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1 Droit pénal En général, le Droit est assimilé au Droit pénal, mais en réalité ce n’en est qu’un aspect particulier. Aussi, le Droit pénal évoque toujours des sentiments d’émotion (meurtres, vols…). Existent également le Droit pénal des affaires, le Droit pénal spécial. Par définition, le Droit pénal est un ensemble de règles juridiques qui organisent la réaction de l’Etat vis-à-vis de délinquants qui méconnaissent les valeurs de la société. Par extension, en parlant de Droit pénal on parle aussi du Droit criminel, qui n’est pas le même que le Droit des crimes, car c’est le Droit des infractions. On parle aussi du Droit des sanctions (= des peines). Le contenu du Droit criminel Le législateur nous donne dans le Code Pénal une liste d’infractions. Ces infractions, ce sont des actes interdits. Cette liste fait l’objet d’un cours de Droit pénal spécial. Elles sont dans les livres II, III, IV et V du Code Pénal. Dans le livre II, le législateur décrit les infractions portant atteinte à la personne, dans le III les infractions portant atteinte aux biens, dans le IV à la chose publique, dans le V de tout le reste. Chaque infraction commence par un n°. L’art. 220 par exemple, avec le 2 en premier chiffre nous indique qu’il s’agit d’une infraction portant atteinte à la personne. Le livre I, l’objet ici, traite des règles fondamentales de Droit pénal. On évoquera la définition des infractions, les personnes responsables, comment elles peuvent échapper à la responsabilité (légitime défense, en invoquant l’amnistie) et les sanctions. Le Droit pénal, c’est l’étude du phénomène criminel. Une infraction, c’est d’abord une fiction juridique, une création de l’homme. C’est aussi un fait contraire à l’ordre social, prévu et puni par la Loi. Il est contraire à un ordre établi par l’Etat, qui n’est pas l’ordre moral, ni l’ordre religieux. Les religions catholiques et musulmanes considèrent que le suicide est un acte interdit. Le Droit pénal ne sanctionne pas une personne qui tente de se suicider et échoue. L’ordre religieux prévoit certaines interdictions (manger de la viande pendant le carême, dans la journée pendant le Ramadan), ce que le Droit pénal ne sanctionne pas. L’ordre moral suppose que lorsqu’on se marie, on n’ait pas de relations adultères. Depuis 1975, l’adultère n’est plus un délit. Parfois, l’ordre social correspond à l’ordre moral, religieux, parfois non. C’est identique pour le meurtre. Toutes les religions condamnent la mort portée à autrui. L’ordre social évolue. On abandonne certaines infractions (ou incriminations, c’est-à-dire le comportement décrit par la loi) car elles ne correspondent plus à la société. L’adultère, jusqu’en 1975 était un délit punissable différemment selon qu’on était un homme ou une femme (pour la femme, en quelque endroit que ce soit, pour l’homme uniquement au domicile conjugal). Aujourd’hui, c’est une cause de divorce. En 1975, c’est aussi la suppression du délit d’avortement. Jusqu’à la vingtième semaine, il est autorisé. En 1994, le délit de mendicité est supprimé. En 2003, un nouveau délit est créé, la mendicité agressive. L’ordre social reflète les valeurs d’une société. Aujourd’hui, on a l’intention de faire chuter le nombre de morts sur les routes. Est par exemple créé le délit de grand excès de vitesse (au-delà d’un différentiel de 50 Km/h). Le délit de conduite sans permis de conduire existe aussi. Un problème récurrent est l’euthanasie (affaire Vincent Humbert). Une loi a été créée pour pouvoir prévoir qu’il n’y aura pas d’acharnement thérapeutique. Un fait qui trouble l’ordre social est un fait commis par une personne ou un groupe de personne (mais jamais par un animal).

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Droit pénal

En général, le Droit est assimilé au Droit pénal, mais en réalité ce n’en est qu’un aspect particulier. Aussi, le Droit pénal évoque toujours des sentiments d’émotion (meurtres, vols…). Existent également le Droit pénal des affaires, le Droit pénal spécial. Par définition, le Droit pénal est un ensemble de règles juridiques qui organisent la réaction de l’Etat vis-à-vis de délinquants qui méconnaissent les valeurs de la société. Par extension, en parlant de Droit pénal on parle aussi du Droit criminel, qui n’est pas le même que le Droit des crimes, car c’est le Droit des infractions. On parle aussi du Droit des sanctions (= des peines). ◊ Le contenu du Droit criminel Le législateur nous donne dans le Code Pénal une liste d’infractions. Ces infractions, ce sont des actes interdits. Cette liste fait l’objet d’un cours de Droit pénal spécial. Elles sont dans les livres II, III, IV et V du Code Pénal. Dans le livre II, le législateur décrit les infractions portant atteinte à la personne, dans le III les infractions portant atteinte aux biens, dans le IV à la chose publique, dans le V de tout le reste. Chaque infraction commence par un n°. L’art. 220 par exemple, avec le 2 en premier chiffre nous indique qu’il s’agit d’une infraction portant atteinte à la personne. Le livre I, l’objet ici, traite des règles fondamentales de Droit pénal. On évoquera la définition des infractions, les personnes responsables, comment elles peuvent échapper à la responsabilité (légitime défense, en invoquant l’amnistie) et les sanctions. Le Droit pénal, c’est l’étude du phénomène criminel. Une infraction, c’est d’abord une fiction juridique, une création de l’homme. C’est aussi un fait contraire à l’ordre social, prévu et puni par la Loi. Il est contraire à un ordre établi par l’Etat, qui n’est pas l’ordre moral, ni l’ordre religieux. Les religions catholiques et musulmanes considèrent que le suicide est un acte interdit. Le Droit pénal ne sanctionne pas une personne qui tente de se suicider et échoue. L’ordre religieux prévoit certaines interdictions (manger de la viande pendant le carême, dans la journée pendant le Ramadan), ce que le Droit pénal ne sanctionne pas. L’ordre moral suppose que lorsqu’on se marie, on n’ait pas de relations adultères. Depuis 1975, l’adultère n’est plus un délit. Parfois, l’ordre social correspond à l’ordre moral, religieux, parfois non. C’est identique pour le meurtre. Toutes les religions condamnent la mort portée à autrui. L’ordre social évolue. On abandonne certaines infractions (ou incriminations, c’est-à-dire le comportement décrit par la loi) car elles ne correspondent plus à la société. L’adultère, jusqu’en 1975 était un délit punissable différemment selon qu’on était un homme ou une femme (pour la femme, en quelque endroit que ce soit, pour l’homme uniquement au domicile conjugal). Aujourd’hui, c’est une cause de divorce. En 1975, c’est aussi la suppression du délit d’avortement. Jusqu’à la vingtième semaine, il est autorisé. En 1994, le délit de mendicité est supprimé. En 2003, un nouveau délit est créé, la mendicité agressive. L’ordre social reflète les valeurs d’une société. Aujourd’hui, on a l’intention de faire chuter le nombre de morts sur les routes. Est par exemple créé le délit de grand excès de vitesse (au-delà d’un différentiel de 50 Km/h). Le délit de conduite sans permis de conduire existe aussi. Un problème récurrent est l’euthanasie (affaire Vincent Humbert). Une loi a été créée pour pouvoir prévoir qu’il n’y aura pas d’acharnement thérapeutique. Un fait qui trouble l’ordre social est un fait commis par une personne ou un groupe de personne (mais jamais par un animal).

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A côté du Droit pénal spécial, il y a le Droit pénal des affaires (dans d’autres codes) qui traite des infractions en matière de sociétés, de corruption, de banqueroute, de bourse… Un fait qui porte atteinte à l’ordre social est prévu et puni par la Loi qui envisage la sanction. A côté du Droit pénal général, il y a la pénologie, le Droit des peines, le Droit pénal international (conflits de compétence entre une loi française et une loi italienne par exemple, le mandat d’arrêt européen), le Droit international pénal (qui a commencé à s’élaborer au lendemain de la guerre avec le Tribunal de Nüremberg et de Tokyo), la création du TPIY à La Haye en 1993, la création du TPIR en 1996 et la Cour Pénale Internationale issue d’un traité conclu à Rome. Elle sera appelée à juger des crimes commis dans des pays où les pays ne veulent pas juger (les Etats-Unis n’en veulent pas car ils ont peur que leurs soldats en Irak y soient jugés). La procédure pénale (2ème année) a pour objet d’expliquer les règles de poursuites. Il y a une politique criminelle ayant comme but premier la prévention, la réinsertion. Elle se fait auprès du ministre de la justice, du garde des sceaux. Aujourd’hui, les violences routières et les violences conjugales sont une priorité. Cette politique criminelle est très importante car la criminalité coûte très cher à la société : cela suppose des enquêtes, des policiers, des gendarmes, des juges, des tribunaux, des maisons d’arrêt, des juges surveillant la bonne exécution de la sanction, un fond d’indemnisation pour les atteintes criminelles… On élabore cette politique avec deux chiffres : - la criminalité inconnue, celle non révélée par les victimes, qui n’est pas dans les statistiques. C’est le « chiffre noir ». - la criminalité apparente, celle révélée aux autorités, que l’on peut établir sous forme de statistiques (qui font état des plaintes et de la criminalité légale, c’est-à-dire des personnes condamnées). Existe aussi la criminalité réelle, c’est-à-dire le nombre d’infractions effectivement commises au cours d’une année. On ne peut pas la connaître. Les sciences aidant à étudier le phénomène criminel : le pénaliste travaille avec d’autres sciences, les sciences criminalistiques : c’est aider le juge à découvrir le coupable. C’est la médecine légale, permettant des autopsies, composée de toxicologues, la police scientifique (en général les gendarmes) qui étudie le contenu des ordinateurs, l’ADN, le sang, l’anthropométrie, inventée par Bertillon fin XIX. Aujourd’hui, on n’est plus dans les empreintes digitales mais dans la biométrie. Un fichier génétique existe pour les personnes condamnées pour violences sexuelles. Le procédé du détecteur de mensonges est interdit en France. Ces sciences sont complétées par la criminologie. Fin XIX, l’italien Lombroso pour éradiquer le phénomène criminel avait fait une théorie sur les stigmates. Il pensait que d’après l’aspect extérieur de chacun des hommes, on pouvait détecter le criminel né. D’autres ont imaginé un chromosome du criminel. Cette théorie ne fut jamais vérifiée. Les théories sociologiques sont plus sérieuses. Les sciences sociales ont apporté des éléments pour la compréhension du phénomène criminel. En 1971, Pinatel parle de La société criminogène. La délinquance est très liée à la société. En période de chômage, on a une société criminogène. Il y a une interdépendance entre la société et le phénomène criminel. Aujourd’hui, il y a un problème de la délinquance juvénile, et de la délinquance

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sexuelle. La prison est criminogène, et c’est pou cela que l’on essaye d’éviter de courtes peines de prison (inférieures à 4 mois) et on utilise par exemple le bracelet électronique. ◊ La nature du Droit criminel Il a d’abord : - une fonction répressive, de sanction, - une fonction expressive, en exprimant les valeurs d’une société, - une fonction protectrice des victimes, en permettant la réparation du préjudice. En quoi le Droit pénal est-il différent des autres branches du Droit ? Il fait partie du Droit privé et amène à ce que ce soient les tribunaux judiciaires qui soient compétents (tribunal de police, faisant partie du tribunal d’instance ; tribunal correctionnel faisant partie du TGI ; et la cour d’assises faisant partie de la cour d’appel). Il se rapproche néanmoins du Droit public car l’Etat, la société, est confrontée à un individu : le délinquant. Le Droit pénal est concerné par toutes les branches du Droit car il est le gendarme. C’est lui qui apporte la sanction lorsqu’il y a une violation grave à une règle de Droit civil et de Droit commercial, ou de Droit du Travail. Si la violation n’est pas grave, cela peut se régler en interne. Dans le cas contraire, le Droit pénal intervient. Par exemple :

Pour ce qui est du Droit du Travail, le règlement des contentieux s’effectue en principe devant le Conseil des Prud’hommes, mais lorsqu’il y a une violation important, on a du Droit pénal. Le Droit pénal innove aussi en considérant certaines valeurs essentielles, comme la vie et que toute atteinte à la vie, volontaire (meurtre) ou involontaire (homicide involontaire) constitue une infraction. Le Droit pénal considère que certains comportements doivent être prohibés. Le Droit pénal de direction détermine. Le Droit pénal qui se borne à sanctionner une autre branche du Droit est le Droit pénal sanctionateur. Pour faire du Droit pénal, il faut donc connaître tous les Droits. Aujourd’hui, il y a une inflation du Droit pénal. Le législateur utilise trop souvent la sanction pénale pour faire respecter ses Lois. Cela enlève au Droit pénal son côté magistral. Par exemple, lorsqu’une personne ne respecte pas les règles d’urbanisme : pour une construction sans permis de construire, la personne devra se présenter devant le tribunal correctionnel, mais n’ira probablement pas en prison (ou rarement). Pour un vol, c’est la même juridiction, d’où un affadissement du Droit pénal. De là vient la création des autorités indépendantes, autorités administratives. Lorsqu’il y a des conflits en matière de bourse, de concurrence, en matière de TV, ce sont des autorités qui décident d’une sanction mais ce ne sont pas des sanctions pénales : le CSA, l’AMF, le Conseil de la Concurrence vont prononcer des sanctions lourdes et n’encombrent pas les juridictions. ◊ Les solutions historiques - Le Droit antérieur à la codification (Napoléon). Le Code Pénal, en 1810, c’est le dernier code, le moins bon pour certains.

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� La période de la vengeance privée. C’est la primauté du clan, un groupe plus étendu que la famille, qui a un chef, le chef de guerre. Ce clan va réagir lorsqu’il va être attaqué. Il peut l’être de deux manières, soit par un autre groupe, soit c’est l’un de ses membres qui l’attaque. Le chef du clan gère cela, et a le plus souvent des pouvoirs religieux. Il décide d’attaquer l’autre clan : c’est la vengeance. Si c’est un membre de son groupe, il peut décider de l’exclure. Cela a toujours son existence dans la vendetta corse. C’est la victime qui décide de se venger. Cette vengeance est même un devoir. Dans certaines cités, on a ce phénomène de clan. Suite à la vengeance, on transige car on ne peut pas vivre toujours en guerre. La crainte de la vengeance a un effet positif car elle créé un lien social. Tous contre l’ennemi, mais tous coupables. � La justice privée. Ici, on renonce à la vengeance pour accepter un dédommagement, des dommages intérêts en contrepartie du préjudice subi. On renonce à la vengeance privée pour préserver un essor économique. On fait appel aux religieux ou à une personne extérieure en acceptant de transiger. Ce n’est plus le groupe lui-même qui exerce sa vengeance mais une tierce personne. C’est en germe l’idée de composition. La composition de la Loi du Talion : œil pour œil, dent pour dent. Pour telle offense, on aura telle sanction. L’avantage, c’est qu’on prévoit des périodes de trêve permettant un essor économique. On peut décider que seul l’auteur paye sa faute et non tout le clan. C’est l’idée d’individualisation. On peut aussi envisager le combat judiciaire (le duel, ou encore le combat entre deux avocats). La période de la justice privée équivaut à la période franque en Droit français. � La justice publique. Dans ce système, la victime va s’effacer au profit de l’Etat. Ce n’est plus la victime qui va déclencher la poursuite pénale, mais c’est le pouvoir central, la sagesse, le Roi. La victime est en retrait et n’a qu’un rôle subsidiaire, et doit attendre le bon vouloir du pouvoir central. L’Etat est représenté par un magistrat, le ministère public ou le parquet, qui décide de désigner un juge d’instruction, ouvrir une enquête. Mais, en France et en Belgique il y a une survivance de la justice privée : on a donné à la victime la possibilité de déclencher elle aussi les poursuites : - Si on connaît l’auteur de l’infraction (citation directe, devant le tribunal. Un huissier vient chez la personne et la convoque, c’est un système peu onéreux). - Se constituer partie civile, c’est saisir un juge d’instruction et obliger le parquet à poursuivre les faits dont nous sommes victimes. La victime doit consigner une somme d’argent. La justice publique condamne le duel. Les duels ont été interdits au XIX siècle et sont passibles d’infraction pénale. Il y a l’organisation d’un procès, avec deux parties et des juges représentants le pouvoir royal et prononçant la justice pour le Roi. Comme il y a un auteur et une victime, on prononce le jugement en se basant sur la notion de faute. Il existe une survivance de la justice privée : la légitime défense, le pouvoir d’arrestation de chaque citoyen. La faute aboutit à une condamnation. L’amende entre dans les caisses du Trésor, du pouvoir royal. S’il y a un trouble pour la personne en plus, on donne des dommages-intérêts pour la victime. Pendant la période franque, il y avait une opposition entre le Nord et le Sud de la France. Le Nord était soumis aux lois germaniques, le Sud aux lois romaines. Ces deux systèmes (loi romaine / coutumes barbares), lorsque le Moyen-Âge s’installe, le pouvoir

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royal peut jouer sur la justice privée et la justice publique. Le seigneur rend la justice et peut tenir compte de coutumes locales. Beaucoup de coutumes existaient et variaient d’une ville à l’autre. Le juge pouvait ne pas appliquer la sanction prévue : les peines étaient donc arbitraires, le juge avait un pouvoir extraordinaire. Mais cela provoquait l’insécurité juridique, car de ville en ville, il y avait un changement de règles. On ne savait pas quelles sanctions étaient appliquées. La prison était un mode de procédure (= une détention provisoire pouvant parfois durer 15 ans) mais n’était pas une peine. Les peines étaient : - la peine de mort + différentes modalités (écartèlement, pendaison…), - la sanction (fouet, carcan…), - le bannissement, - la mutilation du point… Pour pouvoir faire avouer, différentes formes de questions étaient en vigueur : - la question de l’eau (jusqu’à explosion de l’estomac), - la brûlure des pieds. Il y a une révolution avec le siècle des Lumières. Les philosophes qui réagissent sont Voltaire (Affaire Calas), Rousseau, Montesquieu, Diderot, Cesare Beccaria (un italien de 26 ans, Traité des délits et des peines, en 1764). Ce livre a un retentissement dans toute l’Europe. L’idée de son livre est qu’il faut combattre l’idée selon laquelle la peine de mort peut résoudre la délinquance. Il met l’accent sur l’idée de la prévention et la réinsertion. Comme la justice pénale est basée sur la notion de faute, il faut pouvoir se redempter, s’amender. Louis XVI a essayé de faire passer ces idées dans une réforme. Les parlements s’y sont opposés car ils voulaient garder leurs pouvoirs. - La codification La Révolution française a créé la DDHC de 1789, qui eu une réaction extraordinaire à l’échelle européenne. « Il ne peut pas y avoir de peine arbitraire », « d’infraction sans loi ». Il y a là la condamnation de la possibilité de condamner quelqu’un sans qu’il soit avisé. Elle n’avait pas pour finalité de créer un Code Pénal. Deux lois de 91 inspirées des idées de Beccaria servirent d’ossature à la loi pénale. C’est elles qui servent de modèle et distinguent le crime du délit de la contravention. Elle s’inspire de la DDHC en exigeant le principe de la légalité. Les peines étaient différentes pour un même agissement pour les roturiers ou les aristocrates. Elles ne furent jamais appliquées en raison de la Terreur. Il faut attendre l’arrivée de Napoléon pour que l’on ait des incriminations prévues dans un code. En 1804, c’est le Code Civil. En 1810, c’est le Code Pénal, qui a survécu jusqu’en 1994. Il est inspiré des idées de Beccaria et de l’Anglais Bentham ayant l’idée qu’il faut éviter le passage à l’acte et être relativement répressif pour les comportements les plus graves. On a la peine de mort en 1810 pour les comportements les plus dangereux. Mais, on envisage des circonstances aggravantes. Le juge a un pouvoir d’appréciation large entre un minimum et un maximum. Le Code fut modifié entre temps, par l’influence de l’école néo-classique vers 1830. C’est l’idée de la réinsertion, qui fut un échec. Puis, il y a un intérêt pour la doctrine positiviste, avec Auguste Comte. On ne met pas l’accent sur le fait délictueux mais sur la personnalité de l’auteur, s’il présente un état dangereux. Ferri donne une explication sociologique de la délinquance, et explique que le délinquant est influencé par

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les conflits sociaux et familiaux. La peine de la relégation, c’est le fait d’envoyer les personnes condamnées dans des territoires lointains où ils ne peuvent nuire. On envoie en Guyane les personnes irrécupérables (bagne de Cayenne). Les Anglais, eux, envoyaient en Australie. En 1934, on décide de réviser le Code Pénal avec les travaux de Donnedieu de Vabres. C’est un échec car la guerre arrive. L’accent est mis sur l’auteur. Ancel créé une doctrine qui est la défense sociale nouvelle. Ordonnance du 2 fév. 1945 traite des mineurs : au lendemain de la guerre, beaucoup d’enfants étaient sans parents et pratiquaient des vols pour survivre. Si on les sanctionne, le pays se perd et il faut réinvestir pour eux. L’un des aspects est d’examiner sa personnalité. Chaque personne accusée (= d’un crime) passant devant une cour d’assises (3 magistrats + 9 jurés) devra être examinée par un psychologue, des psychiatres. C’est l’idée de créer un juge d’application des peines. Si une personne est condamnée pour 7 ans, un juge doit voir sa liberté conditionnelle… Deux mouvements suivent par la suite, dus aux changements politiques, d’aggravation et d’adoucissement. D’abord, un système pour vider les prisons, les lois d’amnistie, systématiques après l’élection du président de la République. Une Loi du 15 juin 2000 d’adoucissement, car est passée la « Loi sur le renforcement de la présomption d’innocence » (ministre Guigou). Mais depuis le changement de gouvernement, il y a eu la Loi Perben I du 9 septembre 2002 et la loi Perben II le 9 mars 2004. Ces deux lois ont été votées suite aux attentats du 11 septembre, pour accroître les sanctions, la police pour les infractions de terrorisme. Le 9 mars 2004 est créée une catégorie particulière, la délinquance organisée. Une des plus grandes modifications en 1994 est la responsabilité pénale des personnes morales, la suppression de la peine de prison pour les contraventions et la généralisation des peines alternatives à l’emprisonnement. TITRE I – L’INFRACTION CHAPITRE I – LA REGLE CRIMINELLE Art. 112-2 C. Pén. : « La loi détermine les crimes et délits et fixe les peines applicables à leurs auteurs. Le règlement détermine les contraventions et fixe, dans les limites et selon les distinctions établies par la loi, les peines applicables aux contrevenants. » I – Les sources du Droit pénal Deux sources : la loi (pouvoir législatif) pour les crimes et délits, et le règlement (pouvoir exécutif) pour les contraventions. L’art. 111-2 semble dire qu’il y a en France uniquement deux sources de Droit créatrices d’infractions pénales. Mais, nous sommes dans un système moniste. Notre système moniste suppose aussi l’intégration du Droit international et ne se borne pas au Droit interne. La hiérarchie des normes s’applique aussi au Droit international. A) Les lois pénales

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La loi pénale, comme toutes les lois, est l’expression de la volonté générale. Elle se manifeste par les députés et sénateurs que nous avons choisis (AN + Sénat votent les lois). La majorité des infractions en France sont décidées par le Parlement. 1) La notion de loi pénale ◊ La loi proprement dite. L’art. 34 de la Constitution de 1958 précise que la Loi définit les crimes et les délits. L’art. 111-2 ne fait que reprendre. Pour incriminer un comportement, en étant parlementaire on dépose une proposition de Loi (par un député par exemple). L’autre technique est le projet de Loi déposé par le gouvernement. A 80%, les textes sont issus de projets de lois. Une fois le texte adopté, promulgué, publié au JO, il est en principe applicable. Pendant 24heures, on peut dire qu’on ignorait le texte. Le législateur peut prévoir des applications diversifiées (une partie applicable maintenant, une autre plus tard). Le 9 mars 2004, avec le plaider coupable, la délinquance organisée prévoit qu’à partir de … certaines personnes seront coupables. Avec la réforme du Code Pénal, 2 lois de juillet 92 ont décidé que le Code Pénal s’appliquerait le 1er mars 93, ce qui fut reporté au 1er mars 94. En 94, la table rase des dispositions du Code de 1810 a été effectuée. D’autres dispositions hors du Code ont été maintenues. Par exemple, pour la diffamation, la loi de 1881 sur la presse n’a pas été abrogée (« défense d’afficher »). ◊ Les textes équivalents. A valeur législative les décisions prises par le président de la République dans le cadre de l’art. 16 (les pleins pouvoirs). En 1981, c’est l’abrogation en France de la peine de mort, alors que 80% des Français étaient pour la peine de mort. Les délégations de pouvoirs : l’art. 38 de la Constitution permet de déléguer au pouvoir exécutif avec l’accord du Parlement un pouvoir législatif. Le Parlement donne son autorisation, le gouvernement écrit un texte ratifié par le Parlement ensuite. C’est assez rare. Jusqu’en 1945, il y avait un blocage des prix. En 1986 c’est le déblocage des prix pour un souci d’efficacité économique. On délègue au pouvoir exécutif le pouvoir de légiférer en la matière par ordonnances. 2) L’abrogation de la loi pénale L’art. 6 du C. Proc. Pén. Dispose que la poursuite pénale s’éteint dans différentes hypothèses et prévoit notamment cela par l’abrogation de la loi pénale. « L'action publique pour l'application de la peine s'éteint par la mort du prévenu, la prescription, l'amnistie, l'abrogation de la loi pénale et la chose jugée. Toutefois, si des poursuites ayant entraîné condamnation ont révélé la fausseté du jugement ou de l'arrêt qui a déclaré l'action publique éteinte, l'action publique pourra être reprise ; la prescription doit alors être considérée comme suspendue depuis le jour où le jugement ou arrêt était devenu définitif jusqu'à celui de la condamnation du coupable de faux ou usage de faux. Elle peut, en outre, s'éteindre par transaction lorsque la loi en dispose expressément ou par l'exécution d'une composition pénale ; il en est de même en cas de retrait de plainte, lorsque celle-ci est une condition nécessaire de la poursuite. »

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L’abrogation doit être formelle, expresse : « tel article n’est plus en vigueur ». L’abrogation tacite n’a pas d’effet. En 1942, une prévision d’aggravation de la peine pour le délit d’adultère lorsque l’homme est en dehors du territoire est apparue. Le délit d’adultère a disparu en 75, mais on peut, en théorie, appliquer un texte tant qu’il n’est pas supprimé dont celui de 42. B) Les règlements Les règlements déterminent les contraventions (Art. 37 de la Constitution). Le pouvoir de réglementer revient au pouvoir exécutif. 1) Les décrets en CE Ces décrets vont pouvoir créer des incriminations (des infractions), décrire le comportement et envisager la sanction. Un décret est pris après avis du CE. Le montant maximal de la sanction est cependant prévu par la Loi. Une contravention peut aller jusqu’à 1500€ d’amende, 3000€ si récidive mais il peut y avoir une peine privative de droits (retrait du passeport, permis de chasser, de conduire…), le TIG (Travail d’Intérêt Général), stage de citoyenneté… Le décret définit le comportement et la sanction. Comme c’est un acte administratif, il peut faire l’objet d’un recours devant les juridictions administratives. Dans le C. Pén., on les trouve dans la partie R, comme par exemple pour R-622-2 : « Le fait, par le gardien d'un animal susceptible de présenter un danger pour les personnes, de laisser divaguer cet animal est puni de l'amende prévue pour les contraventions de la 2e classe. En cas de condamnation du propriétaire de l'animal ou si le propriétaire est inconnu, le tribunal peut décider de remettre l'animal à une oeuvre de protection animale reconnue d'utilité publique ou déclarée, laquelle pourra librement en disposer. » 2) Les autres règlements administratifs Très variés, ils peuvent être pris dans le cadre de la police municipale, en matière de transports, de nuisances sonores, olfactives, de circulation de poids lourds… A la différence des décrets en CE, ils complètent la Loi. Ils définissent le comportement, mais la sanction est prévue par le législateur. Les circulaires administratives n’ont pas de valeur en matière pénale. Lorsqu’une Loi est publiée, une circulaire est publiée pour interpréter la Loi, mais n’a pas de valeur juridique. Ex. arrêté ministériel, préfectoral, décret hors CE… 3) L’exception d’illégalité Art. 111-5 : « Les juridictions pénales sont compétentes pour interpréter les actes administratifs, réglementaires ou individuels et pour en apprécier la légalité

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lorsque, de cet examen, dépend la solution du procès pénal qui leur est soumis. » C’est l’organisation d’un recours particulier. Cet art. permet lorsque le juge répressif est saisi d’apprécier la régularité soit du décret, soit de l’arrêté, à ce que le juge pénal soit autorisé à considérer que le décret ou l’arrêté sont irréguliers. Le juge pénal (et judiciaire également) est gardien des libertés. Pour un arrêté municipal, un recours devant le CE peut aboutir à son annulation. Lors d’une affaire, le juge judiciaire considère que l’arrêté ne s’appliquera pas à quelqu’un : c’est un effet relatif. L’arrêté est considéré comme irrégulier, si le juge estime que : - le maire n’est pas compétent, - il y a vice de forme (non signé par exemple), - c’est un arrêté trop vague… C) La primauté de la Constitution et des normes internationales 1) Le bloc de constitutionnalité Dans le système juridique français, le texte suprême est la Constitution. Mais, elle n’est pas la seule. Il y a des textes à valeur constitutionnelle. La Constitution du 4 octobre 1958 dispose d’un préambule, reprise de la Constitution de 1946, visant la DDHC de 1789. La DDHC de 89 a donc valeur constitutionnelle. L’art. 9 concernant la présomption d’innocence a donc valeur constitutionnelle. L’égalité entre les hommes et les femmes, prônée dans le préambule de 46 a valeur constitutionnelle… Le conseil constitutionnel est chargé de vérifier la conformité des lois. Par ailleurs, les principes généraux du Droit, dégagés par le conseil constitutionnel à l’occasion d’un avis son importants et ont valeur constitutionnelle (sont dans le bloc). Par exemple : le principe du droit de la défense, en 87, le c. const. Dit qu’il doit y avoir une proportionnalité entre l’infraction commise et la sanction. Du fait de l’art. 55 on trouve aussi les traités dans le bloc de constitutionnalité. Les traités (internationaux + communautaires) sont supérieurs aux lois. Le traité de Rome est une union douanière au départ, sur la libre circulation entre les marchés et les hommes (la directive Bolkenstein parle de la libre circulation des services. La directive oblige les Etats membres à légiférer. Le règlement impose une définition. Le Droit pénal est le problème de la souveraineté d’un Etat. Il fait partie indirectement de l’Union. Les règlements européens définissent la composition d’un produit : l’appellation feta par exemple. Dans la libre circulation des marchandises, il doit pouvoir être fabriqué partout. Il y aura des entraves sanctionnées par les juridictions des Etats. 2) Les traités Deux sont importants en Droit pénal : - Le traité de Rome, - La Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, communément notée CESDH. Le traité de Rome prévoit deux sortes de dispositions normatives : les règlements et les directives. Les règlements sont applicables directement en France et à tous les 25

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pays de l’Union. IL peut définir l’appellation d’un produit, la composition du vin, du gruyère, l’appellation feta. Les directives ne sont pas directement applicables en France mais doivent être transposées dans la législation du pays. C’est le Droit conformément à la directive. Un arrêt de la CJCE (aussi Cour du Luxembourg), du 13 septembre 2005, a ouvert une brèche disant que des sanctions pénales pourraient être décidées par la Communauté Européenne. Il s’agissait de Droit de l’environnement. La CESDH est issue du Conseil de l’Europe. C’est une convention signée à Rome le 4 novembre 1950. La France l’a ratifié le 31 décembre 1973 (c’est le Parlement qui ratifie). C’est un décret du 3 mai 74 qui a été publié. Le 9 octobre 81, la Parlement a autorisé tout justiciable français ou étranger condamné par une juridiction répressive française de saisir directement la Cour européenne. Les droits fondamentaux de cette convention sont : - le droit à la vie, - l’interdiction de torturer, - le droit au respect de la vie privée, - le droit d’aller et venir, - le droit à un procès équitable (avoir le droit à un juge, le droit de se défendre, le tout dans un délai raisonnable), - la liberté de penser, - la liberté de religion, a- le droit de se marier, - l’interdiction du travail forcé. Pour un TIG, il faut le consentement e la personne. Il y a des protocoles additionnels dont un prévoyant (l’interdiction de la peine de mort. 3) Le contrôle des normes répressives Les normes répressives sont les règles prévoyant des sanctions pénales. La Loi ou le règlement doit respecter la norme supérieure. La Loi, votée par le Parlement, doit respecter la Constitution, les traités… ◊ Conformité à la Constitution : il s’agit d’un contrôle préventif. Jamais d’un contrôle a posteriori. On vote la Loi au Parlement, elle est promulguée puis publiée. Avant d’être signée par le Président de la République, on fait un recours devant le conseil constitutionnel (60 députés ou 60 sénateurs, le président de l’Assemblée Nationale ou le Président de la République). Ce recours est facultatif. Lorsque le conseil constitutionnel est saisi, il examine la Loi votée et vérifie si cette Loi pénale est conforme à la Constitution et aux principes généraux. Si non, il déclare telle disposition anticonstitutionnelle. La partie de la Loi en question est supprimée. La Loi est ensuite promulguée et publiée au JO. Si la loi n’a pas été portée devant le conseil constitutionnel, elle est promulguée et publiée. On ne peut rien faire sauf l’abroger si elle est contraire à la Constitution. Le juge répressif ne peut pas écarter la Loi en disant qu’elle est contraire à la Constitution. La Constitution repose sur des séparations de pouvoirs. Le pouvoir judiciaire ne peut contrôler le législatif. Le juge ne peut examiner la conformité d’une Loi à la Constitution. Il doit l’appliquer et est démuni de pouvoir. La solution est de

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demander aux parlementaires d’abroger la Loi. Pour M. X cependant, elle sera tout de même appliquée, même contraire à la Constitution ◊ Le contrôle interne de la conformité au traité Le juge répressif a un pouvoir immense. Puisque, à l’inverse de la conformité à la Constitution, il peut écarter la Loi pénale française si elle est contraire au traité. Le juge est obligé d’examiner cette conformité. C’est un arrêt rendu le 22 octobre 1970 et publié au Dalloz 1971, p. 221. C’est l’arrêt (du nom des parties) « les fils d’Henri Ramel » (le nom de la société). Cette société était poursuivie pour avoir importé des vins en France non conformes à la législation. C’était une infraction d’importation irrégulière. La législation européenne prévoyait une libre importation des vins. La question était de savoir s’il fallait appliquer la Loi français ou communautaire. La cour de cassation a considérée que la norme européenne était supérieure. La société était donc conforme à la libre circulation des marchandises. C’est la primauté du traité qui a été affirmée ici. L’arrêt du 24 mai 75 de la chambre mixte de la cour de cassation, dans un arrêt dit Jacques Vabre, a estimé que la Loi pénale française postérieure à la législation européenne peut aussi être écartée. Dans un arrêt du 17 octobre 2004, elle considère qu’on écarte la loi pénale française lorsqu’elle est contraire à une directive. La Loi pénale française disait qu’il fallait recourir à un médecin ou à un pharmacien pour mettre en vente un produit cosmétique. Une personne accusée était relaxée, car la directive européenne ne prévoyait pas le besoin d’un pharmacien. Lorsqu’il y a un problème d’interprétation du Traité de Rome, la chambre criminelle va elle-même demander à la Cour du Luxembourg d’interpréter le Traité. Cette demande n’aboutit pas toujours lorsqu’un avocat la demande. En cour de cassation, elle est obligatoire. Le juge suspend l’audience et saisit la CJCE. La CJCE siège à Luxembourg et traite du Traité de Rome. La Cour européenne ne traite que de la CESDH et siège à Strasbourg. Lorsque la CJCE a été saisie par un Etat, elle prend une décision et la cour de cassation est obligée de s’y tenir. C’est un système d’intégration par référence. Il faut raisonner en termes européens. Lorsqu’un avocat soulève une inconformité à la CESDH, la cour de cassation apprécie si la Loi français y est conforme ou non. En procédure pénale, le ministère public pouvait faire appel en matière de contravention de toutes les décisions prononcées. C’est un droit d’appel absolu. En revanche, le prévenu (prévenu puis condamné) ne pouvait faire appel que dans des hypothèses limitées. C’est une rupture d’égalité : la cour de cassation a donc estimée que la Loi française était contraire au principe du procès équitable. Quand la chambre criminelle écarte la Loi pénale pour M. X., le législateur abroge ou modifie la Loi. L’influence de la cour de cassation peut aboutir à une modification législative. Le 4 septembre 2001, la chambre criminelle a décidé la Loi pénale française qui sanctionnait la diffusion de sondages préélectoraux. La loi prévoyant l’interdiction des sondages 48 heures avant les élections a été considérée comme contraire à la liberté d’information (liberté fondamentale prévue dans la CESDH). Les Français pouvaient lire des sondages jusqu’à deux heures avant le scrutin (sur Internet notamment). Il existait en France un délit issu de la Loi sur la presse (29 juillet 81), art. 26, le délit d’offense au Chef d’Etat étranger. Lorsqu’on en critique un, on commet un délit. La

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cour de cassation n’a pas été saisie, mais elle l’aurait écarté. La Loi du 9 mars 2002 a abrogé ce délit car il porte atteinte à la liberté d’information. La chambre criminelle peut résister et dire que le texte est conforme à la CESDH. La seule solution est le contrôle européen. ◊ Le contrôle européen La CJCE (Cour du Luxembourg) ne peut être saisie par le justiciable mais par un Etat, la chambre criminelle ou par un tribunal (le tribunal de police par exemple). On lui demande d’interpréter le traité car on estime que la Loi française y est contraire. La juridiction rend sa décision qui sera applicable dans tous les pays de l’Union Européenne. Devant la CEDH (Strasbourg), en 81 la loi pénale française autorise lorsque l’on a une décision rendue par les juridictions françaises de saisir la CEDH (après expiration de toutes les voies de recours). L’Etat français peut aussi saisir cette Cour. En revanche, la chambre criminelle ne peut la saisir (pas de recours en interprétation). La cour européenne examine si la question lui étant posée permet de dire s’il y a eu respect ou non de la convention européenne. Un arrêt par la CEDH ne concerne que M. X. mais son retentissement a une influence sur les autres pays. Depuis 1950, beaucoup de décisions ont été prises. On a considéré par exemple qu’on ne pouvait pas renvoyer un étranger dans son pays pour avoir commis un vol. Après les 3 mois de prison, il n’est plus reconduit chez lui. La CEDH juge qu’il ne peut y être renvoyé s’il est soumis dans son pays à un traitement inhumain : c’est quand l’étranger était porteur du virus du Sida et qu’il n’y avait pas de médicaments suffisants dans son pays. L’Angleterre a été condamnée pour pratique dans ses établissements scolaires la pratique du fouet. Elle est interdite en Angleterre maintenant et dans toutes les écoles françaises aussi. La CEDH prend des décisions contraires aux juridictions nationales. En 95, c’est l’arrêt Canard Enchaîné. Deux journalistes ont publié la feuille d’impôts de M. Calvet, directeur de Peugeot. Les ouvriers réclamaient plus de salaires. M. Calvet a lui augmenté son salaire de 45,9% (en deux ans). Les journalistes ont été poursuivis pour avoir publiés un document confidentiel avec violation du secret fiscal. Peut-on condamner les journalistes ? La cour de cassation les a condamné. Le 21 janvier 99, la CEDH a eu une analyse différente et a considéré que dans ce cas les journalistes ont eu raison et qu’il y avait une liberté fondamentale supérieure, la liberté d’information. L’arrêt du 21 janvier 2000 est important pour la liberté d’information. La France a été condamnée à payer une somme d’argent aux deux journalistes. Depuis la Loi Guigou du 15 juin 2000 visant à renforcer la présomption d’innocence, elle prévoit que si la Cour européenne a condamné la France pour non respect des libertés fondamentales et que la réparation pécuniaire n’est pas suffisante, il y aura la possibilité de refaire un procès en France. Art. 626-1 : le réexamen d’une décision pénale. L’arrêt de la cour européenne a condamné la France. Les condamnés saisissent la cour de cassation au sein d’une commission qui examine s’il y a lieu ou non de refaire le procès. L’interprétation de la décision est libre. Si elle dit non, on en reste là. Si oui, elle désigne une juridiction de même degré ou elle-même pour examiner les faits de manière différente. La Turquie et la France ont été condamnées pour actes de torture. En France, à l’occasion de la garde à vue. Un acte irrégulier peut annuler toute la procédure. La Cour européenne permet d’avoir une influence très importante. Pendant très longtemps, le juge d’instruction français effectuait des écoutes téléphoniques, mais il n’existait pas de texte précis. Les écoutes étaient transcrites et conservées des années. La Cour européenne, le

