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-- (I 952) CAHIERS D'ACOUSTIQUE * N ~ 46 ETUDE ET REPRESENTATION DE LA NOTE COMPLEXE EN ACOUSTIQUE MUSICALE par Andr6 MOLES Docteur 6s Sciences, Charg6 de 1Recherches au C. ~. R. S. ** SOMMAIRE. -- La complexitd du signal musical ne saurait $tre convenablement dgcrite par les courbes reprdsentatlves du niveau ou de la hauteur en [onction du temps, qui ne donnent qu'une idde partielle de sa structure. Une reprg- sentation compldte da signal musical est /ournie par le diagramme tri-dimensionnel, niveau, hauteur, durde. Une dtude plus appro[ondie montre immddiatement qtte, pendant la durge dtt signal, on peut distinguer des gl~ments ddfinis, plus courts, qu'on nomme les (( notes complexes )). Une gtude des 3 projections du diagramme tri- dimensionnel rapport$es aax sons gl~mentaires fondamentaux qui r~sultent de l'existence de diH~rents seuils dans la perception /ournit des rdgles dt~ code gouvernant le message musical considJrg comme un type spdcial d~in[ormation acoustique. La mdthode expgrimentale permettant d'obtenir un enregistrement suffisamment pfdcis da diagramme tri-dimensionnel est alors examinee. 9 I. -- INTRODUCTION. Le d6veloppement r6cent de la musique, dfi h la Radio et h l'enregistrement, contraint les acous- ticiens h s'int6resser h la (( musique physique )) sous un aspect intrins~que d6bordant de beaucoup le point de rue technique des instruments de musique, qui a fait le principal int6rgt des acousticiens au si~cle dernier. C'est la physique du signal musical, con~u comme un objet sonore : comme la mati6re temporelle qui sort du haut-parleur et p6n~tre dans l'oreille de l'auditeur. Le premier but d'une science en devenir est d'6tablir un syst~me de classifica~cion et une termi- nologie pr6cise, chose particuli~rement n6cessaire dans le cas du signal musical, dont le vocabulaire, 6tabli par des artistes, paraissait hostiIe h route pr6- cision, puisqu'il 6tait pour une large part emprunt6 au domaine spatial (haut, grave, volume, clair, etc.) et transpos6 au domaine temporel h partir de notions plus que vagues sur la correspondance entre les arts trouvant diftlcilement une justi- fication physique. Nous pr6sentons ici, dans le cadre des travaux de musique concrete, une tentative d'appr6hension du ph6nom~ne musical conga comme un objet enre- gistrable, reproductible et d6finissable. Une grande part de la pr6sentation g6n6rale du sujet et de la terminologie a 6t6 6tablie en collaboration avec Pierre SCHAEFrEa, cr6ateur de la musique concrete. II. -- (( APPBI~,HENSION )) DU PH~NOM~NE MUSICAL. Le signal musical, quel qu'il soit, issu du haut parleur et p6n6trant dans l'oreille de l'auditeur se d6veloppe au long du temps et son action sur la sensibilit6 rend 6vident a priori qu'il dolt poss6der une structure temporelle. Comment exprimer objec- tivement cette structure ? La m6thode qui consiste h enregistrer l'oscil- logramme h une 6chelle suffisante pour d6velopper chaque p6riode, appr6hendant ainsi la totalit6 du ph6nom6ne temporel, est compl6tement inad6quate, contrairement h ce que conduirait h admettre un raisonnement simpliste, pour trois raisons essen- tielles : a) la forme de la pscudo-p6riode 616mentaire est inintelligible; nous ne sommes pas capables, saul cas exceptionnels, de repasser de cette forme h la sensation auditive par une simple classification 6tablissant une correspondance, car le r6pertoire de ces formes est beaucoup trop grand ; b) cette m6thode d6veloppant une par une les pseudo-p6riodes 616mentaires n'autorise pas une analyse statistique correspondant aux modes de perception r6els du sujet, notre connaissance du monde ext6rieur par nos sens 6taut toujours lacu- naire et probabiliste, comme l'a r6cemment soulign6 la th6orie de 1'information ; c) enfin, microphone et oscillographe fournissent un signal conforme, non h notre sensation, mais h l'excitation physique (pression, fr6quence) qui, en particulier, nc respecte pas les lois de sensibi- lit6 psycho-physiologiques. Ces trois critiques essentielles --laissant de c5t6 le cofit des m6thodes d'enregistrement directes appliqu6es h de longues dur6es- peuvent 4tre group6es dans la remarque suivante qui, h notre connaissance, n'a pas 6t6 pr6sent6e expticitement dans la litt6rature. Le but d'une m6thode d'analyse consiste, non pas h fournir une information 6quivaleute au ph6nom~ne lui-m~me, mais au contraire h r6duire * S6rie d'expos6s relatifs aux travaux du GROUPEYIENT DES ACOUSTICIENS DE LANGUE ]~RAN~AISE (G. A. L. F.). ** Au CENTRE DE I~ECHERCHES SCIENTIFIQUES, INDUS- TRIELLES ET MARITIMES DE MARSEILLE (C. R. S. I. M.) et collaborateur du CENTRE D'ETUDES I~ADIOPHONIQUES. 9 N. D. L. R. : SOMMAnY (intended, on tile author's request, for english language readers and abstracting services). -- The complexity of musical signal cannot be adequately described by the Level vs time or Pitch vs time curves which give only a partial sight of its structure. A complete representation of the musical signal is given by the three dimensional diagram: Level, Pitch, Time. A closer study shows immediately that, in the duration of the musical signal can be distinguished shorter definite elements which are the (( complex tones )). A study of the three projections of tridimensional diagram as related to the elemental sounds which arise from the existence of different limens in perception, gives some rules of the code governing musical message, considered as a special type of acoustical information. The experimental way of reaching a suffi- ciently accurate record of the tridimensional diagram is finally discussed. -- 430 --

