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L e dixième anniversaire de notre association approche, une occa- sion pour nous de réfléchir sur l’évolution du phénomène épidémiologique qu’est devenu la basse-vision en France et dans le monde au cours de ces dernières années. «Glaucome, Diabète, DMLA des défis de santé publique à relever en France dans les 10 années à venir », c’est sur ce thème que, dans le cadre de l’OPC (Organisation pour la Prévention de la Cécité), M. le Professeur Pouliquen a réuni quelques uns d’entre nous le 2 février à la fondation Singer-Polignac. 161 millions de déficients visuels dans le monde, tel est le dernier chiffre de l’OMS que nous a communiqué le D r Reznikoff. Les malvoyants sont au nombre de 124 millions, 37 millions de personnes étant en état de cécité. Les étiologies évoluent, en particulier dans les pays en voie de développement. Le glaucome et la cataracte restent au premier plan. Les clas- siques trachome, onchocercose et xérophtalmie sont en net recul grâce aux campagnes de soins et de prévention. La mauvaise nouvelle est l’é- mergence de pathologies jusqu’ici apanage des pays industrialisés : la DMLA et la rétinopathie diabétique explosent en Afrique et en Asie du sud-est. BUREAU Bernard Arnaud Président Christian Corbé Président d’honneur Georges Challe François Vital-Durand Christine Aktouche Vice-Présidents Béatrice Le Bail Secrétaire Marie-Cécile Geeraert Secrétaire Adjointe Hugues Paulet Trésorier 2 Labellisation du centre de référence pour les affections sensorielles génétiques. CHU de Montpellier 3 La vision artificielle. B. Arnaud 5 Progrès thérapeutiques dans la DMLA en chirurgie. C. Arndt 7 Progrès thérapeutiques dans la DMLA en nutrition. B. Arnaud 8 Quelques photos du 5 e Congrès de l’ARIBa. 9 Intrication de la réponse curative et de la réponse handicapologique à la vision fonctionnelle. Basse vision, vision fonctionnelle et qualité de vie : un nouveau langage pour l’évaluation et la prescription des soins. G. Dupeyron 11 État des lieux de la basse vision en France. C. Corbé MEMBRES Michel Algan Jean-Pierre Bonnac Yves-Salomon Cohen Catherine Dauxerre Bruno Delhoste Gérard Dupeyron Daniel Dupleix Roger Génicot Françoise Gerin Roig Dominique Martin Laurence Orveillon-Prigent Marie-Odile Pataut-Renard Nos remerciements à IPSEN et ESSILOR pour leur aide dans la réalisation de ce bulletin. Directeur de la Publication : Jean Mergier 12 chemin du Belvédère - 30900 Nîmes Tél. 04 66 68 00 30 - Fax 04 66 68 00 31 mél : [email protected] www.ariba-vision.org Éditorial Sommaire Suite page 2 Conseil d’Administration ARIBa

Éditorial Sommaire - Bienvenue sur le site ARIBa | ARIBa · 2013-06-06 · e dixième anniversaire de notre association approche, une occa-sion pour nous de réfléchir sur l’évolution

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Le dixième anniversaire

de notre association

approche, une occa-

sion pour nous de réfléchir sur l’évolution du

phénomène épidémiologique qu’est devenu la

basse-vision en France et dans le monde au

cours de ces dernières années.

«Glaucome, Diabète, DMLA des défis de santé

publique à relever en France dans les 10 années

à venir», c’est sur ce thème que, dans le cadre

de l’OPC (Organisation pour la Prévention de la

Cécité), M. le Professeur Pouliquen a réuni

quelques uns d’entre nous le 2 février à la

fondation Singer-Polignac.

161 millions de déficients visuels dans le monde,

tel est le dernier chiffre de l’OMS que nous a

communiqué le Dr Reznikoff. Les malvoyants

sont au nombre de 124 millions, 37 millions de

personnes étant en état de cécité.

Les étiologies évoluent, en particulier dans les

pays en voie de développement. Le glaucome et

la cataracte restent au premier plan. Les clas-

siques trachome, onchocercose et xérophtalmie

sont en net recul grâce aux campagnes de soins

et de prévention. La mauvaise nouvelle est l’é-

mergence de pathologies jusqu’ici apanage des

pays industrialisés : la DMLA et la rétinopathie

diabétique explosent en Afrique et en Asie du

sud-est.

BUREAU

Bernard ArnaudPrésident

Christian CorbéPrésident d’honneur

Georges ChalleFrançois Vital-DurandChristine AktoucheVice-Présidents

Béatrice Le BailSecrétaire

Marie-Cécile GeeraertSecrétaire Adjointe

Hugues PauletTrésorier

� 2 Labellisation du centre de référence pour les affections sensorielles génétiques.CHU de Montpellier

� 3 La vision artificielle. B. Arnaud� 5 Progrès thérapeutiques dans la DMLA

en chirurgie. C. Arndt� 7 Progrès thérapeutiques dans la DMLA

en nutrition. B. Arnaud� 8 Quelques photos du 5e Congrès de l’ARIBa.� 9 Intrication de la réponse curative

et de la réponse handicapologique à la vision fonctionnelle. Basse vision, vision fonctionnelle et qualité de vie : un nouveau langage pour l’évaluation et la prescription des soins. G. Dupeyron

� 11 État des lieux de la basse vision en France. C. Corbé

MEMBRES

Michel Algan

Jean-Pierre Bonnac

Yves-Salomon Cohen

Catherine Dauxerre

Bruno Delhoste

Gérard Dupeyron

Daniel Dupleix

Roger Génicot

Françoise Gerin Roig

Dominique Martin

Laurence Orveillon-Prigent

Marie-Odile Pataut-Renard

Nos remerciements à IPSEN et ESSILOR pour leur aide dans la réalisation de ce bulletin.Directeur de la Publication : Jean Mergier

12 chemin du Belvédère - 30900 NîmesTél. 04 66 68 00 30 - Fax 04 66 68 00 31mél : [email protected]

Éditorial Sommaire

Suite page 2

Conseil d’Administration ARIBa

Ce développement des maladies chroniques

liées au vieillissement et au changement

des modes de vie va imposer dans le futur

de nouvelles stratégies de prévention et de

traitement à moyen et long terme.

