur réelle, l’art. 685b al. 5 précise que l’actionnaire peut

demander au juge de fixer la valeur réelle de l’action (ou valeur vénale), aux

frais de la société. La société a alors trois possibilités : racheter en son nom

IUR III 2012-2013 19

Page 20: Droit Commercial.docx · Web viewL’acte de fondation doit être passé en la forme authentique (art. 629 CO). Des organes doivent ensuite être créés : assemblée générale et

Jérémy Stauffacher Droit Commercial

(limite de 20%, art. 659 al. 2 CO), pour les actionnaires ou pour des tiers.

Dans ce cas, le problème est que la société a refusé de faire constater la

valeur vénale de l’action par le juge en proposant elle-même un prix. Dès lors,

elle viole le principe de la clause échappatoire. Ainsi, en application de

l’art. 685c al. 3, notre client est accepté comme actionnaire, la requête ayant

été refusée à tort. En effet, elle a tenté de modifier le principe de la clause

échappatoire et 3 mois se sont écoulés depuis la requête (1er septembre).

Dès lors, sauf si la société parvient à prouver que la valeur réelle est

effectivement de 1800 francs ou moins (auquel cas la société n’aurait pas

violé le principe de la clause échappatoire), l’acheteur est réputé accepté au

sein de la société en application de l’art. 685c al. 3 CO. La société a donc pris

trop de temps et a fait une offre nettement inférieure à la valeur vénale : de ce

fait, elle a refusé à tort d’intégrer l’acheteur.

Il faut faire une dernière précision relative à l’art. 685b, qui utilise les termes

d’acquéreur et d’aliénateur (notions qui doivent être interprétées en fonction

du cas d’espèce). Lorsque la loi parle d’aliénateur, il s’agit plutôt de

l’actionnaire accepté qui souhaitait vendre ses propres actions. Enfin, si

l’acquéreur n’avait pas directement refusé l’offre de la société à 1800 francs,

on applique l’art. 685b al. 6 : l’offre de 1800 francs aurait été acceptée.

Cas n° 11

La répartition des actions (en fonction du montant des actions) est sans

importante. En effet, selon l’art. 703 CO, la majorité est requise par rapport

aux actions représentées. Lorsqu’on parle d’AG, il existe l’AG ordinaire,

extraordinaire et universelle (art. 699 al. 2-3 et 701 CO). Une assemblée

universelle peut se tenir en cas d’accord si tous les représentants sont

présents. L’assemblée ordinaire est obligatoire chaque année. Dans notre

cas, on part du principe qu’il s’agit d’un AG ordinaire.

IUR III 2012-2013 20

Page 21: Droit Commercial.docx · Web viewL’acte de fondation doit être passé en la forme authentique (art. 629 CO). Des organes doivent ensuite être créés : assemblée générale et

Jérémy Stauffacher Droit Commercial

L’AG a la compétence pour modifier les statuts en vue de rendre possible la

création d’un système dualiste (direction exécutant les tâches concrètes et

CdA gérant la stratégie et exerçant la surveillance, art. 716b CO). Suite à la

modification des statuts, le CdA doit rédiger un règlement d’organisation

précisant la répartition des tâches (capacité du tiers gérant, limites). Ce

règlement d’organisation est un document interne, inaccessible à l’ensemble

du public (les statuts sont accessibles au RdC). En matière de majorité (selon

les art. 703-704 CC), la modification des statuts en vue de l’introduction d’un

système de gestion dualiste nécessite, selon la loi, une majorité simple (sous

réserve des statuts naturellement). Il faut donc toujours vérifier l’art. 704 al. 1

puis l’art. 704 al. 2 CO, qui renvoie aux statuts. Si rien n’est précisé dans la loi

et dans les statuts, l’art. 703 CO s’applique : majorité simple.