Étude et représentation de la note complexe en acoustique musicale

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- - (I 952) CAHIERS D'ACOUSTIQUE * N ~ 46

E T U D E ET REPRESENTATION DE LA NOTE COMPLEXE EN ACOUSTIQUE MUSICALE

par Andr6 MOLES Docteur 6s Sciences, Charg6 de 1Recherches au C. ~. R. S. **

S O M M A I R E . - - La complexitd du signal musical ne saurait $tre convenablement dgcrite par les courbes reprdsentatlves du niveau ou de la hauteur en [onction du temps, qui ne donnent qu'une idde partielle de sa structure. Une reprg- sentation compldte da signal musical est /ournie par le diagramme tri-dimensionnel, niveau, hauteur, durde. Une dtude plus appro[ondie montre immddiatement qtte, pendant la durge dtt signal, on peut distinguer des gl~ments ddfinis, plus courts, qu'on nomme les (( notes complexes )). Une gtude des 3 projections du diagramme tri- dimensionnel rapport$es aax sons gl~mentaires fondamentaux qui r~sultent de l'existence de diH~rents seuils dans la perception /ournit des rdgles dt~ code gouvernant le message musical considJrg comme un type spdcial d~in[ormation acoustique. La mdthode expgrimentale permettant d'obtenir un enregistrement suffisamment pfdcis da diagramme tri-dimensionnel est alors examinee. �9

I. -- I N T R O D U C T I O N .

Le d 6 v e l o p p e m e n t r6cent de la musique , dfi h la Radio et h l ' en r eg i s t r emen t , con t r a in t les acous- t iciens h s ' in t6resser h la (( mus ique phys ique )) sous un aspec t in t r ins~que d 6 b o r d a n t de beaucoup le po in t de r u e t echn ique des i n s t r u m e n t s de musique, qui a fa i t le p r inc ipa l int6rgt des acoust iciens au si~cle dernier . C 'es t la phys ique du signal musical , con~u c o m m e un ob je t sonore : c o m m e la mat i6re t empore l l e qui sor t du h a u t - p a r l e u r et p6n~tre dans l 'oreille de l ' aud i t eu r .

Le p r e m i e r b u t d ' u n e science en deven i r est d '6 tab l i r un sys t~me de classifica~cion et une te rmi- nologie pr6cise, chose pa r t i cu l i~ rement n6cessaire dans le cas du signal musical , don t le vocabula i re , 6tabli p a r des a r t i s tes , pa ra i s sa i t hostiIe h rou t e pr6- cision, pu i squ ' i l 6 ta i t p o u r une large pa r t emprun t6 au doma ine spa t ia l (haut , grave , vo lume, clair, etc.) et t r anspos6 au d o m a i n e t e m p o r e l h pa r t i r de not ions plus que vagues sur la cor respondance entre les a r t s t r o u v a n t dif t lci lement une justi- f icat ion phys ique .

Nous p r6sen tons ici, dans le cadre des t r a v a u x de mus ique concrete , une t e n t a t i v e d ' appr6hens ion du ph6nom~ne mus ica l conga c o m m e un ob je t enre- gis t rable , r ep ro d uc t i b l e et d6finissable. Une grande pa r t de la p r 6 s e n t a t i o n g6n6rale du suje t et de la t e rminolog ie a 6t6 6tablie en co l labora t ion avec Pierre SCHAEFrEa, c r6a teur de la mus ique concrete.

I I . - - (( A P P B I ~ , H E N S I O N )) D U P H ~ N O M ~ N E M U S I C A L .

Le signal musical , quel qu ' i l soit, issu du hau t par leur et p 6 n 6 t r a n t dans l 'oreil le de l ' a u d i t e u r se d6veloppe au long du t e m p s et son ac t ion sur la

sensibilit6 rend 6vident a priori qu ' i l dolt poss6der une s t ruc ture tempore l le . C o m m e n t expr imer objec- t i v e m e n t cet te s t r u c t u r e ?

La m6thode qui consiste h enregistrer l 'oscil- l og r amme h une 6chelle suffisante pour d6velopper chaque p6riode, a p p r 6 h e n d a n t ainsi la total i t6 du ph6nom6ne tempore l , est compl6 t emen t inad6quate , con t ra i rement h ce que condui ra i t h a d m e t t r e un ra i sonnement simpliste, pour trois raisons essen- tielles :

a) la forme de la pscudo-p6r iode 616mentaire est inintelligible; nous ne s o m m e s pas capables, saul cas exceptionnels, de repasse r de cet te forme h la sensat ion audi t ive pa r une s imple classification 6tabl issant une cor respondance , car le r6per toi re de ces formes est b e a u c o u p t rop grand ;

b) cet te m6thode d6ve loppan t une par une les pseudo-p6riodes 616mentaires n ' au to r i se pas une analyse s ta t i s t ique c o r r e s p o n d a n t aux modes de percept ion r6els du suje t , no t re connaissance du monde ext6rieur pa r nos sens 6 tau t toujours lacu- naire et probabiliste, c o m m e l ' a r 6cemmen t soulign6 la th6orie de 1 ' in format ion ;

c) enfin, mic rophone et osci l lographe fournissent un signal conforme, non h no t re sensation, mais h l ' exc i ta t ion phys ique (pression, fr6quence) qui, en particulier, nc respec te pas les lois de sensibi- lit6 psycho-physiologiques .

Ces trois cr i t iques essentielles - - l a i s s a n t de c5t6 le cofit des m6thodes d ' e n r e g i s t r e m e n t directes appliqu6es h de longues d u r 6 e s - peuven t 4tre group6es dans la r e m a r q u e su ivan te qui, h not re connaissance, n ' a pas 6t6 pr6sent6e expt ic i tement dans la l i t t6ra ture .