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24 avril 90, dans un arrêt Kruslin a estimé que la Loi française était incomplète. Le législateur a créé une loi en 91 pour réglementer les écoutes téléphoniques. Elles doivent être précisées (pour certains délits et gardées pendant un certain temps). II – Le principe de la légalité des délits et des peines A) Le principe de la légalité des délits et des peines 1) Le fondement du principe On dit parfois le principe de la légalité criminelle. Ce principe est traduit en latin par nullum crimen, nulla poena sine lege, soit « pas de crime, pas de peine sans loi ». Aucune infraction ne peut être constatée, retenue, prononcée sans que n’existe un texte de Loi. Ce principe était ignoré des Romains et de l’Ancien Droit. Les peines étaient auparavant arbitraires, et lorsque la coutume était muette, on pouvait dire que le comportement était délictueux. Sans parler des lettres de cachet permettant d’emprisonner quelqu’un pendant quinze années. Lorsque Beccaria et les philosophes français raisonnent, on arrive à la Révolution qui apporte la DDHC qui estime que chaque citoyen ne peut être condamné que s’il est préalablement averti de ce qui est autorisé ou interdit. Ce principe existait aussi dans les Constitutions des Etats-Unis de 1774. C’est l’art. 8 de la DDHC : « La loi ne peut établir que des peines strictement et évidemment nécessaires et nul ne peut être puni qu’en vertu d’une loi établie et promulguée antérieurement au délit et légalement appliquée ». C’est aussi l’art. 111-3 du C. Pén. « Nul ne peut être puni pour un crime ou pour un délit dont les éléments ne sont pas définis par la loi, ou pour une contravention dont les éléments ne sont pas définis par le règlement. Nul ne peut être puni d'une peine qui n'est pas prévue par la loi, si l'infraction est un crime ou un délit, ou par le règlement, si l'infraction est une contravention. » Tout le monde après la Révolution a estimé que ce principe était la garantie contre l’arbitraire. Il est repris dans la déclaration universelle de 1848 et dans l’art. 7 de la CESDH. Ce principe est aussi dans le pacte de protection des Droits civils et politiques de New York. Il vaut mieux prévenir que sanctionner, en terme de politique criminelle. La Loi doit pour cela être publiée. « Nul n’est censé ignorer la Loi » mais aucun magistrat, avocat, ne connaît la Loi en totalité. Chacun doit vérifier si son comportement est conforme à la Loi. Ce principe a valeur constitutionnelle. Il figure dans la DDHC et fait partie du bloc de constitutionnalité. Une Loi française pénale ne peut pas prévoir des sanctions rétroactives. Cela permet à tout justiciable en considérant que la sanction est contraire au principe de la légalité criminelle condamnés pour des faits qui ne l’étaient pas de contester sa peine. 2) La portée du principe Ce principe de la légalité criminelle s’impose au législateur mais aussi au juge. Le législateur a le monopole de la création du Droit pénal en matière de délit et de

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crimes. Le pouvoir exécutif lui, a le monopole en matière de règlement –de contravention). Le juge ne peut pas créer des incriminations (délits) ou inventer des sanctions. Le législateur doit rédiger des textes précis et viser un comportement concret. La cour de cassation peut estimer que c’est contraire au principe de la légalité. Le juge a l’obligation de juger (sinon déni de justice). Dans les années 1990, apparu un livre Suicide, mode d’emploi, où un médecin expliquait les meilleurs moyens de se supprimer. Une personne a appelé le médecin pour connaître l’efficacité d’un médicament. Le médecin lui a dit de prendre 3 capsules. La personne est restée vivante et la famille s’est retournée contre le médecin. L’omission de porter secours à personne en péril a été retenue mais la personne n’était pas en danger imminent au moment où elle téléphonait. Désormais, la provocation au suicide est réprimée. 3) Le déclin du principe Il se retrouve tant au niveau législatif que judiciaire. La Constitution de 58 avait abandonné tout un pan des incriminations (toute la partie contraventions est assumée par le pouvoir exécutif) au profit de l’exécutif. C’est le code de la route, de l’environnement, de la chasse, le code douanier… Le gouvernement peut légiférer (art. 34) en matière pénale, lorsque le Parlement le lui accorde. L’ordonnance de 1986 en est un exemple, elle a incriminée des comportements en matière de Droit de la vente (refus de vente pour raison discriminatoire). L’ancien art. 114 prévoyait un comportement particulier pour un fonctionnaire, d’ordonner ou faire un acte arbitraire attentatoire à la Constitution. Le texte, relativement flou, n’a jamais été appliqué. Mais, il a permis de poursuivre les personnes ayant fait des écoutes téléphoniques irrégulières. Dans les années 1980, il y eu des attentats en Irlande et il a été procédé à des écoute d’Irlandais à Vincennes. Pour mieux cerner leur action, les écoutes téléphoniques étaient justifiées. La cellule de l’Elysée a ensuite écouté d’autres gens n’ayant rien à voir avec des attentats. En matière fiscale, c’est l’art. 1741 du Code général des impôts qui définit l’irrégularité fiscale. Pour l’expression « tout autre manière frauduleuse », le juge peut mettre n’importe quoi. Le harcèlement moral, plus récent, a été créé dans le Code Pénal. « Dégrader les conditions de travail » peut être interprété différemment : écrire à la main et non à l’ordinateur, est-ce une dégradation des conditions de travail ? Pour le déclin judiciaire, les tribunaux sont amenés à appliquer des textes de lois, mais ils ne retiennent pas parfois de circonstances aggravantes. Pour le vol, art. 311-1, c’est 3 ans d’emprisonnement. Mais avec une arme, cela peut aller loin (10 ans de prison). C’est le phénomène de la correctionnalisation judiciaire (on ne tient pas compte de la circonstance aggravant pour que ça reste un délit). Un vol est jugé par la cour d’assises, mais parfois il peut l’être par un tribunal correctionnel. Devant le tribunal correctionnel, il y a un consensus entre l’auteur, la victime, et le juge. L’auteur sera sûrement condamné, mais cela n’aurait pas été si sûr devant le cour d’assises (et c’est ce que veut la victime). B) L’interprétation stricte de la loi pénale C’est la conséquence du principe de la légalité. Elle est prévue à l’art. 111-4 C. Pén. « La loi pénale est d’interprétation stricte ». C’est une conséquence du principe

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de la légalité car le juge ne doit pas pouvoir extrapoler les termes de la Loi. Le juge est obligé de juger, s’il n’applique pas le texte, il fait un déni de justice (art. 434-7-1 C. Pén. « Le fait, par un magistrat, toute autre personne siégeant dans une formation juridictionnelle ou toute autorité administrative, de dénier de rendre la justice après en avoir été requis et de persévérer dans son déni après avertissement ou injonction de ses supérieurs est puni de 7500 euros d'amende et de l'interdiction de l'exercice des fonctions publiques pour une durée de cinq à vingt ans. »). Avant 1994, le juge pouvait être condamné pénalement s’il ne jugeait pas. Comment interprète-il la Loi ? 1) Les méthodes d’interprétation Il se peut que le législateur ait lui-même prévu quelle était l’interprétation à donner à la Loi, en demandant au ministre de la justice de publier une circulaire. Le pouvoir exécutif, le garde des sceaux explique alors la Loi. Elle n’a aucune valeur juridique. La circulaire n’a aucune valeur juridique, et elle est contraire à ce que dira le juge. Elle est d’ailleurs souvent démentie par la chambre criminelle… ◊ La méthode littérale Elle s’attache à la lettre de la Loi. On fait prédominer ce qui est écrit sur le sens de la Loi. Si la Loi dit blanc, on ne cherche pas ailleurs. C’est la méthode adoptée par les révolutionnaires mais elle est stérile. Le Code de 1810 nous a gouverné jusqu’en 1994, mais il y eu beaucoup d’évolutions. ◊ La méthode téléologique A l’inverse de la méthode précédente, elle recherche le sens de la Loi. On le trouve en étudiant des discussions parlementaires. Cette méthode est, en général, la méthode préférée. Ex. la définition de l’empoisonnement (Art. 221-5 « Le fait d'attenter à la vie d'autrui par l'emploi ou l'administration de substances de nature à entraîner la mort constitue un empoisonnement. L'empoisonnement est puni de trente ans de réclusion criminelle. Il est puni de la réclusion criminelle à perpétuité lorsqu'il est commis dans l'une des circonstances prévues aux articles 221-2, 221-3 et 221-4. Les deux premiers alinéas de l'article 132-23 relatifs à la période de sûreté sont applicables à l'infraction prévue par le présent article. » Deux affaires médiatiques ont poussé les juges à s’intéresser sur la définition du mot « empoisonner ». Un homme porteur du virus du Sida a eu des relations sexuelles non protégées car sa compagne voulait un enfant. Il n’a pas dit à sa compagne pour le virus. La jeune femme est elle aussi contaminée et elle porte plainte. La question est de savoir si la poursuite pour empoisonnement pouvait être maintenue. Il a employé une substance mortifère (son sperme) allant entraîner la mort (pas de trithérapie à l’époque). L’empoisonnement suppose-t-il aussi la volonté de tuer. C’est l’animus necandi, la conscience ou volonté de donner la mort. D’après les travaux parlementaires, on en a conclu qu’il y a eu volonté de donner la mort. L’arrêt de la chambre criminelle du 2 juillet 98 n’a pas retenu l’empoisonnement ou la volonté de donner la mort. L’affaire a rebondi à l’occasion des personnes hémophiles, la distribution de produits sanguins contaminés. L’écoulement sanguin est dangereux quand il se fait dans les viscères. Lors d’un accident, on peut décéder dans la demi-heure. Il a été prévu d’envisager des produits sanguins qui réparent cette anomalie, pour permettre à des

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enfants d’avoir une vie normale. Problème : l’institut Pasteur cherchait un test pour savoir si le sang est contaminé ou pas et un institut américain aussi. Entre début 85 et fin 85, on a attendu que le test sorte, en sachant que les produits encore distribués présentaient un risque. 18 juin 2003, la cour de cassation a dit que les administrateurs du centre national de diffusion sanguine avait certes conscience que le produit était mortifère (produit sanguin non chauffé) mais que néanmoins il n’avait pas la volonté de tuer. C’est dans le cadre d’une analyse téléologique que la cour de cassation a jugé. ◊ La méthode analogique Cette méthode est condamnée. Elle consiste à appliquer la Loi pénale à un comportement non prévu par le législateur. La doctrine considère que c’est une méthode d’un Etat totalitaire. On procède par déduction, on compare, et on dit « c’est comme si ». Art. 313-5 sanctionne la filouterie (aller dans un restaurant puis être dans l’impossibilité de payer, il y en a une en matière de carburant, d’hôtel et de taxi). Cette pratique est susceptible de 6 mois d’emprisonnement et de 7500€ d’amende. Dans un arrêt de la CA de Rennes du 3 mai 2000, les magistrats ont infirmé le jugement du tribunal correctionnel qui avait condamné une personne pour filouterie de carburant. L’automobiliste était parti dans une station service libre-service. C’est un raisonnement par analogie car « se faire servir » n’est pas la même chose que de se servir soi-même. Art. 313-5 : « La filouterie est le fait par une personne qui sait être dans l'impossibilité absolue de payer ou qui est déterminée à ne pas payer : 1º De se faire servir des boissons ou des aliments dans un établissement vendant des boissons ou des aliments ; 2º De se faire attribuer et d'occuper effectivement une ou plusieurs chambres dans un établissement louant des chambres, lorsque l'occupation n'a pas excédé dix jours ; 3º De se faire servir des carburants ou lubrifiants dont elle fait remplir tout ou partie des réservoirs d'un véhicule par des professionnels de la distribution ; 4º De se faire transporter en taxi ou en voiture de place. La filouterie est punie de six mois d'emprisonnement et de 7500 euros d'amende. » L’arrêt de la CA de Poitiers, 20 janvier 1901 : une jeune femme voulait se marier (André Gide a été nommé à la Cour d’Assises comme juré et s’est intéressé aux archives, puis a écrit La séquestrée de Poitiers). Les parents avaient d’autres vues et ont refusé le prétendant. La jeune femme est restée dans sa chambre et est aller dans une maison au fond de la propriété. La mère est morte, et le frère a obligé sa sœur non pas à rester dans la maison, mais non plus d’aller chez un médecin. Cela a duré 30 ans. La fille, devenue femme, présentait des signes de légère débilité. Le frère est-il coupable ? Pour coups et blessures volontaires notamment. Les magistrats de la CA ont refusé cette qualification car les coups volontaires supposent un acte positif. A partir de cet arrêt, le délit de commission par omission ne peut pas être retenu (sauf si la Loi le prévoit). La méthode analogique a été débattue concernant le fœtus. Une femme a eu un accident et l’autre personne est jugée pour homicide involontaire pour avoir tué l’enfant in utero. Il est question de savoir si on peut le poursuivre alors que l’enfant n’est pas né. L’assemblée plénière, 29 juin 2001, a énoncé qu’on ne peut pas condamner l’automobiliste car l’homicide suppose une personne vivante. L’enfant non né n’est pas une personne juridique.

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Une exception est l’analogie in favorem, en faveur de l’auteur. Si le raisonnement par analogie est favorable à la personne poursuivie, on admet ce raisonnement. On dit qu’il n’y a pas de vol entre les parents et les enfants, ni entre époux. Art. 380 C. Pén., c’est l’immunité familiale. La cour de cassation a extrapolé et appliqué l’immunité familiale pour l’abus de confiance et a étendu le champ d’application du texte. 2) La méthode retenue en France C’est la méthode téléologique. Si on a des travaux parlementaires, on s’y réfère. Bien souvent, ils sont muets sur la question précise, d’où l’obligation pour les magistrats de recourir à un raisonnement un peu analogique. De 1810 à 1994, beaucoup de transformations ont modifiées les éléments d’infraction. A la fin du XVIII siècle, c’est l’apparition de l’électricité et les clandestins se branchaient sans payer. La question est de savoir si on peut les poursuivre. Art. 379 ancien, devenu 311-1, « le vol, c’est la soustraction frauduleuse de la chose d’autrui ». Pour les magistrats, le mot chose supposait une chose appréhendable, mais on peut néanmoins soustraire l’électricité par un branchement. La cour de cassation les a considérés comme des voleurs. La violation de domicile est soit commise par un particulier, soit par un dépositaire de l’Etat, cela peut être aussi un garage, un jardin fermé… III – Les corollaires du principe de la légalité Un corollaire est une proposition qui découle d’une autre proposition. Le principe de la légalité, art. 111-2 et 111-3 C. Pén., exige un texte antérieur au comportement délictueux et une peine. Ce principe a une conséquence dans deux domaines : l’application de la loi pénale dans le temps, et l’application de la loi pénale dans l’espace. Art. 111-2 : « La loi détermine les crimes et délits et fixe les peines applicables à leurs auteurs. Le règlement détermine les contraventions et fixe, dans les limites et selon les distinctions établies par la loi, les peines applicables aux contrevenants. » Art. 111-3 : « Nul ne peut être puni pour un crime ou pour un délit dont les éléments ne sont pas définis par la loi, ou pour une contravention dont les éléments ne sont pas définis par le règlement. Nul ne peut être puni d'une peine qui n'est pas prévue par la loi, si l'infraction est un crime ou un délit, ou par le règlement, si l'infraction est une contravention. » A) L’application de la loi pénale dans le temps Il y a nécessairement un décalage entre la date de la commission des faits et le jour où l’individu sera jugé. Une infraction en 2003, et si l’individu est jugé en 2006, on aura eu la Loi Perben I et II entre temps. Quel texte appliquer ? ◊ Distinction entre lois pénales de forme/de fond. Les lois pénales de forme sont des lois pénales de procédure. Elles supposent l’application immédiate de la loi nouvelle. Ce sont par exemple les lois sur la composition des juridictions. L’effet immédiat, car la justice ne peut vérifier tous les cas particuliers. Exception : si on supprime une voie de recours, la personne qui avait le droit d’interjeter appel conserve ce droit. Aujourd’hui, la garde à vue, c’est 24 heures, 48

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heures au maximum si le parquet l’accorde. La loi nouvelle prévoit de garder quelqu’un 96 heures pour la criminalité organisée. Une Loi pénale de fond définit l’infraction et prévoit la sanction. ◊ La non rétroactivité de la Loi pénale de fond plus sévère. Une Loi plus sévère, c’est une Loi qui créée une infraction. Ce qui était autorisé hier devient interdit (par exemple squatter les halls d’immeuble, c’est une Loi qui augmente la sanction (6 mois à 1 an), une Loi qui ajoute une circonstance aggravante (le vol quand il est commis à l’encontre de personnes en raison de circonstances raciales, religieuses, devient un vol davantage réprimé). Elle est prévue à l’art. 8 de la DDHC de 89, art. 7 de la CESDH, art. 112-1 C. Pén. « Sont seuls punissables les faits constitutifs d'une infraction à la date à laquelle ils ont été commis. Peuvent seules être prononcées les peines légalement applicables à la même date. Toutefois, les dispositions nouvelles s'appliquent aux infractions commises avant leur entrée en vigueur et n'ayant pas donné lieu à une condamnation passée en force de chose jugée lorsqu'elles sont moins sévères que les dispositions anciennes. » La rétroactivité, c’est quand une Loi nouvelle s’applique à des faits commis antérieurement, on revient en arrière. La non rétroactivité, c’est quand la loi nouvelle plus sévère ne pourra s’appliquer à des faits commis avant son entrée en vigueur. Ce principe a valeur constitutionnelle et est bien plus fort que l’article 2 C. Civ. Le conseil constitutionnel, le 9 janvier 1980 a effectivement reconnu que ce principe avait une valeur constitutionnelle. Exception : les lois dites interprétatives sont des Lois postérieures à la Loi première n’ayant pour objet que d’interpréter une Loi déjà en vigueur. Elles précisent la notion. Ex. L’ordonnance du 28 août 44 visant la répression du crime de guerre de la Seconde Guerre mondiale a assimilé les chambres à gaz à un empoisonnement. C’est une Loi interprétative de la Loi précédente. L’art. 434-3 oblige à dénoncer les mauvais traitements à enfants. Ce texte a été suivi d’une Loi du 17 juin 98, disant qu’on devait aussi envisager les agressions sexuelles parmi ces traitements. C’est une Loi décidée comme interprétative, c’est la cour de cassation qui le dit le 12 juillet 2000. Les Lois déclaratives, c’est une Loi qui se borne à constater une règle préexistante. Il y a en France deux sortes de prescriptions : - la prescription d’action publique : c’est l’action intentée par le représentant de l’Etat (le Ministère Public) pour poursuivre un délinquant (ou un coupable) = c’est le délai pendant lequel on peut agir à partir de la commission d’infraction (délai pendant lequel on peut poursuivre). � En matière criminelle, le délai pendant lequel le Ministère Public peut poursuivre est de 10 ans. Le point de départ est le jour où le meurtre a été commis. � En matière de délit, la prescription est de 3 ans, un vol simple ne peut être poursuivi pendant 3 ans (Il faut une poursuite). � Pour les contraventions, la prescription est d’une année. Si une action est intentée par le Ministère Public, il y a de nouveau un an. - la prescription de la peine. La personne a été condamnée mais s’est enfuie. Il y a un délai pendant lequel on peut faire exécuter la peine. On ne cherche pas l’auteur, on veut exécuter une peine (délai pendant lequel on peut être poursuivi). � 20 ans pour un crime. � 5 ans pour un délit.

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� 3 ans pour une contravention. La loi du 26 décembre 1964 a constaté l’imprescriptibilité des crimes contre l’humanité commis pendant la Seconde Guerre mondiale. La cour de cassation, le 26 janvier 1984 a dit que la Loi de 64 n’avait fait que constater ce qui existait auparavant. Les lois concernant les mesures de sûreté. Ce n’est pas une peine, mais une mesure destinée à contrôler l’état dangereux d’une personne. Le 9 mars 2004, la Loi Perben II a créé le FIJAIS (FIchier Judiciaire national automatisé des Auteurs d'Infractions Sexuelles.) Il permet d’enregistrer toute personne qui à l’occasion a été signalée comme susceptible d’avoir commis des infractions sexuelles. Doit-on y inscrire les personnes condamnées avant 2004 ? La réponse fut positive. Le fichier est à vie, et les personnes condamnées pour agression sexuelle doivent justifier de leur adresse tous les 6 mois. Cette mesure rétroagit. Le problème du bracelet électronique et de la loi sur la récidive : Pour certains récidivistes, on a pensé pouvoir leur imposer, même si leurs actes remontent avant la Loi. La Loi de décembre 2005 permet cela. Les Lois expressément rétroactives. Il a existé des lois qui prévoyaient de rétroagir, comme en matière civile. La Loi de 67 concernant les ventes d’immeubles à construire par exemple. Elle serait écartée par le conseil constitutionnel ou la chambre criminelle. Les Lois dites de circonstances, les lois économiques. Le législateur considère que si le texte de Loi qui prévoit la sanction n’est pas modifié, mais que seulement le montant autorisant tel ou tel comportement est modifié, la sanction doit demeurer. En matière de marché public, au-delà d’un certain seuil, en dessous de 300 000 F, n’importe quel entrepreneur peut être choisi. Au-dessus, il y a obligation d’un appel d’offre. Le seuil de 300 000 est passé à 900 000. Les juridictions ont considéré que la Loi prévoyant le délit de favoritisme n’ayant pas changé, on est soumis à l’infraction car seul le montant a changé. Les lois expressément rétroactives n’existent plus. Les lois économiques sont une exception. ◊ L’application rétroactive de la loi pénale plus douce Ce principe est aussi appelé le principe de la rétroactivité in mitius (= plus doux). Ce principe ne figurait pas dans le C. Pén. de 1810 ni dans la CESDH car il est une entorse au principe de la légalité vu précédemment. On va appliquer une loi pénale nouvelle à des faits précédemment commis. On va faire rétroagir la loi. Pourquoi ce principe a-t-il trouvé écho dans la JP ? Car il est plus favorable aux délinquants. Le C. Pén. a prévu ce principe à l’art. 112-1. Une des conditions est que la personne n’ait pas été jugée. « Sont seuls punissables les faits constitutifs d'une infraction à la date à laquelle ils ont été commis. Peuvent seules être prononcées les peines légalement applicables à la même date. Toutefois, les dispositions nouvelles s'appliquent aux infractions commises avant leur entrée en vigueur et n'ayant pas donné lieu à une condamnation passée en force de chose jugée lorsqu'elles sont moins sévères que les dispositions anciennes. » Le conseil constitutionnel, le 19 janvier 1981 a également estimé que ce principe de la rétroactivité in mitius était essentiel. Le conseil constitutionnel lui a donné valeur constitutionnelle mais ne figure pas dans la CESDH. Le seul traité qui inscrit ce principe

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est le Pacte de New York sur la protection des droits civils et politiques. Il date de 1966, et le principe de non rétroactivité y figure à l’art. 15. L’art. 112-4 « L'application immédiate de la loi nouvelle est sans effet sur la validité des actes accomplis conformément à la loi ancienne. Toutefois, la peine cesse de recevoir exécution quand elle a été prononcée pour un fait qui, en vertu d'une loi postérieure au jugement, n'a plus le caractère d'une infraction pénale. » précise expressément les conditions. La rétroactivité s’applique quand la personne n’a pas encore été condamnée et aussi quand la personne a déjà été condamnée (la loi nouvelle et la loi nouvelle plus douce n’a pas d’effet en principe sauf si elle supprime l’infraction). La personne incarcérée et condamnée ne peut plus rester en prison si la loi nouvelle prévoit une suppression de l’infraction. C’est un principe qui permet d’adopter le procès à l’évolution du Droit. La personne n’est jamais jugée lorsqu’elle n’a jamais été citée devant la juridiction de jugement. Si la personne a été condamnée et qu’elle a fait appel, l’appel est suspensif en matière pénale. L’appel (dans les 10 jours après le rendu du jugement) qui met de 6 à 18 mois, examine le fait et le droit et peut appliquer la loi nouvelle plus douce. S’il y a un pourvoi devant la cour de cassation (condamnation par tribunal correctionnel puis CA par ex.), il faut former un pourvoir 5 jours après la décision (3 jours pour un délit de presse). Le pourvoi est suspensif, et pas en matière civile. Le délai entre l’examen de pourvoi et la cour de cassation peut atteindre 2 ans. La cour de cassation qui examine la régularité de la décision quand elle a été prise, elle ne devrait pas appliquer la loi nouvelle. Elle l’applique néanmoins quand elle est favorable au délinquant. Une loi nouvelle plus douce s’applique à des faits commis antérieurement, sauf s’il s’agit de lois de circonstances dit la c. cass. Avant 1986, il y avait un système de prix bloqués (de 45 à 86). Un vendeur vendant de l’essence plus cher que ce que dit la Loi, il est en infraction (à 100 au lieu de 75). Entre temps, le gouvernement autorise de vendre à 125. Devant le tribunal, si on applique la loi ancienne, il est en infraction ; mais si on applique la loi nouvelle, il n’est pas en infraction. La c. cass. dit qu’il serait trop simple de faire des recours et exception à l’exception, la loi pénale ancienne demeurera applicable en matière d’infraction économique. Seule réserve : sauf si on supprimait complètement l’infraction. - La mise en œuvre du principe : Il faut comparer le texte ancien et le texte nouveau. Si elle est plus douce, elle rétroagit. Si elle est plus sévère, elle ne peut atteindre les faits commis antérieurement. Par ex. la loi nouvelle est simple. La réponse est claire. Lorsque l’on supprime un délit, contravention, crime, on sait que la loi pénale nouvelle est plus douce. En 94, suppression du délit de mendicité. Celui qui a mendié en 93 ne peut être poursuivi. Si on supprime une circonstance aggravante, on est moins sévère, donc la loi nouvelle est plus douce. Si on ajoute une circonstance aggravante, qui n’existait pas, la loi nouvelle est plus sévère (depuis 2003, de nombreuses infractions ont été aggravées liées aux infractions pour appartenance discriminatoire (sexuelle, raciale, religieuse)). L’ajout de circonstances aggravantes transforme la loi pénale en une loi pénale plus sévère. Si le motif du vol est homophobe, il ne peut être retenu que pour l’avenir.

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Comment dire si la loi nouvelle est plus sévère ou plus douce si la répression est modifiée ? On va comparer les peines selon leur nature : les peines privatives de liberté et les peines pécuniaires. Si on passe de 6 mois de prison à 1 ans, même si on prévoit une sanction pécuniaire de 300 000 € au lieu de 450 000 €, on considère qu’elle est plus douce. Quand on augmente la peine de prison et qu’on diminue l’amende, ou inversement, il y a un grand principe : on privilégie toujours la peine d’emprisonnement comme critère, ce qui veut dire que si on augmente la peine de prison et qu’on diminue l’amende, on considère qu’elle est plus sévère. - Les lois indivisibles. La loi nouvelle n’est pas simple. Dans l’hypothèse des lois individuelles, la loi nouvelle sera examinée au regard de sa disposition principale sans tenir compte des aspects secondaires. Si elle a des aspects plus doux et d’autres plus sévères. La loi du 2 septembre 1941 a correctionnalisé (transformation d’un crime en délit) l’infanticide (n’existe plus depuis 94). C’est l’abandon du nouveau né par la mère. Aujourd’hui, c’est une infraction ordinaire (peut être commise par mère, père ou autre). Mais, le texte prévoit également de supprimer la possibilité d’accorder es circonstances atténuantes pour le juge. La question est de savoir si cette disposition est plus douce ou plus sévère. On a considéré que c’est une loi indivisible donc on ne peut pas comparer l’interdiction délictuelle et celle d’interdire les circonstances. On a considéré que la disposition principale est plus douce. On regard l’ensemble du texte pour une loi indivisible et on privilégie la disposition principale. Textes récents sur délits d’atteintes sexuelles (agression sexuelle : acte commis par violence, surprise, sans le consentement / atteinte : acte sexuel commis avec le consentement de la personne mais qui est mineure le plus souvent), art. 227-25 « Le fait, par un majeur, d'exercer sans violence, contrainte, menace ni surprise une atteinte sexuelle sur la personne d'un mineur de quinze ans est puni de cinq ans d'emprisonnement et de 75000 euros d'amende. ». C’est un délit punissable de 5 ans d’emprisonnement et de 75 000 € d’amende. Avant, on avait 2 ans d’emprisonnement et une amende supérieure. La loi nouvelle est globalement plus sévère. B) L’application de la loi pénale dans l’espace Concernant les lois de prescription, la Loi Perben II (9 mars 2004) énonce que concernant les prescriptions, on applique la loi nouvelle tant que la prescription n’est pas acquise (même si elle est plus sévère, plus longue). Une prescription de 30 ans aux délits de criminalité organisée s’applique aux faits commis hier. Art. 113-1 à 113-12 C. Pén, & C. pr. Pén. Article 113-1 Pour l'application du présent chapitre, le territoire de la République inclut les espaces maritime et aérien qui lui sont liés. Article 113-2 La loi pénale française est applicable aux infractions commises sur le territoire de la République. L'infraction est réputée commise sur le territoire de la République dès lors qu'un de ses faits constitutifs a eu lieu sur ce territoire.

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Article 113-3 La loi pénale française est applicable aux infractions commises à bord des navires battant un pavillon français, ou à l'encontre de tels navires, en quelque lieu qu'ils se trouvent. Elle est seule applicable aux infractions commises à bord des navires de la marine nationale, ou à l'encontre de tels navires, en quelque lieu qu'ils se trouvent. Article 113-4 La loi pénale française est applicable aux infractions commises à bord des aéronefs immatriculés en France, ou à l'encontre de tels aéronefs, en quelque lieu qu'ils se trouvent. Elle est seule applicable aux infractions commises à bord des aéronefs militaires français, ou à l'encontre de tels aéronefs, en quelque lieu qu'ils se trouvent. Article 113-5 La loi pénale française est applicable à quiconque s'est rendu coupable sur le territoire de la République, comme complice, d'un crime ou d'un délit commis à l'étranger si le crime ou le délit est puni à la fois par la loi française et par la loi étrangère et s'il a été constaté par une décision définitive de la juridiction étrangère. Article 113-6 La loi pénale française est applicable à tout crime commis par un Français hors du territoire de la République. Elle est applicable aux délits commis par des Français hors du territoire de la République si les faits sont punis par la législation du pays où ils ont été commis. Il est fait application du présent article lors même que le prévenu aurait acquis la nationalité française postérieurement au fait qui lui est imputé. Article 113-7 La loi pénale française est applicable à tout crime, ainsi qu'à tout délit puni d'emprisonnement, commis par un Français ou par un étranger hors du territoire de la République lorsque la victime est de nationalité française au moment de l'infraction. Article 113-8 Dans les cas prévus aux articles 113-6 et 113-7, la poursuite des délits ne peut être exercée qu'à la requête du ministère public. Elle doit être précédée d'une plainte de la victime ou de ses ayants droit ou d'une dénonciation officielle par l'autorité du pays où le fait a été commis. Article 113-9 Dans les cas prévus aux articles 113-6 et 113-7, aucune poursuite ne peut être exercée contre une personne justifiant qu'elle a été jugée définitivement à l'étranger pour les mêmes faits et, en cas de condamnation, que la peine a été subie ou prescrite. Article 113-10 (Loi nº 2001-1168 du 11 décembre 2001 art. 17 Journal Officiel du 12 décembre 2001) La loi pénale française s'applique aux crimes et délits qualifiés d'atteintes aux intérêts fondamentaux de la nation et réprimés par le titre Ier du livre IV, à la falsification et à la contrefaçon du sceau de l'Etat, de pièces de monnaie, de billets de banque ou d'effets publics réprimées par les articles 442-1, 442-2, 442-5, 442-15, 443-1 et 444-1 et à tout crime ou délit contre les agents ou les locaux diplomatiques ou consulaires français, commis hors du territoire de la République. Article 113-11

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(inséré par Loi nº 92-1336 du 16 décembre 1992 art. 340 Journal Officiel du 23 décembre 1992 en vigueur le 1er mars 1994) Sous réserve des dispositions de l'article 113-9, la loi pénale française est applicable aux crimes et délits commis à bord ou à l'encontre des aéronefs non immatriculés en France : 1º Lorsque l'auteur ou la victime est de nationalité française ; 2º Lorsque l'appareil atterrit en France après le crime ou le délit ; 3º Lorsque l'aéronef a été donné en location sans équipage à une personne qui a le siège principal de son exploitation ou, à défaut, sa résidence permanente sur le territoire de la République. Dans le cas prévu au 1º , la nationalité de l'auteur ou de la victime de l'infraction est appréciée conformément aux articles 113-6, dernier alinéa, et 113-7. Article 113-12 (inséré par Loi nº 96-151 du 26 février 1996 art. 9 Journal Officiel du 27 février 1996) La loi pénale française est applicable aux infractions commises au-delà de la mer territoriale, dès lors que les conventions internationales et la loi le prévoient. La loi pénale française n’a pas de vocation universelle (ne s’applique pas à l’étranger). En principe, la loi pénale française s’applique pour les infractions commises sur le territoire français. Mais, il y a des hypothèses multiples où la loi pénale française va pouvoir s’appliquer à des faits commis à l’étranger. A l’inverse, des lois pénales étrangères vont pouvoir s’appliquer à des faits commis en France. Une jeune anglaise avait été tuée en Bretagne, et en fait un inspecteur a trouvé un Espagnol aux Etats-Unis, qu’on a fait venir en France pour le juger. ◊ Le principe de territorialité et les différents systèmes - Ce principe de territorialité est que l’on applique la Loi du pays où l’infraction a été commise. La loi française ne s’appliquera que pour les infractions commises sur son territoire. Jamais elle ne sera applicable pour des faits commis à l’étranger. Que les personnes soient françaises ou étrangères, que les victimes soient françaises ou étrangères. L’une de ses incidences est que l’on n’extrade pas ses nationaux. Si un Français commet un crime à l’étranger, on ne le livre pas aux autorités étrangères. C’est le système qui prévaut en France. - Le système de la personnalité ou système de la compétence personnelle : la Loi s’attache à la nationalité soit du coupable, soit de la victime. La loi pénale française va s’appliquer à chaque fois qu’un Français a commis un crime ou un délit, sur le territoire français ou ailleurs. Si l’auteur est Français, la loi pénale française est applicable. C’est la personnalité active. Toujours dans la même idée, si la victime est Française, qu’elle soit victime en France ou à l’étranger, la Loi pénale française sera toujours applicable. C’est la personnalité passive. Si on pousse ce système jusqu’à ses limites, ce système a un défaut majeur car un étranger qui commettrait un délit en France ne pourrait jamais être poursuivi (il existe des délits sans victime : grand excès de vitesse, conduite sans permis de conduire…). Dans ce système, on attache la loi pénale française à la qualité de Français.

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- Le système de la compétence réelle : on fait dépendre l’application de la loi française en fonction de la nature de l’infraction. En matière de tourisme sexuel, on est presque à la limite de l’application de cette compétence réelle. - La compétence universelle : il consiste à dire qu’il y a des infractions si graves que le juge répressif français (la cour d’assises) doit pouvoir juger cette infraction même si l’auteur est étranger, si la victime est étrangère, si l’infraction a eu lieu hors du territoire de la République. Il n’y a aucun lien de connexité avec la France. Cette compétence est prônée par la Belgique. Elle a subi des pressions très fortes par les Américains lorsqu’elle a estimé dans sa législation que les cas les plus graves devaient être jugés à Bruxelles (dans un lien avec la guerre en Irak). Elle a modifié ce texte de loi ; ◊ Les infractions commises sur le territoire de la République ou réputées commises sur ledit territoire Le système français retenu est celui de la territorialité. Pour les infractions commises en France, on applique la territorialité. Art. 113-1, le territoire de la République est le sol français et aussi l’espace aérien et maritime français. Territoire : l’hexagone, les départements d’outre mer (Guadeloupe, Martinique et les TOM (Wallis et Futuna, Nouvelle Calédonie). Pour la Nouvelle Calédonie, le système est évolutif depuis 1984. L’espace aérien : tout espace situé au-dessus de l’un des territoires français. Espace maritime : toute zone située dans les 12 miles marins des côtes françaises. Art. 113-2. Le juge pénal sera toujours compétent. On ne tient pas compte de la nationalité de l’auteur ou de la victime. Ce principe s’applique même si l’auteur s’est réfugié à l’étranger. Affaire Dickinson : l’auteur et la victime sont étrangers, mais l’affaire est jugée en France. La loi pénale française est applicable même si la loi pénale du pays de l’auteur n’envisage pas cette infraction. Beaucoup de personnes néerlandais, espagnoles consomment des produits stupéfiants en France et invoquent que cela est permis chez eux… Exception à ce principe : les immunités diplomatiques. La loi pénale française ne s’appliquera pas lorsque l’auteur bénéficiera d’une immunité diplomatique (si un diplomate étrange, un membre de sa famille ou un employé commet une infraction, il est jugé à l’étranger car il bénéficie d’une disposition lui permettant cela). - Les infractions réputées commises sur le territoire français : ce sont les infractions commises par des bateaux porteurs de pavillon français. Art. 113-3 : si on commet une infraction sur un bateau battant pavillon français, la loi pénale française s’applique. En matière d’avion, Art. 113-4 on a le même principe. La règle s’applique pour des bateaux ou avions militaires. On considère qu’on appliquera toujours la loi pénale française si l’infraction est commise sur le territoire français. Art. 113-2, al. 2 « un fait constitutif » : une infraction est composée de plusieurs éléments, on peut commencer à la préparer (tentative), l’exécuter (l’infraction consommée), utiliser des complices.. Quelques soient les modalités de l’infraction, dès l’instant que l’un des actes a eu lieu en France, la Loi française est applicable. Par ex., l’agissement d’un complice sur le territoire français. Extension : lorsque l’infraction a lieu à l’étranger (vol de tableaux en Suisse) et que le recel a lieu en France, le tribunal français est compétant pour le vol et le recel.

