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natagora 27 en pratique en pratique De nouvelles libellules Au cours des 20 dernières années, les observateurs de libellules ont constaté une augmentation des observations de sept espèces rarement observées dans notre pays et dont la répartition était jadis plus méridionale. Sept espèces, c’est beaucoup, si on considère que seulement 66 espèces de libellules ont été répertoriées à ce jour en Wallonie. Au cours des années 80, les observations se rapportaient à des afflux de libellules durant des étés par- ticulièrement chauds, mais ces afflux restaient sans len- demain. En revanche, à partir des années 90, les données se sont multipliées et sont devenues régulières; l’implan- tation durable de populations reproductrices est même constatée pour certaines de ces libellules. Sur certains sites, une augmentation importante du nombre d’espèces a été notée, suite à l’arrivée de ces espèces méridionales, comme à l’étang de Virelles où 23 espèces maximum étaient observées par an à la fin des années 80, contre 29 aujourd’hui. Chaud devant... ...froid dans le dos ! (4) Roland de Schaetzen, Philippe Goffart et Violaine Fichefet Après une parenthèse de deux numéros du magazine Natagora, nous revenons sur le changement climatique, non plus avec d'inquiétantes prévisions de disparitions d'espèces, mais avec la progression des libellules méridionales dans nos contrées ! Enfin une bonne nouvelle ? C'est à voir… 0 0,005 0,01 0,015 0,02 0,025 1981 1983 1985 1987 1989 1991 1993 1995 1997 1999 Fréquence relative 8 9 10 11 12 13 14 Température moyenne annuelle (°C) Sympétrum méridional (Sympetrum meridionale) Aeschne affine (Aeshna affinis) Agrion mignon (Coenagrion scitulum) Anax napolitain (Anax parthenope) Sympétrum de Fonscolombe (Sympetrum fonscolombii) Lest e sauvage ( Lestes barbarus) Libellule écarlate (Crocothemis erythraea) Température moyenne annuelle Évolution de la fréquence relative d’observation de sept espèces de libellules méridionales de 1981 à 2000 Le leste sauvage est une des sept espèces de libellules méridionales désormais observables en Wallonie. Elle s'y est reproduite à diverses reprises mais y reste cependant rare jusqu'à ce jour. Philippe Goffart

en pratique Chauddevant froid (4)

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natagora 27

en pratiqueen pratique

De nouvelles libellulesAu cours des 20 dernières années, les observateurs de

libellules ont constaté une augmentation des observations

de sept espèces rarement observées dans notre pays et

dont la répartition était jadis plus méridionale. Sept

espèces, c’est beaucoup, si on considère que seulement

66 espèces de libellules ont été répertoriées à ce jour en

Wallonie. Au cours des années 80, les observations se

rapportaient à des afflux de libellules durant des étés par-

ticulièrement chauds, mais ces afflux restaient sans len-

demain. En revanche, à partir des années 90, les données

se sont multipliées et sont devenues régulières; l’implan-

tation durable de populations reproductrices est même

constatée pour certaines de ces libellules.

Sur certains sites, une augmentation importante du

nombre d’espèces a été notée, suite à l’arrivée de ces

espèces méridionales, comme à l’étang de Virelles où 23

espèces maximum étaient observées par an à la fin des

années 80, contre 29 aujourd’hui.

Chaud devant......froid dans le dos ! (4)

Roland de Schaetzen, Philippe Goffart et Violaine Fichefet

Après une parenthèse de deux numéros du magazine Natagora, nous revenons sur le changement

climatique, non plus avec d'inquiétantes prévisions de disparitions d'espèces, mais avec la progression

des libellules méridionales dans nos contrées ! Enfin une bonne nouvelle ? C'est à voir…

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Sympétrum méridional (Sympetrum meridionale)

Aeschne affine (Aeshna affinis)

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Anax napolitain (Anax parthenope)

Sympétrum de Fonscolombe (Sympetrum fonscolombii)

Leste sauvage (Lestes barbarus)

Libellule écarlate (Crocothemis erythraea)

Température moyenne annuelle

Évolution de la fréquence relative d’observation de sept espèces de libellules méridionales de 1981 à 2000

Le leste sauvage est une des sept espèces delibellules méridionales désormais observables en Wallonie. Elle s'y est reproduite à diverses reprises mais y reste cependant rare jusqu'à ce jour.

