25
Du rôle de la position dans l'indication des rapports syntaxiques: L'exemple du persan Author(s): Mortéza Mahmoudian Source: La Linguistique, Vol. 9, Fasc. 1 (1973), pp. 17-40 Published by: Presses Universitaires de France Stable URL: http://www.jstor.org/stable/30248839 . Accessed: 10/06/2014 11:01 Your use of the JSTOR archive indicates your acceptance of the Terms & Conditions of Use, available at . http://www.jstor.org/page/info/about/policies/terms.jsp . JSTOR is a not-for-profit service that helps scholars, researchers, and students discover, use, and build upon a wide range of content in a trusted digital archive. We use information technology and tools to increase productivity and facilitate new forms of scholarship. For more information about JSTOR, please contact [email protected]. . Presses Universitaires de France is collaborating with JSTOR to digitize, preserve and extend access to La Linguistique. http://www.jstor.org This content downloaded from 195.78.108.48 on Tue, 10 Jun 2014 11:01:35 AM All use subject to JSTOR Terms and Conditions

Du rôle de la position dans l'indication des rapports syntaxiques: L'exemple du persan

Embed Size (px)

Citation preview

Du rôle de la position dans l'indication des rapports syntaxiques: L'exemple du persanAuthor(s): Mortéza MahmoudianSource: La Linguistique, Vol. 9, Fasc. 1 (1973), pp. 17-40Published by: Presses Universitaires de FranceStable URL: http://www.jstor.org/stable/30248839 .

Accessed: 10/06/2014 11:01

Your use of the JSTOR archive indicates your acceptance of the Terms & Conditions of Use, available at .http://www.jstor.org/page/info/about/policies/terms.jsp

.JSTOR is a not-for-profit service that helps scholars, researchers, and students discover, use, and build upon a wide range ofcontent in a trusted digital archive. We use information technology and tools to increase productivity and facilitate new formsof scholarship. For more information about JSTOR, please contact [email protected].

.

Presses Universitaires de France is collaborating with JSTOR to digitize, preserve and extend access to LaLinguistique.

http://www.jstor.org

This content downloaded from 195.78.108.48 on Tue, 10 Jun 2014 11:01:35 AMAll use subject to JSTOR Terms and Conditions

DU ROLE DE LA POSITION DANS L'INDICATION

DES RAPPORTS SYNTAXIQUES L'EXEMPLE DU PERSAN

par Morteza MAHMOUDIAN

En persan parld A Teheran, le sujet, I'objet, et divers compl'ments n'ont pas de position pertinente, et jouissent de latitudes positionnelles analogues. Nous

essayons de decrire le cheminement complexe qui aboutit A 1'Ctablissement des fonctions syntaxiques, en examinant les facteurs qui sont A la base de ces latitudes

positionnelles. En conclusion, un classement est propose pour hikrarchiser les monemes

selon le degr6 d'autonomie.

Les trait6s de grammaire persane, quand ils ne passent pas sous silence l'ordre des el6ments constitutifs de la phrase', leur

assignent g6n6ralement I'ordre : sujet-compl6ment-verbe. Les travaux rdcents ne changent rien "a cet 6tat de choses2. Il est intdressant de remarquer qu'en admettant cet ordre, force nous est de constater I'existence d'exceptions dont le nombre est consi- ddrable, et au sujet desquelles aucune regle ne peut etre formul6e3.

Il semble evident que l'ordre S + C + V est celui qu'on rencontre le plus frdquemment dans les textes littdraires. Le persan parld

. Tehdran admet, au contraire, dans la position des 6l1ments,

une libertd considdrablement plus grande. Nous nous proposons de rechercher ici les moyens mis en ceuvre en persan parlh pour l'indication des rapports syntaxiques, et la part qu'y tient la suc- cession lindaire.

x. Cf. Abdol-Azim QARIB, et al., Dastur-e zaban-e fdrsi, T6heran, Ketabxmne

Markazi. 2. Bateni retient l'ordre sujet-objet-pr6dicat. Cf. Mohammad-RezA BATENI, Tousif-e daturi-e

zab4n-e fdrsi, Th~6ran, Amir-e-kabir, g969, c 5-6. Lazard, Maikur et Sadeghi considArent cet ordre comme normal, fr6quent, et citent nombre d'exemples d6rogeant A cet ordre. Cf. Gilbert LAZARD, Grammaire du persan contemporain, Paris, Klincksieck, 1957, c 192-193; Mohammad-

lavad MASKUR, Dastur-name dar sarf o nahv-e zabdn-e pd.rsi, TUh6ran, Mo'asese-ye matbu'ati-e Sarq, 1338 (1960), c 595-596; Ali-Achraf SADEGHI, L'indication des fonctions grammaticales en persan, Paris, Sorbonne, 1967 (th6se inedite), p. 6-io.

3. Sadegh pr6cise que l'ordre peut bien varier s'il n'y a pas de risque d'ambiguit6. Cf. op. cit., p. 8.

This content downloaded from 195.78.108.48 on Tue, 10 Jun 2014 11:01:35 AMAll use subject to JSTOR Terms and Conditions

x8 MORTAZA MAHMOUDIAN

I. LA STRUCTURE ELEMENTAIRE

Il convient d'exposer d'abord en grandes lignes la structure

eldmentaire de la phrase. Nous pourrons ensuite priciser les carac-

teristiques des classes de monemes (verbe, pronom, etc.), ainsi

que celles des fonctions (sujet, objet, etc.). Nous nous bornerons ici aux inoncis a predicat verbal.

L'dnonce minimum consiste en : syntagme verbal + modalite verbale << personne >>. Ex. :

(I) mi-d-d << ind. pris. + venir + 3. sg. >>; donc << (il) vient >> (2) mi-xor-e << ind. pr. + manger + 3. sg. >>; << (il) mange >>

(3) raf-t << aller + prdterit + 3. sg. >> (ce dernier etant represente ici par le signifiant zero); << (il) alla >>'.

Le moneme verbal est - comme le montrent les exemples ci-dessus - toujours accompagnd d'une ou plusieurs modalits : mi- << indicatif present >> dans

I) et 2), -t << preterit >> dans 3).

Etant donne le cadre de cette discussion, la presence ou l'ab- sence des modalitis temporelles et modales ne presente aucun int&ret : nous pouvons donc en faire abstraction. Le terme syn- tagme verbal s'entend comme I'assemblage du mondme verbal avec ses 6ventuelles modalitis, a l'exception de la modalite verbale << personne >>.

Au niveau de la structure de l'inonce minimum, le compor- tement du syntagme verbal n'appelle guere de remarque parti- culiere. Quant a l'autre terme de l'inonci minimum, c'est-A-dire la modalite verbale << personne >>, on doit noter qu'il est : a) gram- matical, b) uninuclkaire, c) unirelationnel, d) actualisateur du

predicat verbal, e) non commutable avec les monemes d'un autre

paradigme, f) non expansible. Le caractere grammatical (a) de ce paradigme est mis en

evidence du moment qu'on constate que l'inventaire est limite a 6 unites.

4. Comme traduction, nous donnons les mon~mes constitutifs de l'6nonc6 persan dans l'ordre de leur apparition, suivis d'un 6quivalent approximatif en 6nonc6 francais.

5. A c6t6 de la forme zero, tres largement r6pandue, il existe une autre variante morpho- logique en -e' (donc raft-ec au lieu de raft). Nous ne tenons compte ici que de la forme i signifiant zero, &tant donn6 que l'autre n'est que d'un usage restreint. Morphologiquement, une question peut se poser : -t est-il le signifiant du < pr6terit >>, 6tant donn6 qu'il apparait aussi dans raftan

<< aller)> et xdlham raft<< j'irai>> ? Quelle que soit la forme de son signifiant, nul doute que le < pr6tbrit > est present dans (3).

