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Page 1 sur 11 Etudier et modifier la rhéologie des peintures Plan de la formation 1. Cahier des charges rhéologique d’une peinture grand public 2. Test d’applicabilité 3. Estimation rapide du comportement rhéologique 4. Stabilité et seuil d’écoulement 5. Projections (application au rouleau) 6. Compromis tendu-coulures 7. Bibliographie Page 2 2 4 7 7 11 L’objectif est d’étudier la rhéologie de peintures commerciales afin de dégager des « comportements-type » et choisir une peinture qui servira de référence, ainsi que des peintures formulées avec différents épaississants ou mélanges d’épaississants. Peintures commerciales étudiées : 2 peintures murales acryliques en phase aqueuse premier prix (Brico Depot, Auchan) 2 peintures murales acryliques de meilleure qualité (Ripolin, Dulux) Peinture alkyde (« glycéro ») brillante, en phase solvant (white spirit) Peinture alkyde en phase aqueuse, pour application sur métaux Revêtement d’étanchéité de toiture infiltration (peinture élastique à base de silicone) Lasure newtonienne (Dyrup Heliotan) Lasure gel (Xyladecor) Peintures formulées : Epaississants non associatifs : Viscoatex 730, Rheotec 3800, Coapur 6050 Epaississants associatifs : Coapur 2025, Coapur 3025, Coapur 830W Epaississants associants : Thixol 53L Combinaison de plusieurs épaississants On pourra se référer aux cours « Introduction à la rhéologie » pour une introduction aux concepts de base, et « Modifier la rhéologie d’un produit » pour la description du mode d’action des épaississants.

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Etudier et modifier la rhéologie des peintures

Plan de la formation

1. Cahier des charges rhéologique d’une peinture grand public 2. Test d’applicabilité 3. Estimation rapide du comportement rhéologique 4. Stabilité et seuil d’écoulement 5. Projections (application au rouleau) 6. Compromis tendu-coulures 7. Bibliographie

Page

2 2 4 7 7

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L’objectif est d’étudier la rhéologie de peintures commerciales afin de dégager des « comportements-type » et choisir

une peinture qui servira de référence, ainsi que des peintures formulées avec différents épaississants ou mélanges

d’épaississants.

Peintures commerciales étudiées :

2 peintures murales acryliques en phase aqueuse premier prix (Brico Depot, Auchan)

2 peintures murales acryliques de meilleure qualité (Ripolin, Dulux)

Peinture alkyde (« glycéro ») brillante, en phase solvant (white spirit)

Peinture alkyde en phase aqueuse, pour application sur métaux

Revêtement d’étanchéité de toiture infiltration (peinture élastique à base de silicone)

Lasure newtonienne (Dyrup Heliotan)

Lasure gel (Xyladecor)

Peintures formulées :

Epaississants non associatifs : Viscoatex 730, Rheotec 3800, Coapur 6050

Epaississants associatifs : Coapur 2025, Coapur 3025, Coapur 830W

Epaississants associants : Thixol 53L

Combinaison de plusieurs épaississants

On pourra se référer aux cours « Introduction à la rhéologie » pour une introduction aux concepts de base, et

« Modifier la rhéologie d’un produit » pour la description du mode d’action des épaississants.

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1. Cahier des charges rhéologique d’une peinture grand public

Le but de l’étude rhéologique d’une peinture est de simuler le plus fidèlement possible les différents processus impliqués lors de sa fabrication (non traité ici), son stockage, et son utilisation par un client. Si les mesures rhéologiques sont pertinentes, on obtient une bonne corrélation des résultats obtenus avec les propriétés du produit. Une peinture subit au cours de son utilisation des sollicitations très diverses, auxquelles elle doit répondre de manière adaptée. Les qualités suivantes sont directement liées aux propriétés rhéologiques

Bonne stabilité lors du stockage (pas de sédimentation) Impression de qualité lors du mélange (consistance) Bon chargement de l’outil d’application Absence de coulures lors du transfert entre le pot et le support Etalement facile sur le support (brossabilité) Bon garnissage du support (garnissant) Pas de projections lors de l’application Pas de coulures après application Nivellement du film une fois appliqué (tendu) Pas de déformations du film dues à la tension superficielle (ex : cratères)

2. Test d’applicabilité

Une première évaluation des performances d’une peinture peut être réalisée à partir d’une application sur carte contraste

grand format (voir figures ci-dessous).

