2
cière de la COB. A l’entreprise d’être prête à réagir rapidement face à une fuite susceptible d’affecter le marché. Le maître mot reste l’anticipation, qui consiste à préparer en amont la communication face à différents scé- narios possibles. « Tout dépend en fait du degré de précision de la fuite, sou- ligne Edouard de Rothschild, associé- gérant de Rothschild & Cie. Si elle est pertinente et chiffrée, une collaboration avec les médias peut s’avérer nécessaire et bénéfique pour l’issue des négociations. Sinon, l’entreprise peut préparer un communiqué. » L’intensification des opérations de croissance externe a aussi obligé la communication financière à élargir son champ d’action. Certes, son rôle consiste toujours, et avant tout, à convaincre les action- naires que l’opération sera créatrice de valeur. Mais le développement de l’actionnariat salarié et les récents dé- crets d’application pris par le gouver- nement Jospin sont générateurs de nouveaux défis. Ainsi la loi sur les nouvelles régulations économiques (NRE) du 15 mai 2001 renforce l’in- formation du comité d’entreprise de la cible et, depuis peu, la loi de mo- dernisation sociale impose des règles strictes concernant les salariés de l’acquéreur. L’extension du rôle des autorités européennes de la concurrence modi- fie également la vision traditionnelle de la communication financière. Le dilemme est de rendre le projet le plus attractif possible pour les action- naires, sans prendre le risque de bra- quer les autorités de la concurrence (lire par ailleurs article ci-contre). Gérer au mieux l’après-fusion La communauté des analystes et des investisseurs comme la presse fi- nancière ne sont plus les seuls récep- teurs et seuls juges de l’information diffusée par l’entreprise. La commu- nication financière est désormais face à un exercice délicat : tenir un discours unique à des cibles aux in- térêts et aux attentes souvent diver- gents. Les fusions et acquisitions confron- tent enfin les communicants à un dernier défi : celui de gérer au mieux l’après-fusion… Il faut continuer d’assurer une attention soutenue et ENQUÊTE 18 La Tribune VENDREDI 5 JUILLET 2002 ILLUSTRATION : HERVÉ PINEL/PHOTOS : SIPA ET LUYSSEN www.latribune.fr - L’information économique en temps réel Une collaboration « La Tribune » - De nouveaux enjeux pour la V écue jadis comme une contrainte par la majo- rité des sociétés cotées, la communication fi- nancière a acquis au- jourd’hui une dimension stratégique. Comment expliquer cette évolution majeure ? Certains événements largement médiatisés ont joué un rôle de prise de conscience. L’effondrement de 40 % du titre Alcatel, le 17 septembre 1998, après un profit warning à contretemps, a vraisemblablement convaincu nombre d’entreprises de la nécessité d’une communication régulière et préventive en direction des marchés. Mais c’est surtout la ré- cente vague de croissance externe qui a donné une nouvelle visibilité et assigné de nouvelles obligations à la communication financière. Certains enjeux classiques de la politique de communication s’en sont trouvés renforcés. La « gestion de la fuite », par exemple, devient d’autant plus délicate que les opérations fi- nancières sont importantes. A ce titre, le règlement (n° 98-07) de la Com- mission des opérations de Bourse (COB) stipule que « tout émetteur doit, le plus tôt possible, porter à la connaissance du public tout fait impor- tant susceptible, s’il était connu, d’avoir une incidence significative sur le cours du titre concerné ». Le Code des marchés boursiers permet certes de retarder l’annonce d’une information significative si l’en- treprise y trouve un intérêt légitime et si le management est en mesure de garantir la confidentialité de l’infor- mation. Mais, comme le concède Gérard Rameix, directeur général de la COB, si « la doctrine du régulateur de marché est claire dans ses principes, elle reste délicate à mettre en application ». Il faut avant tout savoir et pouvoir anticiper Les fuites dans les opérations de fusions et acquisitions sont quasi in- évitables – d’autant que certains par- tenaires les utilisent à des fins straté- giques. La parade consiste à faire signer des engagements de confiden- tialité aux personnes impliquées, et à limiter au maximum le nombre des intervenants. Mais cette stratégie n’est efficace que dans les premières phases de né- gociation. « Plus on s’approche du dé- nouement, plus les risques de fuites sont grands. Car la mise en œuvre du projet requiert l’assistance de nombreux spécia- listes et suppose l’adhésion d’un plus grand nombre d’actionnaires », explique Hubert Reynier, chef du service des opérations et de l’information finan- La communication financière se trouve aujourd’hui face à un exercice délicat : tenir un discours unique à des cibles aux intérêts et aux attentes souvent divergents. La récente vague de fusions et acquisitions a rebattu les cartes du monde de l’entreprise et de ses partenaires. Salariés et autorités de la concurrence sont devenus des cibles de la communication, au même titre qu’analystes financiers et investisseurs. De nouvelles stratégies de communication doivent être mises en œuvre. Edouard de Rothschild, associé- gérant de Rothschild & Cie : « Si elle est pertinente et chiffrée, une collaboration avec les médias peut s’avérer nécessaire et bénéfique pour l’issue des négociations. » Méthodologie de l’enquête C ette enquête a été initiée et pi- lotée par l’agence de commu- nication financière CICom- munication, dirigée par Catherine Isnard. Elle a été réalisée en parte- nariat avec six étudiants de l’Insti- tut d’études politiques de Paris Nicolas Godinot, Emmanuel Betry, Frédéric Biscarat, Jérôme Coffinet, Natalia Kim et Cécile Previeu. Dans le cadre de leur formation de dernière année, les étudiants et l’agence de communication ont pendant cinq mois analysé les poli- tiques de communication finan- cière de groupes internationaux et étudié leurs retombées. Un rapport de synthèse a été pré- paré, dont La Tribune a choisi de pu- blier les principales conclusions (ce qui explique que ces textes ne soient pas signés), apportant ainsi son soutien à cette initiative pédago- gique. Les étudiants ont pu prendre conscience de la dimension de plus en plus stratégique de la communi- cation financière, qui engage la responsabilité de l’entreprise vis- à-vis du marché et des actionnaires, bien sûr, mais également envers d’autres publics, et notamment les salariés.