This content downloaded from 195.78.108.48 on Tue, 10 Jun 2014 11:01:35 AMAll use subject to JSTOR Terms and Conditions

L'EXEMPLE DU PERSAN 19

Par uninuclhaire (b), on entend que ces mondmes ne peuvent etre subordonnes qu'a une seule classe de mondmes. En l'occur- rence, seuls les mondmes appartenant

' la classe du verbe peuvent en etre noyaux.

Le caractbre unirelationnel (c) du paradigme implique que les membres de ce paradigme ne peuvent entretenir qu'un seul

type de relation avec le noyau auquel ils sont subordonnes. Dans le cas present, le type de relation peut etre appel6 << agent >A.

Une remarque semble s'imposer au sujet des points b) et c) : la fonction d'un mon6me est done conque comme la somme totale de relation + point d'incidence'.

La pr6sence de ces mon6mes dans un syntagme verbal suffit

pour constituer un syntagme predicatif; de ce fait, ils sont carac- terises comme actualisateurs (d).

Leur presence est non seulement suffisante, mais aussi neces- saire a I'actualisation du predicat verbal : il en decoule que d'au- tres mondmes ne peuvent commuter (e) avec eux.

Ils ne peuvent recevoir aucune expansion (f) que ce soit du type coordonne ou du type subordonnd.

Les critbres a) Af) permettent de distinguer trois classes dans les paradigmes grammaticaux de << personne > que nous disi-

gnerons par les termes pronoms personnels, modalites verbales de << personne >> et modalites verbo-nominales de << personne >>. Les caracteristiques syntaxiques de ces paradigmes peuvent etre recapitulkes dans le tableau suivant :

Inventaires

Pronoms Modalitis Mod. personnels verb. verbo-nom.

I. sg. man -am -(a)m 2. sg. to -i - (e) t

3. sg. u (n) -e (ou zero) -(e)I i. pl. md -im - (e)mun 2. pl. Somd -in - (e) tun 3. pl. und (ou iun) -an - (e)sun

6. La pertinence syntaxique des differences s6mantiques (par ex. << agent >>/<< patient >>) n'6tant pas mise en 6vidence, nous ne pouvons pas encore employer des termes comme << sujet >>, << objet >>.

7. Cf. Fr6d6ric FRANgOIS, De l'autonomie fonctionnelle, La linguistique, 197o, 6/I, p. 5-21; Mort6za MAHMOUDIAN, Les modalitis nominales en franfais, Paris, Presses Universitaires de France, r970, c III.7.

This content downloaded from 195.78.108.48 on Tue, 10 Jun 2014 11:01:35 AMAll use subject to JSTOR Terms and Conditions

20 MORTfZA MAHMOUDIAN

Caracteristiques syntaxiques Pronoms Modalites Modalitis

personnels verb. verbo-nom.

a) grammatical + + + b) uninucldaire - c) unirelationnel + d) actualise pr. v. + e) commutable avec

lexeme + + f) expansible +

Les pronoms personnels et les modalites verbo-nominales sont

plurinucleaires; ils peuvent etre subordonnes au verbe ou au nom. Ex. :

pr. pers. : md na-did-im < nous ne vimes pas >>

xune-y-e md << maison de nous (notre maison) >> mod. verbo-nom. : didam-et << je te vis >>

ketdb-et < livre toi (ton livre) c.

Ils sont plurirelationnels, peuvent done entretenir plus d'un type de relation avec le noyau, quand celui-ci l'admet :

pr. pers. : az md gereft << de nous il prit (il nous a pris a nous) > be md goft << a nous il dit (il nous a dit) >>

mod. verbo-nom. : az-es gereftam < de lui je pris (je lui ai pris 'a lui) c

be-(h)es' goftam << a lui je dis (je lui ai dit a lui) >>.

Ils ne peuvent pas actualiser le verbe; pour cela, la presence d'une modaliti verbale < personne > est indispensable. Il n'existe donc pas d' dnoncis minima comme *mdi did<< nous + voir + pre- terit > ni *migir-emun < pr. ind. + prendre + nous o.

Ils sont commutables avec des monemes d'autres classes, subs- tantifs, par ex. :

Pr. pers. : xune-ye md << notre maison > / xune-ye parviz << maison de Parviz >

mod. verbo-nom. : ketdb-et << ton livre >> / ketab-e parviz << livre de Parviz o

Pr. pers. : az md << de nous >> mod. verbo-nom. : az-emun < de nous azparvizr de Parvizc

This content downloaded from 195.78.108.48 on Tue, 10 Jun 2014 11:01:35 AMAll use subject to JSTOR Terms and Conditions

L'EXEMPLE DU PERSAN 21

Les deux paradigmes se distinguent du point de vue des pos- sibilites d'expansion : les modalites verbo-nominales n'admettent aucune expansion. Les pronoms personnels admettent, au contraire, toutes les expansions par coordination, ainsi que cer- taines expansions par subordination :

coordination : man o to < moi et toi >> yd man yd parviz << ou moi ou Parviz >

subordination : man e xaste < moi de fatigue (moi fatigue) > somd ke rd ro baladin < vous qui connaissez le chemin >.

Rappelons que l'analyse morphologique n'est pas exhaustive. Certaines questions n'ont pas 6te discutees, mais tranchees. Ainsi dans xunal, nous considerons -S comme variante de -es, et xuna comme variante de xune.

2. LE SUJET

A cet 'nonce minimum, on peut ajouter des elements pluri- fonctionnels : grammaticaux : man << moi >>, to < toi >>, un << lui, cela >, etc., ou lexicaux : parviz < Parviz (nom propre) >>, javun << jeune >>, gdv << vache >>, alaf<< herbe >>, nun << pain >>, xune < mai- son >>, etc.

On obtiendra :

(4) man raftam << moi j'allai >> (5) to rafti < toi tu allas >> (6) un raft << lui il alla >>8 (7) parviz midd < Parviz vient >> (8) javun midd < (le) jeune vient >>

(9) gdv mizane < (la) vache frappe >>

(Io) alaf suxt < (1') herbe brfila >>

(iI) nun suxt < (le) pain brila >>

(12) xune suxt < (la) maison brila >>.

Ces expansions ont ceci de particulier qu'elles appellent la presence d'une modalitd verbale de personne et excluent les autres modalites verbales : un, parviz, gdv, etc., impliquent la

presence de < 3. sg. >>; man appelle I. sg. >> et to < 2. sg. >>. Ces

8. Il n'y a pas de distinction de genre ni de sexe en persan. Pour simplifier, nous rendons <<3. sg. >> par il ou lui, au lieu de presenter chaque fois les alternatifs, il et elle.

This content downloaded from 195.78.108.48 on Tue, 10 Jun 2014 11:01:35 AMAll use subject to JSTOR Terms and Conditions

22 MORTIkZA MAHMOUDIAN

expansions neutralisent donc l'opposition entre les actualisateurs; c'est a elles que nous reservons dans la suite le terme sujet, la fonction des modalitis verbales de personne etant appelke actua- lisation. Nous verrons que sujet et actualisateur ont des compor- tements diffdrents.

Le sujet n'a pas de place fixe en persan. II peut &tre antepos6 ou postpose au syntagme predicatif sans entrainer de diff6rence sur le plan syntaxique :

(I3) midd parviz (14) mizane gdv.

Ce qui distingue (7) et (9) d'une part et (13) et (14) de l'autre, c'est la mise en valeur stylistique du verbe dans les deux derniers.

Signalons aussi que le sujet peut etre ddpourvu de toute deter- mination grammaticale. Ainsi dans (4)-(I4), le sujet est un monbme sans modalite (= moneme nu).

