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p.97 « Francis Ponge nous a, un jour, donné le mot “objeu”. [...]. Le mot ouvre l’oreille comme par surprise et l’objet ejoué ! Mépris, peut-être? Avec l’objet, aussi le concept. » « Ainsi donc le jet y devient un jeu. Jeter n’epas jouer mais l’objeu pourrait être un jeu à objet perdu. Jamais objet de jeu qui ferait de lui un jouet : les enfants reçoivent des jouets pour que soient épargnés les objets ! » « Objeu eun évènement de mot dans un éclat de rire de chose. Il ejubilation de rencontre, j"te e#re chose et mot. Lorsque le jet est un jeu, il est déjà le dess ( e ) in d’un bondissement et d’un saut. Et ce dessin ecelui de l’$pace d’un tra&port. Littéralement métaphore. » « Jouir d’un jeu à jeter l’objet c’elaisser l’objet se prendre au mot du mouvement qui le conitue avaqu’il soit en face, posé sur l’extériorité de ses limites. Et si, somme toute, l’objet n’était fait que pour être jeté ? » ! " 1978 L’objeu Pierre Fedida (19342002) L’ « objeu » - Objet, jeu et enfance. L’ $pace psychothérapeutique (ch.VIII) [p.97-195] L’absence - Gallimard - Paris 1978 www.tabledesable."

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p.97 « Francis Ponge nous a, un jour, donné le mot “objeu”. [...]. Le mot ouvre l’oreille – comme par surprise – et l’objet est joué ! Mépris, peut-être? Avec l’objet, aussi le concept. »

« Ainsi donc le jet y devient un jeu. Jeter n’est pas jouer mais l’objeu pourrait être un jeu à objet perdu. Jamais objet de jeu qui ferait de lui un jouet : les enfants reçoivent des jouets pour que soient épargnés les objets ! »

« Objeu est un évènement de mot dans un éclat de rire de chose. Il est jubilation de rencontre, j"te e#re chose et mot. Lorsque le jet est un jeu, il est déjà le dess(e)in d’un bondissement et d’un saut. Et ce dessin est celui de l’$pace d ’un tra&port. Littéralement métaphore. »

« Jouir d’un jeu à jeter l’objet c’est laisser l’objet se prendre au mot du mouvement qui le constitue – ava' qu’il soit en face, posé sur l’extériorité de ses limites. Et si, somme toute, l’objet n’était fait que pour être jeté ? »

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Pierre Fedida (1934–2002)

L’ « objeu » - Objet, jeu et enfance. L’ $pace psychothérapeutique

(ch.VIII) [p.97-195]L’absence - Gallimard - Paris – 1978

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« Le petit d’homme ne s’en prive pas lorsque le sevrage décide ainsi de l’objet de son enjeu. [...] [ // p. 98 ] “jouer à laisser tomber les objets” fait de l’objet l’évèneme# dépr$sif de la perte. Je dis évèneme' car il y va d’une découverte de l’objet par le jeu : ce jeu consiste à ouvrir la main, à se d$sa)ir. L’objet serait ainsi constitué comme signifiant la séparation, l’abandon ou la perte. »

« L’idée ne manque pas de surprendre si on songe que l’objet est culturellement organisé et intelle)uellement investi comme symbole de conservation, de domination ou de possession. Et ce qui nous importe ici est, au contraire, de lui connaître le pouvoir de s’instituer en lieu et place d’un manque. Que sont les objets-relique, les objets-fétiche, les objets transitionnels ? »

« Nul ne connaît mieux que l’artiste et le poète le plaisir de ce jeu à transgresser les limites de l’objet, à le faire disparaître pour faire revenir le mot – celui qui atteste d’une vérité de chose. La désinstrumentalisation pratique de l’objet et sa défonctionnalisation sociale sont œuvre d’humour poétique : une sur-réalité de l’objet est l’effet de l’opération que l’objet produit sur lui-même et tient de la dérision des limites que lui impose son concept. Faudrait-il parler ici d’un travail du jeu au sens où se conçoit un “travail du rêve” ? »

« Les questions qui aff luent sont, [ . . .] autant d’hypothèses s’appelant l’une l’autre pour interroger ce+e renco#re du jeu et de l’objet. »

« On pourrait me faire grief de confondre les objets matérialisés – une boîte, une lampe, un briquet, un livre ... – et

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l ’objet te l qu ’ i l se conçoit formel lement – parfois symboliquement et toujours abstraitement – dans la détermination complémentaire d’un choix (le choix d ’objet), de l’amour (l’amour d ’objet), de la relation (relation d ’objet), etc. »

« La théorisation [ // p. 99 ] opératoire du concept de l’objet en psychanalyse appartient à des champs d’élaboration – souvent congruents ou connexes – qui renvoient à une attention exa)e des modèles et des procédures techniques de la pratique dont elle se réclame. »

« Une métapsychologie de l’objet court le risque de l’abstra)ion discursive [...] si elle ne se maintient pas au conta) de la démarche technique qui concrètement l’inspire et en porte le mouvement. L’essai théorique du psychanalyste [...] doit ouvrir la le)ure au fondement de l’expérience. »

« Il va sans dire que la question du rêve (et de l’interprétation) se trouvera au cœur de notre réflexion dur le jeu. Car non seulement le rapport du rêve au jeu demande à être éclairci mais l’interprétation peut-elle se passer, dans sa notion analytique, de la référence opérante et opératoire au jeu ? »

« C’est pourquoi une seule question pourrait orienter l’essentiel de mon propos : qu’en $t-il de la création du se& ? [...] toute recherche analytique sur le concept d’objet ne peut se dispenser de se poser la qu$tion du se&. »

« La question est, peut-être, alors déjà : quel est le pouvoir du lapsus ou de l’a)e manqué qui créent un sens en opérant sur des mots ou des comportements un jeu de dé-signification. L’humour est là : c’est du sens par dé-

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signification. Le jeu y est bien pour quelque chose dans ce “décrochage” de la signification! »

[ note en bas de page 100 // 101 ] « Il n’est certainement pas facile de restituer le contenu d’un jeu scénique corporel au cours d’une consultation mettant en présence le psychothérapeute et // l’enfant avec le parent. La disponibilité corporelle du psychothérapeute est la condition de son aptitude à écouter et regarder les échanges et les passages qui s’effe)uent entre le parent et l’enfant au cours de l’entretien. Le corps du thérapeute est une scène qui gagne à être aussi mobile que possible afin de pouvoir accueillir et laisser jouer – en écho l’un à l’autre – les scénarios multiples présents à la parole du parent, à celle de l’enfant et aux expressions – souvent décalées – de l’un et de l’autre. »

p. 105 « J’aurai l’occasion de m’expliquer ultérieurement plus à fond sur l’importance que j’accorde ici à la dimension esthétique – et singulièrement poétique – de l’objet. Il s’agit d’ailleurs moins d’une “dimension” que d’une direction existentielle que Binswanger, après Heidegger, désigne comme “dire)ion de signification” (Bedeutungsrichtung). Pour l’heure, il me suffit de rappeler que l’objet coïncide, dans sa constitution obje)ive et obje)ale, avec le juge [ // p. 106 ] ment d’attribution et le jugement d’existence qui marque la mise en place de l’extériorité au titre d’une instauration surmoïque. L’objet se conçoit, comme tel, d’un interdit qui renvoie à une fon)ion de la loi. »

p. 107 « Lorsqu’elle peut “parler contre les paroles”, la parole joue avec les choses une renco#re de surpr)e. À être nommées dans cette parole – appelé$ plutôt que nommées – les choses s’émerveillent de ce qu’elles ne savaient pas qu’elles étaient, de quoi et comment elles étaient faites; elles jubilent, jouissent et se réjouissent de cette parole à laquelle elles apportent et confient une énergie et une dynamique. »

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« Et la parole – morte d’être parlée, tel un discours reposant sur sa seule syntaxe et sur ses mots-concepts – ignorait sa propre ressource poétique (créatrice) et son pouvoir de tenir de sa sa gorge – jusqu’à la “rage” – la matérialité des choses, leur substance ainsi que l’étonnement de leurs formes. Il est essentiel de rappeler que l’articulation de la parole – articulante parce qu’articulée – est en communication avec celle de la main. »

« L’apparition de la chose sollicite de son élémentarité – et de son élémentalité – une motricité qui, chez le jeune enfant, est pré-fonctionnelle et ainsi, soustraite aux adaptations concepto-motrice que commande l’objet. »

« Ce qui est chose – et non objet – est, avant tout, donnée multiple de sensations en elle recueillies et indistin)es dans leur détermination. La corporéité de la parole – le plaisir de chose des phonèmes et des mots qu’elle produit – $t comme la racine subje,ive d$ chos$. C’est aux choses que revient la capacité de la parole d’être métaphore. Et la métaphore suppose cet espace de rencontre et de jeu entre les mots et les choses. »

« Subjectif : Faille et saut. La p#ssée et le jet »

