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EN FACE LE MONDE · SAMEDI 3 FÉVRIER 2018 7 LUCIE GEFFROY L e discours se déploie dans un fran- çais ponctué d’accents beyrouthins et de mouvements des bras qui sou- lignent la volonté d’être bien com- pris : le plus souvent, les paumes s’ouvrant vers le ciel – on remarque alors un tatouage sur l’avant-bras gauche, un frag- ment de phrase impossible à déchiffrer. On lui demanderait bien ce que dit ce tatouage mais ce n’est pas le sujet. Ce jour-là, Ghassan Hage est de passage à Paris pour la sortie de l’un de ses ouvrages, Le Loup et le Musulman (Wildproject, 2017), son premier livre traduit en français. Anthropologue libano-australien qui vit et enseigne à Melbourne, Ghassan Hage est une grande figure intellectuelle en Australie et est considéré, depuis la publica- tion, en 1998, de White Nation, ouvrage devenu un classique, comme un des porte- voix des Whiteness Studies. Surtout implanté dans les universités anglo- saxonnes et nord-américaines, ce champ d’étude est apparu aux Etats-Unis au tournant des années 1980-1990, comme une sorte de contrepoint aux études centrées sur la ques- tion des « races » et des minorités : il a pour objet la construction sociale, culturelle et his- torique des identités blanches. « Le concept de “race” était jusqu’alors surtout associé aux mi- norités. Avec les Whiteness Studies, on admet qu’il existe une catégorie racialeblanche, le plus souvent privilégiée ou dominante, qu’on étudie en y appliquant une perspective constructiviste », résume la sociologue Mirna Safi. Le livre Wages of Whiteness (Verso, 1991) de l’historien américain David Roediger, sou- vent cité comme l’un des livres fondateurs des Whiteness Studies, montre, par exemple, comment la classe ouvrière américaine se définit en termes de classe mais aussi comme une catégorie « blanche » par opposition aux Noirs américains. « CAPITAL BLANC » Dans White Nation, Ghassan Hage analyse, quant à lui, les ressorts de la suprématie blan- che australienne vis-à-vis des minorités. Opé- rant une articulation entre les pensées du psy- chanalyste Jacques Lacan et du sociologue Pierre Bourdieu, le livre définit l’identité blan- che ou la « blanchité » non pas simplement comme une couleur de peau, mais comme un fantasme au sens psychanalytique et comme un champ d’accumulation de « capital blanc », une façon de s’habiller ou de parler… En Aus- tralie et surtout aux Etats-Unis, le concept a séduit de nombreux chercheurs. En France, même si les travaux du sociologue Maxime Cervulle s’y inscrivent et si ceux de l’historien Pap Ndiaye s’en inspirent en partie, il est beau- coup moins répandu dans la sphère universi- taire. « Ici, on a un rapport assez embarrassé avec les questions de race, on a du mal à accep- ter l’idée qu’il puisse y avoir un système de discrimination raciale généralisé, explique Patrick Simon, sociodémographe à l’Institut national d’études démographiques. Mais il faut dire aussi que ces études s’articulent autour d’un appareil conceptuel souvent assez hermétique, très théorique et finalement peu empirique. » On pressent néanmoins qu’elles éclaireraient de manière intéressante certains débats récents au sujet de la journa- liste Rokhaya Diallo et autour du terme de « racisme d’Etat ». Le livre de Ghassan Hage, Le Loup et le Musul- man, introduit une dimension inattendue à ce champ d’étude. Essai concis, il propose une nouvelle articulation des questions postcolo- niale et écologique. Hage y développe l’idée selon laquelle la « crise raciale », d’une part, lisible pour lui dans l’islamophobie, et la crise écologique, d’autre part, incarnée par la peur de ne plus pouvoir maîtriser l’environnement « sont, dans les faits, une seule et même crise, une crise inhérente au mode dominant d’habi- tation au monde ». Pour en arriver là, l’anthropologue analyse une série de métaphores naturalistes du racisme au premier rang desquelles, celle du loup. « Je montre que le musulman “racialisé” est de plus en plus souvent associé à la figure du loup. Dans l’imaginaire collectif occidental, les figures du loup et du musulman ou plus géné- ralement de l’Arabe ou du migrant, ont en com- mun de représenter une menace pour l’ordre établi : ils sont vus comme des éléments ingou- vernables », explique-t-il. Loup métaphorique, le migrant fait fi des frontières. Si le prédateur lupin vient menacer un système agraire, le musulman, lui, secoue l’espace national. Or, ces « fantasmes