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Le Praticien en anesthésie réanimation (2011) 15, 225—229 MISE AU POINT Faut-il encore utiliser le protoxyde d’azote en anesthésie ? Is nitrous oxide still useful during anaesthesia? Jean-Louis Bourgain 1,, Florent Laverdure Service d’anesthésie, institut de cancérologie Gustave-Roussy, 114, rue Édouard-Vaillant, 94805 Villejuif, France Disponible sur Internet le 13 juillet 2011 MOTS CLÉS Protoxyde d’azote ; Anesthésie ; Environnement ; Sécurité ; Analgésie Résumé Le protoxyde d’azote (N 2 O) a des effets hypnotiques et analgésiques. Il est utilisé à une concentration de 50 % à 70 % pour potentialiser les agents anesthésiques. Arrêter l’utilisation de N 2 O a peu ou pas d’influence sur la consommation d’hypnotique ou d’opiacés car sa puissance est limitée. Le N 2 O augmente la vitesse d’induction par un effet « second gaz ». Ses effets indésirables ne sont pas négligeables : le N 2 O double l’incidence des nausées et vomissements postopératoires. Le N 2 O réduit l’activité de la méthionine synthétase qui joue un rôle dans la synthèse de l’ADN (acide désoxyribonucléique), de l’ARN (acide ribonucléique), de la myéline et des catécholamines, ce qui justifie les contre-indications : anémie de Biermer, pathologie iléale, grand âge, dénutrition ou alcoolisme. Le N 2 O provoque une augmentation de l’homocystéinémie qui est un facteur de risque cardiovasculaire. L’augmentation de la fraction inspirée en oxygène sans N 2 O pourrait influencer favorablement le taux d’infections postopératoires, la cicatrisation et la fréquence des complications dites majeures. © 2011 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. KEYWORDS Nitrous oxide; Anaesthesia; Environment; Security; Analgesia Summary Nitrous oxide has limited anaesthetic potency. It shortens the duration of anaes- thetic induction due to a second gas effect. It is commonly used in a 60 to 70% mixture in oxygen to maintain an adequate depth of anaesthesia in combination with halogenates or intravenous anaesthetics, but its hypnotic and opioid agents’ sparing effect is limited. The use of N 2 O also results in side effects: N 2 O produces a two fold increase in the risk of postoperative nausea and vomiting. N 2 O reduces methionine-synthase activity, which plays a role in DNA, RNA, and myelin and catecholamine synthesis. It is consequently contra-indicated in patients suffering Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (J.-L. Bourgain). 1 Photo. 1279-7960/$ — see front matter © 2011 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. doi:10.1016/j.pratan.2011.05.003

Faut-il encore utiliser le protoxyde d’azote en anesthésie ?

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Le Praticien en anesthésie réanimation (2011) 15, 225—229

MISE AU POINT

Faut-il encore utiliser le protoxyde d’azote enanesthésie ?

Is nitrous oxide still useful during anaesthesia?

Jean-Louis Bourgain1,∗, Florent Laverdure

Service d’anesthésie, institut de cancérologie Gustave-Roussy, 114, rue Édouard-Vaillant,94805 Villejuif, France

Disponible sur Internet le 13 juillet 2011

MOTS CLÉSProtoxyde d’azote ;Anesthésie ;Environnement ;Sécurité ;Analgésie

Résumé Le protoxyde d’azote (N2O) a des effets hypnotiques et analgésiques. Il est utilisé àune concentration de 50 % à 70 % pour potentialiser les agents anesthésiques. Arrêter l’utilisationde N2O a peu ou pas d’influence sur la consommation d’hypnotique ou d’opiacés car sa puissanceest limitée. Le N2O augmente la vitesse d’induction par un effet « second gaz ». Ses effetsindésirables ne sont pas négligeables : le N2O double l’incidence des nausées et vomissementspostopératoires. Le N2O réduit l’activité de la méthionine synthétase qui joue un rôle dans lasynthèse de l’ADN (acide désoxyribonucléique), de l’ARN (acide ribonucléique), de la myéline etdes catécholamines, ce qui justifie les contre-indications : anémie de Biermer, pathologie iléale,grand âge, dénutrition ou alcoolisme. Le N2O provoque une augmentation de l’homocystéinémiequi est un facteur de risque cardiovasculaire. L’augmentation de la fraction inspirée en oxygènesans N2O pourrait influencer favorablement le taux d’infections postopératoires, la cicatrisationet la fréquence des complications dites majeures.© 2011 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

KEYWORDS Summary Nitrous oxide has limited anaesthetic potency. It shortens the duration of anaes-

Nitrous oxide;Anaesthesia;Environment;Security;Analgesia

thetic induction due to a second gas effect. It is commonly used in a 60 to 70% mixture in oxygento maintain an adequate depth of anaesthesia in combination with halogenates or intravenousanaesthetics, but its hypnotic and opioid agents’ sparing effect is limited. The use of N2O alsoresults in side effects: N2O produces a two fold increase in the risk of postoperative nauseaand vomiting. N2O reduces methionine-synthase activity, which plays a role in DNA, RNA, andmyelin and catecholamine synthesis. It is consequently contra-indicated in patients suffering

∗ Auteur correspondant.Adresse e-mail : [email protected] (J.-L. Bourgain).