ENQUÊTE De nouveaux enjeux pour la - · PDF filede délit d’initié, ... boursier, explique Emmanuel Bro- ... lonté de rassurer le marché entre di

Embed Size (px)

Citation preview

Page 1: ENQUÊTE De nouveaux enjeux pour la -  · PDF filede délit d’initié, ... boursier, explique Emmanuel Bro- ... lonté de rassurer le marché entre di

cière de la COB. A l’entreprise d’êtreprête à réagir rapidement face à unefuite susceptible d’affecter le marché.

Le maître mot reste l’anticipation,qui consiste à préparer en amont lacommunication face à différents scé-narios possibles. « Tout dépend en faitdu degré de précision de la fuite, sou-ligne Edouard de Rothschild, associé-gérant de Rothschild & Cie. Si elle estpertinente et chiffrée, une collaborationavec les médias peut s’avérer nécessaire etbénéfique pour l’issue des négociations.Sinon, l’entreprise peut préparer uncommuniqué. »

L’intensification des opérations decroissance externe a aussi obligé lacommunication financière à élargirson champ d’action.

Certes, son rôle consiste toujours,et avant tout, à convaincre les action-naires que l’opération sera créatricede valeur. Mais le développement del’actionnariat salarié et les récents dé-crets d’application pris par le gouver-nement Jospin sont générateurs denouveaux défis. Ainsi la loi sur lesnouvelles régulations économiques(NRE) du 15 mai 2001 renforce l’in-formation du comité d’entreprise dela cible et, depuis peu, la loi de mo-dernisation sociale impose des règles

strictes concernant les salariés del’acquéreur.

L’extension du rôle des autoritéseuropéennes de la concurrence modi-fie également la vision traditionnellede la communication financière. Ledilemme est de rendre le projet leplus attractif possible pour les action-naires, sans prendre le risque de bra-quer les autorités de la concurrence(lire par ailleurs article ci-contre).

Gérer au mieux l’après-fusion

La communauté des analystes etdes investisseurs comme la presse fi-nancière ne sont plus les seuls récep-teurs et seuls juges de l’informationdiffusée par l’entreprise. La commu-nication financière est désormaisface à un exercice délicat : tenir undiscours unique à des cibles aux in-térêts et aux attentes souvent diver-gents.

Les fusions et acquisitions confron-tent enfin les communicants à undernier défi : celui de gérer au mieuxl’après-fusion… Il faut continuerd’assurer une attention soutenue et

ENQUÊTE

18 La Tribune VENDREDI 5 JUILLET 2002

ILLU

STR

ATI

ON

: H

ER

PIN

EL/

PH

OTO

S : S

IPA

ET

LUY

SSE

N

www.latribune.fr - L’information économique en temps réel

Une collaboration « La Tribune » -

De nouveaux enjeux pour la

Vécue jadis comme unecontrainte par la majo-rité des sociétés cotées,la communication fi-nancière a acquis au-

jourd’hui une dimension stratégique.Comment expliquer cette évolutionmajeure ?

