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RÉFÉRENCES Fait politique Partis politiques et système partisan en France Sous la direction de Florence Haegel Extrait de la publication

Florence Haegel (dir.) PARTIS POLITIQUES ET ……enjeux politiquestels que le déclin communiste et la réémergence de ... RAMEAU : - Partis politiques ... « Que sais-je ? », 2002

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Fait politique

Essentiels pour comprendre les logiques politiques, les partis sontsouvent décriés et leur analyse délaissée, surtout en France. Cetouvrage a pour objectif de fournir au public les connaissances et lesréflexions leur permettant de comprendre non seulement les partis del’intérieur mais aussi les questions qu’ils posent à la démocratie,comme de rendre visible le renouvellement des travaux à leur sujet.

Pour chaque parti, le livre apporte un nouvel éclairage sur desenjeux politiques tels que le déclin communiste et la réémergence del’extrême gauche, les transformations à droite marquées par une inter-rogation sur l’identité de l’UDF et de l’UMP, la culture d’organisation duPS et des Verts, le poids idéologique du FN.

Une réflexion plus générale sur la place des partis dans le systèmefrançais est ensuite menée par les auteurs à travers, successivement,la transformation du lien partisan, la présidentialisation des partispolitiques et l’influence des règles électorales.

Un ouvrage par une équipe de chercheurs français qui fournit un cadrepour comprendre la situation des partis aujourd’hui en France mais quisoulève également une interrogation sur une éventuelle « manièrefrançaise » de les appréhender, en bref qui ouvre un débat.

Florence Haegel est directrice de recherche au CEVIPOF (Centre derecherches politiques de Sciences Po).Ont contribué à cet ouvrage : Carole Bachelot, Alexandre Dézé, FlorenceFaucher-King, Julien Fretel, Florence Johsua, Julian Mischi, Christine Pütz,Nicolas Sauger, Vincent Tiberj, Alan Ware.

Florence Haegel (dir.)PARTIS POLITIQUES ET SYSTÈME PARTISAN EN FRANCE

Sous la direction de

Florence Haegel

20€

ISBN 978-2-7246-1001-7 - SODIS 953 519.4

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Fait politique

Partis politiques

et système partisan

en France

Sous la direction de

Florence Haegel

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Catalogage Électre-Bibliographie (avec le concours des Services dedocumentation de la FNSP)Partis politiques et système partisan en France / Florence Haegel (dir.) –Paris : Presses de Sciences Po, 2007.ISBN 978-2-7246-1001-7RAMEAU :- Partis politiques : France : 1990-…DEWEY :- 324.2 : Partis politiquesPublic concerné : Public motivé

La loi de 1957 sur la propriété intellectuelle interdit expressément la photocopieà usage collectif sans autorisation des ayants droit (seule la photocopie à usageprivé du copiste est autorisée).Nous rappelons donc que toute reproduction, partielle ou totale, du présentouvrage est interdite sans autorisation de l’éditeur ou du Centre français d’ex-ploitation du droit de copie (CFC, 3, rue Hautefeuille, 75006 Paris).

© 2007, PRESSES DE LA FONDATION NATIONALE DES SCIENCES POLITIQUES

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ISBN - version PDF : 9782724682328Extrait de la publication

SOMMAIRE

Ont contribué à cet ouvrage 9

Introduction

Florence Haegel 11

Première partieLes partis

Chapitre 1 / LES CONDITIONS DE (RE)PRODUCTION DE LA LCR

L’APPROCHE PAR LES TRAJECTOIRES MILITANTES Florence Johsua 25

Une approche par les trajectoires militantes 28Les processus de reproduction d’un parti politique 34Les conditions d’une métamorphose 49La transformation à l’aune des trajectoires individuelles et collectives 53

Chapitre 2 / POUR UNE HISTOIRE SOCIALE DU DÉCLIN DU PARTI COMMUNISTE Julian Mischi 69

Conflits sociaux en mairie communiste 76La professionnalisation de la gestion communiste locale 83Les mineurs du Pays-Haut lorrain 89La « corporation » contre le « parti » 96

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6 Partis politiques et système partisan en France