« On peut s’apercevoir – pour nous en tenir ici à une phénoménologie poétique de la création – que ce rapport de la parole aux choses, essentiel à tout dévoilement ludique, poétique, pi)ural, ne saurait pouvoir s’assumer par [ // p. 108 ] le concept d’une opposition entre sujet et objet, subje,if et obje,if, voire même i#érieur et extérieur. Tout comme le jeu, l’a,e poétique

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$t le temps d ’un $pace de renco#re, de tra&formation et d ’échange où se trouvent remis en question le sujet et sa subje)ivité, l ’ ob je t e t son ob ject i v i té a ins i que l eur s l imi tes oppositionnelles dans le concept qui les pense. »

p. 109 « Il est, [...], important de retrouver ici les dire)ions de signification (Bedeutungsrichtung) qui engagent la temporalité de la parole à même l’$pace qu’e.e établit. Et il est alors tout à fait primordial de reconnaître à la subjectivité cette double dimension corrélative du projet et de la proje)ion : de façon qui leur est inhérente et constitutive, l’axe du jeter. »

« Entendons qu’il s’agit d’un axe-dire)ion de sens et non d ’un s imple mouvement réduct ib le au donné chronophotographique d’un déplacement dans l’espace. C’est dire que la découverte du “mouvement” par le nourrisson concerne une rupture et un p/sage qui sont l’espace originaire du soi (en tant que hors de soi) : comme si le soi de la subje,ivité était bien l’objeu du projet (ou l’objet de la proje,ion). Subje,if désigne donc à la fo) la fai.e et le saut, l’obstacle et le jet »

p. 111 « “Objeu” et subjet »

« 1° – L’objet, contemporain de la perception et du jugement, correspond à une organisation fon)ionnelle et symbolique du “monde extérieur” qui, en tant que tel, repose sur l’instauration d’unités conceptue.$ à la fois perceptives et motrices. Ces unités sont obje,iveme' définies par des limites

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consc iemment a s s ignab les e t par l eur s é p a ra t i on diachronique. »

« La chose se distingue de l’objet en ce qu’elle participe d’une communication élémentaire entre sentir et se mouvoir [...] : elle est réalité esthétique anté-prédicative et pré-conceptuelle. L’horizon des potentialités ou marginalité (cf. Husserl, Maldiney) sous lequel se découvre la chose est Umwelt ou fond de monde qu’on peut nommer réalité (cf. Merleau-Ponty) »

« 2°– Une ontologie de la parole (que méconnaissent, en grande partie, la linguistique contemporaine et certaines [// p. 112 ] recherches psychanalytiques qu’elle inspire) est sous-tendue par cette corporéité de la chose. Celle-ci implique, au cœur de la parole, un rapport de pr)e (une préhension articulante) et de lanceme' (jaculation ou jet). Prendre et lancer enveloppent l’entrelacs de sensations et de mouvements. »

« Cette ontologie de la parole engage la double signification ex)te#ie.e du temps et de la subje,ivité. Sans quoi, la parole n’est qu’une organisation fon)ionnelle de sémantèmes reproduisant le système des concepts et des objets. »

« 3°– L’ “objeu” – objet poétique et de – est un espace ou plutôt la métaphorisation spatiale d’un temps de la rencontre entre les mots et les choses. C’$t l’objeu qui définit ce qu’on nomme subje,ivité : la subje)ivité est originairement ce soi hors de soi qui se signifie d’un temps pulsionnel (systole-diastole) de recueillement et de bondissement [...] »

« 4°– Le rapport mère-nourrisson est, sans doute, déterminant dans la constitution ludique du soi. Et il s’agit

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bien [ // p. 113 ] d’une constitution corporelle qui est dominée par un rythme des échanges d’où prennent sens les comportement a)ifs et expressifs de l’enfant. »

« En appelant donc ici la notion de rythme, c’est de genèse de temps et évènement de langage que je désigne : c’est sous cette double référence co-essentielle que le rythme – enfant qui joue, selon Héraclite – est une articulation chronogénétique du sens en même temps qu’il en est la dire)ion. Ce problème mérite toute notre attention car il en va de la signification de l’absence pour la présence. Comme si le rythme avait donc dire)ement à voir avec l’émergence du sens – entre présence et absence. »

p. 114 « [...] la capacité de jouer. Il est [...] tout à fait essentiel de rapporter celle-ci à une cara)éristique singulière de la personne et de sa sensibilité corporelle inventive et créative et non pas une acquisition «technologique» secondaire, c’est-à-dire acquise et exploitée comme le serait un moyen occa s ionne l de se r v i r une pra t ique psychothérapeutique. »

« L’ enfance – et non pas l’enfantin (qui rend «précieux» l’infantile) – $t le milieu et le médiat du rapport e#re l’analyste et son patient : elle a pour séjour la présence corporelle de l’analyste au sens où elle est l’a)ivité de l’amnésie m)e en jeu et ainsi de l’aptitude spontanée à créer et à re-créer la rencontre. »

« Le corps de l’analyste est le foyer scénique de ce jeu [...]. C’est moins une aptitude à jouer avec les enfants que la capacité à laisser corporellement jouer en soi ce qui est vu et

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ce qui est entendu. [...] La mobilité s’avère ainsi plus kinesthésique qu’a)ivité motrice. Elle est la condition de se trouver «en prise» sur la situation par une présence dont la créativité est constamment sollicitée. »

« Freud n’a pas manqué de faire appel à la métaphore du jeu pour désigner ce qui se passe dans la cure analytique [...]. [ // p. 115 ] Ceux qui, par la suite, ont frayé la voie à la psychanalyse d’enfant ont accordé au jeu la place qui lui revenait dans l’expression symbolique des conflits et leur communication. »

« J#er et éc%re »

« Jouer – être jouant – est semblable à écrire : la feuille blanche en est l’espace de repos et d’attaque, de recueillement et d’expansion. Écrire – comme jouer et dessiner – est l’a,e du même à l’autre dans l’entre lacs de l’apparaître et du disparaître, du voilement et du dévoilement d’un objet innomé innommable. »

« Cet a)e, do# l’aire de renco#re $t le monde (sans que le jeu se laisse enfermer en un monde sous forme de “monde du jeu”), fait du jeu [ // p. 116 ] l’a#i-phr/e do# le corps serait le verbe. Comme si le jeu – qui donne geste au monde muet – allait toujours co#re la phrase qui lie un sujet à son attribut et qui procède par prédicats en fixation de sémantèmes. »

« Le verbe – jouer-jouant étant le maître-verbe ou verbe originaire – joue ses temps dans des dire)ions spatiales (haut-bas, élévation-chute, arrière-avant, droite-gauche...) qui sont les dire)ions de signification de la subje)ivité corporelle de

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soi sautant, bondissant ou se mettant en repos pour disparaître et de nouveau apparaître et s’élancer. Le jeu est autogenèse de la forme – la forme en formation. »

« Le jeu – le jouer – crée l’espace corporel du tra&port c’est-à-dire de la métaphore. Ce qui compte est toujours l’ouverture du corps à sa propre distance, sorte de passage toujours et en un i&ta' d’un corps à l’autre du même corps différent. Le jeu $t la métaphore corpore.e de l’écriture et le corps de la métaphore est, dans le jouer, ce rien où tout $t libre d ’advenir. »

« En somme, la métaphore (engageant condensation et déplacement) est par définition cet espace de passage et de transformation où le temps de l’évènement sémantique (le sens, en un instant, dévoilé) est délié de la discursivité explicative ou descriptive de la phrase. »

p. 117 « [...] écrire comme jouer est création de se& par dé-signification des contenus ou des vécus de conscience sémantisés. Ces contenus ou ces vécus sont sociolinguistiques; ils sont le code institutif du sujet dans la culture et dans la langue (cadre social, symbolique des échanges, sémiotique de la communication, etc.). Écrire et (ou) jouer dé-signifie', soit réfèrent chacun de ces contenus et de ces vécus à une négativité. »

« Un lapsus linguistique ou relationnel a ce pouvoir d’introduire du jeu (de l’humour) dans une fon)ionnalité apprésentative interpersonnelle. L’évènement de sens est effet de désignification. »

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« Le présent du jeu semble a)ualiser instantanément toutes les dimensions pathiques [...] hors de toute phrase. A#i-phr/e, le jeu ne se laisse prendre par aucune phrase et ne se laisse non plus mettre en phrases. »

p. 118 « Nul ne peut douter que jouer est toujours d’intense érotisation et que sa dynam) et son energeïa sont au service d’un moi-plaisir au co#a4 du monde élémental – terre et air, feu et eau. On peut, il est vrai, interpréter tout jeu comme jouer – écrire et marcher – le conta) avec le corps de la mère : s’y laisser accueillir et reposer, s’en élancer et, sur lui, sauter ou, de lui, bondir. »

« Le sens symbolique ne doit pourtant pas voiler ce fa)eur – ve)eur, plutôt – de co#a4 car il y va [...] d’une rencontre prénommée du mot-corps avec les choses et de l’extraordinaire puissance que l’énergie des choses donne au corps pour en faire leur verbe [...] »