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28 natagora numéro 8 juillet-août 2005

en pratique

Effet des étés chaudsPlus que d’autres insectes, les libel-lules ont une forte capacité à coloni-ser de nouveaux territoires. En effet,après avoir passé de longs mois dansl’eau au stade larvaire, elles se méta-morphosent pour devenir adultes,sous la forme que tout le mondeconnaît. Dans un premier temps,elles entament des déplacementsqui peuvent atteindre, pour certainesespèces et dans certaines circons-tances, des centaines de kilomètres.Les étés chauds favorisent les dépla-cements vers le nord et c’est ainsique des espèces méridionales attei-gnent nos régions. Le pic observé en1983 correspond de fait à une vaguede colonisation faisant suite à un étéparticulièrement chaud, et les obser-vations de plus en plus fréquentesdepuis le milieu des années 90 sur-tout s’expliquent par une succes-sion rapprochée d’étés chauds etsecs. À cet égard, le caractère simul-tané de l’expansion des différentes

espèces méridionales est à relever.De plus les observations de cesespèces se concentrent surtout dansles régions « chaudes » de Wallonie :Lorraine, Fagne-Famenne…

D’autres hypothèses ont été exami-nées pour expliquer ces expansions,comme l’augmentation des prospec-tions réalisées durant cette périodeou l’enrichissement des eaux (connusous le nom d’eutrophisation). Mais

l’analyse des données en fréquencerelative montre les mêmes ten-dances que les données brutes et,parmi les espèces caractéristiquesdes eaux eutrophisées, seules lesespèces méridionales ont progressédans l’intervalle. Ces facteurs neparaissent donc pas déterminantsdans ces progressions pour les-quelles le réchauffement climatiqueapparaît bel et bien être la causeprincipale.

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La voiture et nous

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e En Wallonie, les transports intervien-nent pour 22 % de la consommationénergétique totale et en ce qui concer-ne les personnes, 92 % de ceux-ci sefont par la route (Source : Tableau debord de l'environnement wallon 2004 -MRW) ! Mieux maîtriser nos déplace-ments et moduler les moyens de trans-port nous permettent de réduire notreproduction de gaz à effet de serre, maisaussi de réduire les autres nuisances etautres impacts de l'utilisation de la voi-ture sur l'environnement : l'emprise surle territoire par le développement desinfrastructures routières, les collisionsavec les oiseaux et d'autres élémentsde la faune, notre santé, le bruit…

Tout le monde en est conscient mais,reconnaissons-le, il nous est le plussouvent difficile de passer à l'acte…

Voici quelques cas expérimentés pardes membres de Natagora qui peuventservir de source d'inspiration :

1. Gérard roule depuis toujours avecune voiture équipée au gaz LPG. Onsait que le LPG ne produit que trèspeu de gaz polluants et que la pro-duction de CO2 est également rédui-te par rapport à une voiture à l'es-sence. Il ne comprend pas que tousles naturalistes ne suivent pas sonexemple, d'autant plus que cela per-met de réaliser des économies sub-stantielles puisque le LPG coûtebeaucoup moins cher que l'essenceou le diesel.

2. Valentine, qui habite Bruxelles, s'estaffiliée à la centrale de car-sharingCambio pour disposer d'une voitureuniquement quand elle en a réelle-ment besoin (voir www.cambio.be).

3. Éric, lui, n'a pas hésité à choisir lalocalisation de sa maison en fonc-tion de la proximité des services quesa famille utilise le plus (magasins,écoles…).

4. Ludovic est ornithologue et se dépla-ce à pied, en vélo, en bus, en train etplus rarement avec la voiture de sesparents le week-end pour ses carrésde l'atlas de l'avifaune en Wallonie.

5. Olivier a participé activement à lamobilisation citoyenne pour la créa-tion d'un RAVeL qui désormais luipermet, ainsi qu'à ses enfants, derejoindre en vélo le centre urbainvoisin.

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natagora 29

le magazine couleurs naturePublication bimestrielle de Chantier Coopératif - Natagora asblRue du Wisconsin 3B-5000 NamurTél. : 081/830.570 - Fax : 081/[email protected] - http://www.natagora.beForum Aves : http://fr.groups.yahoo.com/group/aves-contact/Forum RN (membres effectifs) : http://fr.groups.yahoo.com/group/rnob/Forum Natagora : http://fr.groups.yahoo.com/group/natagora-contact/

Publié avec le soutien de la Communauté Française, Direction Générale de la Culture et de la Communication.Publié avec l’aide de la Ministre de l’Environnement et de l’Énergie de laRégion de Bruxelles-Capitale, du Ministre de l’Agriculture, de la Ruralité, del’Environnement et du Tourisme de la Région wallonne et du Ministre duLogement, des Transports et du Développement territorial.Publié avec l’aide du Ministère de l’Emploi de la Région wallonne et duMinistère de l’Emploi de la Région de Bruxelles-Capitale qui octroient despostes A.P.E.

