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UNIVERSITE DE FRANCHE COMTE
Faculté de Médecine et de Pharmacie de Besançon
EDUCATION NUTRITIONNELLE EN READAPTATION CARDIAQUE :
Comment améliorer l’accompagnement diététique des patients en unité
ambulatoire ?
Mémoire de Diplôme Universitaire d’éducation du patient
Christine FREYERMUTH
Juin 2009
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UNIVERSITE DE FRANCHE COMTE
Faculté de Médecine et de Pharmacie de Besançon
EDUCATION NUTRITIONNELLE EN READAPTATION CARDIAQUE :
Comment améliorer l’accompagnement diététique des patients en unité
ambulatoire ?
Mémoire de Diplôme Universitaire d’éducation du patient
Christine FREYERMUTH
Juin 2009
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A mon mari, merci pour ton aide, ton soutien, ta patience à toute épreuve (y compris quand la table de la salle à manger est restée encombrée de livres et dossiers sur
l’Education thérapeutique une bonne partie de cette année !!), ton coaching informatique parfois désespéré, ton écoute empathique dans les moments de
profond doute,……
A Maëlle, à qui je souhaite de prendre autant de plaisir à apprendre que ce que j’ai pu éprouver cette année ; restes curieuse de tout, épanouies-toi dans toutes les
rencontres futures et gardes tes facultés d’écoute…..
A mes parents qui m’ont inculqué le sérieux (côté paternel) et l’amour de la lecture et la curiosité intellectuelle (ça c’était maman, tu me manques !!)
A mes collègues de travail des Hauts de Chazal, équipe motivée et dynamique,
toujours partante, et à Philippe pour son soutien dans tout projet innovant, merci pour ta confiance…
Que chacun à sa place, avec ce qu’il apporte dans mon parcours, soit sincèrement
remercié
5
Remerciements Un grand merci à toute l’équipe de l’UTEP, qui nous a accompagnés pendant cette
année : votre enseignement a été riche, intéressant, vous avez réussi à dynamiser le
groupe que nous formions, contribuant grâce à la bonne humeur et à l’ambiance
sympathique dans laquelle se sont déroulés les différents modules, à rendre cette
année, certes studieuse , agréable et vivante…..Vos capacités d’écoute m’ont aidé à
cheminer dans mes réflexions et ont contribué à faire avancer mon projet, malgré
des périodes de doute ou de perplexité…..
Un merci tout particulier à Christine Kavan, son aide et ses lectures critiques de mes
écrits m’ont considérablement secouru dans les errances de rédaction de ce
travail…. Sa disponibilité et son attention m’ont beaucoup aidé à y voir plus clair et à
mieux préciser où je voulais aller…..
Je vous souhaite à tous de continuer ce magnifique travail dans le même esprit de
travail et d’écoute de l’autre….
6
SOMMAIRE
Remerciements Sommaire Table des sigles et abréviations Formulation de la problématique Synthèse bibliographique
1. Justification et contexte de la problématique 2. Comment l’éducation nutritionnelle peut-elle s’inscrire dans un
programme de réadaptation cardiaque ? 3. L’éducation thérapeutique nutritionnelle : quelle trame de prise en
charge proposer ? 4. Quelle démarche pourra contribuer à améliorer l’éducation du
patient ? Conclusion Rapport de stage (Clinique de la Reine Blanche à Orléans) 1. Présentation du lieu de stage 2. Le service de réadaptation cardiovasculaire 3. L’unité de réadaptation nutritionnelle 4. L’unité de RCV ambulatoire 5. Quelles sont les attentes des patients en matière d’alimentation Conclusion Pistes pour l’action A. Présentation de la structure B. Déroulement actuel de la prise en charge diététique des patients en RCV C. Et si on inventait une autre manière de faire ?
o Quels sont les objectifs de l’accompagnement diététique ? o Comment pourrait s’organiser l’accompagnement diététique
aux Hauts de Chazal ? 1. L’accueil et l’ambiance
2. Le 1er temps de la démarche éducative : le bilan partagé initial 3. Le plan d’action personnalisé 4. Evaluation de la démarche éducative
Synthèse personnelle Annexes Bibliographie Résumé et mots clés
P.5 P.6 P.7 P.8 P.10 P.10 P.12 P.12 P.15 P.16 P.17 P.17 P.17 P.23 P.29 P.31 P.33 P.35 P.35 P.36 P.40 P.40 P.40 P.40 P.40 P.45 P.48 P.51 P.53 P.68 P.70
7
TABLE DES SIGLES ET ABREVIATIONS ADLF Association des Diététiciens de Langue Française
AFDN Association Française des Diététiciens Nutritionnistes
AVK Anti Vitamine K
CRCP FC Centre de Réadaptation Cardio-Pneumologique de Franche Comté
DU Diplôme Universitaire
ETP Education thérapeutique du Patient
HAS Haute Autorité de Santé
HTA Hyper Tension Artérielle
RCV Réadaptation Cardio Vasculaire
RN Réadaptation nutritionnelle
SFC Société française de cardiologie
8
PROBLEMATIQUE
« De la diététique comptable et technique à la diététique d’accompagnement du
patient », ainsi pourrait se résumer ce « glissement » dans mon projet professionnel :
de la technique telle qu’elle est enseignée lors de la formation initiale des
diététiciens, basée sur la « prescription » diététique et sur une prise en charge
hiérarchisée , vers une démarche d’éducation personnalisée et dictée par le rythme
du patient. Cette transition s’est nourrie de mes expériences professionnelles auprès
desquelles j’ai pu puiser l’envie d’aller rechercher des données éclairant ma
réflexion : par rapport à l’aspect psychologique et humain de la prise en charge
nutritionnelle (par le biais d’ouvrages traitant de ces notions non enseignées lors de
la formation initiale) et par rapport aux notions d’éducation du patient découvertes
lors de formations précédentes , qui ont pu donner des notions de base en ETP et
l’envie d’en savoir plus !
Ma pratique actuelle en Centre de Réadaptation Cardiologique et Pneumologique
m’a amené à proposer depuis quelques années une organisation de prise en charge
diététique des patients accueillis. Un changement de locaux (l’emménagement est
en cours) va m’amener à investir de nouveaux lieux et de nouveaux outils de travail,
avec un nombre de patients accueillis plus important. Ces changements
s’accompagneront d’un temps dédié à la prise en charge diététique plus conséquent
et qui me permettra de passer à un accompagnement du projet de vie des patients,
grâce à une personnalisation du « soin diététique » prenant en compte leurs
attentes.
A cette fin, beaucoup de points restent à développer, notamment concernant la
création d’outils adaptés favorisant l’apprentissage, la compréhension de la
rencontre entre le patient et l’aidant, les façons de motiver le patient au changement
et l’évaluation des outils et des pratiques.
9
En débutant ce D.U., j’avais une certaine vision de l’ « éducation » : enseignement,
transmission d’un maximum de connaissances en un minimum de temps… il me
fallait convaincre le patient du bien-fondé de ma démarche dans un cadre
globalement assez « rigide ». Les premières sessions ont contribué à mettre en
évidence pour moi la nécessité de laisser le patient prendre du temps pour amorcer
les changements, ainsi que l’intérêt d’un projet éducatif individualisé et adapté à ce
rythme donné par le patient.
Les notions de rencontre avec l’autre et la mise en évidence des composantes qui
jouent dans cette rencontre sont des outils précieux dans la relation éducative et me
semblent en être le socle sur lequel toute démarche pourra se construire.
J’espère dans la suite de cette formation, trouver des outils permettant de mettre en
place un projet éducatif qui respecte et valorise chaque individu en s’appuyant sur
l’expérience et les représentations de chacun.
Le choix de ma problématique s’est fondé sur ces différents points évoqués, avec
l’éclairage nouveau apporté par le changement de locaux et l’opportunité de
retravailler le parcours du patient lors de son séjour :
« Education nutritionnelle en réadaptation cardiaque :
Comment améliorer l’accompagnement diététique des patients en
unité ambulatoire ? »
10
SYNTHESE BIBLIOGRAPHIQUE
Pour éclairer la problématique qui m’intéresse « Education nutritionnelle en
réadaptation cardiaque : comment améliorer l’accompagnement diététique des
patients en unité ambulatoire ? », il m’a semblé important dans un premier temps
de me pencher sur la justification de la question que je me posais et notamment de
savoir ce que la littérature apporte dans l’importance de l’éducation nutritionnelle
dans le cadre plus spécifique de la réadaptation cardiaque.
J’ai ensuite recherché comment cette éducation nutritionnelle pouvait s’inscrire dans
ce type de programme et partant de là, éclairer le cheminement de l’éducation
thérapeutique dans les différentes étapes de la démarche éducative.
1. Justification et contexte de la problématique
La Société Française de Cardiologie (SFC) rappelle les objectifs de la réadaptation
par la définition de l’OMS : « La réadaptation cardiaque est l’ensemble des activités
nécessaires pour influencer favorablement le processus évolutif de la maladie, ainsi
que pour assurer aux patients la meilleure condition physique, mentale et sociale
possible afin qu’ils puissent, par leurs propres efforts, préserver ou retrouver une
place aussi normale que possible dans la vie de la communauté ». (1)
Elle nous rappelle également que la réadaptation cardiaque nous fait côtoyer des
patients de pathologies diverses, coronariens, insuffisants cardiaques ou opérés. La
réadaptation a sa place dans le cadre d’hospitalisations de plus en plus courtes
assorties souvent d’un transfert de l’éducation thérapeutique plus précoce vers des
structures dont le rôle sera avant tout de faire en sorte de limiter « par toutes les
mesures possibles » les facteurs de risque, permettant de mieux les contrôler et
d’améliorer la qualité de vie.
Enfin, la SFC précise que la réadaptation cardiaque permet de créer un moment
privilégié pour l’information et l’éducation pratique des patients et de leurs familles,
grâce à des entretiens individuels ou collectifs…
11
Le contenu du programme nous est également proposé par P.MEURIN et coll. (2) :
à côté des techniques de reconditionnement à l’effort, il devra englober une prise en
charge des facteurs de risque répertoriés (dyslipémies, surpoids, HTA, diabète, aide
au sevrage tabagique), la réadaptation ne se limitant pas à la seule activité physique.
C’est l’éducation thérapeutique de ces patients qui permet, selon P.F.KELLER et
coll.(3), de limiter les risques de récidive par le biais d’une meilleure observance du
traitement et de meilleures connaissances chez le patient (de sa maladie et des
facteurs de risque).
Qu’en est-il de la spécificité de la prise en charge en ambulatoire ? Après la période
d’hospitalisation de durée de plus en plus courte (dite phase 1 de la réadaptation
cardiaque) , la phase de convalescence active en unité de réadaptation
cardiovasculaire (phase 2) permet une possibilité d’offre de soins en ambulatoire et
M.FERRIERE (4) constate que ce mode de prise en charge permet au patient de
conserver une vie familiale et sociale « normale » et qu’elle est particulièrement bien
adaptée à la population citadine (par rapport à l’éloignement fréquent des centres de
réadaptation en hospitalisation traditionnelle). Dans un contexte professionnel de
reprise de l’activité (dans environ 20% des cas, les patients reprennent une activité
professionnelle au moins à temps partiel), elle trouve avantageusement sa place et
permet également une transition facile vers la phase 3 (ou phase de maintenance,
reprise de toutes les activités normales et d’un suivi par les praticiens habituels du
patient).
