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Ecologie et perspectives de restauration et de valorisation dcosystmesenvahis par desLudwigia sp. : Etat de lArt

Smida I.(1)(3)

, Le Petit J.(2), Charpy-Roubaud C.

(1)

(1)UMR 193 IRD, FST St-Jrme, Universit Paul Czanne Aix-Marseille III, Case 441, 13397 Marseille Cedex 20, France.

smida_imen@yahoo.fr claude.charpy-roubaud@ird.fr

(2)UMR CNRS 6116, FST St-Jrme, Universit Paul Czanne Aix-Marseille III, Case 441, 13397 Marseille Cedex 20, France.jean.le-petit@univ-cezanne.fr

(3) UR 0902, Facult des sciences, Campus El Manar Tunis, 2092 Tunis, Tunisie. Smida_imen@yahoo.fr

Abstract : La colonisation des plans deaux par les Ludwigia spp., hydrophytes amphibies invasives, provoqueune dystrophie des cosystmes aquatiques, un effondrement de la biodiversit des taxons indignes et la mort

des macro-invertbrs et des poissons. Leur dveloppement exubrant entrane donc la destruction des habitats,

provoquant dimportantes nuisances cologiques, et galement socio-conomiques par leurs impacts sur les

activits humaines, quelles soient touristiques ou professionnelles (pche, chasse, agriculture, industries).Linvasion des milieux par les herbiers est trs rapide et stend peu peu sur tout le territoire franais et les

pays avoisinants. La problmatique est proccupante et divers acteurs sinvestissent rsoudre les nuisances

engendres par lenvahissement des herbiers de Ludwigia sp. : Ministres, Administration de Rgion,

chercheurs, diverses Associations, professionnels, touristes. Un tat des lieux est dress sur la biogographie des

Ludwigia spp., les connaissances sur lcologie de cette plante, limpact des herbiers sur la biodiversit des

biotopes et, au-del, celle des cosystmes. Le rel impact des recherches dveloppes et des diffrents moyensmis en uvre actuellement, de mme que ceux prospects, pour limiter lexpansion de ce flau et pour restaurer

les milieux envahis sont analyss. Par ailleurs, les prospectives de valorisation biotechnologique de cette plante

des fins de dveloppement durable sont galement abordes, de mme que les bnfices socio-conomiques qui

en rsulteraient.

Keywords: socio-economics of nature restoration - invasive species - identifying appropriate conservation and restoration objectives Ludwigia sp.

Introduction :

Lintroduction despces exognes et la prdisposition de certaines delles devenir envahissantes

dans leur nouveau milieu daccueil sont considres comme lune des causes majeures des rosions de

la biodiversit constate lchelle mondiale. Originaires du Brsil, les hydrophytes Ludwigia spp.

invasives (les Jussies) sont pour les zones humides dulaquicoles de presque tous les pays du monde

un exemple de cette dynamique expansionniste denvahissement qui simplifie dangereusement la

diversit aux chelles locales et rgionales. Lenvahissement par la Jussie touche la plupart des pays

du monde, provoquant de graves nuisances cologiques et socio-conomiques. Importe en France

Montpellier vers 1830, elle a peu peu colonis tous les plans deau, naturels ou de facture humaine.

La lutte gnrale engage contre cette peste concerne essentiellement le relev des herbiers, leur

destruction (qui ne peut tre que temporaire), le suivi de leur expansion, la mdiatisation du danger.

Elle est sans fin, car la Jussie est impossible radiquer et son expansion est imprvisible. Toutefois,

les Ludwigia sp. produisent des mtabolites secondaires susceptibles de valorisation

biotechnologiques. La bonne gestion des cosystmes envahis ne peut trouver de solution que dans

celle vise de dveloppement durable, qui allie cologie et socio-conomie.

I. Contexte gnral et local cologique, socital et conomique

Les cosystmes aquatiques ont une grande valeur ajoute pour lagriculture, lindustrie, la chasse, la

pche, lapprovisionnement urbain, les activits touristiques. Leur bon fonctionnement est de la plus

haute importance non seulement pour le maintien quilibr de leurs habitats mais, galement, pour

toutes les activits humaines quil permet. Originaire du Brsil, les hydrophytes Ludwigia spp. sont

prsentes en Afrique, en Amrique latine, Amrique du nord, Australie et en Europe.