En France, nous le savons bien, prévention etdépistage sont dépendant de l’avenir de l’ophtalmologie et de la mise en place d’unenouvelle organisation du tissu médical.

Des initiatives originales sont apparues. Le comité de lutte contre le glaucome propose undépistage itinérant embarqué sur un camion. Unréseau de lecture de rétinophotos de dépistagede la rétinopathie diabétique se met en placegrâce à la télémédecine. Des logiciels d’analyseautomatique d‘image de fond d’œil sont encours d’étude pour ces pathologies.

Mais ces initiatives demeurent isolées et ne peuvent répondre à la forte demande despatients. Le succès de la journée porte ouvertede la SFO 2004 auprès du public a bien montrél’importance de l’attente de nos concitoyens.

La mise en place de réseaux de soins semblepouvoir répondre à une partie de ces besoins, lesmembres de l’ARIBa avec leur culture de la pluridisciplinarité en sont bien conscients. Undéfi est à relever : mettre en place ce maillage !D’autres solutions peuvent être proposées, ànous de les imaginer !

Quel beau défi pour notre association…

Dr Béatrice Le BailSecrétaire Association

Membre du Bureau ARIBa

Labellisation du centre de référencepour les affections sensorielles génétiques

Pr Bernard ArnaudProfesseur ophtalmologie, Chef de service au CHU de Montpellier

Le service d’ophtalmologiedu CHU de Montpellier vientd’être labellisé par leMinistère de la santé commeCentre de Référence pour lesAffections Sensorielles Géné-tiques (arrêté du 19 novem-bre 2004).

Le service d’ophtalmologie que dirige leProfesseur B. Arnaud devient le premier ser-vice ophtalmologique hospitalier français aêtre reconnu dans le cadre du suivi et destraitements des maladies génétiques. Il tra-vaille en lien étroit avec l’Unité INSERM 583de génétique des affections rétiniennes créeen 2002 sous la direction du Docteur Hamel,Directeur de Recherche et Coordonnateur dunouveau Centre de Référence.

Le Centre s’occupe du suivi et de la rechercheconcernant tout spécialement les affectionsrétiniennes génétiques dégénératives, dutype rétinopathie pigmentaire, maladie deLeber…, des neuropathies optiques géné-tiques, et également des DMLA. Il suit deuxmille cinq cents malades et plus de six centsfamilles atteintes, pour caractériser leuraffection, chercher les gènes cause de la mal-adie et les mécanismes de ces différentesaffections, avec, à plus long terme, l’espoirde pouvoir un jour les traiter.

La reconnaissance officielle de la part duMinistère de la santé accompagnée d’unbudget d’un million d’Euros va permettred’activer les recherches en cours.Dans le

ARIBa - Bulletin n°142

ARIBa - Bulletin n°14 3

cadre de sa mission, le service travaille égale-ment en étroite collaboration avecl’ARAMAV de Nîmes et l’Association SOS-Rétinite.

La vision artificiellePr Bernard ArnaudProfesseur ophtalmologie, Chef de service au CHU de Montpellier

À côté de la recherche médicale ou géné-tique visant à éviter l’évolution vers la cécitése développe la recherche sur la vision artifi-cielle visant à rendre une certaine acuité à

celui qui l’a perdue. Les circonstances sontvariables, la cécité survenant après uneatteinte de la rétine ou du nerf optique, ouune lésion cérébrale. Les solutions étudiéessont, elles aussi, très variables.

Les prothèses corticales

Le premier appareil, ou « œil électronique »selon ses concepteurs, est étudié par l’institutDobelle, l’équipe du National Eye Institute àBethesda, et celle de l’Université de l’Utah. Sinous en connaissons son principe nous avonsmoins de renseignements disponibles concer-nant les résultats actuels. Une vingtaine deperson-nes, pour la plus grande partie deve-nues aveugles à la suite d’un traumatisme,sont appareillées de cette façon.

Le premier procédé, datant de plus de vingtans, intéressait 3 patients. Deux étaient capa-bles de localiser une source lumineuse en uti-lisant une photocellule explorant le champvisuel, cette photocellule elle-même était enrapport avec un receveur vissé à la surface ducrâne. Des fils traversaient le crâne osseuxpour rejoindre la surface du cerveau où setrouvait une plaque portant 80 électrodes enrapport avec le cortex visuel. Un oscillateuractivait le receveur à l’aide de fréquenceradio.

Caméra

Signal versl'ordinateur

Signal modifiévers le cortex

Matrice d'électrodessur le cortex visuel

Figure 1 : Prothèse corticaleLes signaux d’une caméra vidéo sont traités

par un système informatique portable qui envoie des impulsions électriques vers des électrodes placées

sur le cortex visuel.

5e Congrès de l’ARIBaEn octobre dernier, l’ARIBa retrouvait Nîmespour son 5e congrès, présidé par le Pr BernardArnaud et organisé par le Dr GérardDupeyron. Le congrès avait pour thèmes prin-cipaux :

� La vue, la vision, le regard : une aventurehumaine, scientifique et technologique.

� La vision artificielle est-elle pour demain?� Organisation des soins : les réseaux de soins

basse vision.