La littérature s’est beaucoup penché sur la prise en compte des capacités physiques
du patient et de l’impact psychologique par rapport au poste de travail
(C.MONPERE) (5) mais il existe très peu de données sur l’impact nutritionnel, qui est
pourtant important dans le travail posté ou dans l’offre alimentaire organisée sur le
lieu de travail, et dont il faut tenir compte dans la prise en charge nutritionnelle.
12
2. Comment l’éducation nutritionnelle peut-elle s’inscrire dans un
programme de réadaptation cardiaque ?
N.MASSEBOEUF et F.DELESTRE (6) nous rappellent l’importance de la
participation et de la collaboration du patient, rendues quelquefois difficiles par le
côté « enquête » alimentaire de la première rencontre, qui souvent ne prend pas
vraiment en compte les facteurs familiaux, psychosociaux ou les attentes et
représentations des patients. Le patient se retrouve ainsi souvent standardisé et
donc passif jusque dans la remise du fameux « régime de sortie », encore trop ancré
dans la tradition diététique actuelle !
Faire un vrai bilan éducatif initial permet de se recentrer sur la « personne patient »,
la rendant actrice des changements, et ainsi potentialise les compétences qu’il peut
mettre en œuvre dans sa vie de tous les jours, dans son milieu familial et
professionnel.
Le rôle de la diététicienne dans le programme de Réadaptation Cardiaque pourra
ainsi amener le patient à réaliser son projet de vie par le biais de modifications de
ses habitudes alimentaires en partant de là où il est, en tenant compte de ses
représentations, et en l’accompagnant à son rythme en fonction de ses possibilités
d’apprentissages par le biais de séances éducatives adaptées et pertinentes.
3. L’éducation thérapeutique nutritionnelle : quelle trame de prise en
charge proposer ?
a) La première étape de la démarche éducative nutritionnelle
est le plus souvent la « Consultation diététique » : l’ADLF (devenue AFDN) et l’HAS
(7) se sont penchées sur cette partie de la démarche de soin diététique en proposant
une trame de recueil de données, qu’il faut prendre principalement comme un guide
général permettant de recenser outre les données administratives et médicales des
éléments du mode de vie du patient, en veillant à ne pas se laisser enfermer dans ce
cadre « questions/enquête » et en s’en détachant pour se laisser aussi guider par le
patient.
13
Reste cependant que le fait de bien connaître le patient à l’issue de ce 1er entretien
permet de renforcer ou de susciter sa motivation puisque comme le décrit
J.IGUENANE (8), cette connaissance permet de mobiliser les ressources
extrinsèques (celle de l’environnement) et intrinsèques (celle du patient).
A l’issue de cette 1ère étape, P.GIBELIN (9) propose une réunion de groupe (table
ronde des patients) avec des soignants-observateurs en position d’écoute ce qui
amènerait, selon lui, à un diagnostic éducatif « global ». Cette notion me semble
intéressante par rapport au ressenti face à la maladie, par rapport à la chronicité de
cette maladie ou au regard croisé des patients sur ces sujets (partage
d’expériences), mais ne devrait que compléter le travail en amont ou en individuel.
Elle pourrait en revanche faire émerger des attentes de la part des patients par
rapport à leurs inquiétudes ou à des sujets possibles à exploiter individuellement ou
en collectif. P.GIBELIN est très favorable à un contrat éducatif prenant en compte les
objectifs de sécurité (liste à cocher) et en « fin de contrat » les objectifs personnels
du patient, contrat donné à lire et à signer au patient ! N’est-ce pas là une obligation
donnée au patient de s’engager à apprendre ?
La notion d’« accord moral » et de négociation des objectifs (J.F.D’IVERNOIS et
R.GAGNAYRE (10)) lors des bilans éducatifs intermédiaires me semble davantage
adaptée, ressemblant de cette façon davantage à une feuille de route pour atteindre
un but négocié, approuvé et à l’initiative du patient.
b) La mise en place d’un Plan d’Action Personnalisé
Il me semble important de conjuguer les séances individuelles et collectives.
Sur les séances individuelles : en matière d’alimentation, il faut prendre en compte
l’aspect psychologique et sociologique dans ce sens où le comportement alimentaire
n’est pas toujours uniquement le fait de la personne elle-même mais relève aussi de
son histoire, de son vécu personnel et familial et que « changer ses habitudes » peut
aussi signifier « changer la façon de vivre et la façon de s’alimenter de toute la
maisonnée » (J.C.KAUFFMANN), obligeant quelque fois le « chef » à réviser
14
complètement ses références et son organisation (11) . Dans ce contexte, et si cela
correspond aux attentes du patient, proposer la présence d’un conjoint ou d’un
aidant culinaire me semble important.
Les séances collectives permettent aux patients d’échanger et de partager
expériences et/ou connaissances, dégageant ainsi une certaine émulation. La prise
en charge du groupe nécessite cependant une certaine habitude et le respect de
quelques techniques, bien décrites dans le livre de C.CARRE (12) : rester dans
l’empathie, faire confiance au groupe, tenir compte de l’unicité et de l’histoire du
groupe.
Il nous rappelle aussi qu’il convient pour l’animateur de bien utiliser ses ressources
verbales (le langage adapté, les termes à la portée des patients, des intonations
permettant l’accroche ou la relance du discours) et visuelles (gestuelles, supports)
sans oublier la vérification de la compréhension du ou des messages (définis par le
ou les objectifs de séance) ce qui sous-entend faire participer, pratiquer une écoute
active, réguler les échanges et poser des questions ouvertes ou renvois en
reformulant.
Au niveau pédagogique, il m’a semblé intéressant de rassembler plusieurs
techniques et modes d’apprentissage.
Chez P.GIBELIN (9), les séances collectives avec des techniques variées (technique
des ambassadeurs, groupe de parole, tables rondes, exposés interactifs…) peuvent
côtoyer l’auto-apprentissage (documentation écrite, ordinateur, Internet). A.LACROIX
et J.P.ASSAL (13) misent davantage sur l’apprentissage par la situation : le patient
acteur se confronte à une situation et mobilise ses connaissances afin de résoudre
un problème.
Cet apprentissage pourra se faire en triant, classant, examinant des aliments ou des
emballages (dans le domaine de l’alimentation) ou en se penchant sur une situation
(choix ou correction d’un menu par exemple) : cette formule attractive et participative
me semble adaptée à la pratique nutritionnelle et très aisément exploitable en un
temps réduit.
15
Ces séances qu’elles soient individuelles ou de groupe nous permettront là aussi de
renforcer la motivation des patients à condition d’intégrer des séances en adéquation
avec les projets et les problématiques du patient, en s’appuyant sur leurs
expériences et leurs ressources, en les faisant participer et en les valorisant
(J.IGUENANE) (8).
Les deux aspects (individuel et collectif) sont complémentaires dès lors qu’ils
correspondent aux attentes et capacités d’apprentissage des patients.
c) L’évaluation
Elle est indispensable à tout acte d’éducation et doit selon J.F.D’IVERNOIS et
R.GAGNAYRE (10) répondre à des critères de validité (choisir le bon outil en
fonction de l’objectif), de fiabilité (le résultat de l’évaluation est constant quelque soit
l’évaluateur), d’objectivité, de commodité, d’acceptabilité.
Avec ces critères, la formule proposée d’ESO (évaluation structurée objective) me
semble particulièrement intéressante parce qu’elle couvre un ensemble de
compétences, mobilisable en interdisciplinarité et sous forme d’ateliers ce qui permet
de bien cibler les objectifs issus du bilan partagé éducatif initial, et de constituer en
un lieu et un moment donnés une évaluation de l’ensemble des contenus du
programme de réadaptation.
Cette évaluation, en valorisant les acquis et les capacités à décider et à adapter ses
actions, va là aussi, être un élément clé de la motivation au maintien ou à l’initiation
du changement(J.IGUENANE) (8).
4) Quelle démarche pourra contribuer à améliorer l’éducation du patient ?
La démarche actuelle d’éducation nutritionnelle des patients en réadaptation
cardiaque reste classiquement orientée autour d’un suivi individuel (sous forme de
consultations diététiques « classiques ») et de séances collectives cadrées autour de
thèmes en relation avec les facteurs de risque cardiovasculaires (graisses, équilibre
alimentaire,…).
16
L’article de B.SANDRIN BERTHON (14) décrivant l’expérience d’un partenariat
soignants-patients dans le cadre du programme « En marche ! Mieux comprendre et
mieux vivre sa maladie artérielle » m’a convaincu de l’intérêt d’associer les patients à
l’élaboration de leur programme de réadaptation en partant du bilan initial, des
objectifs et des ressources de chaque patient.
L’idée de créer une feuille de route individualisée m’est apparue comme une solution
adéquate aux problématiques diverses posées dans le vécu quotidien du patient et
m’a amené dans un premier temps à travailler sur un questionnaire de recherches
des attentes des patients (présenté sur le lieu de stage et dans les structures de
travail actuelles) afin de cerner les attentes et les perceptions des patients
concernant leur prise en charge nutritionnelle.
Conclusion
Si l’éducation thérapeutique a été définie de multiples façons, la notion d’ « aventure
humaine » évoquée par B.SANDRIN BERTHON (15) me semble toute indiquée dans
ce qu’elle suppose d’inconnu, de cheminement commun, d’accompagnement.
Le soignant a bien sûr un projet pour celui qu’il accompagne ; ce projet ne se limite
pas à la « correction » de facteurs de risque dans une relation de domination ou de
prise de pouvoir, mais à une prise en compte de la globalité de la personne, toute
complexe qu’elle puisse être, et le soin apporté à cette rencontre particulière donnera
toute l’intensité et la richesse du chemin à parcourir.
Rendre le patient acteur de sa vie, avec sa maladie, en fonction de son vécu, de ses
attentes et de son ressenti, passe forcément par ce glissement si bien décrit par
D.COSTANTINI dans sa brillante conférence pendant ce DU quand il évoque en
parlant du management participatif le fait de passer de la « parole confisquée à la
parole donnée ».
Dans ce sens, l’éducation thérapeutique du patient n’est-elle pas une forme de
management participatif d’accompagnement et d’écoute, où le patient est au centre
de nos préoccupations ?
17
RAPPORT DE STAGE Afin d’éclairer ma problématique « Education nutritionnelle en réadaptation
cardiaque : comment améliorer l’accompagnement diététique des patients en unité
ambulatoire ? », j’ai choisi de découvrir un lieu proposant des activités éducatives
en partie différentes de celles que je connaissais, notamment par des ateliers
pratiques de cuisine. Il s’agissait aussi d’observer l’organisation de l’éducation
thérapeutique dans un établissement proposant une offre de soin analogue à celle
dont je dispose (réadaptation cardiovasculaire en ambulatoire) et enfin de pouvoir
proposer aux patients cardiaques un questionnaire destiné à faire émerger leurs
attentes ou les thèmes susceptibles de les intéresser de façon générale, dans le but
de faire évoluer mon propre projet.
1. Présentation du lieu de stage
La Clinique de la Reine Blanche est située à Orléans ; créée en 1970, elle a une
capacité d’accueil de 131 lits avec en particulier des lits de médecine dont 18 lits de
convalescence nutritionnelle, des services de médecine cardiologique, des urgences
cardio, 24 lits en réadaptation cardiovasculaire et 14 places en RCV en ambulatoire.