d’ingouvernabilité » que cristallisent le loup et le migrant trahissent, selon Ghassan Hage, un rapport au monde propre à l’homme occidental blanc. Ce mode d’occupation de l’espace relèverait de la « domestication généralisée », concept-clé de son raisonnement, défini ici comme une domination qui s’exerce sur l’« autre », que ce soit un être humain ou un animal. Dans cette relation aux musulmans, ce sont toutefois bien les mécanismes mentaux du « dominant » qui intéressent Ghassan Hage. Il trouve dans le roman Soumission, de Michel Houellebecq (Flammarion, 2015), une des Né à Beyrouth, ce chercheur inspiré par Levi-Strauss s’est imposé en 1998 avec un livre sur la suprématie blanche en Australie. Son œuvre offre une perspective non- occidentale sur des problématiques contemporaines telles les migrations ou la laïcité TINA BERNING À LIRE Le Loup et le Musulman. Le racisme est-il une menace écologique ? de Ghassan Hage (Wildproject Editions, 2017). expressions littéraires classiques de ces fan- tasmes paranoïaques. « Houellebecq exprime cette peur commune à beaucoup d’Occiden- taux d’être envahis voire carrément domesti- qués par les musulmans. » VISION NON HEXAGONALE Même si la légèreté de certaines démonstra- tions peut désarçonner, le livre possède la vertu d’inviter à un décentrement du regard et d’offrir une vision non hexagonale sur des problématiques contemporaines globales. « En France, dès qu’on parle de l’islam c’est très chargé. Ici, la question de l’islamophobie est posée du point de vue libano-australien », estime l’anthropologue Frédéric Keck. Son confrère Didier Fassin affirme, quant à lui, que, « au sein de l’anthropologie, la pensée de Ghassan Hage se distingue par son caractère original et non conventionnel ». Une pensée aiguisée au gré d’un parcours aussi sinueux qu’un tronc d’olivier. Ghassan Hage est né en 1957 à Beyrouth, dans une famille de la bourgeoisie maronite, franco- phone et cosmopolite, à l’histoire marquée par ce qu’on n’appelait pas encore l’expatria- tion. Ses grands-parents maternels libanais ont émigré à Saint-Domingue (République dominicaine) dans les années 1930 et y ont vécu de longues années avant de partir se lan- cer dans les affaires en Australie. « Ma mère avait 7 ans quand sa famille est partie vivre en Australie. Elle y est restée jusqu’à l’âge de 30 ans. Puis elle est partie au Liban et y a connu mon père, un officier éduqué en France… » Hage se construira à rebours de cette famille conserva- trice et antipalestinienne. « C’est simple, quand mes sœurs écoutaient Dalida, moi je ne jurais que par Frank Zappa et le Festival de Wood- stock, j’étais fasciné par la contre-culture. » Il étudie à l’université américaine de Bey- routh jusqu’à ce que la guerre civile éclate, puis ses parents l’envoient poursuivre ses étu- « Je montre que le musulman “racialisé” est de plus en plus souvent associé à la figure du loup » des en Australie. Bien qu’ayant fait toute sa carrière académique sur ce continent, Ghas- san Hage a aussi enseigné à Harvard (Massa- chusetts) et à l’Ecole des hautes études en sciences sociales, à Paris. Au début des années 1990, il effectue un postdoctorat auprès de Pierre Bourdieu. Se réclamant volontiers d’un Claude Lévi-Strauss ou d’un Philippe Descola, il revendique toutefois une position indépen- dante vis-à-vis de l’anthropologie française tout en suivant de près les débats intellectuels qui agitent l’Hexagone. Il est notamment l’un des signataires de la tribune publiée dans Le Monde, le 11 février 2016, contre les « clichés orientalistes » de Kamel Daoud au sujet des agressions sexuelles contre des femmes à Cologne (Allemagne). Quant aux questions actuelles sur la laïcité, son jugement est sans appel : « La laïcité fran- çaise et “le sens de l’humour” à la Charlie Hebdo prennent une dimension de plus en plus occidentalo-phallique, quelque chose que l’Occident déploie dans la direction de l’autre (le musulman) pour lui dire : regarde ce que j’ai, ce que j’ai (comme mon sens de l’humour ou ma laïcité) est très important et toi tu n’en as pas. Pauvre type. » Avant de prendre congé de Ghassan Hage, on lui demande ce qu’il a de tatoué sur le bras. C’est un vers de Charles Bau- delaire, en français, qu’il avait l’habitude de réciter à ses filles. Pour ses 50 ans, l’une d’elle le lui a offert sous forme de tatouage. Il est tiré d’un poème des Fleurs du mal : « Envole-toi bien loin de ces miasmes morbides ». h Ghassan Hage L’anthropologue de la « blanchité »