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◊ Les infractions commises hors du territoire de la République A priori, on ne peut plus appliquer le principe de territorialité donc on a recours au système précédemment décrit et au système de la personnalité. Art. 113-6 à 133-12. On retient le critère de la compétence personnelle lorsque l’auteur ou la victime est française. Art. 113-6 Un crime (au sens de la Loi pénale française) commis par un Français peut toujours être jugé par un tribunal français. A l’opposé, une infraction de contravention commise par un Français à l’étranger ne peut jamais être jugée par un tribunal français. Pour un délit commis par un Français à l’étranger, peut être jugé par la Loi française à une condition : il faut que les faits reprochés soient également punissables par la Loi étrangère. C’est la réciprocité d’incrimination. Cela s’applique même si la personne est devenue française par la suite. La victime française, art. 113-7, est victime d’un crime en Allemagne (un vol par exemple). La loi pénale française est applicable. La loi française est applicable uniquement si le fait commis est punissable d’une peine d’emprisonnement. On se moque de savoir si l’auteur est français ou étranger. On applique la compétence personnelle passive. Si l’auteur est français, compétence personnelle active. Si la victime est française, compétence personne passive. S’ajoute une condition essentielle. Il faut pour que l’infraction soit jugée en France que le ministère public (parquet) ait poursuivi les faits. Il ne le fait que s’il y a une plainte. Ces conditions s’appliquent lorsque la victime est française et lorsque l’auteur est français. Il faut une plainte de la victime ou des autorités étrangères, puis le Ministère Public poursuit. Souvent, des infractions sont faites à l’encontre de Français et le Ministère Public ne bouge pas. C’est donc une condition essentielle. Exception, prévue dans deux articles, art. 222-2 et 227-27-1. Art. 222-2 « L'infraction définie à l'article 222-1 est punie de la réclusion criminelle à perpétuité lorsqu'elle précède, accompagne ou suit un crime autre que le meurtre ou le viol. Les deux premiers alinéas de l'article 132-23 relatif à la période de sûreté sont applicables à l'infraction prévue par le présent article. » vise les agressions sexuelles (contrainte, violence, menace, surprise). Art. 227-27-1 « Dans le cas où les infractions prévues par les articles 227-22, 227-23 ou 227-25 à 227-27 sont commises à l'étranger par un Français ou par une personne résidant habituellement sur le territoire français, la loi française est applicable par dérogation au deuxième alinéa de l'article 113-6 et les dispositions de la seconde phrase de l'article 113-8 ne sont pas applicables. » vise les atteintes sexuelles (relation librement consenties avec un mineur de moins de 15 ans. Vise aussi la corruption de mineurs. Dans ces 2 hypothèses, lorsque les agressions sexuelles sont commises à l’étranger par un Français ou par une personne résidente habituellement sur le territoire français, la Loi française est applicable par dérogation. Si un crime de viol est commis par un Français en Thaïlande, il peut être condamné par une loi pénale française sans poursuite par le ministère public ou de poursuites par les autorités étrangères. L’atteinte sexuelle est un délit, la victime est étrangère, l’auteur est français. Loi du 17 juin 98 a prévu ces exceptions. En 2006, plusieurs cas de condamnations ont eu lieu pour tourisme sexuel.

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- Une catégorie particulière où la Loi française est applicable en raison des intérêts supérieurs français. Art. 113-10. Ce sont des infractions qui visent surtout des atteintes aux intérêts fondamentaux de la Nation. C. Pén. (Livre 4, Titre 1) - La falsification des sceaux d’Etat (la Marianne) - La falsification des pièces de monnaie et billets de banque. - La possibilité de poursuivre partout dans le monde tous les crimes et délits commis contre les diplomates français. Art. 113-8-1, issu de la Loi du 9 mars 2004 « Sans préjudice de l'application des articles 113-6 à 113-8, la loi pénale française est également applicable à tout crime ou à tout délit puni d'au moins cinq ans d'emprisonnement commis hors du territoire de la République par un étranger dont l'extradition a été refusée à l'Etat requérant par les autorités françaises aux motifs, soit que le fait à raison duquel l'extradition avait été demandée est puni d'une peine ou d'une mesure de sûreté contraire à l'ordre public français, soit que la personne réclamée aurait été jugée dans ledit Etat par un tribunal n'assurant pas les garanties fondamentales de procédure et de protection des droits de la défense, soit que le fait considéré revêt le caractère d'infraction politique. La poursuite des infractions mentionnées au premier alinéa ne peut être exercée qu'à la requête du ministère public. Elle doit être précédée d'une dénonciation officielle, transmise par le ministre de la justice, de l'autorité du pays où le fait a été commis et qui avait requis l'extradition. » L’extradition peut mettre beaucoup de temps. Au sein de l’UE existe le mandat d’arrêt européen permettant d’extrader très facilement un ressortissant européen ou pas. Tous les pays de l’Union n’ont pas signé. Il permet d’échanger des délinquants. Si la France refuse d’extrader une personne ayant commis une infraction en Indonésie et qui s’est réfugiée en France, la sécurité de cette personne n’y est peut-être pas assurée et on refuse de l’extrader. Mais on estime qu’on pourra la juger sur le territoire français à condition que l’état indonésien fasse une démarche auprès de la France. - La compétence réelle fait dépendre la nature de l’infraction. Une infraction très grave sera jugée par une juridiction française. Dans la compétence universelle, on estime que l’affaire est grave et on la juge là où elle est. Elle n’est retenue qu’en Belgique (puis abandonnée sous pressions américaines). En France, il y a une universalité de droits de punir quel que soit le lieu, la nationalité de l’auteur. Il faut que l’on ait une convention qui prévoit une telle possibilité. Nous sommes compétents pour juger des faits commis à l’étranger sans relation avec la France. La seule relation qu’il y ait avec la France est que la personne suspecte soit arrêtée en France. En France, nous avons une compétence universelle en raison de conventions internationales signées. Ex. les tortures à l’encontre de Bosniaques : les suspects étaient serbes, et les parties civiles se sont constituées en France. Une convention sur la torture peut juger ces actes. 29 mars 1996, la c. cass, bull. 132, a rejeté le pourvoir car il fallait que le suspect soit arrêté en France. Ex. le génocide rwandais. Un prêtre s’était réfugié en France et les victimes l’avaient accusés d’avoir participé au génocide. La c. cass. a estimé que la juridiction

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était compétente, car le suspect était en France. 6 janvier 1998, bull. 2, il fut poursuivi pour crime mais finalement acquitté. Art. 689 et s. du C. pr. Pén. : « Les auteurs ou complices d'infractions commises hors du territoire de la République peuvent être poursuivis et jugés par les juridictions françaises soit lorsque, conformément aux dispositions du livre Ier du code pénal ou d'un autre texte législatif, la loi française est applicable, soit lorsqu'une convention internationale donne compétence aux juridictions françaises pour connaître de l'infraction. » Conventions : - Convention sur le terrorisme signée en 1977, - Convention sur la protection physique des matériels nucléaires en 1980, - Convention sur les actes illicites contre la navigation maritime, - Convention sur la protection des intérêts financiers de la communauté européenne, - Convention sur le financement du terrorisme le 10 janvier 2000. On ne peut juger une personne en France si l’auteur et la victime et les faits sont commis à l’étranger. IV – La distinction entre les crimes, délits et contraventions C’est aussi la classification tripartite. Art. 1, titre I, C. pén. évoque cette distinction : Article 111-1 Les infractions pénales sont classées, suivant leur gravité, en crimes, délits et contraventions. Les comportements les plus graves sont des crimes, les comportements les moins graves sont des contraventions, les infractions moyennes sont des délits. A) Le principe de la distinction Cette distinction est issue de la Révolution. Dans l’ancien Droit, avant la Révolution, on avait deux catégories : le grand criminel et le petit criminel, et à côté des infractions dites de police. La catégorie des crimes les plus graves était punissable de peins afflictives et infâmantes : la personne était bannie de la société. Aujourd’hui, dans le C. Pén. de 1810, on raisonne en terme de peines. La peine la plus grave est la peine criminelle. La peine contraventionnelle est moins importante. Critique : pour un délit de vol, un vol peut devenir un crime (avec des circonstances aggravantes). En principe, 3 ans d’emprisonnement (art. 311-1), mais il devient crime (311-7 & 311-8), lorsqu’il est commis avec l’usage d’une arme par exemple. Il est important de savoir si c’est un vol simple (délit) ou aggravé (crime). ◊ Les peines criminelles Elles s’adressent aux personnes physiques. On détermine non pas une infraction par son nom mais par la pénalité applicable. Un crime, c’est une peine de réclusion. Un délit, c’est une infraction punissable d’une peine d’emprisonnement.

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La peine de réclusion peut être à perpétuité, de 30 ans au plus, 20 ans au plus et le premier pallier est de 10 ans. On a abandonné le caractère afflictif et infâmant. Pour des crimes odieux, on peut prononcer l’interdiction de droits civiques ou la déchéance. ◊ Les délits Art. 131-3 : « Les peines correctionnelles encourues par les personnes physiques sont : 1º L'emprisonnement ; 2º L'amende ; 3º Le jour-amende ; 4º Le stage de citoyenneté ; 5º Le travail d'intérêt général ; 6º Les peines privatives ou restrictives de droits prévues à l'article 131-6 ; 7º Les peines complémentaires prévues à l'article 131-10. » Un délit se définit soit par une peine d’emprisonnement, soit par une peine d’amende, jours-amendes, stage de citoyenneté, TIG… L’emprisonnement peut être de 10 ans au plus, avec différents paliers : 6 mois, 1 an, 2 ans, 3 ans, 5 ans, 7 ans et 10 ans. Emprisonnement � Délit Le législateur n’est pas toujours rigoureux. En matière de stupéfiants, des peines d’emprisonnement de 3 mois ont été prononcées. ◊ Les peines d’amende A partir de 1500€ (- de 1500€, on entre dans les catégories des contraventions divisées en 5 classes). B) Les intérêts de la classification tripartite ◊ Les lois pénales de fond Il n’existe pas de tentative en matière de contravention : ou la vitesse autorisée est franchie, ou elle ne l’est pas. La complicité en matière de contravention est plus difficilement applicable que pour les délits et les crimes. En matière de contravention, il n’y pas de sursis, sauf pour les contraventions de 5ème classe. La faute en matière de contravention est présumée. En matière de crime, ou de délit, elle doit être rapportée, établie, caractérisée. ◊ Au regard de la loi pénale de forme, toute la procédure pénale est guidée par cette classification tripartite. La cour d’assises est compétente pour des infractions appelées crime. C’est une juridiction de 3 magistrats et de 9 jurés. En appel, il y 3 magistrats et 12 jurés. Les délits, eux, seront examinés par des tribunaux correctionnels (il est partie intégrante du TGI). Les contraventions relèvent soit du tribunal de police (5ème classe), soit de la juridiction de proximité pour les classes 1 à 4. Les contraventions de classes 1 à 4 jugées par des juges de proximité ne figurent pas sur les casiers judiciaires. Les prescriptions : il y en a de 2 sortes : - la prescription d’action publique : c’est l’action intentée par le représentant de l’Etat (le Ministère Public) pour poursuivre un délinquant (ou un coupable) = c’est le délai pendant lequel on peut agir à partir de la commission d’infraction.

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� En matière criminelle, le délai pendant lequel le Ministère Public peut poursuivre est de 10 ans. Le point de départ est le jour où le meurtre a été commis. � En matière de délit, la prescription est de 3 ans, un vol simple ne peut être poursuivi pendant 3 ans (Il faut une poursuite). � Pour les contraventions, la prescription est d’une année. Si une action est intentée par le Ministère Public, il y a de nouveau un an. - la prescription de la peine. La personne a été condamnée mais s’est enfuie. Il y a un délai pendant lequel on peut faire exécuter la peine. On ne cherche pas l’auteur, on veut exécuter une peine. � 20 ans pour un crime. � 5 ans pour un délit. � 3 ans pour une contravention. ◊ Les difficultés de mise en œuvre. Il est prévu pour éviter l’emprisonnement (une peine plus nocive que positive) des peines de substitution. Pour une infraction, on peut prononcer l’interdiction de reconduire un véhicule par exemple. La personne se demande si elle a bien été condamnée pour un délit, car la peine d’interdiction de conduire est aussi une contravention, d’où des confusions. On peut prononcer des peines inférieures à ce qui est prévu lorsque le législateur donne un bonus à celui qui dénonce ses camarades. La délation doit pouvoir éviter le crime. S’il a participé à prévoir le crime, l’infraction qui lui sera reprochée sera un délit. CHAPITRE II – L’ELEMENT MATERIEL Pour caractériser un crime/délit/contravention, on a besoin de l’élément légal, matériel et moral. Ces caractéristiques sont cumulatives. I – L’élément matériel dans l’infraction consommée A) Actes caractéristiques de l’élément matériel L’élément matériel, c’est en fait le comportement délictueux. On est dans l’hypothèse où l’infraction a eu lieu. On va caractériser l’élément matériel à partir du comportement. Ce comportement, pour l’analyser, on va utiliser des critères différents… ◊ Modalités Quels sont les différents critères qui caractérisent l’élément matériel ? Ce sont des critères dégagés par la doctrine (les auteurs) et repris par les tribunaux. - Infraction de commission et infraction d’omission On oppose les infractions qui se commettent par un acte positif aux infractions qui se commettent par une abstention (on se réfère au Code). Si le Code décrit un comportement positif, c’est une infraction de commission. Lorsque le législateur parle de vol (Art. 311-1), il suppose un acte positif (on devient voleur en agissant). A à peu près 80%, le législateur prévoit des comportements positifs, des infractions de commission. Mais, il sanctionne aussi le fait de ne pas agir. Deux exemples : on doit déclarer ses revenus. Le fait de ne pas déclarer ses revenus constitue

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une infraction fiscale. Art. 223-6, al. 2, « Sera puni des mêmes peines quiconque s'abstient volontairement de porter à une personne en péril l'assistance que, sans risque pour lui ou pour les tiers, il pouvait lui prêter soit par son action personnelle, soit en provoquant un secours. », c’est l’omission de porter secours à personne en péril. Ex. La séquestrée de Poitiers : c’est une infraction de violence volontaire. On ne pouvait retenir une omission. On ne peut que sanctionner sur le fond de comportement positif. Une omission peut aussi être le fait de ne pas mettre sa ceinture de sécurité. - Infractions simple et complexe Une infraction simple est une infraction où un seul agissement est décrit, et pris en compte (commission ou omission). Ex. le meurtre, tuer quelqu’un ; le vol, s’emparer de la chose d’autrui ; le viol, une relation sexuelle non consentie. Un seul acte suffit. Une infraction complexe est une infraction où le législateur exige deux comportements de nature distincte, qui sont cumulatifs (il faut avoir les deux pour caractériser l’infraction). Ex. l’escroquerie (art. 313-1 C. pén.) « L'escroquerie est le fait, soit par l'usage d'un faux nom ou d'une fausse qualité, soit par l'abus d'une qualité vraie, soit par l'emploi de manoeuvres frauduleuses, de tromper une personne physique ou morale et de la déterminer ainsi, à son préjudice ou au préjudice d'un tiers, à remettre des fonds, des valeurs ou un bien quelconque, à fournir un service ou à consentir un acte opérant obligation ou décharge. L'escroquerie est punie de cinq ans d'emprisonnement et de 375000 euros d'amende. » 1er élément : des moyens frauduleux (une mise en scène, un faux nom, chercher à convaincre la victime). 2ème élément : la remise soit de l’argent, soit de la signature d’un contrat… L’élément matériel est composé de deux éléments cumulatifs et donc il s’agit d’une infraction complexe. Si l’un des éléments se situe sur le territoire français, la Loi française est applicable (une mise en scène avec une société qui n’existe pas ayant eu lieu en France, avec la remise de l’argent en Allemagne : la loi pénale française est applicable). Cette distinction est importante au regard de la prescription, dont le point de départ se situe au jour de la remise. - Infractions militaire, politique, terroriste Une infraction militaire : il existe des infractions militaires qui ne peuvent être commises que par des militaires. Elles figurent dans le Code de justice militaire (manquements à la discipline, abandon de poste). A côté de ça, on a des infractions de droit commun pouvant être commises par un militaire : ex. l’outrage à militaire. Mais lorsque l’infraction est commise d’un militaire à un militaire, c’est une infraction militaire. Des infractions peuvent être commises par des civils, mais dans une zone militaire. Depuis que l’armée a supprimé le service militaire, on a recours à des contrats qui font appel à des civils pour des tâches informatiques, cuisiniers… Il y a des sanctions particulières pour une infraction commise par un militaire (la destitution de grade…). Ex. la général en Côte d’Ivoire suspecté de meurtre été suspendu, et peut être destitué à commandant. L’art. 697 C. pr. pén. « Dans le ressort de chaque cour d'appel, un tribunal de grande instance est compétent pour l'instruction et, s'il s'agit de délits, le jugement des infractions mentionnées à l'article 697-1.

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Des magistrats sont affectés, après avis de l'assemblée générale, aux formations de jugement, spécialisées en matière militaire, de ce tribunal. Dans le même ressort, une cour d'assises est compétente pour le jugement des crimes mentionnés à l'article 697-1. Un décret pris sur le rapport conjoint du garde des sceaux, ministre de la justice, et du ministre chargé de la défense fixe la liste de ces juridictions. » En temps de paix, les infractions militaires sont jugées par les juridictions de droit commun (tribunal correctionnel/cour d’assises). Ex. de la Côté d’Ivoire, ce sera la cour d’assises qui jugera. En temps de guerre, art. 699 prévoit « En temps de guerre, les tribunaux des forces armées sont immédiatement établis. Jusqu'à leur mise en place effective, les affaires de leur compétence sont portées devant les juridictions mentionnées à l'article 697. Celles-ci se dessaisissent des affaires au profit des tribunaux des forces armées dès que ceux-ci les revendiquent. » Lorsque les faits sont criminels, il n’y a pas de jugement en cour d’assises, mais par 7 magistrats. Depuis 1981, on estime que les infractions doivent être jugées par des juridictions de droit commun. Les infractions politiques : les personnes condamnées pour une infraction politique se trouvent incarcérées dans des conditions différentes que les droits communs. L’infraction politique classique du XVII ou XVIII siècle était le crime de lèse majesté. Il est devenu un délit d’offense au Chef de l’Etat qui est une infraction politique. L’infraction politique a été très souvent retenue au XIV siècle parce qu’il y a eu des faits de révolution importants (1830, 1848, La Commune) qui étaient des comportements politiques. On parle de détention criminelle pour un crime. Un crime est de nature politique lorsqu’on parle de détention (en droit commun, on a la réclusion). Cela s’obscurcit pour les délits, où nous n’avons pas de terminologie différente. Le mot est alors emprisonnement. Ex. de crime politique : art. 412-4 « Constitue un mouvement insurrectionnel toute violence collective de nature à mettre en péril les institutions de la République ou à porter atteinte à l'intégrité du territoire national. » Il punit de 15 ans de détention criminelle celui qui participe à un mouvement insurrectionnel en édifiant des barricades pour entraver l’action de la force publique. Les infractions politiques portent atteinte à l’organisation de l’Etat. C’est un critère objectif. Mais on peut aussi considérer que l’infraction est politique si le mobile est politique. Cette deuxième conception est abandonnée et n’a jamais été retenue. En fait, comme infraction politique, on a l’espionnage, la trahison, les fraudes électorales, les atteintes à la liberté d’association, les atteintes à la liberté de culte, les atteintes à la liberté d’opinion. Si on refuse une opinion politique en étant maire, on peut avoir une infraction politique. Si pendant le XIX siècle, on a été très sensible aux infractions politiques, on y est hostile au XX et XXI siècle. Ex. arrêt du 20 août 1932, un russe assassine le président de la République française Doumer en protestant contre l’interprétation politique du président. Il est jugé et dit : « j’ai commis un crime politique, mon mobile était mon opinion politique », ce à quoi la c. cass. répond négativement. Jamais les tribunaux n’ont reconnu aux activités corses délinquantes la notion d’infraction politique. Même en 84, quand il y eu des oppositions au rattachement de la Nouvelle Calédonie à la France, jamais l’infraction politique n’a été retenue. L’intérêt de ce statut est que l’on n’est pas obligé de travailler en prison.

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L’infraction terroriste que certains voulaient classer dans les infractions politiques a fait l’objet d’une grande mobilisation sur le plan international et ce avant le 11 septembre. En 1977 est publiée une convention européenne contre le terrorisme qui ne sera ratifiée par la France qu’en 1987. Cette convention définit les actes terroristes, permet une coopération policière, considère que l’infraction terroriste est une infraction soumise à des règles plus sévères, particulières. Nous avons attendu 10ans, car en 1986, il y a eu une vague d’attentats très importants en France ayant conduit le Parlement à légiférer (loi du 9 septembre 1986). Art. 421-1 C. pen. « Constituent des actes de terrorisme, lorsqu'elles sont intentionnellement en relation avec une entreprise individuelle ou collective ayant pour but de troubler gravement l'ordre public par l'intimidation ou la terreur, les infractions suivantes : 1º Les atteintes volontaires à la vie, les atteintes volontaires à l'intégrité de la personne, l'enlèvement et la séquestration ainsi que le détournement d'aéronef, de navire ou de tout autre moyen de transport, définis par le livre II du présent code ; 2º Les vols, les extorsions, les destructions, dégradations et détériorations, ainsi que les infractions en matière informatique définis par le livre III du présent code ; 3º Les infractions en matière de groupes de combat et de mouvements dissous définies par les articles 431-13 à 431-17 et les infractions définies par les articles 434-6 et 441-2 à 441-5 ; 4º Les infractions en matière d'armes, de produits explosifs ou de matières nucléaires définies par les 2º, 4º et 5º du I de l'article L. 1333-9, les articles L. 2339-2, L. 2339-5, L. 2339-8 et L. 2339-9 à l'exception des armes de la 6e catégorie, L. 2341-1, L. 2341-4, L. 2342-57 à L. 2342-62, L. 2353-4, le 1º de l'article L. 2353-5, et l'article L. 2353-13 du code de la défense ; 5º Le recel du produit de l'une des infractions prévues aux 1º à 4º ci-dessus ; 6º Les infractions de blanchiment prévues au chapitre IV du titre II du livre III du présent code ; 7º Les délits d'initié prévus à l'article L. 465-1 du code monétaire et financier.” C’est une définition très large et il appartient à la c. cass. de retenir des termes exacts. Les intérêts de cette qualification : les peines sont très fortement aggravées, la procédure est modifiée (en matière de terrorisme, la garde à vue peut aller jusqu’à 96 heures). La prescription sera elle aussi allongée. La Loi de janvier 2006 a prévu cet allongement, car les attentats de 95 et les condamnés en 95 peuvent ressortir, et on a prévu que l’on peut plus longtemps les poursuivre et les condamner. Les victimes en matière de terrorisme bénéficient d’un système d’indemnisation prévu par la Loi de 86. L’argent vient d’un fond issu de nos contrats d’assurance. Les jurés de la cour d’assises avaient peur de siéger, et prétendaient donc être malades, avoir des examens… Donc la cour d’assises n’est fait que de professionnels. On a un terrorisme atmosphérique, écologique, agricole… Tentative : Art. 422-1, l’exemption de peine, « Toute personne qui a tenté de commettre un acte de terrorisme est exempte de peine si, ayant averti l'autorité administrative ou judiciaire, elle a permis d'éviter la réalisation de l'infraction et d'identifier, le cas échéant, les autres coupables. » C’est une dénonciation. Les effets de l’exemption : la personne est déclarée coupable mais elle n’a pas de sanction pénale. C’est la « prime à la dénonciation ».

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L’infraction est commise : Art. 422-2, la réduction de peine, « La peine privative de liberté encourue par l'auteur ou le complice d'un acte de terrorisme est réduite de moitié si, ayant averti les autorités administratives ou judiciaires, il a permis de faire cesser les agissements incriminés ou d'éviter que l'infraction n'entraîne mort d'homme ou infirmité permanente et d'identifier, le cas échéant, les autres coupables. Lorsque la peine encourue est la réclusion criminelle à perpétuité, celle-ci est ramenée à vingt ans de réclusion criminelle. » Lorsque quelqu’un participé à un acte de terrorisme et dénonce, prévient les autorités de manière à ce que les agissements cessent ou à ce que l’avertissement permette d’éviter la mort d’un homme. On applique aussi cette réduction si elle permet aussi d’identifier des coupables (conditions cumulatives, ce n’est pas ou… ou…). Dans la deuxième hypothèse, la peine encourue est réduite de moitié. Ex. au lieu de la perpétuité, on descend à 20 ans. - L’infraction de criminalité organisée Au départ, on ne parle pas de criminalité organisée. La notion est apparue dans la Loi du 9 mars 2004. Avant 2004, pour réprimer ces infractions à grande échelle (3 personnes par exemple), il y avait deux techniques : � L’infraction d’association de malfaiteurs, art. 450-1, « Constitue une association de malfaiteurs tout groupement formé ou entente établie en vue de la préparation, caractérisée par un ou plusieurs faits matériels, d'un ou plusieurs crimes ou d'un ou plusieurs délits punis d'au moins cinq ans d'emprisonnement. Lorsque les infractions préparées sont des crimes ou des délits punis de dix ans d'emprisonnement, la participation à une association de malfaiteurs est punie de dix ans d'emprisonnement et de 150000 euros d'amende. Lorsque les infractions préparées sont des délits punis d'au moins cinq ans d'emprisonnement, la participation à une association de malfaiteurs est punie de cinq ans d'emprisonnement et de 75000 euros d'amende. » Cette infraction est ante delictum, c’est-à-dire avant le délit. Elle est consommée, existe, avant que le délit ne soit commis. En préparant une infraction dans le cadre d’une entente, d’un groupement on prépare un délit, un crime. Cette infraction est projetable lorsqu’on commet un délit ou un crime encourant au moins 5 ans de sanction. La pénalité encourue est alors de 5 ans d’emprisonnement et de 75 000 € d’amende. C’est une sanction relativement grave. Si on envisage un crime punissable de 10 ans, la sanction est de 10 ans d’emprisonnement et de 150 000 €. Cette situation permet en France d’arrêter, d’incarcérer des personnes qui ne sont pas encore passées à l’acte. On n’a pas besoin de résultat, mais c’est un projet criminel. On repère ces personnes à l’aide d’écoutes téléphoniques. Si jamais ces personnes ont mis leurs projets à exécution, ces personnes peuvent être condamnées cumulativement pour association de malfaiteurs et pour séquestration, soit à 2 reprises. � Autre hypothèse, la bande organisée : art. 132-71 « Constitue une bande organisée au sens de la loi tout groupement formé ou toute entente établie en vue de la préparation, caractérisée par un ou plusieurs faits matériels, d'une ou de plusieurs infractions. » La définition est la même que pour l’association de malfaiteurs. Mais ici, on ne précise pas la nature de l’infraction (délit, crime). Comme pour l’association de malfaiteurs, l’idée est qu’il y a une préméditation. L’infraction d’association de malfaiteurs est une infraction autonome. La bande organisée, elle, est une circonstance aggravante d’une autre infraction. La bande organisée est apparue pour la première fois

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en 1810 à propos du vol. Mais elle a permis d’aggraver la sanction lorsqu’on avait affaire à une entreprise criminelle. Après les attentats du 11 septembre, on a exploité la notion de terrorisme, mais parallèlement, avec la mondialisation, Internet, la criminalité n’avait plus rien à avoir avec la criminalité d’il y a 15 ans. On retiendra la circonstance aggravante de la bande organisée et pour certaines infractions très graves, on y ajoute la notion de criminalité organisée. Art. 706-73 C. pr. pén. « La procédure applicable à l'enquête, la poursuite, l'instruction et le jugement des crimes et des délits suivants est celle prévue par le présent code, sous réserve des dispositions du présent titre : 1º Crime de meurtre commis en bande organisée prévu par le 8º de l'article 221-4 du code pénal ; 2º Crime de tortures et d'actes de barbarie commis en bande organisée prévu par l'article 222-4 du code pénal ; 3º Crimes et délits de trafic de stupéfiants prévus par les articles 222-34 à 222-40 du code pénal ; 4º Crimes et délits d'enlèvement et de séquestration commis en bande organisée prévus par l'article 224-5-2 du code pénal ; 5º Crimes et délits aggravés de traite des êtres humains prévus par les articles 225-4-2 à 225-4-7 du code pénal ; 6º Crimes et délits aggravés de proxénétisme prévus par les articles 225-7 à 225-12 du code pénal ; 7º Crime de vol commis en bande organisée prévu par l'article 311-9 du code pénal ; 8º Crimes aggravés d'extorsion prévus par les articles 312-6 et 312-7 du code pénal ; 9º Crime de destruction, dégradation et détérioration d'un bien commis en bande organisée prévu par l'article 322-8 du code pénal ; 10º Crimes en matière de fausse monnaie prévus par les articles 442-1 et 442-2 du code pénal ; 11º Crimes et délits constituant des actes de terrorisme prévus par les articles 421-1 à 421-6 du code pénal ; 12º Délits en matière d'armes et de produits explosifs commis en bande organisée, prévus par les articles L. 2339-2, L. 2339-8, L. 2339-10, L. 2341-4, L. 2353-4 et L. 2353-5 du code de la défense ; 13º Délits d'aide à l'entrée, à la circulation et au séjour irréguliers d'un étranger en France commis en bande organisée prévus par le quatrième alinéa du I de l'article 21 de l'ordonnance nº 45-2658 du 2 novembre 1945 relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ; 14º Délits de blanchiment prévus par les articles 324-1 et 324-2 du code pénal, ou de recel prévus par les articles 321-1 et 321-2 du même code, du produit, des revenus, des choses provenant des infractions mentionnées aux 1º à 13º ; 15º Délits d'association de malfaiteurs prévus par l'article 450-1 du code pénal, lorsqu'ils ont pour objet la préparation de l'une des infractions mentionnées aux 1º à 14º ; 16º Délit de non-justification de ressources correspondant au train de vie, prévu par l'article 321-6-1 du code pénal, lorsqu'il est en relation avec l'une des infractions mentionnées aux 1º à 15º.

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Pour les infractions visées aux 3º, 6º et 11º, sont applicables, sauf précision contraire, les dispositions du présent titre ainsi que celles des titres XV, XVI et XVII. » On a une liste limitative d’infractions commises en bande organisées pouvant en plus être poursuivies dans le cadre de la procédure de la criminalité organisée. Ex. des viols en bande organisée, des vols, des meurtres, enlèvements, trafics de stupéfiants à grande échelle. Cette procédure est appliquée au gang des barbares. On peut être mis en garde à vue pendant 96 heures. Le Parquet peut procéder à des infiltrations : un policier, un gendarme, un douanier se fait passer pour une personne intéressée pour une séquestration ou des stupéfiants. Ce double jeu permet de démonter des projets en préparation. Des autorisations doivent être faites par un magistrat (un juge d’instruction ou le Parquet). En France, les perquisitions commencent entre 6 heures du matin, et ne peuvent commencer à 21 heures. Dans la procédure de criminalité organisée, les perquisitions de nuit sont autorisées. Dans la procédure de criminalité organisée, on a donné des pouvoirs d’investigation, de recherche portant atteinte aux libertés et on a même prévu de sonoriser des lieux privés (micros). Comme pour le terrorisme, il y a une exemption de peine et une réduction de peine. Art. 132-78 le prévoit dans le C. pén. « La personne qui a tenté de commettre un crime ou un délit est, dans les cas prévus par la loi, exempte de peine si, ayant averti l'autorité administrative ou judiciaire, elle a permis d'éviter la réalisation de l'infraction et, le cas échéant, d'identifier les autres auteurs ou complices. Dans les cas prévus par la loi, la durée de la peine privative de liberté encourue par une personne ayant commis un crime ou un délit est réduite si, ayant averti l'autorité administrative ou judiciaire, elle a permis de faire cesser l'infraction, d'éviter que l'infraction ne produise un dommage ou d'identifier les autres auteurs ou complices. Les dispositions de l'alinéa précédent sont également applicables lorsque la personne a permis soit d'éviter la réalisation d'une infraction connexe de même nature que le crime ou le délit pour lequel elle était poursuivie, soit de faire cesser une telle infraction, d'éviter qu'elle ne produise un dommage ou d'en identifier les auteurs ou complices. Aucune condamnation ne peut être prononcée sur le seul fondement de déclarations émanant de personnes ayant fait l'objet des dispositions du présent article. » La personne qui dénonce, le repenti, bénéficie d’une protection avec éventuellement la possibilité de donner une autre identité au repenti et à sa famille (système inspiré par les Italiens, mais ne fonctionnant pas très bien en France). ◊ Durée des infractions - Les infractions instantanées : celle qui se commet en un trait de temps, à un moment x. Ex. le vol, le meurtre, l’arrestation arbitraire (empêcher quelqu’un d’aller et venir). - L’infraction continue : celle qui dure dans le temps. La volonté criminelle est réitérée. Tous les jours, quelqu’un commet l’infraction. Ex. la séquestration arbitraire (garder quelqu’un dans une cave pendant des jours). Dans cette infraction, tous les jours, je veux garder cette personne enfermée. Le recel de choses : lorsqu’il y a un vol de bijoux, il y a celui qui les achète en sachant qu’ils sont volés. C’est l’achat d’un objet volé. En utilisant un téléphone volé tous les jours, le délit de recel continue.

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L’intérêt essentiel est ici le point de départ de la prescription d’action publique (délai pendant lequel on peut poursuivre le délinquant à partir du moment où l’infraction est consommée). Le jour du vol du portable par exemple, s’il a lieu le 8 mars 2006, la prescription ira jusqu’en 2009 (3 ans pour un délit). En matière d’infraction continue, le jour où l’infraction cesse est quand on n’utilise plus l’objet (téléphone perdu par exemple), quand on ne l’a plus entre les mains. - Les infractions permanentes : elles sont assimilées à des infractions instantanées. Ce ne sont pas des infractions continues. Ex. la bigamie : une personne se marie et fait croire à quelqu’un d’autre qu’il n’est pas marié. Lorsqu’il se marie une deuxième fois, l’infraction est consommée. Tous les jours après le mariage, ce sont les effets de l’infraction qui continuent et pas la volonté délictueuse. Pour la bigamie, le point de départ de la prescription est le jour du deuxième mariage. Comme c’est un délit, on ne peut plus le poursuivre au bout de 3 ans. On ne se marie pas tous les jours. Ex. l’apposition d’affiches alors que c’est interdit. Si elle reste 10 ans, c’est une infraction permanente. Le jour où l’affiche est placardée est retenu. Pour distinguer les trois infractions, on regard le texte en général. Parfois, c’est la c. cass. qui donne l’interprétation. Jamais la Loi dit d’une infraction qu’elle est continue, c’est la c. cass. qui le dit. Si on commet tous les jours du mois un vol dans un magasin, il y aura 30 vols, car ce sont des infractions répétées. Ce n’est pas une infraction continue, mais des infractions instantanées qui se répètent. Une catégorie d’infractions est importante : les infractions clandestines. Ce sont des infractions instantanées qui ne peuvent pas être découvertes au moment où elles sont commises. La c. cass. admet que l’on puisse reporter le point de départ de la prescription au jour où l’on découvre les faits. Ex. les écoutes téléphoniques illégales : si un voisin place des micros ou enregistre les conversations chez une personne, il n’est pas possible de le découvrir. Ce n’est que le jour où l’on découvre l’infraction que la prescription commence. Ce ne sont pas des infractions continues. La clandestinité, selon c. cass. fait partie de l’essence même de l’infraction. L’écoute téléphonique n’a d’effet que si on l’ignorait. On a une infraction clandestine lorsqu’il y a un mensonge sur la filiation. Ex. une femme dit qu’elle a accouchée, cela vaut filiation maternelle, alors que l’enfant n’est pas le sien. - Les infractions d’habitude : Ce sont celles qui selon la c. cass. nécessitent deux agissements identiques. Le premier agissement n’est pas délictueux. Seul le deuxième agissement tombe sous le coup de la Loi. L’exemple classique est le délit d’exercice illégal de la médecine. Le premier agissement ne tombe pas sous le coup de la Loi car on considère qu’il peut être motivé par autre chose qu’une volonté délictueuse. Le fait délictueux est le deuxième, l’infraction n’est consommée que pour le deuxième fait (problème pour l’application de la loi dans le temps). Ex. le harcèlement moral (art. 222-33-2 (2002)) et sexuel (art. 222-33 (1998)). « Le fait de harceler autrui par des agissements répétés ayant pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel, est puni d'un an d'emprisonnement et de 15000 euros d'amende. » « Le fait de harceler autrui dans le but d'obtenir des faveurs de nature sexuelle est puni d'un an d'emprisonnement et de 15000 euros d'amende. »

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Dans les deux hypothèses, on a le mot « harceler ». Est-ce que le législateur exige une répétition, ou s’il se contente d’un acte isolé. Demander des rendez-vous plusieurs fois à une personne dans le cadre de son travail, est-ce harceler ? La c. cass. n’a pas tranché, mais la doctrine considère en majorité qu’un acte unique peut caractériser un harcèlement (pas de délit d’habitude, de répétition nécessaire). B) Le résultat de ces actes - Infraction formelle / Infraction matérielle Infraction matérielle : l’infraction n’est consommée que s’il y a un résultat. Ce résultat est décrit par la Loi : ex. le meurtre, porter atteinte à la vie d’autrui, tuer ; le résultat du meurtre est un mort. Dans l’infraction matérielle, le résultat est indispensable. Dans le vol par exemple, le résultat est s’emparer de la chose (et en priver son propriétaire). Si le résultat n’est pas atteint, on ne peut pas parler d’infraction consommée (s’il n’y a pas de mort, on peut la poursuivre pour tentative). Beaucoup d’infractions sont matérielles, les résultats sont décrits dans les textes. A l’inverse, l’infraction formelle est une infraction où le résultat n’est pas un élément constitutif. Elle n’a pas besoin de résultat pour être caractérisée. Elle existe en tant qu’infraction consommée même si l’objectif n’est pas atteint. Ex. l’omission de porter secours à personne en péril existe même si la personne en train de se noyer arrive à atteindre la berge et échappe au danger. Ex. la corruption de fonctionnaire est consommée même si la corruption n’a pas aboutie. Ex. l’empoisonnement (art. 221-5 « Le fait d'attenter à la vie d'autrui par l'emploi ou l'administration de substances de nature à entraîner la mort constitue un empoisonnement. L'empoisonnement est puni de trente ans de réclusion criminelle. Il est puni de la réclusion criminelle à perpétuité lorsqu'il est commis dans l'une des circonstances prévues aux articles 221-2, 221-3 et 221-4. Les deux premiers alinéas de l'article 132-23 relatif à la période de sûreté sont applicables à l'infraction prévue par le présent article. ») est une atteinte à la vie par l’utilisation de substances mortifères. Le crime d’empoisonnement, punissable de 30 ans de réclusion criminelle est une infraction formelle. La mort de la victime est indifférente. On est poursuivi pour emprisonnement si on fait avaler une substance de nature à entraîner la mort, et même si la personne survit. C’est un crime formel. L’infraction est caractérisée même si le résultat n’est pas atteint. On peut être coupable d’empoisonnement même si on sauve la personne par la suite. Le désistement de l’auteur n’a aucun rôle dans la qualification de l’infraction. Les justifications de ces infractions formelles sont la gravité de l’infraction. - Mise en danger délibérée de la personne d’autrui. Art. 223-1 (dans les risques causés à autrui) : « Le fait d'exposer directement autrui à un risque immédiat de mort ou de blessures de nature à entraîner une mutilation ou une infirmité permanente par la violation manifestement délibérée d'une obligation particulière de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou le règlement est puni d'un an d'emprisonnement et de 15000 euros d'amende. » C’est une infraction nouvelle, apparue dans C. pén. en 1994. Le législateur a imaginé de sanctionner celui qui fait courir à une autre personne un risque très grave pour son intégrité physique (mort ou blessures). Sanction : un an d’emprisonnement, 15 000€ d’amende. On n’est accusé de cette

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infraction que si on viole une règle de sécurité. C’est une infraction formelle également car on n’a pas besoin de résultat. C’est le risque qui est sanctionné. Le fait de doubler en haut d’une côte constitue en soi une infraction au Code de la Route, et au pénal, la mise en danger délibérée. Ex. franchir un feu rouge (retrait de points), ou orange (pas de retrait de points), est-ce un délit ? Une mise en danger ? Réponse de la c. cass. : Cela dépend. De nuit, la tendance des tribunaux est de dire qu’en plus de la contravention, on commet un délit de mise en danger délibérée. Si le feu est franchi de jour, cela ne sera pas systématique. Si on franchit le feu rouge et que l’on blesse quelqu’un, on a la contravention de franchissement de feu rouge. Mais on ne condamne pas pour mise en danger délibérée de la vie d’autrui, car elle n’existe que si le résultat n’est pas atteint. Ce sera une infraction plus grave. II – L’ELEMENT MATERIEL DANS L’INFRACTION TENTEE Qu’est-ce que la tentative d’une infraction ? Art. 121-4 et 121-5 C. Pén. La tentative se situe dans ce que l’on appelle d’un nom latin « le chemin du crime » (iter criminis). Le comportement délictueux ne sera retenu qu’à partir d’une certaine étape. La tentative est une étape du chemin du crime. A) La notion et le domaine de la tentative punissable Le législateur, pour condamner quelqu’un, ne demande pas que le résultat ait été atteint. Il admet donc la possibilité de condamner même si la victime n’est pas morte. On admet également de condamner quelqu’un, même si le bien convoité n’a pas pu être appréhendé (tentative de vol de portable par exemple). Quel est le domaine de la tentative punissable ? � Elle est toujours prévue pour les crimes (art. 121-4). � Pour les délits, la tentative n’est répréhensible que si la Loi le prévoit. � Pour les contraventions, il n’y a jamais de tentative. Où trouve-t-on dans le Code le texte prévoyant la tentative de délit ? À la fin de la section. L’art. 311-1 prévoit le vol (un délit). L’art. 311-13 prévoit de réprimer la tentative de vol. Il est très important que le législateur prévoit la tentative en matière délictuelle, car s’il l’oublie, on ne peut pas condamner pour tentative (cela s’est produit en 1981 : le législateur réforme le délit de vol, et il oublie de sanctionner la tentative dans certaines hypothèses ; en vertu du principe de la légalité, les tribunaux ont été obligés de relaxer les auteurs de tentative de vol). L’auteur d’une tentative va être puni parce qu’il a essayé de commettre l’infraction. Il faut écarter l’idée que l’auteur d’une tentative doit être moins puni que l’auteur de l’infraction consommée. La loi prévoit les mêmes peines pour l’auteur de l’infraction consommée comme pour l’auteur de l’infraction tentée. B) Le commencement d’exécution

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Art. 121-5 C. Pén. définit la tentative : « La tentative est constituée dès lors que, manifestée par un commencement d’exécution, elle n’a été suspendue où n’a manqué son effet qu’en raison de circonstances indépendantes de la volonté de son auteur. » Qu’est-ce que le commencement d’exécution ? Le législateur ne dit rien et laisse aux tribunaux le soin de préciser cette notion. Deux conceptions s’affrontent :

- La conception objective : le comportement d’un individu n’est pénalement répréhensible que s’il porte un trouble à l’ordre social. En conséquence, s’il n’y a pas de trouble, de résultat, la personne ne doit pas être poursuivie.