Les services dans lesquels j’ai pu observer le fonctionnement et la prise en charge
des patients sont la réadaptation cardiovasculaire, la convalescence nutritionnelle et
l’unité de RCV ambulatoire.
Le service diététique de l’établissement est représenté par trois diététiciennes (un
poste temps plein et deux postes à temps partiel) qui se partagent les divers services
de la Clinique et une quatrième diététicienne libérale qui effectue des vacations et
s’occupe plus particulièrement de la RCV ambulatoire ainsi que d’un atelier cuisine.
2. Le service de réadaptation cardiovasculaire
Il est organisé en service d’hospitalisation complète et reçoit des patients en
convalescence post-infarctus, des patients coronariens ou après chirurgie
cardiovasculaire (pontage, chirurgie valvulaire).
18
Le séjour est organisé sur trois semaines avec un programme de réentraînement (cf.
annexe 1) organisé autour d’activités de marche le long de la Loire à raison de trois
fois par semaine , de rééducation à l’effort sous forme de séances de cyclo sous
télémétrie ou rameur ou tapis roulant 4 x/semaine, et de balnéothérapie 3 x/semaine
ainsi que des séances hebdomadaires de gymnastique (sauf dimanche). Les
activités sont encadrées par 2 kinésithérapeutes affectés au service. Le programme
est affiché sur un tableau dans le couloir du service et les numéros de chambre des
patients concernés par les activités y sont joints et actualisés tous les jours.
J’ai pu suivre le cheminement d’un patient à son entrée dans le service. a) L’accueil du patient (arrivé peu après midi) est fait par l’infirmière du service qui
se présente et qui présente le service tout en expliquant au patient le déroulement du
séjour.
Elle fait un certain nombre de gestes techniques (prise de tension, ECG,
température, pesée) et pose des questions (fermées) afin de reconstituer l’histoire de
la maladie et le traitement en cours.
Cet accueil reste à mon sens très médical. Dans le cas observé, le patient était dans
une chambre à deux lits et le patient voisin a pu assister à tout l’entretien (cela ne
nuit-il pas à la qualité de l’entretien ?) : on aurait pu imaginer choisir un moment où le
patient était seul dans la chambre (le voisin n’était pas alité) ou faire l’entretien
ailleurs même si le fait de faire l’entretien dans la chambre peut rassurer le patient (la
chambre devenant en quelque sorte son « chez lui » pendant son séjour…).
Il n’y a pas de place faite lors de l’entretien aux notions d’attentes du patient, de
ressenti par rapport à sa maladie (patient ponté depuis une semaine) et pas assez
de questions ouvertes où pourrait s’inscrire le projet du patient. Il manque nettement
ce moment de « rencontre » dont le patient est le centre et celui-ci est resté passif et
objet de la rencontre plutôt qu’actif et sujet…
Les explications sont cependant claires quant au déroulement du séjour et aux
examens programmés (bilan sanguin le lendemain, consultations, radios…)
permettant de démarrer les activités rapidement.
19
Par ailleurs, le patient pourra être intégré à des réunions destinées à éclaircir des
points le concernant (par exemple au sujet des AVK ou des médicaments), réunions
d’information proposées par les infirmières du service, qui ont lieu dans une salle de
réunion et présentées sous forme d’un montage Power Point commenté.
Une des infirmières du service est plus particulièrement intéressée par l’éducation
thérapeutique et c’est souvent elle qui anime ces séances (elle était
malheureusement en congé maladie pendant mes trois jours de stage et je n’ai pas
pu la rencontrer !).
b) La démarche éducative nutritionnelle
La diététicienne rencontre le patient le lendemain de son arrivée. L’entretien a
également lieu dans la chambre du patient qui est en train de prendre son petit
déjeuner…. Le voisin est bien entendu aussi présent (et prend aussi son petit
déjeuner…).
Elle fait avec lui une « enquête alimentaire » (cf. support en annexe 2) destinée
d’une part à organiser les repas pendant le séjour (liste des goûts et non-goûts
alimentaires, composition et répartitions des repas pendant le séjour), ces repas
étant pris en salle à manger (sauf le petit déjeuner servi en chambre) et d’autre part
à relever les habitudes alimentaires du patient.
Les questions utilisées sont alternativement ouvertes et fermées, et amènent le
patient à « raconter » ses journées alimentaires, son mode de vie : lieu de prise des
repas, qui cuisine ?, rythme et horaires, fréquence de consommation des aliments,
raisons des choix alimentaires, contraintes liées à l’activité professionnelle…) , ses
habitudes en matière de cuissons (type de graisses, modes de cuissons privilégiées,
ainsi que l’histoire de son poids (ce patient avait pris 15 kg à l’arrêt du tabac un an
plus tôt).
Pour le patient rencontré, certains points évoqués auraient facilement pu faire écho
quant à la suite de la prise en charge nutritionnelle : patient âgé de 60 ans, vivant
seul, très intéressé par l’informatique (il communique par Internet avec ses enfants et
20
petits enfants), qui prend tous ses repas chez lui malgré la poursuite de son activité
professionnelle, qui fait la cuisine et aime cuisiner des petits plats (souvent en
sauce), prend quelquefois des recettes sur Internet ou dans des émissions culinaires
à la télévision. L’arrêt du tabac un an plus tôt avait occasionné une prise de poids de
15 kg (par augmentation des rations et des grignotages salés, ainsi qu’une
consommation accrue de bière en fin de journée). Cette prise de poids le préoccupait
et il avait conscience que son « entrecôte - frites devait être relégué aux
oubliettes »…, il avait entendu beaucoup de discours discordants par rapport aux
graisses recommandées et attendait des réponses à ce sujet.
La diététicienne lui a donné des éléments de réponses techniques par rapport au
poids (notamment par l’explication du régime mis en place pendant le séjour, par des
précisions quant aux quantités de féculents et de pain, adaptées aux habitudes
alimentaires et ré-évaluables en cours de séjour) et par rapport aux questions de
qualité de graisses (ces notions seraient reprécisées dans le document de sortie
prévu).
Elle lui a également précisé la possibilité de participer à un atelier-cuisine, activité qui
a d’emblée plu au patient (la diététicienne l’a d’ailleurs inclus dans l’atelier de la
semaine suivante).
En revanche, il aurait été judicieux d’approfondir davantage d’autres aspects mis en
évidence par l’entretien : l’intérêt du patient pour l’informatique et les recettes
glanées sur Internet ou à la télé (proposer un atelier permettant d’utiliser ces outils à
bon escient par exemple). La problématique du poids et de l’équilibre alimentaire
évoqués par le patient n’ont pas été exploités dans leur aspect « éducatif » mais
seulement dans l’aspect « régime » : il aurait été possible de l’intégrer dans les
séances éducatives prévues pour les patients du service « rééducation
nutritionnelle » par exemple…Dans ce cas les ateliers proposés auraient été mieux
adaptés et personnalisés.
Le bilan initial diététique reste très technique et seule l’activité cuisine et l’intérêt
qu’elle suscite auprès de ce patient est pris en compte. Pour des raisons
21
d’organisation et de temps, il n’y a pas vraiment de Programme d’action personnalisé
proposé.
Il m’a aussi semblé dommage qu’il n’y ait pas de Réunion interdisciplinaire pour
évoquer le projet du patient et les moyens de l’accompagner dans sa démarche.
Les informations glanées par chaque professionnel sont renseignées dans le dossier
du patient et visible par toute l’équipe mais un moment d’échanges ouverts entre
professionnels seraient un moment privilégié pour harmoniser l’accompagnement et
donner le même ton à tous les intervenants….
c) L’atelier cuisine
Organisation
L’atelier cuisine à destination des patients de RCV est animé par une diététicienne
qui exerce en libéral et qui effectue des vacations à la Clinique (50 heures/mois). Elle
intervient également dans le service ambulatoire de RCV. L’atelier a été mis en place
en 1990. La cuisine est une petite pièce bien claire mais sa taille ne permet pas d’y
accueillir plus de 3 ou 4 patients. Elle est bien équipée et permet de faire toutes les
préparations dans des conditions analogues à celles d’une cuisine familiale.
La diététicienne ne connaît pas les patients qui viennent à l’atelier mais la collègue
du service lui transmet les informations de base concernant les patients qu’elle va
rencontrer (ces renseignements de base concernent la pathologie, les habitudes par
rapport à la cuisine : ceux qui savent ou non cuisiner,….) ; il manque des
informations plus précises sur les attentes des patients (en relation avec les
renseignements recueillis à l’entrée par exemple).
Les patients sont choisis soit parce qu’ils ont manifesté de l’intérêt pour l’atelier lors
de l’entretien d’accueil soit parce que la diététicienne lui propose la veille d’y
participer en les invitant chacun individuellement (un des patients était d’ailleurs
assez peu motivé par l’activité quand on la lui a proposé !!)
22
Préparation de l’atelier
Le choix des recettes se fait selon la saison, et selon le menu de la semaine, sans
roulement particulier mais sans concertation avec les patients au préalable. Les
denrées sont préparées en cuisine, certaines préparations sont prévues à l’avance,
l’objectif de l’atelier n’étant pas forcément de « faire faire » mais plutôt une
démonstration participative si les patients le souhaitent. On tient compte aussi du fait
que certains patients de ce service sont fatigués et donc peu enclins à élaborer tout
le repas dans son intégralité.
Il m’a semblé que le choix des recettes aurait pu se faire en concertation avec les
patients au moins par rapport à leurs attentes ou préoccupations (par exemple
beaucoup d’entre eux disent ne pas bien savoir cuisiner le poisson, ou ne pas bien
savoir varier les préparations de légumes…..) : ne pourrait-on pas intégrer les
notions de connaissances et d’attentes des patients dans le choix des recettes ou
des thèmes de l’atelier ?
Déroulement de l’atelier
Les patients sont cherchés dans le service et accompagnés jusque dans la cuisine
où l’atelier peut commencer tout de suite (après lavage des mains et notions
d’hygiène données) par un rappel du menu à préparer et une rapide revue des
recettes du jour.
Chaque patient a un exemplaire des recettes (liste des ingrédients, confection,
technique culinaire employée et extrapolation de cette technique) et peut y ajouter
les commentaires ou idées par rapport à la réalisation de la recette.
Pour cet atelier en particulier, il y avait 4 patients dont 3 hommes (aucun des 3 ne fait
la cuisine habituellement) et une femme (bonne cuisinière et très intéressée).
On remarque rapidement que les échanges se font très facilement entre les patients
et que même les non-cuisiniers partagent leur expérience et leurs idées sur les
recettes réalisées, chacun étant invité à participer à tour de rôle aux préparations
(couper les tomates, préparer la gélatine, décorer les assiettes, chacun fait sa
papillote de poisson).
23
Au fur et à mesure du déroulement de l’atelier, la diététicienne donne des « trucs »
ou idées pour alléger les recettes, pour transformer des recettes « de famille » en
recettes plus « light », pour donner des informations pratiques sur les qualités de
graisses recommandées ou les édulcorants….
L’atelier se finit par la dégustation de ce qui a été préparé, ce qui est à nouveau
l’occasion d’échanger entre les patients, de poser des questions et finalement de
livrer des préoccupations qui n’auraient pas eu d’autre endroit pour être
évoquées…..
