DST n°1 - lettrines.netlettrines.net/.../1e-Devoir-Heros-combat_corrige.pdf · Texte A - François Rabelais, Gargantua, édition de 1542 Au cours des guerres picrocholines, l’abbaye

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  • DST n1Date : Jeudi 19 septembre 2013 Dure de lpreuve : 1h30

    Nom du professeur : M. DANSET Classe : 1S2

    Matriel autoris : AucunMatriel autoris : Aucun

    Consignes particulires : Laissez la premire page vierge, hormis les informations dusage (nom, prnom, classe, date,

    intitul du devoir). Commencez rdiger sur la page 2. Conservez le sujet avec vous.

    Bon courage !

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    Bon courage !

    Objet dtudeLe personnage de roman du XVIIe sicle nos jours

    CorpusTexte A - Franois Rabelais, Gargantua, 1542Texte B - Miguel de Cervants, Don Quichotte, 1605Texte C - Voltaire, Candide, 1759Texte D - Flaubert, Lducation sentimentale, 1869

    Question de synthse sur le corpus (4 points)Examinez les similitudes entre les personnages de ce corpus, puis montrez comment, travers

    leurs diffrences, ils servent les intentions des auteurs.

    lments de corrig

    PlanI. Des hros parodiques et burlesques (Don Quichotte est une parodie de chevalier ; Frre

    Jean, un hros tonnant et un moine burlesque ; Candide, un hros apeur et quelque peu inconscient ; Frdric, un hros effac qui ne comprend rien)

    II. Le burlesque au service dintentions diffrentes (Grce aux excs burlesques de Frre Jean et sa dfense du vin, Rabelais fait une satire des moines - rappelons que la satire mle rire et critique - ; Cervants parodie les romans de chevalerie avec son personnage fou ; Voltaire dnonce par la voie comique lhorreur de la guerre et rcuse ainsi loptimisme de Leibniz ; enfin, Flaubert ne prend plus rien au srieux : ni son hros compltement dcal, ni la rvolution de 1848, comique et dsacralise)

    Pour la mthode de composition de la rponse, et notamment laspect rdactionnel, je vous renvoie aux documents en ligne sur Lettrines (diaporama, copies dlves).

    Squence I

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  • Texte A - Franois Rabelais, Gargantua, dition de 1542

    Au cours des guerres picrocholines, labbaye de Seuilly est assaillie : cest Frre Jean des Entommeures* qui en sauve le clos hardiment, aprs avoir harangu les moines.

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    En l'abbaye il y avait alors un moine du clotre nomm frre Jean desEntommeures*, jeune, galant, gaillard, ardent, trs adroit, hardi, aventureux, rsolu, grand, maigre, bien fendu de gueule, bien avantag en nez, beau dpcheur d'heures, beau dbrideur de messes, beau dcrotteur devigiles**, pour tout dire sommairement vrai moine sil en fut jamaisdepuis que le monde moinant moina.

    Celui-ci, en entendant le bruit que faisaient les ennemis par le clos de leur vigne, sortit pour voir ce qu'ils faisaient, et prenant conscience qu'ils vendangeaient le clos do provenait leur boisson pour toute lanne, retourne au chur de l'glise, o taient les autresmoines, tous tonns comme des fondeurs de cloches ; en les voyant chanter im, im, im, pe, e, e, e, e, e, tum, e, tum, um, in, i, ni, i, mi, co, o, o, o, o, o, rum, um***, il leur dit : C'est bien chien chant !Par la vertu de Dieu ! que ne chantez-vous : Adieu paniers, les vendanges sont faites ?

    Je me donne au diable s'ils ne sont pas dans notre enceinte, et coupent tant et si bien les ceps et les raisins qu'il n'y aura, par le corps de Dieu, rien grappiller dedans pendant quatre ans ! Ventre Saint-Jacques ! que boirons-nous pendant ce temps-l, nous autres, pauvres diables ? Seigneur Dieu,da mihi potum !

    Alors leprieurdu clotre dit : Que fait cet ivrogne ici ? Qu'on me le mne en prison. Troubler ainsi le service divin !

    - Mais, dit le moine, et le service du vin, faisons en sorte quil ne soit pas troubl, car vous-mme, monsieur le prieur, aimez boire, et du meilleur, comme tout homme de bien. Jamais homme noble ne hait le bon vin, c'est une maxime monacale. Mais ces rpons que vous chantez ici ne sont, par Dieu ! Point de saison. [...] coutez, vous, messieurs ; qui aime le vin, par le corps de Dieu, quil me suive ! [...]

    En disant cela, il enleva son grand habit et se saisit du bton de la croix qui tait en cur de cormier, long comme une lance, rond plein poing, et quelque peu sem de fleurs de lys, toutes presque effaces.