Chapitre 3 / LES VERTS ET LA DÉMOCRATIE INTERNE

Florence Faucher-King 103

Les spécificités des Verts 110Trois principes organisationnels 118Frustrations, déceptions et nouvelles réflexions 133

Chapitre 4 / LA CULTURE D’ORGANISATION AU PARTI SOCIALISTE

DE L’EXPLICITATION À L’APPROPRIATION DES NORMES Carole Bachelot 143

Le PS au prisme de la culture d’organisation 146Une approche par les rituels : l’explicitation des normes lors des congrès socialistes (1994-2005) 152Une approche compréhensive : l’appropriation des normes par les spécialistes de l’organisation 164Conclusion : la spécialisation oligarchique revisitée 179

Chapitre 5 / L’UDF AU PRISME DU JEU D’ÉCHELLE

Julien Fretel 183De la nécessité d’une étude « localisée » du parti centriste… 190…à une inévitable remontée vers l’« organisation centrale » 203Pour une sociologie « tout court » des partis politiques 217

Chapitre 6 / LE PLURALISME À L’UMP STRUCTURATION IDÉOLOGIQUE ET COMPÉTITION INTERNE Florence Haegel 219

De l’enjeu du pluralisme partisan 221

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SOMMAIRE 7

Les instruments d’institutionnalisation du pluralisme 230La structuration idéologique de la nébuleuse UMP 237La compétition pour le pouvoir 248

Chapitre 7 / LE FRONT NATIONAL COMME « ENTREPRISE DOCTRINALE »Alexandre Dézé 255

Idéologie et identité partisane 259Idéologie et organisation 267

Idéologie et stratégies 280

Deuxième partieLe système partisan

Chapitre 8 / LE SYSTÈME PARTISAN COMME « ESPACE DES POSSIBLES »Vincent Tiberj 287

Le tournant cognitiviste 289L’érosion de la proximité partisane positive 297Les ennemis : la « négativisation » des rapports aux partis 306Les partenaires : « l’espace des possibles » électoral 311

Chapitre 9 / LA PRÉSIDENTIALISATION DES PARTIS FRANÇAIS Christine Pütz 321

L’approche néo-institutionnelle 324La logique du système 328Les élections présidentielles en France – un suffrage partisan 334

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8 Partis politiques et système partisan en France

L’approche néo-institutionnelle et les effets institutionnels de l’élection présidentielle 354

Chapitre 10 / UN SYSTÈME ÉLECTORAL VECTEUR D’INSTABILITÉ ?Nicolas Sauger 359

Les effets persistants du mode de scrutin à deux tours dans les circonscriptions législatives 368Un impossible déterminisme au niveau national 376L’impact des systèmes électoraux sur la dynamique des systèmes partisans 383

Conclusion / LES PARTIS VUS DE FRANCE ET D’AILLEURS Florence Haegel 391

Changement d’échelle 392L’approche organisationnelle 393Les modèles « entrepreneurial » et utilitariste 397Organisations et institutions 400La fabrication du politique 404

Postface / LES PARTIS FRANÇAIS ET LA SCIENCE POLITIQUE COMPARATIVE Alan Ware 407

Bibliographie 419

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Ont contribué à cet ouvrage

– Carole BACHELOT, doctorante, Sciences Po, Paris.

– Alexandre DÉZÉ, doctorant, Sciences Po, Paris.

– Florence FAUCHER-KING, chargée de recherche, CEVIPOF, Sciences Po, Paris.

– Julien FRETEL, maître de conférences en sociologie à Sciences Po Lille, cher-cheur au CRPS, Université-Paris 1.

– Florence HAEGEL, directrice de recherche, CEVIPOF, Sciences Po, Paris.

– Florence JOHSUA, doctorante, Sciences Po, Paris.

– Julian MISCHI, chargé de recherche, INRA-CESAER, Dijon.

– Christine PÜTZ, chercheuse, Centre de recherches européennes en sciencessociales de Mannheim (MZES), Université de Mannheim.

– Nicolas SAUGER, chargé de recherche, CEVIPOF, Sciences Po, Paris.