Nous présentons dans ce numéro les textes dequelques présentations qui ne remplacerontbien sûr pas l’émotion du congrès ...Le spationaute Jean-Pierre Haigneré nousavait fait l’honneur d’introduire le congrès ennous retraçant son parcours de l’œil aigu dupilote jusqu’au regard du spationautecontemplant notre merveilleuse Terre.L’émotion s’est poursuivie au long des inter-mèdes de la troupe « La compagnie desOliviers» qui entrecoupaient les conférencesscientifiques et médicales d’interpellationspoétiques, nous rappelant à la manière duCharlie Chaplin de City Lights que la vue n’estrien sans le regard du cœur. Et la ruche bour-donnante des quelques 500 professionnelsophtalmologistes, orthoptistes, opticiens, ré-éducateurs et autres professionnels, qui for-ment la riche mosaïque de l’ARIBa s’est re-trouvée une nouvelle fois pour échangerdynamiquement autour de la Basse Vision.

ARIBa - Bulletin n°144

Avec ce système, les patients étaient capablesde voir des phosphènes dans différenteslocalisations du champ visuel ce qui apportaitla preuve qu’un tel dispositif pouvait activerle lobe visuel.

Cette première expérience n’entraînait quela vision de phosphènes et nécessitait l’usagede longues électrodes, il y avait des phosphè-nes douloureux dus à la stimulation desméninges, il existait un risque d’activité épi-leptique en relation avec la stimulation élec-trique.

Les premières modifications ont porté sur lesélectrodes, puis une caméra a été utilisée cequi a permis d’obtenir la vision de caractèresd’environ 10 centimètres de hauteur, situés à1 mètre. Les électrodes ont été insérées dansle lobe occipital, associées aux électrodes desurface. Le nombre d’électrodes a été aug-menté. Par la suite, les progrès de l’électro-nique ont considérablement amélioré l’effi-cacité et la miniaturisation du système.

Avantages et désavantages

Le crâne protège à la fois le système deplaques et d’électrodes, et court-circuite tousles neurones qui se trouvent avant le cerveauet qui peuvent être malades ou non fonc-tionnels. Ainsi, il y a possibilité de rendre ser-vice à un maximum d’aveugles. Toutefois,l’organisation spatiale est plus complexe auniveau cortical, et deux zones corticales voisi-nes ne correspondent pas nécessairementaux même zones voisines dans l’espace. Ainsiune stimulation à partir d’une forme peut nepas reproduire cette même forme. En plus,chaque petite zone cérébrale du cortex visuelest très spécialisée pour la couleur, la prépon-dérance d’un œil sur l’autre et les autresparamètres de stimulation visuelle. Enfin lescirconvolutions cérébrales superficielles ren-dent l’implantation difficile et les complica-tions chirurgicales peuvent induire des com-plications incluant le décès et ceci sur dessujets en pleine santé.

Les prothèses sur le nerf optique

Le nerf optique est formé par les axones descellules ganglionnaires venant de la rétine etallant vers le corps géniculé. Ce nerf peutêtre abordé chirurgicalement et il est possi-ble d’implanter à sa surface des électrodes.Mais la densité axonale est grande : plus d’unmillion de fibres sur un cylindre de 2 mm dediamètre. L’utilisation ne serait utile quedans les cas de pathologies des couchesexternes de la rétine. Ainsi quatre électrodessont implantées le long du nerf optique.

Les stimuli électriques appliqués sur le nerfoptique donnent des phosphènes localisés,parfois colorés, largement distribués surtoute la surface du champ visuel. Leur inten-sité peut varier en changeant l’amplitude, ladurée, la répétition des impulsions. Avec unentraînement, le patient peut reconnaîtredifférentes formes et même des lettres.Cependant, le nombre très important d’axo-nes fragiles, intriqués les uns sur les autres,rend difficile une stimulation précise.

Image/ Lumière

Implant épirétinien

Cellules ganglionnaires Cône

BâtonnetCellules bipolaires

Cellules amacrines

Cellules horizontales

Implant sous

rétinien

Signal

Électrodes de stimulation

Épithélium pigmentaire

Couche synaptique

interne

Couche synaptique

externe

Couche des fibres nerveuses

rétiniennes

Figure 2 : Implants épirétinien et sous-rétinien

ARIBa - Bulletin n°14 5

Les implants rétiniens

Les implants rétiniens représentent la troisiè-me variété des implants étudiés pour luttercontre la cécité. De nombreuses équipes yont consacré leurs travaux, mais pour l’ins-tant elles sont encore trop peu fiables et pra-tiques pour une application sûre chez l’hom-me. Il faut introduire les implants à l’inté-rieur de l’œil, ceci pouvant se faire à deuxniveaux.

Implant épi-rétinien

L’implant épi-rétinien est placé à la surfacede la rétine, il est donc en contact avec lescellules ganglionnaires et leurs prolonge-ments. Il est principalement prévu pour rece-voir des signaux électriques en provenanced’une caméra extérieure à l’œil, associée àune centrale de traitement d’images.Lorsqu’il est stimulé, l’implant épi-rétiniengénère des impulsions électriques qu’il vatransmettre aux cellules ganglionnaires,elles-mêmes en relation avec les fibresoptiques, le nerf optique, puis le cerveau. Lastimulation obtenue par ce type d’implantest moins structurée nécessitant un traite-ment spécial. L’implant lui-même est plus dif-ficile à fixer à la surface de la rétine, nécessi-tant l’utilisation de colles ou de clous réti-niens.

Implant sous-rétinien

L’implant sous-rétinien est placé sous la réti-ne en avant de l’épithélium pigmentaire, ilest donc au contact des cellules visuelles,cônes et bâtonnets.

Il se présente sous forme de très finesplaques de quelques dizaines de microns d’é-paisseur, elles sont équipées de microdiodeset de microélectrodes. L’ensemble reçoit lalumière qui va activer les microdiodes qui, àleur tour, vont stimuler les cellules visuelles.La mise en place des implants sous-rétinienest facile. Ils sont parfaitement maintenusaprès cette mise en place. La stimulation réti-nienne correspond à celle observée à l’étatphysiologique.