« Le jeu, avons-nous dit, est toujours une renco#re de surpr)e. Comme l’exprime Maldiney, « le réel... est... cela même qu’on a+endait p/ : l’évènement-avènement de moi avec le monde » [...]. Rencontre, c’est-à-dire racointer ou acointer. Le coin est le seul angle que la géométrie du jeu connaisse. »

« Être sur-pr) dans la rencontre c’est, en fait, ne pas s’attendre à se trouver soi-même, là où l’autre-contre a fait de vous en un instant, l’étonnement d’un hasard. Le jeu joue co#re toute a+e#e de celui qui s’attend à quelque chose – sa thés) et ses themata, en quelque sorte ! C’est la meilleure façon de ne pas être pris. »

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p. 119 « J#er est un corps d’a'ention flo'ant( L’ adulte »

« Les psychothérapies qui technicisent – ou plutôt technologisent – le jeu et qui en font, ainsi, des moye& d ’exploration de l ’ inconscient et des auxil iaires de communicat ion se v ident , du même coup , de l a compréhension interne de leur propre projet et reposent sur un déni et un désaveu de l ’enfance au profit d’une surestimation de l’enfant. »

« Non seulement jouer n’y est pas possible mais son pouvoir est faussé d’une méconnaissance radicale de l’enjeu psychothérapeutique où jouer n’est pas différent de écouter et laisser, dans l’a+e#ion dite flottante, se créer et recréer cette parole qui tra&porte en retour – donne à d)poser en son entendu – ce qu’elle a accuei.i. »

« On pourra i t a vancer que l a théor i sa t ion psychanalytique du jeu a abouti, le plus souvent, à une fétichisation herméneutique du jeu tout de même qu’il a été fait du rêve dans l’analyse des adultes. Dans les deux cas , la fétichisation du moyen renvoie à l’obje)ivation des buts et à la suprématie accordée à la représentation sur la présence. »

« Soumis à la technologie du jeu-moyen constitué en objets (jouets), le psychothérapeute ne peut que devenir abstrait (abstrait de son corps) sous l’alibi d’être neutre (comme on dit : ne pas s’impliquer!) C’$t l’enfance en l’analyste qui $t ai&i perdue. Comme en témoignent les propos avoués de nombre de psychothérapeutes d’enfants, la rigidité du faire sembla' place la pratique psychothérapeutique sur la base de

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la simulation de jouer – simuler de jouer et concevoir le jeu comme simulation. »

« Autrement dit, seule la capacité de jouer de l’analyste – qui s’alimente et se nourrit de toute sa vie – est en mesure de produire [...] cette aire de jeu qui est l’espace corporel, non-prédéterminé, de la surprise du sens dans la rencontre. »

« Le manque de capacité de jouer se symptomatise en ce qu’on nomme ennui : lorsque l’ennui envahit, de façon constante, l ’attention de l ’analyste, aucune pratique psychothérapeutique n’est désormais plus possible. L’ennui signifie une prote)ion terrifiée et la terreur $t ce qui détruit la capacité de jouer. »

p. 120 « Bien évidemment, d’apprentissage, ici, point. L’“acquisition” de la capacité de jouer est affaire de découverte qui suppose, de la part du psychothérapeute une juste exa,itude dans l’appréciation de sa propre d)tance au patient et de sa mobilité personnelle intérieure. »

« Lors des premiers entretiens avec le patient – enfant ou adulte – l’analyste doit se trouver en mesure de découvrir sur lui-même cette scène ou aire corporelle du jeu : en d’autres termes, il doit assez immédiatement savoir si le patient – quelle que soit la souffrance qui l’amène à consulter – peut être par lui accueilli avec le plaisir de jouer. »

p. 121 « C’est la raison pour laquelle je considère les premiers entretiens de consultation comme tout à fait déterminants. L’analyste est, à ce moment-là, un peu dans la position de celui qui aurait dessiner de quelques traits la

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personne qui lui fait face. Mais ce dessin s’effe)ue, au cours de l’entretien, sur le corps de l’analyste. »

« En se dessinant ainsi – d’un regard à pointe d’écoute – le patient se ré-anime déjà, prend mobilité potentielle à même l’aire corporelle de l’analyste. Ce qu’on nomme écoute analytique ne peut ainsi qu’y gagner. Laisser le patient se dessiner dans l’écoute c’est aussi trouver sur lui cette perception singulière et originale du nourrisson ou de l’enfant derrière – et à travers – tous les accoutrements de l’adulte. »

« Être pr) par une parole, se faire l’objet d’emprise d’une souffrance empêche les aires de jeu de se constituer : il est alors inutile d’espérer pouvoir engager une cure avec le patient. Le trop-présent de l’analyste signifie l’impossibilité de donner lieu à l’absence [...] »

« Et c’est donc seulement avec la découverte de ce jouer que présence de l’analyste veut dire : perme+re à l’absence d ’avoir lieu. [...] jouer $t donner un $pace à l’absence à partir d ’une présence qui en signifie le temps. »

« [...] s’il est vrai qu’il convient d’amener le patient à la capacité de jouer, on a le plus souvent affaire à des patients adultes incapables de jouer. Être incapable de... jouer, dessiner, peindre, etc. signifie, ici, que quelque part dans sa vie le patient a subi une terreur intérieure si violente qu’il semble que les bourgeons en ont été gelés : un épanouissement s’est enrayé et le dévelop [ // p. 122 ] pement affe)if a pris l’habitude de se protéger de sa propre énergie créatrice au moyen de mécanismes de défenses dépressives ou de clivages schizoïdes. »

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p. 124 « Une phénoménologie de l’expérience du corps [...] est sous-tendue par la description et le dévoilement des stru)ures spatiales qui définissent des modalités d’être-au-monde et d’habiter »

p. 125 « [...] “être présent par le corps dans le corps” signifie que la présence est un “devenir-présent” corporel. Mais la localisation spatiale de la présence soustrait aussitôt la présence à une dimension temporelle sans laquelle elle est inintelligible. »

« Une des difficultés majeures que nous rencontrons ici est celle d’articuler exa)ement cette dimension temporelle de la présence à un rapport corporel à l’espace. »

p. 126 « L’“espace psychothérapeutique” de l’analyse trouve donc sa spécification technique opératoire du référent symbolique dont il s’instaure. Ce référe# symbolique $t le pouvoir du négatif : séparation, perte, absence, c/tration, sont les expressions d’une négativité qu’aucun contenu empirique positif (séparation “réelle”, carence, disparition, etc...) ne peut logiquement définir. Et c’est ce pouvoir du négatif qui soustrait la psychanalyse au psychanalysme [...] »

p. 127 « Quand on parles de négativité , je pense précisément à une référence essentielle du jouer. Quelle est donc la négativité du jeu ? »

p. 128 « L’ observation de l ’enfant : une apo%e et son jeu. »

« Octave Mannoni rappelait fort justement que “Winnicott n’a pas eu à découvrir, comme on le dit quelque

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fois, l’objet transitionnel, mais il l’a théor)é”. Remarque semblant akker de soi si on pense que personne n’a jamais attendu Winnicott pour observer que les enfants sucent leur pouce, qu’ils gardent dans leur main un bout d’étoffe pour s’endormir [...] »

p. 129 « L’observation psychanalytique de l’enfa' – expression en soi problématique – vient, au milieu des évidences communes : tel détail de comportement [...] est toujours déjà là, déjà connu, déjà raconté ou interprété par l’entourage ; il est aussi, de la sorte, “pris” dans le “vécu” de l’environnement, ou isolé en un comportement étranger ou étrange. »

« [...] la perception d’un détail de comportement est pour l’analyste moins une affaire de théorie préalable à la recherche de ses vérifications que la notation d ’un signe différe#iel dont l’expression se donne à l’observation comme “insignifiante”. »

« L’axe de la théorisation peut être tracé comme suit : c’$t l’i&ignifia# qui fait signe (par exemple : le gazouillis de l’enfant au moment du pré-endormissement ; le bout de tissu tenu dans la main, sucé ou non)/le signe rompt avec son code de compréhension établi tout en le gardant sémantiquement “en réserve” (par exemple : faire du gazouillis ou du bout de tissu l’expression signifiante d’une compensation orale : la [ // p. 130 ] symbolisation court-circuite le sens et le signe est rendu inopérant. Le signe se désigne d’une rupture)/la désignification du signe lui confère pouvoir d ’être théoriqueme# opéra' (est appelé objet ou phénomène transitionnel le signe de la discontinuité qui définit conceptuellement “l’aire intermédiaire d’expérience qui se situe entre le pouce et l’ours en peluche, entre l’érotisme

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oral et la véritable relation d’objet, entre l’a)ivité créatrice primaire et la proje)ion de ce qui a été introje)é, entre l’ignorance primaire de la dette et la reconnaissance de celle-ci...”). [D.W. Winnicott - jeu et réalité - L’espace potentiel - nrf -

Gallimard - Connaissance de l’inconscient - 1975] »

« Les gazouillis ou le bout d’étoffe appellent à être pris pour ce qu’ils sont – un rien insignifiant! – pour décider du sens qu ’ i l s enga gent théor iquement , de par l eur désignification. Et ce rien insignifiant n’est autre que ce e#re ou cet i#er qui suggère le concept d’une aire intermédiaire et d’un espace potentiel. »