Dans notre cas, 600 actions étaient représentées à l’AG, la majorité simple

l’art. 703 est fixée à 301. Étant donné que 310 voix se sont exprimées en

faveur de la modification des statuts (100 contres et 190 abstentions), la

mesure est adoptée. Les 190 abstentions doivent être prises en compte dans

le pourcentage du vote (les abstentions sont au final assimilées à des non

étant donné que la majorité requise est fondée sur le nombre total

d’actionnaires, qu’ils s’abstiennent ou non). La délégation de compétence est

donc valable. Concernant les informations, Pierre-André ne peut utiliser le

droit de l’art. 697 CO car celui-ci doit être exercé durant l’AG. On se demande

ensuite si P-A pourrait avoir accès au règlement d’organisation, précisant la

répartition des tâches. L’art. 716b al. 2 CO exige une requête d’un actionnaire

(ou d’un créancier) et un intérêt digne de protection. Les créanciers peuvent

ainsi vouloir savoir qui représente la société (ce qui est précisé dans les

statuts, art. 718 al. 1 CO) ou qui exerce effectivement le pouvoir (influence

interne des membres du CdA). L’actionnaire, de son côté, dispose d’un droit

d’accès général au règlement d’organisation (selon la doctrine majoritaire).

L’art. 716b donne un droit permanent à l’actionnaire d’avoir accès au

règlement, au contraire de l’art. 697 qui prévoit un droit aux renseignements

uniquement pendant l’AG. P-A pourrait ouvrir action sur la base de l’art. 706,

mais cela nécessite une violation de la loi ou des statuts. Le juge n’a aucune

compétence pour vérifier l’opportunité d’une décision de l’AG.

IUR III 2012-2013 21

Page 22: Droit Commercial.docx · Web viewL’acte de fondation doit être passé en la forme authentique (art. 629 CO). Des organes doivent ensuite être créés : assemblée générale et

Jérémy Stauffacher Droit Commercial

On constate que le CdA a décidé de donner beaucoup de pouvoirs au

nouveau venu. Or, il est impossible d’attaquer en justice les décisions du

CdA, selon le principe de la répartition des pouvoirs entre les différents

organes. L’art. 706b CO précise quelles sont les décisions nulles. Malgré la

lettre de cet article, la nullité concerne également les décisions du CdA, et

non seulement de l’AG. Il s’agit d’une nullité de plein droit, invocable par tout

le monde et qui ne peut être guéri par l’écoulement du temps (au contraire

des décisions annulables au sens de l’art. 706, qui entrent en force si elles ne

sont pas attaquées dans les deux mois suivant l’AG). Les décisions du CdA

ne peuvent donc pas être attaquées sur la base de l’art. 706 CO.

Par contre, il est possible de se fonder sur l’art. 717 CO (qui reprend les

conditions de la RC : dommage, acte illicite, faute et lien de causalité). La

société peut également révoquer les membres du CdA si cela s’avère

nécessaire. En pratique, les actions en responsabilité civile (art. 754 CO) sont

presque toujours intentées à la faillite de l’entreprise (il est très difficile de

prouver l’existence d’un dommage le reste du temps).

Concernant le contrôle par l’AG et les actionnaires, le TF a statué dans un

ATF 137 III 503 en précisant que si l’AG peut décider de la mesure de la

délégation. En effet, l’AG étant compétente sur le principe de la délégation,

elle doit également l’être concernant ses modalités. Une partie de la doctrine

estimait au contraire que les modalités de gestion dépendaient exclusivement

du CdA (compétences inaliénables du CdA selon la loi).

En l’espèce, on pourrait imaginer que PA pourrait demander l’adoption d’une

disposition statutaire précisant les compétences des personnes nommées au

CdA. Vu que P-A ne dispose que de 100 voix, il ne pourrait naturellement pas

faire adopter cette disposition à lui tout seul. Enfin, l’art. 754 al. 2 CO

(semblable à l’art. 55 CO) précise la responsabilité en matière de délégation.

IUR III 2012-2013 22

Page 23: Droit Commercial.docx · Web viewL’acte de fondation doit être passé en la forme authentique (art. 629 CO). Des organes doivent ensuite être créés : assemblée générale et

Jérémy Stauffacher Droit Commercial

Cas n° 12

Il n’existe aucun quorum pour les AG. En tout, lors de cette AG, 2000 actions

étaient représentées (400 à 1000 et 1600 à 500). L’augmentation autorisée

est régie à l’art. 651 CO. L’augmentation ne peut être supérieure à la moitié

du CA préexistant (art. 651 al. 2 CO), ce qui ne pose pas de problème ici.