3. COMPLMENTS

Voici des exemples d'un autre type d'expansion possible a l'dnonce minimum :

(15) xune mire << maison, pr. ind., aller, 3. sg. (il va A la maison) >>

(16) tanhd mire << seul, - - - (il va seul) >> (17) zud midd << t6t, - venir, - (il vient t6t) >>

(18) tond midd << vite, - - - (il vient vite) >>

(19) yavdc mixore << lentement, - manger, - (il mange lentement) >> (20) nun mixore << pain, - - - (il mange du pain) >>

Ces expansions se caract&risent par le fait que : a) leur posi- tion est libre, comme c'est le cas du sujet, b) leur presence ne neutralise pas - a la diff6rence du sujet - l'opposition entre les actualisateurs. Comparez :

(21) xune mi-r-am << maison, pr. ind., aller, i. sg. (je vais B la maison) >>

(22) - i - - - 2. sg. (tu vas A la maison) >>

(23) - an - - - 3. pl. (ils vont A la maison) >>

Les expansions qui prdsentent les deux traits a) et b) seront

appeldes compldments. Ainsi ddfini, le compldment n'est pas une fonction (fonction prise dans le sens strict du terme), mais un ensemble de fonctions. Et c'est A cet ensemble de fonctions que nous nous rdf6rons chaque fois que nous employons le terme

This content downloaded from 195.78.108.48 on Tue, 10 Jun 2014 11:01:35 AMAll use subject to JSTOR Terms and Conditions

L'EXEMPLE DU PERSAN 23

compldment. Noter que dans (I5)-(23), le compldment est tou-

jours un moneme nu; il n'est accompagne ni de modaliti ni d'indicateur de fonction.

4. SUJET ~ COMPLEMENT

La comparaison des deux inventaires, issus du c 2 et du c 3, revele des ressemblances et des diff6rences. En effet, les monemes : xune << maison >>, nun < pain >>, alaf << herbe >>, gdv << vache >>, etc., apparaissent tant en fonction sujet qu'en compldment. En revanche, sont spdcifiques a la fonction sujet les monemes comme man, to, un (pronoms personnels) parviz (anthroponyme), etc. Ne figurent qu'en complement les monemes du type tanhd seul >>, zud << t6t >>, tond << vite >>, yavdtis< doucement >.

On remarquera d'abord que dans un inonce comportant un

syntagme predicatif comme raft << alla >>, midd << vient >> et un

d1ment du type tanhd, zud, tond, il n'y a aucune difficult ' iden-

tifier la fonction de ces derniers. Ainsi dans (I6)-(I9). I1 convient aussi de noter que Ia oi l1'6nonce comporte un syntagme predicatif du type mixore, raft, midd et un eldment comme un, parviz, l'iden- tification de la fonction de ces derniers ne pose pas non plus de

problhme, le sujet etant la seule fonction que peuvent remplir ces monemes. Ainsi dans (4)-(7). Par contre, quand le syntagme prddicatif (raft<< alla>>, xord<< mangea>>, zad<< frappa >) est accompa- gn' d'un mon~me du type nun, xune, alaf, gdv, on ne pourra dire a priori si celui-ci est sujet ou complement. IL y a, en effet, syncr6- tisme entre les deux types de fonctions9; (24) xune raft peut signifier

c il alla a la maison >> ou << la maison alla (est partie, perdue, au jeu par exemple) >. De mame (25) gdv zad signifie soit < il frappa >>, abattit (une, des) vache(s) >>, soit << (la) vache frappa, battit >. Ou encore xune-hd raftan << litt. maisons allkrent >> peut signifier < ils allkrent a des maisons >> ou << les maisons allkrent, sont

perdues >>. Certes, ce syncretisme n'existe pas dans xunehd raftim < maisons allames >; la presence de l'actualisateur -im I. pl. c

montre que xunehd n'est pas sujet. Ceci vaut pour les quatre pro- noms personnels : I. sg., 2. sg., I. pl., 2. pl.10. Ainsi un moneme

9. Si l'on appelle ambiguite le fait que deux faits syntaxiques diff6rents recoivent une seule et meme expression, ici nous avons affaire A ambiguit6. Cf. Denise et Fred6ric FRANgoIs, L'ambiguit6 linguistique, Word, vol. 23, nOc 1-2-3, 1967, p. 150-179.

so. Ceci vaut dans certains contextes aussi pour 3. sg., 3. pl. Mais ce serait trop long d'exposer ici le conditionnement contextuel de la variation libre (= << accord >> facultatif) et de l'opposition, pour cerner les cas d' << accord >> obligatoire.

This content downloaded from 195.78.108.48 on Tue, 10 Jun 2014 11:01:35 AMAll use subject to JSTOR Terms and Conditions

24 MORTIZA MAHMOUDIAN

comme xune est sans aucune difficulti reconnu comme compld- ment dans :

(26) xune raftam << maison allai >> (27) xune rafti << maison alias >>

(28) xune raftim << maison allimes >>

(29) xune raftin << maison allates >.

5. LA PROSODIE

La contribution de la prosodie ne semble pas etre decisive dans l'indication des fonctions. Considerons le cas de la hierarchie des accents : dans (24) et (25), le syntagme predicatifet l'expansion ont chacun un accent. Ces accents peuvent etre tous deux pri- maires. On peut avoir aussi un accent primaire (") et un accent secondaire ('). Trois schemes accentuelsil peuvent se rialiser dans (24) et (25), a savoir :

(30) " ( ' , ) (3') I _

(32) " , Aucun de ces schemes n'exclut la virtualiti de la fonction sujet

ou complement. Ii semble que le scheme accentuel serve le plus generalement a faire varier le segment sur lequel porte 1'emphase. Par exemple, (30) est un scheme sans emphase, alors que (3i) et (32) mettent en vedette respectivement le syntagme prndicatif ou l'expansion. Cette mise en valeur n'affecte nullement les relations syntaxiques. On pourra paraphraser cette mise en valeur comme suit :

(33) 'nun 'pox-t << pain, cuire (ou faire cuire), preterit, 3. sg. >> Cet enonc6 iquivaut a peu pres a << le pain cuisit >> ou a<< il fit cuire du pain >>;

(34) "nun 'poxt << c'est le pain qui cuisit>> ou << c'est le pain qu'il fit cuire >>;

(35) 'nun "poxt qu'on ne peut rendre que tres imparfaitement en

frangais : soit << faire cuire, c'est ce qu'il a fait avec le pain >>; soit << cuire, c'est ce qu'a fait le pain >>12.

Ii. Chaque trait repr6sente une unite accentuelle et non une syllabe. Nous suivrons cette notation dans la suite. Si nous ne considerons pas la possibilit6 d'un scheme " , , c'est qu'il se confond avec r

12. Sans doute rendra-t-on mieux cette mise en valeur en allemand : (36) peut signifier soit << gebacken hat er das Brot ), soit << gebacken ist das Brot >.

This content downloaded from 195.78.108.48 on Tue, 10 Jun 2014 11:01:35 AMAll use subject to JSTOR Terms and Conditions

L'EXEMPLE DU PERSAN 25

6. LE CONTENU SEMANTIQUE

Ces fonctions - sujet d'une part et complkment de l'autre - ne sont pas equiprobables. Des facteurs interviennent qui excluent certaines virtualites. La o0i l'expansion est un moneme sans subor- donne, ces facteurs semblent etre les suivants : 10 le contenu seman-

tique du predicat et de l'expansion, 20 le contexte et la situation. Le contenu semantique du pr'dicat et de l'expansion joue un

r6le evident dans l'indication de la fonction. Soit un enonce comme : (36) alaf mijo(v)e << herbe, macher, pr.-ind. 3. sg. c.

Etant donne que l'herbe ne peut pas etre I'agent de ]'action << macher )>, il est hautement improbable que dans les conditions normales de la communication, sa fonction soit sujet; alaJ 1' << herbe >> sera donc complement. De fagon analogue agit le contenu semantique de l'expansion et du predicat dans : (37) bdzdr xarid << bazar acheta >>. Le moneme < bazar > a, en persan, un contenu semantique tel qu'il ne peut pas etre I'agent de I'action << acheter >. II est done complement. Mais I'analogie entre (36) et (37) s'arrete 1la. En effet, alafa la particularit6 de renvoyer au patient de l'action, quand - en lex6me nu - il est complement d'un syntagme predicatif comme m'o (v)e, mixore, etc. Par contre, le moneme << bazar >> se caracterise du fait qu'employd, en lexeme nu, comme compl6ment, il correspond au cadre spatial de l'action. Aussi, nous traduirons :

(36) << (il) mache (de 1') herbe >>; (37) " (il) acheta (au) bazar >>.