1 Photo.

1279-7960/$ — see front matter © 2011 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.doi:10.1016/j.pratan.2011.05.003

226 J.-L. Bourgain, F. Laverdure

from Biermer anaemia, bowel diseases, alcoholism, and in aged and malnourished patients.N2O induces an increase in homocystein, which is a risk factor of cardiovascular disease. Admi-nistration of high FiO2 concentration without N2O has been reported to decrease the incidenceof postoperative infectious and major complications and to improve surgical wound healing.© 2011 Elsevier Masson SAS. All rights reserved.

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mcpmelen étant utilisable en dehors de tout contexte anesthésique.

2 Lors de l’induction anesthésique, du fait de sa diffusion san-guine rapide, le N2O entraîne une augmentation de la concentration

ntroduction

e protoxyde d’azote (N2O) est un agent anesthésiqueolatil, très largement utilisé en anesthésie depuis leixe siècle. Plusieurs arguments plaident en faveur de sondministration au cours de l’anesthésie : ses effets anti-yperalgésiques (du moins chez l’animal), ses propriétéshysicochimiques qui rendent sa pharmacocinétique inté-essante et ses effets potentialisateurs des hypnotiques etes opiacés. De nombreuses études ont démontré un effetynergique d’action du N2O avec les agents anesthésiquesalogénés avec, pour certains auteurs, une réduction de leuroncentration alvéolaire minimale de l’ordre de 60 % lors’adjonction de N2O [1,2].

Toutefois, des réticences s’expriment de plus en pluslairement à propos des effets indésirables de cet agentnesthésique alors que son intérêt en association avec lesypnotiques ou les opiacés modernes est remis en question.es risques de l’administration de N2O ont été mis en évi-ence dans plusieurs articles de bon niveau méthodologique3].

Cet article a pour ambition de clarifier le débat sur laalance bénéfices/risques de l’utilisation peranesthésiquee N2O.

ffets hypnotiques et analgésiques durotoxyde d’azote

ffets hypnotiques

a concentration alvéolaire minimale du N2O est de 104 %hez l’homme : il ne peut donc à lui seul induire une pro-ondeur d’anesthésie suffisante pour la réalisation d’uncte chirurgical. Le N2O réduit d’environ 30 % la concen-ration alvéolaire minimale des halogénés. Cet effet a étéémontré en l’absence d’association avec un morphiniqueour l’ensemble des halogénés dont le desflurane et leévoflurane [2,4]. Cependant, pour une concentration deémifentanil de 3 ng/mL, la concentration alvéolaire mini-ale du desflurane ne semble pas affectée par la présencee N2O ; pour une concentration de 1 ng/mL de rémifenta-il, la concentration alvéolaire minimale du sévoflurane etelle du desflurane sont plus faibles en présence de N2O [5].’interaction N2O — halogénés semble donc de type additifu infra-additif, voire très faible ou quasi nulle en présencee concentrations modérées de morphiniques.

En pratique, une diminution de la consommation de N2O

e modifie que peu la consommation d’halogénés et pas duout celle de propofol (Tableau 1) [6]. Cela est conforté pares études très récentes qui décrivent une influence du N2Our le Bispectral Index (BIS) sous sévoflurane et pas sous pro-

aadh

ofol. Nous avons étudié l’évolution de la consommationoyenne d’agents halogénés en fonction de la diminutione consommation de N2O liée au strict respect des restric-ions d’utilisation. La consommation de sévoflurane est peuffectée alors que celle du desflurane est plus fortementnfluencée par la moindre utilisation de N2O. Les explica-ions ne sont que des hypothèses : mécanisme de synergieifférent ? Utilisation préférentielle du desflurane pour leshirurgies longues ?