Les études actuelles portent sur la biocompa-tibilité. Il faut que l’implantation ne soitsource d’aucune inflammation, qu’elle nesoit pas biodégradable, qu’il n’y ait pas deproblèmes de corrosion. Il faut aussi uneénergie propre au système pour pouvoirfonctionner.

Progrès thérapeutiques dans la DMLA en chirurgie

Dr Carl ArndtMontpellier

La chirurgie de la dégénérescence maculaires’adresse essentiellement à la forme dite« humide » ou exsudative rétro-fovéolaire,même si certains opérateurs ont rapportéquelques séries limitées concernant la dégé-nérescence maculaire dite « sèche » ou atro-phique.

L’objectif chirurgical primaire dans la dégé-nérescence maculaire exsudative a été desoustraire la fovéa à l’action délétère de l’ex-sudation produite par la membrane néovas-culaire.

Les techniques chirurgicales quivisent à détruire la membrane néovasculaire

� En 1980, Machemer réalise une rétinoto-mie large et mutilante pour accéder à lamembrane néovasculaire. L’idée est amé-liorée, en 1991, par Thomas qui utilise unerétinotomie de petite taille qui suffit pourlaisser le passage des instruments sous-rétiniens et extraire la membrane. La tech-nique s’adresse aux membranes néovascu-laires situées en avant de l’épithélium pig-mentaire, seules directement accessiblesdans l’espace sous-rétinien. Néanmoinsl’ablation reste traumatisante et engendre

ARIBa - Bulletin n°146

une lésion de l’épithélium pigmentairesous-jacent en raison de l’attache du pédi-cule nourricier provenant de la chorioca-pillaire. Pour cette raison, une destructionde la membrane in situ en épargnant leneuro-épithélium a été envisagée par uti-lisation d’un laser.

� Le laser sous-rétinien simple proposé parThomas (1993) ou per-endoscopique misau point par Koch (2000) se base égale-ment sur une rétinotomie de petite taillequi permet l’introduction du laser ou d’unendoscope couplé à une fibre laser. Ellepermettrait une destruction limitée à lamembrane néovasculaire en épargnantdavantage l’épithélium pigmentaire, sur-tout dans le cas où le laser se fait souscontrôle endoscopique (Koch).

L’approche de ces deux techniques a pourinconvénient de n’épargner que partielle-ment les tissus adjacents à la membrane néo-vasculaire (neuro-épithélium et épithéliumpigmentaire) et de ne pas prendre en comp-te l’atteinte sous-jacente de l’épithélium pig-mentaire et de la membrane de Bruch à l’ori-gine de la néovascularisation. Pour atteindrecet objectif, il a été proposé de déplacer lafovéa à distance de la membrane néovascu-laire et disposer ainsi d’un épithélium pig-mentaire et d’une membrane de Bruchintacts : c’est la translocation.

La translocation

La translocation par rotation a été mise aupoint par Eckardt (1993). Elle est basée surune rotation de la rétine après une rétinoto-mie sur 360°. Elle est associée à la chirurgieoculomotrice pour compenser la rotation dupoint de fixation et à un tamponnementinterne par huile de silicone. La technique estefficace, mais aussi agressive, elle impliqueune durée d’intervention longue et un opé-rateur expérimenté.

La translocation dite « limitée » décrite etmise au point par De Juan (1998) est unetechnique élégante de translation de la

fovéa utilisant un raccourcissement scléralpour créer un excédent de rétine permettantde déplacer la rétine. Le principal inconvé-nient de cette technique est le caractère limi-té du déplacement (< 1000 µm) qui réduitl’indication à des membranes néovasculairesde petite taille.

Ainsi la translocation par rotation apporteune amélioration fonctionnelle qui est par-fois spectaculaire, mais elle reste une tech-nique d’exception réservée à quelques équi-pes entraînées. À l’inverse, la translocationpar translation est une technique plus aisée àmettre en œuvre, mais ses résultats fonction-nels restent décevants à long terme en raisondu faible déplacement.

Une autre approche chirurgicale de la dégé-nérescence maculaire est l’ablation chirurgi-cale du néovaisseau suivie d’une greffe tissu-laire d’épithélium pigmentaire isolée oud’une greffe en bloc d’épithélium pigmentai-re, de membrane de Bruch et de choroïde.

La greffe

Plusieurs équipes se sont intéressées auxgreffes d’épithélium pigmentaire (Peyman,1991). La technique se fait en trois étapes :prélèvement de cellules d’épithélium pig-mentaire autologues, chirurgie d’exérèse dela membrane néovasculaire, suivie d’undépôt cellulaire ou tissulaire d’épithéliumpigmentaire dans l’espace rétro-fovéolaire.Les résultats fonctionnels décevants sont pro-bablement liés à l’atteinte de la membranede Bruch sous-jacente qui limite la survie del’épithélium pigmentaire greffé.

De ces échecs relatifs dérive une autre appro-che, techniquement plus complexe qui faitappel à des autogreffes combinées épithé-lium pigmentaire-membrane de Bruch-cho-roïde, présentée par Van Meurs (2003). Lapremière série paraît encourageante tant auniveau de ses résultats fonctionnels qu’auniveau des récidives. Les résultats demandentà être confirmés.

ARIBa - Bulletin n°14 7

Conclusion

La prise en charge chirurgicale ne s’est pasimposée comme une modalité thérapeutiquecourante de la dégénérescence maculaire.Les techniques simples (exérèse, transloca-tion limitée) donnent des résultats fonction-nels décevants. D’autres techniques sont plusefficaces sur le plan fonctionnel, mais ellesfont appel à un haut niveau de technicitéliée soit au geste chirurgical (translocationpar rotation), soit à l’équipement nécessaire(laser endoscopique) limitant leur emploi àgrande échelle en comparaison avec la tech-nique de référence représentée par la photo-thérapie dynamique.