Rappelons encore que pour la clarti de l'expose, nous nous en sommes tenu a l'examen des 6noncis comportant - outre le syntagme predicatif - une expansion nue, c'est-?a-dire sans determinant ni subordonnd. Les remarques sur la fonction des monemes bdzdr et alaf ne valent que pour les cas ofi ils ne sont accompagnes d'aucun autre moneme. Elles n'impliquent nulle- ment que < herbe c ne peut jamais etre en persan le cadre spatial de l'action << micher c; cela veut seulement dire que pour l'etre, ce moneme doit tre accompagn6 d'un autre moneme. De meme, pour etre patient de l'action << acheter >, le mon me << bazar >> doit s'adjoindre un autre moneme13. Nous y reviendrons (cf. infra, c o).

I3. Noter que par propriktes semantiques, nous n'entendons pas des universaux qui entrent dans la definition d'un concept, ind6pendant des langues particulibres. Quand nous disons que

This content downloaded from 195.78.108.48 on Tue, 10 Jun 2014 11:01:35 AMAll use subject to JSTOR Terms and Conditions

26 MORTAZA MAHMOUDIAN

7. CONTEXTE ET SITUATION

Un autre type de facteurs qui peut favoriser l'une des relations syntaxiques virtuelles consiste en contexte et/ou situation. Nous subsumons ces deux facteurs sous la meme rubrique, car malgre leur diff6rence, ils fournissent sur les relations syntaxiques des informations qui ont leur origine 'a l'ext6rieur de la phrase. Repre- nons la phrase (I 2) xune suxt << maison brila >>, oih maison peut 6tre

sujet ou complement. Le contexte ou la situation peut rendre l'une ou l'autre fonction plus probable. La phrase (12) signifie << (il) brtla (a la) maison >, quand elle est prononcee en reponse 'a la question << oi tu t'es briCl6 le bras ? >, ou simplement en face d'un ami qui regarde mon bras brfle'. La meme phrase signifie << (la) maison brfila >>, si la question qui pr6ce~de est << qu'est-ce qui a brlle ?

Nous ne nous proposons pas de pousser plus avant l'examen de l'influence du contexte et de la situation. Cet examen sommaire nous a paru necessaire, car il est important de savoir quelles sont les informations obligatoires a inclure dans les dnoncis d'une langue, et non dans ceux d'une autre langue'4. Ici, une comparai- son avec le frangais semble interessante : en frangais, il existe des cas oh le contexte r6alise parmi les sens de deux segments homo- phones, celui qui est le plus improbable dans la phrase prise isol&- ment. On peut evoquer :

(38) l'homme se retire dans un /kua /, ou encore (39) le pharmacien execute l'ordonnance, oh il ne semble pas y avoir de doute quant au sens de /kus/ ou d'exdcuter. Pourtant, Boris Vian donne a ces termes le sens le moins probable dans le contexte; ainsi /ku'e/ signifie << coing >>, et exe'cuter << operation qu'on effectue au moyen de guillotine >>. Ces influences contextuelles prdsentent cependant une diff6rence fondamentale avec ce qui se passe en persan. Dans les phrases (38) et (39), ce qui subit la pression du contexte, c'est le sens d'un mondme sans que changent ses relations avec le reste de l'Cnonce.

xune ne peut pas 6tre l'agent de l'action << acheter >>, ce n'est pas le r6sultat d'une analyse semantique prealable, mais une simple constatation dont nous partons. De IA, nous concluons que pers. xune et fr. maison n'ont pas un contenu identique. En effet, pers. xune ne peut designer une personne morale comme le fait fr. maison, par ex. dans la maison vient d'acheler une nouvelle affaire.

14. Roman JAKOBSON, La notion de signification grammaticale selon Boas, Essais de linguis- tique ginirale, Paris, Minuit, 1963, p. 197-2o6.

This content downloaded from 195.78.108.48 on Tue, 10 Jun 2014 11:01:35 AMAll use subject to JSTOR Terms and Conditions

L'EXEMPLE DU PERSAN 27

Par contre, dans les phrases persanes (12) et (36), ce sont les relations syntaxiques qui sont alterees par les facteurs contextuels. Une phrase comme (12) n'est comparable qu'avec les rares

phrases frangaises otf, selon le contenu s6mantique, un terme peut assumer plus ou moins probablement une fonction ou une autre. Comparez : quels Americains lisent Sartre et Camus? et quels auteurs

frangais lisent les Amgricains?

8. CLASSEMENT DES EXPANSIONS

Ce qui prechde nous permet de repartir les monemes selon la

(ou les) fonction(s) qu'ils assument dans les classes suivantes : I. man, to, ..., parviz, ...; classe dont les monemes nus ne peuvent

assumer aucune autre fonction que sujet. Cette classe comporte les pronoms personnels, et les noms propres de personne (anthro- ponymes).

II. zud, tond, yavdS, tanhd, ...; classe dont les mon mes nus ne

peuvent jamais etre sujets. Ils sont toujours compldments, et entretiennent un seul et meme type de rapport avec le predicat. Nous les appellerons adverbes.

III. gdv, xune, javun, ...; classe dont les mondmes nus peuvent assumer soit la fonction de sujet, soit celle de compldment. Cette classe est divisde en deux :

III.I. gdv, javun, miz table >>, qdli < tapis >>; classe dont les monemes nus - quand ils sont compldments - n'entretiennent

qu'un type de rapport avec le predicat, ta savoir le rapport < patient >> -< action >> (= fonction objet);

III.II. xune, dokkun < boutique o, bdzdr, ruz < jour >>, 3ab < nuit >>, ...; classe dont les monemes - quand ils sont compl&- ments - peuvent etre non seulement objet, mais aussi entretenir un autre rapport avec le predicat, celui du < cadre spatial (ou temporel) >> a 1' c action >. Rapport que nous appellerons adverbial. En effet, dans ce contexte, les classes II et III.ii se comportent de faqon identique quant a l'indication de fonction. Cette classi- fication ne pretend certes pas a l'exhaustivitd. Des subdivisions

ultdrieures permettront de digager des classes plus fines. Mais cela nous 6loignerait trop du sujet de notre discussion.

A remarquer que la distinction entre la fonction objet et

l'emploi adverbial ne repose pas sur une approximation siman- tique, mais est fondde sur des critbres syntaxiques.

This content downloaded from 195.78.108.48 on Tue, 10 Jun 2014 11:01:35 AMAll use subject to JSTOR Terms and Conditions

28 MORTIZA MAHMOUDIAN

Notons aussi que ne font pas ndcessairement partie de la classe III.ii tous les monemes qui denotent la dimension tempo- relle ou spatiale. Par exemple bdq << jardin >>, tehrun << Tehran >>, daftar << bureau >> peuvent &tre employds comme adverbe sans aucune marque :

(40) parviz-daftar-e << Parviz bureau est (P. est au bureau)>>

(41) parviz bdq-e << Parviz jardin est (P. est dans le jardin) >> (42) parviz tehrun-e << Parviz Teheran est (P. est '

Tehdran) >>. Mais sandali<< chaise >>, miz < table >>, qdli<< tapis >>, qatdr < train >>

ndcessitent toujours un moneme fonctionnel pour marquer le meme rapport avec le syntagme pr6dicatif :

(43) parviz ru sandali-e << P. sur chaise est (P. est sur la chaise) >>

(44) parviz sare miz-e < P. est a la table >

(45) parviz vasate qdli-e < P. est au milieu du tapis >

(46) parviz tu qatdr-e << P. est dans le train >>.

9. ENONCE A TROIS TERMES

La prdsence simultande du sujet et d'un compldment ne change rien a leur comportement. Tout d'abord les latitudes positionnelles ne varient pas (cf. supra, c 2) : l'ordre normal (c'est-a-dire sans mise en valeur d'un dl6ment de l'enonc6) est : sujet-compldment- syntagme predicatif. Les autres dispositions lindaires sont aussi

possibles. Mais impliquent-elles quelque changement syntaxique ? Pour rdpondre 'a cette question, nous avons eu recours aux rdac- tions de trois informateurs. Nous avons pris deux phrases : (47) parviz tehrun raft < Parviz Tehdran alla >> (48) gdv alaf mixore < vache herbe mange >>.