Le bu t d 'une m6 thode d ' a n a l y s e consiste, non pas h fournir une i n f o r m a t i o n 6quivaleute au ph6nom~ne lui-m~me, mais au contra i re h r6duire

* S6rie d'expos6s relatifs aux travaux du GROUPEYIENT DES ACOUSTICIENS DE LANGUE ]~RAN~AISE (G. A. L. F.).

** A u CENTRE DE I~ECHERCHES SCIENTIFIQUES, INDUS- TRIELLES ET MARITIMES DE MARSEILLE (C. R. S. I. M.) et collaborateur du CENTRE D'ETUDES I~ADIOPHONIQUES.

�9 N. D. L. R. : SOMMAnY (intended, on tile author's request, for english language readers and abstracting services). - - The complexity of musical signal cannot be adequately described by the Level vs time or Pitch vs time curves which give only a partial sight of its structure. A complete representation of the musical signal is given by

the three dimensional diagram: Level, Pitch, Time. A closer study shows immediately that, in the duration of the musical signal can be distinguished shorter definite elements which are the (( complex tones )). A study of the three projections of tridimensional diagram as related to the elemental sounds which arise from the existence of different limens in perception, gives some rules of the code governing musical message, considered as a special type of acoustical information. The experimental way of reaching a suffi- ciently accurate record of the tridimensional diagram is finally discussed.

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t. 7, n ~ 11, 1952] ~IOTE COMPLEXE I~N

l ' informatlon que nous apporte le ph6nom~ne par une s61ection dans celle-ci d'616inents intelligibles. Le but de l 'analyse scientifique cst de diminuer et non d 'augmenter la quantit6 d'information ; plus pr6cis6ment de la r6duire h une valeur juste sup6- rieure h la capacit6 d'information de l'esprit h uma in : c'est h ce but que correspondent des m6thodes telles que celle de Founi~n, les In6thodes de filtrage et, d'une facon g6n6rale, une grande part des (( classifications )) morphologiques.

L'appr6hension correcte du ph6nom6ne musical exigeant une r6f6rence h la sensation, seul crit6re 6videmment uvilisable, nous conduit h nous int6- resser, plut6t qu'h l 'amplitude et h la fr6quence, au ni~,eau et h la hauteur du son que, dans une premi6re approximation, nous assimilerons aux logarithmes des grandeurs physiques correspon- dantes.

GABon a d6jh mofitr6 qu'une relation d'incer- titude existait entre la d6finition de la hauteur par l'oreille et le d61ai minimum n6cessaire h la per-

!:

ACOUSTIQU:E M U S 1~ C A.LI~, ~ / 9

de FounI~n nous autorisc h discerner dans l'oscil- logramme sonore.

Cela nous famine h trois grandeurs seulement : niveau, hauteur et dur6e et nous avons d6jh remarqu6 dans un pr6c6dent travail [1, 2] qu'il y a dans la notat ion musicale classique une contra- diction de principe, car les notions de fr6quence ou de hauteur sont implicitement attribu6es h des ph6nom6nes p6riodiques, alors que l ' introduction de la notion de dur6e suppose que le ph6nom~ne est limit6 dans le temps, donc qu'il n'est jus tement pas p6riodique au sens rigoureux du terme. Si cette contradiction est peu marqu6e quand les notes durent identiques h elles-m~mes un temps sutti- samment long pour que la notion de fr6quence 6merge sans trop d'incertitude, elle devient flagrantc pour les notes tr6s courtes, pizzicati, etc. com- portant un nombre tr6s r6duit de pseudo-p6riodes, oh la notion de hauteur devient 6vanescente. Par ailleurs, cette earact6risation se r6f6re aux notes produites par les instruments de la musique clas-

~ r 6 S

FIG. 1. - - Le d i a g r a m m e t r i - d imens i onne l L, I I , t r e p r 6 s e n t a t i f de la (c n o t e c o m p l e x e )~.

ception d 'un son de hauteur d6finie. Par ailleurs les notions de seuil de niveau et de hauteur intro- duisent dans le domaine spectral niveau-hauteur une incertitude suppl6mentaire qui nous ain6ne

liiniter inf6rieuretnent la pr6cision requise dans la repr6sentation de l 'objet musical.

La th6orie classique de la musique consid6re les (, sons musicaux)) comme d6finis par quatre variables : la hauteur, le ni~eau, le timbre et la durde. Le timbre n'est pas une grandeur autonome, puisqu'il repr6sente une perception globale d'une forme, ce que le physicien appelle le spectre, exprim6e elle-mgme par les variations du niveau en fonction de la hauteur sous forme d'une s6rie finie de composantes sinusoidales que le th6or6me

sique conservant une certaine uniformit6 dans la 16partition spectrale du son qu'elles produisent ; elle est, par cons6quent, d 'une application tr~s liinit6e ; la Inusique concr6te, par exemple, admet que tout son est susceptible de prendre un caract6re musical s'il est plac6 dans une structure ad6quate et sera conduite "h d6noncer cette repr6sentation arbitraire. , J A c Q U I N O T [3] avait d6jh montr6 l'insuf- fisance des notions de hauteur, niveau et dur6e pour repr6senter un ph6nom6ne sonore, et signal6 qu 'en �9 r6alit6, celui-ci ne pouvait gtre appr6ei6 ad6qua- tement que par l '6tude de la variation de son spectre et de son niveau en fonction du temps. I1 apparalt done que la repr6sentation du ph6nom6ne sonore le plus g6n6ral doit, d'apr~s ce que nous

[ ] P o u r t o u t r e n v o i entre crochets se r e p o r t e r in fine h la b i b l i o g r a p h i e .