L’effet « second gaz »2 accélère la vitesse d’induction eta décroissance de la concentration d’halogéné au réveil ;a conséquence lors du réveil est un raccourcissement duélai d’ouverture de yeux (8,7 contre 10,1 minutes) et de’extubation (11,0 contre 13,2 minutes) [7]. Que ce soit à’induction ou au réveil, ces différences minimes peuventtre parfaitement compensées par une bonne utilisationes concentrations inspirées d’halogénés à l’induction etu débit de gaz frais au réveil, ainsi que l’utilisation deorphinique à demi-vie courte, tel le rémifentanil.

ffets analgésiques

’effet analgésique du N2O est dose-dépendant et appa-aît à partir d’une fraction inspirée de 10 %. Au-delà de0 %, l’action hypnotique du gaz prédomine et il est diffi-ile d’évaluer ses effets analgésiques propres. L’effet sur laouleur est maximal après 20 à 30 minutes d’exposition maisisparaît au-delà de 150 minutes d’exposition. Cet effetnalgésique est proche de celui des opioïdes : chez l’animal,’exposition au N2O induit une libération d’opioïdes endo-ènes qui active les voies inhibitrices modulant, au niveaupinal, la transmission du message douloureux entre les neu-ones périphériques et centraux des voies ascendantes de laociception.

Le N2O, utilisé comme seul agent d’analgésie dans unélange de 50 % avec l’oxygène, a démontré une effica-

ité analgésique en obstétrique, en chirurgie dentaire et enédiatrie. Il est utilisé sous la forme d’un mélange équi-olaire au cours de gestes invasifs (ponction, pansement,

tc.). Cette technique donne du confort aux patients qui onta possibilité de s’auto-administrer le mélange gazeux, tout

lvéolaire d’halogéné qui accélère la vitesse d’induction. Cet effetprobablement été surestimé. Lors du réveil, l’effet de dilution

u N2O réduit les concentrations alvéolaires en oxygène et en gazalogéné et accélère la vitesse d’élimination de l’halogéné.

Protoxyde d’azote et anesthésie 227

Tableau 1 Consommation des agents anesthésiques dans deux groupes de patients ayant ou n’ayant pas recu de pro-toxyde d’azote (N2O).

Avec N2O (n = 215) Sans N2O (n = 179) p

Fraction inspirée en O2 32 ± 6 73 ± 20 0,001

n n

Concentration alvéolaire minimale d’halogéné (%) 162 0,63 ± 0,02 130 0,76 ± 0,02 0,001Propofol (�g/mL) 48 3,28 ± 0,50 46 3,30 ± 0,58 NSFentanyl (�g) 154 106 ± 50 114 117 ± 72 NSMorphine (mg) 169 11 ± 5 142 11 ± 7 NS

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D’après [6].

Effets anti-hyperalgiques

L’effet analgésique du N2O trouve une explication neurophy-siologique basée sur le système opioïde endogène.

Le N2O est un agentanti-N-méthyl-D-aspartate (NMDA) qui pourrait

participer à la réduction des phénomènes desensibilisation centrale en périodes per- et

postopératoires.

Le N2O administré chez l’animal de facon concomi-tante aux fortes doses d’opioïdes limite les phénomènesd’hyperalgésie et d’allodynie consécutives aux lésionstissulaires et à l’administration d’opioïdes. En période post-opératoire, la tolérance aiguë aux opiacés est limitée parl’utilisation peropératoire du N2O [8].

Pour l’instant, les études cliniques visant à lier qualitéde l’analgésie postopératoire et utilisation peropératoire duN2O donnent des résultats divergents. Certaines identifientle N2O comme un facteur favorisant l’existence d’une dou-leur en salle de réveil [9]. D’autres ont trouvé une réductionde la durée d’utilisation de la morphine en Patient Control-led Analgesia (PCA) (35 contre 51 heures) sans modificationni de la consommation de morphine postopératoire ni desscores de douleurs [10].

L’utilisation des anti-NMDA se généralise et le N2O devratrouver, le cas échéant, sa place à côté d’autres agents aussipuissants tels que la kétamine ou le néfopam.

Conditions d’utilisation du protoxyde d’azote

Risque d’administration d’un mélange hypoxiqueIl ne peut être négligé et son extrême rareté actuelle estliée à sa prévention systématique ; il ne faut pas baisserla garde et maintenir strictement des règles de sécurité :mesure obligatoire de la fraction inspirée en oxygène (FiO2),lutte contre la rétropollution par la maintenance régulièredes mélangeurs de gaz, respect du gradient des pressionsd’alimentation en fluides médicaux (PN2O < Pair < PO2) afin

qu’en cas de rétropollution, ce soit l’O2 qui s’écoule dansla tuyauterie du N2O et non le contraire.