Nous en avons modifid l'ordre des dlements constitutifs, ce qui nous a fourni six suites lindaires pour chacune des deux phrases :

(47) a) parviz tehrun raft b) parviz raft tehrun

c) tehrun raft parviz d) tehrun parviz raft e) raft parviz tehrun f) raft tehrun parviz

(48) a) gdv alaf mixore b) gdv mixore alaf c) alaf mixore gdv

This content downloaded from 195.78.108.48 on Tue, 10 Jun 2014 11:01:35 AMAll use subject to JSTOR Terms and Conditions

L'EXEMPLE DU PERSAN 29

d) alaf gdv mixore

e) mixore gdv alaf f) mixore alaf gdv.

Nous avons soumis ces douze suites, par ecrit, a trois infor- mateurs, leur demandant de dire quel est l'agent de l'action dans

chaque suite. Voici leur reaction : En aucun cas les monemes tehrun < Teheran >> ou alaf< herbe>>

n'ont 6td identifies comme agent. Les suites qui ont suscite quelque hesitation sont (47 e), (47 f), (48 e) et (48 f), oii le syntagme predicatif est mis en valeur. Ici, la hidrarchie des accents a contri-

bud a 6carter l'hesitation. P.M. s'est mis a lire plusieurs fois la phrase a haute voix, en faisant varier le scheme accentuel. Arrives au scheme , ' , les trois informateurs ont identifie

parviz et gdv comme agent. Mais les autres schemes accentuels n'ont pas pu amener les informateurs ' identifier l'autre terme comme agent. Cela signifie que la hierarchie des accents est un indice a ne pas negliger, mais elle ne peut, a elle seule, intervertir les rapports syntaxiques.

On peut donc conclure que l'ordre des elements ne sert pas ici a marquer les rapports syntaxiques; ce qui les determine, c'est le contenu semantique des elements en presence'5. II est possible que certains arrangements lindaires soient peu probables voire impossibles. Cela n'infirme pas la non-pertinence de la position dans l'indication des rapports syntaxiques. La position n'est

pertinente que dans la mesure oh son changement aboutit " un

changement des rapports syntaxiques. Si l'on s'en tient a cette dCfinition, un ordre fixe qui est d6termine par le choix des mon mes ne pourra &tre considrei comme pertinent. L'ordre fixe ainsi que les latitudes positionnelles relevent de la morphologie de la phrase, et non de la syntaxe.

Io. LE SEGMENT (r)o

Les mondmes to, man, parviz, javun peuvent aussi assumer une autre fonction que celle de sujet. Ils seront alors accompagnes d'autres segments dont (r)o :

(49) to ro mizane <<(il) te bat >> (50) man o mizane < il me batc

15. L'effectif des enquetes est certes trbs restreint. Le sondage prouve n6anmoins que nous ne nous fondons pas sur une simple introspection.

This content downloaded from 195.78.108.48 on Tue, 10 Jun 2014 11:01:35 AMAll use subject to JSTOR Terms and Conditions

30 MORTiZA MAHMOUDIAN

(51) parviz o mizane << il bat Parviz >> (52) javun o mizane < il bat (le) jeune >>.

La presence de (r)o marque de faqon sans equivoque que le mon6me qui le precede est objet. Ce segment (r)o n'est pas sp6- cifique de la classe I; il peut accompagner aussi les monemes de la classe III, et les marquer comme objet :

(53) gdv-o mizane < (il) bat la vache > (54) nun-o poxt (il) fit cuire le pain o.

(r)o dlimine par sa presence toute incertitude quant a la fonction du moneme qu'il accompagne.

Cependant, la presence et l'absence de (r)o ne constituent pas deux variantes de la realisation d'un meme fait syntaxique. Aussi, le sens de (53) ne se confond pas avec celui de (9), meme si le contexte ou la situation indique que gdv est objet dans (9) : dans

(53) gdv est presente comme determine par le << difini c, alors

que dans (9) aucune determination ne lui est assignee (correspond donc a ce qu'on appelle traditionnellement < nom d'espece ou de matibre >>).

I I. INDICATEURS DE FONCTION

Ii existe en persan un certain nombre d'indicateurs de fonction, tels que bd << avec >>, tu<< dans >>, ru << sur >, etc. Ils sont gendralement antiposis's au segment dont ils marquent la fonction, et ne pre- sentent - sauf dans de rares cas"7 - aucune equivoque. Ces fonctionnels rendent 1'dtablissement des rapports syntaxiques ind&- pendant du sens. Ainsi, par recours aux fonctionnels, on peut construire des enoncis semantiquement fort improbables :

(55) be gorbe pul ddd << a chat argent donna (il donna de I'argent au chat)c

(56) az sag-ef ridzi yadgereft << de chien lui math. apprit (il apprit les mathematiques de son chien) >>.

De la meme faqon pour exprimer < l'herbe mange la vache >>, en persan, il faut recourir a (r)o o

(57) alafgdv o mixore.

16. On peut se demander si ru << sur ), bdld, etc., ne sont pas des fonctionnels postpos6s dans in ru << Il-dessus >>, un bMl a l-haut >.

17. Parmi ces exceptions, nous citerons le cas de az < de a qui peut ^tre fonctionnel ou d6ter- minant << partitif o. Ainsi la phrase az md behtar e << de nous meilleur est )> peut signifier soit - il est mieux que nous >, soit a le n6tre est meilleur o.

This content downloaded from 195.78.108.48 on Tue, 10 Jun 2014 11:01:35 AMAll use subject to JSTOR Terms and Conditions

L'E XEMPLE DU PERSAN 31

D'autre part, les indicateurs de fonction, quand ils accompa- gnent un substantif, n'apportent pas de restriction

. l'inventaire

de ses modalites :

bd asb < avec cheval c bd asb e << avec le cheval >> bd (ye) asb (i) << avec un cheval >> bd asb c << avec chevaux >> bd in asb avec ce cheval >>, etc.

C'est aussi le cas de (r)o : asb o < le cheval (objet) >> asb e ro << le cheval (objet) >> s (ye) asb (i) ro << un cheval (obj.) >a1 asb d ro << chevaux (obj.) >> in asb o << ce cheval (obj.) >>, etc.

Par consequent (r)o participe tant des traits caract6ristiques des modalitis nominales que de ceux des fonctionnels. Est-il

18. On notera que nous consid6rons meddd-o et meddd-e-ro comme deux variantes, l'opposition entre la presence et l'absence de -e- 6tant neutralisbe.

Il est evident que des diff6rences peuvent se manifester entre divers usages du persan parl6 A T6h6ran. Dans l'usage que nous avons

consider6, le lexdme nu peut d6noter un objet v d6fini >>

ou I'objet en tant qu' << esphce >>; alors que le lexeme accompagn6 du<< d6fini >> -e d~signe l'objet en tant que sp6cimen hic et nunc : asb << le cheval > (espece ou sp6cimen hic et nunc) asb-e < le cheval >> (sp6cimen hic et nunc).

Dans d'autres usages, celui de la jeune gen6ration notamment, ii semble que le lexdme nu asb renvoie toujours A ' << espbce chevaline >, alors que asb-e en d6signe un individu d6termin6; ici, < cheval >> n'est pas plus < d6fini o dans asb o xarid que dans asb xarid (< cheval acheta >>. (r)o est purement et simplement un fonctionnel. asb o et asb-e ro ne seront plus deux variantes d'un mime fait syntaxique, mais pr6sentent l'opposition du << defini >> i son absence.