- La conception subjective : ce qui est répréhensible n’est pas le trouble effectif mais c’est la volonté délictueuse de l’individu, qui a eu un comportement nécessairement grave même si le résultat n’est pas atteint.

Quelle est la position retenue par la jurisprudence ? La tentative est le chemin du crime. Le législateur, en parlant de commencement d’exécution, distingue ce qu’il y a avant et après :

- Première étape : la pensée délictueuse (le fantasme de vouloir tuer quelqu’un n’est pas un acte répréhensible par exemple).

- Deuxième étape : Cette volonté délictueuse pourra s’extérioriser (ex. l’achat d’un revolver, d’un poison…).

- Troisième étape : Utilisation de l’arme (mélange du poison dans de la nourriture).

- Quatrième étape : La personne est blessée par le coup de feu et meurt, ou est empoisonnée.

- Cinquième étape : Le remord, le repentir (psychologique et actif). Le repentir actif se traduit par la donation d’un anti-poison, l’appel de secours…

La question qui se pose aux magistrats est d’estimer à quel instant on se trouve dans le commencement d’exécution. La pensée criminelle n’est pas un commencement d’exécution. L’extériorisation de la pensée criminelle (l’achat de l’arme) n’est pas non plus considérée comme un commencement d’exécution. La Cour de Cassation qualifie cette extériorisation « d’acte préparatoire ». L’acte préparatoire n’est pas pénalement répréhensible. Il est considéré comme un acte équivoque, tout simplement car on peut acheter un revolver pour tuer ou pour se défendre. La mort aux rats peut être utilisée pour tuer un homme ou des rats. La Cour de Cassation contrôle cette notion et la formule la plus courante est : le commencement d’exécution est « un acte tendant directement au délit et commis avec intention de le commettre ». Arrêt Lacour (et l’arrêt Schieb, rendu le même jour), 25 octobre 1962. Arrêt Lacour : pendant la guerre d’Algérie, une femme avait un fils refusant de faire son service militaire. Le compagnon de la femme, fervent militaire, le voyait d’un mauvais œil et envisageait de supprimer le jeune homme en faisant appel à un tueur à gages. Le tueur à gages se présente et renonce à son projet. Il souhaite s’entendre avec le fils pour pouvoir toucher la somme. Le docteur Lacour s’est retrouvé poursuivi pour complicité de tentative d’assassinat. Dans cet arrêt, la Cour de Cassation a dit qu’il ne pouvait pas y avoir de tentative d’assassinat de la part du docteur, car le fait de donner de l’argent n’a pas pour conséquence directe et immédiate d’engager

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le commencement d’exécution, ni de donner la mort. Depuis la Loi du 9 mars 2004, la Loi a été modifiée. Le fait de se poster dans une voiture avec des perruques, des carabines sous les sièges, et avec des cagoules dans la poche, à proximité d’une agence bancaire a été considéré par la Cour de Cassation comme un commencement d’exécution. Le fait de rentrer dans une voiture dont la porte était ouverte est considéré comme un commencement d’exécution du délit de vol. Acte préparatoire/Commencement d’exécution ? L’acte préparatoire est un acte équivoque. Le commencement d’exécution, c’est un acte univoque (on est rentré dans le schéma criminel : perruques, carabines, cagoules). Le commencement d’exécution est la première étape où l’on peut condamner pénalement quelqu’un. Ex. en entrant dans un supermarché et en mettant dans sa poche un objet nous attirant et étant trop onéreux, on est arrêté une fois ayant passé la caisse. Quand on franchit la caisse, on est entré dans le commencement d’exécution de tentative de vol. Art. 221-5-1 C. Pén. « Le fait de faire à une personne des offres ou des promesses ou de lui proposer des dons présents ou avantages quelconques afin qu’elle commette un assassinat ou un empoisonnement est puni, lorsque ce crime n’a été ni commis, ni tenté, de 10 ans d’emprisonnement et 250 000 € d’amende. » Il a fallu attendre 2004 pour que l’on sanctionne le mandat criminel. � Si le résultat est atteint, on parle d’infraction consommée et non de tentative. � Si on donne un antidote, l’infraction sera quand même consommée. Cela n’a pas d’effet sur la qualification pénale. C) La tentative interrompue Art. 121-5 Deux hypothèses se distinguent : l’interruption involontaire et la tentative infructueuse. • L’interruption involontaire se « fait par des circonstances indépendantes de la volonté de son auteur ». Des événements extérieurs vont empêcher la commission de l’infraction. Cela veut dire aussi par le raisonnement a contrario que si le désistement est volontaire, il n’y a pas de tentative. La question est de savoir quand le désistement est-il volontaire ou involontaire. Il est volontaire quand il est issu de la volonté de l’individu. Pourquoi la personne renonce-elle ? Peu importent les raisons de son désistement (pitié, la crainte du châtiment, peur…) dès l’instant ou c’est volontaire. En revanche, lorsque le désistement provient de l’extérieur, on considère que le désistement est alors involontaire (la police arrivant lors d’un cambriolage, l’arrivée d’une personne…). Le délinquant est poursuivi pour tentative de vol dans ce cas-là. Ce peut être aussi un événement technique (un coffre-fort qui résiste, un système d’alarme qui bloque les portes…). Le problème est lorsqu’il y a un événement qui oblige à renoncer à la commission de l’infraction. On considère qu’un ami nous disant d’arrêter un projet de vol peut être considéré comme ayant infléchi notre volonté. On devrait considérer que c’est un élément extérieur. Néanmoins, la Cour de Cassation considère que l’on ait pu être convaincu. Parfois cela peut être interne (la peine sexuelle : au moment d’un viol un homme est privé d’errection). Le désistement est-il alors volontaire ou involontaire ? La Cour de Cassation a considéré cela comme un désistement involontaire (10 janvier 1996).

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• La tentative infructueuse : le C. Pén. parle d’infraction manquée. C’est la même hypothèse que l’interruption involontaire (on a un commencement d’exécution, mais là, on va jusqu’au bout et on tire par exemple). L’infraction est manquée parce qu’un événement empêche d’obtenir le résultat. Ex. un tir raté, un fusil enrayé, une dose de poison insuffisante. Il y a un problème avec l’infraction impossible (Art. 121-5 ne parle que d’infraction manquée, mais la JP, la chambre criminelle, a souvent eu l’occasion d’appliquer la notion d’infraction manquée à l’hypothèse d’une infraction impossible). Dans l’hypothèse de l’infraction manquée, l’infraction était possible. Dans l’hypothèse de l’infraction impossible, en revanche, l’infraction ne pourra jamais se réaliser (on pourrait penser qu’on ne peut pas punir cette personne). La Cour de Cassation considère que l’on condamne l’auteur d’une infraction impossible. Ex. entrer dans une voiture non pas pour la voler mais pour voler ce qu’il y a à l’intérieur, or celle-ci est vide ; s’en suivent des poursuites pour vol, infraction manquée. La Cour de Cassation, bien que l’infraction soit impossible, c’est une impossibilité de fait : la personne a tout fait pour s’emparer de la chose si jamais elle avait été là. L’infraction impossible est sanctionnée comme l’infraction manquée. Lorsque l’impossibilité n’est pas de fait mais de droit, on ne pourrait pas condamner la personne comme auteur de la tentative. Arrêt du 16 janvier 1986, affaire Perdereau. Trois personnes sont ennivrées, type SDF, et deux d’entre elles décident de supprimer le troisième. L’une des deux personnes a tapé sur la personne et l’a tué. Pendant ce temps-là, l’autre cuvait son vin et ne s’est pas rendu compte de la mort de la victime. Le deuxième repart cuver son vin, et l’autre se réveille. En voyant la masse à terre, il pense qu’il est encore vivant et l’étrangle. Si on raisonne en terme d’infraction manquée, on peut tuer une personne morte. Si on raisonne en impossibilité juridique, la réponse est non : le meurtre suppose de tuer une personne vivante. La Cour de Cassation a privilégié l’élément intentionnel sur l’exigence du texte qui imposait que la personne soit vivante au moment de l’acte, et a estimé qu’il pouvait y avoir infraction manquée même en cas d’impossibilité de droit. La condamnation est la même. L’infraction putative (putare) : on croit commettre une infraction (fréquenter une mineure de moins de 15 ans ou fréquenter une mineure en pensant qu’elle a plus de 15 ans). Si les éléments physiques de la personne laissent penser qu’elle a plus de 15 ans, les poursuites n’auront pas lieu. D) La répression de la tentative Art. 121-4. L’auteur d’une tentative de crime ou délit est puni comme si l’infraction avait été consommée. La peine encourue est la même que celle encourue par l’auteur. Le fait que l’infraction ne soit pas commise revient au même. Les magistrats raisonnent comme si elle avait été consommée. La tentative n’est répréhensible que si l’auteur est conscient et a une intention délictueuse. À partir du moment où il a cette volonté délictueuse, il sera jugé comme si l’infraction avait été consommée (+ en fonction de son passé…). III – L’ELEMENT MATERIEL DANS L’INFRACTION COMMISE AU TITRE DE LA COMPLICITE

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La complicité est définie aux art. 121-6 et 121-7 C. Pén. Le complice N’EST PAS MOINS COUPABLE QUE L’AUTEUR et n’en sera pas moins condamné. « Sera puni comme auteur le complice de l’infraction au sens de l’article 121-7. » Dans l’art. 121-7, on nous décrit les hypothèses de complicité… A) Les conditions de la complicité Tout d’abord, il faut un fait principal punissable et un acte matériel antérieur ou concomitant (= en même temps) de complicité. • Le fait principal punissable (art. 121-7) : « Est complice d’un crime ou d’un délit la personne qui facilite la préparation de l’infraction (…) Est également complice la personne (…) qui aura provoqué à une infraction. » On exige tout d’abord un fait principal punissable qui, même s’il n’a pas été retenu, pourrait être retenu. Il faut une infraction caractérisée. Il n’y a pas de prescription dans l’expression « fait principal punissable », on est dans le délai pour le poursuivre, et cela suppose qu’il n’y ait pas d’amnistie. Si amnistie, on ne peut plus poursuivre. L’al. 1 vise la complicité du crime ou du délit. Le fait principal peut être n’importe quel crime ou délit. La complicité sera toujours possible. Dans la deuxième hypothèse (complicité par provocation), le mot « infraction » comporte les crimes, délits et contraventions. � Le fait principal peut être un crime ou un délit, quand il s’agit de l’aide. � Le fait principal peut être un crime, un délit ou une contravention, quand il s’agit de provocation. Il y a aussi des complicités en matière de contravention (complicité pour tapage nocturne par ex.). Si le fait principal n’est plus punissable, il n’y a pas de complicité. Si le fait principal n’est pas punissable, il n’y a pas non plus de complicité. En France, le suicide est autorisé. On ne peut pas être poursuivi pour complicité de suicide puisqu’il est licite. La personne échappant à un suicide n’est pas conduite devant les tribunaux. En revanche, il existe l’infraction spécifique qui est la provocation au suicide (écrire les mille manières de se suicider n’est pas de la complicité mais de la provocation). On n’exige pas que l’auteur ait été poursuivi et condamné. On peut poursuivre le complice et pas l’auteur. « Punissable » veut aussi dire que l’auteur n’a pas été sanctionné car il a bénéficié de la minorité (un enfant de 10 ans commettant des infractions sexuelles sur une voisine, aidé d’un homme de 18 ans). Le majeur serait condamné en tant que complice. Les causes qui tiennent à l’auteur n’ont pas d’effet sur le complice, sauf si ces causes suppriment l’infraction. Il y a une immunité entre les parents et les enfants : un enfant qui vole son père bénéficie d’une immunité familiale. Il sera condamné civilement mais pas pénalement. Si ce fils se fait aider par un copain, le copain sera poursuivi pour complicité de vol. Peut-on être complice d’un complice ? Peut-on aider un tiers qui est lui-même complice ? Dans le C. Pén., deux décisions sont contradictoires. La réponse de la Cour de Cassation est : la complicité est un fait principal punissable, et donc celui qui aide un complice commet lui même un acte de complicité punissable. Ex. une personne me demande le nom d’un bijoutier acceptant des bijoux volés. Je lui donne un nom et cette personne donne le nom à une autre. Le premier est receleur, le deuxième complice, et celui qui remet les bijoux est complice du complice.

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• L’existence d’un acte matériel antérieur ou concomitant de complicité : art. 121-7 C. Pén. : « Est complice d’un crime ou d’un délit la personne qui sciemment, par aide ou assistance en a facilité la préparation ou la consommation. Est également complice la personne qui par don, promesse, menace, ordre, abus d’autorité ou de pouvoir, aura provoqué à une infraction ou donné des instructions pour la commettre. » Trois hypothèses se distinguent :

- L’aide ou l’assistance (crime et délit), - La provocation (crime, délit, contravention), - La fourniture d’instructions (crime, délit, contravention).

L’immunité : il y a immunité familiale entre parents et enfants, sauf pour le complice. Mais la JP considère que le fait principal n’est pas punissable. Elle retient la responsabilité du complice comme auteur, comme s’il avait lui même commis le vol appartenant au père de son ami (par exemple). Ces actes de complicité doivent être entièrement consommés. Il faut fournir des clés, mais pas seulement promettre d’en fournir. L’acte de complicité doit ensuite être un acte positif : c’est une action. Celui qui n’agit pas, qui s’abstient, ne peut pas être poursuivi pour s’être associé à une infraction. Néanmoins, la JP de la c. cass. a attenué cette exigence. Elle considère que celui qui demeure passif peut néanmoins être poursuivi comme complice. Cette atténuation n’a été reconnue que dans deux hypothèses similaires : il faut, selon la c. cass., que la personne a qui on reproche un acte de complicité et qui s’est retenue, ait eu une obligation d’agir. Ex. un douanier qui assiste à une introduction irrégulière sur le territoire, un policier qui assiste à un cambriolage, on considère qu’ils ont une obligation d’agir. Ils sont complices du fait de leur abstention. Cette solution a aussi été retenue contre un administrateur social sachant que son supérieur faisait de l’abus de biens sociaux. Si l’on est dans la rue et que l’on assiste à un cambriolage, personne ne peut nous reprocher de n’avoir pas agit. Mais, en dehors de ces hypothèses, il y a des cas où l’on commet une infraction lorsque l’on ne dénonce pas (coups sur enfants, abus sexuels…). Les voisins sont poursuivis pour non-dénonciation et non pas pour complicité de coups et blessures sur enfant. La complicité par abstention est extrêmement pointue. Sans complicité par abstention, par de responsabilité, sauf pour la non-dénonciation. Un acte antérieur ou concomitant : si l’aide se situe postérieurement, il n’y a pas de complicité. L’acte de complicité doit être antérieur (donner un emploi du temps…) ou en même temps que l’infraction. Celui qui aide, aide au moment de la commission d’infraction. Cette règle n’est pas intangible. La c. cass. a estimé que si l’aide est postérieure à la commission d’infraction, c’est-à-dire au vol, on peut quand même retenir la complicité à condition qu’il y ait eu un accord antérieur. Ex. la projection d’un vol : l’un entre dans la boutique, l’autre fera le guet. S’il attend avec une voiture et permet l’évasion, cela se situe après le vol. L’acte ne tombe pas en principe sous le coup de la Loi, sauf accord antérieur. Si l’on commet un cambriolage et qu’ensuite une personne inconnue vous emmène en voiture, cette personne que vous ne connaissez pas ne sera pas accusée. La personne qui récupère les objets volés sera poursuivie au titre du recel. Le recel est une infraction autonome. On a également le délit de blanchiment. Le recel : on

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utilise les bijoux volés par un tiers pour votre compte personnel (on les porte, on les revend…). Le blanchiment, c’est donner une virginité à des sommes issues d’un trafic (de drogues, de terrorisme, de vols…). Ex. investir dans l’immobilier… L’aide et l’assistance sont visés dans l’al. 1 de l’art. 121-7. Il s’agit de termes très vagues : « Est complice d’un crime ou d’un délit la personne qui sciemment, par aide ou assistance en a facilité la préparation ou la consommation. » La c. cass. interprète : ce peut être le prêt d’une voiture pour un cambriolage, la distraction de la victime pendant le vol, tenir la victime pendant que l’auteur la maltraite, vendre une carte de téléphone falsifiée c’est se rendre complice d’escroquerie, fournir des fausses clés, une échelle, donner des éléments permettant de rentrer dans une maison… Le guetteur est complice bien qu’il ne participe pas matériellement. La provocation, al. 2. « Est également complice la personne qui par don, promesse, menace, ordre, abus d’autorité ou de pouvoir, aura provoqué à une infraction ou donné des instructions pour la commettre. » On vise n’importe quelle infraction ici (crime, délit, contravention). Ce peut être un don (ex. donner des bijoux) ou une promesse. La menace n’est pas une menace d’atteinte à l’intégrité physique. Celui menaçant sa compagne de la quitter si elle n’avorte pas est retenu pour complicité car l’IVG était illégal. L’ordre : il faut qu’il y ait une relation de subordination. L’ordre donné par un passage au conducteur de passer outre un barrage de police. Le conducteur est poursuivi pour violence volontaire. La c. cass. a décidé que le passager était complice car il avait donné un ordre. Abus de pouvoir, d’autorité : dans une relation de travail, on oblige un salarié de commettre une infraction. Obliger un comptable à mettre de faux chiffres. Le comptable, en inscrivant ces chiffres, est auteur de l’infraction. Celui qui écrit est auteur. Le chef d’entreprise est complice. Mais, la c. cass. a répondu une fois : un avocat a obligé sa secrétaire à rédiger un faux document, et si matériellement le faux avait été rédigé par la secrétaire, c’était l’avocat qui était l’auteur. Dans cette hypothèse, la c. cass. a renversé les responsabilité en disant que celui qui avait donné l’ordre était l’auteur. Donner des instructions, avant la commission de l’infraction : il faut donner des renseignements (ex. un emploi du temps). Il faut que ces renseignements soient précis. Donner le nom de quelqu’un permettant de commettre une infraction fait que l’on est complice (ex. donner le nom de quelqu’un chez qui on peut trouver du shit). Qu’en est-il si le renseignement donné ou l’aide apportée ne sont pas utilisés par l’auteur ? L’acte du complice peut-elle être retenue si l’agissement du complice n’a pas servi ? La c. cass. a répondu négativement en considérant que lorsque l’on donne un renseignement (ou une échelle, des clés…), on désire s’associer à une action délictueuse. Peu importe qu’autre chose soit utilisé par la suite. La JP est sévère en la matière. Si la personne a qui on donne le renseignement ne commet l’infraction, il ne peut y avoir de complicité, puisque l’on manque de fait principal punissable (affaire Lacour). Exception, art. 225. Le Dr. Lacour n’a pu être condamné pour complicité, car le tueur à gages s’est désisté. Il n’a pas été poursuivi pour tentative de complicité. � La complicité de tentative d’infraction peut toujours être retenue (ex. s’associer à une tentative de cambriolage).

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� La tentative de complicité (essayer de commettre une complicité) ne peut être retenu car la complicité suppose un acte consommé. B) La répression de la tentative • L’élément moral : il faut être conscient de ce que l’on fait. On ne peut pas être complice si on ignore que l’on s’associe à une infraction (ex. un artisan fabriquant une copie de clefs dérobées : il ignorait qu’il s’associait à un cambriolage). Si l’on donne le nom d’une personne susceptible de vendre de la drogue, on ne peut pas dire qu’on l’ignorait. On est supposé connaître l’existence du trafic. Faut-il que le complice ait connaissance de l’infraction qui sera effectivement commise ? Une décision du 13 janvier 1955 a permis de résoudre en partie cette difficulté. Un créancier avait confié à un tiers deux pistolets pour impressionner le débiteur. Le tiers se présente et le débiteur n’est pas là. Il demande à la concierge où il est, et s’en suit une altercation. Il tue la concierge. Lorsque l’on remet deux armes pour une menace et que l’on se retrouve avec un meurtre, est-on complice de meurtre pour fourniture de moyens ? Non, dit la c. cass. car la personne s’était associée à une tentative d’extorsion, mais cette tentative a dégénéré en meurtre. Dans une affaire ultérieure, changement de position : un pistolet est fourni à un prisonnier pour qu’il s’évade. Celui-ci utilise l’arme pour menacer les gardiens. Les gardiens tirent et tuent aussi un gardien. La c. cass. a estimé que la remise du pistolet impliquait l’utilisation éventuelle de l’arme. Elle a poursuivi celui qui a remis l’arme pour complicité de meurtre. • Les peines : Art. 121-6. Changement par rapport à l’ancien Code : « sera puni comme auteur » et non « comme l’auteur ». « Sera puni comme auteur le complice de l'infraction, au sens de l'article 121-7. » Lorsque l’on parle de complicité, on parle d’emprunt de criminalité. Je m’associe au fait délictueux de l’auteur. C’est lui qui constitue l’élément illicite. Je m’y associe dans la définition de l’infraction et dans les sanctions. L’emprunt de criminalité : on prend le fait principal punissable + la sanction. On est punissable comme l’auteur. C’est la position du C. Pén. de 1810. Le complice est punissable comme l’auteur. Plus tard, en 1994, la personne morale est introduite dans le C. Pén. et est désormais responsable. Elle ne peut être punissable comme l’auteur. L’auteur personne physique peut être emprisonné. Le complice sera puni comme s’il était un auteur. On ne va plus regarder la répression du complice à travers l’auteur, mais à travers ses caractéristiques. Si c’est une personne morale, elle sera punie par les peines encourues pour les personnes morales. Idem si c’est une personne physique. Avant 1994, nous avions un meurtre particulier qui supposait la peine de mort avant 1981 : le parricide. C’est le fait de tuer la personne qui vous a engendré (peine de mort avant 81, puis prison à perpétuité). Le complice est punissable comme l’auteur dans ce cas là. Il est punissable d’une complicité de parricide (avant 1981, éventuellement peine de mort). Je désire tuer mon père, je connais les risques, je me fais aider. L’ami tue mon père et est poursuivi pour meurtre simple. Moi qui l’ait aidé, je suis complice de meurtre et non de parricide. Je suis poursuivi pour complicité de meurtre et non de parricide. En 1994, il y a un changement : tuer son père, c’est être auteur d’un meurtre avec circonstance aggravante, mais celui qui m’a aidé n’a pas tué son ascendant et est poursuivi comme complice d’un meurtre simple. Hypothèse inverse : demander à quelqu’un de m’aider à tuer mon père. Il

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le tue, et est auteur d’un meurtre. Je l’ai aidé, je suis simplement complice d’un meurtre, sans circonstance aggravante. Ces changements sont importants au cas par cas. En principe, dans le nouveau C. Pén., on est réprimé comme si on était un auteur. Trois hypothèses :

- Lorsqu’il y a des circonstances aggravantes objectives ou réelles (= qui s’attachent à l’infraction ; un vol simple + un vol aggravé car commis avec une infraction comme un bris de vitre), la circonstance aggravante réelle s’applique au complice, même si celui-ci l’ignore. Actuellement, on a la bande organisée : si on s’associe à un vol et qu’on ignore qu’il est organisé en bande, on a toute la chance d’être poursuivi pour vol en bande organisée. La circonstance aggravante réelle s’applique au complice.

- La circonstance aggravante mixte : elle ne s’applique plus au complice. Ex. un délit de faux devenant un crime de faux lorsqu’il est commis un officier public. La circonstance aggravante ne s’appliquera pas au complice.

- Les circonstances personnelles ne s’appliqueront jamais au complice : ex. le parricide (aujourd’hui, la circonstance aggravante de la qualité d’ascendant).

• Le choix entre la qualification d’auteur et celle de complice. Nous sommes dans une hypothèse d’actes délictueux commis à plusieurs. Deux systèmes s’opposent :

- Soit je raisonne en termes d’emprunt de criminalité (un auteur – un complice, une infraction principale – une hypothèse de complicité),

- Soit la proposition du doyen Carbonnier de dire qu’il y a deux infractions : l’infraction de l’auteur et l’infraction de complice. On aurait trois éléments constitutifs pour le complice, et un quatrième serait ajouté : l’infraction de l’auteur.

Le système français retenu en 1994 est hybride. Pour définir l’acte du complice, on raisonne en termes d’emprunt de criminalité (on a besoin du fait principal punissable). Sans fait principal punissable, pas d’infraction. En revanche, pour la répression, on raisonne partiellement en termes d’infraction autonome. Dans quelles hypothèses retient-on la coaction ou la complicité ? On aura tendance à retenir la coaction (poursuivre les deux personnes comme coauteurs) quand la complicité n’existe pas. La complicité n’est pas possible en matière de complicité de contravention par aide et assistance (sauf complicité de tapage nocturne ou complicité de violence légère). Une obligation spécifique s’adresse au conducteur (vérifier que les passages sont attachés). On retient la coaction quand l’acte du complice est indispensable à la commission de l’infraction. Retenir la complicité plutôt que la coaction permet d’éviter certaines circonstances aggravantes. Lorsque l’on vole, le but est d’obtenir la voiture par exemple. On ne poursuit pas pour recel et pour vol. Celui qui vole un objet, c’est pour s’en servir. Le vol, c’est 3 ans de prescription. Le recel (délit continu), la prescription continue le jour où le délit cesse. On peut condamner pénalement le complice et le déclarer en même temps coupable de recel. Il s’est associé au vol de la voiture, mais l’a conservée après. Le départ de la prescription se fera le jour où la voiture sera vendue. Celui qui réunit en sa personne les 3 éléments constitutifs de l’infraction est considéré comme auteur. Celui qui commet un viol, c’est celui qui commet un acte de pénétration. Celui qui tient la fille est complice.

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Lorsque l’on a deux coauteurs ou lorsque l’on a un auteur et un coauteur ou un complice, on a la possibilité de retenir la circonstance aggravante de la réunion pour toutes les infractions (vols, coups et blessures…). Si, en revanche, on a eu préméditation, on pourra à ce moment là retenir la circonstance aggravante de la bande organisée. Lorsque l’on s’associe à un projet, on parlera d’association de malfaiteurs. CHAPITRE III – L’ELEMENT MORAL C’est le troisième élément constitutif de l’infraction. C’est l’art. 121-3 C. Pén., très long, remanié à de nombreuses reprises, et comportant 5 alinéas. I – LA FAUTE INTENTIONNELLE Art. 121-3, al. 1 : « Il n’y a point de crime et de délit sans intention de le commettre. » À partir de ce mot « intention », on décline l’élément psychologique de chaque infraction. Aujourd’hui, l’élément intentionnel se trouve défini dans cet article. La Loi de 1994, le nouveau C. Pén. a pris pour principe que tous les délits et tous les crimes doivent être commis avec une intention. La JP avait pris des pratiques condamnables et estimait que pour certains délits seuls les éléments légal et matériel suffisaient. On appelait cette catégorie de délits les « délits matériels » (≠ infraction matérielle). Ce sont la publicité mensongère, la pollution… Ex. un entrepreneur pollue une rivière, et sa responsabilité pénale est engagée. En 1994, le législateur dit que chaque délit, chaque crime, doit être associé à une intention. La faute intentionnelle représente les ¾ du C. Pén. A) L’intention et le mobile L’intention, non définie par le législateur, est en fait la conscience d’enfreindre la loi pénale. On est conscient de commettre un acte illicite. « Nul n’est censé ignorer la Loi » en France : on ne peut pas dire qu’on ne connaissait pas le caractère illicite. L’intention, c’est la faculté de discerner le bien du mal. Il faut être conscient, sans avoir besoin de savoir quels comportements sont interdits. Dès qu’un être est doué de raison et n’est pas en hôpital psychiatrique, dès que l’on commet un acte illicite, l’élément intentionnel est rapporté. Lorsque quelqu’un vole, on ne se pose pas la question de savoir son intention. Le mobile, c’est une raison psychologique, personnelle à chacun des délinquants. En France, on a le problème de l’euthanasie. Tuer quelqu’un pour le voler. La raison du meurtre est l’appât du gain. On peut tuer quelqu’un pour l’alléger de ses souffrances dans le cas de l’euthanasie. C’est un mobile « louable » dans un cas, « crapuleux » dans l’autre. Il ne nous importe pas en droit pénal. Ce n’est pas l’intention. Voler des denrées alimentaires pour l’Afrique, c’est commettre un vol tombant sous le coup de la Loi. Le mobile en soi n’est pas un élément dans la qualification de l’infraction. Depuis une dizaine d’années, de nombreuses infractions sont aggravées en fonction de mobiles racistes, ethniques, sexistes, religieux. Dans la loi du 9 mars 2004, Perben II, on a même prévu cette aggravation concernant le vol. Le vol inspiré par un motif religieux, raciste,

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sexiste, est un vol aggravé. Y aurait-il un mobile à côté de l’intention ? Dans ce type d’infractions, on a élevé le mobile. � Le mobile n’entre pas en ligne de compte, sauf exceptions. Il n’est pris en considération que dans le cadre de la répression. B) Le dol général et le dol spécial – DOL = ERREUR L’intention, c’est la conscience de violer la Loi pénale. Comment l’établit-on ? On n’a pas à rapporter une preuve précise. Cette conscience est présumée. Si on n’est pas sûr, on fait une expertise. C’est supposé acquis, mais pour certaines infractions, on requiert un élément supplémentaire, le dol spécial : c’est une intention renforcée. Le dol général, c’est l’intention. Le meurtre, c’est l’intention de tuer. Comment rapporter cette intention ? Où a été porté le coup ? S’il vise le cœur, la volonté de tuer sera rapportée. S’il vise le pied et qu’il a une septicémie, cela paraît plus difficile. Un coup de revolver dans le foie, on peut supposer que la volonté de meurtre est présumée. Si le pied est visé, mais que la personne décède suite à une septicémie, on présume que l’intention de meurtre n’est pas présumée. On voit que le législateur utiliser des termes comme « intention de tuer », « frauduleusement », « de mauvaise foi », et on sait que l’on sera plus exigeant pour pouvoir déclarer cette personne coupable. Le vol, art. 311-1, « soustraction frauduleuse de la chose d’autrui ». Le vol suppose un dol spécial (« frauduleuse »). Quand c’est un vol simple, on ne se pose pas de questions sur les intentions du voleur. Mais, lorsque l’on photocopie un document pour voler quelque chose, on a une intention frauduleuse. Crime et délit, vol simple � intention simple « Frauduleuse »… � dol spécial C) Le dol simple, le dol aggravé, le dol indéterminé et le dol dépassé Le dol aggravé : On peut avoir une volonté criminelle aggravée, décuplée. Le plus souvent, le vol simple est un dol général. L’aggravation provient d’une circonstance particulière, comme par exemple le terrorisme, la préméditation… Un meurtre simple sera aggravé par la préméditation. On parle de dol aggravé. Certaines circonstances aggravantes sont liées à l’intention lorsque l’on vise certaines personnes vulnérables. Là, on a un dol aggravé. Le dol dépassé : agir mais sans vraiment vouloir le résultat, mais en l’assumant. Aller au-delà de ce qu’on l’avait prévu. Ex. donner des coups. On doit assumer les conséquences graves, les complications (la perte d’un œil suite à un coup de poing). En donnant un coup, on accepte les circonstances. Ex. le fait de tirer en l’air avec un pistolet d’alarme, c’est en assumer les conséquences (une crise cardiaque par exemple). Donner un coup à une personne qui décède juste après. Le dol indéterminé : savoir qu’il y aura des conséquences, on ne sait pas lesquelles, et on les assume. Lorsque l’on monte une qualification pénale, il faut s’interroger sur l’existence de cette faute intentionnelle. Si la personne n’est pas démente, n’est pas dénuée de discernement, sa responsabilité sera engagée. Si, en revanche, elle est soumise à une

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contrainte, force majeure, erreur sur le Droit, on fera tomber cet élément moral. On peut écarter cette faute intentionnelle s’il y a une contrainte, force majeure ou erreur sur le Droit. II – LA FAUTE DE MISE EN DANGER DELIBEREE A) Le contenu Art. 121-3 : « Il n'y a point de crime ou de délit sans intention de le commettre. Toutefois, lorsque la loi le prévoit, il y a délit en cas de mise en danger délibérée de la personne d'autrui. Il y a également délit, lorsque la loi le prévoit, en cas de faute d'imprudence, de négligence ou de manquement à une obligation de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement, s'il est établi que l'auteur des faits n'a pas accompli les diligences normales compte tenu, le cas échéant, de la nature de ses missions ou de ses fonctions, de ses compétences ainsi que du pouvoir et des moyens dont il disposait. Dans le cas prévu par l'alinéa qui précède, les personnes physiques qui n'ont pas causé directement le dommage, mais qui ont créé ou contribué à créer la situation qui a permis la réalisation du dommage ou qui n'ont pas pris les mesures permettant de l'éviter, sont responsables pénalement s'il est établi qu'elles ont, soit violé de façon manifestement délibérée une obligation particulière de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement, soit commis une faute caractérisée et qui exposait autrui à un risque d'une particulière gravité qu'elles ne pouvaient ignorer. Il n'y a point de contravention en cas de force majeure. » Art. 121-3, al. 2. « Toutefois, lorsque la Loi le prévoit, il y a délit en cas de mise en danger délibérée de la personne d’autrui. » Cette deuxième hypothèse se situe entre l’intention, la faute intentionnelle, et la faute non intentionnelle. Elle est à mi-chemin, c’est la faute de mise en danger délibérée de la personne d’autrui. Cette faute de mise en danger de la personne d’autrui existait avant 1994 au titre du dol éventuel. Ce qui est réprimé, c’est d’être indifférent à la personne d’autrui. Elle se retrouve dans différentes infractions, comme un élément d’aggravation particulier, tout en constituant une infraction particulière (art. 221-6, les « atteintes involontaires à la vie »). Ex. imprudence, un piéton est renversé. Si on agit en violant manifestement une obligation, on transforme l’infraction avec circonstance aggravante (passer un feu rouge) et on passe de 3 à 5 ans d’emprisonnement. Art. 223-1 « Le fait d’exposer autrui à un risque immédiat de mort ou de blessure de nature à entraîner une mutilation ou une infirmité permanente par la violation manifestement délibérée d’une obligation particulière de sécurité ou de prudence imposée par la Loi ou le règlement. Ce fait-là est punissable d’un an d’emprisonnement et de 15 000 € d’amende ». Ex. franchir une côte en doublant : on commet une infraction au C. Route. Et, on expose autrui à un danger. On sera alors condamné doublement, même si on ne commet pas d’accident.

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Cas pratique : - Rechercher le texte de loi - Rechercher l’agissement répréhensible (acte matériel, omission, tentative, complicité) - Etait-il conscient ? Cette mise en danger délibérée est à la fois une infraction autonome (dépassement en haut d’une côte). Même s’il n’y a pas d’accident, la condamnation est possible. En même temps, cela constitue l’élément moral qui va aggraver certaines infractions (principalement, les infractions qui sont commises de manière involontaire comme l’homicide involontaire ou blessures involontaires). L’homicide involontaire est cité à l’art. 221-6 : 3 ans d’emprisonnement. Si la faute commise est une mise en danger délibérée de la vie d’autrui, on passe à 5 ans d’emprisonnement. Cet élément moral sera retenu pour aggraver la sanction. B) Le domaine Cela concerne les infractions d’imprudence. Il faut un règlement (loi, décret, arrêté municipal). Ce règlement a donc été méconnu, violé, et on considère que cette violation doit avoir été manifeste (= délibérée). Il s’agit d’un règlement concernant la sécurité ou la prudence, et non pas n’importe lequel. La majorité des règlements du C. Route sont visés. En matière de droit du travail, la réglementation vise aussi la prudence. La mise en danger délibérée de la vie d’autrui pourra être obtenue assez facilement lorsqu’une réglementation n’aura pas été respectée. Ex. si en franchissant un feu rouge, ou en conduisant au-delà de la vitesse maximale, un individu met-il délibérément en danger la vie d’autrui ? La réponse de la c. cass. est mitigée. Si les juges d’appel ont constaté que le franchissement du feu rouge a eu lieu la nuit, elle approuve la qualification de mise en danger délibérée de la vie d’autrui (même s’il n’y a pas d’accident). S’il y a un accident, cela constitue la circonstance aggravante de l’accident. Si le franchissement du feu rouge a eu lieu dans la journée, elle refuse de dire qu’il y a systématiquement une mise en danger délibérée de la vie d’autrui. La même analyse vaut en matière d’excès de vitesse. III – LA FAUTE NON INTENTIONNELLE Art. 121-3, al. 3 et 4 C. Pén. : « (…)Il y a également délit, lorsque la loi le prévoit, en cas de faute d'imprudence, de négligence ou de manquement à une obligation de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement, s'il est établi que l'auteur des faits n'a pas accompli les diligences normales compte tenu, le cas échéant, de la nature de ses missions ou de ses fonctions, de ses compétences ainsi que du pouvoir et des moyens dont il disposait. Dans le cas prévu par l'alinéa qui précède, les personnes physiques qui n'ont pas causé directement le dommage, mais qui ont créé ou contribué à créer la situation qui a permis la réalisation du dommage ou qui n'ont pas pris les mesures permettant de l'éviter, sont responsables pénalement s'il est établi qu'elles ont, soit violé de façon manifestement délibérée une obligation particulière de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le

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règlement, soit commis une faute caractérisée et qui exposait autrui à un risque d'une particulière gravité qu'elles ne pouvaient ignorer. (…) » La majorité des infractions dans le C. Pén. sont des infractions volontaires (ex. vol, meurtre…). Ces infractions sont commises avec une intention, un résultat. Dans les infractions pour lesquelles la faute non intentionnelle est requise, le résultat n’est pas désiré. Art. 121-3, al. 3 et 4. Les infractions non intentionnelles sont des délits et certaines contraventions, jamais des crimes. Dans le C. Pén. 1994, il n’y a plus de crime non intentionnel. Deux catégories de fautes sont non intentionnelles. Elles sont limitées dans le C. Pén. mais fréquentes devant les tribunaux (car relevant de la vie quotidienne) : - Les infractions qui portent atteinte à l’intégrité physique (blessures) et à la vie (homicide) : ce sont des infractions dites involontaires. - Les infractions en matière de pollution. Dans ces 2 cas précis, il faut un résultat. La faute non intentionnelle ne sera retenue que si elle a entraîné un dommage. Jusqu’en 1996, l’élément intentionnel était simple : l’auteur d’une infraction involontaire est déclaré coupable dès l’instant où son comportement révèle une imprudence, une maladresse, une inattention, une négligence ou l’inobservation d’un règlement, à condition que ce comportement soit en relation avec le dommage, le préjudice (ex. un pied coupé, un traumatisme crânien d’un piéton…). Ce comportement doit seulement avoir eu un rôle causal dans la survenance de l’accident. Quelle causalité ? La JP estimait que « peu importe que le rôle de la faute ait été minime, cela suffisait pour entraîner la responsabilité de l’auteur ». Jusqu’en 1996, on faisait prévaloir « l’équivalence des conditions ». N’importe quelle faute qui avait un lien lointain entraînait la responsabilité. Pourquoi une telle rigueur ? Il y a 4 domaines où intervient la faute non intentionnelle : les accidents de la circulation ; les accidents du travail ; les interventions chirurgicales (médecine en général, traitements…) ; le domaine des décideurs publics (personnes élues & fonctionnaires ; maires, préfets, enseignants…). Il suffit que l’on ait relevé à l’encontre d’un maire une négligence en relation avec les dommages pour qu’il soit déclaré coupable. Cette négligence s’appréciait in abstracto (= de manière abstraite), non pas par rapport à un maire idéal, mais par rapport à un homme moyen. Tout ceci aboutit à un objectif commun : l’indemnisation des victimes. Depuis 1912, la chambre criminelle de la C. cass. avait estimé dans un arrêt que la faute civile était liée à la faute pénale. S’il n’y a pas de faute pénale, pas de faute non intentionnelle, il n’y a pas de faute civile. Donc, pas de dommages et intérêts, pas d’indemnisation. Les magistrats avaient tendance dans un souci de réparation jusqu’en 1996 de retenir toutes les fautes aussi légères soient elles pour estimer que la responsabilité était établie. C’était positif pour les victimes, mais négatif pour les auteurs (ayant alors un casier judiciaire et une condamnation pénale). Plusieurs éléments vont inciter le législateur à modifier la notion de faute non intentionnelle : - Depuis 1994, les personnes morales sont pénalement responsables (or, établir la responsabilité pénale d’une personne morale est difficile).