Concernant l’adoption, une majorité de deux tiers est nécessaire (majorité

qualifiée au sens de l’art. 704 al. 1 ch. 4 CO). Il faut donc les 2/3 des voies

représentées, soit 1'333 voies (1'350, cette condition est remplie). Une

deuxième condition existe : la majorité de la valeur nominale est requise

(et non plus selon le principe 1 action 1 voie). La majorité absolue des valeurs

nominales est donc de 600'500 (400 x 1'000 + 1'600 x 500, le tout divisé par

deux + 1 voie, soit au minimum 500). On calcule alors la valeur nominale de

l’ensemble des oui (875'000) et l’on constate que la majorité des valeurs

nominales est remplie : l’augmentation autorisée du CA est acceptée.

Le législateur entend protéger les petits actionnaires (qui n’ont pas de droit de

vote privilégié). Or, si l’on demandait la majorité de l’art. 704 CO pour abolir

les actions à droit de vote privilégié, il serait plus compliqué de protéger les

petits actionnaires. Dès lors, l’introduction demande une majorité qualifiée de

l’art. 704 CO mais pas l’abolition. Dès lors, la majorité pour l’abolition est de la

moitié + 1 voie (majorité absolue, 1001 voies). Or, étant donné qu’il n’y a que

850 oui, la décision paraît refusée. Toutefois, l’abstention des banques n’est

pas valable. En effet, la loi prévoit que les dépositaires qui n’ont pas reçu

d’instructions doivent suivre les propositions du CdA (art. 789b al. 2 CO). En

l’occurrence, si l’on ajoute les 300 abstentions des banques (100 ont déjà

accepté la proposition), on obtient 1'150 voies pour, et donc l’acceptation de

l’abolition des actions à droit de vote privilégié. Il faut donc attaquer la

décision auprès du juge sur la base de l’art. 706 CO. Ainsi, si la loi avait été

respectée, l’abolition aurait été acceptée : le juge peut donc demander que

les modifications soient effectuées dans les statuts.

IUR III 2012-2013 23

Page 24: Droit Commercial.docx · Web viewL’acte de fondation doit être passé en la forme authentique (art. 629 CO). Des organes doivent ensuite être créés : assemblée générale et

Jérémy Stauffacher Droit Commercial

Cas n° 13

Les articles sur la SA commencent à l’art. 620 CO. Le contrôle ordinaire

débute à l’art. 727 CO et le contrôle restreint à l’art. 729 CO (ainsi que 727a).

Il y a ensuite un certain nombre de dispositions communes dès l’art. 730 CO.

Selon l’art. 727 al. 1 CO, le contrôle ordinaire est exigé pour les sociétés

cotées en bourse, pour les sociétés ayant contracté un emprunt par obligation

selon l’art. 1156 CO et pour les sociétés holding (rapport entre sociétés). De

même, les sociétés remplissant deux des caractéristiques suivantes doivent

également se soumettre au contrôle ordinaire : bilan de 20 millions, chiffre

d’affaire de 250 millions et effectif de 250 emplois à plein temps.

Cette disposition a été modifiée récemment pour soulager les entreprises

(selon l’art. 727 al. 1 ch. 2) : les exigences sont donc plus souples, moins

d’entreprises sont soumises au contrôle ordinaire. L’art. 727 al. 2-3 permet

ensuite aux actionnaires de demander un contrôle ordinaire ou à l’entreprise

de fixer ce contrôle dans ses statuts.

Selon l’art. 727a al. 1 CO, toutes les entreprises qui ne sont pas soumises au

contrôle ordinaire sont soumises au contrôle restreint, sauf exception de

l’art. 727a al. 2 CO. En effet, si tous les actionnaires y consentent et si

l’effectif de la société ne dépasse pas 10 emplois à plein temps, il est possible

de renoncer à tout contrôle. Dès lors, sauf ces (petites) entreprises, toutes les

sociétés sont au moins soumises au contrôle restreint. Il s’agit à présent de

comparer les deux types de contrôle : ordinaire et restreint :

Qualité professionnelle des réviseurs : selon l’art. 727b CO, les

sociétés ouvertes au public (au sens de l’art. 727 al. 1 ch. 1 CO) sont

soumises à la surveillance de l’État. En plus de la surveillance étatique,

le réviseur doit être un (expert-)réviseur agréé. Les autres sociétés

tenues au contrôle ordinaire (art. 727 al. 1 ch. 2-3 CO) doivent être

contrôlées par un expert-réviseur agréé. Pour le contrôle restreint, un

réviseur agréé est exigé (et non pas un expert-réviseur).