I9. ye asb-i xarid et ye asb-i ro xarid ont pratiquement le mime sens < il a achet6 un cheval >>, mais ne sont pas deux r6alisations d'un mime ph6nomine syntaxique. Dans la derniire phrase, la fonction de a cheval > est explicitement

marquee; elle ne l'est pas dans la premiire, ohs, dans des

conditions de communication trbs particuliires (un conte de f6e, par ex.), le << cheval >> pourrait bien tre 1' << agent >> de l'action << acheter >>.

Partant des mimes faits, Milanian arrive 'i des conclusions quelque peu diff6rentes : << Mais pratiquement on pr6f6re, lia oih le lextme est marque par /-i << article indefini >, omettre /ra/ si le lexime d6signe un objet : /mardi ra di-d/<< il a vu un homme>> /medisd-i xari-d/ << il a achet6 un crayon >>. Cf. Hormoz MILANIAN, Les modalitis en persan as point de vue de la linguistique ginirale, Paris, Sorbonne, 1965 (th6se in6dite), p. I s i. Ce qui favorise la pr6sence ou l'absence de rA (= (r)o en pers. parlk), n'est pas la distinction objet (inanime)/anim6, mais un conditionnement plus complexe (cf. supra, c 6; cf. aussi note 13). La suppression de rd dans mardi rd did aboutit A mardi did oi o<< homme >> peut etre aussi bien 1' << agent >> que le << patient > de << voir >. Par contre, dans medddi xarid, l'absence de rd ne peut crier aucune ambiguit6 dans les conditions normales de la communication. De par son contenu s6mantique, medad << crayon > n'est pas susceptible d'etre << agent >> d' << acheter >>. De mime rad est omis dans bacce-i zaid a un (e) enfant donna naissance (elle donna naissance i un(e) enfant) ), oi le contenu simantique des 616ments en prbsence exclut normalement que 1' << enfant o> soit 1' o agent c de < donner naissance >).

This content downloaded from 195.78.108.48 on Tue, 10 Jun 2014 11:01:35 AMAll use subject to JSTOR Terms and Conditions

32 MORTAZA MAHMOUDIAN

modalite ou fonctionnel ? La question20 a suscit6 beaucoup de discussions. Il nous semble que (r)o est l'amalgame des deux

mon~mes << defini >> et < fonction objet >>, quand il accompagne un substantif sans determinant grammatical. Partout ailleurs il est un simple indicateur de fonction. Cette solution semble tenir

compte de la complexite du comportement syntaxique de (r)o. La definition de la fonction < objet >> en persan pose certains

problkmes qui sortent du cadre de cet article. II convient toutefois de noter qu'appeler cette fonction objet n'implique pas que c'est une fonction positionnelle; et les multiples exemples qui pricedent ont bien montre le contraire. Cela ne veut pas dire non plus que c'est une fonction saturable. En effet, une phrase peut cumuler deux expansions marquees par (r)o :

(58) se hafta ro kdrdm o mikonam << trois semaines (obj.) mes travaux

(obj.) je fais (pendant trois semaines, je fais mes travaux) >>.

12. LA CONTRIBUTION DES MODALITES ET DES SUBORDONNES

Mis a part ces moyens specifiques que sont les fonctionnels, d'autres indices servent aussi 'a marquer les relations syntaxiques. Quand une phrase comporte deux expansions, les deux peuvent avoir des chances egales d'etre sujet ou objet. C'est le cas de :

(58) yeki Sdh dvord << un (pronom) roi apporta >>,

qui, prononce a la table de jeu, peut signifier a< quelqu'un a tire un roi >. Si le contexte ou la situation indique que yeki < un >> renvoie t l'inanime, p. ex. << pomme >>, la phrase peut signifier < le roi en apporta une >21. Encore une fois, que certains agence- ments lineaires rendent tels rapports syntaxiques plus probables

20o. La question est souvent formul6e en d'autres termes : ra est-il l'article d6fini ou la

marque de l'objet ? N.B., rd est le correspondant, en persan litt6raire, de (r)o. 21. Nous avons relev6 une phrase analogue dans une pi&ce 6crite dans un persan imitant

quelque peu le registre familier. La voici : yeki sefid vazir bidvarad< un, blanc, vizir, apporte, 3. sg., subj. pres. >>. La phrase est pr6c6d~e de la description d'un arbre portant des pommes rouges et

blanches, auquel arbre le gu6risseur envoie le roi. Le sens de la phrase dans ce contexte est 6vident : << que le roi en apporte une blanche >>. Cf. Bahrim BEYZAI, Soltdn mdr, Teh6ran, 1966, p. 9. Pour mettre en 6vidence le r6le syntaxique de la position, on a propos6 des exemples tels que :

ai badi xubi ne-micav-ad << mal bien ne devient pas >>, as xubi badi ne-micav-ad << bien mal ne devient pas >>,

hb adam cir mi-kocad << homme lion tue >>, b2 ir adam mi-kogad << lion homme tue >>.

Il nous semble que sous l'influence du contexte (et/ou de la situation), les rapports syntaxiques dans a et b peuvent btre intervertis sans changement d'ordre des 61ements. Mbme si cela n'6tait

pas le cas, les contre-exemples de ce type sont trbs rares (Bateni n'en donne qu'un) et n'ont qu'une

port6e trbs restreinte.

This content downloaded from 195.78.108.48 on Tue, 10 Jun 2014 11:01:35 AMAll use subject to JSTOR Terms and Conditions

L'EXEMPLE DU PERSAN 33

que tels autres, cela est 6vident. Par exemple, hors contexte, il est plus probable que le premier element - << un > dans (58) - soit le sujet. Mais le r61e de la position n'est nullement decisif; et la reaction des informateurs le prouve. Des trois informateurs, l'un a rdpondu que le sujet 6tait << un >; les deux autres ont declard qu'en dehors du contexte, << unc aussi bien que << roi>> pourraient etre sujets.

De meme, isolde, une phrase comme

(59) doxtar fouhar mixdst << fille mari souhaitait >>

peut signifier plus probablement << (la) fille souhaitait (un) mari>> que << (le) mari souhaitait (une) fille >>. Si l'un des substantifs est accompagn6 du << dafini >>, c'est lui qui sera sujet, et objet celui qui est depourvu de modalit6 ou accompagn6 de 1' << indefini >; et ce, quel que soit l'ordre. Ainsi les phrases :

(60) doxtar-e Souhar (i) mixdst

(61) Jouhar(i) mixdst doxtar-e

signifient la << fille souhaitait (un) mari >>. Et dans les phrases

(62) doxtar fouhar-e mixdst

(63) Souhar-e doxtar mixdst

c'est<< le mari>> qui est sujet. En effet, un substantifde la classe III . (cf. supra, c 8), ditermine par le defini, ne peut assumer la fonction objet que s'il est accompagne de (r)o. Les syntagmes substan- tif + defini se comportent donc de ce point de vue comme les monemes de la classe I.

Mais ce n'est pas une caract6ristique sp6cifique du << defini >; d'autres modalitis nominales agissent de meme, dont : - les modalitis personnelles verbo-nominales : am << I. sg. >>,

et << 2. sg. >... - les modalitis demonstratives : in << ce...-ci >>, un << ce...-lI >>.

Les syntagmes comme

(64) vouhar-et << ton mari >>

(65) in doxtar (e) << cette fille-ci >>

ne peuvent remplir la fonction objet que s'ils sont accompagnes de (r)o. La liste des syntagmes, se comportant comme les monemes de la classe I (cf. c 8), doit 6tre 6largie pour recevoir en son sein ces syntagmes, et d'autres encore :

LA LINGUISTIQUE, I 2

This content downloaded from 195.78.108.48 on Tue, 10 Jun 2014 11:01:35 AMAll use subject to JSTOR Terms and Conditions

34 MORTiZA MAHMOUDIAN

- les substantifs ayant comme subordonn6 un anthroponyme : (66) doxtar-e parviz << fille de Parviz >>; - les substantifs ayant pour subordonne un syntagme du type

(64)-(66). Ainsi :

(67) xdhar-e Souhar-et < soeur de mari toi (la soeur de ton mari) >>

(68) ndmzad-e in doxtar-e < (le) fianc6 de cette fille >>

(69) ketdb-e doxtar-e parviz < (le) livre de (la) fille de Parviz >>.