Cordage

Absence de coulures

Garnissant insuffisant

Bon tendu

Coulures

Garnissant insuffisant

Bon compromis tendu-coulures

Bon garnissant

Le motif en damier permet d’évaluer qualitativement le pouvoir couvrant (opacité) du film, lié à la formule (quantité de

TiO2) mais aussi à l’épaisseur appliquée (pouvoir garnissant, conditionné par une viscosité importante à haut gradient de

vitesse). L’application se fait à la brosse en deux passes croisées, et se termine par le tracé d’une croix (afin d’évaluer la

tension du film), puis d’une rainure fine (évaluation des coulures). Il est enfin possible de mesurer le rendement

d’application, c’est-à-dire la surface que l’on peut couvrir à l’aide d’un litre de peinture, l’aire du damier valant 0,1 m2. Pour

cela, on pèse la brosse ainsi que le contenant de la peinture avant et après application pour déterminer la masse de peinture

déposée. Le volume appliqué peut-être déduit à partir de la densité de la peinture.

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3. Estimation rapide du comportement rhéologique

Le but est d’obtenir un profil rhéologique de la peinture étudiée, de manière à pouvoir estimée rapidement son comportement. Plusieurs types de rhéogrammes peuvent être tracés :

𝜎 = 𝑓(�̇�) courbe d’écoulement

𝜂 = 𝑓(�̇�) courbe de viscosité

Contrainte imposée ou gradient imposée ? Avec un rhéomètre, il est possible d’imposer la contrainte de cisaillement ou le gradient de vitesse. Le choix dépend avant tout du phénomène que l’on cherche à modéliser. Par exemple, les coulures sont imposées par une contrainte, le poids ; mais l’application est imposée par un gradient de vitesse. Remarque : en réalité, les phénomènes d’écoulement sont contrôlés par une contrainte. Ainsi, le gradient de vitesse est rarement un paramètre indépendant, mais résulte de la viscosité à la contrainte considérée.

La montée (ou la descente) en cisaillement peut se faire par paliers (plus précis) ou par rampe (plus rapide, adapté aux échantillons qui sèchent vite). Il est également possible de réaliser un pré-cisaillement afin de simuler une peinture qui mélange la peinture avant d’appliquer.

3.1. Choix de la géométrie de mesure

Cône/plan : cisaillement constant dans l’entrefer si l’angle du cône est faible. Cette géométrie permet donc de mesurer des viscosités absolues. Elle n’est toutefois pas adaptée aux formulations comportant des particules solides de diamètre élevé.

Plan/plan (plateaux parallèles) : le gradient de vitesse est nul au centre et maximum à la périphérie : on mesure une viscosité relative. Géométrie moins agressive que la géométrie cône/plan. L’entrefer est modifiable en fonction de l’échantillon (granulométrie) et du cisaillement choisi.

3.2. Profil rhéologique Au-delà du gradient de vitesse D=500 s-1, le produit est projeté lors de la mesure. Il faut donc déterminer la contrainte

correspondant : contrainte maximale 𝜎𝑚𝑎𝑥 en réalisant une rampe de cisaillement (durée : 30s) de 0 à 500 s-1. On relève

alors la valeur maximale de la contrainte. On peut ensuite tracer des courbes en contrainte imposée de 0 Pa à la

contrainte maximale. Il est indispensable de travailler en contrainte imposée pour bien visualiser le seuil d’écoulement.