Certains événements largementmédiatisés ont joué un rôle de prise de conscience. L’effondrement de40 % du titre Alcatel, le 17 septembre1998, après un profit warning àcontretemps, a vraisemblablementconvaincu nombre d’entreprises dela nécessité d’une communicationrégulière et préventive en directiondes marchés. Mais c’est surtout la ré-cente vague de croissance externequi a donné une nouvelle visibilité etassigné de nouvelles obligations à lacommunication financière.

Certains enjeux classiques de lapolitique de communication s’en sonttrouvés renforcés. La « gestion de lafuite », par exemple, devient d’autant

plus délicate que les opérations fi-nancières sont importantes. A ce titre,le règlement (n° 98-07) de la Com-mission des opérations de Bourse(COB) stipule que « tout émetteurdoit, le plus tôt possible, porter à laconnaissance du public tout fait impor-tant susceptible, s’il était connu, d’avoirune incidence significative sur le coursdu titre concerné ».

Le Code des marchés boursierspermet certes de retarder l’annonced’une information significative si l’en-treprise y trouve un intérêt légitimeet si le management est en mesure degarantir la confidentialité de l’infor-mation. Mais, comme le concèdeGérard Rameix, directeur général dela COB, si « la doctrine du régulateurde marché est claire dans ses principes, ellereste délicate à mettre en application ».

Il faut avant tout savoir et pouvoir anticiper

Les fuites dans les opérations defusions et acquisitions sont quasi in-évitables – d’autant que certains par-tenaires les utilisent à des fins straté-giques. La parade consiste à fairesigner des engagements de confiden-tialité aux personnes impliquées, et àlimiter au maximum le nombre desintervenants.

Mais cette stratégie n’est efficaceque dans les premières phases de né-gociation. « Plus on s’approche du dé-nouement, plus les risques de fuites sontgrands. Car la mise en œuvre du projetrequiert l’assistance de nombreux spécia-listes et suppose l’adhésion d’un plusgrand nombre d’actionnaires », expliqueHubert Reynier, chef du service desopérations et de l’information finan-

La communicationfinancière se trouveaujourd’hui face à un exercicedélicat : tenir un discoursunique à des cibles aux intérêts et aux attentessouventdivergents.

� La récente vague de fusions et acquisitions a rebattu les cartes du monde de l’entrepriseet de ses partenaires.� Salariés et autorités de la concurrence sontdevenus des cibles de lacommunication, au mêmetitre qu’analystes financierset investisseurs.� De nouvelles stratégiesde communication doiventêtre mises en œuvre.

Edouard de Rothschild, associé-

gérant de Rothschild & Cie : « Si

elle est pertinente et chiffrée, une

collaboration avec les médias peut

s’avérer nécessaire et bénéfique

pour l’issue des négociations. »

Méthodologiede l’enquêteCette enquête a été initiée et pi-

lotée par l’agence de commu-nication financière CICom-

munication, dirigée par CatherineIsnard. Elle a été réalisée en parte-nariat avec six étudiants de l’Insti-tut d’études politiques de Paris –Nicolas Godinot, Emmanuel Betry,Frédéric Biscarat, Jérôme Coffinet,Natalia Kim et Cécile Previeu.

Dans le cadre de leur formationde dernière année, les étudiants etl’agence de communication ontpendant cinq mois analysé les poli-tiques de communication finan-cière de groupes internationaux etétudié leurs retombées.

Un rapport de synthèse a été pré-paré, dont La Tribune a choisi de pu-blier les principales conclusions (cequi explique que ces textes ne soientpas signés), apportant ainsi sonsoutien à cette initiative pédago-gique.

Les étudiants ont pu prendreconscience de la dimension de plusen plus stratégique de la communi-cation financière, qui engage la responsabilité de l’entreprise vis-à-vis du marché et des actionnaires,bien sûr, mais également enversd’autres publics, et notamment les salariés.

Page 2: ENQUÊTE De nouveaux enjeux pour la -  · PDF filede délit d’initié, ... boursier, explique Emmanuel Bro- ... lonté de rassurer le marché entre di

L es salariés ont longtemps fait fi-gure de parents pauvres de lacommunication financière.