Progrès thérapeutiques dans la DMLA en nutrition

Pr Bernard ArnaudProfesseur ophtalmologie, Chef de service au CHU de Montpellier

L’importance du régime alimentaire sur lasanté est connue depuis très longtemps.L’exemple cité par tous les auteurs est celuidu régime crétois expérimenté en 1999 parRenaud et connu depuis 1951. À cetteépoque, l’étude épidémiologique de KeysAncel avait, après une dizaine d’années desurveillance, mis en évidence la différenceimportante qui existait entre les États-Unis etla Crète où le taux de mortalité de cause car-diaque était cinquante fois plus faible.Renaud a donné ce régime à un groupe depersonnes cardiaques et a comparé leurdevenir par rapport à un groupe de person-nes cardiaques ayant un régime classique. Lamortalité a diminué de 50 % dans le groupesuivant le régime crétois.

DMLA et vitaminothérapie

L’étude AREDS (groupe de recherche en char-ge de la dégénérescence maculaire) estparue en 2001. Elle s’intéresse directementau traitement préventif de la DMLA par unesupplémentation à fortes doses de vitaminesC et E, de bêta-carotène et de zinc. Son butétait d’administrer de tels produits et de voirsi leur administration peut retarder la pro-gression de la DMLA et ralentir la perte devision correspondante.

Dans ce but, 3640 patients, âgés de 55 à 80ans, ont été enrôlés dans l’étude : ils ont étésuivis 6,3 ans en moyenne.

Ces patients devaient présenter sur leur réti-ne des drusen, ou une atrophie géogra-phique non centrale, ou sur un œil une pertede vision due à la DMLA.

Ils étaient répartis en 4 groupes sans traite-ment, avec traitement partiel ou total :

1er groupe : avec peu ou pas de drusen,

2e groupe : avec drusen petits ou modérés,

3e groupe : drusen modérés à larges ou atrophiegéographique non centrale,

4e groupe : DMLA avancée ou perte de vision dueà la DMLA sur l’œil.

Sur les groupes 1 et 2 aucune modificationn’a été observée entre le groupe placebo etle groupe traitement total. Sur les groupes 3et 4 la probabilité de progression vers uneDMLA évoluée qui était de 28 % chez lessujets du groupe placebo n’était que de 20 %chez les sujets traités par l’association anti-oxydants et zinc. Des contre-indications peu-vent exister chez le fumeur en raison durisque augmenté de cancer du poumon dûau bêta-carotène. Des fortes doses de vitami-ne C peuvent également être responsablesde lithiases rénales.

ARIBa - Bulletin n°148

DMLA et acides gras polyinsaturés (Oméga 3)

Plusieurs arguments jouent en faveur d’uneéventuelle relation entre la DMLA et les aci-des gras polyinsaturés à longue chaîne de lafamille des Oméga 3. Les Oméga 3 tels que leDHA (acide docosahexaénoïque) ont un rôleimportant dans la physiologie vasculaire parleur action anti-angiogénique. L’on sait éga-lement que ces mêmes Oméga 3 ont un rôled’équilibre lipidique au niveau des segmentsexternes des photorécepteurs pour éviterleur dégradation. Enfin, les Oméga 3 ont unrôle anti-inflammatoire. Pour l’instant nousne disposons pour étayer ces hypothèses quede données laissant penser que la prise deDHA à forte dose diminuerait le risque desurvenue de DMLA.

De même, des études épidémiologiques por-tant sur des populations de malades, sem-blent montrer que les sujets mangeantdavantage de poisson seraient moins tou-

Quelques photos du Congrès…

chés. Actuellement une étude française esten cours avec des patients traités par DHA. Lerésultat sera connu dans quelques années.

DMLA et caroténoïdes (lutéine et zéaxanthine)

Les pigments maculaires sont constitués d’hy-droxycaroténoïdes (lutéine et zéaxantine).Dans la rétine, leur concentration est maxi-male au niveau de la macula centrale et dimi-nue ensuite rapidement en allant vers la péri-phérie rétinienne. La couleur jaune de lamacula est due à cette pigmentation quiabsorbe de façon préférentielle la lumièrebleue, constituant un filtre antioxydant lorsd’une exposition solaire. Ces produits ont-ilsun rôle dans la prévention de la DMLA ?Faut-il en prescrire?

De gauche à droite :

R. GénicotB. ArnaudM. Villain

B. DupeyronJ.P. Haigneré

De gauche à droite etde haut en bas :R. Sirven, M. ImbertB. Cadet, J. MergierG . GiraudetUne évocation de City Lights par laCompagnie desOliviers et une vue des stands...

ARIBa - Bulletin n°14 9

Intrication de la réponse curative etde la réponse handica-pologique à la vision fonctionnelle.Basse vision, vision fonctionnelle et qualitéde vie : un nouveau langage pour l’évalua-tion et la prescription des soins.

Dr Gérard DupeyronNîmes

Le concept thérapeutique de rééducationbasse vision est aujourd’hui bien reconnu parl’ensemble des professionnels de la vision.Par contre, cette rééducation reste relative-ment mal comprise, tant dans ses indicationsque dans l’évaluation de ses résultats.

Il existe en effet une certaine incompréhen-sion entre les intervenants de l’ophtalmolo-gie curative, et les différents acteurs de laréponse handicapologique à la déficiencevisuelle. Cette difficulté de compréhensionsemble essentiellement relever de l’existencede deux langages et de deux cultures diffé-rents. En effet, si la pratique de l’ophtalmo-logie quotidienne utilise essentiellementcomme moyen d’évaluation la mesure de l’a-cuité visuelle et l’examen du champ visuel,les rééducateurs s’attachent avant tout àl’exploration de la vision fonctionnelle et àl’évaluation de la qualité de vie.

