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Bull. Soc. Chim. Belg., 61, pp. 492-503, 1952 L Essais dc Chloration dirigCe I11 (l) C6Lones Aliphatiqnes par A. BRUYLANTS et J. HOUSSIAU (Louvaiii) I~PsuMB. -- Dans le cadre tl’une etude gCnCrale de la chloratioii photoclrimiquc, les auteurs Ctudient It1 monochloration en phase gazeuse de l’acctone (I), dc la butanone-2 (11) et de la mCthyl-t,butylcCtone (pinacolone) (111). Le clilore s’introduit exclusiveinent en position tc par rapport au groupe carbonyle ; (I) et (111) fournissent UII produit de rCac- tion unique, reyiectiveinent la mono-chloracCtone et la 1 -mono-chloro- piriacdone. (11) engerrdre UIL mClangc de deux moriorlilor-hutaiiories clans lequel prCdomiiie, par suite de I’orientation simultade du groupe mCthyle, la :~-c.hlorctbutaiione-2. En ce qiii coircernc 1s butanone-2, le5 auteurs ont rkalise en outre diffhnts cssais, en pliase liquide, soit par action dirccte du chlore B l’obscuritc en presence de catalyseur, soit par action du chlorure de sril- furyle. Les produits de la rCaction sont toujours lcs memes et idcritiques a ceux qu’on obtient par le premier procCdC. INTRODUCTION I,’i.tude des travaux classiques consacres a la chloratiori des celoncs rhvCle un fait htonnant : il n’a pas etk possible jusqu’ici, en modifiant le mecanisme de la reaction, d’orienter la substitution en differentes positions, comme dans le cas des acides et de leurs dhrivks fonctionnels. hinsi, dans le cas de la monochloration de la butanone-2, HENRY et VAN HEYMENANT, travaillant tour A tour avec le chlore libre et le chlorure de sulfuryle (2 a, b), obtiennent les m&mes cktones tc --- chlorks que KLING (3) prepare de son c8t4 (l) a) 1. Ce Bull. 58, pp. 310-328 (1949) ; 1)) 11. Ce Rull. 61, pp. BGG-392 (1952). (2) a) BZ. sc. Ac. Roy. Belg. [4] 30, 57-63 (1900); C. B. 1900, 1,1123. b) ibid. 725-29 ; C. B. 1901, 1901 I, 95. HI. Sor.. ehirrc. (3), 33. 825 (1906).

Essais de Chloration dirigée III Cétones Aliphatiques

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Bull. Soc. Chim. Belg., 61, pp. 492-503, 1952 L Essais dc Chloration dirigCe I11 (l)

C6Lones Aliphatiqnes

par

A. BRUYLANTS et J. HOUSSIAU (Louvaiii)

I~PsuMB. - - Dans le cadre tl’une etude gCnCrale de la chloratioii photoclrimiquc, les auteurs Ctudient It1 monochloration en phase gazeuse de l’acctone (I), dc la butanone-2 (11) et de la mCthyl-t,butylcCtone (pinacolone) (111). Le clilore s’introduit exclusiveinent en position tc par rapport au groupe carbonyle ; (I) et (111) fournissent UII produit de rCac- tion unique, reyiectiveinent la mono-chloracCtone et la 1 -mono-chloro- piriacdone. (11) engerrdre UIL mClangc de deux moriorlilor-hutaiiories clans lequel prCdomiiie, par suite de I’orientation simultade du groupe mCthyle, la :~-c.hlorctbutaiione-2.

E n ce qiii coircernc 1s butanone-2, le5 auteurs ont rkalise en outre d i f fhn t s cssais, en pliase liquide, soit par action dirccte du chlore B l’obscuritc en presence de catalyseur, soit par action du chlorure de sril- furyle. Les produits de la rCaction sont toujours lcs memes et idcritiques a ceux qu’on obtient par le premier procCdC.

INTRODUCTION

I,’i.tude des travaux classiques consacres a la chloratiori des celoncs rhvCle un fait htonnant : il n’a pas etk possible jusqu’ici, en modifiant le mecanisme de la reaction, d’orienter la substitution en differentes positions, comme dans le cas des acides e t de leurs dhrivks fonctionnels.

hinsi, dans le cas de la monochloration de la butanone-2, HENRY et VAN HEYMENANT, travaillant tour A tour avec le chlore libre et le chlorure de sulfuryle (2 a, b), obtiennent les m&mes cktones tc --- chlorks que KLING (3) prepare de son c8t4

(l) a) 1. Ce Bull. 58, pp. 310-328 (1949) ; 1)) 11. Ce Rull. 61, pp. BGG-392 (1952).

