1
6 actualités Actualités pharmaceutiques n° 483 Mars 2009 Le lupus érythémateux disséminé (LED) est une pathologie auto- immune inflammatoire chronique très invalidante dont la prise en charge reste peu spécifique. Une équipe du CNRS de Strasbourg a mis en évidence un fragment protéique qui montre des résultats très encourageants dans son traitement. D’ origine multigénique, environnementale et immunologique, le lupus touche plusieurs millions de patients dans le monde. En France, le nombre de patients atteints est estimé à environ 100 000, en majorité des jeunes femmes de 18 à 30 ans. Le système immuni- taire des patients atteints de lupus développe des anticorps spécifi- ques de molécules du soi. Comme d’autres maladies auto-immunes chroniques, le LED se manifeste par des atteintes inflammatoires multi-organes, dont les caracté- ristiques varient selon les patients. Parmi les signes cliniques les plus fréquents, on trouve des douleurs articulaires et musculaires inten- ses, en particulier au niveau des doigts, des poignets, des cou- des…, des lésions cutanées du visage, des atteintes rénales plus ou moins sévères, des manifesta- tions psychiatriques comme des troubles de l’humeur ou des syn- dromes confusionnels. Souvent, les patients subissent également des atteintes hématologiques des trois lignées, des inflammations au niveau des plèvres, du cœur ou des vaisseaux sanguins, une photosensibilité, parfois des ulcé- rations de la muqueuse digestive. Restaurer l’état normal du système immunitaire Si le lupus est de mieux en mieux maîtrisé, il reste extrêmement invalidant et nécessite un suivi permanent avec des phases de poussées imprévisibles et très douloureuses. Des traitements symptomatologiques existent mais aucun n’est spécifique de la maladie (corticothérapie ou métho- trexate dans les formes sévères). De plus, leurs effets secondaires peuvent aussi se révéler handica- pants (troubles cardiovasculaires, obésité, diabète, troubles de la fertilité, immunodépression). Les chercheurs du laboratoire CNRS d’immunologie et chimie thérapeutiques dirigé par Syl- viane Muller à Strasbourg avaient découvert, en 2001, une molécule capable de restaurer l’état normal du système immunitaire altéré 1 . Traitées avec un fragment d’une protéine nucléaire, le peptide P140, des souris lupiques présen- tent une durée de vie voisine de celle de souris saines. Les souris traitées présentaient une atteinte rénale et des signes d’inflamma- tion articulaires mineures. L’essai thérapeutique de phase IIa a été réalisé par la société ImmuPharma en Bulgarie sur 20 patients atteints de lupus qui ont reçu trois injections de peptide P140 par voie sous-cutanée, cha- cune espacée de deux semaines 2 . Le peptide testé n’a généré aucun effet indésirable grave hormis une réaction locale au site d’injection. Une diminution des auto-anti- corps anti-ADN et des immuno- globulines typiquement retrouvés chez les patients atteints de lupus a confirmé l’efficacité du peptide P140. De plus, le score d’intensité de la maladie (index international Systemic Lupus Erythematosus Disease Activity Index, SLEDAI)) a été significativement diminué dans le groupe de patients ayant reçu la plus faible dose de peptide. Un espoir est né Ces résultats, inespérés après une si brève période de traite- ment, confirment les observations précliniques. Par rapport aux thé- rapeutiques actuelles, l’intérêt de cette molécule, beaucoup plus ciblée, est de ne pas affecter la globalité du système immunitaire. Ainsi, l’administration répétée du peptide P140 n’affecte pas la capacité des souris à résister à une infection virale à la diffé- rence des immunosuppresseurs. Il constitue ainsi le premier can- didat potentiel pour le traitement spécifique du lupus. Un essai clinique de phase IIb impliquant environ 200 patients est actuel- lement en cours en Amérique du Sud et en Europe. Sébastien Faure Maître de conférences des Universités, Faculté de pharmacie, Angers (49) [email protected] Recherche Vers un traitement plus ciblé du lupus érythémateux Références 1. Murine models of systemic lupus erythematosus: B and T cell responses to spliceosomal ribonucleoproteins in MRL/Fas(lpr) and (NZB x NZW)F(1) lupus mice. Monneaux F, Dumortier H, Steiner G, Briand JP, Muller S. Int Immunol. 2001;13(9):1155-63. 2. Spliceosomal peptide P140 for immunotherapy of systemic lupus erythematosus: results of an early phase II clinical trial, Muller S, Monneaux F, Schall N, Rashkov RK, Oparanov BA, Wiesel P, Geiger JM, Zimmer R. Arthritis Rheum. 2008; 58(12):3873-83. Pour en savoir plus : http://www.immupharma.com Et si l’on autorisait les pharmaciens à faire des petits ? Le statut juridique des officines a connu une importante évolution ces dernières années, marquée notamment par l’explosion des sociétés d’exercice libéral (SEL). Le Collectif des groupements des pharmaciens d’officine (CNGPO) a récemment présenté aux députés UMP Pierre Marcon et Christine Marin, auteurs d’un récent rapport sur les professions libérales réglementées, un projet visant à permettre à une pharmacie “mère” de détenir jusqu’à trois succursales. À la différence du système des SEL en cascade qui impose un titulaire dans chaque point de vente, ce système permettrait au pharmacien titulaire de la première officine d’employer dans ses succursales des pharmaciens adjoint ou gérant. Plusieurs autres avantages sont énumérés. « Premier avantage, le capital reste dans les mains de la profession », note Pascal Louis, président du CNGPO. Les députés UMP se sont montrés tout à fait séduits, mais le chemin législatif pourrait être long avant de voir aboutir la proposition. En effet, la publication du décret sur la société de participation financière des professions libérales (SPF-PL), essentielle à la mise en place d’un tel dispositif, se fait attendre depuis 2001. Par ailleurs, Jean-Pierre Marcon souligne : « Ce sont des propositions à caractère financier et fiscal qui requièrent une grande technicité. » Il sera donc nécessaire pour les députés porteurs du projet de « demander à la commission des Finances de l’Assemblée nationale de travailler sur le sujet afin de pouvoir proposer des amendements dans la discussion de la prochaine loi de finances ». Aurélie Haroche © jim.fr profession