Il paraît donc essentiel pour se rapprocher dudomaine de la basse vision d’essayer de com-prendre ce changement de concept et d’a-dopter un nouveau langage. Prenons par

exemple le schéma classique d’un patientatteint de dégénérescence maculaire liée àl’âge ayant suivi des séances classiques derééducation basse vision. Chez ce patientatteint de scotome central a été mis en évi-dence un point de fixation de suppléance.Une rééducation a été mise en place :

� motrice avec modification du réflexe defixation,

� sensorielle avec développement d’un nou-veau schéma rétino-cortical.

Cette rééducation a été complétée par uneprise en charge pluridisciplinaire (coordina-tion œil-main et ergothérapie). À la fin de ceprogramme, on sera tenté d’évaluer cepatient en se posant la question du gain d’a-cuité visuelle, par exemple sur une échelle deParinaud. C’est à ce niveau que s’illustre larupture entre ces deux milieux profession-nels et que se situe leur incompréhension. Eneffet, pour bien comprendre les résultats decette prise en charge thérapeutique, ilconviendra, comme nous l’avons dit, de faireappel à ces deux nouveaux concepts que sontla vision fonctionnelle et la qualité de vie.

Vision fonctionnelle

Le concept de vision fonctionnelle va explo-rer la vision dans ses multiples aspects. Bienplus qu’à l’acuité visuelle, au champ visuel età la vision des couleurs, il s’intéressera sur-tout à d’autres paramètres tels que la visiondes contrastes, l’endurance visuelle, la vitessede lecture. Il conviendra de tenir compte denombreux paramètres, en particulier la dis-tance de lecture, l’éclairage, l’attitude dutronc, de la tête et des yeux, et les caractèresde la lecture : lecture déchiffrée ou lue, lectu-re guidée ou spontanée, difficultés en milieuou fin des mots, signes fonctionnels associés.Notons également que l’utilisation des échel-les d’acuité visuelle traditionnelle est sou-vent obsolète et qu’il convient de s’adressersoit à des échelles spécialisées en bassevision, soit par exemple à l’échelle EDTRS.

ARIBa - Bulletin n°1410

Qualité de vie

La notion de qualité de vie nous renvoie auconcept d’handicapologie qui concerne lapersonne au sein de son environnement.Sans revenir sur les notions définies par lesclassifications internationales du handicap,remarquons que, bien souvent, les incapaci-tés sont beaucoup plus subtiles et complexesque ce qu’un premier interrogatoire rapidepourrait faire apparaître. Ainsi, dans le cas dela dégénérescence maculaire liée à l’âge, l’in-capacité intéresse-t-elle :

� la vision de près : lecture, écriture, contrô-le des gestes fins, activités de la vie quoti-dienne (bricolage, repas, couture) ;

� la vision de loin : conduite automobile,repérage dans les lieux inconnus, déplace-ment dans les lieux changeants (transportsen commun, carrefours) ;

� mais également la vision à mi-distanceavec le problème de reconnaissance desvisages et les incidences psycho-socialesmajeures engendrées.

Bien évidemment tous ces aspects là vontêtre vécus de façon différente selon la per-sonnalité du patient, son caractère, sonmode de vie, sa culture, son niveau socio-éco-nomique, son état général, son lieu de vie,son entourage, et nous savons que c’est à ceniveau que surviennent les notions dedépendance et de sur-handicap.

Afin d’évaluer tous ces éléments, nous pou-vons disposer de différents barèmes :

� Échelles de qualité de vie,

� Bilans d’indépendance,

� Diagrammes d’autonomie.

Ainsi donc, à l’évaluation ophtalmologiqueclassique, fondée essentiellement sur le cou-ple acuité visuelle et champ visuel, devra-t-on substituer l’évaluation basse vision fon-dée sur le couple vision fonctionnelle (quis’adresse beaucoup plus à la vision intégréepar le cerveau qu’à la vue elle-même) et qua-

lité de vie (qui concerne la personne dans soncontexte environnemental). C’est l’utilisationde ces deux langages complémentaires quipermettra de relier les milieux curatif et han-dicapologique.

Ce concept est non seulement intéressantpour évaluer les résultats de la rééducationbasse vision, mais également pour évaluer lesrésultats de certains soins curatifs tels que laphotothérapie dynamique (PDT). Ainsi, aprèsavoir traité un patient atteint de dégénéres-cence maculaire liée à l’âge par le procédé dePDT, aurons-nous souvent tendance à nouscontenter d’essayer d’évaluer les résultatspar la simple mesure de l’acuité visuelle, cequi s’avère souvent décevant. Si nous substi-tuons à ce schéma traditionnel, le schéma demédecine physique et de réadaptation :

� DMLA

� Traitement par photothérapie dynamique,

� Évaluation de la qualité de vie,

� Évaluation de la vision fonctionnelle,

non seulement pourrons-nous évaluer lecaractère positif des résultats de ce type detraitement, mais également pourrons-nousposer l’indication d’une rééducation bassevision qui viendra d’autant plus en optimiserles résultats.

Conclusion

En conclusion, il nous paraît essentiel que cenouveau concept soit connu dans les diffé-rents domaines de l’ophtalmologie. C’estd’ailleurs ce langage basse vision qui seral’indispensable outil de communication àl’intérieur des réseaux de soins basse vision.

ARIBa - Bulletin n°14 11

État des lieux de la basse vision en France

Pr Christian CorbéInstitution Nationale des Invalides, Paris

Définition

Difficile d’être exhaustif sur ce sujet, car laprise de conscience de cette entité spécifiqueest encore récente et certains restent sur leschéma des prises en charge anciennes. Deplus, la déficience n’est pas une entité uni-voque. La perte de vision peut être totale oupartielle, d’apparition brutale ou progressi-ve, etc. Ainsi, le retentissement fonctionnelest variable d’un sujet à l’autre et peut secumuler avec d’autres déficiences associées.

La déficience visuelle affecte princi-palementles personnes âgées. L’ensemble des donnéesépidémiologiques disponibles montrent quela prévalence de la déficience visuelle aug-mente de façon très importante avec l’âge,après 60 ans.