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- Les maires se trouvaient impliqués trop fréquemment pour des affaires de responsabilité pénale et étaient poursuivis en cas d’accidents survenus dans les communes. - Les enseignants étaient fréquemment poursuivis par les parents. Le plus souvent, les parents vont devant le tribunal répressif (choix d’aller devant la juridiction répressive ou la juridiction civile) : on n’avance pas de frais, les procédures sont plus rapides. Deux accidents ont eu un grand retentissement : - L’effondrement de la tribune de Furiani en Corse. Le maire et le préfet ont été impliqués et traduits devant le tribunal correctionnel. Selon eux, leur responsabilité est limitée, mais ils devront payer. - Un établissement thermal : un court-circuit a eu lieu, et la responsabilité du maire et des autorités devant vérifier le respect de la réglementation a été engagée. La première étape est la loi du 13 mai 1996 : elle précise que l’on est responsable de ses fautes d’imprudence, d’inattention, maladresse… sauf si l’on a rempli correctement les diligences imposées par la loi. Les maires ne seraient plus déclarés coupables si, avec les moyens qu’ils avaient, ils avaient veillé à l’application des textes (1 visite par mois des établissements scolaires et dès que la visite est faite, ils ont rempli leurs obligations). Cette loi a été un échec total, parce que la c. cass. a considéré qu’il s’agissait d’un texte corporatiste et a continué à raisonner de manière abstraite. Mme Georgina Dufoix était ministre de la santé au début de l’affaire du sang contaminé. Interrogée par un journaliste, elle a dit être responsable mais pas coupable. En d’autres termes, elle veut bien payer mais pas être déclarée coupable. Or, en France, on est d’abord déclaré coupable avant de payer pour ses responsabilités… La loi du 10 juillet 2000 est la loi ayant réformé les al. 3 et 4. C’est la loi Fauchon (du nom d’un sénateur). Elle avait le même travers que la loi de 1996 au départ, c’est-à-dire que dans le projet de loi, on visait les décideurs publics (préfets, élus, fonctionnaires…). Au cours des débats parlementaires, certains députés ont évoqué le principe d’égalité des citoyens devant la loi. La loi du 10 juillet 2000 s’applique à tous (aux personnes physiques et aux personnes morales). Le délit de divulgation par imprudence d’un secret de défense nationale (art. 413-10 C. Pén.). La loi distingue 2 alinéas : - La causalité directe - La causalité indirecte. A) La causalité directe Art. 121-3, al. 3 « Il y a également délit, lorsque la loi le prévoit, en cas de faute d’imprudence, de négligence ou de manquement à une obligation de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement, s’il est établi que l’auteur des faits n’a pas accompli les diligences normales compte tenu, le cas échéant, de la nature de ses missions ou de ses fonctions, de ses compétences ainsi que des pouvoirs et des moyens dont il disposait. » C’est l’hypothèse de la causalité directe. Le changement instauré par la loi du 10 juillet 2000 est que l’on distingue désormais si le comportement de l’auteur est ou non en relation directe avec le dommage causé. On abandonne l’idée de

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l’équivalence des conditions. Il faut une causalité directe : un comportement à l’origine du dommage. Les travaux parlementaires n’ont pas aidé les magistrats à distinguer le direct de l’indirect. Il y a tout de même une circulaire d’application (elle n’a aucune valeur juridique). Le législateur a considéré que le lien de causalité direct, c’est lorsque la main de l’homme ou son prolongement sont en contact avec la victime. Il y aura un lien de causalité directe lorsque ce sera la main, le pied, qui aura occasionné le dommage (le prolongement de la main de l’homme : un ski, un bâton, une voiture, une arme à feu, le chirurgien laissant un objet dans le corps d’un patient…). La notion de maladresse et d’inattention sont abandonnées. On ne parle plus que d’imprudence, de négligence ou de manquement. Lorsque l’on arrive à établir que le skieur a été imprudent et que cela s’est traduit par un choc avec la victime, sa responsabilité sera engagée. L’imprudence existe indépendamment de l’inobservation des règlements, de la même manière pour la négligence. Le fait d’exiger un lien certain avec les dommages, c’est une forme de dépénalisation. Sans lien certain, on a une autre responsabilité, mais beaucoup plus difficile à établir. En pratique, il y a rarement de causalité directe dans les accidents du travail, dans le corps médical. En revanche, il y a très fréquemment le prolongement de la main dans le cadre des accidents de voiture : si la voiture heurte la victime, on raisonne en termes de causalité directe. L’inobservation d’un règlement suffit à caractériser la faute non intentionnelle. Dans cette hypothèse, on a une identité entre la responsabilité civile et la responsabilité pénale. Ex. si le skieur crève l’œil d’un enfant, il est responsable civilement. Cette causalité directe a diminué le champ de la répression, puisque l’exigence « prolongement de la main » ne se retrouve pas toujours. B) La causalité indirecte C’est l’innovation de la loi du 10 juillet 2000. Le principe : s’il n’y a pas de prolongement de la main de l’homme, pas de contact, en principe, on ne retient pas le comportement de l’intéressé. Ce principe ne pouvait être retenu que s’il comportait des exceptions importantes. Pour l’affaire du Mont St-Odile, il faut maintenant déterminer les responsabilités. Deux exceptions de fautes non intentionnelles ont été envisagées dans le cas de la causalité indirecte. Ex. un chasseur laisse son arme armée dans un jardin et 2 enfants jouent avec. Un enfant tue l’autre. Le chasseur a-t-il une part de responsabilité dans le décès de l’enfant ? Le chirurgien opère et ne prévient pas des risques de complication au réveil : la personne décède au réveil. Le médecin est-il responsable ? Dans une classe de 30 enfants, l’un se jette par la fenêtre. Y a-t-il une responsabilité de l’instituteur ? L’art. 121-3, al. 4 : « Dans le cas prévu par l'alinéa qui précède, les personnes physiques qui n'ont pas causé directement le dommage, mais qui ont créé ou contribué à créer la situation qui a permis la réalisation du dommage ou qui n'ont pas pris les mesures permettant de l'éviter, sont responsables pénalement s'il est établi qu'elles ont, soit violé de façon manifestement délibérée une obligation particulière de prudence ou de sécurité

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prévue par la loi ou le règlement, soit commis une faute caractérisée et qui exposait autrui à un risque d'une particulière gravité qu'elles ne pouvaient ignorer. » Le texte ne s’adresse qu’aux personnes physiques. La personne physique doit avoir créé la situation à l’origine du dommage, ou alors ne pas avoir pris de disposition. Il faut d’abord établir que dans les circonstances de l’espèce, le comportement de l’auteur est à l’origine du contexte dans lequel va avoir lieu l’accident. La c. cass. n’a jamais accepté que l’on discute raisonnablement de cette première partie de la phrase. Créer la situation, contribuer à la créer, c’est une redondance de la faute qui sera retenue ultérieurement. La personne a 2 comportements pouvant l’amener devant les juridictions répressives : la faute délibérée et la faute caractérisée. - La faute délibérée se rapproche de la mise en danger délibérée de la personne d’autrui. La mise en danger délibérée de la personne d’autrui est une faute pouvant aggraver certaines infractions dans l’hypothèse d’un lien de causalité direct. Ici, c’est l’hypothèse d’une causalité indirecte. Il faut relever à l’encontre du suspect un texte de loi, un arrêté municipal, qui vise à la sécurité et qui ait été manifestement violé. Même s’il n’y a pas de contact entre la main de l’homme et la victime, on aura une responsabilité du chef d’entreprise, de l’instituteur, du maire, du préfet, de l’automobiliste s’il a violé de manière délibérée une prescription légale. Ex. pour un chef d’entreprise, le non-respect d’une règle de sécurité : le port de casque sur un chantier. Si un ouvrier n’en a pas et reçoit un objet sur la tête, le chef d’entreprise est responsable. Idem pour protections sur un échafaudage. Un instituteur a l’interdiction de laisser les élèves seuls dans une classe : si l’un se jette par la fenêtre, l’instituteur ne respecte pas les règles de sécurité. Idem en conduisant un véhicule et en violant une obligation de sécurité. - La faute caractérisée : il n’y a pas de réglementation qui a été violée (ex. l’arme du chasseur : aucun texte ne l’oblige à retirer les balles de son arme). Le législateur prévoit tout de même de retenir la responsabilité si une faute caractérisée est commise. La c. cass. considère que la faute caractérisée forme un tout. Si le comportement est suffisamment grave, d’après les circonstances, on estimera que la personne peut être déclarée coupable. Ce n’est pas une faute légère. La c. cass. considère le comportement d’une personne par rapport à un homme moyen. Si le comportement de quelqu’un est discutable, on invoquera la faute caractérisée. Ex. le gynécologue accoucheur est appelé, estime que ce n’est pas assez grave et va voir une autre patiente. Entre temps, l’enfant naît mort-né. Autre problème : anomalies non détectées sur les échographies. On peut retenir à son encontre une faute caractérisée. Les chefs d’entreprise sont accusés d’accident du travail même si le C. Travail a été respecté. La JP est contradictoire. Enfin, il faut s’interroger sur le caractère direct (négligence, inobservation des règlements…) ou indirect (faute délibérée ou faute caractérisée). Ex. Le sang contaminé. En 1985, on découvre que la transmission du SIDA peut se faire par voie sanguine. Rivalité entre les instituts français et américains pour découvrir le test permettant de détecter le SIDA dans le sang. Pour les hémophiles, risque de mort suite à un accident. Ces enfants recevaient des produits sanguins pour y pallier. L’institut français du sang a collecté du sang, dont du sang infecté. Attente du test français pour tester ce sang. Les enfants ont tout de même reçu ce sang contaminé. Le directeur du centre national de transfusion sanguine, les médecins prescripteurs sont-ils responsables ? En définitive, il n’y avait pas eu à leur encontre de faute caractérisée. On a

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exclu la qualification pénale d’homicide involontaire pour le directeur du centre national de transfusion sanguine et pour les médecins prescripteurs. IV – LA FAUTE CONTRAVENTIONNELLE Elle est prévue indirectement à l’al. 4 de l’art. 121-3. Il y a 2 sortes de contraventions : celles où l’on exige une faute intentionnelle, précise et rapportée, et celles où la faute est contenue dans l’élément matériel, sans besoin de la rapporter. Lorsque la contravention exige une faute intentionnelle ; la contravention de violences légères, la contravention de coups volontaires ayant entraîné moins de 8 jours d’incapacité. Dans ces 2 hypothèses-là, il faut rapporter une faute intentionnelle (la volonté de porter des coups). C’est l’hypothèse parcellaire. La majorité des hypothèses, c’est que la faute contraventionnelle est contenue dans l’élément matériel. Il suffit qu’un feu rouge soit grillé, d’avoir circulé sans ticket pour que l’infraction soit caractérisée. Il suffit d’avoir fait du bruit (jour et nuit) pour que le tapage soit caractérisé. Il n’y a pas de présomption de faute. Si on parle de présomption, on peut apporter la preuve contraire. On ne peut pas apporter la preuve de sa bonne foi. L’al. 5 de l’art. 121-3 précise qu’il n’y a point de contravention en cas de force majeure (hypothèse permettant d’exclure la responsabilité pénale en touchant à l’élément moral). En parlant de faute contraventionnelle, il existe une faute inhérente à l’agissement matériel, mais l’auteur peut toujours dégager sa responsabilité s’il apporte la preuve : 1/ Qu’il n’avait pas conscience du bien et du mal, 2/ Qu’on était dans une hypothèse de force majeure. Conscience du bien et du mal : c’est la personne qui est dépourvue de discernement (personne internée dans un hôpital psychiatrique prenant le train sans billet). Force majeure : un événement vous oblige à commettre l’infraction (événement climatique, orage, tempête ou un événement dû à la personne d’autrui). Un événement climatique : je dois déposer un document le 30 mai, il y a une inondation, je ne peux respecter la réglementation ; avoir une femme enceinte à bord de son véhicule…). La force majeure exclue la responsabilité pénale. Elle présente certaines caractéristiques : la force majeure doit être extérieure, irrésistible et imprévisible. En Droit pénal, on admet qu’elle puisse être interne. Ex. un automobiliste qui commet une infraction (feu rouge) car pris d’une crise d’épilepsie ne sera pas poursuivi car il a été contraint. � Pas de responsabilité pénale. S’il continue de conduire, il sera poursuivi car sa maladie est prévisible. CHAPITRE IV – LA DETERMINATION DES PERSONNES RESPONSABLES Depuis 1994, les personnes morales (associations, sociétés, fondations, clubs sportifs…) sont pénalement responsables. Lorsqu’un fait délictueux est commis (crime, délit, contravention), la détermination des personnes responsables s’applique : la question est de savoir qui sera renvoyé devant la juridiction de jugement, devant le T. corr. Une personne ? deux ? Cette question appartient au Ministère Public, chargé de la poursuite,

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au juge d’instruction, mais le juge d’instruction n’intervient que dans 5% des affaires. Le Ministère Public décide soit de classer, c’est-à-dire d’interrompre, soit de faire un rappel à la loi, soit de faire un renvoi devant la juridiction de jugement. Ensuite, le tribunal (de police, correctionnel, cour d’assises), la juridiction de jugement se pose des questions (relatives au texte de loi, au comportement reproché, est-ce que ces conditions sont réunies pour condamner le prévenu ou l’accusé ?). I – LA RESPONSABILITE PENALE DE LA PERSONNE PHYSIQUE La question qui se pose est celle de savoir si nous sommes responsables de nos seuls faits, ou bien si nous sommes également responsables pénalement du fait d’autrui. C’est une question très importante qui aura des réponses en Droit civil. A) La responsabilité du fait personnel Le principe est énoncé à l’art. 121-1 : « Nul n’est responsable pénalement que de son propre fait ». Cette distinction apparaît pour la première fois dans le Code de 1994, et c’est l’aboutissement d’une longue évolution. Au départ, la responsabilité pénale était collective, c’était la vengeance d’un groupe, et une vengeance privée. Lorsque la justice est devenue publique, c’est-à-dire organisée par l’Etat, on a envisagé de limiter la responsabilité pénale au seul Homme qui avait violé la loi. En réalité, c’est la Révolution française qui a émis cette idée qu’on ne pouvait pas être pénalement responsable des faits commis par autrui. C’est sous-jacent dans la Déclaration des Droits de l’Homme : la liberté suppose la responsabilité. Le fait que l’art. 121-1 soit là permet de dire aux justiciables qu’on le rappelle, mais il existait même non écrit. Quelle est sa valeur ? Ce principe a-t-il une valeur légale ou une valeur supra légale ? On considère que la responsabilité pénale du fait personnel a une valeur supra légale. Néanmoins, il y a des dérogations. Si c’était un principe à valeur constitutionnelle, on n’aurait pas de dérogation. Dans le droit civil à l’inverse, on est responsable civilement des faits commis par autrui. Ex. les parents sont responsables des faits commis par leurs enfants. C’est eux qui doivent payer. Les chefs d’entreprise sont responsables des faits commis par leurs employés. Les propriétaires d’animaux sont responsables si leurs moutons (ou chiens) causent des dégâts. Art. 1384 C. Civ. on est responsable des choses que l’on a sous sa garde. Le droit civil prévoit une responsabilité du fait des choses et du fait des personnes avec lesquelles on est lié. En droit pénal, le principe est non. La responsabilité pénale se limite aux agissements que l’on a personnellement commis. Néanmoins, dans certaines hypothèses se pose la question des infractions dites collectives. Ex. le complice emprunte le fait de l’auteur et a bien commis un acte. On parle de responsabilité collective, mais le complice commet un acte. Là où le problème de la responsabilité collective se pose, c’est lorsque l’on participe à un attroupement et que l’on retient les participants, on retient la responsabilité de chacune des personnes. Adoptée en 1971, et abrogée dix ans plus tard, la loi anti-casseurs a été prises car suite aux événements de 68, il y avait de très nombreuses manifestations. Elles étaient violentes et visaient à obtenir des revendications politiques. Lorsque la manifestation était interdite et qu’elle avait lieu quand même, le fait d’y participer faisait de la personne un

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délinquant. Certains policiers souhaitent revoir ce texte. En 1981 (Mitterrand), cette loi a été abrogée car considérée comme une atteinte au principe de la responsabilité pénale du fait personnel. Ex. en matière d’infraction volontaire, lorsqu’il y a une bagarre et que 3 personnes tapent sur une 4ème, il n’est pas toujours aisé de savoir qui parmi les 3 a donné le coup de poing mortel. Dans cette hypothèse-là, la c. cass. fait une analyse conjointe des 3 personnes. Elle estime que les 3 sont coauteurs de coups et blessures ayant entraîné la mort sans intention de la donner. C’est un peu choquant car un seul a donné le coup, mais c’est du fait de l’impossibilité de détecter techniquement que l’on prend les 3 personnes. Ex. en matière d’infraction involontaire, on retrouve ce même schéma. On a 3 chasseurs ayant la même carabine, les mêmes balles, ils pensent tuer un sanglier mais en fait, ils tuent un autre chasseur. Comment savoir quelle est la balle à qui appartient la balle qui a réellement tué le chasseur ? On fait une analyse qui repose sur une fiction et on estime que les 3 sont coauteurs. C’est la « gerbe d’étincelle », on ne sait pas quelle arme a tué. La c. cass. admet que dans certaines circonstances, celui qui agit matériellement et doit être considéré comme auteur ne sera en fait que complice s’il agit en connaissance de cause ou voir même relaxé. On retiendra comme auteur celui qui n’a pas agit matériellement mais qui a donné l’ordre. On l’appellera alors l’auteur moral. Ex. l’avocat qui dicte une lettre à sa secrétaire et cette lettre constitue un faux. Celle qui rédige le faux est la secrétaire et doit être considéré auteur. Selon ce schéma inverse, on dit que l’avocat est l’auteur. C’est « l’auteur moral ». Il sera généralement condamné au titre de la complicité, mais là, comme il fait le fait par le prolongement de sa main, il est auteur. Ex. M. Moussaoui a été condamné pour complicité. En France, il n’aurait pas pu être condamné pour complicité. On lui reproche de ne pas avoir dit aux autorités qu’un attentat se préparait. En France, il faut un acte positif. En France, il aurait été condamné pour non révélation de crime, pas pour complicité. B) La responsabilité pénale du chef d’entreprise a) Conditions Pour le chef d’entreprise, on va avoir une responsabilité pénale du chef d’autrui (= à l’origine de). Où repose cette entorse ? À l’art. 121-1. Cette exception repose dans certains art. du C. Travail, du C. Route, et certains du C. Urb. Il existe des responsabilités en matière de circulation et en matière de C. Urb. : en matière de C. Route, il existe une responsabilité pénale pour le titulaire du certificat d’immatriculation (carte grise). Cette responsabilité est automatique, même si l’infraction a été commise par une autre personne. Ex. emprunter la voiture de ses parents et mal se garer, ce sont les parents qui sont responsables. Un excès de vitesse visualisé par une photo, si la photo n’est pas utilisable (physionomie du conducteur), on condamne le propriétaire du véhicule à une amende mais pas un retrait de points. C’est une amende dite civile mais prononcée par une juridiction pénale. C’est la responsabilité pénale du propriétaire du véhicule automobile. La responsabilité pénale est prévue en matière d’hygiène et de sécurité à l’art. L 263-2 C. Travail. Cet art. prévoit qu’en matière d’hygiène et de sécurité, ce seront les gérants d’une société qui seront responsables pénalement des infractions commises en

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matière d’hygiène et de sécurité dans l’entreprise, « par leur faute personnelle. » Le P-DG d’une société est responsable que les employés n’ont pas la tenue vestimentaire obligatoire (en général tenue de protection). On considère que le chef d’entreprise doit veiller à ce que tous ses salariés soient pourvus des vêtements indispensables pour leur sécurité. En matière de conduite de camion, il est indispensable (pour le chauffeur et pour les automobilistes) que le chauffeur ait des temps de repos. Un disque permet d’enregistrer les temps de repos et de reprise. Si le camion n’en est pas pourvu, le chef d’entreprise est responsable de cette inobservation. Un texte de loi permet de reprocher ces éléments. Cela peut aller plus loin en cas d’accident du travail. Pourquoi le chef d’entreprise est-il déclaré coupable ? Parce qu’il a une mission de surveillance. Comment peut-il se dégager de cette responsabilité ? La JP a imaginé que le chef d’entreprise puisse avoir la possibilité de déléguer ses pouvoirs. La délégation de pouvoirs ne repose sur aucun texte. Elle n’est pas inscrite dans la loi ou dans un règlement. Elle a été dégagée par la c. cass., c’est une interprétation jurisprudentielle. La délégation de pouvoirs est une soupape qui permet à un chef d’entreprise de désigner une personne (un salarié) en lui disant que sur le chantier de Châteauroux, ce sera lui le responsable de la sécurité. Le chef d’entreprise pourrait se dégager aisément en désignant un homme de paille, un fantoche. La c. cass. est exigeante : la délégation de pouvoirs doit s’adresser à un salarié qui soit pourvu de pouvoirs précis avec des moyens utiles. Lorsque la délégation répond à ces critères, on peut admettre que la responsabilité pénale du chef d’entreprise soit transmise au délégataire. Cela permet alors de pouvoir exonérer le chef d’entreprise du poids de la responsabilité pénale. Cette délégation est d’origine jurisprudentielle, s’applique en matière d’hygiène et de sécurité, mais la c. cass. a extrapolé cette délégation à d’autres infractions. La délégation s’applique aussi en matière d’embauche illicite de travailleurs étrangers. Ex. dans une société de BTP, on utilise des travailleurs dissimulés (travailleurs français d’origine aussi, ou clandestins = payés au noir). Qui est responsable ? Le chef d’entreprise. On considère que le préposé aux relations d’embauche est responsable. b) Fondements Fondement de la responsabilité pénale du chef d’entreprise (responsabilité du fait d’autrui) : Le chef d’entreprise est déclaré coupable d’une infraction qui a été commise par un tiers. Les auteurs sont divisés : certains considèrent que cette responsabilité pénale repose sur l’idée du risque. Quand on est dirigeant de société, on accepte les risques que supporte cette activité. Cette explication est contraire au droit pénal. Le droit pénal ne condamne pas quelqu’un sur un simple risque, même dans l’hypothèse de la mise en danger délibérée de la personne d’autrui. La deuxième explication est l’idée du pouvoir : celui qui dirige une entreprise détient des pouvoirs et parmi ces pouvoirs, il y a le pouvoirs de sanctionner les ouvriers, salariés (procédure disciplinaire, ou de licenciement) qui ne respectent pas la réglementation. L. 263-2 C. Travail � Le chef d’entreprise est responsable du fait personnel. Cela implique la responsabilité si jamais il y a la méconnaissance d’une loi pénale. Dans le pouvoir, il y a l’idée de faute, donc il est logique qu’il soit pénalement responsable. Cette seconde explication prévaut à l’heure actuelle. Celui qui n’exerce pas bien ses pouvoirs est responsable. Le chef d’entreprise doit d’une manière ou d’une autre payer quelqu’un pour

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sortir les poubelles par exemple. S’il ne fait pas cet effort financier, il supporte la responsabilité pénale. Pour la c. cass. le fait de ne pas avoir pris de dispositions suffisantes constitue en soi une faute. En 1978, la notion de faute a été introduite. En 1976, un magistrat avait incarcéré un chef d’entreprise pour ne pas avoir fait respecter la réglementation en matière de sécurité (problème d’éclairage) dans une mine du Nord de la France. Ce non respect avait entraîné le décès d’un mineur. Le non respect en matière de sécurité a été considéré comme grave par le magistrat qui l’a incarcéré. Cette incarcération a fait grand bruit, d’où la notion de faute personnelle en 1978. La c. cass. n’y est pas sensible. Le chef d’entreprise est pourvu de pouvoirs. II – LA RESPONSABILITE PENALE DE LA PERSONNE MORALE C’est l’innovation la plus grande du C. Pén. de 1994. Jusqu’en 1994, il n’était pas possible de condamner pénalement une personne morale. Au Moyen-Âge, on avait condamné des villes pour avoir commis des infractions pénales. Mais, on avait également condamné des animaux. Finalement, au cours des siècles, on a abandonné cette notion de responsabilité pénale des personnes morales. Personne morale : groupement pourvu de la personnalité morale, reconnue par les autorités, ayant un nom, un domicile et un patrimoine. Cette personne peut se défendre en justice, être déclarée civilement responsable, mais jamais pénalement. Ex. : associations (d’utilité publique, déclarée…), fondations, groupement d’intérêt économique. La loi Le Chapelier de 1791 avait estimée que l’on devait supprimer les corporations. Elles étaient sources de privilèges, et donc attentatoire à la liberté. Dans l’Ancien Droit, il fallait adhérer et être accepté à une corporation. Sans appartenir à une corporation, on ne pouvait pas travailler. Jusqu’en 1990, pour travailler dans l’édition, il fallait adhérer à la CGT. Cela s’est atténué. Le C. Pén. de 1810 n’envisage pas l’existence de personnes morales. Il a fallu attendre 1866 pour que le législateur réglemente le droit des sociétés. Une personne morale peut être civilement condamnée. Pénalement, on estime qu’elle n’a pas de volonté délictueuse. « On ne déjeune pas avec une personne morale. » Autrement dit, personne n’en a jamais rencontré. C’est un être de fiction. En pratique, lorsqu’une infraction était commise dans une société, qui était responsable ? On considérait que c’était le gérant, ou le dirigeant, le président. Donc, on faisait remonter la responsabilité de la fraude fiscale. Le responsable en matière de fraude fiscale, de communication… sera toujours le dirigeant de la société, gérant de la SARL… Le dirigeant était toujours poursuivi pour les infractions commises au nom de la société. Ex. publicité mensongère : on ne voit pas toujours les astérisques figurant sur les publicités. Même si la société est une fiction juridique, il n’empêche qu’elle peut avoir des comportements illicites. Une première réforme est intervenue en 1934, du nom de son créateur Matter. Elle prévoyait que l’on devait abandonner le principe d’irresponsabilité pénale des personnes morales. La guerre arrive et le projet est enterré. Il a fallu attendre la commission de révision du C. Pén. mise en place par VGE en 1974 pour que l’on arrive au texte actuel : l’art. 121-2 C. Pén. La majorité des auteurs était pour la responsabilité pénale des personnes morales. Certaines critiques sont tout de même apparues : si c’est une personne morale qui est condamnée pénalement, non-respect du permis de construire par exemple, le chef d’entreprise se moquera de respecter la

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réglementation. Les actionnaires sont uniquement intéressés par les bénéfices. La responsabilité pénale est diminuée. L’angoisse de certains est la dilution de la responsabilité pénale. Il n’y a aucun effet de prévention ou de réadaptation. A) Le champ d’application Art. 121-2 : « Les personnes morales, à l'exclusion de l'Etat, sont responsables pénalement, selon les distinctions des articles 121-4 à 121-7 et dans les cas prévus par la loi ou le règlement, des infractions commises, pour leur compte, par leurs organes ou représentants. Toutefois, les collectivités territoriales et leurs groupements ne sont responsables pénalement que des infractions commises dans l'exercice d'activités susceptibles de faire l'objet de conventions de délégation de service public. La responsabilité pénale des personnes morales n'exclut pas celle des personnes physiques auteurs ou complices des mêmes faits, sous réserve des dispositions du quatrième alinéa de l'article 121-3. » Le législateur a considéré que l’Etat ne pouvait pas commettre une infraction : c’est la souveraineté nationale. On ne peut le condamner pénalement. a) Personne morale de droit privé ou de droit public Personne morale de droit privé : il faut avoir la personnalité morale, s’insérer dans un moule juridique prévu par le législateur (société, syndicats, fondation…). Que se passe-t-il dans une coordination ? C’est un groupement de fait, qui n’a pas de statut, de représentants. Un groupement de joueurs de bridge ne sont pas des personnes morales de droit privé. On ne peut pas pénalement condamner la coordination si elle commettait des infractions. Chacune des personnes sera condamnée séparément. Si demain, on créé de nouvelles sociétés, elles pourront être pénalement responsables (il faut qu’elles aient la personnalité morale). Pour les personnes morales de droit public, exception pour les collectivités territoriales (communes, départements, régions, et certains groupements d’économie mixte, mi-civils, mi-administratifs). Ces collectivités sont un démembrement de l’Etat, le législateur a estimé qu’elles pouvaient être déclarées pénalement coupables. Limite : al. 2 « infractions commises dans l’exercice d’activités susceptibles de faire l’objet de conventions de délégation de service public. » Le législateur veut dire que lorsque l’activité exercée par la commune peut être déléguée (exercée par une personne de droit privé), la personne morale de droit public (la commune) pourrait alors être déclarée coupable pénalement. Ex. Une commune décide de ne plus réaliser elle-même les repas des cantines scolaires, et décide d’avoir recours à une société privée, la société Dupont. Des enfants sont victimes d’une intoxication alimentaire. Dans cette hypothèse là, la personne morale de droit privé, Dupont, sera poursuivie si elle n’a pas respectée la réglementation. Si c’est la commune qui fait les repas, on se retournera pénalement vers la commune, car les cantines scolaires sont une activité délégable. Ex. Où il n’y a pas de responsabilité pénale de la commune : elle est chargée de délivrer des cartes d’identité. Cette activité ne peut pas être déléguée à une société privée. Cela fait partie de la souveraineté nationale, c’est un droit de l’Etat (comme une société

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ne peut pas non plus délivrer des permis de conduire). La c. cass. retient un autre critère, dégagé par le CE, qui estime que l’on considère comme activité délégable lorsque la société privée qui exercerait cette activité serait rémunérée par rapport au pourcentage tiré de cette activité. Ex. Une commune ayant chargé une société d’éclairer une place : il y a une co-responsabilité de la commune et de la société. Il y a un pourcentage qui intéressait la commune, donc il s’agissait d’une activité délégable, d’où la responsabilité pénale. Pour les personnes morales étrangères, principalement de droit privé. Ce sont les sociétés étrangères pouvant commettre des infractions. La personne morale a une nationalité qui dépend de son siège social. Si elle a un siège social dans un pays européen n’étant pas la France. Toute personne morale de droit privé étrangère pourra être condamnée en cas de violation. La question épineuse est celle de l’exécution des peines. b) Les infractions concernées Art. 121-1 formule ancienne « Les personnes morales sont responsables des infractions dans le cas prévu par la loi ou le règlement [a été supprimé du C. Pén. de 2006] ». En 1994, on a donc choisi de ne retenir la responsabilité pénale des personnes morales que dans des cas limités. On a édicté le principe de spécialité et on a créé une liste d’infractions pour lesquelles la responsabilité pénale des personnes morales pourrait être retenue. Une personne morale ne peut pas être condamnée pour viol. Ex. Les trafics de stupéfiants : la majorité des infractions en matière de livre III, d’atteinte à la propriété, et bon nombre d’infractions concernant l’atteinte à l’intégrité physique, et notamment les blessures involontaires. On a édicté le « principe de spécialité » et on a fait une liste d’infractions pour lesquelles la responsabilité pénale des personnes morales peut être retenue. La loi comportait des lacunes et petit à petit, le législateur est intervenu pour compléter la liste. La première fois qu’il est intervenu, c’est par une loi de 2001 sur les dérives sectaires. Les sectes utilisaient le plus souvent le statut juridique d’association ou de société pour pouvoir attirer certaines sociétés. Certaines associations, dites sectes, utilisaient les personnes comme objets sexuels. La Loi du 12 juin 2001 a étendu la liste des infractions, et notamment avait prévu l’escroquerie etc. En 2004, le verrou a sauté : la publicité mensongère. Jamais le texte n’a prévu de sanctionner la personne morale. 10 ans après le C. Pén. de 1994, la Loi Perben II a décidé de supprimer le principe de spécialité. Cette loi du 9 mars 2004 est applicable à partir du 01/01/2006 avec 2 exceptions : - En matière de presse (la loi du 29 juillet 1881), il y a déjà une responsabilité particulière du directeur de publication. Il est considéré comme l’auteur de la diffamation. - Le système de la communication ont été exclus de la responsabilité pénale. Pour toutes les autres infractions (viol, consommation de stupéfiant, dopage), on a la possibilité de condamner la personne morale qui serait impliquée par ses organes ou représentants dans la commission des infractions. B) Les conditions de mise en œuvre Art. 121-2 : le texte évoque les infractions commises pour le compte des personnes morales : « Les personnes morales, à l'exclusion de l'Etat, sont responsables

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pénalement, selon les distinctions des articles 121-4 à 121-7 et dans les cas prévus par la loi ou le règlement, des infractions commises, pour leur compte, par leurs organes ou représentants. Toutefois, les collectivités territoriales et leurs groupements ne sont responsables pénalement que des infractions commises dans l'exercice d'activités susceptibles de faire l'objet de conventions de délégation de service public. La responsabilité pénale des personnes morales n'exclut pas celle des personnes physiques auteurs ou complices des mêmes faits, sous réserve des dispositions du quatrième alinéa de l'article 121-3. NOTA : Loi 2004-204 du 9 mars 2004 art. 207 IV : Les termes "et dans les cas prévus par la loi ou le règlement" sont supprimés à compter du 31 décembre 2005. » Pour le compte des personnes morales : la responsabilité de la personne morale est indirecte, mais néanmoins une responsabilité personnelle. Ce n’est pas une responsabilité identique à celle du complice. Responsabilité indirecte = responsabilité par ricochet selon certains auteurs. La personne morale qui traite de la fiction ne peut pas commettre directement l’infraction. Le magistrat est obligé de passer d’abord par la responsabilité pénale de la personne physique. Ensuite seulement, on s’interrogera sur la responsabilité pénale de la personne morale. Le relais indispensable est la personne physique. En Droit civil, quand on met en cause une société pour dommages - intérêts, on n’a pas besoin du relais d’une personne physique. Le caractère personnel : la responsabilité pénale de la personne morale n’est pas, à l’inverse du complice, une responsabilité d’emprunt. C’est une responsabilité autonome. Lorsque l’on déclare que la personne morale est responsable, elle est responsable à titre individuel, même si sa responsabilité passe nécessairement par le biais d’une personne physique. Elle est auteur, et non complice. Il y a responsabilité personnelle dans l’hypothèse où cette responsabilité lui est propre. Il s’agit d’un arrêt du 20 juin 2000, c. cass. : une société A avait été absorbée par une autre société B, c’est une fusion - absorption. Dans la société A, il y avait eu un accident du travail. Lorsque le tribunal correctionnel apprécie les fautes, la société A n’existe plus. La CA avait condamné la société B et l’avait déclarée pénalement coupable pour accident du travail pour cause de négligence. Un pourvoi a été dirigé contre cet arrêt et la chambre criminelle a cassé la décision. Sa motivation est la suivante : la responsabilité pénale de la société morale est une responsabilité personnelle. La société B, dans cet arrêt, ne pouvait être déclarée pénalement responsable. On ne pouvait plus condamner la société A non plus. a) L’infraction doit être commise par un organe ou un représentant Le terme « organe » signifie « un organe de Droit ». C’est une personne ou une entité investie du droit d’agir au nom de la personne morale ou d’assurer son administration. On parle de « personne ou entité », car l’organe n’est pas toujours une personne physique. Ex. dans la commune, une collectivité territoriale, les organes sont d’une part le maire (personne physique) et d’autre part, le conseil municipal (entité n’ayant pas la personnalité morale). Le conseil municipal est élu et peut engager la commune. Dans le conseil général, l’organe sera son président mais également la personne morale. Pour la responsabilité pénale, on retiendra le président. Pour les

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sociétés, on retiendra le gérant mais également le conseil d’administration. Les organes, ce sont ceux qui agissent au nom de la personne morale. - Les organes de fait : cela consiste le plus souvent dans une société lorsque l’on a une personne qui a déjà dirigé des sociétés et qui a été condamnée pour banqueroute ou faillite. Ces condamnations pour banqueroute ou faillite (ou escroquerie) sont sanctionnées par une « interdiction de gérer ». Pendant 5 ans, ou de manière définitive, la personne ne peut plus diriger de société. Etant donné que la personne ne sait pas faire autre chose, elle trouve un homme de paille (une personne désignée, nommée comme gérant ou président, mais qui en réalité n’exercera pas sa fonction). Le dirigeant de droit laissera la gérance au dirigeant de fait (à celui qui a l’interdiction de gérer). En pratique, le gérant de droit signe mais la société est en fait gérée par le gérant de fait. La question est de savoir si l’organe de fait va pouvoir engager pénalement par ses actes la personne morale. La c. cass. a répondu positivement. Elle considère que si c’est l’organe de fait qui gère la société, son activité va pouvoir entraîner la responsabilité pénale de la personne morale. En pratique, le plus souvent, on déclare le gérant de fait coupable comme auteur et le gérant de droit comme complice. La personne morale sera déclarée co-auteur. Après avoir engagé les organes, observons les infractions commises par les représentants. - Représentant légal de la société de la personne morale : dans la majorité des cas, le représentant a aussi la qualité d’organe (un gérant est organe et représentant ; il signe les contrats, est traduit en justice). On a aussi des représentants qui ne sont pas des organes. Ex. les personnes qui bénéficient d’une délégation judiciaire. Dans une société ayant des difficultés financières, à un moment donné lorsque son passif est supérieur à son actif (les dettes ne peuvent plus être remboursées), on va faire une « déclaration d’état de cessation des paiements », devant le tribunal de commerce. Le T. commerce a le choix de prononcer la « liquidation judiciaire de la société » ou le « redressement judiciaire ». Dans les 2 cas de figure, liquidation ou redressement, on nomme un administrateur judiciaire ou un liquidateur judiciaire qui va donc gérer la société de manière provisoire. Ex. Cette personne, administrateur ou liquidateur, va pouvoir elle-même engager éventuellement la responsabilité pénale de la personne morale. Si elle prend une décision d’embaucher des travailleurs clandestins, la personne morale sera elle-même coupable d’infraction. La question de la délégation de pouvoirs se posant à la c. cass. : est-ce qu’une personne n’ayant pas la qualité d’organe ni de représentant peut néanmoins engager la responsabilité pénale de la personne morale si elle bénéficie d’une délégation de pouvoirs ? La c. cass. a répondu positivement dans un arrêt SATA du 9 novembre 1999. Il s’agissait d’une société d’économie mixte, c’est-à-dire d’une société semi-publique (très fréquemment utilisée par les communes) ayant comme activité d’assurer la commercialisation/gestion du domaine skiable de la commune. Un gérant était chargé de cette mission. Le gérant avait lui-même délégué à un directeur des pistes (personne physique) le soin de prendre le soin d’ouvrir ou non les pistes. Une ouverture a eu lieu et un accident a eu lieu suite à une avalanche. Un skieur a été blessé, des blessures par imprudence, et la question était de savoir si le directeur des pistes pouvait ou non engager la responsabilité pénale de la société d’économie mixte, alors qu’il n’avait pas la qualité de représentant. La c. cass. dit que c’est possible. � le texte dit organe ou représentant, mais il y aussi le délégataire. Le délégataire, du fait de son comportement, peut engager la responsabilité pénale de la personne morale pour les infractions intentionnelles comme