Dans ce sens, il m’a semblé que le déroulement de l’atelier a été conforme à une
démarche éducative correcte, dans ce qu’il a permis aux patients présents
d’exprimer des difficultés ou des interrogations par rapport à certains points
concernant leur alimentation en fonction de leur pathologie .
De façon générale en ce qui concerne les patients de ce service de RCV, il m’est
apparu qu’il n’y a pas vraiment une démarche éducative organisée, les
professionnels chacun de leur côté « font de l’éducation », dans le sens
enseignement, transmission de connaissances mais l’aspect relationnel et partagé
de l’éducation qui parte du patient et qui soit centrée sur ses attentes et objectifs m’a
semblé très nettement insuffisant voire absent….
3. L’unité de réadaptation nutritionnelle
Elle accueille dans un service de 18 lits des patients souffrant de maladies
métaboliques et nutritionnelles dont certains font un séjour dans le but de perdre du
poids.
Mon stage s’étant déroulé pendant la période des congés scolaires de la zone
d’Orléans, j’ai pu constater que 2 préadolescents accompagnés de leurs mères ainsi
que 3 adolescentes étaient en « cure d’amaigrissement » pour cette période.
24
Le parcours diététique de ces patients se fait sur deux plans :
a) Une prise en charge individuelle sous forme d’un bilan alimentaire initial du
même type que celui décrit en RCV, enquête alimentaire sur le même modèle
(questions fermées et ouvertes, relevé des habitudes de vie…) suivi de l’intégration
des patients dans un cycle de 4 séances d’éducation de groupe et éventuellement
d’un atelier cuisine. Ces patients sont plus dynamiques, souvent plus jeunes et
moins fatigués que les patients de RCV.
b) Les séances éducatives de groupe se passent dans une petite salle de
gymnastique (le nombre de chaises est insuffisant et le seul support mural sous
forme d’un tableau blanc est inaccessible parce que les tapis de gym sont stockés
devant !!). Ces séances sont au nombre de 4 (une par semaine) avec des thèmes
abordés différents à chaque fois.
1ère séance : Equilibre alimentaire, connaître les aliments et nos besoins. Cette
séance est destinée à faire découvrir les groupes d’aliments, leurs intérêts et leurs
compositions.
2ème séance : Comment adapter ses menus quand on mange au restaurant ou quand
on est invité ? Cette séquence propose de savoir comment gérer les repas
exceptionnels en fonction des choix possibles.
3ème séance : Garder la ligne tout au long de la journée (séance à laquelle j’ai assisté
et sur laquelle je reviendrai dans la suite).
4ème séance : Devenir un consommateur averti ou l’art de « décoder » les étiquettes.
Cette séance consiste à observer et à comprendre l’étiquetage des produits et
dépister les produits trop gras, trop sucrés.
La séance à laquelle j’ai assisté a réuni une quinzaine de patients (dont 3
adolescentes et 2 « préadolescents » d’une douzaine d’années avec leurs mères.
25
Le déroulement de la séance a permis dans un premier temps de revenir sur des
notions déjà évoquées lors de séances précédentes et de faire participer les
patients. L’objectif de la séance, annoncé au début, est clair et le plan de la séance
est donné d’emblée : discussion ouverte pour passer en revue les 3 repas de la
journée et savoir de quoi ils devraient se composer pour être équilibrés puis exercice
pratique de mise en application des principes énoncés. Ce plan est d’ailleurs suivi
comme prévu.
Il n’y a pas de présentations faites (ni des patients mais ils se connaissent déjà tous
pour la plupart, ni de la diététicienne qui aussi connaît déjà tous les patients pour les
avoir rencontré en consultation d’entrée)
La diététicienne fait beaucoup participer les patients, répond aux questions qui
émergent au fil de la discussion, fait participer les enfants et adolescents présents et
reformule bien en complétant les réflexions des patients, les notions d’équilibre
alimentaire et le contenu type de chaque repas.
La séance finit par un exercice fait par petits groupe de 2 -3 personnes (cf annexe
3) : faire un menu équilibré d’une journée (midi et soir) avec une liste d’aliments
imposés. La diététicienne passe dans les différents groupes pour discuter, répondre
aux questions, voir les menus proposés et apporter les conseils nécessaires.
Il m’a manqué, en observant la séance :
→ Un support (il m’aurait semblé important d’écrire les points clés (le tableau
inaccessible ne le permettait peut être pas !!) pour permettre aux patients à
l’aise dans une perception visuelle de mieux assimiler les messages.
→ Il m’aurait également semblé pertinent de proposer une « séance spéciale »
pour les ados et préadolescents, leurs attentes et leurs motivations n’étant
pas les mêmes que ceux des adultes présents même si le fait de participer
aux mêmes activités (y compris la rééducation et les activités sportives
adaptées) finit par créer un groupe uni et complice, où les patients se
connaissent mieux et peuvent avoir des relations amicales (notamment entre
ados par exemple). Les repas « fast food » ou les plateaux télé sont par
26
exemple davantage dans leurs habitudes que dans celles de leurs aînés et
auraient pu faire une spécificité dans ce type d’exercice !
→ Enfin, il manquait en fin de séance un moment pour faire un retour sur
l’exercice proposé avec éventuellement un exemple de menus (proposé par
un des groupes de patients par exemple) qui aurait permis de revenir sur les
principes et objectifs de la séance ou de faire émerger des réactions ou
questions de la part des patients dans les différents groupes constitués pour
l’exercice.
→ Il n’y a pas non plus de la part de celle qui anime la séance de temps de pris
en fin de séance pour rapidement évaluer la séance (l’idée d’un carnet de
bord des séances collectives me semble à cet effet un outil recommandable,
au minimum pour faire le point de temps en temps, pour poser les
impressions générales et s’en servir pour améliorer ou modifier les contenus
des séances, les adapter aux patients, l’habitude de faire les séances étant
quelquefois un frein aux changements…).
c) L’atelier cuisine
Organisation
L’atelier cuisine proposé aux patients de RN est animé par une des diététiciennes de
la Clinique (elles interviennent à tour de rôle sur l’atelier). La diététicienne qui anime
l’atelier ne connaît pas forcément les patients, même si le choix des patients invités
est fait par la diététicienne du service. Là aussi le choix des patients passe par
l’intérêt du patient pour la cuisine mais aussi dans un but d’éducation à l’attention
des adolescents par exemple. Les invitations sont faites individuellement et à
l’avance, le menu et les recettes qui seront réalisées également (cf. annexe 4).
Préparation de l’atelier
Les recettes sont choisies en fonction des menus de la semaine et des saisons, mais
tiennent aussi compte des non-goûts des patients (dans le groupe présent ce jour-là
27
par exemple, une adolescente ne mange ni poisson ni certains légumes et le menu
sera choisi en fonction de ces données).
L’objectif de l’atelier cuisine est double :
• « Faire faire » les recettes du menu
• Travailler sur les notions de quantités et de parts de féculents et de pain
Déroulement de l’atelier
L’atelier a regroupé 4 patients : deux femmes (30 et 62 ans) qui ont l’habitude de
cuisiner et qui se disent très gourmandes, un homme de 57 ans qui cuisine souvent
(il dit que c’est lui qui a appris à cuisiner à son épouse !) et Morgane (15 ans) qui ne
cuisine pas et pour qui c’est la première fois qu’elle a l’occasion de « toucher de la
viande » !!
Ici, la participation et l’action sont les maîtres mots, chacun participe et fait une partie
des recettes, chacun fait sa papillote de lapin. Au cours de l’atelier, on évoque les
notions de qualité des graisses, les différents types d’édulcorants utilisables pour les
desserts (avec des emballages de divers produits à disposition) mais aussi des idées
de décorations de plats, on évoque les notions de couleurs et de présentations des
plats, les notions de variétés et de saisonnalité….
Les discussions et échanges vont bon train et les expériences des uns et des autres
sont échangées facilement, les questions posées sont pertinentes et reflètent
souvent les difficultés quotidiennes des patients (notamment le suivi au long cours
des habitudes alimentaires ou du « régime », l’adaptation des repas en tenant
compte de la cantine pour Morgane, du self pour les adultes) et leurs
questionnements (la maman de Morgane suit un régime hyper protéiné et Morgane
se demande si c’est bien et si elle-même ne pourrait pas suivre le même régime).
J’ai eu la sensation que le lieu, l’activité, la taille du « groupe » favorisait bien
l’échange, les questions, les patients pouvant discuter entre eux et avec la
professionnelle de l’alimentation ; les échanges permettent de faire davantage
émerger le vécu et le ressenti que dans un groupe plus grand ou même en
individuel (les choses étant suscitées différemment).
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Pendant la cuisson des papillotes, la diététicienne propose un petit exercice
d’estimation de poids de féculents, chaque patient présent connaît les poids de
féculents et de pain qui lui est attribué dans le cadre de son régime et il s’agit de
couper la quantité de pain qui lui convient et de confirmer l’estimation par une pesée,
puis de la même façon d’évaluer la quantité de pâtes qui lui est destinée , en
travaillant aussi sur les notions de contenants (des bols de 3 tailles différentes étant
utilisés pour cet exercice), permettant d’évoquer les notions de « visuel » à la fois par
rapport aux quantités et par rapport à la satiété.
Cet exercice a beaucoup plu aux patients présents, chacun étant invité à donner son
avis et son ressenti (confronter l’impression qu’on a à la réalité de la pesée).
L’atelier finit bien sûr par la dégustation du menu réalisé, autour d’une table (avec un
mini cours de pliage de serviettes improvisé par une des patientes présentes), avec
échanges des impressions et appréciations par rapport au goût de ce qui a été
cuisiné (Morgane se découvre des talents de cuisinière et est impatiente d’épater sa
maman par les recettes qu’elle compte bien refaire !).
Les objectifs et le contenu de cet atelier m’ont semblé pertinents, adaptés au public
présent, même si là encore l’opportunité de proposer une séance « spéciale ados »
pourrait être discutée puisque d’un côté le fait de grouper des patients aux attentes
et problématiques proches est intéressante et la présence sur cette période de
plusieurs ados aurait pu justement favoriser un tel atelier à thème , mais d’un autre
côté l’immersion de Morgane dans le cadre de cet atelier s’est faite facilement et a
bien été vécue par les adultes comme par Morgane.
Par contre, l’évaluation de la séance par les patients comme par la professionnelle
ne se fait pas ni « à chaud » ni « à froid », et cet élément manque là aussi dans la
démarche éducative entreprise….Il me semble indiqué de faire au minimum de
temps en temps mais régulièrement une évaluation du contenu de la séance, de son
vécu du côté du patient et de s’assurer que la séance a correspondu à ses
attentes,…..
29
4. L’unité de RCV ambulatoire
L’unité accueille 12 à 14 patients pour des demies journées, et ce en général après
leur convalescence en hospitalisation complète à la clinique mais aussi quelquefois
en séjour annuel autorisé.