4 3 1 - -

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3/9 A., M O L E S

S e c

S ,o u Filzr;od~

venons de dire, ~tre fai te sous forme tr i -dimen- sionnelle, expr iman t l ' 6vo lu t ion du spectre, c 'est. h-dire de la rSpar t i t ion des n ivcaux cn fonct ion des hau teurs au eours du temps . C'est eet te repr6- sen ta t ion t r i -dimensionnel le L, H, t, que nous uti i iscrons (fig. t) .

I I I . - - L E D I A G R A M M E

T R I - D I M E N S I O N N E L ,

D'aprgs la d6finit ion que nous venons de donner des trois dimensions du ph6nom~ne sonore : niveau, hau teur , dur6e, on peut , en p roc6dan t par repr6-

2~ tto Nb Per-iodes

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Arnplil~de

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Ampl i tudes d b

[ANNALES DES Ti~L~COMMUNIC&TIONS

- - plan ttarmonique ou plan des spectres, le plan n iveau-hauteur ;

- - plan mdlodiqtte ou plan des tessi tures, le plan de var ia t ion des composantes de la hau teur en fonct ion du temps.

Si l 'on examine selon ce principe un t)h6nom~ne sonore de dur6e assez l o n g u e - un morceau enre~ gistr6 sur d i s q u e - - t e l qu 'on p eu t l 'obteni r par des m~thodes exp~rimentales que nous pr6ciserons ci-dessous, on y discerne a priori deux types de s t ruc ture :

a) Une s t ructure macroscopique, h grande 6chelle des temps , qui s '6tend sur rou te la longueur du morceau et qui r6vS|e une organisa t ion in terne par fa i t ement d6finie, don t !a figure 2 donne un exemple par t icu | i~rement net en proiect ion dyna- mique, organisat ion in terne qui n ' appa ra i t nulle- ment sur la part i t ion.

b) Une s t ructure microscopique s '6 tendant sur de courts intervalles de temps et dans laquel!e la forme et le spectre conservent une unicit6 interne just i f iant exp6r imenta lement la not ion de note complexe : c 'est celle-ci qui doi t gtrc substitu6e h cello de note utilis6e par l '6cr l ture musicale tradi- tlonnelle, qui ne pr~sente aucune 6vidence exp6- r imentale dans la cont inui t6 du signal sonore. La note complexe peut gtre const i tu6e par un groupe ou une succession de notes musicales produites par des ins t ruments : accords, f ragments de mesure, etc. Plus g6n6ralement, elle r6sul tera d ' un d6coupage de la dur6e, qui s ' imposera h l ' a t t en t i on de l 'obser- va teur dans le d iagramme tr i -dimensionnel . C'est sous ce seul aspect qu 'on la d6finira en musique concrete.

Si le d iagramme n iveau -hau teu r exprime en fonct ion du temps l '6volut ion du ph6nom~ne musical, dans la note complexe unique, c 'est la n o t i o n de dur6e qui 6merge de nouveau, non plus comme condit ion d 'exis tence des autres dimensions, mais comme une sensation d i r ec temen t per~ue par l ' audi teur : nous re t rouvons h ce stade la dur6e de la note sur laquelle a f o r t em en t insist6 la no ta t ion musicale ctassique, t e n d a n t h voir dans la musique

Stokowski, Danse Polovtsienne

3 6 ~ 5 7 0 8 e 6 7 r 8 8 8 t o e 7 8 6 9 9 6 =o 9 6

6 ~, 7 g ~ 7 8 7 :7 ,if, I! 6 tO .~ tO 9 .9 ~ g ~ 7 :7 9 ~t r

Fro. 2. - - Enve loppe des n i v e a u x m a x i m a d 'un enreg i s t rement musica l (tlg. 2 c). On no te ra son aspec t quasi p6riodique qui est expr im6 pa r les polygones de r6par t i t ion relati[s aux p6riodes et aux ampl i tudes (tlg. 2 a e t 2 b).

senta t ion g6om6trique, d iscerner trois cc project ions ~) co r re spondan t aux combina isons deux h deu x des dimensions pr6c6dentes. L '6 tude de chacune de ces project ions nous fourni ra un mode d'appr6- hension de la note et nous appel leroas :

- - plan dynamique ou p lan des formes, le plan d '6volu t ion des n iveaux en fonc t ion du t emps ;

une dialeetique de la dur6e. Ainsi que nous l 'avons vu ci-dessus, ce t te percep t ion ob6it aux lois g6n6- tales de la sensation. Elie poss~de un seuil que les psychologues appel lent gpaisseur du prdsent : dur6e m in im u m en deq~ de Laquelle tous les ph6nom~nes nous apparaissent comme simultan6s, et qui dol t fitre ra t tach6e k la p6riode d ' in t6gra t ion de l 'oreille.

- - 4 3 2

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t. 7, n ~ 11. 1952]

La valeur de ce seuil est mal d6finie, mais il n 'es t pas illusoire de la chiffrer aux environs de 1 /30 de seconde.

De mgme, diverses 6tudes sur la perception des dur6es ont mont r6 qu' i l existe une saturat ion dans

NOTE COMPLEXE EN ACOUSTIQUE MUSICALE 4/9

un n iveau moyen sensiblement cons tan t en d6pit d 'une 6volution d 'ensemble (croissance ou d6crois- sance lente, v ibra to , etc.). La figure 4 en donne quelques exemples ;

- - l 'ex t inct ion, ou queue de la note, don t le

nal'urei5

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a r riFiclak~ Crenet&/t~-~

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• l n v e r • t I

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FIG. 3. - - Q u e l q u e s m o d e s d ' a t t a q u e d ' u n e n o t e c o m p l e x e .

cet te sensat ion de dur6e, c'est-h-dire que l 'erreur commise dans son es t imat ion devient illimit6e quand on d6passe un cer ta in intervalle de t e m p s ; nous le chiffrerons assez a rb i t ra i rement aux environs de 5 secondes. Dans cet te gamme de 0,03 h 5 secondes, la percept ion des dur6es ob6it h une loi de sensa- t ion que nous assimilerons h la loi de FECnNEn :

dur6e ~ K logar i thme du d61ai,

consid6r6e comme premibre approximat ion d 'un ph6nom6ne pr6sen tan t un seuil et une sa tura t ion (JAUSSEnAND).