IUR III 2012-2013 24

Page 25: Droit Commercial.docx · Web viewL’acte de fondation doit être passé en la forme authentique (art. 629 CO). Des organes doivent ensuite être créés : assemblée générale et

Jérémy Stauffacher Droit Commercial

- Degré de vérification : dans le contrôle ordinaire, on parle d’attestation

positive (art. 728 CO). Au contraire, dans le contrôle restreint, on parle

d’attestation négative (ou review, note marginale de l’art. 729 CO).

L’attestation négative se limite à vérifier une partie des documents de

l’entreprise. Dès lors, le contrôle restreint ne fait qu’affirmer que les

éléments contrôlés sont corrects, au contraire du contrôle ordinaire.

- Objet de l’examen (art. 728a CO) : l’organe de révision vérifie les

comptes annuels (art. 662 al. 2 et art. 662a CO), l’emploi du bénéfice

(selon l’art. 671 ss CO : constitution légale de réserves et versement

aux actionnaires) et le système de contrôle interne. Précisons par

contre que la gestion de l’entreprise n’est pas contrôlée : le CdA dirige

la société de manière totalement indépendant. L’organe de révision

vérifie donc la légalité et non pas l’opportunité (art. 728a al. 3 CO).

Au contraire, dans le contrôle restreint, le système de contrôle interne

n’est pas pris en compte. De plus, l’organe de révision n’effectue des

vérifications qu’en cas de doute sur une éventuelle violation de la loi ou

des statuts. Il n’y a donc pas d’examen général de tous les documents

mais une vérification ciblée aux éléments suspicieux.

- Indépendance : l’art. 728 al. 2 CO (contrôle ordinaire) prévoit une liste

des cas dans lesquelles l’indépendance pourrait être mise à mal.

Au contraire, il n’existe pour le contrôle restreint aucune liste (il s’agit

d’une liste non-exhaustive) des cas litigieux (art. 729 CO).

- Les rapports : le contenu du rapport du contrôle ordinaire est précisé à

l’art. 728b CO (al. 1 pour le CdA et al. 2 pour l’AG). Le rapport envoyé

au CdA est détaillé alors que le rapport pour l’AG est résumé. Pour le

contrôle restreint, l’art. 729b CO précise qu’un seul rapport à l’attention

de l’AG est nécessaire (pas de rapport détaillé pour le CdA).

- Avis : pour le contrôle ordinaire, l’art. 728c CO prévoit un avis

obligatoire au CdA en cas de problèmes financiers (art. 725 ss CO). De

même, il est parfois possible d’avertir l’AG en cas de violation grave.

Pour le contrôle restreint, par contre, une seule obligation du contrôle

ordinaire est maintenue : celle d’aviser le juge en cas de

surendettement manifeste lorsque le CdA ne le fait pas.

IUR III 2012-2013 25

Page 26: Droit Commercial.docx · Web viewL’acte de fondation doit être passé en la forme authentique (art. 629 CO). Des organes doivent ensuite être créés : assemblée générale et

Jérémy Stauffacher Droit Commercial

Il convient à présent de parler des opting (out et down ; in et up). L’opting out

correspond à la renonciation à la révision (art. 727a al. 2 CO). L’opting down

est un contrôle effectué par une personne non-habilitée à le faire. L’opting in

est un choix d’effectuer un contrôle alors qu’aucune disposition légale ne

l’exige (art. 727a al. 4 CO : cet opting suit donc forcément un opting out).

Enfin, l’opting up correspond à l’art. 727 al. 2-3 et donc à la demande de

contrôle par les actionnaires ou au contrôle selon une disposition statutaire

votée à l’AG. Les 4 types d’opting sont donc directement reliés au CO et

correspondent aux possibilités légales. L’opting down est un cas particulier :

étant effectué par un réviseur « autre », l’inscription au RdC est impossible.