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pour les infractions non intentionnelles. Les conséquences pratique de cette jurisprudence : cela permet d’étendre des hypothèses de condamnation de personnes morales (derrière la condamnation pénale, on a la condamnation civile : l’octroi de dommages – intérêts). En présence d’une personne morale de droit public, on fait jouer de manière plus extensive la responsabilité pénale des communes. Il faut nécessairement passer par cette personne physique. La c. cass., dans un arrêt du 18 janvier 2000, a censuré un arrêt de CA ayant condamné la SNCF pour homicide involontaire en estimant que la SNCF avait commis une faute de négligence, alors que la CA n’avait pas d’abord posée la question de savoir si l’ingénieur avait commis une faute en qualité de délégataire. Par conséquent, un préposé, un salarié, peut engager la responsabilité pénale de la personne morale à condition qu’il ait la qualité de délégataire. Dans l’arrêt de la SNCF, l’ingénieur n’avait pas la qualité de délégataire, donc il ne pouvait pas engager la responsabilité pénale de la personne morale. La faute de l’ingénieur restait une faute personnelle. b) Les infractions commises pour le compte Art. 121-2 précise « pour le compte ». Cette formule signifie qu’il y a un transfert de responsabilité, mais encore faut-il que l’infraction « profite » à la personne morale. On exclut donc les infractions qui sont commises dans le seul intérêt du représentant. Si le dirigeant détourne des fonds, il est certain que la société, victime, ne sera pas en même temps coupable ! Le représentant n’agit pas « pour le compte » de. Si le dirigeant commet une agression sexuelle au sein de la société à l’encontre d’un personnel, on ne peut pas dire qu’il agit pour le compte de la société. Si l’infraction est réalisée pour une minorité, la question s’est posée à l’occasion d’une décision d’un conseil municipal. Mme Maigret, maire d’une commune, avait proposé d’adopter un arrêté, qui n’a pas été adopté à la majorité. Cette arrêté prévoyait que les enfants nés dans la commune bénéficieraient d’une prime sous réserve que les parents soient Français. La décision avait été adopté, est entrée en vigueur, et un recours a été déposé en estimant qu’il y avait une discrimination au regard de la nationalité. La question est de savoir si la commune était pénalement responsable de cette discrimination. La réponse a été négative, car si le maire engage pénalement la responsabilité de sa commune, le conseil municipal n’avait pas été favorable à l’unanimité à la décision discriminatoire. Mme Maigret a été seule condamnée du chef de discrimination. Quelles infractions sont retenues pour le compte de la personne morale ? Ce sont les infractions économiques, financières (fraudes fiscales), le non respect de la réglementation en matière d’hygiène et de sécurité (� homicide involontaire, blessures involontaires), en matière d’urbanisme (� construction sans permis au nom de la commune par un dirigeant). Quid de l’emploi de travailleurs clandestins ? On ne peut pas dire « immigré », on parle maintenant de « travailleurs dissimulés » (on ne déclare pas ces personnes à l’URSSAF, ce peuvent être des Français et non nécessairement des étrangers). L’embauche de travailleurs dissimulés par un dirigeant pouvait-elle être imputable à la personne morale, la société ? La discrimination à l’embauche est-elle caractérisée ? Si le DRH refuse d’embaucher des personnes dont les cheveux sont roux, il y a discrimination à l’embauche. Dans les deux hypothèses, la c. cass. a dit que l’infraction était commise pour le compte de la personne morale. À travers l’expression

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« pour le compte », on a une extension sur la notion d’organe et de représentants, et sur la notion « pour le compte ». Un grand nombre d’infractions seront considérées comme commises pour le compte de la personne morale. c) L’élément moral Les personnes morales pouvaient être responsables des infractions intentionnelles comme des infractions non intentionnelles. Quid de la faute de la personne morale ? Quelle solution retenir pour estimer que la personne morale a commis une faute ? On considère que la faute de la personne physique rejaillit sur la personne morale. On considère également que la personne morale peut avoir une faute propre. La faute de la personne physique qui rejaillit sur la personne morale est évidente : la négligence du dirigeant, la volonté de procéder à une discrimination rejaillit sur la personne qu’il dirige. En revanche est plus complexe l’idée d’une faute personnelle à la personne morale. La politique de la société peut révéler la volonté délictueuse. Si la politique de la société est de mal accepter les syndicats, de les empêcher d’effectuer leurs fonctions, on n’hésitera pas à condamner la société pour délit d’entrave aux fonctions de représentants syndicaux. Il s’agit là de l’élément intentionnel, pour les infractions intentionnelles (faute de l’organe, faute de la société). Pour les infractions non intentionnelles : art. 121-3, al. 4 : « Il n'y a point de crime ou de délit sans intention de le commettre. Toutefois, lorsque la loi le prévoit, il y a délit en cas de mise en danger délibérée de la personne d'autrui. Il y a également délit, lorsque la loi le prévoit, en cas de faute d'imprudence, de négligence ou de manquement à une obligation de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement, s'il est établi que l'auteur des faits n'a pas accompli les diligences normales compte tenu, le cas échéant, de la nature de ses missions ou de ses fonctions, de ses compétences ainsi que du pouvoir et des moyens dont il disposait. Dans le cas prévu par l'alinéa qui précède, les personnes physiques qui n'ont pas causé directement le dommage, mais qui ont créé ou contribué à créer la situation qui a permis la réalisation du dommage ou qui n'ont pas pris les mesures permettant de l'éviter, sont responsables pénalement s'il est établi qu'elles ont, soit violé de façon manifestement délibérée une obligation particulière de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement, soit commis une faute caractérisée et qui exposait autrui à un risque d'une particulière gravité qu'elles ne pouvaient ignorer. Il n'y a point de contravention en cas de force majeure. » Son analyse a contrario permet de dire que la responsabilité pénale des personnes morales est plus sévèrement engagée en matière de faute non intentionnelles que la responsabilité des personnes physique. Pourquoi ? Pour les personnes morales, que la causalité soit directe ou indirecte, on retiendra toujours la simple faute d’imprudence. Dans une hypothèse sans contact entre la main de l’homme et le dommage, la responsabilité de la personne morale sera engagée pour une simple faute de négligence. C’est beaucoup plus sévère pour les personnes morales que pour les personnes physiques. � La personne morale ne peut pas se dégager en apportant la preuve de son altération des facultés mentales. La personne morale n’a, en effet, pas de faculté mentale.

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III – LE PRINCIPE D’UN CUMUL DE RESPONSABILITE PENALE ENTRE LES PERSONNES PHYSIQUES ET LES PERSONNES MORALES Art. 121-2, al. 3. « La responsabilité pénale des personnes morales n'exclut pas celle des personnes physiques auteurs ou complices des mêmes faits, sous réserve des dispositions du quatrième alinéa de l'article 121-3. » Pour la personne physique, on exige une infraction caractérisée, pour la personne morale, on prendra n’importe quelle faute. La personne morale peut être auteur, complice ou receleuse. a) Le principe du cumul Art. 121-2, al. 3 énonce clairement le principe du cumul. La raison d’être : le législateur n’a pas voulu que les personnes physiques se dégagent de leur responsabilité pénale personnelle en disant qu’elles ont agi pour la personne morale et qu’elles ne sont donc pas responsables. Cette justification est nécessaire dans la mesure où la personne physique assume ses actes. Si on avait admis le contraire, plus aucun dirigeant, aucun responsable, n’aurait été vigilant. Pourquoi ? N’étant pas responsable pénalement, il se serait dit que c’est un problème de personnel morale. Aujourd’hui, on peut condamner ensemble la personne physique (le président de l’association) et la personne morale. Est-on obligé de les condamner cumulativement ? Non. C’est un choix qui est offert aux tribunaux. Peut-on condamner la personne physique et ne pas condamner la personne morale ? Oui. On peut estimer que le dirigeant n’a pas agit pour le compte de la personne morale. L’inverse est vrai. On peut condamner la personne morale et ne pas condamner le dirigeant. La question a été débattue, mais la c. cass. a estimé que si le dirigeant bénéficiait d’une immunité, qu’il n’avait pas commis de faute non intentionnelle, on pouvait néanmoins condamner la personne morale pénalement. Ex. du domaine skiable : on n’a pas de causalité directe, mais une causalité indirecte. L’ouverture de la piste a créé les circonstances permettant la survenance de l’accident. La question est de savoir si le directeur des pistes a manqué à une obligation particulière de sécurité. Si non, il n’est pas coupable, en revanche il engagera néanmoins la responsabilité pénale de la personne morale sur le fondement de la faute pour négligence de l’art. 121-2, a. 3. On a donc une dissociation entre la responsabilité de la personne physique et la responsabilité de la personne morale. On peut également avoir une dissociation entre la responsabilité pénale et la responsabilité civile, dans un cas particulier. Lorsque l’on est condamné pénalement, automatiquement, la responsabilité civile était engagée (dommages - intérêts pour la victime). Pour octroyer des dommages – intérêts, il faut établir d’abord une responsabilité pénale, sauf dans l’hypothèse où il s’agit d’un agent public. Lorsqu’il s’agit d’un fonctionnaire, ou bien une personne agent des collectivités territoriales, ou agent hospitalier. Dans ces hypothèses-là, la personne physique, l’infirmer par ex. ayant commis une faute de négligence, est déclaré pénalement coupable. L’hôpital, établissement public aura sa responsabilité pénale engagée. L’enseignant, avec la mort d’un élève, est déclaré coupable, et le ministère sera déclaré responsable.

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Exception par rapport au droit commun : s’il s’agit d’une faute de service, l’agent des collectivités territoriales (agent hospitalier) ne peut pas être condamné civilement. C’est l’Etat qui payera les dommages – intérêts. C’est une règle de la fonction publique faisant que l’Etat est responsable de ses agents. La responsabilité pénale est dissociée de la responsabilité civile. Ex. les paillotes incendiées (installées illicitement sur les plages) sur ordre du préfet en Corse en 2000. La question est de savoir si les gendarmes ayant agi devant des dommages – intérêts. La réponse est négative, ils ont commis une faute de service. Les tempéraments au principe : il a été conseillé par l’intermédiaire de circulaires de privilégier la responsabilité pénale des personnes morales plutôt que de maintenir une responsabilité cumulative avec les personnes physiques. Ces instructions ont été données dans le domaine particulier de la pollution. On a considéré que dans le domaine de la pollution (maritime avec les marées noires, ou les cours d’eau) de privilégier la responsabilité pénale des personnes morales et de ne pas retenir celle du dirigeant. On pense que dans certaines hypothèses de pollution, le dirigeant n’a pas les moyens suffisants pour respecter la réglementation du fait même de la politique de la société. Mais, dans les 2 dernières marées noires, on a retenu les 2 responsabilités. Le plus souvent, une poursuite commune a lieu (Ministère Public poursuit la personne physique et la personne morale), mais en bout de course, les magistrats ont assez fréquemment tendance à ne pas retenir la responsabilité pénale de la personne physique pour les infractions non intentionnelles, mais à maintenir la responsabilité de la société. Cela permet alors à la victime d’être indemnisée. On ne peut pas emprisonner une personne morale, donc il ne peut y avoir de peine de réclusion. Il peut y avoir des peines de dissolution (la mort de la personne morale). En revanche, il y a eu récemment une condamnation de GDF pour l’explosion d’une canalisation. Le montant des dommages – intérêts augmente en pratique devant les juridictions. La personne morale peut être auteur, complice ou receleuse. CHAPITRE V – LES CAUSES D’IRRESPONSABILITE Art. 122-1 : « N'est pas pénalement responsable la personne qui était atteinte, au moment des faits, d'un trouble psychique ou neuropsychique ayant aboli son discernement ou le contrôle de ses actes. La personne qui était atteinte, au moment des faits, d'un trouble psychique ou neuropsychique ayant altéré son discernement ou entravé le contrôle de ses actes demeure punissable ; toutefois, la juridiction tient compte de cette circonstance lorsqu'elle détermine la peine et en fixe le régime. » Anciennement, elles visent à la fois le fait justificatif et les causes de non-imputabilité. La question qui se pose est de savoir de quelle manière on pourra écarter soit la déclaration de culpabilité, soit la sanction. Le législateur parle de causes d’irresponsabilité ou d’atténuation de responsabilité (art. 122 et s. C. Pén.). Le législateur de 1994 parle d’irresponsabilité : cela signifie que l’on n’est pas déclaré coupable (relaxe, acquittement). Atténuation de la responsabilité : cela signifie que l’on est coupable, mais un peu moins. Mettre sur un pied d’égalité irresponsabilité et atténuation est choquant. D’où le choix de maintenir ce qui était dans l’ancien C. Pén.,

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c’est-à-dire de dissocier les causes objectives d’irresponsabilité des causes subjectives d’irresponsabilité. Le mot « atténuation » choque, dans la mesure ou l’on est responsable ou non. On n’est jamais à moitié responsable en Droit pénal. Le C. Pén. de 1994 s’est beaucoup inspiré des décisions jurisprudentielles de la Crim. Les hypothèses jurisprudentielles devenues légales sont au nombre de 2 : l’erreur sur le droit et l’état de nécessité. Le législateur de 1994 a supprimé ce que l’on appelait auparavant des « excuses atténuantes » (un homme rentre chez lui et trouve sa femme avec un autre homme et le tue). Les « excuses absolutoires » sont maintenues (elles avaient été supprimées) ; l’infraction est commise puis ont lieu des excuses. Avec la technique des repentis, ces excuses ont été réintroduites. Cause objective/cause subjective : � Cause objective : on agit sur « l’élément légal » � Cause subjective : on agit sur « l’élément moral » Les causes objectives ont pour principal effet d’écarter l’élément légal parce que la loi, par ailleurs, autorise ce comportement. On fait disparaître l’infraction parce que la loi prévoit dans ce cas précis que l’on puisse commettre cet agissement. Pour les causes objectives d’irresponsabilité, ce qui est écarté est la qualification pénale. L’élément légal est supprimé. Par conséquent, il ne reste plus que le matériel et le moral, il ne peut y avoir de déclaration de culpabilité. La responsabilité est elle-même supprimée, mais à titre secondaire. L’infraction disparaît et le fait redevient licite. Cela aura des conséquences pour le complice et le receleur que l’élément légal disparaisse. (La personne morale peut être auteur, complice ou receleuse.). Les causes objectives d’irresponsabilité peuvent être soulevées à tout moment de la procédure (enquête, le Ministère Public s’aperçoit de la légitime défense ; instruction, le juge d’instruction s’aperçoit que la victime a consenti aux relations sexuelles et on abandonne la qualification de viol ; jugement…). Il faut que ce soit invoqué par la partie : ex. celui qui est poursuivi doit dire qu’il était en état de légitime défense. I – LES CAUSES OBJECTIVES D’IRRESPONSABILITE OU FAITS JUSTIFICATIFS On fait tomber la qualification pénale. Les causes objectives sont au nombre de 3, mais une 4ème induit des discussions doctrinales : l’ordre de la loi et le commandement d’autorité légitime ; la légitime défense ; l’état de nécessité (le consentement de la victime ne vaut-il pas fait justificatif dans certaines hypothèses ?). Les faits justificatifs peuvent être invoqués pour toutes les infractions (intentionnelles ou non intentionnelles). Dans certaines hypothèses, la JP avait refusé de faire jouer la légitime défense pour les infractions non intentionnelles. Ex. Un ivrogne importune un passant, le passant se sent agressé et riposte verbalement. L’ivrogne se sent agressé et donne un coup : on estime qu’il a agit de manière volontaire, donc on a appliqué la légitime défense. Dans un cas pratique, il faut invoquer une cause d’irresponsabilité après avoir conclu ! A) L’ordre de la loi et commandement de l’autorité légitime.

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Art. 122-4 : « N'est pas pénalement responsable la personne qui accomplit un acte prescrit ou autorisé par des dispositions législatives ou réglementaires. N'est pas pénalement responsable la personne qui accomplit un acte commandé par l'autorité légitime, sauf si cet acte est manifestement illégal. » - On résume l’al. 1 sous la formule : « l’ordre de la loi ». C’est l’ordre de la loi française. Le règlement, un acte émanent du pouvoir réglementaire (arrêté municipal, préfectoral). Un acte prescrit (on oblige de faire telle chose) ou autorisé (on a la faculté de faire telle chose). La question s’est posée pour les proxénètes : les proxénètes qui vivent dans le cadre d’un mariage avec une prostituée sont de par la loi civile tenus d’avoir une résidence commune (ils peuvent aussi avoir une résidence distincte), c’est l’obligation de cohabitation. Le C. Pén. dit qu’une personne cohabitant avec une prostituée est supposé bénéficier du fruit de la prostitution. Si une personne non proxénète habite avec une prostituée, il sera supposé proxénète. L’argumentation consiste à dire que la loi pénale sanctionne le proxénétisme, mais la loi civile oblige à vivre avec son épouse. La JP a considéré que l’argumentation civile n’écartait pas la qualification pénale. La personne vivant avec la prostituée, malgré un mariage, est considérée comme bénéficiant des fruits de la prostitution, et donc comme proxénète. La Loi, c’est celle qui figure dans les codes, mais aussi des lois particulières. Le démarchage à domicile est autorisé, mais on ne peut pas faire signer un contrat et recevoir de l’argent en moins de 8 jours. Exception : les forains ont le droit de vendre à domicile et d’obtenir la conclusion du contrat immédiatement (vente d’objets artisanaux). Il est interdit pour les douaniers de faire des infiltrations : ils n’ont pas le droit de se faire passer pour des trafiquants. Ils étaient condamnés pénalement. La Loi du 9 mars 2004 a autorisé les policiers à faire des infiltrations. Seule la loi française est concernée ici comme exonératoire. On peut avoir une exonération issue d’une norme internationale cependant (provenant d’une convention par ex.). De plus en plus de conventions réglementent les douanes. La JP est assez restrictive sur ces notions : jusqu’à la peine de mort, 1981, celui qui était autorisé à donner la mort, hormis la légitime défense, était le bourreau (il devait trancher la tête). Depuis 1981, aucun texte ne prescrit de tuer quelqu’un, hormis la légitime défense. La question qui s’est posée concernant des relations sexuelles : le mariage suppose fidélité, secours et assistance. Le mariage suppose-t-il l’existence de relations sexuelles ? Rien ne le dit. Le mariage oblige-t-il l’épouse à des relations sexuelles ? Non, on a condamné un homme pour avoir imposé des relations sexuelles à sa femme. L’ordre s’adresse à qui ? Il s’adresse à une personne déterminée : le bourreau, l’huissier de justice. L’huissier de justice obéit à la loi. Art. 73 C. pr. Pén. : Toute personne est habilité à s’emparer d’une personne qui vient de commettre un crime ou un délit flagrant (concernant une peine d’emprisonnement). La personne s’emparant manu militari à quelqu’un viole la liberté d’aller et venir de chacun. Les policiers/gendarmes disposent également de ces facultés d’arrestation. Les gendarmes disposaient d’une possibilité de tirer après une sommation. La question est de savoir si ce texte là les autorisait à commettre éventuellement une infraction (à blesser) dans le décret de 2003. Réponse de la Crim. Dans un arrêt du 18 février 2003 : un automobiliste sans permis. À la vue des gendarmes, il part dans l’autre

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sens, alertant leur vigilance. Cela dure 6Km, puis il est arrêté. L’un d’entre eux l’oblige à s’arrêter avec son arme, l’automobiliste est blessé au cœur et meurt. Arrêt de relaxe de la CA, non coupable du délit d’homicide involontaire. Car l’ordre de la loi l’autorise à tirer après sommation. La c. cass. a cassé l’arrêt en estimant que les juges d’appel auraient dû vérifier avant de relaxer si l’usage de l’arme était absolument nécessaire. Désormais, plus de différences entre les policiers et gendarmes : ils ne doivent user de leur arme que lorsque c’est nécessaire. L’ordre de la loi n’autorise pas les personnes habilitées à commettre des infractions sans discernement. Ex. un médecin était poursuivi pour ne pas avoir dénoncé un crime sexuel sur un enfant, un viol. On a considéré que le médecin est protégé par le secret professionnel. Art. 434-1 C. Pén. L’ordre de la loi autorise le médecin à se taire. - Le commandement de l’autorité légitime : c’est le 2ème al. de l’art. C’est soit l’ordre de la loi, soit le commandement de l’autorité légitime. « N’est pas pénalement responsable la personne qui accomplit un acte commandé par l’autorité légitime, sauf si cet acte est manifestement illégal. » Le commandement de l’autorité légitime repose sur une autorisation légale. On a bien souvent les 2 mélangés (ordre de la loi + autorité légitime). L’ordre de la loi prévoit les infiltrations. Il faut tout de même un ordre d’un supérieur hiérarchique. Cet ordre vaut commandement de l’autorité légitime. C’est l’autorité publique, mais pas l’autorité privée. L’autorité légitime, c’est l’autorité hiérarchique militaire, mais aussi l’autorité publique issue des personnes investies de l’autorité (magistrats, élus, toutes personnes ayant une autorité). Celui qui a le droit de donner des ordres, n’a pas de pouvoir public. Celui qui obéit à un ordre ne peut être déclaré coupable, sauf certains actes jugés inadmissibles (actes de barbarie et de torture). La question s’est posée de savoir si l’autorité légitime pouvait être l’autorité des parents. La réponse est négative. L’autorité, c’est l’autorité française légitime, et non les forces étrangères (sauf si on est soldat de l’ONU). « Légitime », car à la Libération, on a déclaré que le Gouvernement de Vichy était un Gouvernement de fait, « illégitime ». Tous les fonctionnaires ayant obéit aux ordres de Vichy ne pouvaient pas bénéficier de cette cause d’exonération. D’où l’ordonnance du 28 novembre 1944 qui prévoit une exception : pour les fonctionnaires subalternes, on a fait jouer la cause d’exonération liée à l’autorité de Vichy. Les crimes de guerre n’ont pas été prévus dans cette liste. « Subalternes » = les supérieurs hiérarchiques n’ont pas bénéficié de cette dispense. D’où, le procès Papon, condamné en Gironde pour avoir déporté des personnes juives. Mais, comme il était fonctionnaire du Gouvernement de Vichy, on a estimé qu’il a choisi comme fonctionnaire de l’administration. Les dommages - intérêts ont été partagés entre lui et les contribuables. Il est coupable de crime contre l’humanité. Et, lorsque l’autorité est légitime mais que l’ordre est illégale ? Art. 122-4 « sauf si cet acte est manifestement illégal. » Un acte illégal est un acte contraire à la loi. Si un juge d’instruction ordonne à un policier de faire une perquisition, le juge d’instruction est une autorité légitime, et il donne un ordre légitime. Donc, la perquisition est légitime. S’il donnait un ordre illégal, une perquisition avant 6h du matin (en principe pas avant 6h, mais exceptions possibles avec Perben II), ce serait un ordre illégitime. Le problème s’est posé après la guerre avec le massacre d’Oradour sur Glane en 1944 (à prox. de Limoges, les soldats ont eu l’ordre d’enfermer la population dans l’Eglise et d’y mettre feu). Il a été reproché aux Français de l’armée allemande (Alsaciens par ex.) d’avoir obéit à un ordre

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manifestement illégal. Les soldats doivent être des « baïonnettes intelligentes », il ne peut pas y avoir de fait justificatif si l’ordre est manifestement illégal. En 2004, un Français installe des paillotes sur la plage, le territoire maritime. L’occupation du territoire maritime est interdite, sauf dérogation. Il a été plusieurs fois demandé au restaurateur de partir, ce qu’il n’a pas fait. Le préfet de Corse Bonnet donne l’ordre aux gendarmes d’incendier les paillotes la nuit. Les gendarmes ont obéit. Les gendarmes ayant obéis à une autorité légitime pouvaient-il bénéficier de ce fait justificatif ? La réponse a été négative. Arrêt 13 octobre 2004 a estimé que le commandement était manifestement illégal. Les gendarmes ont été déclaré coupables et la condamnation pénale a été approuvée (destruction de biens appartenant à autrui). La c. cass. a estimé qu’il s’agissait d’une faute de service et a donc demandé à ce que ce soit l’Etat qui paye. En revanche, pour le préfet, on a refusé la qualification de faute de service. Il a dû verser des dommages – intérêts sur ses biens propres. Si on donne l’ordre à un policier dans le cadre de l’autorité légitime de tuer/torturer, aucun policier ne pourra s’exonérer de sa responsabilité en invoquant l’obéissance à l’autorité légitime. Pour les tortures lors d’une garde à vue, même chose. Ce fait justificatif du commandement de l’autorité légitime, s’il est retenu, exclut la qualification pénale. Il n’y a donc pas d’infraction. Comme elle n’existe pas ou plus, il n’y a pas de dommages – intérêts. Quand on est dans l’ordre de la loi, la question qui se pose est celle de la permission de la loi. La permission de la loi peut aussi être exonératoire, dans l’hypothèse où il y a une pratique (ex. un sport où on admet que l’on puisse porter des coups). Il y a une permission de la loi sur la vente du muguet le 1er mai. Il est interdit de vendre sur la voie publique tout objet sans autorisation. Le muguet du 1er mai tombe aussi sous le coup de la loi. Il y a une permission car cela remonte au défilé du 1er mai, et on ne pénalise pas les gens. Il y a permission de la loi, mais pas de tolérance administrative. Ex. un maire accepte que l’un des administrés construise une cabane, une piscine, sans avoir préalablement demandé une autorisation. Chaque construction est soumise à une déclaration administrative, c’est le maire qui la donne. L’administré qui se fait interpeller par les gendarmes ne peut pas invoquer la tolérance administrative. Elle ne vaut pas fait justificatif. La coutume justifie certaines pratiques pourtant illégales. Quelles pratiques ? Dans le Nord de la France, certains actes de cruauté sur les animaux sont admis (ex. combats de coqs, en Martinique également ; dans le Sud, c’est la corrida). Selon les traditions, on admet ou pas. Certaines traditions changent. La coutume qui consiste à donner du fouet à ses enfants, à sanctionner physiquement a été censurée par la Cour Européenne des Droits de l’Homme, dans un arrêt du 18 février 1982, arrêt Campbell (concerne la GB, mais s’applique en France). La CEDH a censuré la pratique des lanières de cuir constituant des sanctions dans les écoles publiques écossaises. Néanmoins, la CEDH n’a pas interdit tout châtiment corporel sur les enfants. Une autre pratique interdite en France : le bizutage, l’excision des filles africaines (considéré comme une mutilation). Les parents sont déclarés coupables, même si les parents invoquent une coutume. B) La légitime défense

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Art. 122-5 et l’art. 122-6. La légitime défense a toujours été considérée dans toutes les sociétés comme justifiée, c’est-à-dire autorisée. C’est l’instinct de survie. Si on craint pour sa vie, on peut réagir. La légitime défense, c’est l’admission légale de la violence. Cette reconnaissance légale apparaît pour la 1ère fois dans l’ordonnance de 1666 (petit livre écrit sous Louis XIV prévoyant des règles de procédure pénales). Le titre XVI prévoit des lettres de rémission, en cas d’homicide involontaire. Lorsque, « cet homicide involontaire aura été commis dans la nécessité d’une légitime défense de la vie ». Donc, la personne arrêtée pour avoir tué pour se défendre est déclarée coupable, mais ensuite, elle sollicite à genoux une lettre de rémission, de pardon, qui va être accordée par le Roi. C’est très proche de la grâce royale. Depuis 1789, la légitime défense est devenue non plus une faculté (un pouvoir discrétionnaire), mais est devenue un droit. La Cour européenne justifie la légitime défense en se fondant sur la notion de droit à la vie. Comme on a le droit à la vie, on a le droit de la préserver. Légitime défense signifie aussi légitime vengeance pour certains. Suite à la mort de sa fille, un père a demandé le rétablissement de la peine de mort. La légitime défense peut être levée à tout moment de la procédure, y compris devant la cour d’assises. Art. 122-5, al. 1 : « N’est pas pénalement responsable la personne qui, devant une atteinte injustifiée envers elle-même ou autrui, accomplit, dans le même temps, un acte commandé par la nécessité de la légitime défense d’elle-même ou d’autrui, sauf s’il y a disproportion entre les moyens de la défense employés et la gravité de l’atteinte. » Le texte est muet sur les infractions : est-ce qu’on va blesser son agresseur ? Est-ce que c’est un crime, un délit, une contravention ? On applique le principe là où la loi ne distingue pas. Le juge ne distingue pas. On peut tout faire (crime, délit, contravention), sauf les actes de torture et de barbarie. Cela s’appliquera donc pour les violences, même légères, et aux infractions telles que le viol également. Cela s’applique aux infractions portant atteinte aux biens. La légitime défense pourra-t-elle s’appliquer aux infractions involontaires ? Compte tenu du fait que la loi ne précise rien, la réponse doit être « oui ». Néanmoins, l’arrêt Cousinet du 16 février 1967 : une personne était importunée par un homme ivre. Elle l’a repoussé, et cette personne est tombée, s’est blessée et s’est tuée. La c. cass. a dit qu’on ne peut se défendre que volontairement. Le geste de repousser la victime est un geste involontaire. Elle a refusé le bénéficie de la légitime défense. Parallèlement, la c. cass. modifie sa JP. Ex. une personne faisait du bruit lors d’une réception chez elle. Les voisins appellent la police, qui fait cesser le bruit. La personne ennivrée tombe chez M. A. qui a appelé la police. M. A. renvoie la personne, qui revient chez lui plus tard. M. A. tire et la c. cass. a retenu la légitime défense. Lorsque l’on tire, le coup de feu est volontaire, peu importe les suites. On a donc appliqué à cette hypothèse la légitime défense du voisin estimant avoir été agressé dans son domicile. a) Le droit commun de la légitime défense C’est l’hypothèse générale. La légitime défense des personnes : l’agression et la riposte (même chose dans un cas pratique). - L’agression doit revêtir plusieurs aspects : 1/ L’agression réelle : il faut qu’il y ait un péril. Si le fusil de l’agresseur est à terre, il n’y a plus de danger. C’est une question d’appréciation concrète,

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le danger doit être réel de sorte qu’il est interdit aux policiers de tirer sur quelqu’un qui s’enfuit. Il est interdit aux citoyens de tirer sur quelqu’un qui s’enfuit de chez vous. L’agression n’est alors plus en cours. Pour un adulte, on appréciera différemment l’agression que si elle est ressentie par un mineur ou par un vieillard. La notion d’agression peut être différenciée. Ex. une femme faisant du camping avec son fils de 17 ans, arrêt du 18 octobre 1972. La mère réagit à l’encontre de personnes à l’extérieur de la tente et en blesse une. La c. cass. a répondu qu’il y eu agression, car elle pouvait penser qu’elle était agressée. C’est l’agression putative (imaginaire, mais vraisemblable). Ex. deux voleurs de poules, un particulier et un fils les interpellent. En les emmenant chez les gendarmes, un voleur se retourne et un coup de feu par de la part du particulier. La c. cass. a estimé qu’il y a eu agression. On est agressé par rapport à quoi ? On est agressé soi-même ou autrui. Qu’est-ce que l’on défend ? La loi n’est pas précise, et il appartient à la c. cass. d’interpréter. Soi-même = sa vie, son intégrité physique. Mais, en même temps, on peut avoir uniquement des menaces, ce peut être l’atteinte à son honneur (par forcément à la vie). Être victime d’une tentative de viol, on peut avoir la possibilité de réagir violemment. La castration était autorisée lorsqu’elle était provoquée par une tentative de viol, dans l’ancien code. L’al. 2 prévoit la protection des biens « n’est pas pénalement responsable, la personne qui, pour interrompre l’exécution d’un crime ou d’un délit contre un bien, accomplit un acte de défense, autre qu’un homicide volontaire, lorsque cet acte est strictement nécessaire au but poursuivi, dès lors que les moyens employés sont proportionnés à la gravité de l’infraction. » Cet al. 2 a été introduit dans le C. Pén. en 1994. Aujourd’hui, la loi pénale admet que l’on puisse défendre sa maison, son téléphone, son mp3, en portant des coups à celui qui voudrait s’en emparer. Le législateur ajoute cependant 2 conditions : cela ne vise que les crimes et les délits. Donc, l’acte ne sera justifié que si on commet un crime ou un délit pour se défendre ou défendre ses biens. Aucun meurtre ne peut justifier la défense de sa voiture ou son mp3, aucun meurtre ne peut légitimer la défense d’un bien corporel. Le texte dit « strictement nécessaire », c’est-à-dire que le délit que l’on va commettre doit être l’unique moyen. L’al. 2 de l’art. 122-5 expose la légitime défense des biens, apparue en 1994. Elle ne vise que des délits ou des crimes, pas de meurtre, et suppose que la riposte soit le seul moyen. 2/ L’agression actuelle : le texte dit « en même temps ». Si le danger est passé, il n’y a plus d’agression, donc plus de légitime défense. Celui qui reçoit une gifle et qui part chercher son fusil n’est pas dans une hypothèse de légitime défense. Le danger doit être concomitant. Peut-il être futur ? La question s’est posée dans un arrêt ancien de 1978, dans les conditions suivantes : il s’agissait de pièges à voleur et du garagiste Legras. Ce garagiste avait une grande propriété, fermée par des murs, et il avait été cambriolé 12 fois en 10 ans. Avant 1978, vu l’inefficacité des alarmes, il piège un transistor. Il met ce transistor dans la cabane et met sur le mur un écriteau « piège à feu, attention danger ». Deux cambrioleurs arrivent, dont l’un analphabète. Le système fonctionne, malgré la pose de piles il y a plus d’un an. L’explosion a lieu, un mort et un blessé. Le garagiste Legras est poursuivi devant la juridiction pour homicide et blessures involontaires. Le tribunal correctionnel devant le juger refuse de faire jouer la légitime défense, car ce tribunal applique la JP Cousinet. Legras, conseillé par ses avocats adopte la tactique : « j’ai voulu tuer », le transistor a été posé pour blessé et pour tuer. Il demande à ce que la qualification d’homicide involontaire soit écartée au profit

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d’homicide volontaire, de meurtre. La c. assises est alors compétente. La CA admet qu’un transistor piégé est une arme destinée à donner la mort avec la volonté de tuer. La CA retient son argumentation. Arrêt du 9 nov. 1978 prononcé à Reims. Il savait qu’en allant devant 9 jurés, bons Français, il avait toutes les chances d’être acquitté. C’est ce qui s’est produit, puisque la cour d’assises appelée à juger pour meurtre (+ faits annexes, blessures volontaires) l’a acquitté sans que l’on sache pourquoi. Devant la cour d’assises, pas d’arrêts, mais un procès-verbal des débats. À l’issue de ce procès-verbal, les jurés se retirent dans la salle des délibérations, avec les 3 juges. C’est un débat clos. Il faut une majorité de 8 voix. Il a été acquitté, il avait un comité de soutien dehors, à une époque où la légitime défense des biens n’était pas inscrite dans la loi. La JP Legras est un élément ayant conduit à la rédaction de l’art. 122-5, al. 2 et aussi à l’idée que l’on ne doit pas se faire déposséder sans réagir. Au moment où Legras place son piège, il n’y a pas d’agression, c’est une agression futuriste, potentielle. L’agression doit être contemporaine, actuelle, pour la légitime défense des biens, ou des personnes. D’où la JP sur les policiers et l’impossibilité de tirer pour empêcher quelqu’un de s’enfuit. 3/ L’agression injuste : « devant une atteinte injustifiée ». Si l’agression est autorisée par la loi, il n’y a pas de légitime défense. Le policier qui arrête une personne dans le cadre de la flagrance, dans le cadre d’une instruction (ordonnée par le juge d’instruction) obéit à la loi, à l’autorité légitime, et donc l’agression est juste. La question s’est posée pour les huissiers et pour les professeurs. Les huissiers : ils effectuent des saisies. Pour pouvoir saisir, il y a une saisie conservatoire (il vient avec un commissaire de police, un serrurier et fait l’inventaire des biens), puis vient la saisie-exécution (on emmène les meubles et on laisse une table, un lit, une chaise). L’huissier est autorisé par la loi à violer un domicile, par un jugement, et on ne peut pas dire que cette agression est injuste. L’agression injuste, la légitime défense ne sera admise que si l’auteur n’a pas lui-même commis 2 fautes. M. Paul Touvier appartenait à la milice, arrêt du 21 octobre 1993. Il a fait exécuter de nombreux otages juifs. Au lendemain de la guerre, il a échappé aux poursuites (réfugié dans des monastères). Il a été jugé : il lui a été reproché d’avoir tué des juifs, une complicité de meurtre. Il a invoqué la légitime défense. Il a prétendu avoir commis cette infraction pour préserver la vie d’un plus grand nombre de juifs. Il a été décidé qu’il a commis une faute au départ par la CA puis par la c. cass. : il appartenait à la milice (« lutter contre la lèpre juive »). Peut-on résister à une violation de domicile faite par un huissier ou un commissaire alors qu’il se trompe de personne saisie ? La doctrine est divisée, la c. cass. préconise l’obéissance passive. On ne peut pas donner l’ordre à son chien de mordre l’huissier (= délit de rébellion). Une seule hypothèse a été admise : une personne a vu quelqu’un rentrer dans son fonds de commerce, la séquestrée en lui demandant de régler des sommes dues par rapport à la vente d’un véhicule d’occasion. Elle a utilisé une bombe lacrymogène pour pouvoir s’enfuir. Elle est poursuivie pour avoir utilisé une arme contre un huissier. La c. cass. admet que l’agression était juste, puis injuste car erreur sur le nom. 20 octobre 1993, la personne avait utilisée la bombe lacrymogène parce qu’elle était agressée de manière injuste. Lorsque la personne est démente ou ivre, l’agression est juste, on peut bénéficier de la légitime défense. - La riposte : une fois que l’agression est établie, pour que la légitime défense joue, il va falloir apporter la preuve d’une riposte conforme à la loi. La texte dit