Ainsi, l '6 tude uni ta i re de la note complexe adoptera , pour l '6chelle des dur6es, des unit6s logar i thmiques en accord avec les unit6s adopt6es pour les deux autres dimensions.

Plan dynamique. C'est le plan le moins utilis6 dans la musique

classique, t a n t parce que les notat ions dont elle dispose sont assez restreintes que parce que la compression des dynamiques r6sultant soit des variat ions incidentelles de la grandeur des orchestres

C (n',veo, u)

pul.~ Artifictel A ~ o ~ a n r

tem~

d6but se discerne real, et qui prend en lu ther ie t radi t ionnel le un caract~re normalis6, d6 aux pro- pri6t6s des ins t ruments r6sonnants ou des salles dans lesquelles le son est 6mis, faisant osciller la forme de l ' ex t inc t ion a u t o u r d 'une exponent ie l le dite ~ de r6verb6rat ion ~, h pen te plus ou moins raide ; elle f o r m e en c0ns6quence nne f rac t ion tr6s notable de la dur6e de la note. La figure 5 donne quelques types d 'ex t inc t ions usuelles.

Plan harmonique. L ' u n des caract~res les plus constants des ins-

t r u m e n t s de musique t rad i t ionnels est d 'ut i l iser les propri6t6s v ibra to i res de corps mat6riels assez simples (cordes, plaques, membranes , colonnes d'air) ob6issant h des lois num6riques faisant de la forme du spectre dans le p lan ha rmon ique une chose assez peu var iable au cours d 'une m ~ m e note, pour que l 'on puisse parler d u t im b re d 'un ins t rumen t , ou t o u t au moins d 'une no te de cet ins t rument . En g6n6ralisant, o n ' d e v r a , ell t o u t e r igueur, discerner dans la dur6e de la note complexe au t an t de r6par-

Crenet& Crescer~lo

/ a b c d

~t~x t~

F ro . 4 . - Q u e l q u e s m o d e s d ' e n t r e t i e n d u corps de la n o t e .

s o i t - dans la musique reprodui te - - des com- pressions faites presque obl igatoirement par les canaux et par los reproducteurs , en rendent l 'ut i- l isation sys t6mat ique difficile. C'est dans ce plan que l 'on peut d6finir ce que nous appellerons la ~ ]orme ~ de la note , dans laquelle nous discernerons trois par t ies essentielles :

--l'attaque, d6but de la note, souvent tr~s brusque en lu ther ie t radi t iomiel le (cordes pinc6es, percussions, syllabes, e tc . ) . La figure 3 donne la te rminologie re la t ive h quelques types d ' a t t aques naturel les ou artificielles que l 'on est susceptible de rencont rc r dans les ph6nom~ne~ sonores usuels ;

lc corps de la note, dans lequel celle-ci garde

t i t ions spectrales diff6rentes qu ' i l existe d'616ments temporels .

Le spectre lui-m~me ne vol t sa complexi t6 l imit6e que par des r~gles tr~s g6n6rales, que nous classerons en lois harmoniques et m~lodiques. Dans l 'aire audible limit6e sup6r ieurement et inf6r ieurement par les sons inaudibles ou dou loureux et ~ droi te et ~ gauche par les ul t ra-sons et infra-sons, un son complexe peu t ~tre repr6sent6 par l 'ensemble des cellules don t les dimensions sont 6gales au seuil de percep t ion en n iveau et en h au t eu r (fig. 6) ; ces dimensions, de l 'ordre du demi-d6cibel et de 3 savar ts vers le centre, s'$1argissent vers la p6ri- ph6rie de l 'aire audible (per te de finesse de l 'oreille).

- - 433

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5 / 9 A. 3IOLES [ANNALE$ DES Tf~L~COMMUNICATZo~S

i r e r6gle : Chacune de ces cellules repr6sentant limit6e h une valeur r e l a t ivement assez r6duitc ; un son 616mentaire t r anspor te p a r cons6quent une cela revient h dire qu' i l n 'es t pas possible d 'ut i l iser cer ta ine quan t i t6 d '6nergie fonct ion de sa position s imultan6ment un grand hombre de cellules. Seul

1 i . I I"

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a ~rnps L t e m ~ de ri,,~'.t,.,.or, o,, =J t.emp+. Io

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I t b t ~ m ~ a r s

C FIG. 5 . - Quelques'types d'extinelion usuels d>une note ample, a) el: b) sch6mal;ique, c) influence de la salle.

i l l o l L nivtl~iu elb II/X//i /AI/XI/IVA~/AIA/2 VAI/~IIIAa

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F l a . 6 . - U n ~( s y m b o l e )) s o n o r e i n s t a n t a n 6 r ep r6sen t6 su r l ' a i re a c o u s t i q u e darts le p l a n spec t r a l .

sur le t a b l e a u [A2612 ou (Log (-1) L X Log(--1)H) '-'] h des cons tan tes pr~s. L 'ensemble des 6nergies trans- port6es pa r chacune des cellules s imul t an6ment pr6- sentes cons t i t ue 6v idemment l '6nergie de la source sonore. Sauf cas tr~s part icul ier , ce t te 6nergie est

un nombre limit6, sp6cialement avec les ins t ruments de nmsique classique d o n t la puissance est tr~s r6duite, sera pr6sent h chaque ins tant et l 'on ne peut r6aliser un (( b ru i t blanc )) que par voie sta- t istique, c 'est-h-dire en r enouve lan t le choix des

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t. 7, n ~ 11, 1952] NOTE COMPLEXE EN

cellules tr~s fr~quemment, de fa~on erratique, ce qui fait qu'au bout d 'un d61ai suffisant, toutes les cellules des sons 616mentaires ont 6t6 utilis6es avec une probabilit6 6gale.