Dans notre cas, la société ne remplit aucune des conditions de l’art. 727 CO :

de par la loi, le contrôle ordinaire n’est pas exigé. Pourtant, la société décide

de faire un contrôle (il ne s’agit pas d’opting up étant donné qu’aucune

disposition statutaire n’exige un contrôle). Dès lors, selon l’art. 727a, la

société doit être soumise à un contrôle restreint, sauf si l’on se trouve dans un

cas d’application de l’art. 727a al. 2 CO (opting out : l’opting down est

quasiment laissé de côté puisqu’il ne s’agit pas véritablement d’un type de

contrôle à part entière). Il faut donc vérifier si l’opting out était valable : la

condition des 10 employés est respectée et il faut donc analyser l’accord de

tous les actionnaires. Caroline, en l’occurrence, demande un contrôle

restreint, selon l’art. 727a al. 4 CO (opting in : il faut partir du principe que

Caroline a, à l’origine, accepté l’opting out). Elle peut donc exiger un contrôle

restreint. Par contre, elle ne peut pas demander de contrôle ordinaire, car elle

devrait posséder 10% du CA : seule elle ne peut pas demander de contrôle

ordinaire. Par contre, si elle parvient à convaincre certains membres de sa

famille, elle pourrait demander un tel contraire (opting up).

Dans le droit de la SàRL (art. 818 ss CO), l’art. 818 CO précise que les

articles applicables à la SA sont applicables par analogie. Tout de même, un

associé soumis à l’obligation d’effectuer des versements supplémentaires

(art. 725 CO : différence entre SA et SàRL : dans la SàRL, les associés

peuvent être obligés à effectuer des versements supplémentaires) peut

requérir un contrôle ordinaire des comptes annuels (désaccord doctrinal entre

le commentaire romand et le commentaire bâlois, art. 727 al. 2 CO).

IUR III 2012-2013 26

Page 27: Droit Commercial.docx · Web viewL’acte de fondation doit être passé en la forme authentique (art. 629 CO). Des organes doivent ensuite être créés : assemblée générale et

Jérémy Stauffacher Droit Commercial

Cas n° 14

Dans le bilan, les 40 (caisses), les 50 (créances) et les 70 (stocks) forment

l’actif circulant alors que les 170 et 250 forment l’actif immobilisé. Avant

l’achat des machines, le bilan se présentait de la manière suivante :

- Actifs : 40, 50, 70, 170 (la valeur des machines de 250 et la perte de

200 due à la dépréciation de valeur sont supprimées).

- Passifs : 150, 40, 40 et 200 (seuls les 350 correspondant à l’emprunt

sont supprimés : l’emprunt a été fait pour acheter les machines).

- Bilan (430) : il manque encore 100 dans la caisse étant donné que

l’emprunt a été fait à hauteur de 350 (sur 450) : 100 ont été dépensés.

Il faut calculer la valeur de la société (avant et après), correspondant à l’actif

net (actif moins auquel on soustrait les dettes) : on obtient 280 (430 – 150)

avant l’achat des machines et 80 (580 – 500) après l’achat. On craint donc

une situation de surendettement au sens de l’art. 725 CO : si la moitié du CA

et des réserves légales n’est plus couverte, on est en cas de surendettement.

Dans ce cas, on compare 280 (CA + réserves), que l’on divise par 2 (140),

avec l’actif net (80) : il n’est possible de couvrir que 80 : il y a surendettement.

On peut également faire le calcul inverse en prenant en compte la perte

(200), qui est supérieure à la couverture légale nécessaire (140). Il y a donc

surendettement à cause de la perte de valeur des machines, qui peut être

due à un mauvais investissement de la part de Serac. On se tourne donc vers

la responsabilité des organes pour vérifier les agissements de Serac.

L’art. 754 CO pose les bases de la responsabilité des organes : « les

membres du conseil d’administration et toutes les personnes qui s’occupent

de la gestion ou de la liquidation répondent à l’égard de la société, de même

qu’envers chaque actionnaire ou créancier social, du dommage qu’ils leur

causent en manquant intentionnellement ou par négligence à leurs devoirs  ».

On retrouve les 4 critères habituelles de la RC : dommage, lien de causalité,

acte illicite et faute. L’art. 717 CO précise quels sont les devoirs de diligence

et de fidélité. Dans notre cas, il y a délégation au sens de l’art. 754 al. 2 CO.