Rq : Pour plus de précision on peut réaliser des paliers de cisaillement de 20s avec 10s d’intégration, en faisant toutefois attention à ne pas dépasser le temps de séchage de la peinture.

3.3. Interprétation des courbes

Courbe de viscosité 𝜂 = 𝑓(𝐷)

Figure 1 – Gradients de vitesse caractéristiques rencontrés lors du processus de mise en peinture.

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Courbe de viscosité 𝜂 = 𝑓(𝐷)

Figure 2 – Contraintes de cisaillement caractéristiques (1 Pa=10 dyne/cm2)

Courbe d’écoulement 𝜎 = 𝑓(𝐷)

Cette courbe permet une première estimation rapide du comportement rhéologique du produit ainsi que du seuil

d’écoulement.

Attention : la détermination du seuil à partir de la courbe d’écoulement n’est pas précise. Pour obtenir cette

information, il est préférable de réaliser une étude spécifique.

Quelques idées de manipulations : Corrélation entre la prise de produit et la viscosité à moyen gradient de vitesse (10-100 s-1). Corrélation entre les coulures lors du transfert vers le support et le seuil d’écoulement avant cisaillement. Estimation de la consistance de différents produits (analyse sensorielle) et corrélation avec la viscosité à moyen

gradient de vitesse. Mesure du garnissant, évaluation de la brossabilité (analyse sensorielle), corrélation avec la viscosité à haut

gradient de vitesse (500-1000 s-1). Etude des projections au rouleau. Corrélation avec la viscosité à haut gradient de vitesse et le module élastique.

4. Détermination précise du seuil d’écoulement

4.1. Quel est l’intérêt de connaître le seuil ?

Dans le cas d’un comportement plastique idéal, le seuil d’écoulement est la contrainte à partir de laquelle on passe d’un

comportement élastique (solide) à un comportement visqueux (fluide). En réalité, très peu de matériaux (peut-être aucun)

ne comportent de véritable seuil : on parle de seuil apparent. En dessous du seuil, la viscosité n’est pas infinie mais

seulement très grande. Par conséquent, les mesures de seuil ne sont pas absolues : les valeurs obtenues dépendent de la

technique de mesure (en particulier de son temps caractéristique). Il est possible de déterminer plusieurs types de seuil,

selon le phénomène que l’on cherche à modéliser :

Contrainte seuil avant cisaillement ou seuil statique : passage de l’état de repos à l’état d’écoulement (ex : pour

évaluer la stabilité en pot)

Contrainte seuil après cisaillement ou seuil dynamique : passage de l’état d’écoulement à l’état de repos

(restructuration, liée au compromis tendu-coulures).

Figure 3 – Seuil d’écoulement, une analogie mécanique.

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Parmi les caractéristiques de la peinture liées au seuil d’écoulement on peut citer les suivantes :

Résistance à la sédimentation

Les facteurs déterminant la stabilité d’une suspension peuvent être thermodynamiques : utilisation de dispersant

permettant de créer des forces répulsives entre les particules solides. Mais ils peuvent également être cinétiques :

ralentissement de la sédimentation. La vitesse de sédimentation est régie par la loi de Stokes :

𝑣 =2. Δ𝜌. 𝑔. 𝑟2

9. 𝜂

Ainsi, la taille des particules – et donc la qualité de la dispersion – est un facteur important de stabilité ; l’autre

facteur est la viscosité de la phase continue : plus elle est grande, plus la sédimentation est ralentie. L’idéal pour

assurer une stabilité optimale est un seuil d’écoulement supérieur à la contrainte contrôlant la sédimentation :

𝜎0 >Δ𝜌. 𝑔. 𝑟

3

On peut estimer à partir de cette équation qu’un seuil d’écoulement statique supérieur à 1 Pa suffit à éviter la

sédimentation.

Propreté d’application (la « crème de peinture » qui permet d’appliquer en costume … d’après la pub !)

Le transfert du pot au support doit se faire sans coulures. On estime qu’il faut pour cela un seuil statique

supérieur à 1 Pa.