2 e rhgle : Beaucoup de sources de sons naturelles, sans pr6senter la simplicit6 des 616ments vibrants des instruments de musique, sont quand m~me des syst~mes en vibration plus ou moins compliqu6s. Au lieu d'avoir un spectre caract6ris6 par un d6sordre parfait des 616ments simultan6ment choisis, ceux-ci ob6iront h une loi statistique approch6e : la loi harmonique, disant que les 616ments pr6sentent des fr6quences multiples les unes des autres ou d 'un m~me plus grand commun diviseur (partiels), en d'autres termes, que leurs hauteurs seront, sur le

IS

l l l l l ~ l l l l l ~ 2 i l l l a mmm

ACOUSTIQUE MUSICALE 6/9

du tout de r~gles esth6tiques (jeu en accord, etc.) qui ne s ' imposent h l 'a t tention qu'apr~s, donnant lieu par exempte au concept de note fausse, etc., valable surtout pour la partition musicale, laquelle ne nous int6resse pas ici. La figure 8 pr6cise quelques aspects de la terminologie relative au plan har- monique.

Plan des tessitures ou plan m~lodique. C'est dans ce seul plan que l'on pourrait tracer

le sch6ma tr~s pauvre que repr6sente en musique traditionnelle la partition sur la port6e du c h a n t - c'est-~-dire de l ' instrument d o m i n a n t - sch6ma m61odique dont les ex6cutions r6elles ne seront que des enrichissements soumis dans une large mesure

; i

i

U 5

g e n ~ e

tO t o O 0 r ~ O H 2

FIG. 7 . - L a loi de c o n v e r g e n c e de la s6rie de F o v n i E n r e p r e s e n t a t i v e d ' u n e n o t e m u s i c a l e o r d i n a i r e c o n d u i t h a d m e t t r e q u ' h p a r t i r d ' u n ce r t a in r a n g les 616ments s o n o r e s s o n t s i t u6s a u - d e s s o u s de la d i a g o n a l e d u r e c t a n g l e .

diagramme de la figure 7, 6quidistantes ou distantes d'un multiple d'une mgme longueur.

3 e r~gle : Enfin, les propri6t6s g6n6rales des s6ries de FOURIER, en lesquelles on peut d6composer tout ph6nom6ne vibratoire, conduisent h admettre que la s6rie n 'est convergente que si l 'amplitude des partiels ou harmoniques successifs d6crolt en au moins 1 In, au moins h partir d'un certain rang (*), c'est-h-dire que les ce]lules utilis6es finissent par se trouver au-dessous de la dlagonale du rectangle.

Ces trois r~gles harmoniques, r6gissant la s61ection des cellules 616mentaires qui constituent un spectre instantan6, forment une codification au sons de la th~orie du message, du r6pertoire des 616ments de celui-ci. Elle en augmente la pr6visibilit6 et diminue le taux d' information transmis.

On remarquera que des r6gles r6sultent indiff6- remment soit de lois g6n6rales de la physique (6nergie, notion d'harmoniques) soit de lois de la perception (seuil diff6rentiel, aire audible) et pas

h l 'arbitraire de l 'ex6cutant. La musique tradi- tionnelle admet en effet implicitement un niveau moyen des notes ex6cut6es sur un unique ins- trument. Les exp6riences d'6crgtage infini, dans lesquelles on r6duit "~ une seule valeur l 'ampli tude possible des signaux 616mentaires, montrent d'ailleurs que ce point de vue n'est pas dSpourvu de sens puisqu'il reste possible, ~ l 'audition de tels signaux, de reconstituer l'ensemble du sch6ma m61odique dans sa complexit~ initiale : c'est ce qu'on peut appeler le <c filtrage de l ' information s6mantique >>, c'est-~-dire intelligible.

A l'int6rieur d 'une note complexe unique, et si compliqu6e que soit son 6volution, il est encore tr~s rare que, avec les sources sonores usuelles, la variance du spectre au cours du temps soit aussi fr~quente qu'elle pourrait l'~tre avec un bruit s ta t is t iqueme, t continu tel qu'un sit]lement de vapeur ou un bruit blanc, dans lequel les spectres successifs se succ~dent h des intervalles 6gaux

(*) M. VOGEL f a i t r e m a r q u e r que , si l ' on s u p p o s e , c o m m e il e s t n a t u r e l , q u e l ' a c o u s t ~ q u e ne p e u t a v o i r affa i re h des p h 6 n 0 m 6 n e s d i s c o n t i n u s , la loi de c o n v e r g e n c e r e q u i e r t u n e

d 6 c r o i s s a n c e en i / n ~ a u m o i n s , ce qu i l im i t e eDcore l ' a r b i - t r a i re d u c h o i x des ce l lu les .