« Affirmer que l’objet transitionnel est e#re le pouce et l’ours – e#re le sujet et l’objet ou encore e#re le subje)ile et la proje)ion – c’est bien co&idérer la tra&ition comme l’$se#iel de l’objet. Le terme d’objeu est, on le voit, celui qui convient pour désigner cet objet sans lui être, pour autant, assimilé. »

« On peut faire du jouet un symbole de l’objet et de la relation pré-obje,ale ma) il $t exclu de signifier l’objeu par ce jouet : l’objeu se signifie lui-même de sa désignification d’objet [ // p. 131 ] et de jeu (play) et c’est ainsi qu’il ne pourra jamais être un jouet. »

« Ajoutons que la désignification inhérente à la théorisation analytique est précisément l’affaire d’un jouer. Jouer désignifie des contenus de signification : c’est même ainsi que jouer pourrait être défini. »

« Or jouer – ainsi que je l’ai dit de écrire – est une subversion du support et transgression de la trace. Jouer, c’$t toujours re-créer l’effaceme#, faire apparaître le caché en le fa)a' d)paraître. Comment, dans ces conditions, l’observation

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pourrait-elle “enregistrer” le jeu sans le vider de ce qui lui est essentiel –  le trop de sens de son non-sens? Et la représe#ation v)ue.e et v)ible du jeu est une scène de montage qui ne fon)ionne signicativement que sous le rapport à l’“autre scène”. »

p. 134 « [...] ce qui s’écrit en se joua# (le jeu $t écriture pure, psychique, sans trace) fait théorie de l ’absence. [...] Ce qu’on appellerait ainsi le jeu de l’absence est un travail du sens. Mais cela n’est possible qu’en raison d’une non-thématisation du sens par le jeu : la circulation de sens répond à un mouvement de voilement-dévoilement et à des moments précis d’articulation de l’apparaître dans le disparaître. »

« Il serait insuffisant – et faux à la limite – de parler d’effet de sens produit par le jeu : la produ,ion du se& [...] $t engagée par la création de l’absence. Comme si on pouvait ainsi avancer qu’il n’y a de se& que de jouer de l’absence. »

p. 135 « En jouant, l’enfant désétablit les limites dont conceptuellement on se sert dans le système symboli[ // p. 136 ] que de la langue et des objets. Que d’une assiette l’enfant fasse un chapeau puis une roue, puis un bouclier puis une chaussure, puis… Il donne à entendre comment, en jouant, se dé-signifie et se dé-fon)ionnalise l’objet : Le parent ne tolère pas que le concept soit injurié ou maltraité et qu’une assiette ne soit plus une assiette. »

p. 137 « Les adultes parlent volontiers de l’enfant en disant qu’il joue à... La poupée, au train, à l’auto, etc. Et si l’enfant joue bien à quelque chose, il ne cesse pour autant, de jouer avec... un autre parfois, lui-même toujours. »

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« L’expression jouer à – est révélatrice, chez l’adulte, de son aptitude à l’obje)ivation : dans son regard, l’enfant se tient d’un support de l’objet. Le “à” de jouer à... Est lui-même [ // p. 138 ] adaptatif : il se comprend de l’abstra)ion du jeu et de son isolement (passage de jouer ou joua' à jeu et jouet) et de la soustra)ion du partenaire imaginaire indiqué par jouer avec. »

« Autrement dit, l’observation du jeu, en confiant à celui-ci un objet d ’application, soustrait la dimension de l’imaginaire qui réfère un autre du jeu pour que le jeu puisse jouer. Et, du même coup, l’observation se prive de la perception qui comporte la capacité de jouer. Pris isolément, le jouer à... annule la dimension créative du jeu. Car la créativité du jeu tient précisément à cet avec sans complément, grâce à quoi le jeu est métaphore et métamorphose [...] »

« [...] le deuil met le monde en mouvement. Il inspire ce jeu fantastique – désignifiant des attitudes et rituels de deuil – qui crée la fête de la mort. L’enfant a, par son jeu, la capacité d’être mort et de tuer. Le monde est agi d’une mobilité nouvelle dès lors que la mort tient, tout à coup, son évidence d’un jeu qui en accomplit symboliquement le désir. »

« [...] les cimetières sont toujours des jardins d’enfance : on y houe à la marelle! Et c’est pour énoncer aussi cette pensée que le jeu d’enfance – quel qu’il soit – donne une place motrice à la mort. Le jeu éclaire le deuil : il en effe)ue le sens caché et en temporalise les potentialités subje)ives. »

p. 139 « Jouer à et jouer avec sont indissociables dans l’écriture du jeu [...]. Ils nous livrent ensemble simultanément

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des contraires qui s’inversent : actif-passif, toucher-être touché, voir-être vu. Les identifications imaginaires se soutiennent d’une métaphore des inversions et des renversements. »

« Que l’enfant joue seul ou avec un autre enfant, jamais n’est fa)uellement réduit le pouvoir créatif du jeu par une indétermination infinitive de son verbe. Et si on ne laisse pas se perdre la mesure de cette dimension – qui engage le jeu à être toujours un jeu de l’autre – on s’aperçoit que ce à quoi joue l’enfant est à rien. »

« Il faut le redire : combien les jouets sont dérisoires tant ils portent (et tant qu’ils portent) l’interdit moteur d’être démontés, mis en pièces, transformés ou... perdus. Ils sont si souvent conçus par les adultes sur le modèle mégalomaniaque de leurs enfants, selon la prétention à se représenter gigantesques. Et pourtant les jouets – poupées, soldats de plomb, machines, trains, voitures – sont formés sur le concept adaptatif qui assigne l’enfant à jouer à... Afin de ne pas se perdre dans le monde et de ne pas non plus le questionner. »

p. 140 « [...] la parole a pouvoir de ré-inventer la langue : le verbe est le geste de la parole. [...]. La pulsion dans le verbe peut-être comprise comme [ // p. 141 ] dire)ion de signification (Bedeutungsrichtung), selon l’acception que lui accorde Binswanger. Cette dire)ion de signification – soit ce qui conduit au sens – est inhérente au verbe temporellement engagé dans la phrase. Ce qui revient à penser que le contenu sémantique d’un fantasme est déjà l’effet d’une condensation (et d’un déplacement) [...] »

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« La dire)ion de signification – qu’on peut nommer aussi esquisse existentielle, ou encore détermination stylistique – anticipe sur le sens et l’informe mais le reconduit aussi toujours au-delà de son institution sémantique dans une signification (qu’on dit symbolique donnée). »

« Je ne néglige pas la compréhension des significations symbolique d’un jeu [...] et je ne sous-estime pas non plus l’organisation du jeu en scénario fantasmatique : je pense, cependant, que le jeu (et notamment sous son rapport au verbe) est, par essence, effectuation de directions de significations, modulation temporelle de pulsion à travers – en deçà et au-delà – les représentations fantasmatiques qu’il met en scène. »

« L’idée de penser uniquement le jeu comme langage symbolique ou comme a)ivité imaginaire de fantasmes mis en scène conduit à faire du jeu, comme on dit, “le monde de l’enfant”. C’est, dans ces conditions, ignorer que le monde est, par le jouer, tout en même temps fondé et dévoilé, retiré et mis au jour, exploré comme absence et retrouvé (caché) comme présence... »

« Métaphore : espace de jeu. »

« Les dire)ions de signification ne sont point des déterminations stru)urelles qui définiraient un espace comme pote#iel [...]. Relevant de l’expérience pathique (E. Strauss) et thymique (L. B inswanger ) , l eur mise à jour dans l’interprétation ne peut-être le fait que d’un a,e poétique. »

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« Métaphore est, sans doute, cet a)e poétique – au sens où il lui revient, dans la parole, d’éveiller et de réveiller toute la signifiance temporelle de la langue, d’en attaquer les [ // p. 142 ] sédimentations sémantiques, de recueillir enfin dans les mots la réalité de chose. »

« [...] la notion de dire)ion de signification – qu’il serait préférable d’appeler concept – convoque et agit le corporel dans la parole, à même la parole : comme si le sens, avant qu’il soit sédimenté dans sa signification, était immanent à la sensation et à se sollicitation motrice. »

« Je dira) volo#iers que la parole du patie# doit trouver da& l’écoute de l’analyste une possibilité de germination : c’est là que e#endre transcende comprendre. Parler de germination de la parole dans l’écoute de l’analyste, c’est désigner l’a)e temporel intersubje)if de la métaphore. »

p. 143 « On conçoit mieux comment jouer engage la métaphore de façon totale et essentielle. Et le geste du jeu – geste de la métaphore rendue visible – est d’autant plus difficilement représentable que son entrelacs rythmique est en perpétuelle a)ivité de dé-signification et d’acheminement de sens. C’est à cette condition qu’un tel geste est jouer – soit toujours en même temps créer (détruire) et interpréter. »

« Il est clair que jouer – comme écrire et peindre – implique nécessairement l’expérience esthétique dans la parole qui veut en parler : et cela, parce que le jeu participe lui-même d’une a$thés). »

« L’ engendreme# temporel de l’$pace du jeu $t le jeu lui-même – pour ainsi dire son verbe et son g$te, le verbe de son g$te.