Résistance aux coulures Deux facteurs agissent principalement sur les coulures : l’épaisseur appliquée ainsi que la viscosité de la peinture après application. La contrainte correspondant peut facilement être calculée (pour une paroi verticale, et une épaisseur de film e), ce qui permet d’en déduire le gradient de vitesse :

𝜎 = 𝜚. 𝑔. 𝑒

�̇� =𝜚. 𝑔. 𝑒

𝜂

Pour réduire les coulures, il faut donc augmenter la viscosité à la contrainte correspondante de manière à ralentir le phénomène durant le temps de séchage. Une autre possibilité est de créer un seuil dynamique apparent (après cisaillement) supérieur à la contrainte correspondante. On estime qu’un seuil dynamique supérieur à 0,25 Pa permet d’éviter les coulures.

Caractéristique Type de seuil Valeur souhaitée

Tenue en pot Statique > 1 Pa

Propreté d’application Statique > 1 Pa

Résistance à la coulure Dynamique > 0,25 Pa

Tableau 1 – Valeurs idéales de contraintes seuils

4.2. Détermination du seuil par viscosimétrie (montée en cisaillement) Il est possible de déterminer le seuil d’écoulement en travaillant à contrainte imposée :

Estimer le seuil d’écoulement à partir de la courbe d’écoulement obtenue précédemment. Réaliser des paliers de cisaillement de 0 à une valeur légèrement supérieur à la contrainte seuil ainsi estimée. Tracer la courbe d’écoulement et déterminer le seuil d’écoulement.

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Figure 3 – Estimation du seuil d’écoulement par viscosimétrie

Le problème est que l’on n’a pas accès aux très bas gradients de vitesse. Il est donc nécessaire de déterminer le seuil d’écoulement par extrapolation, ce qui suppose de modéliser le comportement rhéologique. On trouvera dans le tableau 2 les principaux modèles utilisés.

Modèle Equation générale Type de comportement modélisé

Linéaire 𝜎 = 𝜂. �̇� Newtonien

Loi de puissance 𝜎 = 𝑘. �̇�𝑛

k = consistance ; n = indice de structure Pseudoplastique (n < 1) Rhéoépaississant (n > 1)

Bingham 𝜎 = 𝜎0 + 𝜂′. �̇�

σ0 = seuil d’écoulement ; 𝜂′ = viscosité de Bingham Plastique idéal

Herschel-Bulkley 𝜎 = 𝜎0 + 𝐾. �̇�𝑛 Plastique non idéal

Tableau 2 – Quelques modèles rhéologiques

Figure 4 – Comportements rhéologiques

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4.3. Montée en contrainte

Une autre méthode pour déterminer très rapidement le seuil d’écoulement consiste à repérer un pic de viscosité. En effet

avant le seuil, le matériau subit des déformations élastiques et « résiste » de manière croissante ; une fois le seuil atteint,

la structure élastique du matériau s’effondre et la viscosité diminue.

Figure 5 – Détermination du seuil à partir du pic de viscosité

Il est également possible de suivre la déformation 𝛾 en fonction de la contrainte. La déformation est nulle sous le seuil, puis commence à croitre à partir du seuil.

4.4. Test de fluage

Il s’agit d’un test plus long à réaliser, mais considéré comme le plus précis. On impose des contraintes de cisaillement

constantes et on mesure la complaisance élastique ( 𝐽 =𝛾

𝜎 ) en fonction du temps :

𝜎 < 𝜎𝑜 : les courbes se superposent.

𝜎 > 𝜎𝑜 : on observe un décrochage.