    Ainsi il sortit en bellecasaque, mit sonfrocen charpe. Et de son bton de la croix, il frappa si brusquement sur les ennemis qui, sans ordre ni enseigne, ni trompette ni tambourin, vendangeaient parmi le clos, - car les porte-fanion et les porte-drapeau avaient mis leurs fanions et drapeaux le long des murs, les tambourineurs avaient dfonc leurs tambourins d'un ct pour les emplir de raisins, les trompettes taient charges de branches de vigne, les troupes taient disperses -, il choqua donc si roidement sur eux sans crier gare, qu'il les renversait comme des porcs, frappant tort et travers, la vieilleescrime.

    Aux uns il crabouillait la cervelle, aux autres il rompait bras et jambes, aux autres il dbotait les vertbres du cou, aux autres il disloquait les reins, faisait tomber le nez, pochait les yeux, fendait les mandibules, enfonait les dents dans la gueule, dfonait les omoplates, meurtrissait les jambes, luxait les hanches, fragmentait les jointures. []

    Si quelqu'un voulait se sauver en fuyant, celui-ci il faisait voler la tte en pices par la commissure lambdode.Si quelqu'un montait dans un arbre, en pensant y tre en sret, il empalait celui-ci sur son bton par le derrire.[] Je vous prie de croire que c'tait le plus horrible spectacle quon ait jamais vu.

    * Entommeures peut tre traduit par hachis** Vigiles : prires*** Impetum inimicorum : les moines chantent lattaque des ennemis de faon ridicule.

    Squence I

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  • Texte B - Miguel de Cervants, Don Quichotte, 1605

    Peu aprs avoir quitt son village en qute de Dulcine, la princesse de ses rves, don Quichotte sarrte une auberge, quil se figure tre un chteau, afin dy tre adoub chevalier. Tandis quil commence sa veille darmes la tombe de la nuit, un muletier va donner de leau ses btes.

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    En ce moment, il prit fantaisie lun des muletiers qui staient hbergs dans la maison daller donner de leau ses btes, et pour cela il fallait enlever de dessus lauge les armes de don Quichotte ; lequel, voyant venir cet homme, lui dit haute voix:

    toi, qui que tu sois, tmraire chevalier, qui viens toucher les armes du plus valeureux chevalier errant qui ait jamais ceint lpe, prends garde ce que tu fais, et ne les touche point, si tu ne veux laisser ta vie pour prix de ton audace.

    Le muletier neut cure deces propos, et mal lui en prit, car il se ft pargn celle de sa sant ; au contraire, empoignant les courroies, il jeta le paquet loin de lui ; ce que voyant, don Quichotte tourna les yeux au ciel, et, levant son me, ce quil parut, vers sa souveraine Dulcine, il scria:

    Secourez-moi, ma dame, en cette premire offense quessuie ce cur, votre vassal ; que votre aide et faveur ne me manquent point dans ce premier pril.

    Et tandis quil tenait ces propos et dautres semblables, jetant sa rondache, il leva sa lance deux mains, et en dchargea un si furieux coup sur la tte du muletier, quil le renversa par terre en si piteux tat, quun second coup lui et t tout besoin dappeler un chirurgien. Cela fait, il ramassa ses armes, et se remit marcher de long en large avec autant de calme quauparavant.

    Peu de temps aprs, et sans savoir ce qui stait pass, car le muletier gisait encore sans connaissance, un de ses camarades sapprocha dans la mme intention dabreuver ses mules. Mais, au moment o il enlevait les armes pour dbarrasser lauge, voil que, sans dire mot et sans demander faveur personne, don Quichotte jette de nouveau son cu, lve de nouveau sa lance, et, sans la mettre en pices, en fait plus de trois de la tte du second muletier, car il la lui fend en quatre. Tous les gens de la maison accoururent au bruit,et lhtelier parmi eux. En les voyant, don Quichotte embrassa son cu, et, mettant lpe la main, il scria:

    dame de beaut, aide et rconfort de mon cur dfaillant, voici le moment de tourner les yeux de ta grandeur sur ce chevalier, ton esclave, que menace une si formidable aventure.

    Ces mots lui rendirent tant dassurance, que, si tous les muletiers du monde leussent assailli, il naurait pas recul dun pas. Les camarades des blesss, qui les virent en cet tat, commencrent faire pleuvoir de loin des pierres sur don Quichotte, lequel, du mieux quil pouvait, se couvrait avec son cu, et nosait sloigner de lauge, pour ne point abandonner ses armes. Lhtelier criait quon le laisst tranquille, quil leur avait bien dit que ctait un fou, et quen qualit de fou il en sortirait quitte, les et-il tus tous. De son ct, don Quichotte criait plus fort, les appelant tratres et mcrants, et disant que le seigneur du chteau tait un chevalier flon et malappris, puisquil permettait quon traitt de cette manire les chevaliers errants.

    Si javais reu, ajoutait-il, lordre de chevalerie, je lui ferais bien voir quil est un tratre ; mais de vous, impure et vile canaille, je ne fais aucun cas. Jetez, approchez, venez et attaquez-moi de tout votre pouvoir, et vous verrez quel prix emportera votre folle audace.