– Vincent TIBERJ, chargé de recherche, CEVIPOF, Sciences Po, Paris.

– Alan WARE, professeur au Worcester College, Université d’Oxford.

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Extrait de la publication

Introduction

Florence HAEGEL

Ces dernières années, nombreux sont ceux qui ont déploré le faitque l’étude des partis politiques ait été négligée en France. La raretédes travaux consacrés aux partis, mais également des colloques oudes groupes de travail leur étant dédiés1 en témoignait. Elle semanifestait également par le peu de publications inscrivantl’analyse des partis, et en particulier des organisations françaises,dans les débats scientifiques en cours. En effet, les ouvrages dispo-nibles en français sont soit des manuels à destination des premièresannées universitaires2, soit des livres défendant un type d’approchebien spécifique3. En anglais, des synthèses sur les partis français ont

1. De ce point de vue, la situation a commencé à changer,comme le signalent différentes initiatives scientifiques : parexemple, la publication d’ouvrages (cf. Dominique Andolfatto,Fabienne Greffet et Laurent Olivier (dir.), Les Partis politiques :quelles perspectives ?, Paris, L’Harmattan, 2001), l’organisa-tion de colloques (cf. le colloque organisé par l’Association fran-çaise de science politique en 2002 sur Les tendances récentes del’étude des partis politiques dans la science politique française :organisations, réseaux, acteurs), ou la mise en place d’un groupede travail sur les partis politiques, le Groupe d’étude sur lesorganisations partisanes et les partis (GEOPP) à l’Associationfrançaise de science politique.

2. Pierre Bréchon, Les Partis politiques, Paris, Montchres-tien, 1999 ; et Éric Agrikoliansky, Les Partis politiques en Franceau 20e siècle, Paris, Armand Colin, coll. « Synthèse », 2000.

3. Daniel-Louis Seiler, Les Partis politiques en Occident.Sociologie historique du phénomène partisan, Paris, Ellipses,2003 ; et Michel Offerlé, Les Partis politiques, Paris, PUF, coll.« Que sais-je ? », 2002 [4e éd.].

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12 Partis politiques et système partisan en France

récemment été publiées4. Destinées aux personnes intéressées par la« French politics », elles sont généralement faites d’une successionde chapitres, plus descriptifs que problématiques, présentant lescaractéristiques de chacune des organisations.

Cette désaffection apparaissait paradoxale si l’on considère queMaurice Duverger, précurseur dans le domaine, est sans doute lepolitiste français le plus cité dans le monde. Elle renvoyait à lacroyance commune dans une perte de centralité des partis, alimentéepar le constat du déclin de leur capacité mobilisatrice et par l’attraitque suscite toujours l’étude des organisations politiques alternatives,et renforcée par l’idée de leur croissante marginalisation dansl’élaboration de l’action publique. Et pourtant, pendant ce temps-là,les partis français se transformaient. Des fusions, des scissions et deschangements d’alliance infléchissaient l’équilibre général dusystème partisan et pouvaient témoigner de sa réactivité face àl’affirmation de nouveaux clivages. La mise en place d’un finance-ment public et de règles de parité renforçait leur encadrement publicet modifiait leur fonctionnement interne. L’accroissement despouvoirs des adhérents dans la sélection du personnel partisan(leaders et candidats) et, quoique de manière plus marginale, dans ladéfinition des programmes, renforçait le système de rétributioninterne, mais également la place des partis dans les mécanismes derecrutement politique. Enfin, la modification du sens même donné àl’adhésion, avec par exemple l’invention des e-adhérents, illustraitleur effort pour s’adapter à la concurrence et à la mutation des formesd’engagement politique.

4. Jocelyn Evans (ed.), The French Party System,Manchester, Manchester University Press, 2003 ; et AndrewKnapp, Parties and the Party System in France. A Discon-nected Democracy ?, New York (N. Y.), Palgrave, 2004.