IUR III 2012-2013 27

Page 28: Droit Commercial.docx · Web viewL’acte de fondation doit être passé en la forme authentique (art. 629 CO). Des organes doivent ensuite être créés : assemblée générale et

Jérémy Stauffacher Droit Commercial

Avant d’analyser la responsabilité du délégué Serac, on se demande si le

demandeur, Petitgris, a la possibilité d’attaquer le responsable. Logiquement,

selon l’art. 756 CO précise les prétentions hors faillite (art. 757 CO). Dans

notre cas, on se tourne vers l’art. 756 CO (hors faillite). Il faut donc qu’un

dommage soit causé à la société (qui doit être différencié du dommage de

l’actionnaire). Petitgris dispose de 10% de la société, qui subit un dommage

de 200 (dépréciation des machines), et subit donc un dommage de 20

(dommage réfléchi, indirect : en étant actionnaire, Petitgris subit une certaine

perte). En droit de la SA, comme précisé à l’art. 756 CO, l’actionnaire ne peut

pas faire valoir son dommage mais uniquement le dommage de la société.

Naturellement, s’il obtient la réparation du dommage de la société, son

dommage sera automatiquement réparé. Petitgris va donc pointé le dommage

de 200 subi par la société. L’action peut être dirigée contre Serac, sur la base

de l’art. 754 al. 1 CO (en lien avec l’art. 756) ou contre tout autre membre du

CdA selon l’art. 754 al. 2 CO (délégation). On analyse donc les deux :

- Action selon l’art. 754 al. 1 CO (Serac en tant qu’exécutant) :

o Dommage : le dommage correspond au 200.

o Acte illicite (art. 717 CO : fidélité, diligence et égalité) : le juge

doit se placer au moment où la décision a été prise pour estimer

si la décision était ou non irréfléchie. Il faut que les actes soient

faits raisonnablement dans l’intérêt de la société, sur la base de

informations suffisantes et en absence de conflits d’intérêts. S’il

existe un conflit d’intérêt, il sera difficile de prouver le respect du

devoir de diligence. De même, si l’administrateur n’était pas

suffisamment informé (ce qui est très difficile à vérifier), on peut

estimer qu’il y a violation du devoir de diligence. Enfin, il faut

que la décision prise ne soit pas manifestement déraisonnable.

En l’espèce, aucune de ces trois conditions n’est remplie : il

s’agissait de nouvelles machines innovatrices (seule la condition

de l’information pourrait être utilisée, mais cela est compliqué).

o Lien de causalité naturelle et adéquate : il est clair que le lien de

causalité est rempli : c’est la dépense des machines qui est à

l’origine de la perte de 200 (dépréciation des machines).

IUR III 2012-2013 28

Page 29: Droit Commercial.docx · Web viewL’acte de fondation doit être passé en la forme authentique (art. 629 CO). Des organes doivent ensuite être créés : assemblée générale et

Jérémy Stauffacher Droit Commercial

o Faute : la faute n’a presque aucun impact : son aspect subjectif

est réduit à la question de la capacité de discernement. Dès

lors, l’aspect objectif de la faute est assimilé à l’illicéité.

Au final, il sera difficile pour Petitgris de prouver la responsabilité de

Serac, principalement à cause de la condition de l’acte illicite.

- Action selon l’art. 754 al. 2 CO (CdA ayant délégué, art. 55 CO) :

o Une délégation licite : en l’espèce, la délégation est licite

(prévue par les statuts et précisée dans le règlement) mais

pourrait tout de même poser un problème. En effet, le CdA

aurait pu violé la loi (ou les statuts) en déléguant des pouvoirs

inaliénables (attributions du CdA, art. 716a CO). On pourrait se

demander si la délégation n’est pas illicite par excès. Dès lors, si

la délégation est illicite, le CdA répondrait directement sur la

base de l’art. 754 al. 1 CO (violation directe de la loi).

o Un délégataire (CdA) : le CdA peut exclure sa responsabilité en

invoquant les trois curae (choix, instruction et surveillance) : le

CdA devra prouver qu’il a vérifié les compétences de la

personne, qu’il a concrètement instruit clairement le délégué en

lui expliquant la stratégie de l’entreprise et qu’il demande des

informations du délégué afin de contrôler ses agissements. Dès

lors, si l’on avait accepté une violation du devoir de diligence de

la part de Serac, il faudrait vérifier le respect de ces curae. Il est

possible d’attaquer plusieurs membres (question de solvabilité).

o Un délégué causant un acte illicite : on renvoie ici aux conditions

générales de la responsabilité, examinées ci-dessus.