(2) a) BZ. sc. Ac. Roy. Belg. [4] 30, 57-63 (1900); C. B. 1900, 1,1123. b) ibid. 725-29 ; C. B. 1901, 1901 I, 95. HI. Sor.. ehirrc. (3), 33. 825 (1906).

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CHLORATION DE CETONES 493

par chloration en presence d’eau et de marbre, suivant m e technique brevetee (”. Les recherches recentes confirmen t ces faits, la chloration ionique conduit aux m h e s rksultats que la photochloration (”>; cette derniere semble m&me prefe- rable au point de vue rendement en produits mono-chlorks, ainsi qu’il ressort d’une etude comparative (7).

I1 nous a paru interessant, dans le cadre des travaux que nous avons deja consacres a la monocliloiation selective, de reprendre le problkme de la repartition des isomkres mono- chlores. Ilans ce but, nous avons realis6 la photochloration en phase gazeuse de l’acetone (I), cle la butanone-2 (11) e t de la pinacolone (111). Pour nous assurer ensuite que le changement de conditions operatoires n’affecte pas l’orientation, nous avons en outre chlore la butanone-2, par le chlorure de sul- furyle en presence de peroxyde et par le chlore libre a l’ob- scurite avec le soufre comme agent d’activation.

Nous ne cacherons pas que nous nous attendions a obser- ver dans le cas des cetones une orientation du m&me genre qu’avec les acjdes e t leurs nitriles. A savoir, orientation ex- clusive en tl dans les processus ioniques; orientation prefe- rentielle en p dans la reaction photochimique.

Nous etions fond& a croire, a la suite de nos travaux sur les acides, leurs derives fonctionnels e t les nitriles (’ b, que les auteurs prkcites, et surtout les anciens, n’avaient peu t-&re pas pris les precautions necessaires leur perniettant d’ohser- ver des orientations differentes suivant les conditions opera- toires. (*)

(4) FRITSCA, Ber. 26, 597 (1893); Ann. 272, 312 (1892); D. R. P.

(5) a) ELLIN(:ER and GOLDBERG, J . Chem. Soc. 1949, 266; b) DANILOV and TIIIROMIHOVA: C. A. 43 3791 C (1949).

(6) KABJ~ION and REGIER, J . Org. Chem. 11, 781-7 (1946). (7) It. JIJSTONI, Chz’wh. Industria. 24, 89-94 et 195-201 (1942);

C. A. 37, 271C 4 (1943). (*) On peut lire en effet sous la plume de KOLSHORN, travaillant au

laboratoire de GABRIEL (Rer., 37 2474 (1906)) (( Da die chlorierung des kaeuflichen Methylaethyl ketons (Sdp. 78,6-79,50) weder mit gasfoer- migen chlor, noch mit Sulfurylchlorid (cfr. 2) in befriedigender Ausbeute gelang, arbeite ich nach der Methode von P. FRITSCH (cfr. 4). D’autre part, De METRE-VL.~DESCO (B1.Soc. Chim.(3), 6 410 (1891)) nous informe

69.039, Frdl. 111, 9.

.

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Dans line premiere serie d’essais d’orientation effectues sur la butanone (11), la photochloration en phase gazeuse ne nous a permis cl’obtenir que les deux derives Q, la 3-chloro- butanone-2 (71 ”/,) et la I-chlorobutanone-2 (29 yo), l’exclusion de dkrivk p.

‘I’oujours persuades que cette orientation exclusive ktait due a l’action perturbatrice d’impuretes, nous avons repris les essais de photochloration avec des cetones purifiees e t skchPes avec un soin particulier. En appliquant a des reactifs tres purs les techniques qui se sont rbvelees par ailleurs ”)

efficientes pour provoquer l’orientation prefkrentielle en p, nous pensons avoir reuni des resultats en tous points coni- parables B ceux obtenus dans nos recherches anterieures et susceptibles d’emporter la conviction.

Nous ne rapporterons ici que les resultats definitifs de nos experiences, sur lesquels nous discuterons ensuite le com- portement des cktones.