435

Page 7: Étude et représentation de la note complexe en acoustique musicale

7/9

t. Niveau

L Niveou

Hctu/-eut a Niveau

Pauvre

I t

Epais

/ I / I / 1 1 1 1 1 1 1 1 , , , / / / / / / / / /~

H t H H H I

H

A. MOLES [AIqNALEN DES ~*~LI~COMMUNICATIONS

l 'oscillation de celles-ei au tou r d ' une %gion moyenne (ph6nom~ne du v ibra to en fr6quenee). On in t rodui t de ee fair une not ion d 'o rd re temporel , de r6gu- larit6, qui relic imm6d ia t emen t les sons de la musique t radi t ionnel le h la no t ion d 'ordre et met en eorr61ation la not ion de bruit et eelle de dgsordre parfa i t dans lequel aueune m6moire ne subsiste des speetres d 'uu ins tan t h l ' au t re , aueune eorr6- lat ion ne s '6tablit ent re ee qui a lieu h un ins tant t et h u n ins tant t -~- T post6r ieur (auto-corr+lation nulle). C'est lh un r6sul ta t i m p o r t a n t du point de vue de la percept ion esth6tique. La figure 9 donne un certain nombre de modes d '6volut ion temporel le du son dans le p lan des tessi tures.

P ra t iquement , ce t te 6volut ion reste toujours tr~s limit6e quand on a affaire h des organes r6sonnants tels que ceux des i n s t rumen t s de musique tradi- t ionnels, et seuls les moyens d ' enreg i s t rement h l 'origine des techniques de la musique concrete p e r m e t t e n t d'as~urer une var iance notable dans

f iche

1 I Hauteur H ~

L Niveou

bri|lonr

L Nivaou

temp

reverberee

t N;veou

temps

cyclique

L Niveau

,i lilt, ,,_ clair

I i= FIG. 8 . - Quelques aspects courants du spectre .

l '6paisseur du pr6sent , sans ordre aueun, sans r6gu- larit6 pr6visible au t r e que s ta t i s t ique.

Cela nous condui t h in t rodu i re une r~gle g6n6rale de sdlection mdlodique qui v iendra compl6ter les trois r~gles ha rmoniques p r6e6demment consid6r6es et s '6noncera ainsi :

Au eours d 'une m6me note, les speetres suceessifs pr6sentent les uns par r a p p o r t aux autres une simili tude t r adu i san t une ~volut ion globale de tessitures, s imil i tude valable seulement dans l'en- semble sans pr6judice de var ia t ions de d6tails dans la posi t ion des eomposan tes , en par t ieul ier de

k N',vectu

t~ml~

L Niveau

temps

divergent mosaique FIG. 9 . - Sons subissant une var ia t ion de tessiture daI~s

leur 6volution.

les 6volutions temporel les , d o n n a n t lieu h des registres tr6s vari6s de sons artificiels don t la musique classique fourn i t tr6s peu d 'exemples (ukelele, clavicorde).

I V . - - A P P B ] ~ H E N S I O N E X P ] ~ B I M E N T A L E

D E L A N O T E C O M P L E X E .

L'ob ten t ion du d i ag ramme tr i -dimensionnel que nous venons d '6 tudier ei-dessus se heurte au pro- bl6me classique de l ' ana lyse pa r filtres ; il s 'agit en effet de percevoir , dans le eours de l '6volution

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t. 7, n ~ 11, 1952] NOTE COMPLEXE EN

de la note, les var ia t ions d ' intensit6 de ses diverses composantes. Or, il est bien connu, depuis les t r a v a u x de KiiPFM~iLLER [5] , que tou t quadrip61e s61ectif requier t pour a t te indre son r6gime per- manent , - - c 'est-h-dire pour fournir h la sortie une tension propor t ionnel le h l 'ampli tude de la composante dans la bande passante du quadri- p S l e , - un d61ai propor t ionnel a la s61ectivit6, c 'est-Mdire ~ l '6troi tesse de la bande passante de celui-ci ; il appara~t donc que, en toute rigueur,

A C O U S T I Q U E MUSICALE 8/9

demmen t , ce qui rev iendra i t h dire qu ' i l serai t n6cessaire de disposer d ' env i ron 500 filtres exp lo ran t s imul t an6ment la gamme acous t ique avec une pr6cision de l 'ordre de 20 ~/o, ce qui repr6sente un temps m i n i m u m de r6ponse de 0 = I/A[, soit ici :

[ 100 H z I 000 t t z l 0 000 H z

A/ t,5 t5 100

0 see. 0,6 0,06 0,0I

i total

. . . ~ ~ .a.,.,~_,.,_.'.~, ~J.,.

,~ .... k -,[I.

�9 L,, a.&

2 1(30 p/s

3 230 p / s

S 2500 pls

al l , ..,, A ~ AA

Fro . 10. - - L a r e p r 6 s e n t a t i o n t r i - d i m e n s i o n n e l l e d ' u n f r a g m e n t se f a i t p a r l ' a s s e m b l a g e des p ro f i l s L ( t ) p o u r les d i v e r s e s f r 6 q u e n c e s .

un syst~me de circuit filtre divisant la gamme acoust ique en bandes de composantes 6troites, ne peu t donner de r6sul tats satisfaisants que pour un ph6nom~ne pe rmanen t , c 'est-h-dire ne convient pas pour l 'analyse de la note complexe. Sans requ6rir une pr6cision ind6finie, on peut penser qu' i l est au moins n6cessaire que la pr6cision de l 'appa- rei! soit comparab le ~ celle de l'oreille, c 'est-h-dire que les dimensions de la cellule d ' incer t i tude : pr6- cision en niveau muhipl i6e par largeur de la bande passante du filtre, soient de l 'ordre de grandeur de celles de la cellule 616mentaire de pe rcep t ion : t / 2 d6cibel X 5 savarts , disions-nous pr6c6-

La g randeur de ce chiffre se s i tue~ne t tement au- dessous de ]a dur6e moyenne d 'une note complexe ; elle m o n t r e donc que la r6ponse de la sort ie du quadrip61e doit reproduire , avec un cer ta in coef- ficient d ' e r r eu r co r respondan t ~t une sorte de vis- eosit6, les var ia t ions de l ' impor t ance de la eompo- sante eonsid6r6e au cours de l '6volut ion de la no te complexe . Le probl~me para t t donc soluble au po in t de r u e exp6r imenta I par la m6thode des filtres, dans la mesure ofl l 'on peu t disposer d ' un nombre de filtres sufiisant ; un ana lyseur du t y p e SIEMENS OU les s6ries de filtres d ' u n appare i l de r speech seraient par exemple inad6quats , mais