Et si l’on autorisait les pharmaciens à faire des petits ?

Embed Size (px)

Citation preview

Page 1: Et si l’on autorisait les pharmaciens à faire des petits ?

6actualités

Actualités pharmaceutiques n° 483 Mars 2009

Le lupus érythémateux

disséminé (LED) est

une pathologie auto-

immune inflammatoire

chronique très

invalidante dont la prise

en charge reste peu

spécifique. Une équipe

du CNRS de Strasbourg

a mis en évidence un

fragment protéique qui

montre des résultats

très encourageants

dans son traitement.

D’origine multigénique, environnementale et immunologique, le

lupus touche plusieurs millions de patients dans le monde. En France, le nombre de patients atteints est estimé à environ 100 000, en majorité des jeunes femmes de 18 à 30 ans. Le système immuni-taire des patients atteints de lupus développe des anticorps spécifi-ques de molécules du soi. Comme d’autres maladies auto-immunes chroniques, le LED se manifeste par des atteintes inflammatoires multi-organes, dont les caracté-ristiques varient selon les patients. Parmi les signes cliniques les plus fréquents, on trouve des douleurs articulaires et musculaires inten-ses, en particulier au niveau des doigts, des poignets, des cou-des…, des lésions cutanées du visage, des atteintes rénales plus ou moins sévères, des manifesta-tions psychiatriques comme des troubles de l’humeur ou des syn-dromes confusionnels. Souvent, les patients subissent également des atteintes hématologiques des trois lignées, des inflammations au niveau des plèvres, du cœur ou des vaisseaux sanguins, une

photosensibilité, parfois des ulcé-rations de la muqueuse digestive.