PAltTIE EXPERIMENI’ALE

A . Photochloration en phase gazeuse

Ides trois c6toiies envisagCes se prktent bien B la rkactiori en phase gazeuse suivaiit la technique dkja dCcrite (l). Dans les tableaux qui sui- vent, on trouve les rCsultats de la rCpartition des produits chlorBs ainsi clue les donnkes analytiques qui ont servi Ctablir leur nature particulihe. L’nrialyse est rkalisCe comme suit : la chloration terminbe, on soumet la &tone chlorke ti un barbotage par l’azote sec dc faron a chasser le chlorure d’liydroghne dissous, puis on rectifie. Les maxima obtenus soiit

souniis ensuite B des mesures de densitCs et d’indices de r6frac.tion4, p i s h des rkartions c.himiques d’identification.

I. .lcLtone

1,:~ propanonc utilisCe &nit de qualitb p. an. Elk a C t C d6shydr:itle

que dans l’action directe du ehlore ii froid sup la butanone il a obteiiu un dkrivC monorhlorb unique (3-chlorobutanone-2) ainsi qu’un dkrivk dichlord (8,3-dichlora-butanone). L’autre dCrivb monchlorB (I-chloro- hutanone) isolC par Ies auteurs belges (cfr. 2) lui a CchappC. Un examen nttentif du tableau de rectification de 1lV. (Zoc. cit. p. 407) rBv6le cepen- dnnt qu’une rectification plus poussCe des fractions intermkdiaires aurait peut Ptrc permis de mettre le second isom6re en Bvidenre.

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CHLOHATION UE &TONES 495

par distil1;ttion bur P205. Les Ccliantillons utilisks prksentent .j6,20C (+ 0,loC) (8).

Eb,,, :

3 cssais sur 0,s 31 : Durbe addition C1, 60‘ 50’ 65’ .lugmentation en poids 18 gr. 12 16 (Th. 17)

Rectification : 3 tours - Hendement en monoclilores : 86,s ?A.

TCte Maximum Eb76, 100-19‘)C : 4 ”/; Eb,,, 219-22°C : 8 6 , s O n Eb764 122-35°C :

ng = 1,4859 9,3 0:

Go - 1,1794 ( > 135°C. dCc.) semi-earbazone, Fus. 134-3°C

La fraction de t&e doit contenir, a cbte d’un peu d’acetone inaltkrke, la 1 .l’-clichloropropanone (Eb. 115-1160C). La fraction de queue renferme probablement une petite quantitk de 1.3-dichloropropanone (Eb. 173°C). Le maximum est coristitui: par la monochloraeCtone, dont le degr6 de puretk peut 6tre mis en Cvidence en comparant sa rCfraction molbculaire B celle qu’on peut ralculer A partir de celle de l’acbtone, en retranrhant I’incrPmcnt tie I’liydrogCme et en y ajoutant relui du chlore.

( ’ I I~ -CO-CH~(’ l ItM,,,. 20°C = 20,51 RMcalc. 20°C = 20,22

*M&. RMCII~-~O-CII~ (’) - 1 1% (lo) I- 1 C1 (11) 16,18 -- 1,04 + 5,08 = 20,22

L’Ccart est cle 1,5 7; ; ce qui permet d’assigner B la monchloracktone obtenue un degrC de puretC satisfairant. Ajoutons que la RKalc. de la tkhloropropanone vaut 24,12, soit m e diffbrenre de 20 % d’avec rclle tlr la monorhloracCtone.

11. Butanone-2

La butsnone-2 (mCthyl-ethylcktone) d’origine commereiale a Ctk purifiee par passage h 1’Ctat de conibinaison bisulfitique et dkshydratke par distillation sur P,O,. Ides ecliantillons utilisCs prCsentent : Eb76, : 79,G°C 0,l”) (12).

.J. TIMMEHMANS, ~’l~ysic.o-C~iemica1 constants of pure organic,

(’1 1tM di:terminC d’apr6s les valeurs de TIMMERMANS, Zoc. cit.

(lo) WIBAUT et LANGDYCK, Rec. 59, 1227 (1940). (11) VAN DE WRYER, 31. k‘i’o(*. Chim. Be&. 45, 287 (1936). (12) TIMMERMANS, loc. cit .

cwnpoiinds, EZsPvier P. Cy. p. 334 (1950).