    Il disait cela dun air si rsolu et dun ton si hautain, quil glaa deffroi les assaillants, tellement que, cdant la peur et aux remontrances de lhtelier, ils cessrent de lui jeter des pierres. Alors don Quichotte laissa emporter les deux blesss, et se remit la veille des armes avec le mme calme et la mme gravit quauparavant.

    Squence I

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  • Texte C - Voltaire, Candide, 1759

    En 1759, Voltaire publie Candide, un conte philosophique qui remet en cause la philosophie de loptimisme de Leibniz au gr dun rcit plaisant et comique. Au dbut du conte, Candide est chass du chteau de Thunder-ten-Tronckh et se retrouve, au chapitre 3, au beau milieu dune bataille entre Bulgares et Abares*.

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    Rien ntait si beau, si leste, si brillant, si bien ordonn que les deux armes. Les trompettes, les fifres, les hautbois, les tambours, les canons, formaient une harmonie telle quil ny en eut jamais en enfer. Les canons renversrent dabord peu prs six mille hommes de chaque ct ; ensuite la mousqueterie ta du meilleur des mondes environ neuf dix mille coquins qui en infectaient la surface. La baonnette fut aussi la raison suffisante de la mort de quelques milliers dhommes. Le tout pouvait bien se monter une trentaine de mille mes. Candide, qui tremblait comme un philosophe, se cacha du mieux quil put pendant cette boucherie hroque.

    Enfin, tandis que les deux rois faisaient chanter desTe Deum, chacun dans son camp, il prit le parti daller raisonner ailleurs des effets et des causes. Il passa par-dessus des tas de morts et de mourants, et gagna dabord un village voisin ; il tait en cendres: ctait un villageabare que les Bulgares avaient brl, selon les lois du droit public. Ici des vieillards cribls de coups regardaient mourir leurs femmes gorges, qui tenaient leurs enfants leurs mamelles sanglantes ; l des filles, ventres aprs avoir assouvi les besoins naturels de quelques hros, rendaient les derniers soupirs ;dautres, demi brles, criaient quon achevt de leur donner la mort. Des cervelles taient rpandues sur la terre ct de bras et de jambes coups.

    Candide senfuit au plus vite dans un autre village : il appartenait des Bulgares, et des hros abares lavaient trait de mme. Candide, toujours marchant sur des membres palpitants, ou travers des ruines, arriva enfin hors du thtre de la guerre, portant quelques petites provisions dans son bissac, et noubliant jamais mademoiselle Cungonde.

    * Les Abares sont une peuplade dorigine mongole ; Voltaire dsigne en ralit ici lAutriche-Hongrie.

    Squence I

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  • Texte D - Flaubert, Lducation sentimentale, 1869

    Mme Arnoux, aime du hros, Frdric Moreau, lui a enfin accord un rendez-vous. Il lattendra en vain, pendant des heures, ce 22 fvrier 1848, au beau milieu dun Paris en pleine fivre rvolutionnaire.

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    Les tambours battaient la charge. Des cris aigus, des hourras de triomphe slevaient. Un remous continuel faisait osciller la multitude. Frdric, pris entre deux masses profondes, ne bougeait pas, fascin dailleurs et samusant extrmement. Les blesss qui tombaient, les morts tendus navaient pas lair de vrais blesss, de vrais morts. Il lui semblait assister un spectacle.

    Au milieu de la houle, par-dessus des ttes, on aperut un vieillard en habit noir sur un cheval blanc, selle de velours. Dune main, il tenait un rameau vert, de lautre un papier, et les secouait avec obstination. Enfin, dsesprant de se faire entendre, il se retira.

    La troupe de ligne avait disparu et les municipaux restaient seuls dfendre le poste. Un flot dintrpides se rua sur le perron; ils sabattirent, dautres survinrent; et la porte, branle sous des coups de barre de fer, retentissait ; les municipaux ne cdaient pas. Mais une calche bourre de foin, et qui brlait comme une torche gante, fut trane contre les murs. On apporta vite des fagots, de la paille, un baril desprit-de-vin. Le feu monta le long des pierres ; ldifice se mit fumer partout comme un solfatare ; et de larges flammes, au sommet, entre les balustres de la terrasse, schappaient avec un bruit strident. Le premier tage du Palais-Royal stait peupl de gardes nationaux. De toutes les fentres de la place, on tirait ; les balles sifflaient; leau de la fontaine creve se mlait avec le sang, faisait des flaques par terre ; on glissait dans la boue sur des vtements, des shakos, des armes ; Frdric sentit sous son pied quelque chose de mou; ctait la main dunsergent en capote grise, couch la face dans le ruisseau. Des bandes nouvelles de peuple arrivaient toujours, poussant les combattants sur le poste. La fusillade devenait plus presse. Les marchands de vins taient ouverts ; on allait de temps autre y fumer une pipe, boire une chope, puis on retournait se battre. Un chien perdu hurlait. Cela faisait rire.

    Squence I

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