Contrairement à d’autres pays occidentauxqui disposent de sources d’informations surle handicap visuel (enquêtes longitudinalesde prévalence, registres...), il existe peu dedonnées sur ce problème en France. Lesenquêtes déclaratives de santé, régulière-ment menées, ne permettent pas de distin-guer réellement les difficultés rencontréespar les personnes malvoyantes ou aveugles,de celles présentant des déficiences visuellesplus légères.

Cependant ces derniers mois, plusieurs orga-nismes ont mis en œuvre des enquêtesexhaustives qui montrent que l’entité bassevision est devenue un phénomène de santépublique.

Intérêt

L’intérêt de la prise en charge de l’entitébasse vision est multiple. Il a été exacerbé parl’émergence récente de la dégénérescencemaculaire liée à l’âge, dont la prévalence estestimée à 20 % de la population occidentali-sée de plus de 65 ans dans les 10 années àvenir.

Intérêt sémantique

L’intérêt est d’abord sémantique, car actuel-lement se définit une nouvelle population depatients : les malvoyants. Il s’agit de maladesqui ne sont pas aveugles, mais presque, etqui possède encore une certaine quantité ouqualité de vision. L’ambiguïté est la difficultéd’analyse de cette vision et son utilisation enpratique courante. Que va-t-on faire de cereste visuel qui est un élément véritablementdérangeant pour le médecin, pour la maladeet son entourage ?

Intérêt médico-socio-économique

L’intérêt est médico-socio-économique. Eneffet, grâce à l’amélioration de la qualité devie, l’espérance de son allongement est unfait (témoin la réforme des retraites).Cependant cette période qui se voudraitsereine, est souvent altérée par des problè-mes de santé, où les maladies oculaires inva-lidantes tiennent une part importante, rédui-sant le périmètre d’autonomie, augmentantla dépendance, diminuant les capacités derésistance, et par là ouvrant facilement laporte aux affections opportunistes.

C’est ainsi qu’entre 1985 et 2005, l’augmen-tation de la population française sera de6,7 % avec une augmentation de 28 % desplus de 65 ans. Entre 2005 et 2025, cette augmentation est estimée à 36 %. De ce fait,le problème doit être pris en compte pourrépondre à cette phrase de Cicéron qui écrivait déjà : « la vieillesse est noble quandelle garde ses droits, se défend elle-même etne se vend à personne».

ARIBa - Bulletin n°1412

Épidémiologie

� Selon l’observatoire régional de la santédes Pays de la Loire, 3 340 000 personnesenviron présenteraient une déficiencevisuelle en France, soit un taux de préva-lence global de 57 ‰.

� Selon l’enquête décennale santé conduiteen 1990 par l’INSEE, la prévalence de ladéficience visuelle est estimée à 35 ‰.

� Aux États-Unis, selon la National HealthInterview Survey (NHIS) conduite annuelle-ment auprès d’un échantillon de 50 000ménages, la prévalence de la déficiencevisuelle modérée, chez les personnesâgées de 18 ans et plus, varie entre 36 ‰et 46 ‰ selon les années pour la périodede 1986 à 1995. Si l’on tient compte uni-quement des aveugles complets et mal-voyants, la prévalence de la déficiencevisuelle est estimée à 29,3 ‰ pour l’en-semble des 2 populations.

Selon l’ORS, la prévalence de la déficiencevisuelle grave augmente avec l’âge surtout àpartir de 70 ans. Les personnes âgées de 80ans et plus déclarent 10 fois plus de déficien-ces visuelles graves que celles âgées de 40 à59 ans.

Parmi les pathologies entraînant une défi-cience visuelle, deux sont très fortement liéesà l’âge : la cataracte dont la fréquence aug-mente à partir de 70 ans, et la dégénérescen-ce maculaire liée à l’âge qui apparaît plustardivement encore.

L’épidémiologie nous enseigne que lesbesoins existent. La méthodologie de priseen charge de ces patients existent égale-ment.

Méthodologie de prise en charge

� Elle s’adresse à toute personne présentantune atteinte visuelle bilatérale, quel quesoit son âge.

� Elle nécessite une évaluation initiale finedes capacités fonctionnelles.

� Le protocole de réadaptation proposé aupatient doit être pluridisciplinaire.

La prise en charge rééducative s’appuie surles capacités visuelles liées à l’état organiqueoculaire, mais aussi sur la qualité du traite-ment de l’information visuelle. Elle tientcompte de la qualité des interactions avec lesautres sens, de l’état moteur et cognitif dupatient. Elle suit une progression hiérar-chique en faisant évoluer les contenus phy-sique, perceptif et cognitif des exercices pro-posés et tient compte des capacités adaptati-ves propres à chacun. Elle assure la mise enplace des aides optiques et non optiques.Une évaluation finale permet d’objectiver lesrésultats obtenus par rapport aux objectifsinitiaux en réponse aux besoins.

État de la réalité de terrain

En fait, la prise en charge des patients « bassevision » est disparate, se faisant souvent enfonction des opportunités (une orthoptisteintéressée se met en relation avec un opti-cien, ou un ophtalmologiste...).

La position et le rôle des intervenants sontmal définis, parce que mal connus. Or,chaque discipline du groupe a un rôle précisqui est garant du succès du projet rééducatif.Le mélange des genres amène à beaucoupd’ambiguïté.

Une des causes essentielles de ce flou deprise en charge est l’absence de règles deconsensus. Plusieurs solutions sont propo-sées. Des fiches cliniques de prises en chargesont diffusées. Cependant, il n’existe pasd’attitude commune devant les procédures àmettre en œuvre. Cependant, soulignonsque cette nouvelle entité est d’une émergen-ce très récente et la question est encore desavoir s’il s’agit vraiment d’un problème desanté publique. De ce fait les modalités admi-nistratives de prise en charge sont encore fra-giles et incomplètes. Et bien plus, les procé-dures sont très chronophages.