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INTRODUCTION 13

Pour pallier ce manque, des travaux ont été engagés et progres-sivement menés à terme par de jeunes chercheurs redonnant vie àce domaine. Cet ouvrage comble un vide éditorial et rend visibleun renouvellement en cours, à travers toutes ses facettes. La diversitérenvoie d’abord aux différents cadres d’analyse mobilisés puisque sontreprésentées des contributions relevant d’approches « sociétale »,« cognitiviste », « néo-institutionnelle », etc., mais également auxdifférentes problématiques interrogées. Ainsi, des notions aussicentrales que celles d’idéologie ou de culture partisane, de pluralismeou de démocratie interne sont mises à l’épreuve, et partant, des auteursaussi canoniques que Roberto Michels, Maurice Duverger ou GiovanniSartori sont convoqués et discutés. La diversité tient aussi aux diffé-rentes méthodes utilisées : étude localisée, enquête qualitative fondéesur des entretiens compréhensifs, enquête quantitative, etc. Le derniersigne de l’intention de multiplier les points d’observation se mani-feste par l’attention portée au système partisan, objet d’étude encoreplus négligé que les partis.

Cet ouvrage n’a donc pas l’ambition de rendre compte, demanière la plus complète possible, de l’état de la littérature scien-tifique, des approches disponibles et des controverses en débat.Pour autant, il ne réduit pas son objectif au fait de fournir desconnaissances actualisées sur les partis français et le système qu’ilsforment ou d’appliquer une réflexion standardisée à chaque partiétudié. Il part de l’idée que le regain d’intérêt porté aux partis nepeut se faire qu’en rendant lisibles les débats et les questions queleur analyse soulève. Partant de ce constat, il fait le pari d’appli-quer une perspective théorique spécifique à une organisationdonnée ; en bref, de construire des cas. Chaque chapitre adoptedonc une grille de lecture particulière du phénomène partisan,constituée par un type d’approche théorique ou par une questionde recherche fondatrice. Cette introduction tente de restituer

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14 Partis politiques et système partisan en France

de manière synthétique – quoique subjective5 – les argumentsdéveloppés par chacun des auteurs.

La première partie est composée d’une série de sept chapitresportant sur les principaux partis français : la Ligue communisterévolutionnaire (LCR), le Parti communiste français (PCF), le Partisocialiste (PS), les Verts, l’Union pour la démocratie française (UDF),l’Union pour un mouvement populaire (UMP) et le Front national(FN). La seconde fournit trois éclairages complémentaires sur lesystème partisan français. Une telle construction laisse évidemmentdes angles morts, ceux-ci sont d’ailleurs révélateurs de l’état actuelde la production scientifique. Sans être exhaustive, on peut parexemple souligner qu’aucune contribution ne se réfère au modèle duchoix rationnel pourtant très présent dans la littérature américaine :on ne s’en étonnera pas. On peut également noter qu’il existe peud’études portant sur le travail partisan en matière programmatique,voire même idéologique6 : on s’en étonnera plus si l’on considèreque l’activité programmatique est un maillon essentiel de l’articula-tion entre policies et politics, et si l’on garde en mémoire lesréflexions pionnières de Frédéric Bon7 sur les idéologies partisanes.

Le premier chapitre s’intéresse à l’engagement militant en mobili-sant une analyse en termes de trajectoires. Dans le cas de la LCR, unetelle approche s’avère particulièrement pertinente dans la mesure oùcette organisation est caractérisée non seulement par les aléas de sa

5. Une telle entreprise collective suppose de successifséchanges entre les contributeurs et la coordinatrice, et je tiensà remercier tous les auteurs de cet ouvrage (y compris SylvainBrouard qui n’y a finalement pas participé) pour leur travail.