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Le jeu se laisse bien maladroitement raconter et décrire : il se peut, sans doute, seulement, écrire. Pour autant qu’il est lui même chemin de créer, je jeu n’est pas non plus une œuvre d’art. »

« En rapprochant le rêve, l’a)e graphique (ou pi)ural), l’écriture et le jeu, nous ne pouvons certainement pas rester insensibles à ce qui les différencie et à ce qui fait de l’un la forme transformée de l’autre. Les espaces produits ne se superposent pas et ne peuvent s’assimiler l’un à l’autre. »

p. 144 « Jeter au loin/de n#veau. L’ho%zontal et le ve*ical. »

« La référence fréquente faite à ce jeu [le Fort-Da], dans la littérature psychanalytique, lui donne valeur de modèle et même, d’une certaine façon, de paradigme. C’est le jeu de l’absence, du “parti-trouvé” – ou encore sa scansion répétitive en “va-et-vient” figure la toute-puissance manipulatoire d’un lien et le jeu du rejet et du retour. »

« [...] il ne fait pas de doute que ce jeu de la bobine – dont on pourrait décrire de multiples variantes – concerne une tentative e maîtrise symbolique de l’absence et de son objet. »

« [...] je voudrais faire état de l’interprétation que Freud explicite à la suite de cette observation. »

« 1° – Le jeu est formé sur le mode d’une substitution afin de permettre à l’enfant de supporter sans douleur ni protestation le départ et l’absence de la mère : il reproduit par une mise en scène [...] la disparition et la réapparition de l’objet aimé. Cette mise en scène par le jeu dédommage [...]

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l ’enfant du désagrément occasionné par le départ et l’absence. »

« Le jeu prend donc fon)ion de substitution symbolique concernant [...] un “renoncement à la satisfaction de la pulsion”. Nous voici en présence d’un premier niveau d’interprétation de la fon)ion du jeu : c’est une véritable m)e en scène capable de reproduire un évène[ // p. 145 ]ment (ici désagréable ou traumatique) afin de transformer l’affe) qui lui est lié et d’en maîtriser les effets. »

« 2 ° – La mise en scène de l ’évènement et sa reproduction sur le mode d’un jeu représentent la transformation d’une position p/sive (l’enfant n’ayant aucune prise sur le départ et l’absence de la mère) en une position a,ive (l’enfant se rend symboliquement maître de l’évènement et peut ainsi le reproduire à sa guise). »

« Le jeu obéirait ainsi à un mécan)me de retourneme' de la passivité en a)ivité (et du désagréable en agréable) [...]. Cette ab-réa,ion – par le jeu – de l’affe) désagréable subit passivement présente non seulement une fon)ion de décharge mais vise à assurer une maîtrise de l’affe). »

...

p. 147 « Jeter au loin est un a)e physique qui se signifie du pouvoir de s’énoncer dans cette proposition phonématique le donnant à entendre comme jouer de jouir. C’est la jouissance qui invente le jeu. Et non pas l’inverse. »

« Il serait évidemment plus simple de prétendre que jeter au loin les objets, c’est “se séparer” d’eux, les “faire disparaître” et, ce faisant, assigner à l’espace l’extériorité d’un

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dehors. En fon,ion de quoi pourraient se désigner les limites constituantes du corps propre et ainsi se stru)urer l’$pace du deda&. »

p. 148 « Je ne pense pa s que ça se pa s se a ins i . Paradoxalement, l’a)e physique de jeter au loin les objets les tient pour certains de ne point disparaître ou encore les rend dépendants du geste qui les rejette et semble les annuler. »

« [...] l’enfa# se fait d)paraître en jeta# au loin l$ objets : ce qui est “au loin” (fort) n’est symbolique de l’absence que sous le rapport d’une inversion imaginaire – spéculaire – qui rend l’a,e r$titutif de l ’absent d)paru, soit : l’enfant à lui-même. Et finalement n’est-ce pas l’a)e physique – inscrit dans le langage – qui révèle à l’enfant la dépendance d’une image à ce qu’on peut appeler son “moi”. »

« L’objet r$titué ne serait-il p/ ai&i le moi ? J’entends indiquer, de cette façon, que la mère devie# miroir par son absence. Et aussi que, de la sorte, le moi – idéalement imaginaire – est de l’ordre d’un objet total, comme tel restitué, de l’illusion d’existence d’un reflet en miroir. »

« [...] le jeu – peut-être comme le conte et le mythe – ne se traduit qu’en lui-même, soit : en un autre jeu. [...]. Jeter au loin l$ objets représente un jeu singulier et original et n’est pas le jeu de la bobine. Mais c’est aussi une forme ludique qui, n’étant pas ici fixée, engendre le jeu de la bobine – lequel se transforme en d’autres jeux. »

« Cette loi de transformation du jeu – dont il conviendrait d’étudier de près les “mécanismes” d’effe)uation – nous permet d’en suivre la logique inconsciente et justifie

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l’instauration du jeu comme a)ivité inhérente à tout processus psychothérapeutique. On dirait encore qu’un jeu ne s’interprète pas sinon en jouant. »

p. 149 « Il semble que la psychanalyse privilégie l’horizo#alité : rapport du proche au loi#ain, du propre à l’étranger, de l’i#érieur et de l’extérieur, etc. est, en quelque sorte, connotatif d’une certitude dépr$sive horizo#ale. La verticalité – qui est existentiellement fondatrice de la présence – concerne l’angoisse de l’effondrement (cf. Winnicott et l’expression du breakdown) et de la disparition, en un mot l’angoisse de mort et ce qui, en elle s’entend de la perte d’équilibre, de l’ouverture du sol, de la chute, etc. C’est sur ce registre que s’exprime le psychotique et c’est cette verticalité que l’on voit mise en scène dans certains rêves. »

« Je me propose de préciser ultérieurement les significations – pour ainsi dire ontologiques – de ce que je nomme ici horizo#alité et verticalité. Pour autant qu’il semble s’agir d’espace (de dire)ion de signification qui ordonnent un rapport de l’homme à l’espace), l’horizontalité et la verticalité concerne un fondement de temporalité. »

« Le proche et le loi#ain peuvent ainsi référer une fon)ion de translation horizontale dans un temps de la répétition dont est exclue la découverte interne de la mort et qui se trouve ainsi constitué par la résorption de la verticalité. [...]. On pourrait avancer l’hypothèse selon laquelle le deuil – par la signification que prend par lui la mort de l ’autre – comporte ce dévoilement temporel de la verticalité qui engage – en l’être – une véritable rupture de la répétition par laquelle s’exprime la défense dépressive. »

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« Je dirai , en une formulation provisoirement approximative, que le “au loin” du jeu de l’enfant à jeter ses objets et portant une toute-puissance à les faire d)paraître da& [ // p. 150 ] l’extérieur, maintient une ambiguïté quant à la signification que peut ou non y trouver la mort. »

« [...] quand je dis que la verticalité se comprend, par l’existence de la mort, ou encore d’un rapport au temps, je ne saurais la pense comme dimension logico-géométrique ou logico-topologique relevant d’une proje)ion ici comprise de façon chronophotographique. »

p. 151 « [...] la verticalité – se donnant pour la dimension primordiale et originaire de la mort et, par là, comme coextensive du soi dont s’entend la subjectivité – était phénoménologiquement présente à la description du rapport pudeur-ho#e-deuil tel qu’il se laisse précisément reconnaître, jusque dans ses aspe)s éthiques, chez le jeune enfant dit “normal” ainsi que dans les processus maniaques et mélancoliques de l’adulte. »

p. 152 « Mo* # absence ? »

« La dépression a quelque chose à voir avec une mort impossible. À cette condition que, pour être conservé en vie, l’enfant soit et reste endormi. Ne réveillez pas en sursaut les dépressifs ! Ne les agitez pas pour qu’ils viennent à ce qu’on appelle le réel. Ils couve# ! Et la psychothérapie des états dépressifs se conçoit d’un creux (ou ce que j’ai appelé d’un ventre de l’oreille et de la membrane de son silence) propre à recevoir le trop-plein d ’un vide. »

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« C’est par un conte – soit le pouvoir d’efficacité symbolique du mythos – que la parole donne chemin au réel et à ce qu’on appellerait ainsi le réveil. Cette protection du dépressif à l’égard de la mort [ // p. 153 ] est précisément assurée par l’enfant endormi. »

« Le holding – ce qu’on appelle maintien – y est fon)ionnellement primordial. Et toute rupture – fût-elle de détail et surtout si c’est d’un détail qu’il s’agit – de cet environnement de maintien (le cadre et le protocole de la cure) comporte la menace d’un p/sage à l’a,e de mort, ce.e-ci figura' le réel. Et le réel ne serait rien d’autre que ceci : l’enfant n’était qu’illusion – brutalement dénoncée comme mascarade par une mère-la-mort. »

p. 154 « [...] est-ce que – faute de la mort – le temps ne se trouve pas ainsi privé de sa verticalité qui met l’homme en projet d’exister et d’être sujet ? En d’autres termes, quelle est l’horizontalité du temps dépressif dans ses rapports à la répétition ? »