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496 A. BRUYLANTS ET J. HOUSSIAU

3 essais sur 0,5 M : DurPe addition C1, 40‘ 45‘ 5.5’ Augmentation en poids 15 gr. 17 19,7 (Th. 17

Rectification : (i tours - Rendement en monochlor6s : 90 yo

Fraction Eb W % Identification TETE Eb76, 80-118 4 melange MAX 11’ Eb,,, 113-16 64 71 I1 ‘ -+ 2,3 dimCthylindole (IV)

Eb770 115,5-115,9 11’ --+ tetramCthylpyrszine (V)

i iD - 1,4229

FUS. 104-5°C

FUS. 74-7UC 20

MAX 11” Eb,,, 136-40 20 29 11” -f 3-Cthylindole (VI) picrate Fus. 121-3oC

sel Hg++ Pus. 160-3~)(* Eb7,O 136-9 11“ + 2,s dikthylpyrazine (VII)

nzo = 1,4571 (dCc.) QUEUH Eb,, 60-5 (i melange

La fraction de tPte est un melange qui, a cat6 de butsnone insltCrkt~, contient probablement de la 3,3’-dichlorobutanone-2 (Eb 11 1 -1:W) qiie nous avons caracteriske par la reaction h. la dimkthyl-glyouime. Maih cette rkaction n’est pas spkcifique, elle pourrait indiquer aussi la pr6scnc.c. de diacetyle (Eb 88°C) qui prendrait naissance par photolysc dc la butam- ne.

La fraction de queue contient probablement la 1,3-dichIoro-butttiio- ne-2 (Eb,, 63(’C\.

En re qui conccrne lcs tleiix rnaximum, les constantes physiques quc nous avons mesides correspondent remarquablement bicn avec ccllrs qui sont attribuecs, dans la littkrature recente, (13) h. la 3-rhZorobutanont,-L (11’) e t A la I-rhlorobutnnone-2 (11”) (14). Au surplus, 11’ a Ct6 tr:tns- forme, d’sprcs les indications classiques (I6 b ) , sou3 I’action de 1’:iniline en 2,s dim~thylindolr ( IV) et en t6tram6thylpyrazine (V) sous I’ac*tion de I’nnimoniaque : tandis quc 11”, souniis nux memes r6:trtifs rlonntx res- pectivement Ic 3-Cthylindole (VI) et la 2,5-dictliyl~~yrazint~ (VII).

(13) I ~ A ~ J O I I N , REGIER, Zor. ci t . (,) (14) HUNTREBS, Organir rhlorine compoiintls. Wilry and Sons. Id.

(I5) a) I>EMETRE-VLAUICSCO, BZ. SOC. Chirn. [3] 6, 826 (1891). pp. 1090 e t 1052 (1948).

1)) CATCII, ELLIOTT, J . Chem. Soc. 1948, 272.

Page 6: Essais de Chloration dirigée III Cétones Aliphatiques

CHLORATION DE CETONES 407

111. Pinacolone (mCthyl-t . butylcbtone) Cette cCtone a Ctk prCparCe d’aprks les indications de Syn. Org. ( 16* 4 )

et purifike par la mCthode de DELANGE (16, *) ; la pinacolone brute contient en effet encore de la propanone dont elk est issue. On lui fait subir un traitement au sulfate mercurique acide jusqu’a ce qu’il n’y ait plus de prCcipitC indiquant la prCsence de CH,-CO-CEI,. Elk est ensuite sCchCe sur dribrite, puia sur CuSO, anhydre jusqu’h ce que re dernier ne bleuisse plus. On rerueille par rectification la fraction Eb,,, : 106,3’C (+ %I*).

Dude addition C1, 55‘ 75’ 50‘ 3 essais sur 0,s M :

Augmentation en poids 1 8 gr. 16 1 7 3 (‘1’11. 17)

Rectification : 1 0 tours - Elendement en monochlorks : 88 ‘3’.

TCtte Maximum Queue

____-___-

Eh, 45-92’C ; 5’6 Eb,, 92-94DC : 88% Eb,, 94-96’C : 7% n g = 1,4430 brun, lacrymoghe

nzo D == 1,4420 $0 D = 1,4415

jaunktre, lacrymoghe inrolore, lncrymogene

D’apr5s son indice de rCfraction, la frartion de tCte doit renfermer de I’a-chloropinacolone; la fraction de queue en contient aussi a r B t C du dCrivC dirhlorC C12COC(CH,),.