Lenvahissement, observ dans le nord-ouest de la Tunisie (Smiti, com.pers.) jusqu la frontire

algro-tunisienne (Poittier-Alapetite, 1981) a donc dj gagn une partie du Maghreb mme si la

Ludwigia na pas encore t observe en Algrie(Vela, botaniste INRA Montpellier, com. pers., et les

recherches bibliographiques effectues). En France, elle est apparue dans le Lez en 1830, importepour la beaut de ses fleurs. Depuis, elle a peu peu colonis toutes les rgions (Grillas et al., 1992,

Salanon, 2000, Ancrenaz et Dutartre, 2002, Dandelot, 2004), envahissant tous types de plans deau

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stagnante ou de faible courant : lacs, tangs, bords de rivire, ruisseaux, canaux (Fig.1). Elle peut aussi

se dvelopper sur les sols sableux, calcaires, vaseux ou marcageux.

Figure 1 : in Dandelot 2004 Un exemple denvahissement par un herbier de Jussie : Fig.1.1.Petit tang du

foyer du Scamandre (Camargue), aot 2003, - Fig 1.2. Canal des Capettes (Camargue) .

Lenvahissement perturbe lquilibre cologique de tout lcosystme, entrane la perte de biodiversit

et, terme, la destruction des habitats (Dandelot et al. 2005a). Lexploitation par lhomme des

ressources des cosystmes envahis, qui ont une forte valeur ajoute en terme de ressources naturelles

vivantes (oiseaux, poissons, crustacs) est directement impacte.

En zone Mditerranenne, la biodiversit est particulirement riche (Mdail et Quzel, 1997) mais

aussi trs fragile et svrement menace (Salanon, 2000, Verlaque et al., 2001) car les cosystmes

subissent une trs forte pression humaine et, plus particulirement, touristique. De plus, la forte

biomasse produite en priode de floraison ralentit lcoulement des eaux usage professionnel,

entrave la circulation des barques, colmate les canaux et les systmes de distribution deau (Legrand,

2002), de mme que les plans deau amnags pour des activits aquatiques. Les secteurs gravementtouchs par lenvahissement conomiquement sont le tourisme, lagriculture, lindustrie, la chasse, la

pche, la gestion des eaux urbaines. Classe espce invasive la plus dangereuse pour les graves

nuisances cologiques et socio-conomiques dont elle est responsable, la Jussie a t lorigine de l

Arrt franais du 2 mai 2007 interdisant la commercialisation, le transport, l'utilisation horticole et

l'introduction dans le milieu naturel des plantes invasives.

Par ses caractres invasifs et sa tolrance vis vis des paramtres abiotiques environnementaux, la

Jussie est non seulement impossible radiquer mais son envahissement est souvent imprvisible.

Les acteurs investis dans la lutte contre la Jussie sont nombreux. En France, il sagit des Rgion,

CEMAGREF, INRA, autres Instituts Scientifiques, Universits, Bureaux dEtude, Associations et

Fdrations diverses (protection de la nature, chasse, pche, etc.). Les moyens utiliss pour lutter

contre ce flau sont trs dlicats, pnibles et, seulement et au mieux, efficaces court ou moyen terme(Ancrenaz et Dutartre, 2002) ; ceux qui ne sont pas slectifs (tels les phytocides) prsentent un danger

pour lcosystme. Larrachage, manuel ou mcanique, est le moyen le plus couramment employ.

Les cots, quoique trs variables pour dpendre des cosystmes traiter, sont toujours levs

(Delprat 1998, Spasovski 2001, UNIMA, 2001, Dutartre 2006). Il sy ajoute celui de llimination des

trs gros volumes de biomasse rmanente, qui doit tre totale pour viter tout envahissement de

nouvelles zones tant la capacit de bouturage de la Jussie est grande. La biomasse arrache, qui peut

atteindre des tonnes pour un seul herbier, est gnralement emmene la dcharge pour incinration.Les recherches dveloppes sur la problmatique Jussie concernent essentiellement le

recensement des herbiers et lexpansion de leur envahissement, la diversit spcifique (hybridation)

des herbiers et le mode de reproduction de la plante.Cependant, lexistence de mtabolites secondairesissus de la Jussie est une voie explorer pour une valorisation de sa biomasse polluante. Leur

identification permettrait une meilleure gestion des cosystmes envahis. En effet, dune part lefonctionnement des Ludwigia sp. et des cosystmes devra tre apprhend et cern et, par ailleurs,

des applications aux retombes conomiques (compensation du cot darrachage) et sociales (cration