Le schéma proposé pour les patients est donc :
RCV avec épreuve d’effort d’entrée
3 semaines d’hospitalisation complète avec programme
de réentrainement et ateliers éducatifs
Epreuve d’effort de fin de convalescence
20 séances de RVC en ambulatoire
Epreuve d’effort de fin
Eventuellement
Phase 3 ( Coeur et Santé )
30
La fréquence de présence est généralement de 2 à 3 séances par semaine, le
programme de la ½ journée étant toujours fixe :
14h00 – 14h30 Accueil (infirmière) : pesée, prise de tension
14h30 – 15h00 Gym
15h00 – 15h30 Cyclo
15h30 – 16h00 Repos
16h00 – 16h30 Cyclo ou balnéo
16h30 – 17h00 Repos, douche, préparatifs et fin des séances
Le suivi diététique de ces patients s’articule autour d’une consultation individuelle
programmée au bout d’une semaine de présence du patient. L’entretien a lieu dans
un bureau mis à disposition dans le service de RCV. La diététicienne peut organiser
un entretien d’une heure sur l’après- midi, le patient étant alors exempté d’une
séance d’activités physiques.
Le patient aura déjà eu un suivi diététique pendant son hospitalisation (Cs d’entrée +
Cs fin de séjour avec remise d’un document de sortie) et aura éventuellement pu
participer à un atelier cuisine.
Au cours de l’organisation du rendez-vous avec la diététicienne, l’infirmière remet au
patient un questionnaire de fréquence de consommation et un journal alimentaire sur
une semaine que le patient apportera pour sa consultation diététique (cf. annexe 5).
Lors des rendez vous diététiques auxquels j’ai pu assister, la diététicienne rappelle le
but de cette rencontre : faire le point sur l’alimentation actuelle et les éventuelles
difficultés rencontrées depuis l’hospitalisation. Elle revoit ensuite avec lui les
documents apportés par le patient, faisant émerger les difficultés rencontrées par le
patient, son ressenti par rapport à son alimentation (un des patients rencontré était si
angoissé après son infarctus qu’il ne mangeait plus de graisses du tout et avait perdu
10 kg en une année) et les questions qui se posent dans le quotidien.
Le journal hebdomadaire permet de dépister les carences éventuelles (par exemple
un manque de laitages chez un autre patient diabétique) et amènera à fixer un ou
31
deux objectifs, discutés et validés avec et par le patient, remis sous forme d’un
document écrit, ces objectifs étant reformulés avec le patient.
Un suivi pourra éventuellement être proposé (mais non systématique quelque soit
l’objectif mis en évidence), si le patient en éprouve la nécessité.
La synthèse de l’entretien est mise dans le dossier du patient et sera ainsi visible par
l’ensemble de l’équipe soignante mais là encore, aucun moment de rencontre entre
professionnels n’est prévu pour coordonner les actions autour du patient, ou avec
celui-ci !
En revanche, la reprise par la diététicienne des notions acquises lors du séjour
hospitalier me semble pertinente et les objectifs dégagés avec le patient sont
cohérentes avec une démarche éducative réfléchie. Le patient peut s’exprimer, peut
évoquer les difficultés rencontrées et son ressenti dans son quotidien, la
diététicienne a une attitude d’écoute empathique et arrive à faire s’exprimer le patient
sans contrainte.
5. Quelles sont les attentes des patients en matière d’alimentation ?
J’avais élaboré en vue de ce stage, un questionnaire (cf. annexe 6) pour les patients
destiné à cibler leurs attentes en matière d’alimentation. L’objectif était, en terrain
« neutre » (je ne connaissais pas les patients et eux non plus ne me connaissaient
pas), d’évaluer et d’interviewer les patients, permettant de faire émerger leurs
attentes, leurs intérêts et leurs suggestions par rapport à leur prise en charge
diététique.
Le questionnaire a été distribué par mes soins aux patients du service de
convalescence de RCV, en même temps j’ai donné le but de ma démarche et des
explications par rapport aux questions posées. J’ai proposé de laisser le
questionnaire et de venir le récupérer dans la journée avec possibilité d’en rediscuter
avec les patients qui le souhaitaient.
Le questionnaire a été remis à 16 patients dont 6 femmes. 1 des patients n’a pas
redonné son questionnaire (sortant du jour).
32
Il ressort de ce questionnaire que :
→ Les attentes des patients sont surtout orientées vers les notions de repas
adaptés, équilibrés, certains attendent des recommandations précises avec
des listes d’aliments interdits et autorisés et des conseils en matière d’achats
afin de savoir quoi choisir. Un des patients évoque des notions de messages
contradictoires (il a eu des informations d’une diététicienne de l’hôpital où il
avait été opéré, qui ont été contredites par les notions qu’il a eu à la
clinique). Ils ont besoin d’être confortés dans le fait qu’il va leur falloir
modifier des habitudes de vie mais souvent ils ne savent pas vraiment en
quoi consistent ces changements ; les messages qu’ils ont eu à l’hôpital ont
souvent été délivrés dans des conditions de stress particulières et ils n’ont
pas vraiment enregistré ce que les professionnels leur ont dit.
→ Quand on interroge les patients sur les thèmes qui les intéressent, on
constate que les sujets qui reviennent le plus souvent sont : les conseils
d’achats pour 9 d’entre eux (faire les courses, choisir les produits), puis les
conseils pour élaborer des menus et organiser ses repas pour 8 patients.
Les patients attendent également des conseils sur les choix des graisses,
aimeraient connaître les principes d’une alimentation équilibrée et certains
s’interrogent sur la possibilité de concilier équilibre alimentaire et coût
modéré. On constate aussi que le côté pratique (choix des menus au
restaurant, garder les recettes de famille et savoir les adapter) est également
évoqué. Une seule personne par contre se dit intéressée par l’atelier
cuisine !!
→ Dans la question sur la présence d’un conjoint, seuls 2 personnes les ont
inclus mais les patients présents sont souvent loin de chez eux et les
conjoints sont peu disponibles (et les 6 femmes ne les ont pas inclus !!)
Mon idée était de départ était de me servir de ce questionnaire sur mon lieu de
travail pour en faire la base du carnet de route du patient pendant son séjour, mais
33
cette façon de procéder était trop protocolaire et j’ai finalement opté pour laisser
émerger les attentes des patients lors de l’entretien d’entrée par le biais de questions
ouvertes , en choisissant de travailler davantage cette étape afin de laisser le patient
apporter lui-même ses attentes et de les prendre en compte pour la suite de son
séjour.
CONCLUSION
Le stage effectué m’a permis d’observer et de comprendre un certain nombre de
points concernant la conduite à tenir lors d’entretiens et de séances de groupe.
Les points forts sont dans la variété de moyens éducatifs, d’outils et notamment
l’atelier cuisine, qui m’a semblé un outil riche et efficace, parce que pratique et
permettant aux patients de s’exprimer, de rester dans des éléments pratiques et
qui réussissent à susciter leur attention et les échanges qui en découlent sont
vivants.
Les points faibles sont dans les difficultés d’organisation globale de l’éducation
thérapeutique par manque d’un déroulement éducatif réfléchi : le bilan initial est
souvent abrégé et enfermé dans un aspect technico médical strict et il manque un
véritable plan d’action personnalisé centré sur le patient, alors que les outils sont
là et pourraient être exploités de façon très pertinente !! Il manque aussi une
concertation interdisciplinaire, qui pourrait là aussi optimiser l’accompagnement
des patients.
Néanmoins, j’ai pu enrichir la réflexion par rapport à ma problématique d’une part
par le biais de l’observation et de la participation à deux ateliers cuisine (cet outil
devrait se mettre en place prochainement dans mon établissement) et d’autre
part par le biais du questionnaire et du contact qu’il m’a permis d’avoir avec des
patients avec lesquels j’ai pu dialoguer et déterminer certaines de leurs attentes ;
là aussi cet aspect du stage m’a apporté beaucoup en termes d’informations et
pourra m’aider à faire évoluer ma réflexion.
34
Enfin, c’est aussi par l’observation d’éléments que je sais ne pas vouloir mettre
en œuvre que j’ai pu enrichir ma réflexion !!
35
PISTES POUR L’ACTION
Introduction
Dès le début de ce DU et le choix de ma problématique, il m’a semblé évident que
mes pratiques en éducation thérapeutique étaient à revoir sous un angle différent :
différent en ce que le patient n’était pas suffisamment au centre du projet
d’accompagnement, différent dans le sens où les méthodes utilisées de façon un peu
« machinales » parce que rôdées depuis quelques années déjà n’étaient pas
pertinentes, différent parce que la connaissance de la notion de rencontre avec le
patient ne m’était pas apparue comme essentielle jusque là….
Le choix de la problématique s’en est fait assez naturellement et la réflexion autour
de l’accompagnement des patients accueillis, avec les données spécifiques de
l’accueil en ambulatoire et la limite dans le temps de cet accompagnement, a pu se
nourrir des moments de partage lors des différents modules ainsi que par les
lectures et observations des étapes de ce DU (notamment pendant le stage effectué
à Orléans)
A. PRESENTATION DE LA STRUCTURE L’unité ambulatoire des Hauts de Chazal a été créée en Juillet 2000, se voulant être
un relais du CRCP FC situé à Pont d’Héry (39). Elle permet l’accueil de 20 à 24
patients en RCV le matin de 9 h à 12 h30, les après-midis étant consacrés à
l’accueil de patients relevant de pathologies pulmonaires.
Les patients de RCV sont en majorité accueillis après des pathologies coronariennes
(infarctus), après chirurgie cardiaque (pontage, chirurgie valvulaire), ou pour
insuffisance cardiaque. Il s’agit majoritairement d’hommes (il y a environ 15% de
femmes), les tranches d’âge représentées allant de 20 à 85 ans (mais les tranches
d’âge les plus représentées sont de 40 à 75 ans). Les patients sont généralement
issus des services de cardiologie du CHU Minjoz ou de la Clinique St Vincent de
Besançon et le délai entre leur hospitalisation et leur accueil en RCV peut être de
l’ordre de 4 à 6 semaines.
36
Les patients sont accueillis pendant 4 semaines (soit 20 séances de RCV), et
bénéficient pendant leur séjour d’un programme complet : réentraînement à l’effort,
éducation thérapeutique sous forme de séances collectives incluant les
médicaments, le tabac, l’alimentation, l’activité physique.
Le poste de diététicienne est (pour l’instant) un poste à mi-temps avec 30% dédié à
la RCV (soit 3 matinées par semaine) et 20% à la Réadaptation Pulmonaire.
B. DEROULEMENT ACTUEL DE LA PRISE EN CHARGE DIETETIQUE DES PATIENTS EN RC Le patient cardiaque accueilli est vu en premier lieu par le médecin et l’infirmière, lors
d’un entretien « général » permettant de mieux connaître le patient sur le plan
médical : pathologies, facteurs de risques, situation familiale et professionnelle,
activités physiques pratiquées, évaluation psychologique, ….
Cet entretien est complété par une épreuve d’effort permettant au patient d’intégrer
un groupe de RCV en fonction des résultats de cette épreuve d’effort (il y a trois
groupes de niveaux différents).
Lors de ce premier entretien, l’infirmière remet au patient un questionnaire de
fréquence de consommation des aliments et lui proposera de rencontrer la
diététicienne, en offrant toujours au conjoint la possibilité d’y participer. Elle fera
également avec le patient une visite guidée de l’établissement, ce qui lui permet de
se familiariser avec les lieux et avec le planning qu’elle explicitera à cette occasion.
Le patient est vu en consultation diététique pendant la première semaine de son
séjour, avec ou sans le conjoint. Cette consultation est le moment de faire le point
sur les habitudes alimentaires, de relever les changements déjà opérés depuis
l’hospitalisation (pendant laquelle les patients auront -ou non- eu l’occasion de
rencontrer une diététicienne), de reprendre les points encore incertains ou posant
problèmes.