L'absence d'un fonctionnel pour un segment relevant de cette liste indique que celui-ci est sujet; du coup, l'autre terme est negativement marqu6 comme complement. Ce compl6ment sera du type objet ou adverbial selon la classe a laquelle appartient le moneme.

La liste que nous avons dress6e ci-dessus n'est pas exhaustive et demande a etre compl6t6e. Des inventaires analogues doivent &tre degag6s pour d'autres fonctions (< attribut >>, p. ex.). Nous ne nous sommes interessi ici qu'a un nombre tres limite de fonctions, essayant d'illustrer le cheminement complexe par lequel passe l'tablissement des rapports syntaxiques.

13. FONCTIONS PRIVILGfIEES De ce qui pr6c'de, on peut conclure

. l'existence d'une (ou

des) fonction(s) privil6gide(s) pour une classe determin6e de monemes (ou de syntagmes). Et c'est cette corr61ation entre classes et fonctions qui permet de reconnaitre la fonction d'un terme, et non la position de celui-ci dans ]a chaine. Ce n'est pas & dire que le r61e de la position est nul dans l'indication des liens

syntaxiques. Nous croyons seulement que l'ordre ne sert de marque a la fonction que li oui manquent les indices relevant de la classe, du contexte, de la situation.

La fonction privil6gide n'est certes pas une caracteristique specifique du persan. On peut la retrouver dans d'autres langues, en danois par exemple.

L'ordre des elements dans la phrase danoise peut &tre perti- nent comme le montre la permutation suivante :

(7o) han skaenkede legatet malerisamlingen < il a laiss6 la galerie d'art a la succession >>;

(71) han skaenkede malerisamlingen legatet l il a laisse la succession a la galerie d'art >>.

This content downloaded from 195.78.108.48 on Tue, 10 Jun 2014 11:01:35 AMAll use subject to JSTOR Terms and Conditions

L EXEMPLE DU PERSAN 35

Mais la position n'est pertinente que 1l oti le contenu siman- tique des deux expansions leur permet de jouer indiffdremment le

r61e du << patient>> ou du << ben'ficiaire >. Dans (72) han leverede

tyskerne bogen < il a livr6 le livre aux Allemands >>, bogen et tyskerne ne sont pas permutables. L'interversion de leur ordre aboutit a non-phrase : (73) *han leverede bogen tyskerne, et non " une

phrase avec des relations syntaxiques diff6rentes. Par ailleurs, le danois admet les suites : (74) beneficiaire-

pr'dicat- sujet-patient, (75) patient-pr'dicat- sujet-beneficiaire equivalant syntaxiquement "a la suite suj.-pridicat-benef.-patient, mais avec une mise en valeur stylistique diff6rente. Ainsi dans les

phrases (76) tyskerne leverede han bogen << aux Allemands, il a fourni le livre>> (77) bogen leverede han tyskerne<< le livre, il l'a fourni aux Allemands>c

les rapports syntaxiques sont les memes que dans (72). Si nous effectuons la meme operation sur (70o) et (7I), en y appliquant les suites liniaires (74), (75), nous obtiendrons :

(78) legatet skaenkede han malerisamlingen (79) malerisamlingen skaenkede han legatet

oh on ne peut dire hors contexte et situation quel est le beneficiaire et quel est le patient22.

En effet, ce qui marque les fonctions dans (76) et (77), c'est le contenu simantique de tyskerne et de bogen. C'est aussi le contenu semantique de legatet et de malerisamlingen qui les rend equipro- babies dans les deux fonctions << bindficiaire >> et < patient >>, et est responsable de l'ambiguite de (78) et (79).

14. DEGRES D'AUTONOMIE

Il parait 6vident que la hidrarchie fonctionnelle est indispen- sable a la theorie syntaxique, sans laquelle I'analyse sera ramende a un decryptage distributionnel. Les principes etablis par Andre Martinet23 reposent sur des fondements solides, mais ils demandent a etre ddvelopp6s, pour &tre aptes a rendre compte de fagon plus fine des faits syntaxiques d'ordres divers.

Face aux vastes latitudes positionnelles des constituants de

22. Cf. Aage HANSEN, On the So-Called Indirect Object in Danish, T.C.L.C., V, 1949, p. 198-202.

23. Andre MARTINET, Eliments de linguistique ge'ne'rale, Paris, Colin, nouv. 6d. 1967, chap. 4.

This content downloaded from 195.78.108.48 on Tue, 10 Jun 2014 11:01:35 AMAll use subject to JSTOR Terms and Conditions

36 MORTEZA MAHMOUDIAN

l'6nonc6 en persan, nous pouvons nous demander quelles classes de mondmes (ou de syntagmes) qualifier d'autonomes.

Pour nous en tenir 'a la distinction autonomie/marque posi- tionnelle, on admettra que l'autonomie ne peut pas se confondre avec la diplaqabilited4, quitte ta mettre dans le meme sac : sujet, objet, et compldments divers en persan. La definition la plus adequate et opdrationnelle de l'autonomie semble etre negative, et pouvoir &tre formulde en termes de non-intervention de la

position dans l'indication de fonction. Cela rend possible la dis- tinction entre les fonctions positionnelles et les fonctions non positionnelles, le critbre de distinction &tant I'epreuve de la permu- tation. Les 6C1ments assumant une fonction positionnelle sont tous

permutables. Mais il faut noter que les fonctions peuvent presenter des degrds dans leur permutabilitd. D'autre part, celle-ci peut provenir des facteurs trbs varies. Il convient de rechercher ces facteurs afin d'&tablir une hierarchie dans les divers types de

permutation. C'est ce que nous avons dUf faire pour distinguer les diffirentes classes de mon6mes en persan.

On part du principe que la fonction d'un mondme est la somme d'un type de relation et d'un point d'incidence62. La premiere marque la nature du rapport d'un element a son noyau, le second

indique le noyau auquel il est subordonn6. Le comportement des monemes varie du point de vue de

l'incidence et de la relation. Un moneme peut ne se rattacher

qu'a une seule classe de monemes; nous l'appellerons uninucleaire. Ou bien il peut avoir pour noyau virtuel des monemes de classes diff6rentes; il est alors le plurinucldaire. Avec un noyau donne, un moneme peut n'entretenir qu'un seul type de relation; il est dit unirelationnel. S'il peut au contraire contracter plusieurs types de relation avec son noyau, on l'appellera plurirelationnel. Cette double dichotomie nous permet de caract6riser quatre types syntaxiques :

A : uninucldaire, unirelationnel; B : uninucldaire, plurirelationnel; C : plurinucleaire, unirelationnel; D : plurinuclkaire, plurirelationnel.

24. Cf. Andr6 MARTINET, The Foundations of a Functional syntax, Monograph Series on Lan-

guage and Linguistics, XVII, 1964. Cf. aussi ci-dessus, note 7. 25. MARTINET, Eliments, c 4. I1; cf. aussi note 6, ci-dessus.

This content downloaded from 195.78.108.48 on Tue, 10 Jun 2014 11:01:35 AMAll use subject to JSTOR Terms and Conditions

L'EXEMPLE DU PERSAN 37

La classe A comporte les mon mes (ou syntagmes) qui sont a la fois uninucleaires et unirelationnels. Ainsi les modalitis verbales en frangais : 1' << imparfait )) ne peut avoir qu'une seule classe de noyau : le verbe. Avec ce noyau, il ne peut entretenir

qu'une seule relation. Relkvent de la classe B les monkmes (ou syntagmes) qui ne

peuvent avoir pour noyau qu'une seule classe de monemes, avec

lesquels ils peuvent entretenir diverses relations. La classe C englobe les monemes (ou syntagmes) admettant

plusieurs classes de noyaux, mais un seul type de rapport avec le noyau de quelque classe qu'il soit. C'est le cas des << adverbes >> frangais : trWs peut 6tre subordonn6 tA un<< adjectif>>, un<< adverbe>>; mais la relation qu'il entretient avec son noyau est unique.