« La quest ion de l ’Objet en psychanalyse est inévitablement posée non point par rapport à la mort mais sous le rapport de l’absence en tant que celle-ci se signifie, dans la répétition, de la mère. »

« Est-ce que l’“objet” est pensable hors de cette horizontalité du temps ? Pour le petit enfant, le jeu de la mort se trouve mis en rapport bien autrement que sous la forme d’un scénario de Fort-Da. La mort ne saurait jouer le rôle de l’absence ! »

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p. 159 « Jeu de la bobine et (dé)négation. »

« [..] le jet d$ objets au loin se d$sine et se désigne da& l’a,e du phonème, da& le pouvoir de sa proje,ion. »

[ note en bas de page 160] « Je voudrais ici rappeler un point de vue méthodologique que je n’ai cessé de soutenir à propos de l’interprétation des peintures d’enfant. Ce qui compte c’est d’abord une matérialité émotionnelle de la tache (son contenu thymique) et l’espace quelle engendre : l’impression nous livre immédiatement – de façon pré-figurale ou ante-représentative – les déterminations tonales (et rythmique) d’une présence aux choses. La forme s’y trouve en œuvre – en chemin d’effe)uation ; et lorsqu’elle vient à s’imposer en une représentation, elle ne cesse pas, pour autant, de communiquer – de façon pulsative – avec l’espace qu’elle engendre. »

p. 162 « J’avance déjà l’hypothèse que le jeu – le jouer – ne se peut concevoir que d ’une négation. Et pas n’importe laquelle ! Négation à ne pas prendre trop vite pour la force conceptuelle – en quelque sorte empiriquement positivée – du rejeter ou du jeter au loin ou encore du détruire. On a trop souvent tendance à faire subsumer par le concept de négatif la perte, l’abandon, l’absence, la mort, etc. »

« Dans la psychanalyse, la négativité (qui n’est pas généralisation formelle d’une négation) est de l’ordre d’un impensable qui la rend techniquement opératoire. »

[ note en bas de page 162] « Dans son texte consacré à “La fon)ion du langage dans la découverte freudienne [in La psychanalyse, n°1, 1956], E. Benveniste écrit notamment : “La caractéristique de la négation linguistique est qu’elle ne peut annuler que ce qui est énoncé, qu’elle doit poser explicitement pour supprimer, qu’un jugement de non-existence a nécessairement aussi le statut formel d’un jugement d’existence. Ainsi la

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négation est d’abord admission. Tout autre est le refus d’admission préalable qu’on appelle le refoulement.” (p.13) »

p. 166 « Verwerfung et Verneinung. »

« Revenons tout d’abord sur l’origine mythique – plutôt que psychologique – du jugeme# d ’a+ribution qui consiste, je le rappelle, à dire ou dédire (zu- oder ab-7rechen) la propriété d’une chose. Dans le langage corporel de l’oralité primitive ou dans celui des pulsions de conservation, il s’agit de confier au bon et au mauva), à l’utile et au nu)ible la fon)ion de constituer le rapport d’un deda& à un dehors, d’un i#érieur à un extérieur. Il s’agit de manger ($sen) ou de vomir (a"7ucken) ou encore – dans une transposition (Übertragung) ultérieure – d’introduire ou d’exclure [...].»

« C’est donc affaire de Innen et de A"sen – de deda& et de dehors, d’i#érieur et d’extérieur. À l’origine (qu’il faut bien comprendre comme un temps mythique : “Il était une fois”), le Moi-plaisir (L"t-Ich) [ // p. 167 ] s’incorpore (ou s’introje)e) ce qui est bon et il “ex-corpore” (extroje)e) ce qui est mauvais. Tout cela paraît donc très clair dans le mythe corporel qui assigne une origine à l’affirmation et à la négation. »

« Ainsi que le faisait remarquer Lacan, le Commentaire d’Hyppolite rétablissait toute sa diale)ique à la Verneinung. Je cite Lacan : “ Le procès dont il s’agit ici sous le nom de Verwerfung... c’est exa)ement ce qui s’oppose à la Bejahung primaire et constitue comme tel ce qui est expulsé.” Et il ajoute un peu plus loin : “ La Verwerfung donc a coupé court à toute manifestation de l’ordre symbolique, c’est-à-dire à la

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Bejahung que Freud pose comme procès primaire où le jugement attributif prend sa racine, et qui n’est rien d’autre que la condition primordiale pour que du réel quelque chose vienne à s’offrir à la révélation de l’être...” »

« Et Lacan pon)ue ce moment de sa Répo&e en plaçant cette Verwerfung comme – ainsi que je l’appellerai – l’effet d ’un jeu de retour de ce qui a été retranché : “Ce qui n’$t p/ venu au jour du symbolique apparaît da& le réel.” Et il dit encore : “Car c’est ainsi qu’il faut comprendre l’Einbeziehung ins Ich, l’introduction dans le sujet, et l’A"stossung aus dem Ich, l’expulsion hors du sujet. Cest cette dernière qui constitue le réel en tant qu’il est le domaine de ce qui subsiste hors de la symbolisation... Car le réel n’attend pas, et nommément pas le sujet puisqu’il n’attend rien de la parole...” »

p. 168 « Le dedans et le dehors. »

« Le deda& et le dehors définissent – par le mythe – des stru)ures spatiales dont l’archite)ure imaginaire ne saurait être conçue comme établie par leur opposition. Deda&-dehors assume une scansion fantasmatique dynamique tout à fait privilégiée qui ne peut être confondue avec l’opposition complémentaire de l’i#érieur et de l’extérieur, du subje,if et de l’obje,if, bien qu’elle en sous-tende la polarité imaginaire. »

« Dedans et dehors règlent – avons-nous dit – une scansion fantasmatique qui se retrouve dans les rapports du proche et du loi#ain, du propre et de l’étranger, de ce qui se nomme ici et là. Et pourtant chacun de ces couples de bi-polarité spatiale qu’on peut rapporter au deda&-dehors et qui

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détermine des modalités existentielles variables, laisse disponible la géométrie poétique – voire la topologie poétique – de cet $pace du deda& engendré par ses propres tensions avec une sorte d’anti-espace du dehors. »

p. 169 « L’absence est peut-être faite de ce dehors venu d’un rejet. “Le monde est trop grand”, disait en pleurant à sa mère un enfant qui ne supportait pas ses absences. En tout cas, c’est du dehors que l’absent revient – chassé du dedans ! La m)e en mouveme# du dehors fait la solitude du deda& lorsque le deda& ne donne p/ capacité d ’être seul. »

p. 170 « Je négligerai ici de parler des formes archite)urales du deda& et de leur symbolisme inconscient [...]. Lorsque nous évoquons le deda&, nous pensons certes l’interpréter selon une image sexuelle féminine ou encore corporelle maternelle et ainsi à en faire la figure d’un co#enant : corps, maison, coquillage... »

« Je ne suis guère intéressé – je l’avoue – par ces stéréotypes de la culture psychanalytique qui identifient le lieu de l’analyse à l’espace appartemental où se trouvent au moins un divan et un fauteuil et que l’on prend comme lieu régulier pour y fixer le rendez-vous de la séance. »

« [...] que devient dans les rêves des patients – parfois aussi dans leur installation coutumière – le “décor” de la chambre de séance ? Cela peut-être bien sûr une chambre où on dort, une salle d’opération, une salle à manger... Que sais-je encore ? Mais cela peut être un train, un avion, une auto, un bateau et je dirai que, d’une certaine façon, peu importe puisque le contenu topographique de la représentation du rêve

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es t – comme te l – l e seu l “ c a d re ” qu i conv ienne représentativement à l’archite,ure fa#/tique du lieu de la séance. »

p. 171 « Les enfants s’y connaissent pour disposer, d’un mot ou d’un geste, le templum de leur jeu. Et il n’est point besoin pour eux de déplacer des meubles pour qu’une archite)ure soit la loi d’une liberté imaginaire de transformation. [...]. Après tout l’archite)ure du lieu de la séance se définit par cette seule loi de déformation par transformation. »

p. 172 « Le “décor” ou le “cadre” appartemental et comportemental de l’analyste sont, ai-je dit, le support archite)ural fantastique des transformations. »

« C’est seulement la capacité du psychothérapeute à jouer qui à la fois réorganise les limites et maintient la situation de holding sans donner prise à la manipulation. »

p. 173 « Que l’on dise que le cadre thérapeutique définit topiquement le corps de l’analyste comme situation (ou plutôt geste) de maintien rappelle ce qui est essentiel à la fois comme style de présence personnelle du psychothérapeute et comme condition d’une certitude de stabilité de ce maintien à la fois pour le psychothérapeute et pour son patient. »

p. 174 « Et, par ailleurs, les éléments constitutifs de ce “décor” ou de ce “cadre” ne sauraient se laisser concevoir comme de simples figurations mobilères et immobilières d’un standing du setting ! Ces éléments perdent évidemment toute leur valeur (sinon au titre de l’anecdotique des “installation”) s’ils ne sont pas situés dans le champ de la problématique évolutive de la technique de l’analyste, de son transfert i#erminable, du choix à la fois imaginaire et historique des cas