Le maximum est constituC par l’a-chlorpinarolone ; aes ronstante correspondent bien B celles qui lui sont assignCes par d’autres (13). De plus, les produits qu’il fournit par scission oxydante rnontrent que lr chlore est enade la fonction C=O.En effet,le maximum trait6 par NaBrO, suivant la technique prCconisCe pour I’oxydation de la pinacolone (l’), donne I’aride pivalique (VIII) (trimkthyl-acCtique) et le chloro-dibro- momCtliane (IX). (VIII) obtenu est caractCrisC par : Eb,, 64-8oC, I’us. 34-6OC (cfr. 17) ce qui le distingue sans contestations possibles de son dCrivC monochlorC, l’acide chloropivalique-P, Eh,, 108-12’C, Fus. 41°C(13b).

Le cfiloro dibromoinkthane est identifie par son point de fusion - 20’C (18).

B. Chlorations en phase liquide

Deuv skrie5 d’expCriences ont C t C rCaliaCes, en phase liquide, sur la butanone, dans de5 conditions chaque fois diffkrentes. L‘analyse des produits dc r@action a C t C effectuCe par les rnkmes procCdCs que ci-dessus.

(IG) :I) Syrt. Org. Paris. 1 , 318 et 418 (1935); b) BZ. Sor. Chim. .41, 3, 913 (1908).

(17) Syn. O T ~ . Paris, 1, 96 (1935). (18) Bed. 1, 67-8 (1918).

Page 7: Essais de Chloration dirigée III Cétones Aliphatiques

1!)X A . IIHL!YL,ANTS ET . J . HOUSSIAIJ

I . ('hloriction rk. I n bittnnotie par SO&, en prksmce rlc Bz,02.

D'aprtk VAN HEYMENANT, Ie chlorure de sulfuryle r6agit SUT lit but:inonc I( aver graiicic intensit6 11. Dans nos cssais a v c ~ Ic peroxycle, nous :ivnns done pris la. prdcaution d'ajouter lenterwnt par iinc am- pnule ii broinc Ic SO,CI, n u mdlange cie c+tonr rt perosyde, nuiintenu h froid.

I I : butnnone pure, anliydre Eb,,, : 7'3,6"C' (&o,lW) 0,: PrI

;irigriiiriitatioii en poids 15 gr. ('l'li. 17); dur& 15' l3z,O, : 0,003 M; SO,CI, 0,s M

i : bnliiiione pure, anydrc : 1 M HS,O, 0,005 RI (0,5:: M) : SO,C'I, : 1 M :iiigc.iricrit:ition en poi& : 80 gr. (Th. :34 gr.) tlnri.c 30'

Fr:tction

Tiite

Mas. I Mas. I1 Qucur

1Cb

1) ICb,,, 78-82 2 ) El>,,, 82-114

Eb,,, 11'4-11(i

lCb,, 70-80 El>,, 33-Ci2

O i Naturc

but anone butanone f 3,3' --

dichlorobutanone 5-C1-butanone-2 1-C1-buttinoiie-2 1-3 did-bntannnv-2

22 51 69 23 31 ,4

Butanone 3-C1-butanone-8 1 -CI-butanone-Z 114- l,%dichlbuta- none-%

Page 8: Essais de Chloration dirigée III Cétones Aliphatiques

CHLORATION DE CETONES 499

DISCUSSION I)ES HRSULTATS EXPERIMENTAIJX

A. Photochloration en phase gazeuse

Les principaux resultats sont resumes dans le tableau I ; on y indique la repartition experimentale des produits mono- chlores, en regard de la repartition statistique, calculee sur la base du nombre d’hydrogene substituable ainsi que le rendernent en derives monochlores.

I1 ressort de eel ensemble de resultats que la photochlo- ration des cetones se realise uniquement en cc par rapport au carbonyle.

Ce coinporternent est essenliellement different de celui des acides e t de leurs derives fonctionnels, que nous avons t;tudie preckdemment (’ ”).

L’ac(ti one est chloree aussi aisement que ses homologues ; cette aptitude r6actiorinelle la distingue de l’acide acetique ainsi que du chlorure e t du nitrile correspondants.

LJne difference essentielle se manifeste aussi dans I:\ valeur relative des rendements quantiques @. liappelons que DE PAIJW et JLJNGERS 4 l9) assignent les va1e:irs respeciives @ = 2 et @ == 1,8 A I’acide et au nitrile acetique, tandis que PIECK jndique pour I’acetone une valeur qualitative a ce

(19) BI. SOC. Chirn. Belg. 60, 383-409 (19.51).