L’utilisation du N2O suppose une dénitrogénation avantl’induction et une ventilation en O2 pur à l’arrêt du N2O.

es principes ne doivent pas être oubliés : l’utilisation de2O à l’induction en pédiatrie est une pratique populaireui expose l’enfant à l’inhalation d’un mélange hypoxiquei la pré-oxygénation n’a pas été faite correctement.

iffusion au sein des cavités closese N2O est 30 fois plus diffusible que l’azote ! Il remplit donces cavités closes plus vite que l’azote n’en sort : d’où uneistension des cavités expansibles (tube digestif, plèvres enas de pneumothorax, etc.) ou une augmentation des pres-ions dans les cavités rigides (sinus, oreille moyenne) aprèsnviron 30 minutes d’exposition.

En chirurgie cardiaque avec circulation extracorporelle,e N2O induit une augmentation significative de la taille deulles lorsqu’on le compare à l’azote ou au xénon.

En chirurgie générale, une exposition au N2O (50 %) d’uneurée médiane de 120 minutes induit chez 48 % des patientses altérations postopératoires de la pression dans l’oreilleoyenne.En ophtalmologie, le N2O peut augmenter le volume des

ulles de gaz de C3/F8 et donc augmenter la pression intra-itréenne.

En chirurgie digestive, une méta-analyse ne retrouve pase différence significative pour les effets indésirables cau-és par la distension intestinale liée au N2O qui reste lelus souvent sans conséquence clinique pour la majorité desnterventions. Le problème se pose surtout pour la chirurgieur occlusion.

Les contre-indications classiques restent de mise : chi-urgie de l’oreille moyenne, chirurgie ophtalmologique,raumatisme thoracique avec risque de pneumothorax, sinusacial non communiquant avec les voies aériennes, occlusionigestive et éventration.

Quant aux effets sur la pression régnant dans les ballon-ets des dispositifs médicaux, celle-ci doit être monitoréeuel que soit le dispositif.

xplosions

Le N2O est un comburant aussi efficace que

l’O2 : les bonnes pratiques soulignent l’éviction

du N2O lors de l’utilisation du laser ou d’unbistouri électrique proche de zones susceptibles

de contenir ce gaz.

228

Figure 1. Mécanismes biologiques en cause dans la toxicité duprotoxyde d’azote. L’accumulation d’homocystéine, d’une part, etla réduction du taux de tétrahydrofolate, d’autre part, sont les deuxgrandes voies métaboliques en cause. Une carence en folate ou enB12 majore les effets délétères du protoxyde d’azote.

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Avomissements postopératoires

révention de la pollution des salles d’opérationl convient de pratiquer l’anesthésie et l’analgésie dans desocaux bien ventilés. En effet, une exposition chroniquet importante au N2O altère l’acide désoxyribonucléiqueADN) du personnel soignant en salle d’opération [11].es règles sont normatives et doivent être respec-ées.

ffets indésirables du protoxyde d’azote

éduction de l’activité de la méthionineynthétase

e N2O réduit l’activité de la méthionine synthétase de0 % après une exposition de 46 minutes et de 100 % après00 minutes avec un retour à la normale après quatreours (Fig. 1). Ce fait justifie les contre-indications du2O : anémie de Biermer, pathologie iléale, dénutrition,rand âge ou alcoolisme. L’étude d’Amos lie la mégalo-lastose et la surmortalité chez les patients ayant recu du2O (15 décès sur 18) en comparaison avec ceux qui n’envaient pas recu (7 sur 22). Très rarement, ces carencesont tenues comme responsables d’atteinte nerveuse àype de démyélinisation. D’ailleurs, les fonctions cogni-ives postopératoires ont été jugées comparables dans deuxroupes de patients de plus de 65 ans anesthésiés avecu sans N2O. La contre-indication classique « pas de N2On neurochirurgie » ne repose sur aucun argument objec-if.

La synthèse d’ADN est dénaturée par le N2O. Le reten-issement le plus précoce a lieu au niveau des cellules

ématopoïétiques : anémie mégaloblastique identique auxéficits chroniques en vitamine B12. L’accent doit êtreorté sur les anesthésies itératives où l’utilisation de ce

Le

J.-L. Bourgain, F. Laverdure

az doit être évitée, particulièrement chez le sujet àisque.

tudes sur l’incidence des complicationsostopératoires

inq études prospectives ont comparé l’incidence desomplications postopératoires selon la FiO2 utilisée ; quatretudes montrent un net bénéfice de l’utilisation d’uneiO2 à 0,8 sans N2O : diminution des infections postopéra-oires, des problèmes de cicatrisation et de la fréquencees complications dites majeures. Néanmoins, ces étudese font pas la part de ce qui revient au niveau de FiO2 ou àa non-utilisation de N2O.