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9/9

les filtres h bande 6troite d 'un analyseur h quartz, du type PxMor~ov par exemple, peuvent satisfaire h e e s conditions. On peut remSdier p ra t iquement

l ' insuffisance du hombre de filtres en proc6dant par enregis t rements et en r6p6tant 500 fois une analyse avec des fr6quences moyennes de la bande passante var ian t juxtapos6es dans tou te la gamme acoustique, au prix d 'une mul t ip l icat ion corres- pondan te du temps &analyse. Pra t iquement , l 'exp6rience montre qu'il est possible d 'obtenir une image assez satisfaisante du d iagramme tri-dimen- sionnel en a y a n t recours h un nombre de bandes beaucoup moindre, ce qui est d 'ailleurs n6cessaire pour 6viter la destruct ion progressive de l'enre- gis t rement , au cours des lectures successives de celui-ci. La figure t0 donne une s6rie de diagrammes correspondant h une analyse tr i-dimensionnelle h grande ~chelle lbour une s6rie de 20 fr6quences environ, choisies pour repr6senter l '6volut ion du ph6nom~ne musical, de fa~on assez fid~le.

L 'ana lyse tri-dimensionnelle par la m6thode des filtres permet donc d 'obtenir en tou te r igueur une repr6sentat ion exhaust ive de la note complexe, mais on re tombe iei sur la difficult6, signal6e h propos des m6thodes oscillographiques, de s61ec- t ionner h chaque ins tan t des aspects intelligibles du ph6nom~ne correspondant exac tement au but poursuivi. Le d iagramme tr i -dimensionnel s'av~re sur tou t pr6cieux pour l '6tude du compor tement du ph6nom~ne musical vis-h-vis des canaux de t ransmiss ion (bandes passantes, dynamique , t aux de distorsion, etc.) et c'est lui qui nous r~v61era h chaque ins tan t le spectre ins tan tan6 du signal in t roduisan t ainsi la not ion d'harmonicitd : simpli- cit6 de la forme du spectre vis-h-vis des harmo- niques successifs.

Du point de r u e perceptif, nous venons de voir q u ' u n des caract~res essentiels de la note complexe est son aspect ordre/d6sordre, c 'est-h-dire la pr6vi- sibilit6 de son 6volution, qui se r a t t ache directement h la not ion de degrd de pdriodicit~ et h l 'organisat ion interne du signal. Le degr6 de p$riodicit6 est fina- lement l 'esp6rance ma th6mat ique que nous avons de pr6voir l 'aspect du signal au bout d ' u n certain temps fu tur , h par t i r de ce que nous en connaissons d6jh dans le pass6, c 'est la not ion d'auto-corrdlation d6jh 6voqu6e plus haut , qui pr6sente l ' int6r~t d'gtre accessible h l 'exp6rience directe.

L ' int6grale d'auto-corr61ation :

T r f(t) f ( t+ '~ )d t

qui se relie h la not ion de spectre de FOURIEn par le th6or~me de WIENEn :

G(co) = f +~r eos r dv

et

t / " + ~ ' (1)('r) = ~ j . _ ~ G(@ cos o~': dr

A. M O L E S [ANNALES DBS TI~-LI~COMMUNICATIONS

nous fournira donc une mesure de l'organisation interne du signal et l 'on est conduit h y rechercher un des aspects fondamen taux de la caract6risation du signal musical.

Des premieres exp6riences que nous avons effectu6es h ce sujet avec un appareillage extrg- mement sommaire [4], il para~t r6sulter que deux types d'6tudes distinctes d'auto-eorr61ation doivent ~tre entreprises :

- - l 'une ~('~), pour des d61ais d'auto-corr61ation tr~s r6duits, de l 'ordre jde l a pseudo-p6riode, 6ta- blissant la r6gularit6 unitaire du signal, et por tan t directement sur l ' ampl i tude de celui-ci, que 1'on peut par exemple enregistrer sur une bande magn6- tique et life avec deux tetes d 'enregis t rement d6cal6es de grandeurs variables entre quelques milliemes de seconde et quelques dixi~mes de seconde : on obt ient ainsi f(t) et f(t d -v ) et 1'on en tire l ' int6grale d'auto-corr61ation par moyenne photographique sur l '6cran d 'un oscillographe ou en faisant 61ectriquement le produi t f(t).f(t d - r et en prenant la valeur fiaoyenne ;

- - l 'autre auto-corr61ation, coefficient ~(r est r e l a t ive h la s t ructure macroscopique et dolt gtre 6tudi6e non plus sur l ' ampl i tude instantan6e mais sur le niveau du signal ; c 'est celle qui appara l t ra i t

chaque fr6quence dans un diagramme ba thy- m6t r ique ; elle por tera sur des temps &auto- corr61ation beaucoup plus grands a t te ignant la structure d 'ensemble du morceau.

V - - C O N C L U S I O N .

Le hu t de eette courte 6rude est de pr6senter une terminologie et un mode d 'appr6hension du phgnom~ne musical, du point de vue physique, plutSt que d 'en d6gager les lo is : ce ph6nom~ne est en effet ex t rgmement complexe, ind6finiment variable et son ~tude doit se modeler sur la per- ception mgme de la musique, e'est-h-dire sur un mode essentiellement probabiliste correspondant h la connaissance lacunaire que nous poss6dons du signal musical, comme c'est le cas aussi de tous les messages de nos sens.

Manuscrit regu le 27 rnai 1952.

BIBLIOGRAPHIE

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