EN FACE LE MONDE SAMEDI 3 FÉVRIER 2018 …Ghassan Hage, on lui demande ce qu’il a de tatoué sur le bras. C’est un vers de Charles Bau delaire, en français, qu’il avait l’habitude

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E N FAC E L E M O N D E · S A M E D I 3 F É V R I E R 2 0 1 8

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LUCIE GEFFROY

L e discours se déploie dans un fran­çais ponctué d’accents beyrouthinset de mouvements des bras qui sou­lignent la volonté d’être bien com­pris : le plus souvent, les paumes

s’ouvrant vers le ciel – on remarque alors un tatouage sur l’avant­bras gauche, un frag­ment de phrase impossible à déchiffrer. On lui demanderait bien ce que dit ce tatouage mais ce n’est pas le sujet. Ce jour­là, GhassanHage est de passage à Paris pour la sortie del’un de ses ouvrages, Le Loup et le Musulman(Wildproject, 2017), son premier livre traduit en français. Anthropologue libano­australienqui vit et enseigne à Melbourne, GhassanHage est une grande figure intellectuelle en Australie et est considéré, depuis la publica­tion, en 1998, de White Nation, ouvragedevenu un classique, comme un des porte­voix des Whiteness Studies.

Surtout implanté dans les universités anglo­saxonnes et nord­américaines, ce champ d’étude est apparu aux Etats­Unis au tournantdes années 1980­1990, comme une sorte decontrepoint aux études centrées sur la ques­tion des « races » et des minorités : il a pour objet la construction sociale, culturelle et his­torique des identités blanches. « Le concept de “race” était jusqu’alors surtout associé aux mi­norités. Avec les Whiteness Studies, on admet qu’il existe une catégorie “raciale” blanche, le plus souvent privilégiée ou dominante, qu’on étudie en y appliquant une perspectiveconstructiviste », résume la sociologue Mirna Safi. Le livre Wages of Whiteness (Verso, 1991) de l’historien américain David Roediger, sou­vent cité comme l’un des livres fondateurs desWhiteness Studies, montre, par exemple, comment la classe ouvrière américaine sedéfinit en termes de classe mais aussi commeune catégorie « blanche » par opposition auxNoirs américains.

« CAPITAL BLANC »Dans White Nation, Ghassan Hage analyse,quant à lui, les ressorts de la suprématie blan­che australienne vis­à­vis des minorités. Opé­rant une articulation entre les pensées du psy­chanalyste Jacques Lacan et du sociologuePierre Bourdieu, le livre définit l’identité blan­che ou la « blanchité » non pas simplementcomme une couleur de peau, mais comme unfantasme au sens psychanalytique et commeun champ d’accumulation de « capital blanc »,une façon de s’habiller ou de parler… En Aus­tralie et surtout aux Etats­Unis, le concept a séduit de nombreux chercheurs. En France,même si les travaux du sociologue MaximeCervulle s’y inscrivent et si ceux de l’historien Pap Ndiaye s’en inspirent en partie, il est beau­coup moins répandu dans la sphère universi­taire. « Ici, on a un rapport assez embarrassé avec les questions de race, on a du mal à accep­ter l’idée qu’il puisse y avoir un système dediscrimination raciale généralisé, explique Patrick Simon, sociodémographe à l’Institut national d’études démographiques. Mais il faut dire aussi que ces études s’articulent autour d’un appareil conceptuel souvent assez hermétique, très théorique et finalement peu empirique. » On pressent néanmoins qu’elles éclaireraient de manière intéressante certains débats récents au sujet de la journa­liste Rokhaya Diallo et autour du terme de « racisme d’Etat ».

Le livre de Ghassan Hage, Le Loup et le Musul­man, introduit une dimension inattendue à ce champ d’étude. Essai concis, il propose une

nouvelle articulation des questions postcolo­niale et écologique. Hage y développe l’idéeselon laquelle la « crise raciale », d’une part,lisible pour lui dans l’islamophobie, et la crise écologique, d’autre part, incarnée par la peur de ne plus pouvoir maîtriser l’environnement« sont, dans les faits, une seule et même crise,une crise inhérente au mode dominant d’habi­tation au monde ».

Pour en arriver là, l’anthropologue analyseune série de métaphores naturalistes du racisme au premier rang desquelles, celle du loup. « Je montre que le musulman “racialisé”est de plus en plus souvent associé à la figure duloup. Dans l’imaginaire collectif occidental, les figures du loup et du musulman ou plus géné­ralement de l’Arabe ou du migrant, ont en com­mun de représenter une menace pour l’ordreétabli : ils sont vus comme des éléments ingou­vernables », explique­t­il. Loup métaphorique, le migrant fait fi des frontières. Si le prédateurlupin vient menacer un système agraire, le musulman, lui, secoue l’espace national.