Restaurer l’état normal du système immunitaireSi le lupus est de mieux en mieux maîtrisé, il reste extrêmement invalidant et nécessite un suivi permanent avec des phases de poussées imprévisibles et très douloureuses. Des traitements symptomatologiques existent mais aucun n’est spécifique de la maladie (corticothérapie ou métho-trexate dans les formes sévères). De plus, leurs effets secondaires peuvent aussi se révéler handica-pants (troubles cardiovasculaires, obésité, diabète, troubles de la fertilité, immunodépression). Les chercheurs du laboratoire CNRS d’immunologie et chimie thérapeutiques dirigé par Syl-viane Muller à Strasbourg avaient découvert, en 2001, une molécule capable de restaurer l’état normal du système immunitaire altéré1. Traitées avec un fragment d’une protéine nucléaire, le peptide P140, des souris lupiques présen-tent une durée de vie voisine de celle de souris saines. Les souris traitées présentaient une atteinte rénale et des signes d’inflamma-tion articulaires mineures. L’essai thérapeutique de phase IIa a été réalisé par la société ImmuPharma en Bulgarie sur 20 patients atteints de lupus qui ont reçu trois injections de peptide P140 par voie sous-cutanée, cha-

cune espacée de deux semaines2. Le peptide testé n’a généré aucun effet indésirable grave hormis une réaction locale au site d’injection. Une diminution des auto-anti-corps anti-ADN et des immuno-globulines typiquement retrouvés chez les patients atteints de lupus a confirmé l’efficacité du peptide P140. De plus, le score d’intensité de la maladie (index international Systemic Lupus Erythematosus Disease Activity Index, SLEDAI)) a été significativement diminué dans le groupe de patients ayant reçu la plus faible dose de peptide.

Un espoir est néCes résultats, inespérés après une si brève période de traite-ment, confirment les observations précliniques. Par rapport aux thé-rapeutiques actuelles, l’intérêt de cette molécule, beaucoup plus ciblée, est de ne pas affecter la globalité du système immunitaire. Ainsi, l’administration répétée du peptide P140 n’affecte pas la capacité des souris à résister à une infection virale à la diffé-rence des immunosuppresseurs. Il constitue ainsi le premier can-didat potentiel pour le traitement spécifique du lupus. Un essai clinique de phase IIb impliquant environ 200 patients est actuel-lement en cours en Amérique du Sud et en Europe. �

Sébastien Faure

Maître de conférences des Universités,

Faculté de pharmacie, Angers (49)

[email protected]

Recherche

Vers un traitement plus ciblé du lupus érythémateux

Références1. Murine models of systemic lupus erythematosus: B and T cell responses to

spliceosomal ribonucleoproteins in MRL/Fas(lpr) and (NZB x NZW)F(1) lupus

mice. Monneaux F, Dumortier H, Steiner G, Briand JP, Muller S. Int Immunol.

2001;13(9):1155-63.

2. Spliceosomal peptide P140 for immunotherapy of systemic lupus erythematosus:

results of an early phase II clinical trial, Muller S, Monneaux F, Schall N, Rashkov RK,

Oparanov BA, Wiesel P, Geiger JM, Zimmer R. Arthritis Rheum. 2008; 58(12):3873-83.

Pour en savoir plus : http://www.immupharma.com

Et si l’on autorisait les pharmaciens à faire des petits ? Le statut juridique des officines a connu une importante évolution ces dernières années, marquée notamment par l’explosion des sociétés d’exercice libéral (SEL). Le Collectif des groupements des pharmaciens d’officine (CNGPO) a récemment présenté aux députés UMP Pierre Marcon et Christine Marin, auteurs d’un récent rapport sur les professions libérales réglementées, un projet visant à permettre à une pharmacie “mère” de détenir jusqu’à trois succursales. À la différence du système des SEL en cascade qui impose un titulaire dans chaque point de vente, ce système permettrait au pharmacien titulaire de la première officine d’employer dans ses succursales des pharmaciens adjoint ou gérant. Plusieurs autres avantages sont énumérés. « Premier avantage, le capital reste dans les mains de la profession », note Pascal Louis, président du CNGPO.Les députés UMP se sont montrés tout à fait séduits, mais le chemin législatif pourrait être long avant de voir aboutir la proposition. En effet, la publication du décret sur la société de participation financière des professions libérales (SPF-PL), essentielle à la mise en place d’un tel dispositif, se fait attendre depuis 2001. Par ailleurs, Jean-Pierre Marcon souligne : « Ce sont des propositions à caractère financier et fiscal qui requièrent une grande technicité. » Il sera donc nécessaire pour les députés porteurs du projet de « demander à la commission des Finances de l’Assemblée nationale de travailler sur le sujet afin de pouvoir proposer des amendements dans la discussion de la prochaine loi de

finances ».

Aurélie Haroche

© jim.fr

profession