ugmentation du risque cardiaquel a été montré chez l’animal comme chez l’homme quee N2O déprime le baroréflexe et augmente le tonus sym-athique. Il présente aussi une action dépressive modéréeur la contractilité des fibres myocardiques dont l’origineerait une modulation du flux calcique entrant. En utilisant’échographie transœsophagienne peropératoire, la diminu-ion de la consommation de propofol induite par le N2O pourn même objectif qualitatif de profondeur d’anesthésieimite les effets hémodynamiques induits par cet agent hyp-otique seul : baisse de pression artérielle moyenne, baisseose-dépendante du débit sanguin aortique, débit de pointeortique et vélocité maximale du débit sanguin aortique12].

L’hyperhomocystéinémie est associée à une augmenta-ion de l’incidence de la pathologie cardiaque ; dans leontexte de l’anesthésie, le N2O provoque une augmenta-ion du taux sérique d’homocystéine. Le lien de cause àffet n’a cependant pas été démontré. Un traitement parolates et vitamine B12 la semaine précédant l’anesthésievec N2O prévient l’augmentation de l’homocystéine alorsu’une injection unique ne le fait pas. Il apparaît néanmoinseu réaliste de proposer un traitement préopératoire d’uneemaine pour pouvoir utiliser du N2O.

En utilisant les données des patients inclus dans l’étudeNIGMA 1, les auteurs ont mis en évidence dans le groupe2O une augmentation du risque relatif d’infarctus du myo-arde au cours d’un suivi moyen de 3,5 ans (risque relatif de,59 [1,01—2,51] sans augmentation de la mortalité) [13].e résultat est indicatif et mérite d’être étudié spécifique-ent.

ugmentation du risque d’infection’augmentation du risque d’infection est prouvée formelle-ent dans plusieurs études prospectives de grande ampleur.

l est difficile de faire la part de ce qui revient à l’utilisatione fortes concentrations d’O2 ou de l’absence de N2O. Lesécanismes font appel à la concentration tissulaire en2 qui, lorsqu’elle est élevée, améliore la fonction des poly-ucléaires neutrophiles et le processus de cicatrisation.

ugmentation de l’incidence des nausées et

’incidence des nausées et vomissements postopératoiresst doublée lors de l’utilisation de N2O en comparaison

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Protoxyde d’azote et anesthésie

avec l’azote pour une même FiO2 de 0,4 et ce fait est connudepuis plusieurs années.

Chez 27 patients au cours d’une arthroscopie du genou,l’incidence des nausées et vomissements postopératoiresétait de 6/16 (37 %) pour le groupe N2O contre 2/11 (18 %)pour le groupe air ; cette incidence était corrélée à uneaugmentation des pressions dans l’oreille moyenne majoréedans le groupe N2O [14].

Protoxyde d’azote et pollutionatmosphérique

La biotransformation et la biodégradation du N2O sont trèslentes et sa demi-vie dans l’atmosphère est évaluée entre100 et 150 ans. Il détruit la couche d’ozone qui nous protègedes radiations ultraviolettes du soleil et favorise l’effet deserre en association avec le CO2. Il favorise donc le réchauf-fement climatique en réalisant une barrière à l’évacuationdes radiations thermiques terrestres [15]. Le N2O représenteenviron 10 % de cette pollution.

En conditions cliniques comparables, le desflurane auraitun impact plus important que les autres agents halogénéssur le réchauffement climatique. Le N2O utilisé seul a éga-lement un impact sur ce paramètre. De plus, le N2O (60 %)en association avec une concentration alvéolaire minimaled’agents halogénés augmente l’impact environnemental dusévoflurane ou de l’isoflurane et diminue celui du desflu-rane.

De ce point de vue, il est donc nécessaire de limiterl’utilisation du N2O et d’utiliser un débit de gaz frais le plusfaible possible.

Conclusion

L’intérêt de l’utilisation peropératoire du N2O n’apparaîtplus évident du fait de la puissance et de la maniabilitédes anesthésiques récents. Supprimer l’utilisation de N2Oau bloc ne modifie que peu les pratiques ; cette option peutdonc être choisie sans envisager de risques majeurs liés àcette stratégie.

Il est nécessaire de respecter scrupuleusement lescontre-indications du N2O. Le doute sur l’innocuité de ce gazprogresse et nous sommes dans l’attente des résultats d’unegrande étude en cours (ENIGMA 2) qui étudie spécifiquementles effets délétères de ce gaz.

Déclaration d’intérêts

Les auteurs déclarent ne pas avoir de conflits d’intérêts enrelation avec cet article.

[

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