Éditeur responsable : J.-M. Corbisier, rue du Wisconsin 3, 5000 Namur

Impression : SNEL Grafics, LiègeRédaction : Louis Bronne (04/250 95 97 – [email protected]) et JeanRommes (02/245 55 00 – [email protected])Ont collaboré à ce numéro : D. Batteux, J.-Y. Baugnée, H. Brousmiche, A. Burnel,C. Close, A. Derouaux, V. Fichefet, F. Forget, P. Goffart, T. Gridlet, F. Hidvégi, M.Hubert, H. Mardulyn, É. Poskin, A. Rongvaux, Y. Reynewaeter, R. de Schaetzen, V.Swinnen et R. Wauters.Maquette : P Y MPhoto de couverture : Michel DecleerPublicité : prendre contact avec la rédactionTirage : 10.000 ex.

Les articles signés n’engagent que la responsabilité de leur(s) auteur(s).La reproduction des textes et des illustrations est soumise à l’autorisation de larédaction. Imprimé sur papier non blanchi au chlore.

ISSN 1780-3756

XPour en savoir plus :- www.gomphus.be

L’observation des libellules vousintéresse ? Rejoignez le Groupede Travail Gomphus, qui organisedes activités de terrain (excur-sions et recensements), publie unbulletin de liaison et développeles relations entre passionnés deslibellules par l’organisation dejournées d’études et un forum surInternet.

Contact : [email protected]

Bon signe pour la biodiversité ?Mais une question se pose : ces nou-velles sont-elles positives ou négativespour la biodiversité ? le doute persiste.En effet, les espèces à distribution plusnordique pourraient disparaître de nosrégions au cours des prochaines décen-nies et la rapidité des changements cli-matiques pourrait poser des problèmesaux espèces les moins mobiles ayantpar ailleurs des exigences très strictesen terme d’habitats. Ainsi, en Wallonie,on note déjà la raréfaction et la dispari-tion locale d’espèces, comme l’agrionhasté et l’aeschne subarctique, qui fré-quentent les tourbières des plateauxardennais. D’autres espèces de libel-lules pourraient être concernées à l’ave-nir. Mais le problème se posera sansdoute avec plus d’acuité encore pourtoutes les espèces animales et végétalesdont les capacités de dispersion sontbeaucoup moins développées quecelles des libellules : pourront-ellesréagir suffisamment vite et gagner àtemps des refuges plus au nord ?

Au nord des Alpes, la libellule écarlaten'était, jusque 1980 environ, qu'une visi-teuse méridionale rare. Depuis lors, ellea étendu progressivement son aire versle nord. C’est maintenant la libelluleméridionale la plus fréquemment signaléechez nous. Elle se reproduit aussi enGrande-Bretagne, aux Pays-Bas, dans lenord de l'Allemagne et en Pologne.

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L'aeschne affine s'observeannuellement en Wallonie depuis lemilieu des années nonante, en très petitnombre toutefois. Des indices de repro-duction ont été notés sur de raressites du territoire wallon.

6. Olivia s'arrange avec un voisin pourse rendre au travail en covoiturageet utilise le vélo « de société » qu'el-le a fait acheter par son patron pourse rendre à ses rendez-vous dansun rayon de 5 kilomètres autour deson bureau.

7. Raoul a (re)découvert le train. S'ilest vrai que cela lui prend parfois unpeu plus de temps que de prendresa voiture, il est aussi vrai que letemps passé dans le train est mieuxutilisé qu'en voiture. En train, Raoulpeut lire, préparer une réunion outout simplement se relaxer.

8. Jean-Paul effectue ses relevés deterrain en vélo. Cela ne l'a pasempêché de sillonner toute laWallonie à la recherche des insectesde son groupe favori. Mais que va-t-il faire quand il fondera une petitefamille ? Parviendra-t-il à rester incon-ditionnellement fidèle à son vélo ?