Dès lors, aucune des actions ne paraît pouvoir aboutir de par l’absence d’acte

illicite de Serac, qu’il agisse en tant que délégué (art. 756 al. 1 CO) ou en tant

qu’administrateur (art. 756 al. 1 CO). Attaquer Serac ou le CdA ne change

rien à la situation : l’absence d’acte illicite empêche les actions. La meilleure

solution serait donc de se concentrer sur l’art. 716a pour prouver la présence

d’une délégation excessive. L’entrée en vigueur du CPC a supprimé une

clause du CO sur la répartition des frais : l’actionnaire paye les frais (ce qu’il

faudrait changer : la société devrait supporter les frais de procédure).

IUR III 2012-2013 29

Page 30: Droit Commercial.docx · Web viewL’acte de fondation doit être passé en la forme authentique (art. 629 CO). Des organes doivent ensuite être créés : assemblée générale et

Jérémy Stauffacher Droit Commercial

Cas n° 15

Les prétentions concernent la faillite (art. 756 ss CO). La différence majeure

entre l’art. 756 et l’art. 757 réside dans l’état de la société (faillite ou hors

faillite). Peut agir selon l’art. 756 CO (prétentions hors faillite) la société (AG)

et chaque actionnaire. Pour agir il faut un dommage, un acte illicite, un lien de

causalité et une faute. Dans le cadre de l’art. 756 (hors faillite), l’actionnaire

ne peut tenter de faire réparer qu’un dommage réfléchi (c’est donc toute la

société qui va profiter de l’éventuel succès de l’action). En pratique donc, cet

article est très peu utilisé, au contraire des prétentions de l’art. 757 CO, qui

concerne la situation en faillite. Peut agir sur la base de l’art. 757 CO toute

personne qui a des prétentions envers la société (administration de la faillite).

Si l’administration de la faillite n’exerce pas ses droits (cession de créance),

tout créancier ou actionnaire peut ensuite ouvrir une action personnelle et

obtenir, le cas échéant, une réparation personnelle (et non globale). Seul

l’éventuel surplus sera ensuite réparti entre les personnes qui n’ont pas fait

valoir leurs droits dans la poursuite. Dans le cadre de cet article, la société

elle-même n’existe plus (plus d’organes).

Toute la question tourne en principe autour de l’existence d’un dommage

(préjudice) et des 3 conditions. Dans notre cas, on peut penser que les

versements faits à Jean-Jacques ainsi que les rabais octroyés sur le prix

constituent un dommage, qui affecte directement la société (dommage que

l’on distingue du dommage direct des actionnaires ou des créanciers :

violation d’une norme qui a pour but de protéger ces personnes

exclusivement ou violation de l’art. 41 CO, notamment par l’établissement

d’un faux-bilan). Concernant l’illicéité, il peut s’agir de la violation d’une norme

légale ou des statuts. Il faut que la société ait violé un devoir imposé par la loi

ou par les statuts (devoir de diligence). On pense donc tout de suite à l’art.

717 CO : devoir d’égalité de traitement, de diligence et de fidélité (on peut

aussi penser aux art. 716a, 725 CO). En l’espèce, on peut penser que la

diligence et la fidélité ont été bafouées : en privilégiant des tiers, la société a

mal agi (intérêts de la société). Il faut ensuite un lien de causalité naturelle et

adéquate entre les actes de Yvonne, ceux de Louis-Marc (on attaque donc,

IUR III 2012-2013 30

Page 31: Droit Commercial.docx · Web viewL’acte de fondation doit être passé en la forme authentique (art. 629 CO). Des organes doivent ensuite être créés : assemblée générale et

Jérémy Stauffacher Droit Commercial

sur la base de l’art. 754 CO, toutes les personnes qui s’occupent de la

gestion, organes matériels et organes de fait) ainsi que ceux de Brigitte (nous

reviendrons à ce point ci-dessous) et le préjudice causé. Enfin, il faut une

faute (conception objective : capacité de discernement présumée) : on se met

donc à la place d’un administrateur moyen et diligent pour apprécier la

diligence requise. Dès lors, la faute correspond à l’illicéité. On peut donc

répondre à la première question : la masse en faillite (État administrant les

biens en faillite) peut agir. Concernant la masse en faillite, il s’agit en fait de

tous les actifs de la société. Si elle agit, l’argent ira aux créanciers (selon un

certain ordre). Elle n’a bien entendu pas l’obligation d’agir (art. 757 CO).