37
Quelles sont les critiques possibles de cet instant de rencontre initiale ? Points forts
Points faibles
Temps donné au patient pour ce premier
entretien. Souplesse de l’emploi du
temps du patient sur la matinée
Place laissée à l’expression des
questionnements et attentes du patient
par rapport à ses choix alimentaires
Conseils personnalisés, adaptés aux
données apportées par le patient
Entretien ponctué de trop de questions
fermées
Entretien technique, « interrogatoire »
alimentaire (« mangez-vous de la
charcuterie ?, « avez-vous changé vos
utilisations de graisses ? »…)
Manque de place laissée à l’expression
des attentes ou questions en rapport
avec le vécu et sa situation propre
Mise en place d’objectifs trop généraux :
« équilibrer son alimentation »,
« équilibrer son diabète », « perdre du
poids » avec une liste de 4 ou 5 conseils.
En dehors de ce moment de consultation individuelle, chaque patient participe
« d’office » à 4 séances d’éducation collective consacrées à l’alimentation à raison
d’une séance par semaine et un thème différent par semaine.
Les thèmes proposés sont :
1. Alimentation crétoise : au cœur du problème (liens entre alimentation et
protection cardiovasculaire)
2. Les acides gras : les bons et les méchants…. (faisons le tri des aliments)
3. Et finalement, qu’est ce qu’on mange ? (notions de pyramide alimentaire)
4. Apprenons à lire les étiquettes…..
Pour ces séances les patients sont en groupe de 8 à 12 personnes, dans une salle
dédiée à ces activités….
38
A propos des séances de groupe….. Points forts
Points faibles
Salle claire, lumineuse, équipée de
chaises en nombre suffisant et d’une
table, de matériel informatique et d’un
projecteur.
Séances à thèmes, variées.
Choix d’interactivité dans les séances, à
l’aide de supports concrets (emballages,
photos), participation possible des
patients.
Document récapitulatif donné en fin de
séance, reformulé avec les patients,
quelquefois élaboré par eux
Caractère obligatoire des séances :
chaque patient participe d’office à toutes
les séances, ce qui n’est ni pertinent ni
adapté.
Séances trop scolaires induites par une
géographie de la salle non adaptée
Nombre de participants trop important
quelquefois.
Implication des patients encore
insuffisante : ils sont trop souvent
spectateurs plutôt qu’acteurs.
Absence d’évaluation des séances en
dehors d’une comptabilité des patients
présents !
Animation mono-céphale qui nuit à
l’objectivité et au recul nécessaire !!
Fort de tous les conseils « ingurgités » pendant toutes ces séances, le patient est , si
possible, revu en fin de séjour (souvent le dernier jour) : nous faisons un bilan du
séjour, avec « vérification » de la mise en œuvre des conseils personnalisés de
début de séjour et encouragements à persévérer dans les efforts entrepris, tout en
motivant à la poursuite des changements opérés. La porte est toujours laissée
ouverte à des échanges futurs, si les patients le désirent (directement ou par
téléphone, internet…)
39
Une évaluation globale du séjour (évaluation des connaissances et des savoirs) est
faite en équipe inter disciplinaire sous forme d’un jeu appelé « Questions pour un
cardio-champion » reprenant en deux ou trois questions par thème l’ensemble des
informations données aux patients pendant leur séjour.
A propos du bilan de fin de séjour Points forts
Points faibles
Temps consacré au patient dans la
phase de bilan de séjour
Possibilité de travail en inter
disciplinarité, disponibilité de l’équipe
Outil d’évaluation ludique
Evaluation exclusivement faite sur des
connaissances
Consultation de fin de séjour trop binaire
(« bien », « moins bien »).
Présence d’un nombre restreint de
professionnels lors du jeu final.
Si j’analyse mes pratiques « d’avant DU », et en observant cette façon de faire, je
constate que le but de mon activité était essentiellement d’arriver à donner le
maximum d’information (de cours, de conseils) dans le temps qui m’est imparti, avec
pour objectif de réussir à éliminer du paysage du patient cardiaque tout facteur de
risque alimentaire afin de prévenir la récidive. L’objectif est certes louable, mais
inatteignable si j’en juge par le retour de certains patients qui ont « oublié » au fur et
à mesure tout ou partie des conseils donnés et qui cependant trouvait que « tout était
très bien » à la fois les informations données et l’intérêt qu’ils y trouvaient……
40
C. ET SI ON INVENTAIT UNE AUTRE MANIERE DE FAIRE ? Quels sont les objectifs de l’accompagnement diététique ?
Si l’on reprend les éléments proposés par la SFC, il s’agit d’ »influencer
favorablement le processus évolutif de la maladie » …. pour que les patients
puissent « préserver ou retrouver une place aussi normale que possible dans la vie
de la communauté ».
La diététicienne s’inscrit dans ces objectifs par la prise en compte du patient dans sa
globalité, avec ses doutes et ses questions, en l’aidant à formuler son ressenti et ses
attentes et en réfléchissant avec lui tout en le guidant, afin de le rendre autonome et
responsable, acteur de sa vie avec la maladie.
Comment pourrait s’organiser l’accompagnement diététique aux Hauts de
Chazal ?
1. L’accueil et l’ambiance
Il me semble important de « soigner » cette phase initiale de la rencontre entre
soignants et patient : aussi bien lors du tout premier contact qu’il a avec la structure
par le biais d’un environnement agréable, clair, n’apportant pas de messages
contradictoires (un tri régulier des revues et magazines proposés en salle d’attente
est par exemple pertinent afin d’en retirer ceux qui proposent les derniers « régimes
miracles » ou « pilules magiques » pour maigrir….), que lors de la rencontre entre
patient et soignants par le fait de se présenter par exemple. Nous avons l’habitude
de nous présenter par le prénom et la fonction que nous occupons, ces éléments
étant repris sur nos badges.
2. Le 1er temps de la Démarche Educative : le bilan partagé initial
Il a lieu pendant la première semaine du patient, initié et proposé par l’infirmière.
L’opportunité donnée au conjoint de participer à cet entretien est toujours offerte,
proposée (si le patient est d’accord !).
Le public de patients accueillis fait que la présence du conjoint est souvent
demandée par les patients, qui ne sont pas toujours ni intéressés ni concernés par
41
l’activité cuisine et/ou courses dans leur foyer. Certains préfèrent donc d’emblée que
leur épouse ou compagne soit intégrée dans la partie diététique de leur réadaptation.
Il convient donc de tenir compte de ce désir, en aménageant un temps pendant
lequel le conjoint est disponible (beaucoup d’épouses ou compagnes travaillent, il y a
des horaires scolaires à respecter quelquefois) : c’est au soignant de s’adapter aux
disponibilités du patient dans ce cas…
a) L’accueil : le début de l’entretien
Il me semble important de pouvoir prendre du temps pour ce bilan partagé initial et
de créer un climat qui permette au patient de se sentir en confiance, en présence ou
non de son conjoint.
L’accueil se fait dans le hall et j’accompagne les patients jusqu’à mon bureau, dont
la configuration ne permet pas un entretien côte à côte, qui est cependant clair,
lumineux et accueillant (pas d’ordinateur entre patient et soignant…)
Il est important en début d’entretien, de repréciser le but de celui-ci : « faire le point
sur l’alimentation », « connaître vos attentes ou vos préoccupations », de façon à ne
pas laisser le patient dans les présupposés par rapport à mes intentions (« vous allez
me mettre au régime sec », « on va tout me supprimer ») : il est important de
rassurer, de dédramatiser ce moment et d’encourager le patient en lui précisant nos
intentions : le but n’est pas la privation ou la punition mais plutôt une réflexion
négociée et approuvée qui pourra l’aider à modifier certains éléments, en restant au
plus près des habitudes et des contraintes de vie.
Le « programme de l’entretien » est aussi proposé pendant cet accueil : il s’agira de
faire le point en s’aidant d’un questionnaire rempli au préalable (tableau de
fréquence de consommation), de cerner les attentes et les difficultés ressenties et de
pouvoir formuler des objectifs nous aidant à proposer un programme éducatif adapté
et personnalisé.
42
b) Le contenu de l’entretien
Ce moment de rencontre doit essentiellement permettre de bien connaître le patient,
non pas le « malade chronique », le « mangeur », le « diététiquement correct ou
non », mais la personne qui arrive là avec une histoire de vie, une maladie qui lui
tombe dessus en le laissant K.O. ou révolté, incrédule ou volontaire, à la fois
différent de ce qu’il était et cependant le même. Cet état dans lequel se trouve le
patient à l’instant de notre rencontre, il me faut le comprendre et en tenir compte
faisant preuve d’empathie et de capacité de verbalisation, il conditionnera l’essentiel
de la suite de notre parcours.
L’entretien démarre souvent par une étape de recueil de données générales qui
permet de dépister ce que le patient sait de sa maladie : par des questions ouvertes,
lui faire dire ce qui l’amène en RCV, ce qui s’est passé avant l’épisode aigu ou avant
son séjour, ce qui s’est passé pendant l’hospitalisation, ce qu’on lui a fait, combien
de temps s’est écoulé entre l’hospitalisation et son arrivée, ce qui s’est passé
pendant de laps de temps, comment il se sent et quelles sont ses attentes du séjour.
Cette étape permet également de savoir si le patient a déjà eu l’occasion de
rencontrer une collègue, d’avoir des conseils alimentaires et donc de pouvoir faire
émerger les attentes, questions et difficultés rencontrées soit dans le suivi de ces
conseils soit dans ce qui a pu se faire dans l’intervalle en l’absence de conseils
donnés par une professionnelle (recherches Internet sur le sujet ? conseils des
proches ? idées reçues ? conseils non adaptés ?), donc de dépister si le patient se
sent plutôt en confiance ou démuni par rapport au sujet.
Ce recueil de données reste bien sûr important mais le fait pour le patient d’avoir pu
réfléchir à son alimentation par le biais d’un questionnaire (certains réfléchissent
même en « avant et après » la maladie) avant même le début de son séjour, permet
de ne pas rester enfermés dans un questionnaire trop restrictif et technique, les
éléments susceptibles de poser problème étant rapidement repérables sur le tableau
rempli.
43
En revanche, dans l’optique de mieux connaître le patient, il me semble important
dans le cadre de la démarche éducative nutritionnelle, de lui faire raconter son
histoire de vie alimentaire, le récit d’une journée alimentaire aide souvent à
comprendre les éléments essentiels.
En facilitant cette approche, le patient peut livrer ce qui fait son quotidien, ses
conditions de vie et de prises de repas, ses rapports avec son alimentation et les
difficultés qu’il peut avoir. Il donne des éléments qui nous aident à mieux le connaître
et qui favorisent les échanges.
Plus que le côté technique ou scientifique de la classique « enquête alimentaire »,
cette approche est plus pertinente et il me semble important de ne pas se laisser
enfermer dans un questionnaire type, ce qui nous permet de mieux aller là où le
patient désire nous emmener.
Cette méthode permet aussi au patient de mieux exprimer ses craintes ou ses
difficultés pour l’après-RCV et ce 1er entretien est souvent une étape préparatoire
pour ce futur qui peut certes être angoissant pour certains patients mais le fait de
dédramatiser et de prendre en compte les préoccupations concernant ce que sera le
lendemain est aussi une aide pour les patients. De cette façon, ce qui se vit au
présent permet de faire évoquer les projets qu’a le patient et soulever les
interrogations sur la façon d’intégrer l’alimentation dans ce projet.