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demplois) dj pressenties (Xiao-Shui, 1990, Greenway et Wolley, 1996) mais non tudies pourront

tre envisages

II. Etat de lart scientifique

LesLudwigia spp. (ou Jussie) sont des macrophytes hydrophytes amphibies invasives, enracines dans

les sdiments vaseux de tous les plans deau et cours deau lents. On trouve quelques tudes desconditions environnementales des herbiers de Ludwigia (Dandelot et al., 2005b ; MSA M., 2008),

mais, en rgle gnrale, aucune tude cologique globale et approfondie. Toutefois, il apparat, dune

part que les seules ncessits pour que cette plante se dveloppe soient une bonne lumire, une

temprature comprise entre 17C et 24C et, dautre part, que la salinit est le paramtre le plus

nuisible son dveloppement, inhib par une concentration de 10mg.L-1

(Grillas et al., 1992). Ses

capacits de rsistance au froid, de mme qu la scheresse (sous forme prostre) sont grandes. La

Jussie parat indiffrente la valeur du pH, qui cependant diminue dans les herbiers (Saint-Macarie,

1998), et la pauvret en sels nutritifs des milieux o elle se dveloppe ; en revanche, dans les

milieux fertiles, elle dmontre de grandes capacits stocker lazote, avec la concentration de laquelle

la production de sa biomasse est alors corrle (Charbonnier, 1999). La capacit de reproduction

vgtative par bouturage de la Jussie est trs leve, (entre 40 et 881 boutures par jour) et un seul

fragment peut coloniser prs dun mtre de rive en une anne (Dutartre, 2002). Sa biomasse, qui estsusceptible de doubler en deux semaines (Charbonnier, 1999), peut facilement atteindre 2 3 kg de

poids sec/m2

(GIS Macrophyte, 1997) La densit de lappareil arien desLudwigia , qui atteint 1 m de

hauteur en pleine floraison, fait obstacle la pntration dans leau de la lumire dont les micro-

algues, phototrophes, ont besoin pour se dvelopper, ce qui favorise la mise en place des conditions

anarobies. Lappareil racinaire de la Jussie, qui dpasse souvent les 5 m, provoque la retenue de

dbris minraux et organiques, participant au comblement du plan deau. Linstallation de conditions

anoxiques au niveau des sdiments permet le dveloppement de bactries sulfato-rductrices gnrant

un dgagement de H2S (Dandelot et al., 2008) nocif pour lcosystme et provoquant la mort des

macro-invertbrs et des poissons (Grillas et al., 1992, Dutartre et al. 1997). Cest cet enchanement

de causes qui provoque la dystrophie de lhydrosystme et leffondrement de la biodiversit des taxons

indignes, dautant plus que la Jussie semble navoir aucun prdateur spcifique. Du point de vue

cologique et de celui du Dveloppement durable, il sagit l dune des causes principales, et de plusen plus rpandue, de lrosion de la biodiversit dcosystmes aquatiques.

En contre-partie, certaines analyses de la composition lmentaire de la Jussie font tat de flavonodes,

de saponines (Averett et al., 1990), de triterpnes (Chang et al., 2004, Shilpi et al.,2010 ), dacidesgras (Zygadlo et al. 1994), de polyphnols, de lignine, de cellulose ; ces composs sous-tendent des

voies valorisation des dchets par des filires adaptes et constituent des pistes de recherches trs

prometteuses (Xiao-Shui, 1990, Greenway et Wolley, 1996) ou, pour certaines, ne faisant plus aucun

doute (Lin-Ling Yang et al., 1987, Chang et al., 2004, Yusuf et al., 1994, Ghani, 2003, Kirtikar

and Basu, 1999, Das et al., 2007, Crevar et al 1972, Perry, 1980).Lhypothse de prsence decapacits alllopathiques de cette plante a t mise (Dandelot et al., 2008), conforte par des

expriences dveloppes par Smida et al. (2010). Lexistence de mtabolites secondairesbactriostatiques voire bactricides produits par la Jussie ne peut que jouer un rle important dans

lquilibre des cosystmes quelle envahit et pourrait tre une explication au succs expansionniste

de la plante.

Conclusions

Lenvahissement par lesLudwigia engendre de relles et graves nuisances cologiques, qui impactent

trs fortement les secteurs sociaux et conomiques. Les perspectives de restauration existent. Elles

passent par le suivi de lenvahissement (source, lieu, et importance), pour les sites connus, maisgalement par la recherche de nouveaux sites envahis et la ralisation dun diagnostic. La

connaissance des conditions cologiques restent ainsi approfondir. Il en est de mme pour les intrts

patrimoniaux, leurs usages et leur gestion, qui doivent tre inventoris et pris en compte. Enfin,lidentification de composs secondaires bioactifs permettrait denvisager des applications aux

retombes conomiques (compensation du cot darrachage) et sociales (cration demplois). Cette

peste difficilement contrlable pourrait devenir une ressource. Il est donc vident que la

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restauration et la valorisation dcosystmes envahis par la Jussie sinscriventdans une dmarche degestion globale et intgre respectant les exigences du dveloppement durable.

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