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qu’il prend en charge, enfin de son projet – fût-il in-explicite – d’un self-concept métapsychologique. Chaque détail d’une vie quotidienne – dans le prosaïsme de sa créativité silencieuse – est intégré à la fois à une façon technique et à un style. »

« Ce qui, en ce moment, nous laisse hésitant c’est cette fameuse scansion du deda& et du dehors. Je le rappelle encore : pour l’instant cela n’a rien à voir avec l’intérieur et l’extérieur, ni non plus avec le subje)if et l’obje)if. Deda& c’est drinnen et non pas innen (l’intérieur) et dehors, c’est dra"sen et non pas a"sen (l’extérieur). Ce qui montre bien que le deda& possède des plis pour du repli – peut-être l’affaire malheureuse du soi – et que dehors continue à sonner comme l’interje)ion violente qui je+e, qui met à la porte ! »

p. 175 « Il serait bien regrettable de “rabattre” le deda& sur l’i#érieur (le Drinnen sur l’Innen) et le dehors sur l’extérieur (le Dra"sen sur le A"sen) car serait aussitôt perdue la bipolarité rythmique dedans-dehors (ce que j ’ai appelé scansion fantasmatique et qui se comprend comme Bedeutungsrichtung) sous prétexte de favoriser et de consolider l’opposition problématique entre monde (ou espace) intérieur et monde (ou espace) extérieur. »

« Je parle donc ici de bi-polarité rythmique du deda& et du dehors : cela va dans le sens d’un rapport dynamique d’auto-engendrement réciproque de chacun en soi-même par l’autre. Autrement dit, c’est seulement par l’effet d’un trompe-l’œil baroque que le deda& et le dehors peu[ // p. 176 ] vent être isolément et oppositionnellement représentés. Sinon leur effe)uation – essentiellement sensitivo-motrice – est bien de l’ordre d’un

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engagement rythmique de la forme (G$taltung) l’une en l’autre et l’un par l’autre. »

« Telles que se représentent à nous la bi-polarité rythmique du deda& et du dehors ainsi que leur scansion fantasmatique, nous sommes sollicités par l’évocation d’un espace de la danse [...]. Dans la danse, [...], le mouvement n’est pas produit sur une musique mais c’est le son qui, s’emparant de l’espace, lui donne corps dans le mouvement. L’espace chorégraphique crée et recrée sans cesse et aussi annule – à même le développement du rythme sonore – le haut et le bas, l’avant et l’arrière... le deda& et le dehors. »

« [...] il est une autre voie qui s’ouvre à nous pour mieux comprendre cette bi-polarité du deda& et du dehors. Il s’agit précisément d’une description phénoménologique de l’$pace du jeu. Dans l’un des chapitre de Vom Sinn der Sinne [Springer

Verlag, Berlin, 1956], Erwin Straus fait du dedans et deu dehors des “phénomènes de l’espace du jeu” [...]. »

p. 177 « Après avoir longuement expliqué que dehors et dedans ne correspondaient en rien à “une relation pure obje)ivable”, que ce n’était pas non plus une “relation spatiale pure” [...], E. Strauss désigne dehors-dedans comme “une relation à la totalité du monde” [...]. Cette relation engage le rapport sentir-se mouvoir comme relation existentielle du Je au Monde [...]. »

« Comprenons que la problématique ici engagé par E. Straus articule le rapport dedans-dehors à celui – ante-représentatif et pré-conceptuel – de sentir-se mouvoir [...] qui

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lui-même est inhérent au corps et à son environnement [...] et ainsi au Je dans son rapport au monde. »

« De telle sorte que l’horizon ne peut être autrement défini que sous ce rapport – sentir-se mouvoir – à partir duquel se dévoilent temporellement les limites. Le proche et le loi#ain – ainsi que le montre à la fois l’espace du pay // sage et l’espace du jeu – constituent des polarités spatio-temporelles du sentir-se mouvoir. »

p. 178 « [...] le jeu de l’enfant a ce pouvoir d’effe)uer – sa& per7e,ive – corporellement la mise en mouvement du monde et de n’écrire les limites qu’à partir de la découverte de l’ouverture. Les frontières assignées à figurer une maison sont des actes d’articulation spatio-temporelle du rapport au monde. L’espace du jeu est précisément organisateur de cette polarité spatio-temporel le du dehors -dedans par la mobilisation motrice de la limite. »

« On pourrait dire que l’enfant peut jouer son corps comme un là-b/ ici, ou encore comme une façon d’écrire le monde en recréant sans cesse celui-ci tel un dedans dont, mome#anéme', la limite est posée par le dehors. »

[ note en bas de page 178] « Cette mobilisation corporelle du monde par le je ou jeu nous fait précisément penser à ce qu’on constate dans le deuil. Et c’est peut-être le deuil qui nous aiderait d’autant mieux à comprendre la dimension temporelle de cette transformation spatiale dans la mobilisation du monde. »

« [...] l’opposition d’un intérieur et d’un extérieur participe au contresens psychologique selon lequel il y aurait deux mondes – un monde intérieur et un monde extérieur. Il faudrait retracer ici l’histoire de cette psychologie qui conçoit

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pour l’homme une réalisation spatiale de la subje)ivité sous la forme d’une intériorité. Mais nous ne pouvons manquer, pourtant, de nous interroger sur la fon)ion que prend cette opposition dans la théorie psychanalytique (Freud) ainsi que dans la métaphore d’un espace psychique auquel la cure est congruente. »

p. 179« L’inté%eur et l ’exté%eur. »

« Revenons au texte de la Verneinung. Freud [...] ajoute [...] : “C’est, comme on le voit, de nouveau une question d’extérieur et d’intérieur [...]. Le non-reél, ce qui est seulement représenté, le subje)if, n’est qu’à l’intérieur ; l’autre, le réel, existe aussi à l’extérieur.” Cette opposition est pour Freud le moyen d’assurer à la représentation la fon)ion d’une “caution de la réalité du représenté”. »

« L’institution de cette opposition et de là, l’institution de l’opposition entre le subje)if et l’obje)if sont ici tout à fait déterminantes. L’enjeu s’en trouve être le statut de la “réalité extérieure” et de ce qu’on comprend comme obje,ivité. »

« Je retiendrai ici quelques remarques qui peuvent servir cette réflexion sur l’Objet et le jeu : »

« 1° – [...] [ // p. 180] l’intérieur est le mythe référentiel de la fuite impossible. Un des cara)ère principaux de la pulsion ne réside-t-il pas, nous dit Freud, d’en l’“impossibilité d’en venir à bout par des a)ions de fuite”. [...] l’intérieur est la figure corporelle d’une motricité et d’une mobilité suspendues (fuite impossible) et il se désigne d’une limite dont se conçoit la

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pulsion. [...] finalement l’intérieur ne peut être que l’i#érieur de la parole et de son écoute : la pulsion peut seulement s’entendre. »

« 2 ° – [ . . . ] . Dans un texte sur “ s e f e r m e r et s ’ouvrir” (hommage à Buytendijk, Utrecht-Anvers, 1957), Rumke a va i t s i b ien déga gé l e s s i gn i f i ca t ions phénoménologiques de ce mouvement rythmique – pour ainsi dire biologique – de la communication. L’i#érieur et l’extérieur se jouent l’un par rapport à l’autre comme un seul et même espace créant sa limite interne dans le geste ou dans le visage. »

« 3° – [...] [ // p. 181] [...]. Ce qui nous intéresse chez Freud et dans la psychanalyse n’est pas d’opposer subjectivité et obje)ivité, encore moins de les déduire de l’intérieur et de l’extérieur mais plutôt de reconnaître de que.e subje,ivité $t fait l ’objet. [...]. Ce qui revient inévitablement à sortir de l’ennuyeuse relation d’objet qui a été inventée pour méconnaître l’intersubje)ivité. »

« Je ne crois pas, pour ma part, que la problématique de la subje)ivité – et non plus celle du soi-disant sujet [...] – puisse être articulée hors des significations attachées à la temporalité et à l’historicité. »

« Retenons que le seul sujet qui nous intéresse ici – dont je ne saurais dire ce qu’il en est pour lui de sa subje)ivité hors de l’objet dont il se sert – est celui du jeu. J’ai posé la question : je est-il – et peut-il être – sujet de joue, si l’enfant vient à dire : “je joue”. »

« À moins qu’il faille bien entendre la subje)ivité freudienne telle que la dit Francis Ponge – à savoir que sub-

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je)ivité, c’est une poussée venant du fond et un jet vers l’extérieur. »

p. 182 « Que veut !re “absence de la mère” ? »