Monsieur Y., patient chauffeur routier qui part pour 3 semaines en transport
international et qui veut reprendre son activité après la RCV a un projet dans lequel il
souhaite intégrer les conseils alimentaires qui lui sont donnés ; son projet et les
difficultés qui en découlent devront ainsi faire l’objet d’une réflexion à 2 (ou 3 si son
épouse veut y participer) et d’un cheminement commun pour trouver ensemble des
solutions à sa problématique précise.
Un autre patient , Monsieur G., père de 4 enfants, qui s’intéresse beaucoup à la
cuisine (sa femme travaille et les tâches ménagères sont partagées), ne sait pas
cuisiner autrement qu’au beurre (comme sa mère le faisait), il se sent démuni ;
énoncer cette difficulté devra amener un choix d’actions en vue de lui donner la
possibilité de concevoir la cuisine autrement, sans pour autant perdre ses habitudes
de vie et de cuisine. Prendre en compte sa difficulté, proposer d’y réfléchir ensemble
44
en expérimentant et suggérant sans imposer une solution préétablie semble entrer
dans une démarche éducative judicieuse.
c) Conclure l’entretien
L’écoute et la prise en compte des difficultés ou attentes du patient mais aussi des
ressources et des points forts (en les valorisant, souvent les patients pensent qu’ils
faisaient « tout de travers » avant !) permettront d’arriver avec lui d’une part à
synthétiser et à reformuler les points soulevés par l’entretien, d’autre part à choisir
avec lui en les négociant 1 ou 2 objectifs en fonction des priorités dégagées.
Un document de synthèse qui pourrait être celui de l’annexe 7 pourra être remis au
patient (il pourra être intégré dans un classeur de réadaptation individualisé), ce qui
permettra de valider par le patient et le soignant d’une part l’analyse de la situation
avec les points forts et les difficultés, d’autre part les priorités et objectifs qui auront
été mis en évidence ensemble, enfin de proposer afin d’aider à atteindre ces
objectifs des séances d’éducation individuelles et/ou collectives.
Un exemplaire de ce document reste dans le dossier du patient afin d’être visible par
l’ensemble de l’équipe.
Ces objectifs devront être suffisamment précis pour être compris et validés par le
patient, ils ne doivent pas être trop vagues (« équilibrer votre alimentation ») mais
plutôt précis et adaptés à chacun (« limiter à une fois par semaine votre
consommation de viande rouge »).
Le plan d’action personnalisé et individuel qui sera proposé au patient lui sera
également précisé et expliqué. Annoncer quels types de séance pourront être
proposées, savoir si pour lui des séances collectives seront aussi bien adaptées que
des séances individuelles et donner une idée du contenu des séances, permettra de
donner des informations préalables aux séances et d’arriver à édifier un carnet de
route diététique.
45
Par exemple en annexe 8 et 9, les carnets de route proposés à Monsieur G. et
Monsieur Y., reprennent les propositions de séances individuelles et/ou collectives
proposées et validées par le patient en question.
3. Le plan d’action personnalisé Moyens de mise en œuvre
Les séances adaptées aux attentes du patient pourront se faire grâce à :
a) Des moyens en temps : la possibilité pour la diététicienne d’être sur le site à
plein temps permettra de dégager davantage de créneaux dédiés à des prises
en charge individuelles ou en petits groupes. Ce temps permettra de
diversifier les propositions d’ateliers, les patients pouvant être externalisés de
leurs séances d’activités physiques pour assister à des séquences courtes sur
des thèmes qui correspondent à leurs objectifs.
Ces moyens en temps permettront aussi d’inventer des séances ludiques et
variées, adaptées aux patients.
b) Des moyens matériels :
• Salle : une salle dédiée à des séances de groupe et bien équipée de
façon à accueillir des petits groupes de patients
• Cuisine pédagogique : une cuisine claire et lumineuse équipée
classiquement (comme chez soi), pourvue d’une table ronde et de
chaises permettra de diversifier les possibilités d’ateliers en fonction
des attentes des patients : apprendre à cuisiner autrement, utiliser
« moins de » ou d’ « autres » graisses, cuisiner le poisson, faire des
desserts…. autant d’exemples de thèmes en fonction de ce qui aura
émergé du bilan initial. Avec pour principe d’être participatif, non
imposé et ouvert aux conjoints qui le souhaiteraient. Là aussi l’idée
n’est pas d’offrir un « cours de cuisine » mais un « atelier » où chacun
vient avec des connaissances, des idées, des techniques
éventuellement déjà rôdées, et où le mot d’ordre devra être le partage,
46
l’échange, la discussion, la professionnelle n’apportant que le soutien
technique, le guide. Si document il y a , il devrait à mon sens venir du
groupe, il est inutile d’imposer des documents tout faits, chaque groupe
pouvant s’approprier un document qui lui sera propre, qu’il se sera
créé.
• Matériel pédagogique : aliments factices, cartes de menus, publicités
alimentaires, photos, cartes pédagogiques, emballages de produits
alimentaires, autant d’outils qui pourront être mis au service de
séances éducatives afin de les rendre concrètes, utilisables par tous,
adaptés aux objectifs des séances. Une variété d’outils permettra
d’explorer les différents niveaux d’apprentissage (savoir, savoir être,
savoir faire) et accéder aux divers niveaux de perception des patients.
Le patient pourra ainsi être actif et intégrer plus facilement les
connaissances ou gestes ou acquisitions qui le préoccupent.
• Un hypermarché voisin, autre lieu d’éducation en temps réel possible ;
intégrer le temps des courses dans la démarche éducative pourra là
aussi aider à faire évoluer les habitudes, tout en restant dans le
contexte de vie du patient (prenant notamment en compte tous les
aspects des choix)
c) Des moyens humains
Une équipe motivée et dynamique est un atout majeur dans la mise en place d’un
programme adapté et individualisé. Le patient se sent non seulement en confiance
mais aussi porté par une dynamique d’ensemble.
La flexibilité de l’emploi du temps et la disponibilité des membres de l’équipe non
seulement vis-à-vis du patient mais aussi vis-à-vis des collègues est un moteur
inestimable dans notre prise en charge. Le langage de l’équipe se doit d’être
cohérent, et sans messages discordants ni contradictoires, et s’enrichit des moments
de mise en commun en réunion inter disciplinaire (1x/semaine). Ce lieu d’échanges
autour du patient permet d’avancer avec lui, de faire évoluer son projet et de l’aider à
réintégrer au mieux son contexte de vie.
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Les séances collectives
Elles seront destinées aux patients pour lesquels une séance correspond aux
attentes et objectifs définis en bilan partagé initial.
Elles devront avoir chacune un ou des objectif(s) de séance, et seront proposées
si le patient est d’accord et si le nombre de patients exprimant les mêmes
problématiques le nécessite.
Il me semble important de sortir de la logique « tout le monde a les mêmes
séances », de façon systématique et obligatoire et rester là aussi au plus près
des attentes exprimées par les patients.
La salle prévue à cet effet devra être aménagé afin que les patients puissent y
être installés de façon aidante pour une bonne implication et participation, par
exemple en les installant autour de la table, de manière à se voir et à voir
éventuellement un tableau pouvant servir de support au matériel pédagogique
utilisé.
Il me semble indispensable d’éviter les cours magistraux, mais d’essayer de
rendre le patient le plus possible acteur et participant actif des séances.
Au cours de ce D.U., la boîte à outils pédagogiques s’est bien enrichie pour avoir
à disposition des idées pour animer ces séquences éducatives (photo langage,
technique du métaplan) mais aussi des idées allant dans le sens de l’interactivité,
de la discussion entre patients et de la manipulation concrète (aliments factices,
emballages, photos…)
Un autre aspect représenté par l’apprentissage par le jeu, me semble tout aussi
propice à la participation (les jeux cadres de Thiagi sont dans ce sens très
enrichissants et adaptables).
L’évaluation de ces séances me semble importante aussi : l’idée de tenir un
carnet de bord des séances, regroupant des informations générales (thème,
nombre de patients, réflexions ou réactions « à chaud » par rapport au contenu,
aux réactions et implications des patients et améliorations à apporter, pertinence
des outils) pourra être mise en pratique facilement.
48
Les ateliers individuels
Dans la même logique que les séances collectives, ils seront fonction des
objectifs des patients, des priorités dégagées lors du bilan initial et adaptés au
patient et à sa problématique, en tenant compte des moyens et outils possibles
décrits précédemment.
Il me paraît également important, aussi bien pour les séances collectives que
pour les ateliers individuels, de proposer aux conjoints d’y participer, de façon
d’intégrer autant que possible la dimension familiale.
L’alternance entre ces deux types de séances proposées peut par exemple, dans
le cas des deux patients évoqués plus hauts se traduire dans le carnet de route
proposé sous la rubrique « Moyens proposés » (cf. annexes 8 et 9) par des
possibilités de séances soit collectives (graisses) soit individuelles tenant compte
de la problématique de chacun.
4. Evaluation de la démarche éducative
a) Du côté du patient :
La fin du séjour pourra être le moment d’une évaluation d’une part en terme de
qualité de vie : la démarche a-t-elle permit d’améliorer une situation, a-t-elle
permit au patient de pouvoir faire face à la reprise de ses activités « normales »
dans des conditions satisfaisantes et favorables à son bien-être, à une vie
« bonne » ? A-t-elle été suffisamment personnalisée et pertinente ?
En même temps qu’une évaluation, cette entretien de fin pourra être le moment
de revenir sur le carnet de route, et d’y retrouver les objectifs initiaux, et le cas
échéant de formuler de nouveaux objectifs, et de « passer la main » à d’autres
intervenants (collègue, médecin), afin de conforter ce qui a pu être initié et d’offrir
une continuité dans l’accompagnement.
Le jeu prévu en fin de séjour est aussi en quelque sorte l’évaluation globale du
séjour, évaluation des connaissances et des acquisitions cognitives : son côté
ludique et possiblement inter disciplinaire en fait un outil intéressant à condition
49
qu’il retrouve sa complète interdisciplinarité (actuellement l’ensemble des
intervenants n’est pas présent)
b) Du côté des soignants
Une évaluation de l’adéquation entre la demande des patients et les possibilités
offertes par les soignants : le soignant doit se poser (et se reposer) la question
pour chaque patient. Il s’agit en quelque sorte de l’évaluation de l’offre de soin, à
la fois par son existence, son contenu et sa pertinence.
Une évaluation interprofessionnelle : des séances en tandem, avec un
observateur et un intervenant pourrait aider à une évaluation objective et
régulière des séances et temps d’éducation….
En conclusion, si la planification de ces points d’amélioration de la démarche
éducative peut se traduire en étapes, elle reste cependant très tributaire du temps
accordé à l’action de la diététicienne dans l’établissement. Une prochaine
augmentation de ce temps de travail permettra très rapidement d’organiser la
démarche telle qu’elle est décrite dans ce projet.
Tous les outils ne sont pas encore en place : notamment la cuisine pédagogique
n’est pas installée et un atelier en temps réel en supermarché demande une
organisation en cours de réflexion (il faut sécuriser ce temps de séance au niveau
médical, et effectuer une démarche auprès du directeur du magasin en question
par exemple).