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500 A. BRUYLANTS ET J. HOUSSIAU

point elevee (lo6) qu'elle n'est pas mesurahle par la tech- nique ulilisee (2n).

I,e groupe carhonyle C = 0 active donc intensement, clans la photochloration, les hydrogenes de la position voisine.

Dans le cas de la butanone-2, la substitution se concentre autour de la fonction ctitonique e t c'est la position u secon- daire, celle qui subit l'influence activante simultanee du groupe methyle, qui est privilegiee (u -- C1 sec. 71 yo au lieu de 25 yo). La position p qui ne subit aucune action acti- vante, reste intacte.

I,e coniportement de la pinacolone est tout a fait carac- teristique h cet egard. La position u y est activPe selective- ment, bien que le facteur statique lui soit emincmment tlCiavorable (u - C1 : 100 yo au lieu de 25 '$6).

Ajoutons que sur la base de ces trois exemples typiques, on pourrait aisement dkduire le comportement de toutes les &tones homologues soumises A la photochloration.

E. Chlorafions tie la butanone, dans differentes conditions

Le tableau I1 permet de comparer le comportemenl tle la butanone-2.

I I d! ) 71 0

28 72 0

3 1 (50 0

80"

1 3

RO"

Quelles que soieri 1 les conditions opkratoires, les rbpar-

I,a position tc est privil6gide et l'influence activante tl I I

litions tl'isomkres monochlores sont en fait identiques.

(*O) PIIIC'K, Mdmoire de Doctorut. Louvuin 1040. : 1'11cc~ et J[lN(;tcIts,

H I . SOC. Chiin. Belg. 60, 357-3114 (1951).

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CHLORATION DE CETONES 50 1

groupe methyle se mani€este en outre par une proportion klevee du derive u-chlore secondaire.

Ces resultats placent tout essai d’interpretation en face de 1 alternative suivante :

1) ou bien la reaction de chloration se rkalise suivant un mecanisme identique, quel que soit le modus operandi;

2) ou bien les mecanismes sont differents. Envisageons separement chacune de ces possibilitks. 1) La reaction se fait suivant un mecanisme identique;

supposons d’abord qu’il s’agisse d’un mecanisme ionique. Dans ce cas, il faudrait s’attendre a ce que la vitesse du

processus, activbe par un vecteur d’halogkne, soit de beaucoup plus elevke que la vitesse de la reaction en phase gazeuse anhydre (*); en ritalisant les conditions telles qu’en c) (tableau 11), la chloration, dont la vitesse peut &re estimke qualitati- vement sur la base du rendement en fonction du temps a meme temperature, devrait &re beaucoup plus rapide qu’en toute autre condition et notamment telle qu’en a); or ce n’est pas le cas; en l’occurence, il ne peut donc s’agir d’un mecanisme ionique;

- supposons ensuite qu’il s’agisse d’un mecanisme en chaine; a premikro vue, en ne se referant qu’aux resultats du tableau IJ, cette hyptohkse serait plus plausible que la precedente; en effet, par analogie avec les acides, on admettra volontiers que la photochloration en phase gazeuse (a) et la chloration par le chlorure de sulfuryle en presence de peroxyde (b) (zl) se fait par l’intermediaire de radicaux et d’atomes d’autant plus qu’on pourra toujours objecter que des pre- cautions suffisantes n’ont pas ete prises pour occulter con- venablement le melange reactionnel dans l’experience c), experience dans laquelle le soufre ne jouerait alors que le r61e d’un inhibiteur de reactions en chaine, ralentissant la vitesse de la chloration. Mais on se rappellera qu’on obtient identi- quement les mi?mes produits [3-chloro-butanone-2 (11‘) e t 1-chloro-butanone-2 (II”)] et dans les proportions respectives de 75 %, (11‘) et 25 :h (II‘), pratiquement identiques aux

(*) On aura prCsent A I’esprit le comporteinent de l’acide acCtique; en phase liquide, en prCsence vecteur d’haloghes (I, FeCI,, S . . .) chlora- tion rapide en u, en phase gazeuse chloration excessivement Iente en a. Ici le mCcanisme ionique est prCpond6rant.