Enfin, ressortissent a la classe D les montmes (ou syntagmes) qui admettent plusieurs classes de noyaux, et contractent avec un meme noyau plus d'un type de relation. Par exemple, le directeur

peut etre subordonn6 a un < nom >> ou a un < verbe >>, et entretenir avec l'un ou l'autre plus d'un type de relation :

- avec un noyau nominal :

(80) Jean, le directeur, abandonne

(81) le directeur Jean abandonne

- avec un noyau verbal :

(82) Jean abandonne le directeur (83) le directeur abandonne Jean.

Que nous n'ayons pas pu trouver des exemples pour illustrer la classe B n'implique pas qu'elle ne se r6alise dans aucune langue.

Remarquons aussi que l'un ou I'autre des quatre traits men- tionnes peut etre present dans une structure sans constituer, a lui seul, un trait pertinent syntaxique, mais faire partie d'un trait

pertinent complexe. Par exemple, les deux caracteristiques uni- nucleaire et unirelationnel ne constituent qu'un seul trait perti- nent dans le syst me des monemes<< personnesc> en persan (cf. supra, c I). On peut alors subsumer ces deux caracteristiques sous le trait unique d'unifonctionnel. C'est donc l'unifonctionnalit6 qui caracterise en persan les modalitis personnelles du verbe, et les

distingue de l'ensemble des modalites verbo-nominales de << per- sonnes >> et des pronoms personnels, lequel ensemble est pluri-

This content downloaded from 195.78.108.48 on Tue, 10 Jun 2014 11:01:35 AMAll use subject to JSTOR Terms and Conditions

38 MORTiZA MAHMOUDIAN

fonctionnel. Cette redondance n'a rien d'&tonnant. Et l'indisso-

ciabilitd de deux traits dans un systeme n'empeche pas ces memes traits de constituer ailleurs chacun un trait pertinent.

Les classes prdsent'es ci-dessus n'6puisent pas tous les types syntaxiques possibles. Les distinctions proposdes ne reposent pas sur un pr suppos6 binariste, mais visent a jalonner les deux p6les d'une dimension pouvant caracteriser les classes syntaxiques. Des

types intermediaires sont a envisager. Pour ne donner qu'un exemple de types intermidiaires, fr. charmant peut entretenir deux relations diffirentes avec le substantif, mais une seule

quand le noyau est pronom. Comparer :

(84) ce charmant garfon m'a preti son parapluie (85) charmant, ce garfon m'a prete' son parapluie (86) charmant, il m'a pritJ son parapluie.

Parmi les quatre types syntaxiques, le type A est celui qui recourt le moins a la position pour l'indication de sa fonction. Mais il n'en reste pas moins que la position peut en changer la fonction en changeant son noyau. Ainsi ne... pas a deux fonctions diffdrentes dans :

(87) je n'ignorais pas que tu viendrais, et (88) j'ignorais que tu ne viendrais pas.

Mais le conditionnement et les implications de cette diff6rence de fonction ne sont pas les memes que dans le cas de le directeur. Cf. supra (8o)-(83). On remarquera que le directeur est susceptible de subir le meme type de changement de fonction que ne... pas, le contraire n'&tant pas vrai.

On peut donc penser que ce classement permettra d'&tablir une hidrarchie entre les classes de monemes en termes de degrd d'intervention de la position dans l'indication de leur fonction. A supposer que cela soit vrai, on pourra dire, par exemple, que les classes A et D marquent les deux extremes de cette hierarchie. Pour les monemes de la classe A, la seule fagon dont peut inter- venir la position pour en changer la fonction, c'est de les d6tacher d'un noyau pour les rattacher a un autre noyau de la meme classe que le noyau precedent. En revanche, pour les monemes des autres classes, la position peut agir comme dans le cas de la classe A. Elle peut, en outre, intervenir en changeant la relation (pour la classe B), ou le noyau (pour la classe C), ou encore les deux

This content downloaded from 195.78.108.48 on Tue, 10 Jun 2014 11:01:35 AMAll use subject to JSTOR Terms and Conditions

L'EXEMPLE DU PERSAN 39

(pour la classe D) 26. La part que prend la position dans l'indica- tion de fonction est minima dans le cas de la classe A, et maxima

pour la classe D. Les considdrations qui precedent sont fondees sur l'examen

des virtualit's fonctionnelles des monemes (ou des syntagmes). Or, ces virtualitis fonctionnelles n'6puisent pas les latitudes combinatoires. Celles-ci doivent &tre divisees en deux : les lati- tudes fonctionnelles et les latitudes subordinatoires. Tout moneme

peut assumer, dans l'inonce, des fonctions, c'est-5a-dire entretenir des rapports avec des dlements qui lui sont hierarchiquement superieurs; ce sont les rapports que nous avons appelks latitudes

fonctionnelles. Le moneme peut aussi entretenir des rapports avec des el6ments situds a un niveau infirieur, c'est-a-dire admettre des subordonn's (assumant une fonction secondaire, tertiaire, etc.). Ces rapports seront design6s comme latitudes subordinatoires.

En considerant les latitudes subordinatoires, nous pourrons rendre compte non seulement des r6les virtuels que pourrait jouer la position dans l'indication des rapports d'un moneme, mais aussi du r6le qu'elle joue dans un enonce donne. Par ex., si dans (81), nous faisons commuter Jean avec ii, nous obtiendrons

(81') ii abandonne, oih le directeur ne pourra entretenir les memes rapports avec le sujet. De meme, si l'on fait commuter dans (8I) abandonne avec arrive, on obtiendra

(8 1") Jean arrive, oh le seul noyau possible pour le directeur est Jean.

Enfin, il faut faire entrer en ligne de compte les traits redon- dants, qui, normalement, font partie d'un trait pertinent syn- taxique complexe, mais dans un contexte determine assument a eux seuls l'indication de la fonction. Ainsi en russe et en allemand oi le sujet et l'objet ont une marque mondmatique (= desinence), et une marque positionnelle redondante; sans emphase parti- culikre, le sujet est antepos6 au verbe et l'objet postpos

(89) rus. otec l'ubit syna % (90) all. der Vater liebt den Sohn << le pere aime le fils >>.

26. Tous les << substantifs >> franCais ne se comportent pas de ce point de vue conumme directeur, n'appartiennent partant pas

' la classe D.

This content downloaded from 195.78.108.48 on Tue, 10 Jun 2014 11:01:35 AMAll use subject to JSTOR Terms and Conditions

40 MORTiZA MAHMOUDIAN

En fonction des besoins stylistiques, l'ordre des 6lements peut varier sans entrainer une modification des rapports syntaxiques :

(9 rus. syna l'ubit otec << c'est le fils qu'aime le pare >. (92) all. den Sohn liebt der Vater

Mais ces latitudes positionnelles n'existent pas dans :

(93) rus. mat'. I'ubit doc' (94) all. die Mutter liebt die Tochter <lamre aime la fille

En effet, ici, les marques mondmatiques ayant des formes syn- critiques pour le sujet et l'objet, la position constitue la seule

marque de la fonction. Comparez les phrases suivantes respec- tivement avec (91) et (92) :

(95) rus. doc' l'ubit mat' (96) all. die Tochter liebt die Mutter c la filleaime l mre c>7

Aussi, ce classement nous semble permettre de rendre compte du conditionnement et des implications des contraintes et des latitudes positionnelles des monemes, ainsi que des facteurs qui les sous-tendent. C'est ainsi que nous avons pu degager en persan les classes I-III parmi les monemes qui jouissaient quasiment des memes latitudes positionnelles.

Universite' de Lausanne.

27. Les exemples (89)-(96) sont empruntis h Roman JAKOBSON, Beitrag zur allgemeinen Kasuslehre, T.C.L.P., 6, 1936, p. 240-288.

This content downloaded from 195.78.108.48 on Tue, 10 Jun 2014 11:01:35 AMAll use subject to JSTOR Terms and Conditions