L’obligation légale d’information descomités d’entreprise (CE) avant l’an-nonce d’une offre publique était ainsifréquemment contournée par le ma-nagement : pour minimiser les risquesde délit d’initié, les représentants dessalariés étaient souvent informés audernier moment – le vendredi soirpar exemple pour une offre déposée lelundi matin avant l’ouverture desmarchés ! Un tel scénario appartientde plus en plus au passé.

D’abord parce que la législationrécente renforce les obligations d’in-

formation des CE dans le cadred’opérations de croissance externe.« La loi de modernisation sociale de jan-vier 2002 est en train de donner l’avan-tage au droit du travail face au droitboursier, explique Emmanuel Bro-chier, avocat associé au cabinet Dar-rois, Villey, Maillot, Brochier. Au-jourd’hui, les CE peuvent retarder lesopérations de croissance externe – sansêtre en mesure de les empêcher. On vaarriver tôt ou tard au vrai débat : est-illégitime que le CE ait un pouvoir de dé-cision concernant les opérations de rap-prochement ? »

La communication en direction dessalariés a également acquis une di-mension stratégique : la montée enpuissance de l’actionnariat salariérend en effet difficile une communi-cation agressive sur les synergies parréduction d’effectifs. Cette nouvellesituation est à la fois une contrainteet une opportunité pour la commu-nication financière.

Le fait qu’en 1999 l’offre de laBNP ait été choisie par les action-naires de Paribas, en dépit d’unemeilleure parité offerte par la SociétéGénérale, s’explique par une com-munication habile de la BNP. En

VENDREDI 5 JUILLET 2002 La Tribune 19www.latribune.fr - L’information économique en temps réel

CICommunication - Institut d’Etudes Politiques de Paris

communication financière

ne pas s’enfermer dans une sorte de« black-out » jusqu’à la présentationdes résultats. A ce stade, la commu-nication a en partie les mains liées parles engagements antérieurs.

Au-delà de la cohérence temporelledu discours, c’est bien la crédibilitédu management qui est en jeu. D’oùla nécessité d’être prudent au mo-ment de l’annonce de la fusion, no-tamment dans la définition des pré-visions à court terme, des objectifs àmoyen terme et la quantification dessynergies.

Il faut aussi s’expliquer rapidementdès lors que les engagements ne se-ront pas tenus. Le retour à une com-munication régulière demeure la cléd’une opération de croissance ex-terne réussie, conciliant objectifs ini-tiaux et réalisations concrètes.

La nécessaire implication de la direction générale

La communication financière re-trouve alors ce qui fait à la fois sonobjectif et sa justification : réduire ledifférentiel entre la perception de l’en-

treprise par le marché et par elle-même, afin de valoriser pleinementcette dernière en fonction de ses per-formances et de son potentiel decroissance.

Plus que jamais, les maîtres mots dela communication financière demeu-rent transparence, réactivité, cohé-rence et continuité. Ce besoin decontinuité est d’ailleurs paradoxaldans une société de l’information ca-ractérisée par les urgences, les à-coupset les crises. Pourtant la bonne straté-gie de communication doit donnerl’impression que la « barre est tenue »en permanence dans l’entreprise.D’où une nécessaire implication desa direction générale dans la poli-tique de communication financière.

La vraie difficulté dans ce contexteest de déterminer le juste équilibreentre plusieurs nécessités : commu-niquer sur la stratégie à moyen/longterme, tout en délivrant à court termedes résultats financiers, incarnerl’entreprise mais en évitant la surex-position médiatique individuelle et,enfin, assurer la crédibilité des mes-sages destinés aux différents publicscibles.

Vaste programme, en somme !

Dans uncontexte de négociationsavec lesautorités de concurrence,la complexité est donc de fairepasser un messagecompris de manièreidentique par l’émetteur et le récepteur.