-

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502 A . HIIUYI.ANTS El‘ J . HOUSSIAC:

preckdentes, en realisant la chloration en milieu aqueux (3) (4)

or il est pratiquement exclu dans de telles conditions qu’opere un mecanisme en chaine.

2) Nous sommes ainsi amenes a rejeter la premiere alter- native et a admettre que la rdaclion se prodiiii sriivnnt tlcs mdcnnismes cli//Crents, qui rie‘unmoins conduisent ri tics prodiiils tit. r i n d i o n identiques.

Ces mdcanismcs sont : m6canisme ionique dans la chlora- tion en phase liquide, en presence d’eau ou d’un vecLeiir d’halogene ; mecanisme en chaine par radicaux et atonics dans la chloration en phase gazeuse de nibme que dans la reac- tion avec le chloriire de sulfuryle, en presence de peroxyde (,I).

Ce dernier mecanisme retiendra particnlierement notrc attention.

Ida cause de la difference essentielle de comportement dans la photochloration doit &tre recherchke dans In nature diffbrente des deux groupes carbonyle C = 0 el carboxyle

13appelons que chacun de ces deux groupes est susceptible d’exercer sur les groupements adjacents un cffet klectromkre (4 1.:) et un effct inductif (+ I), tous tleux positivants. En fait, seul ~c \ C-o est en inesure cie les laire agir simultane-

mrnt, tandis (pie - - (; :(O subissant le phknomkne cle meso-

mkrie interne qui rkduit considbrablement 011 annulr mt‘rntl son cffet t IS, n’agit prntiquement pas par cffet t I.

Happclons aussi quc la stabilisation d’un radical, in ler- rnddiaire nbcessaire de la reaction en chaine, est assurk en ortlre principal par l’cffet 6lectromi.re du suhstituant voisin et en ortlre sccontlaire par l’effet inductif, quc iio~is pouvons misonnablenient ndgliger ici.

Si n o i i s comparons la propanoiie A l’ncide acdtiquc, Ics radicaus p i doivent se former pour assurcr la production respective d t nionochloropropanone c t de l’acide monochlo- rac6tiyue sont CH, - C O -CI-I, (A) e t CEI, ~- COOM ( I { ) . Or (A) est stabilisk par l’effet + E qiii lui assure unc possi- bilitk d’hydridation du type allylique CH, - CO = (:€I2 + +

CH3 -CO-C€12 tandis qiie (H) nc jonit pas de cet avantage.

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Page 12: Essais de Chloration dirigée III Cétones Aliphatiques

CHLORATION DE GETONES 503

Toute la difference de comportement relatif des cktones et des acides - rendement quantique et repartition d’isomeres monochlor6s -- releve de cette cause structurale.

C. Pre‘pm‘ation de ce‘tones monohalogPnCes

De nombreux auteurs (2,8~4,6) se sont preoccupes de trouver des mkthodes adequates d’obtention de cetones mono- chlorees exemptes de composes polychlores.

Nous croyons inutile d’entrer dans le detail d’une dis- cussion des avantages ou des dkfauts des diffkrents systemes proposes.

Nous nous bornerons a faire remarquer qu’en utilisant la methode de photochloration en phase gazeuse, telle que nous I’avons decrite de fagon detaillke (cfr. aussi 1 a, b), il est possible de preparer des cetones monochlorks d’un degre de purete tres satisfaisant avec des rendements de l’ordre de 85 a 90 ”/. Pour s’en convaincre, il suffit de consulter les constantes physiques des produits obtenus.

CONCIJJSIONS

1. n a n s le prksent travail, nous confirmons que la photo- chloration directe ou la chloration par le chlorure de sulfuryle, en presence de peroxyde, donne uniquement des isomeres a-monochlorks, A I’exclusion de d@rives p.

La chloration en presence de vecteurs rl’halogene conduit aux mkmes produits de reaction.

Bien qu’on modifie les mtkanismes de reaction, il n’est pas possible d’orienter le chlore en d’autres positions que la position M, par rapport au carbonyle.

2. Les methodes de photochloration decrites fournisserit des produits monochlores purs.

* * * Lcs auteurs remercient le 1 7 0 ~ ~ s NATIONAL (I?. ni. 13. S.)

pour le subside qui a P t b accord6 au 1,aboratoire.

UNIVERSITE DE LOUVAIN Laboratoire de Chimie Ge‘nPrale

Corriwmniqwe‘ ri lu SociBe‘ C l h i q t i e de Relgique, le 19 juin 1952.