« Le jeu de l’enfant – au même titre que le rêve – est compris par Freud comme représentant (darstellen) et tra&posa' un fantasme de désir (Wu&chpha#/ie) ou une motion pulsionnelle (Triebregung). Le jeu possède donc bien, de même que le rêve, la particularité de constituer un espace par le moyen d’une mise en scène. »

« Je souligne que c’$t la m)e en scène qui engendre l’$pace et le tra&forme et non p/ l’inverse. Cela veut dire que l’$pace du jeu $t i&ta#anéme# agi et que s$ tra&formatio& so# ce.$ de l’agir. Mais il faut aussitôt se demander si l’enfant qui joue est bien le sujet de son agir ou s’il ne serait pas plutôt agi par le fantasme de désir ou la motion pulsionnelle. »

« Cette concordance entre le rêve et le jeu ne s’arrête pas là. Il conviendrait de parler paradoxalement d’un travail du jeu – au sens où on parle, bien sûr, du “travail du rêve” et aussi dans la perspe)ive du travail thérapeutique du rêve. Il est bien c l a i re que l e j eu – ou mieux , l e j o u a nt – enga ge intrinsèquement une fon)ion d’élaboration et c’est à ce titre qu’il faut en considérer la place et la technique comme congruentes à la technique psychothérapeutique [...] »

« Le jeu de la bobine a [...] toute l’apparence de fon)ionner de la même façon : l’enfant répète – au moyen de

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cette mise en scène phonématique et motrice – l’évènement traumatique de la disparition de la mère. »

p. 183 « Je retiendrai que, dans les rêves comme dans les jeux où se trouve mis en scène l’évènement traumatique, on est bien amené à s’interroger sur la nature fantasmatique de l’évènement traumatique et sur la fon)ion d’écran rendant possible l’élaboration psychique. [...]. Je pense que le jeu prend valeur d’une véritable fon)ion opératoire dans l’élaboration psychique et c’est pour cette raison qu’il est si essentiel de comprendre précisément – à travers la problématique de l’identification – comment le jeu à la fois emprunte et lève [...] l’opposition entre l’a)if et le passif. »

p. 185 « La symbolisation – qui est œuvre de langage – est engagée, comme dit Lacan, d’un “meurtre de la chose” [...]. Et il s’agit bien là de la mort non point comme négation mais comme négativité : cette mort ne peut entrer comme contenu dans une représentation et elle ne saurait non plus constituer l’écran de la figuration traumatique. »

p. 186 « C’est bien de cette mort qu’il s’agit dans le jouer. L’“objeu” est l’a)e du “meurtre” ainsi que le pouvoir qui en résulte. La mort – ainsi désignée – réfère l’historique à la négativité du langage. C’est d’elle – de cette mort-là – que s’entend l’absence qui est bien autre chose que la disparition de la mère, lorsqu’elle s’absente pour aller au marché ou ailleurs ! »

« Le rêve dans la névrose traumatique se sert de la mort comme d’un accident : la dramat)ation psychique emprunte précisément à l’amour les effets de mise en scène de la perte et de la séparation. [...]. Il est vrai [...] que le jeune enfant est

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soustrait à cette forme de dramatisation psychique que prend la pensée de mort chez l’adulte. Par son jeu, l’enfa# meurt comme il rit. Peut-être da& leur vie, quand ils rie#, l$ humai& la)se#-ils voir de quoi ils sero# mort. »

p. 189 « Cette compulsion sado-masochiste originaire à manipuler est propre à évoquer ce jeu de la bobine avant précisément qu’il devienne un jouer. Je pense que l’enfant découvre cet agir-là – à l’intérieur de sa propre passivité liée à son a+e#e – comme s’il était d’abord agi par un mouvement de va-et-vient, de disparition-apparition. »

« En un mot, le jeu de la bobine peut devenir un jeu dès lors que l’enfant n’est plus joué par cette présence-absence qui s’exerce sur lui comme une sédu)ion sadique de la mère : c’est bien en ré-apparaissant que la mère veut se rendre présente d’un leurre de son absence. [...] ce qui est la trace sadique de la mère c’est sa ré-apparition. »

« L’absence est douloureuse de ce qu’elle maintient – comme hallucinatoirement – de la présence, soit l’absent. Je pense que le jeu de la bobine est – avant d’être un jeu – une scansion pulsionnelle. Il est dans la répétition de la mère, il est même la répétition de la mère. C’est peut-être enfin la mère comme répétition. J’entends plutôt : la répétition comme mère ! [...]. Être agi par la répétition comme mère : voilà une sorte de mise en scène dont le scénario aurait été perdu. »

p. 191 « [...] l’espace qui sépare le corps de l’enfant et le corps de la mère. Cet espace laisse-t-il à l’enfant la capacité de vivre son illusion de toute puissance ? C’est généralement la

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mère qui, ayant trop peur de laisser exister un espace, a besoin de se rassurer en s’accrochant à l’enfant. »

« Dire que la répétition est la mère, c’est précisément poser le problème de l’absence dont la répétition s’est produite. Lorsque l’enfant peut jouer – parce que langage il y a – la répétition est entendue comme projetée donc empruntée. L’analyse est là. »

« Disons en clair que le jeu de la bobine – empruntant la forme d’une répétition dont l’enfant est, d’abord, par la mère joué – n’acquiert la fon)ion véritable d’un jouer ou d’un jouant que par les disjon)ions qu’il effe)ue sur la répétition elle-même. [...] il n’y a jeu possible que par la rupture (disjon)ion) ici introduite dans la répétition et grâce, toutefois, à la mise en œuvre de cette répétition. »

« Lorsque je parle ainsi de rupture disjon)ive introduite et opérée (ou effe)uée) par le jeu dans la répétition, je pourrais concevoir cette rupture d’un renversement et d’un dédoublement mettant en cause le passage du passif à l’a)if ou encore la double identification [...]. Je pense que cette interprétation est insuffisante. Ou du moins qu’elle ne dit pas ce que le jeu engage essentiellement comme tel. »

p. 192 « La répétition dans le jeu ne fait donc pas le jeu. Et le jeu – de même que l’humour – réfère une négativité de la dé-signification. Et c’est à cette condition que jouer à faire d)paraître et à faire ré-apparaître est créateur du se&. Ce qu’on appelle le se& est engendré par le rapport présence-absence. »

« Je ne crois pas que, dans le jeu de la bobine, il soit question, en fin de compte, de l’absence de la mère. L’enjeu en

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$t plutôt la découverte du se& comme absence et le jeu trouve son pouvoir dans la création de l’effet de sens de l’absence. »

« C’est là qu’il nous faudrait définir la position topique du double dont nous avons dit que le jeu permet de le concevoir, tout simplement, comme l’entendre. Le vrai double n’est pas celui qui serait devant soi mais ce qui réfère le négatif d ’un arrière-soi. »

« [...] le jeu de l’enfant devant le miroir – présenté comme le troisième moment plus élaboré du jeu de la bobine – est, en fait, le moment de la découverte par l’enfant de l’illusion de l’absence (à partir de l’absence comme produ)rice d’illusions) et du sens (le double) comme sens de l’absence. »

« [...] l’absence de la mère est douloureuse par ce qu’e.e la)se lorsqu’e.e n’$t pl" là. Et ce qu’elle laisse – comme pour tenir captif et sous prétexte de garder et protéger – c’est une répétition où le jeu est impossible parce que le je se trouve assujetti. Il ne fait pas de doute qu’on a là une signification majeure de l’absence de la mère. La répétition, dirait-on, $t la préoccupation de l’absence. »

p. 193 « Jai souvent parlé de la mère dans la mère ou encore de l’arrière-mère. On sait que dans son rapport à son enfant la mère ré-a)ualise souvent – fût-ce en les corrigeant ou en les compensant – une façon d’être dont elle fut elle-même l’objet. »

p. 194 « C’est dans cette dire)ion qu’il nous faut cercher à comprendre ce que peut vouloir dire absence de la mère lorsque l’absence n’est autre que la répétition omni-prése#e de l’arrière-mère da& la mère. Sans doute sommes-nous encore très près de

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ce visage-miroir de la mère où désespérément l’enfant recherche l’image dont il s’incarnerait par la reconnaissance dont il se verrait ainsi assuré. [...] répétition de l’arrière-mère dans la mère (ou encore de la femme dans la mère). »

p. 195 « L’inflation du concept d’objet en psychanalyse entraîne inévitablement la culture conceptuelle d’une langue. Les significations symboliques de l’objet y sont sémantisées alors même que le concept d’objet était fait pour les dé-signifier. »

« Attribuer un contenu à l’objet (la mère, l’absence ou le sein, le pénis) c’est certainement viser des organisations sémantiques de l ’ inconscient. Mais le risque est de substantialiser les opérations de l’analyse au profit d’un pan-fantasmisme de l’objet. »

« J’ai, ici, parlé de l’objeu. Façon de rappeler la fon)ion de dé-signification du jouer et aussi moyen de dire que le travail analytique n’est pas loin de ce texte dont l’objet est exclu et où le sujet est seulement ce qui joue à paraître et disparaître. »

« L’absence est le pouvoir du sens et jouer est l’a)e de destru)ion poétique de l’objet et du sujet. Là est la création. »

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