Michel Pébereau, PDG de

BNP-Paribas : « La responsabilité

du management de l’entreprise,

c’est de trouver un juste équilibre

entre les attentes des actionnaires,

des clients et des salariés. »

Rien ne peut se fairesans l’aval de Bruxelles

B ruxelles est devenue le point depassage obligé – et redouté – detoutes les grandes opérations

de concentration en Europe.Aux raisons politiques qui ont poussé

la Direction générale de la concur-rence de la Commission européenne àaffirmer son autorité face aux entre-prises, s’est ajouté un facteur structu-rel : « On a assisté à une telle vague deconcentrations dans les années 80-90 quedes fusions ultérieures peuvent, dans cer-tains secteurs, atteindre une taille critique »,explique Michael Zaoui, responsabledes fusions-acquisitions chez MorganStanley pour l’Europe. Cette situationimpose une contrainte nouvelle auxstratégies de communication finan-cière, qui doivent prendre garde aurisque du veto européen sur l’opéra-tion. Cela conduit, le plus souvent, à re-voir légèrement à la baisse le discoursstratégique. Les notes d’information et

les communiqués de presse doivent res-ter factuels et ne plus annoncer, parexemple, la création « du leader » mais« d’un leader » du marché…

L’exemple de la tentative de rappro-chement entre Schneider et Legrandmontre que, dans certains cas, la vo-lonté de rassurer le marché entre di-rectement en conflit avec les attentesdes autorités de la concurrence.

Gérard Rameix, directeur généralde la COB, juge que la communica-tion de Schneider « donnait l’impressiond’une confiance totale dans le fait que la dé-cision de Bruxelles leur serait favorable. »Mais Antoine Giscard d’Estaing, di-recteur financier de Schneider Elec-tric, considère au contraire être restédans le domaine du factuel : « Nousavons indiqué au marché les informationsen notre possession et le stade d’avancementdu processus. »

Dans son communiqué du 27 sep-tembre 2001, Schneider estimait, avantl’annonce de la décision de la Com-mission, qu’un « refus définitif paraîtraitincompréhensible » – prenant néanmoinsla précaution de ne pas anticiper la dé-cision finale.

Ces différentes interprétations dé-montrent la difficulté de tracer la fron-tière entre préemption de la décision etoptimisme légitime. Dans un contextede négociations avec les autorités deconcurrence, la complexité est doncde faire passer un message compris demanière identique par l’émetteur et lerécepteur.

� La Direction de la concurrence de la Commissioneuropéenne exerce son contrôle sourcilleux sur les fusions-acquisitions.� L’« affaire Schneider-Legrand » prouve qu’un veto de Bruxelles est toujours possible.

Les partenaires de l’entreprise veulent une vraie communication� Salariés, actionnaires,fournisseurs, clients,analystes… tous peuventinfluer sur le cours d’uneopération de croissanceexterne.� Une nouvellecommunication doit doncêtre mise en œuvre.

effet, lors de l’annonce de l’opéra-tion, la BNP n’a pas mentionnéd’éventuels licenciements liés aux sy-nergies. On pouvait, par exemple,lire dans le communiqué du 20 sep-tembre 1999, consécutif au résultatde l’OPE sur Paribas : « Le groupeBNP-Paribas respectera les engage-ments pris en matière sociale comme enmatière financière. Les synergies serontmises en œuvre sans recourir à des départscontraints en France. Simultanément, lerecrutement sera maintenu à un niveauadapté au développement internationaldu groupe, et à la relève des très nom-breux départs à la retraite attendus enFrance au début des années 2000. »

« Privilégier le moyenterme »

Ce qui permet à Michel Pébereau,PDG de BNP-Paribas, d’insister surla nécessaire consistance d’un mes-sage à destination des partenaires del’entreprise ou stakeholders : « La res-ponsabilité du management de l’entre-prise, c’est de trouver un juste équilibreentre les attentes des actionnaires, des

clients et des salariés. La communica-tion financière doit expliquer de quellemanière cet effort est conduit, en privilé-giant le moyen terme sur les effets d’an-nonce à court terme. »

Avant même l’annonce de l’opéra-tion, les intérêts de tous – y comprisemployés, clients, fournisseurs… –doivent être pris en compte. « Cespartenaires sont des parties déterminanteset pas seulement prenantes à l’opéra-tion », souligne Edouard de Roth-schild. Le bon déroulement de latransaction passe par un dialogue etune information de l’ensemble de cesintervenants. Michel Pébereau ren-chérit : « Nous ne pratiquons pas l’in-formation financière à plusieursvitesses. »

Ainsi, différents supports de com-munication doivent être à la disposi-tion de l’entreprise : réunions en in-terne, courriers adressés le jour del’annonce, journaux d’entreprise, hotline, supports électroniques… Le toutétant, à travers l’utilisation de ces di-vers supports, de savoir proposer auxparties prenantes un discours cohé-rent avec celui tenu auprès de la com-munauté financière – mais aussi enri-chi et personnalisé.

Avant mêmel’annonce de l’opération,les intérêts de tous – y comprisemployés,clients,fournisseurs… –doivent être pris en compte.