Figure 7 – Tests de fluage pour un échantillon dont le seuil d’écoulement est de 4 Pa

5. Mesures en régime sinusoïdal (mode oscillation)

Il est essentiel de réaliser des mesures dynamiques pour obtenir des informations sur la stabilité et la consistance de la

peinture. Les mesures viscosimétriques, en effet, ne fournissent aucune indication sur les temps caractéristiques du

produit, c’est-à-dire sa réponse en fonction de la fréquence de la contrainte. En particulier, la stabilité d’une peinture ne

peut pas être caractérisée par des mesures statiques : sa déstabilisation est souvent provoquée par des petits

mouvements, comme les vibrations lors du transport.

5.1. Détermination du domaine linéaire de viscoélasticité (LVER) Il s’agit de réaliser un balayage en amplitude à fréquence constante : 1 Hz (fréquence caractéristique de l’application manuelle). Cela revient à augmenter la contrainte de cisaillement au cours du temps.

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Figure 12 – Balayage en amplitude

La réponse de la peinture à cette sollicitation est analysée en mesurant les modules élastiques et visqueux, respectivement G’ et G’’. On peut considérer que le seuil d’écoulement caractérise la transition d’un comportement élastique à un comportement visqueux : il correspond à la fin du domaine linéaire de viscoélasticité (LVER : Linear Viscoelastic Region). NB : la contrainte 𝜎𝐸 pour laquelle les deux courbes se croisent est la contrainte d’écoulement.

Figure 14 – Domaine linéaire de viscoélasticité (DLVE, en anglais : LVER).

𝝈𝟎 correspond à la contrainte seuil et 𝝈𝑬 correspond à la contrainte d’écoulement.

Un échantillon bien dispersé et stable sera caractérisé par un DLVE large et un module élastique élevé.

Energie de cohésion : quantification de la stabilité La stabilité d’un produit peut être quantifiée à partir de l’énergie de cohésion. Il est possible de la calculer à partir de la déformation correspondant à la contrainte seuil (déformation critique 𝛾0) et du G’ dans le DLVE :

𝐶𝐸 =𝐺′𝛾0

2

2

5.2. Caractérisation de la peinture par spectroscopie mécanique (balayage en fréquence)

Le balayage en fréquence permet une bonne caractérisation du comportement rhéologique d’un matériau viscoélastique, plus particulièrement ses temps de réponse caractéristiques. On obtient également de bonnes informations sur la microstructure du matériau et l’intensité des interactions. On se place pour cela dans le domaine linéaire de viscoélasticité (contrainte sous le seuil d’écoulement).

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Figure 15 – Balayage en fréquence

Le type de comportement viscoélastique est alors déduit de l’évolution de G’ et G’’.

Figure 16 – Différents comportements viscoélastiques

La figure 16 indique quelques comportements possibles en fonction du temps caractéristique. Les basses fréquences

permettent de prévoir le comportement du matériau à long terme, les hautes fréquences à court terme. Un

comportement de type gel est caractérisé par une faible dépendance au temps, et donc une très bonne stabilité, due à la

microstructure et aux interactions (ex : réticulation d’un polymère). Un comportement moins structuré, type liquide

viscoélastique, est caractérisé par un croisement des courbes de G’ et G’’ : comportement élastique à court terme

(sollicitations très rapides) et comportement visqueux à long terme (instabilité sur des temps longs).

6. Tests de fluage / recouvrance : étude de la restructuration

L’aspect du film après application dépend principalement du comportement de la peinture au repos après application :

Si la viscosité après application est trop élevée (restructuration rapide, comportement peu dépendant du temps) : on voit les marques de l’outil d’application (ex : cordage).

Si la viscosité après application est trop basse (thixotropie, restructuration lente) : risque de coulures. Optimiser les propriétés du film après application nécessite donc de faire un compromis tendu-coulures.

6.1. Nivellement du film après application

Lors d’une application à la brosse, le film de peinture déposé sur le support peut conserver des marques d’applications, ce qui donne une surface striée ou ondulée. Le tendu est la capacité du film à niveler les défauts de surface. La tension superficielle (qui tend à minimiser la surface libre) est le moteur du nivellement tandis que la viscosité le freine.