Néanmoins et dès à présent certains points ont pu se mettre en place : une façon
de procéder au cours de l’entretien d’accueil du patient avec l’intégration de la
notion de rencontre et de temps me permet déjà de constater qu’une autre
approche du patient permet un dialogue plus riche, et une action plus efficiente.
La mise en place du carnet de route peut également se faire dès à présent.
50
Enfin, la réflexion se passe aussi en équipe et nous sommes actuellement en
travail de réorganisation de l’ensemble du programme de réadaptation afin de le
rendre plus pertinent et adapté aux patients accueillis, le projet
d’accompagnement diététique telle que je l’imagine pouvant dès lors s’intégrer de
façon harmonieuse dans un programme évolutif et réellement personnalisé à
chaque patient.
51
SYNTHESE PERSONNELLE Il y aura incontestablement un avant et un après D.U……
Au-delà des connaissances acquises pendant ces modules, qui ont tous été
enrichissants parce qu’apportant des réponses concrètes et applicables à mes
problématiques de terrain, ce sont surtout mes manières de penser l’éducation
thérapeutique qui ont changé.
Passer de notions d’éducateur à des notions d’alliés en thérapeutique (pour
reprendre le terme d’alliance thérapeutique évoqué par Anne LACROIX pendant
ce D.U.) a été pour moi une découverte importante, même si quelquefois
intuitivement la manière de faire ou d’être allait déjà dans ce sens.
Passer d’une verticalité d’un enseignement (je sais, l’autre ne sait pas), d’une
transmission d’un savoir (plus le patient ingurgite d’informations, mieux il ira !!),
d’une approche prescriptive, à une approche participative où le patient m’apporte
autant (quelquefois plus ?) que je lui apporte dans un climat de confiance et de
respect mutuel, sont des notions qui me parlent et me conviennent dans mes
façons d’appréhender les autres.
Le fait d’être renforcée dans ces convictions que l’écoute de l’autre, le fait d’être
empathique et d’aider l’autre à exprimer ses inquiétudes, ses attentes et ses
projets, sont les meilleurs atouts d’un partage des connaissances en vue d’un
mieux être, d’une amélioration de la qualité de vie et donc pour revenir aux
fondamentaux de la SFC « d’influencer favorablement le processus évolutif de la
maladie » m’ont semblé aussi des points essentiels de cette progression pendant
cette année …..
Il m’a aussi semblé que chaque module a été comme une porte ouverte vers des
horizons divers, variés et nombreux, enrichissant à chaque fois ma curiosité vers
d’autres portes aussi nombreuses et variées. Cette curiosité intellectuelle m’a à
nouveau poussé vers la découverte d’ouvrages dans des domaines que je
n’avais pas encore découvert : entre « La grenouille qui ne savait pas qu’elle était
52
cuite » (cf. Olivier Clerc) et les ouvrages de Brigitte Sandrin Berthon, les articles
d’Anne Lacroix ou les ouvrages sur les animations de groupe ou les jeux cadres
de Thiagi, j’ai aussi considérablement enrichi mon univers personnel.
Là aussi, comme dans nos relations avec nos patients, le chemin n’a pas été en
droite ligne, le D.U. a eu tendance à m’emmener vers des lieux inconnus qui
gagnent à être connus….
J’ai l’impression que ce DU a permis de redynamiser ma pratique
professionnelle : mon activité avait certainement besoin d’être boostée pour me
permettre de redémarrer autrement, avec une prise en compte différente du
patient, avec des notions d’accompagnement et d’échanges qui manquaient par
excès de technique et de certitudes.
Bien sûr ce cheminement n’a pas été simple et les moments de doutes et de
remises en questions ont été présentes tout au long du parcours (et le sont
encore !!) : quand on pense faire « bien et juste », il n’est pas facile de se rendre
compte qu’on est tout de même pas mal « à côté ». Cette situation déstabilisante
est heureusement bien prise en compte d’une part par l’équipe qui nous entoure
si bien, d’autre part par les collègues de promo qui sont dans les mêmes
incertitudes et les mêmes questionnements…
Le partage de nos expériences pourtant diverses et variées nous permet à
chaque fois de relativiser nos inquiétudes et nous sentir moins seuls !!
Finalement, en cette fin d’année universitaire, je me sens un peu comme certains
de mes patients, toujours la même mais plus tout à fait la même …Je me suis
enrichie considérablement au contact d’autres, au contact d’un enseignement
précieux et d’une nouvelle vision de mon action, j’ai dans mes bagages des outils
de qualité, il me reste à conserver cette dynamique, à la faire partager à ceux qui
m’entourent et peut-être à la transmettre plus loin….. L’aventure ne fait que
commencer !!!
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ANNEXES
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Annexe 8
BILAN INITIAL PARTAGE
Date : 14 avril 2009 Nom du soignant : CF
MON CARNET DE ROUTE CARDIOGOURMAND Monsieur G.
OBJECTIFS – PRIORITES
Essayer d’apprendre à cuisiner avec une autre matière grasse que le beurre, sans pour autant faire 2 plats différents ( pour lui et pour les autres membres de la famille)
MOYENS PROPOSES
• Séance collective : bien choisir ses graisses, pourquoi ? comment ? pour quoi faire ?
• Atelier cuisine : définir les recettes « familiales », les adapter avec d’autres matières grasses pour qu’elles conviennent à toute la famille.
• Monsieur G. Amène ses recettes, ses méthodes de cuisson qu’il décrit, et nous réfléchissons ensemble pour adapter, modifier, essayer ....
CF DIET
Points forts
Aime cuisiner, a des livres de recettes, cherche toujours des nouvelles choses à tester ( cuisines du monde, classiques...) Curieux, inventif, prêt à essayer
Difficultés
Habitude « familiale » de cuisiner au beurre, Cuisine pour toute la famille et ne peut faire 2 cuisines différentes malgré son problème cardiaque
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Annexe 9
BILAN INITIAL PARTAGE
Date : 21 avril 2009 Nom du soignant : CF
MON CARNET DE ROUTE CARDIOGOURMAND Monsieur Y.
OBJECTIFS – PRIORITES
Savoir repérer les « bonnes » graisses Savoir quoi mettre dans sa glacière Savoir comment choisir ses menus au restaurant routier si possible
MOYENS PROPOSES
• Séance collective : bien choisir ses graisses, pourquoi ? comment ? pour quoi faire ?
• Atelier individuel : à l’aide de ce qu’apporte monsieur Y. en terme d’idées de menus proposés dans les restaurants qu’il fréquente habituellement, nous essayons de trier, de classer les menus, de choisir les entrées et desserts adaptés et complémentaires du plat.
• Séance au supermarché : choisir des aliments qui complémentent les repas au restaurant en apportant plus d’équilibre à la journée et qui se gardent facilement en glacière sans risque sanitaire !!
CF DIET
Points forts
A envie d’en savoir plus, de comprendre comment et pourquoi changer ses habitudes Peut emmener une petite glacière dans son camion Aimerait manger plus sainement malgré l’absence de choix possible au restaurant ( se rend dans des pays de l’Est régulièrement)
Difficultés
Prends ses repas sur la route, parti souvent plusieurs semaines d’affilée Repas restaurant sans choix possibles Ne connait pas la différence entre « bonnes » et « mauvaises » graisses
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BIBLIOGRAPHIE (1) Monpère C, Sellier P., Meurin P. et al. Recommandations de la Société
française de cardiologie concernant la pratique de la réadaptation
cardiovasculaire chez l’adulte. Archives des maladies du cœur et des
vaisseaux, Octobre 2002, tome 95,n°10,pp. 962-997.
(2) Meurin P., Massabie R., Renaud N. et al. Interêt de la réadaptation cardiaque
chez le patient coronarien. STV, Novembre 2004, volume 16, n° 9, pp. 447-
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(3) Keller P.F., Golay A., Lerch R. et al. Le chaînon manquant dans le traitement
du syndrome coronarien aigu : l’éducation thérapeutique. Kardiovasculäre
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(4) Ferrière M. La place de la réadaptation cardiaque dans Maladie coronarienne
et réadaptation. Paris : Masson, 2003, 112 p.
(5) Monpère C. Comment reprendre le travail après un accident coronarien ?
dans Maladie coronarienne et réadaptation. Paris : Masson, 2003, 112 p.
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pédagogie de l’alimentation dans Education thérapeutique Prévention et
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http://www.has-sante.fr
(8) Iguenane J. Motivation et éducation thérapeutique. Nutritions et facteurs de
risque, Novembre 2004, volume 2, n°11, pp.23-26.
(9) Gibelin P. L’éducation thérapeutique applications aux maladies
cardiovasculaires. Paris : Flammarion Médecine, 2006, 89 p.
(10) D’Ivernois J.F., Gagnayre R. Apprendre à éduquer le patient Approche
pédagogique. Paris : Maloine, 2004, 155 p.
(11) Kaufmann J.C. Casseroles, amour et crises. Paris : Hachette, 2006,
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(12) Carré C. Savoir communiquer avec un groupe. Paris : Retz, 1999, 157
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(13) Lacroix A., Assal J.P. L’éducation thérapeutique des patients. Nouvelles
approches de la maladie chronique. Paris : Maloine, 2003, 240 p.
69
(14) Sandrin Berthon B., Carpentier P.H., Queré I., Satger B.. Associer des
patients à la conception d’un programme d’éducation thérapeutique. Santé
publique, 2007, volume 19, n°4, pp.313-322.
(15) Sandrin Berthon B.L’éducation du patient au secours de la médecine.
Paris : PUF, 2000, 198 p.
70
RESUME
La réadaptation est une étape importante dans le parcours du malade cardiaque,
comme une transition entre l’hospitalisation (phase aigue) et le retour à une vie
« normale » avec une notion de chronicité de la maladie que le patient aura à
intégrer.
L’accompagnement nutritionnel de ces patients est un des jalons de cette transition :
grâce à un bilan partagé initial intégrant une forte notion de rencontre, de recueil de
données mais surtout de partage, d’échanges et d’expression de ce qui fait le patient
dans sa globalité et dans son histoire de vie, il nous faudra établir un climat de
confiance. Celui-ci nous permettra d’arriver à clarifier avec lui des objectifs et des
moyens négociés afin d’arriver à mettre au point un plan d’action personnalisé.
Celui-ci, par l’intermédiaire de séquences éducatives individuelles ou en groupes
permettra d’apporter des réponses pertinentes, grâce à des moyens divers et
adaptés, aux attentes du patient.
En fin de séjour, un nouveau bilan partagé permettra d’évaluer la situation en terme
d’objectifs et d’établir un lien vers d’autres professionnels afin d’assurer une
continuité dans l’accompagnement du patient. Le carnet de route mis en place
pendant le séjour, témoin de la démarche éducative entreprise, servira ainsi de relais
vers l’extérieur, optimisant de cette façon le cheminement conjoint du patient et du
soignant.
Les notions de parcours et d’enrichissement mutuel dans cette « alliance
thérapeutique », de temps donné et nécessaire pour que le patient s’approprie sa
maladie, en devenant acteur de sa vie, sont particulièrement importantes, et
conditionneront en grande partie la transition représentée par le séjour en
réadaptation.
Mots-clés : maladie cardiovasculaire, accompagnement nutritionnel, bilan partagé
initial, éducation thérapeutique, plan d’action personnalisé, séquences éducatives,
carnet de route.