Comme le précise l’art. 757 al. 2, ce n’est qure subsidiaire que les divers

créanciers ou actionnaires pourront agir. Si des actionnaires et des créanciers

agissent, l’argent sera d’abord attribué aux créanciers, puis aux actionnaires

et enfin dans la masse (selon l’excédent). En l’espèce, la masse en faillite

peut agir mais ne le doit pas (ce sont alors les créanciers et les actionnaires

qui peuvent agir : subsidiairement). Du côté des prétendus responsables,

Yvonne tentera de dire qu’elle ne fait que suivre les ordres qu’on lui donne.

Or, il n’est pas possible de faire valoir un contrat de fiducie pour se dégager

d’une responsabilité légale : le fait d’être au CdA et de conclure un contrat de

fiducie viole l’art. 717 CO (manquement à sa diligence : c’est elle qui doit

gérer la société). Lorsque la faillite est ouverte, il est impossible d’invoquer la

décharge (art. 758 CO : sauf faits révélés). Il faut également respecter le délai

de prescription de l’art. 760 CO. Dans ce cas, l’art. 759 CO précise qu’il est

impossible de rechercher un seul responsable pour l’ensemble.

Cas n° 16

Les art. 736 ss CO traitent de la dissolution. Les causes sont diverses : les

statuts (conditions, but précis ou durée limitée, art. 627 ch. 4), une décision

de l’AG (prise à la majorité qualifiée, art. 704 al. 1 ch. 8 CO), l’ouverture de la

faillite (procédure de LP en cas de surendettement, art. 725 ss CO), une

décision judiciaire (requête de dissolution sur justes motifs) et diverses autres

causes légales (carences d’organisation, art. 731b al. 1 ch. 3 CO).

IUR III 2012-2013 31

Page 32: Droit Commercial.docx · Web viewL’acte de fondation doit être passé en la forme authentique (art. 629 CO). Des organes doivent ensuite être créés : assemblée générale et

Jérémy Stauffacher Droit Commercial

La dissolution par jugement (ch. 4) pose le problème de la définition des

justes motifs. Cette disposition peut prévoir la dissolution en ultima ratio. Les

justes motifs peuvent consister en diverses circonstances : le Tribunal fédéral

a notamment mentionné les différents justes motifs suivants :

- L’abus de position dominante qui amène une majorité à décider

systématiquement à l’encontre des intérêts de la société ou des

intérêts légitimes des actionnaires minoritaires.

- Une mauvaise gestion courante de nature à entraîner la ruine de la

société, une violation des droits des actionnaires minoritaires

- Une attitude qui rend impossible l’atteinte du but social.

- Un comportement étranger au but social ou un blocage des organes.

La dissolution est une ultima ratio qui doit respecter le principe de la

proportionnalité, en tenant compte de l’intérêt que peuvent avoir les autres

actionnaires au maintien de la société. La dissolution n’étant qu’une mesure

subsidiaire, elle ne sera pas prononcée s’il apparaît, à la suite d’un examen

concret des circonstances, que l’actionnaire minoritaire peut défendre ses

intérêts légitimes par une voie moins incisive (par exemple en demandant

l’annulation d’une décision de l’AG ou l’institution d’un contrôleur spécial).En

outre, le Tribunal fédéral a relevé qu’au sein des sociétés anonymes, les

motifs personnels cèdent le pas devant les intérêts financiers de sorte qu’en

principe il n’y a pas lieu de dissoudre une société qui réalise des bénéfices.

En l’occurrence, Xana dispose de plus de 10% (32%) mais doit se fonder sur

un juste motif. Les plaintes pénales n’ont aucune influence : la SA doit être

comprise dans un sens économique et non personnel. Selon l’art. 680 al. 2,

Xana n’a aucun droit à réclamer le remboursement des actions. Le juge, par

contre, pourrait forcer la société à racheter ses actions (art. 659 CO) si la part

de Xana était inférieure à la limite des 10% (en effet, le rachat forcé d’actions

est une mesure plus souple que la dissolution). Il serait aussi possible de

réduire le CA (art. 732 CO), avec les limites légales (-32% possible). Enfin, la

société pourrait être scinder en deux nouvelles sociétés. Dès lors, même si

Xana pourrait prouver un juste motif, elle ne pourrait pas obtenir la dissolution

car il existe d’autres moyens moins contraignants.

IUR III 2012-2013 32