Or, ces « fantasmes d’ingouvernabilité » quecristallisent le loup et le migrant trahissent, selon Ghassan Hage, un rapport au monde propre à l’homme occidental blanc. Ce mode d’occupation de l’espace relèverait de la« domestication généralisée », concept­clé de son raisonnement, défini ici comme une domination qui s’exerce sur l’« autre », que cesoit un être humain ou un animal. Dans cette relation aux musulmans, ce sonttoutefois bien les mécanismes mentaux du « dominant » qui intéressent Ghassan Hage. Il trouve dans le roman Soumission, de Michel Houellebecq (Flammarion, 2015), une des

Né à Beyrouth, ce chercheur inspiré par Levi­Strauss s’est imposé en 1998 avec un livre sur la suprématie blanche en Australie. Son œuvre offre une perspective non­occidentale sur des problématiques contemporaines telles les migrations ou la laïcité

TINA BERNING

À L I R ELe Loup et le Musulman.Le racisme est-il une menace écologique ?de Ghassan Hage (Wildproject Editions, 2017).

expressions littéraires classiques de ces fan­tasmes paranoïaques. « Houellebecq exprime cette peur commune à beaucoup d’Occiden­taux d’être envahis voire carrément domesti­qués par les musulmans. »

VISION NON HEXAGONALEMême si la légèreté de certaines démonstra­tions peut désarçonner, le livre possède la vertu d’inviter à un décentrement du regard et d’offrir une vision non hexagonale sur desproblématiques contemporaines globales. « En France, dès qu’on parle de l’islam c’est très chargé. Ici, la question de l’islamophobie est posée du point de vue libano­australien »,estime l’anthropologue Frédéric Keck. Sonconfrère Didier Fassin affirme, quant à lui,que, « au sein de l’anthropologie, la pensée deGhassan Hage se distingue par son caractère original et non conventionnel ».

Une pensée aiguisée au gré d’un parcoursaussi sinueux qu’un tronc d’olivier. Ghassan Hage est né en 1957 à Beyrouth, dans unefamille de la bourgeoisie maronite, franco­phone et cosmopolite, à l’histoire marquée par ce qu’on n’appelait pas encore l’expatria­tion. Ses grands­parents maternels libanais ont émigré à Saint­Domingue (République dominicaine) dans les années 1930 et y ont vécu de longues années avant de partir se lan­cer dans les affaires en Australie. « Ma mère avait 7 ans quand sa famille est partie vivre en Australie. Elle y est restée jusqu’à l’âge de 30 ans.Puis elle est partie au Liban et y a connu monpère, un officier éduqué en France… » Hage seconstruira à rebours de cette famille conserva­trice et antipalestinienne. « C’est simple, quandmes sœurs écoutaient Dalida, moi je ne jurais que par Frank Zappa et le Festival de Wood­stock, j’étais fasciné par la contre­culture. »

Il étudie à l’université américaine de Bey­routh jusqu’à ce que la guerre civile éclate,puis ses parents l’envoient poursuivre ses étu­

« Je montre que le musulman “racialisé” est de plus en plus souvent

associé à la figure du loup »

des en Australie. Bien qu’ayant fait toute sa carrière académique sur ce continent, Ghas­san Hage a aussi enseigné à Harvard (Massa­chusetts) et à l’Ecole des hautes études en sciences sociales, à Paris. Au début des années1990, il effectue un postdoctorat auprès de Pierre Bourdieu. Se réclamant volontiers d’unClaude Lévi­Strauss ou d’un Philippe Descola, il revendique toutefois une position indépen­dante vis­à­vis de l’anthropologie française tout en suivant de près les débats intellectuelsqui agitent l’Hexagone. Il est notamment l’un des signataires de la tribune publiée dansLe Monde, le 11 février 2016, contre les « clichés orientalistes » de Kamel Daoud au sujet desagressions sexuelles contre des femmes à Cologne (Allemagne).

Quant aux questions actuelles sur la laïcité,son jugement est sans appel : « La laïcité fran­çaise et “le sens de l’humour” à la CharlieHebdo prennent une dimension de plus en plusoccidentalo­phallique, quelque chose que l’Occident déploie dans la direction de l’autre (lemusulman) pour lui dire : regarde ce que j’ai, ce que j’ai (comme mon sens de l’humour ou ma laïcité) est très important et toi tu n’en as pas.Pauvre type. » Avant de prendre congé de Ghassan Hage, on lui demande ce qu’il a de tatoué sur le bras. C’est un vers de Charles Bau­delaire, en français, qu’il avait l’habitude deréciter à ses filles. Pour ses 50 ans, l’une d’ellele lui a offert sous forme de tatouage. Il est tiréd’un poème des Fleurs du mal : « Envole­toibien loin de ces miasmes morbides ». h

Ghassan HageL’anthropologue de la « blanchité »