On peut le modéliser à l’aide de l’équation d’Orchard :

𝑎 = 𝑎0 exp {−16𝜋4ℎ3𝛾𝑡

3𝜆4𝜂}

Attention : 𝛾 désigne ici la tension superficielle de la peinture

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Figure 8 – Profil sinusoïdal idéal d’un film non nivelé

Par conséquent, il est possible d’estimer le temps nécessaire à l’obtention du nivellement :

𝑡 ≃3𝜆4𝜂

16𝜋4ℎ3𝛾

Des viscosités d’application plus élevées permettent des épaisseurs plus élevées et des longueurs d’onde plus faibles donc un meilleur nivellement. La viscosité est un facteur moins important que la longueur d’onde et l’épaisseur, sauf s’il y a un seuil d’écoulement supérieur à la contrainte de nivellement : dans ce cas le nivellement est impossible. La contrainte maximale de nivellement peut être calculée à partir de l’équation suivante, et la viscosité correspondante à cette contrainte doit être utilisée dans l’équation d’Orchard :

𝜎 =8𝜋3𝛾𝑎ℎ

𝜆3

6.2. Test de recouvrance : méthode 3ITT (3 Intervals Thixotropy Test) La thixotropie est bénéfique pour le nivellement, mais peut entraîner des coulures. La grandeur qu’il est important d’évaluer est surtout le temps de restructuration. Une évaluation de la thixotropie peut se faire par une mesure en 3 étapes (paliers de gradient de vitesse) :

Application d’un gradient de vitesse très bas jusqu’à stabilisation de la viscosité Un cisaillement correspondant à l’application (selon le type d’outil utilisé) est appliqué (100 s-1 suffisent) Retour au bas gradient de vitesse et suivi de la restructuration

Figure 9 – Evaluation de la thixotropie, 3 ITT (3 Interval Thixotropy Test)

On peut ainsi modéliser la thixotropie à l’aide de l’équation suivante, dans laquelle 𝜏 représente le temps caractéristique de restructuration :

𝜂(𝑡) = 𝜂(𝑡∞) − ([𝜂(𝑡∞) − 𝜂(𝑡0)] × [1 − 𝑒−𝑡𝜏])

La figure 10 montre la recouvrance de viscosité après un cisaillement de 1000 s-1. On remarque que la peinture 2 met dix fois plus de temps que la peinture 1 à retrouver sa consistance initiale après un cisaillement intense.

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Figure 10 – Recouvrance de deux peintures

Pour la peinture 1, les défauts ne se nivellent pas, et on observe un mauvais tendu ; le temps de recouvrance est trop court, le nivellement est stoppé par le seuil d’écoulement qui se reconstruit trop rapidement. Pour la peinture 2 les défauts se nivellent complètement et le tendu du film est parfait. Il y a donc une bonne corrélation entre la tension du film et le temps de recouvrance. Le risque de coulures sera cependant plus important pour la peinture 2. Il est également possible de suivre la courbe 𝛾 = 𝑓(𝑡) où 𝛾 désigne la déformation, ou encore la courbe 𝐽 = 𝑓(𝑡) où J

désigne la complaisance élastique (𝐽 =𝛾

𝜎). Mais la méthode la plus intéressante est de réaliser le test en régime sinusoïdal

afin de suivre l’évolution des modules G’ et G’’ en fonction du temps (figure 11).

Figure 11 – Test de recouvrance en régime sinusoïdal

7. Bibliographie

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Barnes, H.A. (1997). Thixotropy – A Review. J. Non-Newtonian Fluid Mech., 70, 1-33.

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Larsson, M., & Duffy, J. (2013). An Overview of Measurement Techniques for Determination of Yield Stress. Annual

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“http://www.malvern.com/en/support/resource-center/Whitepapers/WP120416UnderstandYieldStressMeas.aspx”

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“http://www.malvern.com/fr/support/resource-center/Whitepapers/WP150713PaintsCoatingsRheology.aspx”

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