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« accomplit un acte commandé ». La riposte doit être nécessaire tout d’abord. Est-elle indispensable ? Si on a un autre moyen que de se jeter sur son agresseur, la c. cass. privilégie l’autre moyen. Les auteurs disent que l’on réagit comme on veut. Ils considèrent qu’il n’y a pas d’obligation légale de fuite, mais on peut aussi faire face. Art. 122-5, al. 2 « strictement nécessaire » pour la défense des biens. Il n’y a pas de controverse : il faut avoir aucun autre moyen pour se défendre, la riposte est l’unique moyen dans l’hypothèse de la défense des biens. La riposte doit être proportionnée : c’est la condition de juste mesure. Il faut que la réaction de celui qui commet une infraction soit en contemplation, en parallèle, avec le fait d’agression. On ne peut pas, alors qu’on a reçu une claque, tuer la personne. On ne peut pas utiliser une arme alors qu’elle a utilisé son poing. Ex. arrêt 7 décembre 1999 : des ramasseurs de champignons. Deux personnes ramassaient des champignons sur le terrain d’autrui, le propriétaire les arrête alors qu’ils fuient en tirant plusieurs coups de feu en l’air, il les intercepte, les frappe à coup de crosse et les attache à un arbre avant d’appeler la gendarmerie. On a considéré qu’il ne pouvait pas bénéficier de la légitime défense. Sa riposte n’est pas proportionnée à l’agression. Ex. arrêt 6 décembre 1995 : une femme se fait importuner dans un bar par un consommateur ivre. Celui-ci la tire par le col et d’autres consommateurs se déplacent pour l’aider. Entre temps, elle s’empare de son talon et frappe le visage de la personne ivre. Ici, la riposte est disproportionnée. b) Les cas privilégiés ou la présomption de légitime défense C’est l’art. 122-6 C. Pén : « Est présumé avoir agit en état de légitime défense celui qui accomplit l’acte : 1°) Pour repousser, de nuit, l’entrée par effraction, violence ou ruse dans un lieu habité. 2°) Pour se défendre contre les auteurs de vol ou de pillages exécutés avec violence. » Pourquoi des hypothèses particulières ? C’est parce que le législateur considère que dans ces deux hypothèses, la personne qui commet l’infraction est dans une situation de fragilité. Il lui accorde de ne pas avoir rapporté la preuve d’une agression ou d’une riposte. Dans l’hypothèse du droit commun, c’est la personne poursuivie qui doit apporter une preuve de la riposte proportionnée. Dans l’art. 122-6, il bénéficie d’une présomption (tirer d’un fait connu un fait inconnu). C’est une présomption légale, tirée de la loi. La question est de savoir si c’est une présomption simple ou irréfragable. Si elle est simple, on peut apporter la preuve contraire ; si elle est irréfragable, ou absolue, on n’a pas de preuve contraire. Jusqu’en 1857, la c. cass. estimait que la présomption était irréfragable. Dans un arrêt de 1844, elle a approuvé le fait qu’on ait retenu la légitime défense pour un mari, qui, la nuit, avait tué l’amant de sa femme. Il s’était introduit la nuit. En 1857, la c. cass. fait un revirement de JP. Elle considère que dans les 2 hypothèses, la victime de coups et blessures peut apporter la preuve que les conditions de la légitime défense ne sont pas réunies. La présomption est simple. Concernant le 1°) : il faut qu’il y ait la nuit, l’absence de clarté. Il faut un lieu habité, une maison, une voiture ou une caravane. Les modalités de cette légitime défense : Pour repousser quelle infraction ? L’entrée par effraction (briser une vitre, forcer une porte), la violence (quelqu’un vous pousse pour entrer en même temps que

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vous) ou la ruse (se faire passer pour un pompier). Ce sont des moyens prévus par la loi. L’escalade ayant été abandonnée, c’est désormais l’entrée par ruse (via un échafaudage par ex.). On n’a pas à apporter la preuve de l’agression (elle est supposée). Il suffit de dire que c’était la nuit, et dans un lieu habité. Pour la riposte, est-ce qu’on craignait pour sa vie ou ses biens. C’est une question d’appréciation. Si le voleur vient avec une arme, c’est sous-entendu qu’il venait pour porter atteinte à une personne. Concernant le 2°), vol avec violences, ou bien pillages avec violences. Il y a une distinction entre vol et pillage. On s’empare d’un bien lors d’un vol, on les détruit lors d’un pillage. Le propriétaire d’un magasin, sachant qu’il y a une manifestation, est dans une hypothèse de légitime défense s’il réagit avec violence contre les personnes voulant s’emparer de ses biens. Le meurtre n’est pas légitimé. � En cas de légitime défense, c’est l’acquittement, pas de dommages - intérêts pour la victime. C) L’état de nécessité Art. 122-7 C. Pén. Il invoque un nouveau fait justificatif depuis 1994. « N’est pas pénalement responsable, la personne qui, face à un danger actuel ou imminent qui menace elle-même, autrui, ou un bien, accomplit un acte nécessaire à la sauvegarde de la personne ou du bien sauf s’il y a disproportion entre les moyens employés et la gravité de la menace. » Cela se rapproche de la légitime défense, mais cela s’en rapproche seulement. L’état de nécessité, c’est une idée de bon sens de déclarer non coupable celui qui fait prévaloir un intérêt supérieur. La première fois où cette notion est apparue, c’est dans l’affaire Menard de 1899. Une mère de famille avait volé du pain pour nourrir son enfant affamé. Elle est traduite devant la juridiction pour vol, le boulanger étant la victime. Le juge va faire une démonstration en expliquant qu’entre la mort de l’enfant pour défaut d’alimentation et la propriété du boulanger, il y a une valeur supérieure, la sauvegarde de la vie de l’enfant. Et donc, il relaxe la mère qui a volé le pain. Cette notion apparaîtra également en 1954, après la guerre. L’abbé Pierre avait suggéré à certaines personnes d’entrer dans des logements vides. Quelle était la valeur protégée ? La violation de domicile ou la mort par le froid ? On a estimé que c’était la vie par rapport à la violation de domicile. � Le critère est « je choisis de commettre une infraction pour sauvegarder un intérêt supérieur. » C’est un fait justificatif de l’infraction. La c. cass. a relaxé un automobiliste qui avait détruit une clôture pour éviter un piéton. Le bris de clôture est moins grave que la mort du piéton. Le baigneur qui perd ses vêtements peut s’emparer d’une serviette sur la plage pour éviter d’être vu nu. Le péril ne provient pas forcément d’une infraction. a) Les conditions - le danger rencontré : il faut un danger actuel, un danger réel, mais l’origine du danger peut être de toute nature. Cela peut être le fait d’un homme, ou un événement. Ex. un orage (pour éviter de recevoir la foudre, on rentre dans une maison ; l’état de danger d’un animal…). Pendant les événements de 1968, lorsqu’il n’y avait plus d’essence, un camion a livré une maternité en lait et en sucre. Mais ce camion a été contrôlé et son

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équipement était défectueux. Le fait de faire circuler un camion en état d’irrégularité est justifié par l’intérêt majeur de la sauvegarde des nouveaux-nés. Le tribunal a dit que oui. Peut-on considérer de manière fréquente qu’il y a un danger en 2006 pour les parents concernant l’alimentation de leurs enfants ? La réponse est diversifiée : on a considéré qu’aujourd’hui en 2006, d’après les ministères, les associations, personne ne peut mourir de faim. Il y a toujours des relais, par les communes, ministères, associations, pour obtenir des chèques. En volant de la nourriture, on ne bénéficiera plus de l’état de nécessité. Pour la pénurie de logement, on ne peut plus squatter des logements inoccupés. La réponse est négative, il n’y a pas d’état de nécessité. Avec une exception : un couple avec une femme enceinte a forcé les portes d’un HLM pour éviter le froid. Le T. corr. de Paris, en 2000 a fait jouer l’état de nécessité : elle allait accoucher. L’occupation illicite n’est pas un état de nécessité ; mais une occupation ponctuelle pourra être justifiée. L’état de nécessité est invoqué par rapport au stationnement : la réponse est non. La c. cass. a accepté le refus d’accepter l’état de nécessité pour l’automobiliste. Sauf dans l’hypothèse : s’arrêter sur un stationnement interdit car une femme accouche dans la voiture. Si la garde de l’enfant est donnée à la mère et qu’elle fait tout pour que l’enfant refuse le droit de visite, peut-on considérer qu’elle fait un délit de refus de droit de visite ? L’état de nécessité peut être admis en la matière. Toujours dans les conditions, l’état de nécessité ne peut jouer que si la personne poursuivie n’a pas commis de faute préalable. Arrêt Lesage de 1958 : un automobiliste est accompagné de sa femme et de son fils, et s’aperçoit soudain que son fils ouvre la portière, il donne un coup de volant et cause un accident en blessant une personne. Il commet des coups et blessures volontaires. Va t-il bénéficier de l’état de nécessité ? Non, car il avait oublié de bien fermer la portière au départ. La faute préalable exclut l’état de nécessité. Dans la rédaction de l’art. 122-7, rien n’est précisé sur cette faute préalable. Mais les auteurs et la c. cass. retiennent quand même une faute préalable, exclusive de l’état de nécessité. - La réaction : on a les mêmes conditions que pour la légitime défense. La réaction doit être mesurée, nécessaire, proportionnelle (il ne faut pas qu’elle soit exagérée). Si certains parquets, Ministères publics ne poursuivent pas les voleurs de denrées alimentaires dans le besoin, néanmoins, les juges refusent de faire jouer l’état de nécessité lorsque les mères de famille volent des jouets pour Noël. Cela s’applique aux infractions volontaires, comme aux infractions involontaires, et s’applique à toutes les infractions (crimes, délits, contraventions). Réaction proportionnée : 27 juin 2002, une personne très malade, paraplégique, souffrait horriblement. Pour alléger ses souffrances, elle consommait du cannabis et surtout, elle avait dans son jardin des pousses de cannabis. Elle a été poursuivie pour détention et usage de produits stupéfiants, et devant le tribunal de Papeete, elle a invoqué l’état de nécessité. Le tribunal de Papeete lui a donné raison. Pas d’appel du parquet. Ex. dans le sang contaminé, la c. cass. a estimé que les hémophiles avaient un risque de mort immédiat si elles ne bénéficiaient pas d’un produit sanguin. L’utilisation de produits sanguins suspects, douteux, infectés par le virus du SIDA a été considéré comme justifié par rapport à l’état de nécessité. Le risque de mort avec le SIDA était lointain, et pas celui dû à l’hémophilie. Lorsque les 2 valeurs protégées sont la vie, il n’y a pas de hiérarchie en principe. L’argumentation de la c. cass. est discutable. On considère aujourd’hui d’un médecin appelé pour une urgence qui brûle

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un feu rouge ne peut pas dire qu’il est en état de nécessité (c’était retenu avant, et plus maintenant). En brûlant le feu rouge, il peut causer un risque de mort, mais la vie de son patient est aussi en jeu. Se posent actuellement des questions sur l’état de nécessité. b) Les effets C’est un fait justificatif qui supprime l’infraction, mais qui ne supprime pas la responsabilité civile. La victime a droit à des dommages et intérêts. Le boulanger a perdu son pain, il est normal qu’il soit indemnisé. La c. cass. a estimé que l’état de nécessité supprimait l’infraction mais autorisait des dommages et intérêts sur le fondement d’une condamnation civile. Pour les dommages et intérêts, on a un fond de solidarité qui s’applique. L’état de nécessité s’applique aux personnes physiques et aux personnes morales. Une personne morale qui utiliserait de travailleurs clandestins pour gagner plus d’argent ne bénéficierait pas de l’état de nécessité. D) Le consentement de la victime Est-il un fait justificatif ? La loi est muette, mais certains auteurs répondent positivement. a) Le principe C’est le refus. Pourquoi le consentement n’est pas un fait justificatif ? Parce que la loi pénale relève de l’ordre public et ne relève pas de la justice privée. Il y aura délit de proxénétisme, même si la prostituée est d’accord. Très souvent se pose la question du consentement en matière médicale. Ex. non-lieu dans l’affaire Humbert. Un paraplégique, nourri par sonde, ne peut s’exprimer que par clignement des paupières. Le garçon demande à ce que l’on supprime sa vie. La mère utilise donc des produits, le garçon est réanimé en catastrophe, et la question se pose pour le médecin si on aide ou pas à la suppression de la vie. Lui est poursuivi pour empoisonnement avec préméditation, pour avoir injecté une substance de nature mortifère. La mère est poursuivie pour complicité, c’est elle qui a demandé. La question se pose aux magistrats de savoir si le consentement de la victime vaut fait justificatif. Entre temps, une loi a été votée, mais la loi qui a été votée autorise simplement le malade a demandé à ce qu’il n’y ait pas d’acharnement thérapeutique. Mais dans l’hypothèse de Vincent Humbert, il n’y a rien. Le non-lieu est davantage motivé sur l’état de nécessité que sur le consentement. Le consentement, dans le cadre de l’euthanasie, ne vaut pas fait justificatif. Peut-il y avoir consentement au suicide ? En soi, ce n’est pas une infraction. Mais la provocation au suicide est une infraction. Peut-on justifier un suicide par un consentement ? La réponse est négative. Un homme donnant des médicaments à quelqu’un d’autre n’étant pas mort peut-il invoquer le consentement pour éviter une condamnation pour provocation au suicide ? La réponse est négative. Pour la transformation, le changement de sexe, l’accord de la personne n’est pas suffisant, il faut un avis médical. Le consentement est-il exonératoire ? Deux catégories : le consentement est-il le fait justificatif ? Les hypothèses visées par les auteurs sont des hypothèses où l’absence d’accord de la victime est un délit. Ex. le contrat de donation : si on donne un bien à un ami, on n’est plus propriétaire. Il n’y a pas

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de vol. Ex. si on consent à des relations sexuelles, on ne peut pas se plaindre de viol. Le viol et le vol supposent l’absence de consentement. S’il y a consentement, le problème de l’infraction ne se pose plus. Ex. affaire belge, un magistrat avait une épouse et pratiquait avec elle et des tiers des actes sado-masochistes. Les clubs les refusaient car leur activité était trop spéciale. Ils utilisaient des locaux personnels, ils filmaient, avec l’accord de la victime, l’épouse du magistrat. Mais elle avait des signes pour dire que les auteurs devaient s’arrêter quand elle souffrait trop. Les auteurs ne se sont pas arrêtés, et ont été condamnés pour blessures volontaires et proxénétisme. Les magistrats ont dit que cela faisait partie de la liberté individuelle. La Cour européenne s’est interrogée sur le consentement : tant qu’il y a un accord, il n’y a pas d’actes contraires à la loi, et pas de qualification pénale. Mais, comme l’épouse à un moment donné a dit qu’elle ne voulait plus continuer, elle a retiré son consentement, et le magistrat et le médecin n’ont pas eu gain de cause. En d’autres termes, le consentement peut justifier la commission d’infraction et exclure la qualification pénale. Fausses exceptions médicales, fausses exceptions sportives : quand on subit une intervention chirurgicale, on consent à un acte grave sur sa personne, c’est-à-dire ouvrir le ventre. C’est plutôt de l’ordre de l’autorisation de la loi. Le médecin DOIT opérer lorsqu’il y a danger de mort. Problème des témoins de Jéhovah : ils refusent les transfusions sanguines, on l’admet, mais uniquement jusqu’au moment où il y a un risque pour les enfants. II – LES CAUSES SUBJECTIVES D’IRRESPONSABILITE OU CAUSE DE NON-IMPUTABILITE Ici, on envisage des causes de non responsabilité, d’absence de responsabilité de culpabilité, et d’atténuation de celle-ci. Le législateur de 1994 a supprimé certaines causes d’atténuation de responsabilité, on supprime l’excuse de provocation, mais a créé une nouvelle cause d’irresponsabilité : l’erreur sur le droit. Ne pas confondre avec les excuses : depuis la loi du 9 mars 2004, les repentis sont déclarés coupables mais ne sont pas condamnés. Ils bénéficient d’une exemption de peine. Ce sont ceux qui dénoncent les infractions de drogue, de prostitution, de terrorisme. Eux ne bénéficient pas d’une cause de responsabilité. A) Le défaut de discernement lié à des troubles psychiques ou neuropsychiques Auparavant, « démence ». Art. 122-1 : « N’est pas pénalement responsable la personne qui était atteinte, au moment des faits, d’un trouble psychique ou neuropsychique ayant aboli son discernement ou le contrôle de ses actes. La personne, qui était atteinte, au moment des faits, d’un trouble psychique ou neuropsychique ayant altéré son discernement ou entravé le contrôle de ses actes, demeure punissable ; toutefois, la juridiction tient compte de cette circonstance lorsqu’elle détermine la peine et en fixe le régime. » Le mot démence est écarté, car c’est un terme clinique, c’est une maladie mentale. La maladie maniaco-dépressive est un autre exemple. Au Moyen-Âge, les fous étaient

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considérés comme envahis par le diable. Ils étaient condamnés plus sévèrement. Le diable était présent. Au cours des siècles, on a eu l’idée que la peine devait aussi améliorer la personne. On ne peut pas améliorer quelqu’un qui ne comprend pas. On a considéré que le dément ne pouvait pas être sanctionné. 3 définitions : � La culpabilité : c’est l’existence d’une faute. � L’imputabilité : on impute la faute à telle personne, on la désigne. � La responsabilité : c’est l’aptitude à répondre de ses fautes (avoir conscience du bien et du mal). Les différents milieux médicaux ont considéré que l’existence de troubles psychiques interdisait d’imputer la faute à l’agent, et donc de le déclarer responsable. Avant le C. Pén. de 1994, si l’on admettait la démence, la personne n’était pas condamnée, mais était envoyée dans un hôpital psychiatrique et était internée (c’est le préfet qui prend un placement d’office après la constatation du juge de la démence, ce n’est pas le juge qui place la personne). Lorsque le discernement est seulement faussé, les personnes iront en prison. Lorsque la personne démente était placée d’office dans un établissement psychiatrique, la décision de sortie échappait et échappe toujours aux magistrats. C’est une décision médicale. La réforme de 1994 a été de dire que seulement les personnes ayant une abolition de discernement bénéficieront de cette cause subjective. À l’heure actuelle, qui apprécie l’altération ou l’abolition ? La notion d’abolition du discernement, cause subjective, est très rarement retenue. Le magistrat nomme un expert qui apprécie si la notion du bien et du mal a été abolie ou altérée. L’expert dira que la personne ne peut être condamnée ou seulement qu’il y a une altération des facultés mentales. Aujourd’hui, en prison, on a énormément de détenus dérangés, ayant besoin d’un traitement psychiatrique, qui ne devraient pas être dans ces établissements. On donne alors beaucoup de neuroleptiques à ces personnes. Les personnes déclarées irresponsables quittent le système judiciaire et vont dans un établissement de soins, mais échappent ensuite à la justice, puisque la décision de sortie est purement médicale. Les notions psychiques/neuropsychiques sont médicales : délires, psychoses… il faut que l’abolition soit au moment de l’acte. Si c’est avant l’acte ou après l’acte, cela ne joue pas. Certaines personnes sont prises de fulgurance démoniaque et tuent tout le monde tout d’un coup. On refuse tous les troubles voisins, tels que la cleptomanie (prendre du plaisir à s’emparer du bien d’autrui et avoir une envie compulsive de voler). Ce n’est pas un trouble psychique au regard de la loi pénale. L’utilisation de stupéfiants, d’alcools, entre-t-elle dans ce champ d’application ? Non. On ne fait pas jouer l’abolition du discernement. On considère qu’il y a une faute au départ. Le fait de boire, d’utiliser des stupéfiants, c’est la volonté de l’intéressé. Pour les somnambules, bénéficie-t-on de l’abolition de discernement. Si le phénomène est accidentel, on bénéficie de l’art. 122-1. Mais, si on se fait placer sous hypnose, on considère que la personne a provoquée elle-même son propre état, et ne bénéficie pas de 122-1. Les effets de la reconnaissance de l’abolition du discernement sont l’impossibilité de déclarer la personne coupable. Lorsqu’il y a une abolition du discernement (la conscience du bien et du mal), on ne peut le déclarer coupable, qu’il ait tué, volé etc. non

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pas parce que l’infraction n’existe pas, mais parce qu’il ne distingue pas le bien du mal. On fait tomber l’élément moral parmi les causes subjectives. Le complice, lui, pourra être déclaré coupable. Qu’en est-il des dommages – intérêts ? Pour toutes les causes d’irresponsabilité subjective, on a la possibilité de condamner pour des dommages et intérêts. En 1968, et cela a donné l’art. 489-2 C. Civ., on a le cas suivant : une personne est renversée par une voiture conduite par un homme riche, mais dément. On n’a pas le droit à des dommages - intérêts car elle est démente. On est renversé par un pauvre, mais conscient, il devra des dommages - intérêts. Art. 489-2 C. Civ. : « Celui qui a causé un dommage à autrui alors qu'il était sous l'empire d'un trouble mental, n'en est pas moins obligé à réparation. » L’art. 489-2 prévoit que la personne déclarée irresponsable pourra néanmoins être condamnée à verser des dommages et intérêts aux victimes. Les victimes, lorsque ce sont des enfants, supportent difficilement lorsque les auteurs sont irresponsables. B) La minorité pénale Art. 122-8 C. Pén. Le texte a été modifié par la loi Perben du 9 septembre 2002. Mais le texte sur la minorité pénale provient de la grande ordonnance du 2 février 1945. Cette ordonnance a été adoptée avec une idée maîtresse : beaucoup d’enfants pendant la guerre avaient été privés de leurs parents pendant la guerre, et certains se sont constitués en tribus pour survivre. Ils commettaient des infractions pour pouvoir survivre. Il y a eu l’idée que la jeunesse était tout de même l’espoir de la vie, et qu’en les condamnant, on n’allait pas reconstruire la société. Il fallait réadapter et donner un plus au mineurs, sachant que l’on devait les traiter différemment des adultes. Déjà, en 1945, on savait que la prison était criminogène.Lorsque l’on est incarcéré, même pour un faible temps, on apprend des techniques de délinquance et on s’y ancre. L’idée est de tout miser sur l’éducation, sur l’évolution du jeune en puissance. L’ordonnance de 1945, aux yeux des autres pays, européens ou non, est considérée comme un texte révolutionnaire. La réalité ressentie par les magistrats et les politiques est toute autre. Ce système audacieux de l’ordonnance de 1945 prévoyant une juridiction à part, le Tribunal pour Enfants (composé de professionnels, et aussi de citoyens) est maintenu en vigueur, mais une réforme pas forcément douce arrive. Art. 122-8 : « Les mineurs capables de discernement sont pénalement responsables des crimes, délits ou contraventions dont ils ont été reconnus coupables, dans des conditions fixées par une loi particulière qui détermine les mesures de protection, les mesures d’assistance, de surveillance, et d’éducation dont ils peuvent faire l’objet. (…) Cette loi [= l’ordonnance] détermine également les sanctions éducatives qui peuvent être prononcées à l’encontre des mineurs de 10 à 18 ans, ainsi que les peines auxquelles peuvent être condamnés les mineurs de 13 à 18 ans, en tenant compte de l’atténuation de responsabilité dont ils bénéficient en raison de leur âge. » Pour pouvoir condamner un mineur, il faut qu’il ait un discernement. S’il n’a pas conscience du bien et du mal, on ne peut pas le condamner pénalement. S’il a conscience du bien et du mal, on pourra le déclarer coupable. La déclaration de culpabilité va être dissociée de la sanction. Quand on dit que les mineurs sont irresponsables en dessous de 13 ans, ce n’est pas exactement la vérité : cela veut dire qu’on ne peut pas les condamner a une peine, mais on peut les déclarer coupables.

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- Les mineurs de moins de 10 ans : s’ils ont un discernement, la capacité de comprendre le bien et le mal, on pourra les déclarer coupables, mais on ne pourra pas prononcer contre eux des sanctions. Déclarer coupable sert à pouvoir prendre des mesures éducatives. Ex. un garçon de 9 ans a volontairement pris une boîte d’allumettes et a brûlé une usine. On a une déclaration de culpabilité, mais pas de sanctions. Il a eu une mesure éducative. Cette déclaration de culpabilité est essentielle au regard du droit civil. Si le mineur est déclaré coupable, on pourra civilement le déclarer coupable et par voie de conséquence, faire jouer la responsabilité civile de ses parents. Dans l’affaire de l’incendie volontaire, ce sont des sommes importantes qui étaient en jeu. Les parents ne sont pas couverts par la responsabilité civile de l’assurance de leurs enfants, qui ne vaut pas pour les infractions volontaires. - Les 10-13 ans : cette nouvelle catégorie fut créée le 9 septembre 2002 (Perben I). Avant, le seuil était de 13 ans. Dans la catégorie des 10-13 ans se pose également la question du discernement. S’il n’y a pas de conscience, il ne peut y avoir de responsabilité pénale. Mais, si la conscience est présente (ex. violeur de 12 ans), la question de la sanction se pose. Le législateur a prévu des sanctions éducatives. Ce ne sont pas des peines identiques à celles des adultes, mais des sanctions retenues pour condamner cette catégorie de délinquants. Ce peut être un classement dans un établissement spécialisé (débats en cours). - Les 13-16 ans / les 16-18 ans : on peut prononcer des condamnations pénales contre ces mineurs, à condition qu’on ait rapporté la preuve qu’ils avaient commis l’acte matériel, mais aussi qu’ils étaient conscients. On peut prononcer des peines à leur encontre (au tribunal pour enfants ou à la cour d’assises pour enfants). Les 13-16 ans bénéficient de droits d’une excuse de minorité. Cela signifie que la peine encourue par un adulte pour le mineur sera coupée en 2. Si le texte prévoit 3 ans en matière de vol, le maximum pour un mineur sera de 18 mois. Le magistrat ne pourra donc pas condamner au-delà de la moitié du maximum prévu pour un adulte. Les 16-18 ans, pour eux la question de la minorité est facultative. Le tribunal accorde ou non l’excuse de minorité. Selon quels critères ? Les circonstances, le fait que l’on soit un délinquant primaire, une récidive (= condamnation plus proche de celle d’un adulte probable). Le mineur peut être jugé comme si les faits avaient été commis par un adulte. Comment évalue-t-on l’âge d’un mineur étranger dont on n’a pas de papiers ? Cela se pose souvent à Roissy. On fait un examen osseux, à partir du poignet (ou de la dentition). Le poignet révèle tout, et cela se confirme à peu près à 2 mois près. Il permet de connaître la taille d’un bébé lorsqu’il sera adulte. L’exécution de la peine ? Les mineurs doivent en principe, lorsqu’ils sont incarcérés, être traités dans des cellules à part. Ils doivent bénéficier de l’éducation, de l’enseignement. En pratique, la réalité est toute autre. Compte tenu de la surcharge de la population carcérale, il arrive fréquemment que des majeurs soient mélangés avec des mineurs… C) La contrainte Art. 122-2 : « N’est pas pénalement responsable la personne qui a agit sous l’empire d’une force ou d’une contrainte à laquelle elle n’a pu résister. » Là-encore, nous sommes dans une cause subjective d’irresponsabilité. C’est-à-dire que l’auteur n’a

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pas voulu l’infraction mais l’a néanmoins commise, alors qu’il n’est pas dément. Le fait délictueux existe toujours. On exonère cette personne sur le fondement de la perte de libre choix. L’état de nécessité = choisir de commettre l’infraction / La contrainte = obligation de commettre l’infraction. La force renvoie à la force majeure du Droit civil. C’est un événement imprévisible, irrésistible et extérieur qui empêche l’exécution d’un contrat (devoir payer une facture, mais une inondation a lieu, plus de communications…). En droit pénal, la contrainte ne requiert que le caractère irrésistible et imprévisible. La contrainte peut éventuellement être interne. En Droit civil, la force majeure s’apprécie de manière abstraite. En droit pénal, on va être plus près des faits, et se demander si M. X. a été soumis ou non à une contrainte. Pour refuser le bénéfice de la force majeure, les tribunaux se réfèrent parfois à un homme normal. a) La contrainte physique Elle peut avoir deux origines : 1/ Contrainte physique d’origine externe : elle équivaut exactement à la force majeure. On est obligé de commettre une infraction par un élément physique externe. Ex. à une époque, on bannissait les délinquants, on les mettait hors du territoire. Celui qui revenait commettait une infraction. Si le bateau dans lequel se trouve le délinquant échoue en France, on considère qu’il n’a pas commis une infraction du bannissement. Cela peut être le fait d’un tiers. Les animaux ne doivent pas divaguer. Le bétail doit être parqué. Si la barrière est volée, le propriétaire bénéficie d’une contrainte physique externe. La divagation ne vient pas de son fait, mais d’un élément extérieur. Le mot prévisible suppose absence de faute. Si on glisse avec son véhicule sur une plaque de verglas et que l’on cause un accident, on ne bénéficie pas de la contrainte. Car, en prenant son véhicule, on doit vérifier la situation climatique et avoir des pneus en état. Si les freins lâchent, tant pis pour le conducteur. 2/ Contrainte physique interne : là, il s’agit d’un événement physique propre. Il peut provenir d’une maladie. Si la maladie empêche la personne de travailler, elle ne peut pas payer la pension alimentaire. On considère que l’absence de revenus due à la maladie vaut cause d’irresponsabilité, vaut contrainte. Autre JP, 19 octobre 1922, Crim, a admis que l’endormissement ayant empêché un voyageur de s’arrêter à la destination de la gare prévue et qui a dépassé la station, est une contrainte interne exonératoire. b) La contrainte morale Les effets sont identiques à ceux de la contrainte physique. Il y a exonération. Mais le caractère irrésistible sera plus sévèrement apprécié. 1/ La contrainte morale d’origine externe : craindre, avoir peur, et ne plus avoir de liberté de choix, c’est agir sous la contrainte. Le banquier ouvre le coffre de la banque, parce qu’un individu menace de faire disparaître ses enfants et sa femme. On considère qu’il peut bénéficier de la contrainte. En revanche, la crainte révérentielle des enfants par rapport à leurs parents n’est pas considérée comme suffisante. On sera plutôt dans l’hypothèse d’une menace. Arrêt du 26 février 1959, pendant la guerre d’Algérie, un fermier algérien a donné asile à des rebelles. Il a donné asile sous peine de menaces de

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mort. Ensuite, les autorités sont venues l’arrêter en lui reprochant d’avoir aidé des rebelles. La c. cass. a approuvé la décision de relaxe, car la menace qui pesait sur l’individu ne lui a pas laissé de choix. 2/ La contrainte morale d’origine interne : la contrainte morale ne peut jouer que si elle externe. Elle ne jouera pas si elle est interne. Il n’y a pas d’exonération. Ce sont par exemple les sentiments, les convictions, la jalousie. On n’admet pas la jalousie, la peur intense, dans toutes les hypothèses, c’est refusé. Les passions ne peuvent pas être retenues comme des causes exonératoires. L’autorité légitime est l’autorité hiérarchique publique (maire, gendarme, policier). En revanche, si l’envoyé commet un acte délictueux, un faux, on peut se demander s’il agit sous la contrainte. Les magistrats répondent négativement, car il doit toujours être responsable. D) L’erreur sur le droit La responsabilité pénale n’existe pas, mais il peut y avoir des dommages et intérêts. C’est l’innovation du C. Pén. de 1994. Le texte est toujours incompris : Art. 122-3 « N’est pas pénalement responsable la personne qui, justifie avoir cru, par une erreur sur le droit, qu’elle n’était pas en mesure d’éviter, pouvoir légitimement accomplir l’acte. » C’est la première fois où le législateur va à l’encontre du principe « nul n’est censé ignorer la loi », et où indirectement, il dit au législateur « vous devez rédiger des textes précis, clairs et accessibles à tous les concitoyens ». C’est une nouvelle cause d’irresponsabilité pénale. Le principe « nul n’est censé ignorer la loi » est une fiction. L’ignorance du délinquant, en principe, n’a pas d’effet. La c. cass. dit « vous devez connaître la loi ». Mais, à travers ce texte, on va admettre une certaine forme d’ignorance. C’est une erreur sur le droit (sur l’interprétation de la règle), et non pas une erreur de fait. C’est une erreur invicible, inévitable. Comment se tromper sur l’interprétation de la règle de droit ? Parce qu’on aura demandé à un ministre, à l’administration l’interprétation que l’on doit donner de la règle de droit. La personne à qui on demande l’information doit être ciblée, compétente. Demander l’information à un avocat ou à un notaire et qu’il se trompe, tant pis pour la personne. Décision du 11 octobre 1995 : Il s’agissait d’un couple séparé, et le mari avait écrit une lettre à l’avoué pour savoir s’il avait le droit de rentrer dans le domicile attribué à son épouse pour y récupérer des vêtements. L’avoué a répondu positivement, puisque avant la séparation, il s’agissait du logement familial. Une fois entré chez l’épouse, elle le poursuit pour violation de domicile. L’interprétation de la loi devant être demandée au juge et non pas à l’avouée, le mari a été condamné. Ex. un directeur de magasin avait demandé une extension. On lui a répondu négativement. Une 5ème fois, on lui a donné une réponse positive. L’autorité lui ayant donné la réponse n’était pas la commission et on avait considéré qu’il avait commis l’infraction d’extension de magasin sans autorisation. L’erreur sur le droit vaut pour les personnes physiques, comme pour les personnes morales. De même que pour la contrainte, responsabilité pénale exclue, responsabilité civile possible. III – LES IMMUNITES

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Ce sont des obstacles à la qualification pénale. Il y en a plus que 4 en réalité. Cela signifie que l’on ne peut pas poursuivre. On bénéficie donc d’un privilège. A) Les immunités diplomatiques et politiques Les diplomates, le consul, l’ambassadeur et son personnel de maison, la cuisinière, le jardinier, le chauffeur, bénéficient d’une immunité pour toutes les infractions qu’ils seraient susceptibles de commettre sur le territoire français. Ex. un diplomate britannique ne peut être poursuivi pour excès de vitesse en France. Cette immunité a été étendue aux représentants de l’UNESCO. Elle est valable, sauf crimes de guerre. Elle s’étend aux personnes et aux bâtiments (la police ne rentre pas dans une ambassade). Le diplomate est jugé par les autorités de son pays. L’immunité parlementaire, politique est la plus connue, mais aussi la plus mal cernée. Il y a un problème de terminologie. L’immunité parlementaire, c’est l’impossibilité de poursuivre les parlementaires, les députés, les sénateurs, à l’occasion des discours qu’ils tiennent dans les assemblées. Cela fait partie des débats, de la joute orale d’utiliser des noms grossiers. Cela n’a rien à voir avec l’inviolabilité parlementaire, ou avec celle des hommes politiques. Cela veut dire qu’un homme politique parlementaire ayant commis une infraction ne peut pas être arrêté sans l’autorisation de l’Assemblée Nationale ou du Sénat (le président de l’assemblée décide). Immunité = non responsable / inviolabilité = responsable, mais problème de procédure. Pour le Président de la République, on n’a rien dans la Loi, mais on a deux décisions, une du CC, une de la Crim. qui estiment que pendant son mandat présidentiel, on ne peut pas demander au président de venir chez le juge d’instruction, c’est donc pendant un temps donné. Un homme politique ne commet pas d’infractions impunies. Les seules infractions sont les diffamations entre parlementaires. B) Les immunités judiciaires et familiales L’immunité familiale est le fait de ne pas pouvoir poursuivre un enfant qui aurait volé ses parents. Cela vaut aussi pour le cas inverse. Cela vaut aussi pour le conjoint, sauf s’ils sont divorcés ou séparés. Si on se fait aider d’un tiers, ce tiers sera déclaré coupable comme auteur (art. 311-12). Quelles infractions ? Au départ, c’était le vol, puis cela a été étendu. L’immunité judiciaire est comme une immunité parlementaire : au tribunal (y compris dans les conclusions qu’on dépose), on peut traiter son adversaire de tous les noms, sauf d’insulter les magistrats. � FIN DU PROGRAMME DE L’EXAMEN TITRE II – LES SANCTIONS PENALES ET LES MESURES DE SURETE CHAPITRE I – L’EVENTAIL DES PEINES ET MESURE DE SURETE ENCOURURES

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L’infraction n’est pas définie par rapport à sa nature dans la mesure où nul part il n’est écrit que le vol est un délit. En revanche, on écrit « le vol est puni de 3 ans d’emprisonnement ». On sait donc que c’est un délit. Lorsque le vol s’aggrave, le vol est punissable de 20 ans de réclusion. Il devient alors un crime. D’où l’importance de bien connaître les sanctions pour pouvoir qualifier la nature de l’infraction à traiter. La peine, c’est la sanction, elle a une double sanction : faire payer, rétribuer, l’auteur ; et remettre en cause l’intéressé. La peine doit réadapter l’intéressé, lui servir de médicament, lui faire comprendre qu’il peut changer. La mesure de sûreté, qui a en principe disparue du C. Pén. de 1994 n’est pas une sanction, c’est une mesure destinée à éviter l’état dangereux pour la société. Certaines sanctions prévues par le législateur sont en réalité des mesures de sûreté. Ex. l’une des mesures de sûreté appliquée dans le cadre de la récidive est de prévoir (loi du 15 décembre 2005) le port du bracelet électronique après avoir exécuté sa peine (à la cheville ou au poignet). C’est une mesure de sûreté appliquée aux délinquants ayant commis leurs infractions antérieurement. On peut l’appliquer rétroactivement. I – LA CLASSIFICATION DES PEINES ET MESURES DE SURETE Non traité. II – LE CONTENU DES PEINES Non traité. III – LA HIERARCHIE DES PEINES A) En matière criminelle Art. 131-2 C. Pén. pour les personnes physiques. Pour les personnes morales, art. 131-37 et s. C. Pén. Le législateur dit ici quelles sont les peines criminelles. - Pour les personnes physiques : la réclusion criminelle ou la détention criminelle à perpétuité (jusqu’à la mort). La deuxième hypothèse est de 30 ans, la troisième de 20 ans, puis 15, et le minimum est de 10 ans au moins. En 1981, on a supprimé la peine de mort. Trois condamnations à mort en 72, une en 76, et deux en 77. Celui qui y a échappé est Patrick Henri, qui est un jeune de 24 ans ayant tué un petit garçon pour une question de rançon. Il a été condamné à perpétuité, puis libéré après 20 ans en prison, et s’est prendre en Espagne pour un trafic de stupéfiants. Il a été remis en prison. La peine de mort est supprimée depuis 1981, et contrairement à ce qui est dit, il n’est pas possible de voter demain une loi française qui prévoirait de réintégrer dans l’arsenal juridique la peine de mort. Car la France a signé le protocole additionnel n°6 de la Convention Européenne des Droits de l’Homme. Cf. C. pr. Pén. La France est engagée dans une convention internationale et ne peut plus être changée. La peine de mort pourra être rétablie en temps de guerre ou dans un danger imminent de guerre. En 1981, suppression ; en 1985, ratification du protocole. Il s’agit d’une convention internationale supra légale. Aucune loi française ne pourra la rétablir.

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En 1981, quand a été votée la suppression de la peine de mort, la majorité des Français était contre, et voulait son maintien. La peine de mort a-t-elle un effet dissuasif ? Toutes les études répondent négativement. Certains condamnés estiment que la réclusion à perpétuité est pire que la peine de mort. Au mois de décembre, on a vu des détenus condamnés à perpétuité écrire au Ministre de la Justice qu’on leur tranche la tête. En pratique, la réclusion à perpétuité prononcée n’est jamais appliquée. Il est extrêmement rare que des personnes restent en détention jusqu’à la fin de la vie, car cela en fait des bêtes féroces (peu leur importe de tuer en prison, puisqu’ils y restent). Pour éviter tout de même une sortie trop rapide, la loi prévoit une peine incompressible. C’est le juge d’application des peines qui autorise la libération des détenus. La loi autorise une durée dite incompressible qui permet de savoir que pendant 20 ans, une personne ne pourra pas sortir. Réclusion ou détention criminelle : - Réclusion : droit commun. - Détention : politique. Qui prononce la peine criminelle ? La cour d’assises (9 jurés, 3 magistrats), elle suppose une instruction, un juge d’instruction. La cour d’assises d’appel (11 jurés, 3 magistrats). Cette cour prononce une peine criminelle (au moins 10 ans), mais le juge est habilité à descendre dans l’échelle des peines. Il peut descendre en dessous de 10 ans, si des circonstances le justifient. S’il descend en dessous de 10 ans, et prononce 7 ans par exemple, la peine devient correctionnelle. La casier judiciaire indiquera donc une peine correctionnelle. Art. 131-2 : Les peines de réclusion criminelle ou de détention criminelle ne sont pas exclusives d’une peine d’amende ou d’une peine complémentaire. En plus de la réclusion, le législateur peut prévoir une autre peine. On a des peines principales, et puis des peines complémentaires (une liste dans laquelle le juge peut choisir une peine qui viendra s’ajouter : la confiscation du passeport, d’un véhicule, l’interdicition de résider en Ile de France). Art. 131-37 : Les peines encourues par les personnes morales sont l’amende, et certaines peines de l’art. 131-39. La peine d’amende pour la personne morale est multipliée par 5. Si elle est de 45000 pour une personne physique, on la multiplie par 5. Les autres peines de l’art. 131-39 : on ne peut pas incarcérer une personne morale, être de fiction ; on a donc trouvé quelque chose d’équivalent, la dissolution. Art. 131-39 : - La dissolution consiste en la décision que la personne morale n’existe plus. Cela n’existe que pour les infractions particulièrement graves. Mais, à travers des prêtes noms, les fondateurs de la première association dissoute pourront en créer une autre. Aucune peine de dissolution n’a été prononcée à ce jour. - L’interdiction d’exercer certaines activités professionnelles. Si on sait qu’une association a des membres l’ayant utilisé pour effectuer des attouchements sur enfants, on lui interdit de s’occuper de mineurs de moins de 13 ans. S’il s’agit de fonds, on lui interdira d’en récolter. - L’exclusion des marchés publics. Ex. une entreprise de bâtiments se voit interdite de construire des routes, lycées, écoles, hôpitaux… c’est la faillite. Cela ne s’est pas encore vu. - La fermeture d’un établissement. Une société peut avoir plusieurs établissements sur le territoire. Si un établissement détourne des fonds, on le ferme. Cela est dangereux car les salariés subiront le contrecoup de cette fermeture.