ARIBa - Bulletin n°14 13

État de la prise en charge

Globalement, il est possible de distinguerquatre modes de prise en charge.

� En premier, se remarquent quelques cent-res très bien structurés, avec personnel etmatériels techniques adaptés. Ces centresréalisent l’évaluation, la mise en placed’un projet thérapeutique rééducatif, etle suivi. Les résultats obtenus sont globale-ment satisfaisants, mais là aussi, il n’existepas de méthodologie vraiment communeet homogène. Surtout, les échanges entreprofessionnels de ces centres sont rares. Ilsne se font que dans des forums généraux.

� D’autres mises en œuvre utilisent la formede réseau entre professionnels d’unemême ville ou d’une même région. Lespremières impressions sont satisfaisantes,autant de la part des rééducateurs que despatients.

� Parfois, faute de certaines spécialités,comme instructeur en locomotion ourééducateur en activité de vie journalière,les réseaux se constituent autour de l’oph-talmologiste, de l’orthoptiste et de l’opti-cien. Il est évident que les projets derééducation seront, dans ces cas, plusorientés vers le développement de lavision fonctionnelle pour des taches limi-tées.

� Enfin, on trouve des accords de circonstan-ces, avec des « alliances » diverses.

État de la formation

Il s’agit d’un véritable problème. Les ensei-gnements et les formations proposés ne sontpas homogènes et ne concernent pas toutesles disciplines.

Les ophtalmologistes se forment soit parcompagnonnage, soit en s’inscrivant auxquelques diplômes universitaires en place,citons :

� le D.U. Techniques de compensation duhandicap visuel à Paris V,

� le D.U. de rééducation orthoptique enbasse vision de Montpellier,

� le D.U. de basse vision de l’universitaireClaude Bernard, Lyon 1.

Les orthoptistes ont dans leur cursus unmodule basse vision. Elles peuvent, en plus,bénéficier des formations ci-dessus ou d’aut-res plus courtes, comme celles dispensées parl’Union Nationale pour la Recherche etl’Information en Orthoptie. On relève unenseignement spécifique basse vision à Paris,Montpellier, Lyon, Nancy, Strasbourg, Saint-Étienne.Globalement, 45 % des orthoptistes ont suiviune formation basse vision.

Les ergothérapeutes bénéficient des D.U. despécialisation ouverts après leur diplôme d’é-tat.

Les instructeurs en locomotion, denrée rare,se forment à partir du certificat d’aptitude àl’éducation et la rééducation de la locomo-tion auprès des personnes déficientes visuel-les. Ce certificat est délivré aux candidatsayant subi, avec succès, les épreuves en deuxparties organisées par le ministère des affai-res sociales. Les prérequis sont de possédersoit une licence en sciences et techniques desactivités physiques et sportives, soit un D.E.de psycho-rééducateur, de kinésithérapeute,d’ergothérapeute, etc. Il s’agit d’une spéciali-té rare du fait de l’étroite porte ouverte parles centres de formation agréés.

Les opticiens se forment, le plus souvent, lorsde stages consacrés à la base vision, mis enplace soit dans les centres constitués, soit parles groupes d’optique.

État du bilan pratique 2004

Une enquête intéressante de l’état des lieuxde la basse vision a été réalisée par « CarréBleu » très récemment. Carrés Bleus est unesociété qui propose à tous ses adhérents des

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formations et des services en matière desanté, de coût et de prise en charge des soins.

Cette étude a été menée auprès des princi-paux professionnels de santé de la vision : 5 333 ophtalmologistes, 493 orthoptistes et 1 383 opticiens ont été contactés. Ce qui apermis de réaliser 454 interviews d’ophtal-mologistes, 409 interviews d’orthoptistes et 1 204 interviews d’opticiens.

� Les ophtalmologistes indiquent recevoirmoins de 10 patients par mois et auraient55 nouveaux patients par an.

� Les orthoptistes indiquent recevoir moinsde 10 patients par mois et auraient 8 nou-veaux patients par an.

� Les opticiens indiquent recevoir moins de10 patients par mois et auraient 10 nou-veaux patients pas an.

� 65 % des ophtalmologistes prescrivent desséances de rééducation et des aidesoptiques.

� 97 % des orthoptistes effectuent des séan-ces de rééducation après avoir réalisé unbilan.

� Plus de 80 % des opticiens font un essaid’aide optique et la mettent à dispositiondu patient pendant 15 jours.

� 65 % des ophtalmologistes travaillent encollaboration avec les opticiens et lesorthoptistes.

� 52 % des orthoptistes travaillent avec desophtalmologistes et des opticiens conjoin-tement.

� 48 % des opticiens travaillent avec desophtalmologistes et des orthoptistesconjointement.

� Près de 90 % des patients basse vision ontplus de 60 ans.

Les difficultés rencontrées

D’après les opticiens et les orthoptistes, lesprincipales sources de difficultés de prise encharge sont :

� Le manque de motivation des patients,

� Les problèmes psychologiques,

� Les difficultés liées à l’âge,

� La déception des patients face aux résul-tats obtenus,

� Le prix de l’équipement,

� Le refus de l’acceptation du handicap.

Conclusion

Les besoins existent, la pertinence de la priseen charge est démontrée, les enseignementsont été élaborés, et les professionnels sontou peuvent être formés. Cependant, l’entité« basse vision ou malvoyance » se heurteencore à un manque de prise de consciencede ce qui est potentiellement un phénomènede santé publique, et aussi à un manque deprocédure généralisée.

Le Livre des Actes du 5e Congrès ARIBa des 8 et 9 octobre 2004

regroupant l’intégralité des communications est disponible sur commande au prix de 12 euros.

Pour de plus amples informations sur nos éditions, veuillez joindre le secrétariat

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