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- L’affichage de la décision de la condamnation : ex. condamnation de GDF pour une canalisation de gaz mal entretenue, et une condamnation lourde pour la personne morale. Il y a eu une publication dans les journaux. B) En matière correctionnelle Art. 131-3 pour les personnes physiques. Pour les personnes morales, les peines applicables en matière criminelle sont identiques en matière correctionnelle. Art. 131-3 : - L’emprisonnement : on différencie le crime du délit par rapport à la terminologie employée. C’est une peine privative de liberté - L’amende. - Le jour-amende. - Le stage de citoyenneté. - Le TIG. - Les peines privatives ou restrictives de droits (131-6). - Certaines peines complémentaires (131-10). - L’emprisonnement : l’échelle des peines, la graduation prévue, qui s’impose aux magistrats est de 10 ans au plus. Si on prononce 10 ans et 1 jour, c’est une peine criminelle. Ensuite, on a 7 ans, 5 ans, 3 ans, 2 ans, 1 an, 6 mois. C’est le système de 1994. Le 18 mars 2003, loi sur la sécurité intérieure, on a l’hypothèse de 2 mois au plus jusqu’à 10 ans. La peine d’emprisonnement s’exécute dans un établissement pénitentiaire, où l’on ne mélange pas en général les petites peines et les longues peines. Cela n’est, bien évidemment, pas respecté. Le vol est punissable de 3 ans d’emprisonnement, le juge ne peut pas prononcer 4 ans, mais peut descendre à 1 an ou 6 mois. - L’amende : le minimum est de 1500 €. En dessous de 1500, on est dans les contraventions. La peine est contraventionnelle pour 1000 €, délictuelle pour 2000 €. Y a-t-il un maximum ? Oui et non. Il existe un maximum prévu pour chacune des infractions. Pour le vol simple, c’est 45 000 € au maximum (3 ans d’emprisonnement). Dans le concours d’infractions, il faudra regarder ces pénalités. Le juge ne prononce jamais ce maximum… Pour certaines infractions, la peine d’amende est proportionnelle en fonction du dommage causé. Pour le recel par ex. on peut aller jusqu’à la moitié des sommes recélées. Si on recèle un tableau de grande valeur, la somme prévue dans le Code est dérisoire. Pour les stupéfiants, les montants sont aussi très élevés. Pour la personne morale, on multiplie par 5 ans. - Le jour-amende : créé en 1983. C’est en quelque sorte une amende à crédit. Le juge va tenir compte des ressources du prévenu. Il va donc calculer une somme qui représentera le montant de la sanction sur un certain nombre de semaines, ou de mois. Le délinquant doit alors payer 10 euros par jour, pendant 1 mois. L’impact psychologique est différent, dans la mesure où cela permet à l’intéressé de comprendre qu’il devra verser une somme pour pouvoir payer sa dette à la société. C’est une pratique peu usuelle, une forme de pénalité peu utilisée par les magistrats. On ne peut pas cumuler les jours amendes avec une peine d’amende. Cela a un effet curatif, mais en pratique, c’est difficile à mettre en place. - Le stage de citoyenneté : introduit par la loi Perben II (9 mars 2004), c’est une innovation. Certains ont été prononcés : ce stage permet d’obliger une personne à effectuer un stage non rémunéré auprès d’une association ou auprès d’un établissement

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lorsque l’infraction demande à ce que la personne comprenne la gravité de son comportement. Art 131-5-1 : à la place de la peine de prison, on prononce le stage de citoyenneté. C’est la juridiction qui prononce la durée du stage, et qui, à la place de la peine d’emprisonnement, pourra décider que la personne est condamnée à ce stage. Cela est destiné principalement aux infractions de discrimination. Ex. provocations raciales, sexuelles, homophobes, religieuses. Cela a aussi été mis en place en matière de sécurité routière. - Le TIG : c’est une institution ancienne. C’est une alternative à l’emprisonnement. On prononce l’un ou l’autre. Il a été institué en 1983. C’est donc un travail non rémunéré, effectué auprès de personnes de droit public (institutions, universités, hôpital, associations habilitées…), mais pas une entreprise/société, pas une personne morale de droit privé). Cette activité s’effectue soit pendant la semaine, mais le plus souvent on essaye d’aménager que cela se passe les week-ends ou en vacances. Art. 131-22. Le juge fixe la durée et les modalités seront assurées par le juge d’application des peines. Le maximum a été modifié par une loi du 31 décembre. Le maximum est de 12 mois. C’est assez bien perçu par les prévenus, en revanche en pratique, même s’il y a eu beaucoup de prononcé de TIG, cela n’est pas toujours évident parce qu’il faut surveiller. Le TIG doit être intelligent. Il doit avoir un aspect curatif. On demande, en matière d’accident de la route, de travailler dans un hôpital. C’est la sanction prononcée. On peut lui demander de travailler aux archives. Le TIG suppose l’accord de l’intéressé. Pourquoi ? Si on condamnait quelqu’un à travailler sans son accord, ce serait de l’esclavage. Il ne peut pas s’appliquer pour les mineurs. On peut le cumuler avec une peine de prison prononcée avec sursis. La peine de prison peut être ferme (incarcération), avec sursis (délai pendant lequel on ne doit pas recommencer), avec sursis et mise à l’épreuve (obligations, résider à un endroit, qui assortissent le sursis). La prison ferme de moins de 3 mois est rarement exécutée. Pourquoi ? Parce que le juge prononce une peine et les modalités sont effectuée par le juge d’application des peines. Il pourra lui-même modifier la peine prononcée. Pour des raisons d’encombrement, le juge fera en sorte qu’une peine de 3 mois ne sera pas réellement exécutée, mais uniquement les week-ends, ou le soir. - Les peines privatives ou restrictives de droits : Art. 131-6. Le juge va pouvoir choisir des peines de substitution ou peines alternatives à l’emprisonnement. La loi offre dans cet art. 131-6 une liste de sanctions que le magistrat va préférer à la peine d’emprisonnement. Il est rare qu’un délinquant soit condamné pour la première fois à une peine privative de liberté. Le magistrat essaye de tempérer une peine d’emprisonnement. La liste est longue, il y a 14 hypothèses (interdiction de conduire certains véhicules, confiscation des véhicules, la suspension du permis du conduire, la confiscation d’une arme, le retrait du permis de chasser, l’interdiction d’exercer une activité professionnelle pendant 5 ans, l’interdiction de séjour, de paraître dans certains lieux, de fréquenter certaines personnes condamnées, d’entrer en relations avec la victime). Toutes ces possibilités doivent être choisies en fonction de la personnalité du délinquant. Ces peines de substitution peuvent être choisies à la place de la peine d’amende. On ne peut pas cumuler avec la peine de prison. Si on choisit la peine de substitution, seule la peine de substitution sera prononcée. Le budget de la justice est extrêmement faible. Il ne sert à rien de prononcer des peines d’interdiction de séjour, si on ne peut pas le contrôler. Des personnes doivent pointer toutes les semaines au commissariat.

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- Les peines complémentaires, prévues à l’art. 131-10 : on peut également les ajouter aux peines prévues en matière criminelle ou correctionnelle. La peine de substitution, c’est à la place de, la peine complémentaire s’ajoute. L’art. 131-10 prévoit des peines complémentaires pour les personnes physiques avec interdiction, déchéance, incapacité, retrait d’un droit, injonction de soins, confiscation d’un objet, fermeture d’un établissement, affichage de la décision ou publication dans un journal. Le magistrat choisira ou non de prononcer par exemple une interdiction des droits civiques. Il y a l’obligation de faire, c’est principalement l’obligation de suivi socio judiciaire, après les faits. L’interdiction des droits, ce peut être l’interdiction des droits familiaux, une cure de désintoxication, l’objectif est un suivi le plus près possible des intéressés. Le suivi socio judiciaire a été introduit en 98 et vise les auteurs d’infractions sexuelles (Art. 131-36-1 : l’obligation de se soumettre au juge d’application des peines, éviter la récidive…). C’est une mesure lourde, mais elle permet de contrôler davantage les auteurs d’agression sexuelles. Les auteurs d’agression sexuelles sont sur un fichier. Qui va être à l’origine ? Le juge d’application des peines. Il y a des résultats efficaces pour les cures de désintoxication à condition qu’elles soient bien encadrées. Les médecins étaient assez défavorables aux soins thérapeutiques, car ils sont efficaces uniquement si les personnes sont consentantes. L’inconvénient du système, c’est que lorsque la personne est incarcérée, on ne prononce pas de peine complémentaire, car on ne peut avoir de suivi en prison. C) En matière contraventionnelle Art. 131-12 pour personnes physiques, et art. 131-40. Le texte, art. 131-12, parle de peines d’amende, de peines privatives ou restrictives de droits, auxquelles ont peut ajouter des peines complémentaires. Jusqu’en 1994, on pouvait de part la loi prononcer des peines de prison pour des contraventions jusqu’à 2 mois. Pour des coups et blessures volontaires, sans incapacité de plus de 8 jours, on encourait une amende et un emprisonnement. En 1994, on a supprimé cette peine d’emprisonnement. Dans les années 1980, on a une controverse : la DDHC précise que la loi détermine les crimes et les délits. Mais la loi, c’est au sens technique, celle émanant du Parlement. Si un décret peut prévoir une peine d’emprisonnement, un décret n’est pas conforme au principe de la légalité, car c’est un règlement. Cette controverse a opposé la Crim. et dans un souci d’apaisement, seule la loi peut prévoir une peine d’emprisonnement (art. 34). Aucun décret pris en matière contraventionnelle ne peut prévoir de peine d’emprisonnement. Les peines contraventionnelles sont décidées par le législateur, mais le choix sera fait par décret, arrêté préfectoral, municipal. Quel est le moule du législateur en matière d’amende ? Art. 131-12 et 131-13. Le texte parle d’un maximum de 3000 €. La maximum de la peine contraventionnelle est de 1500 €. En récidive, on double, et on passe à 3000 €. Plus de 1500 € = délit. 1500 ou moins de 1500 = contravention. 1ère classe : 38 €, 2ème classe : 150 €, 3ème classe : 450 € (fumer dans un lieu public), 4ème : 750 € (vendeurs à la sauvette, bruits, tapages), 5ème : 1500 € (les plus graves, sanctionnées par une amende pouvant aller jusqu’à 3000 € pour la récidive, les coups et blessures volontaires de moins de 8 jours d’incapacité, certains injures, diffamation en public, et aussi les coups et blessures involontaires de moins de 3 mois d’incapacité). Le juge de proximité prononce les 4 premières, le juge prononce la 5ème. La particularité est que la

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preuve s’établit par un procès-verbal faisant foi jusqu’à preuve contraire. La preuve contraire : témoins, écrits. Ex. on ne peut pas vendre à l’extérieur d’un établissement des objets en vente dans l’établissement, sauf si on y est autorisé. Si on apporte la preuve de l’autorisation du maire, on est relaxé. Le juge peut aussi, lorsque la loi le prévoit, prononcer les peines alternatives (restrictives ou privatives de droits). Elles n’existent principalement que pour les cinquièmes classes. En revanche, les peines complémentaires sont fréquemment prévues pour les 3ème, 4ème et 5ème classes. Art. 131-40 pour les personnes morales : elles encourent l’amende, les peines restrictives de droits et les peines complémentaires. De la même manière que pour les peines criminelles et correctionnelles, l’amende est multipliée par 5. Depuis le 1er janvier 2006 (conséquence de Perben II), les personnes morales peuvent être coupables de toutes les infractions pénales, sauf en matière de droit de la presse. La dissolution ne peut pas s’adresser aux partis politiques et aux syndicats. Pour les peines complémentaires s’adressant aux personnes physiques, on peut prononcer le TIG, uniquement pour les contraventions de 5ème classe. CHAPITRE II – LE CHOIX DES PEINES LORS DU PRONONCE DE LA SANCTION C’est l’opération que doit faire le magistrat, le tribunal, lorsqu’il a caractérisé les éléments constitutifs de l’infraction (légal, matériel, légal), qu’il a relié cette infraction à une personne physique et morale. Ensuite, le juge doit choisir la peine. Le magistrat est obligé d’individualiser la peine, sinon on n’aurait pas besoin de magistrats. Parfois, le magistrat est tenu dans un sens qui l’oblige à aller dans un sens ou dans l’autre. I – LE PRINCIPE DE L’INDIVIDUALISATION DE LA PEINE C’est un principe inventé par les révolutionnaires, mais après avoir préalablement choisi le système de la peine fixe. Puis, ils s’aperçoivent que le système est choquant. Ils ne voulaient pas d’arbitraire au départ, ils ne voulaient pas de passe droits. L’inconvénient de la peine fixe, un distributeur automatique, c’est que les délinquants ont des facettes multiples. Si on veut que la peine soit rédomptrice, il faut qu’elle soit au plus juste de l’intéressé. On passe d’un système de peine fixe à un système individualisé. Art. 132-24 évoque la question de la personnalisation. Le juge doit fixer les peines en fonction des circonstances de l’infraction et en fonction de la personnalité de son auteur. Concernant les peines d’amende, le juge doit tenir compte des ressources et des charges de l’individu. D’où, l’obligation pour le juge d’interroger le prévenu sur ses ressources. Pour la personne morale, rien n’est précisé explicitement. On tiendra compte du patrimoine de la société lors du prononcé de la sanction. Comment le juge connaît-il les circonstances de l’infraction ? Tout figure dans le dossier. En revanche, la personnalité de l’auteur est plus complexe. En matière de crime, il y a nécessairement une enquête de personnalité + une expertise psychiatrique + une enquête médico psychologique. Cela permet à la cour d’assises d’avoir des éléments précis.

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Pour les prévenus, jugés en matière délictuelle, il n’y pas d’enquête de personnalité. Parfois, il y en a une, parfois non. L’enquête, s’il y en a une, est extrêmement succinte, surtout en comparution immédiate. En matière contraventionnelle, pas d’enquête de personnalité. Un élément qui permet de connaître la personnalité du délinquant est le casier judiciaire. Les ressources : la personne doit arriver en principe avec sa déclaration fiscale. Pour les infractions plus graves, le juge peut demander aux établissements bancaires de communiquer les comptes de l’intéressé. Avec ces 3 éléments, les circonstances de l’infraction, la personnalité du prévenu, les ressources, il faut faire un choix pour soit une peine d’emprisonnement, soit une peine de substitution, ou une peine d’amende. Avec la peine d’emprisonnement, on a la peine ferme, sursis, ou sursis avec mise à l’épreuve. On a aussi la dispense de peine. L’individualisation est-elle un principe constitutionnel ? La réponse a été indirectement donnée quand on considère que les peines doivent être proportionnelles. Proportionnelles par rapport à l’infraction, par rapport au prévenu. L’individualisation, c’est que le juge peut choisir. Le juge est-il obligé de prononcer certaines peines ? En principe, non. Le législateur de 1994 a supprimé les peines accessoires. Quelles sont ces peines ? Elles s’appliquaient automatiquement pour telle infraction. Le législateur de 1994 a décidé que l’individualisation devait être absolue, mais il a la mémoire courte. Les peines accessoires ne sont pas dans le C. Pén. et certaines ont été maintenues, notamment des interdictions de gérer de société, qui sont automatiquement accolées à l’infraction reprochée (en matière d’escroquerie). Une peine particulière est issue de la loi du 19 janvier 1995, relative au financement des partis politiques, avait prévu dans le code électoral d’éliminer provisoirement des personnes qui avaient commise certaines infractions en matière de corruption, de trafic d’influence, et de détournement de fonds publics. Les personnes étaient interdites de droits civiques et de présenter aux élections pendant 10 ans. La question s’est posée de savoir si l’on pouvait diminuer la durée. Peut-on passer de 5 ans à 1 an ? En théorie non, mais la Cour de Versailles a décidé que la peine d’inéligibilité de Juppé serait d’un an. A) Choix de la nature de la peine Le magistrat a beaucoup de possibilités. Le législateur lui donne en plus, lorsqu’il a choisi une peine, de l’adapter par rapport aux circonstances. La peine de prison : on peut l’exécuter de manière totale (du 1er janvier au 31 mars), incarcéré de jour et de nuit. Le magistrat peut choisir un régime de semi-liberté. Ce régime est prévu à l’art. 132-25. Il ne vaut que si la peine prononcée est inférieure à 1 an. Peine encourue = la loi / prononcé = le juge. Le jour, la personne est dehors, la nuit, à 18h, la personne dort en prison (et y reste les week-ends). C’est le juge d’application des peines qui organise cela. Le régime de semi-liberté est décidé par le juge d’application des peines. On peut fractionner la peine, c’est-à-dire, pour des motifs graves, professionnels, de santé, dire que la peine sera exécuté et que pendant 1 mois, on ira à l’hôpital, et on considérera que l’on n’est pas incarcéré. Les peines de fractionnement ne comptent pas. Elles étaient de rigueur pour les personnes condamnés pour suspension de permis de

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conduire : elles conduisent la semaine, mais pas les week-ends. Cette procédure est interdite dans certaines hypothèses, mais maintenue dans d’autres. On peut prévoir un sursis à la peine de prison, à la peine privative de liberté. Il n’y a pas de sursis pour la réclusion, il vaut uniquement en matière correctionnelle. Le sursis sec a été introduit en 1891. Il y a un délai d’épreuve pendant lequel la personne ne doit pas commettre de nouvelles infractions. Cela permet à l’individu qui n’a pas un profil de délinquant d’être suffisamment attentif pour ne pas commettre une nouvelle infraction. Le sursis simple peut être jumelé avec une peine ferme. B) L’ajournement du prononcé de la peine Art. 132-60 C. Pén. L’hypothèse est la suivante : un individu commet une infraction et le principe de la responsabilité pénale est acquis. Le magistrat se pose la question : faut-il prononcer une peine avec sursis puisque c’est un délinquant primaire ? puis-je ne pas prononcer de peine ? Pour ne pas prononcer de peine, on peut donner un délai pendant lequel le délinquant va principalement indemniser la victime. L’ajournement peut présenter différentes formes : - soit, c’est un ajournement simple : « j’ajourne le prononcé de la peine du 18 mai au 18 octobre, puis nous nous reverrons ». - soit, l’ajournement avec mise à l’épreuve : le délinquant n’est pas laissé seul mais est placé sous contrôle du JAP. Le JAP va alors vérifier son comportement, s’il va travailler, s’il réuni la somme pour la victime non encore indemnisée… - soit, l’ajournement avec injonction : art. 132-66. S’il y a des manquements en matière de pollution dans une usine par exemple, la personne sera enjointe à des travaux nécessaires. Ce texte est une coquine vide, car il n’y a pas encore de décret d’application. À l’issue du délai, que se passe-t-il ? Le magistrat peut aujourd’hui ajourner la peine au maximum sur 1 an. En pratique, on donne plutôt un rendez-vous dans 6 mois. L’individu, déclaré coupable, se re-présente devant le tribunal. Selon les circonstances, le juge va pouvoir prononcer une peine sans difficulté ou bien alors décider de dispenser de peine le prévenu. Si les conditions de la dispense de peine sont réunies, l’individu n’aura pas de condamnation à exécuter. C) La dispense de peine Art. 132-59. L’individu est déclaré coupable, mais le texte dit : « la dispense de peine peut être accordée lorsqu’il apparaît que le reclassement du coupable est acquis, que le dommage causé est réparé, et que le trouble résultant de l’infraction a cessé. » La juridiction est libre de ne pas prononcer de sanction. Il ne s’agit pas d’une relaxe, ni d’un acquittement. La plupart du temps, la dispense de peine sera applicable lorsque la victime aura été indemnisée, que l’individu reconnaît et regrette les faits et que le trouble n’était pas très important. Conséquence : pas de sanction, pas d’inscription au bulletin n°2 (il y a 3 casiers judiciaires, le premier est le B3 dont on peut avoir la connaissance si on en fait la demande, le B2 est destiné aux administrations si on veut

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devenir fonctionnaire ou travailler dans la sécurité, le B1 est transmis aux magistrats et policiers). Mais, le juge peut décider que le jugement ne figurera pas non plus au B1. Le magistrat qui aurait examiné le cas de cette personne n’aura aucune trace. Cette dispense de peine s’applique en principe pour toutes les infractions : elle est rare en matière de crime cependant, elle s’applique pour les délits et pour les contraventions. Les peines s’appliquant automatiquement comme certaines interdictions de gérer, la suspension de points en matière de permis de conduire, disparaissent automatiquement lorsque le juge prononce une dispense de peine (Ex. excès de vitesse de 132km/h au lieu de 130). D) L’aménagement de la peine privative de liberté décidée par le juge Semi-liberté, fractionnement… sont envisagés par le JAP. Aujourd’hui, quand on condamne un individu à 3 mois de prison ferme, sauf mandat de dépôt à l’audience (c’est-à-dire arrestation et incarcération immédiate), il appartiendra au JAP d’individualiser la sanction. 3 mois ferme sans mandat de dépôt à l’audience = le JAP aménagera la sanction. Le JAP convertira cette emprisonnement avec un TIG par ex. En revanche, le juge de jugement peut lui-même prévoir un aménagement. L’aménagement, hormis l’ajournement et la dispense de peine, ce sont principalement les sursis. Il existe 2 sortes de sursis : - le sursis simple : ex. 8 mois d’emprisonnement avec sursis. Pendant un délai de 5 ans, à partir de la condamnation, le juge explique à la personne qu’elle ne doit pas commettre de nouvelles infractions. Quel effet ? Si à l’issue du délai de 5 ans, aucune nouvelle infraction n’a été commise, la condamnation pénale sera considérée comme non avenue. C’est comme si la personne n’a jamais été condamnée. La condamnation est inscrite sur le B1 avec la mention non avenue. C’est comme s’il n’y a jamais eu de condamnation (seuls les magistrats en auront connaissance, mais ne pourront pas en tenir compte au titre de la récidive ; l’information ne sera pas communiquée aux administrations). Le sursis peut s’appliquer à la peine d’emprisonnement, mais aussi à la peine d’amende (on verse une somme avec sursis, si on est tranquille pendant 5 ans, on récupère un casier vierge). - le sursis avec mise à l’épreuve : C’est l’art. 132-40. La personne a des obligations a exécuter. Le juge fixe la durée de la mise à l’épreuve, la durée de la mise à l’épreuve est au minimum de 18 mois et peut aller jusqu’à 3 ans. Le magistrat décide quelles sont les obligations. 3 ans d’emprisonnement, avec 2 ans de mise à l’épreuve : les obligations sont par exemple avoir un domicile fixe, ou essayer d’en avoir un, et le plus souvent, c’est indemniser la victime ou alors une injonction de soins (cure de désintoxication alcoolique, ou aux stupéfiants). Cela permet à l’individu faible pendant le délai d’épreuve à être assisté d’une personne qui l’aide à éviter la récidive. Ce peut aussi être l’interdiction de fréquenter certains lieux. Ici, le juge décide. Si, à l’issue de cette période, tout s’est bien passé, on aboutit à la même solution : la condamnation est déclarée non avenue. - le sursis avec l’obligation d’accomplir un TIG : Ex. 8 mois d’emprisonnement, obligation d’accomplir un TIG

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Le juge peut décider de prévoir une partie de la peine ferme et une partie avec sursis. Ex. 2 ans d’emprisonnement, dont 18 mois avec sursis. Si, en revanche, tout se passe mal et que les règles de la mise à l’épreuve (si le SME Sursis Mise à l’Epreuve n’est pas respecté) ne sont pas respectées, que de nouvelles infractions sont commises, le sursis pourra être révoqué. La révocation n’est pas automatique, sauf dans certaines hypothèses de récidive. Révocation : la personne condamnée à 6 mois avec sursis cumulera cette peine de 6 mois avec la nouvelle peine ; la peine devient relativement lourde. II – LES CIRCONSTANCES LEGALES DE L’INFRACTION Dans certains cas, le magistrat a un pouvoir de personnalisation de la sanction (cf. précédemment). Les circonstances légales de l’infraction, c’est l’hypothèse où le juge est lié. Pourquoi est-il lié ? Parce que le législateur lui impose soit de ne pas sanctionner, soit de sanctionner en aggravant. A) Les causes d’exemption de peine Auparavant appelées les « excuses absolutoires ». Certains auteurs utilisent encore la formule, plutôt parlante. On peut utiliser l’une ou l’autre. Les causes d’exemption de peine visent à inciter la délation, la dénonciation. Ici, l’infraction n’est pas consommée. On incite le délinquant à dénoncer les personnes avec lesquelles il est en train de commettre une infraction. Cette incitation ne va pas faire disparaître sa responsabilité pénale. La personne est toujours coupable, mais ne pourra pas être condamnée, bien qu’il ait participé à une infraction. Ces dispositions s’appliquent principalement en matière de terrorisme, de proxénétisme, de stupéfiants, de crimes d’assassinat ou d’empoisonnement. Ex. art. 450-2 sur l’association de malfaiteurs : « Toute personne ayant participé au groupement ou à l'entente définis par l'article 450-1 est exempte de peine si elle a, avant toute poursuite, révélé le groupement ou l'entente aux autorités compétentes et permis l'identification des autres participants. » Art. 221-5-3 : exemption de peine pour l’auteur d’une tentative d’empoisonnement (avant consommation). Al. 2 évoque une réduction de peine pour la personne ayant empoisonné et ayant appelé les secours (après consommation). Ici, l’infraction n’a pas encore été consommée. « Toute personne qui a tenté de commettre des crimes d’assassinat ou d’empoisonnement est exempte de peine [= dispensée de] si, ayant averti l’autorité administrative ou judiciaire, elle a permis d’éviter la mort de la victime et d’identifier le cas échéant les autres auteurs ou complices. » Deux conditions : � Avertir les autorités. � L’échec de l’infraction. On retrouve cette même excuse absolutoire en matière d’association de malfaiteurs. Le juge est obligé de constater que la personne est coupable (participation à une tentative de meurtre, assassinat, préméditation…), mais est parallèlement obligé de ne pas la sanctionner. Ici, le juge est lié. Il ne peut pas prononcer de sanction.

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La finalité de ces excuses est d’essayer que les délinquants qui sont entrés dans un phénomène criminel dénoncent les co-auteurs. C’est une prime à la délation. L’infraction n’est pas consommée. B) Les causes de réduction de peine L’infraction a ici déjà été consommée. La peine sera amoindrie. En 1810, le législateur avait prévu une excuse de provocation pour notamment le mari jaloux qui tuait l’amant de sa femme lorsqu’il l’a découvrait avec lui au domicile conjugal. Il bénéficiait d’une diminution automatique de la sanction. Cela existait aussi en matière de coups et blessures volontaires non suivis de mort (une personne se sent provoquée, n’est pas en état de légitime défense, mais elle admet de cette diminution de peine tout de même). En 1994, la loi a supprimé le minimum légal. On peut descendre très bas dans l’échelle des peines. L’excuse de provocation a été supprimée. Parallèlement existaient dans le C. Pén. les excuses des repentis. Le repenti, c’est quelqu’un qui a participé à une infraction, et qui, va dénoncer les personnes qui ont commis l’infraction. Art. 221-5-3 est une hypothèse de repenti : on prévoit de réduire la peine, mais de manière impérative. C’est le législateur qui décide que la sanction, la peine encourue, sera de moitié à celle initialement prévue. La réclusion à perpétuité s’applique en principe pour un assassinat : si on dénonce, on passe à 20 ans Les repentis ont été introduits par une loi du 9 septembre 1986. C’est le lendemain d’une vague d’attentats à Paris. Les repentis ont surtout été utilisés en Italie. La diminution de peine automatique est à l’origine italienne. On a élargit l’hypothèse aux stupéfiants, meurtre, terrorisme. En matière de minorité, le juge est obligé de couper la peine encourue en deux pour les mineurs de 13 à 16 ans. C’est l’excuse de minorité. Elle est obligatoire pour le juge pour les 13-16 ans. Si la peine encourue est de 10 ans, on divise par 2 et le juge pourra prononcer au maximum une peine de 5 ans. Après 16 ans, l’excuse de minorité est facultative. Les enlèvements et séquestrations arbitraires : art. 224-1. Lorsqu’il y a un enlèvement, la personne encoure 20 ans de réclusion criminelle. Le dernier al. précise « toutefois, si la personne détenue ou séquestrée est libérée volontairement avant le 7ème jour accompli depuis son appréhension, la peine est de 5 ans d’emprisonnement et de 75000 € d’amende. En libérant l’enfant enlevé, la peine est moindre. Le magistrat doit tenir compte des réductions prévues par la loi. C) Les circonstances aggravantes Ce sont des circonstances qui vont alourdir la pénalité encourue. La peine sera plus sévère, ou alors changera de nature. L’infraction changera donc de nature. L’art. 311-1 prévoit pour le vol simple une sanction de 3 ans d’emprisonnement et 45 000 € d’amende. L’art. 311-4 prévoit une peine de 5 ans d’emprisonnement et de 75 000 € d’amende, dans 9 hypothèses. Ex. lorsque le vol est commis en réunion (auteur – complice), ou avec violence (bousculade).

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Lorsque l’on a deux circonstances réunies, le vol est sanctionné alors par une peine de 7 ans d’emprisonnement et 100 000 € (vol commis dans un transport public en réunion). On passe à la catégorie 10 ans d’emprisonnement lorsque l’on a 3 circonstances : vol avec violence en réunion dans les transports publics. Une aggravation fait que le vol devient crime lorsqu’il est commis avec usage d’une arme et en bande organisée. On passe à 30 ans de réclusion criminelle. Le vol simple avec arme, c’est 20 ans de réclusion criminelle (art. 311-8). Une arme peut être un canif suffisamment long ou un pistolet d’alarme (arme factice). On les retrouve définies généralement dans le Code aux art. 132-71. On distingue 3 catégories de circonstances aggravantes : - Les circonstances aggravantes réelles, c’est-à-dire les circonstances aggravantes relatives à l’infraction elle-même. Ex. le vol en réunion, le vol par effraction, avec arme… Même si le complice n’est pas armé, il sera poursuivi pour vol à main armée. - Les circonstances aggravantes personnelles : elles sont liées au passé judiciaire de l’auteur (récidive). Cette circonstance n’a aucun effet sur le complice. - Les circonstances mixtes : elles vont être retenues pour les auteurs et pour les complices. Ex. la préméditation. Les circonstances aggravantes nouvelles sont par exemple celles de la bande organisée. Il y en a qui sont liées à un mobile, c’est-à-dire l’appartenance ethnique ou religieuse de la victime. D) Les concours d’infractions Il y a une question de terminologie. On parle de concours réels d’infractions et concours idéals d’infractions (de qualifications). - Le concours idéal : c’est lorsque l’on a un fait unique qui est visé par 2 qualifications pénales. Ces 2 qualifications pénales correspondent à 2 valeurs protégées. Ces valeurs protégées se trouvent en principe dans deux titres distincts du C. Pén. La question qui se pose est celle de savoir si pour ce fait unique on peut ou pas cumuler les qualifications pénales. La réponse est oui, parce que le juge considère que par le comportement unique, l’auteur a porté atteinte à deux valeurs protégées de nature distincte. Cela résulte de la JP (décision du 3 mars 1960) : un individu ayant jeté une grenade dans un café pendant la guerre d’Algérie. La grenade n’a pas explosé, mais la personne a été poursuivie pour tentative d’assassinat et pour tentative de destruction par explosif. Le premier crime porte atteinte à la vie des personnes (livre II), le deuxième porte atteinte à la propriété (livre II). Ici, un seul agissement, mais deux infractions (donc 2 qualifications pénales sur le casier judiciaire). Le concours idéal n’est pas un problème de choix de qualification ! Pour un fait unique portant atteinte à la propriété, et une hésitation entre le vol et l’abus de confiance (un vendeur travaillant au rayon micro vole un livre), on se demande pourquoi on le poursuit. Lorsque l’on travaille, on raisonnera pour abus de confiance. Si en revanche, le vol est commis dans les objets qu’on ne vend, c’est juste un vol. Ici, c’est alternatif, et pas une hypothèse de cumul, parce que la valeur protégée, la propriété, est protégée du vol et de l’abus de confiance. - Le concours réel : ici, on a 2 faits distincts, avec un § précis dessus (art. 132-2 et s. C. Pén.). On a une première infraction commise, mais pas encore jugée définitivement.

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Un vol est commis le 1er du mois, et le 15 il s’empare d’un n° de CB et commet une escroquerie. Ces deux infractions ne sont pas séparées par une condamnation définitive (pas d’arrestation). Ici, les infractions sont en concours, se suivent. On parle de concours réel, et le problème est de savoir quelle sanction prononcer. Avant 1994, existait le principe du non cumul des peines. On ne pouvait pas cumuler les peines prévues pour la 1ère infraction avec celles prévues pour la 2ème, car le législateur trouvait que les autorités avaient été défaillantes, c’est-à-dire qu’on n’avait pas prévenu le délinquant de la gravité de son acte, puisqu’on ne l’avait pas condamné (on pensait qu’il avait droit à une impunité). Ce principe existait pour les crimes et délits. En revanche, en matière de contravention, le principe du cumul des peines a toujours existé (les 10 excès de vitesse seront cumulés au regard de la sanction). Le principe du non cumul a disparu en partie en 1994. Désormais, on pourra cumuler les peines prévues pour la 1ère infraction et celles prévues pour la 2ème. Il faut nuancer : on ne peut pas condamner les personnes à 70 ans de prison comme en Angleterre. Il faut distinguer 2 hypothèses : - la poursuite unique : ici, l’individu a commis son vol le 1er du mois, l’escroquerie le 15 et est arrêté le 30. Il est poursuivi pour vol et escroquerie. L’art. 133 dit qu’il ne peut être prononcé qu’une seule peine de cette nature dans la limite du maximum légal le plus élevé. Le juge ne peut pas prononcer une peine supérieure au maximum légal de l’infraction la plus grave. Ex. le vol, c’est 3 ans, l’escroquerie 5 ans : 3 + 5 = 8. Le législateur interdit de cumuler, mais accepte que l’on prononce la peine la plus grave, c’est-à-dire 5 ans. Le juge prononcera en réalité 4 ans. On applique cela pour les peines d’emprisonnement et pour les peines d’amende. C’est le cumul des peines, mais limité. Lorsque les poursuites sont séparées, art. 132-4, car les délinquants bougent beaucoup, on condamne pour escroquerie à une peine de 3 ans d’emprisonnement, et ultérieurement un autre tribunal va être amené à examiner une autre infraction. Comme la condamnation de 3 ans a été prononcée par le 1er tribunal, le 2ème tribunal pourra prononcer une peine - selon l’art. 132-4 - « cumulativement dans la limite du maximum légal le plus élevé ». On va pouvoir avoir des condamnations successives qui vont aboutir à un alourdissement pour le délinquant. Il y a une échappatoire, c’est de demander au tribunal la confusion des peines. Ex. 3 ans d’emprisonnement pour le vol, 5 pour l’escroquerie. La personne est condamnée à 3 ans pour escroquerie, puis à 1 an pour le vol, soit 4 ans. Il peut demander à ce que la peine pour l’escroquerie englobe celle pour le vol. C’est facultatif pour le tribunal, et cela permet d’échapper à une sanction plus lourde dans le cas de poursuites séparées. � On cumule dans la limite du maximum. � S’il y a deux juridictions, il y a un alourdissement du prononcé de la sanction. Depuis la loi du 15 décembre 2005 (loi nouvelle sur la récidive), on parle de réitération de l’infraction. Ce sont 2 infractions qui se commettent, mais la première est sanctionnée par une décision définitive du tribunal. Pas de concours réel. Le délinquant commet une deuxième infraction après un vol, un an plus tard, comme des violences (coups et blessures volontaires). Ce n’est pas une hypothèse de récidive. Art. 132-16-7 de la loi du 15 décembre 2005 précise que les peines prononcées pour la 2nde infraction ne pourront jamais bénéficier d’une confusion avec les premières peines prononcées. C’est

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un alourdissement pour le délinquant, et en même temps pour le juge une interdiction d’individualiser la peine. E) La récidive Art. 132-8 C. Pén. On a un individu qui commet une infraction, est condamné, et le 1er terme est la condamnation qui doit être définitive. Il n’y a plus de voie de recours. C’est le 1er terme de la récidive. Puis, dans un certain délai, le délinquant commet une nouvelle infraction. Le 2ème terme est la nouvelle infraction (pour le concours réel, pas de condamnation entre les deux). La récidive est une circonstance aggravante personnelle ayant pour effet de doubler la peine encourue. On a donc : - 1er terme : condamnation, avec prise en compte de la peine encourue (Ex. vol aggravé, peine encourue de 7 ans est retenue). La juridiction doit être prononcée par une juridiction française. Mise en œuvre de la pénalité encourue : art. 132-8 à 132-11. Il y a 4 hypothèses : � 1er terme de la récidive est un crime ou délit punissable de 10 ans d’emprisonnement, 2ème terme de la récidive est un crime. Auparavant appelée la « grande récidive ». C’est l’art. 132-8. Ici, la récidive est générale (quelque soit la nature du 2ème crime) et perpétuelle (pas de délai entre la condamnation première et le deuxième fait). Ex. un viol en 1980, puis un vol à main armée 15 ans plus tard. � Crime ou délit punissable de 10 ans d’emprisonnement, 2ème infraction est un délit. Art. 132-9 : ici, la récidive est temporaire. Le délit est punissable de 10 ans. S’il y a un délai de 10 ans à compter non pas de la décision de condamnation mais de l’expiration de la peine (après exécution de la peine), et qu’un délit est commis, il y a un état de récidive. Art. 132-9 : dans cette 2ème hypothèse, le délit est puni de moins de 10 ans, mais il y aura récidive. On parle de récidive temporaire car il y aura un délai. La récidive spéciale temporaire : art. 132-10, la personne a été poursuivie pour une peine délictuelle, et 5 ans à compter de l’expiration de la peine un nouveau délit est commis. C’est une récidive temporaire. Il faut un délit identique ou assimilé. Le législateur du 15 décembre 2000 est venu donner des précisions. On considère comme assimilés des délits de même nature (vols, escroquerie). En revanche, dans la loi du 15 décembre 2000, le législateur considère que les infractions commises avec violence sont assimilées au regard de la récidive avec les infractions de violences volontaires aux personnes (art. 132-16-4 de la loi nouvelle). Une personne commettant des coups et blessures volontaires, puis 5 ans après l’expiration de la peine une atteinte à la propriété avec violences, c’est une récidive temporaire et spéciale. Lorsque la personne est en état de récidive, il peut y avoir mandat de dépôt. Le magistrat est libre, mais demain, certains politiques considèrent que le magistrat perdra sa liberté et devra prononcer la peine automatiquement. � Peine correctionnelle, délictuelle, puis un autre délit. � Contraventions : de la 1ère à la 4ème classe, il n’y a pas de récidive. Il n’y a pas de récidive pour les contraventions, sauf pour la 5ème classe. -