6. Seul Alexandre Dézé traite de cette dimension idéologique,mais il en souligne aussi les lacunes.

7. Frédéric Bon, Les Discours de la politique, textes réunispar Yves Schemeil, Paris, Economica, 1991.

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INTRODUCTION 15

capacité mobilisatrice (revenue au devant de la scène en 2002, elleavait connu une traversée du désert dans les années 1990), mais égale-ment par la multipositionnalité de ses militants, engagés, parallèle-ment ou successivement, dans des organisations syndicales ou desassociations contestataires. En saisissant les trajectoires de manière à lafois quantitative et qualitative, on est à même d’en repérer des typesdominants dans l’organisation et de les confronter aux témoignagesindividuels recueillis par entretiens. Trajectoire historique de l’organi-sation et trajectoires individuelles sont donc pensées en relation. Ainsi,on peut établir que le repli des années 1990 a conduit de nombreuxmilitants à s’investir dans ces « structures de rémanence » qu’ont cons-tituées les syndicats et les associations contestataires. En retour, cetinvestissement a eu des effets sur le parti, qui s’est largement trans-formé en intégrant des militants marqués par des expériences en margede la LCR. La mise en lumière de ces processus conduit à soulignercomment une organisation se maintient en se transformant.

Le PCF est le cas idéal pour présenter et discuter l’approche« sociétale », « socio-historique », ou « sociale » (les labels se super-posent et témoignent, d’ailleurs, de certaines inflexions). Cette perti-nence tient d’abord au fait que cette grille d’analyse a largement étéconstituée à partir de l’analyse de l’identité partisane communiste.Pourtant, il ne s’agit pas, dans le chapitre 2, d’inscrire simplement ledéclin communiste dans un contexte socioculturel saisi à l’échellelocale. Il est question, plus radicalement, de l’analyser en termesd’histoire sociale et de le comprendre à partir de la transformationdes rapports socioprofessionnels qui structurent les réseauxcommunistes. Les conflits qui éclatent localement entre commu-nistes et syndicalistes de la Confédération générale du travail (CGT)préfigurent le déclin qui interviendra électoralement quelquesannées plus tard. Mais ils relèvent, dans les deux études localesprésentées, de logiques sensiblement différentes. Dans le cas

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grenoblois, ils signalent la rétraction communiste sur ses structuresmunicipales, puisque les tensions entre syndicalistes et élus commu-nistes se fondent, en réalité, sur des conflits de travail et de hiérar-chie entre des syndicalistes, essentiellement constitués par desemployés municipaux, et des « patrons », incarnés par les élus duparti. Dans le cas lorrain, ces conflits renvoient à des divergences surla gestion de la crise industrielle et conduisent à l’émancipation dessyndicats de mineurs qui, s’ils n’avaient jamais véritablementconstitué le cœur du parti, demeuraient soumis à son influence.

La démocratie au sein des partis politiques est, depuis l’origine,un des enjeux les plus discutés. Elle constitue le cœur de ladeuxième vague de critique des partis politiques8, celle qu’incar-nent Roberto Michels9 et Moisei Ostrogorski10, critiquant la confis-cation du pouvoir par une oligarchie ou un « boss ». Le chapitre 3reprend ce débat fondateur à propos des Verts, dont on connaîtl’attachement quasi obsessionnel à des tentatives de renouvelle-ment des pratiques démocratiques. Grands producteurs de réformesstatutaires, les Verts ont multiplié les dispositifs et les procédurespour créer une organisation conforme à leur idéal démocratique enassurant le pluralisme, en prévenant l’établissement de toutehiérarchie, et en promouvant la participation du plus grandnombre. L’empilement des règles et des normes, mais aussi l’enjeu

8. On peut considérer qu’après une première vague (fin duXVIIIe siècle) critiquant les partis au motif qu’ils seraient des facteursde division de l’unité nationale, une deuxième vague (début duXXe siècle) met en cause leurs pratiques antidémocratiques.

9. Roberto Michels, Les Partis politiques. Essai sur lestendances oligarchiques des démocraties, Paris, Flammarion,1971 [1e éd. 1911].

10. Moisei Ostrogorski, La Démocratie et les partis politiques,Paris, Le Seuil, 1979 [1e éd. 1902].

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INTRODUCTION 17

que finissent par constituer leur usage et leur interprétation, ont nonseulement sécrété des compétences mais des inégalités spécifiques.Leur mise en pratique contribue aussi largement à un sentiment deconfusion, voire d’obstruction procédurière, et façonne des interac-tions spécifiques qui sont loin de l’image d’une société verte amicaleet conviviale. À tel point que la délibération tant recherchée seheurte à l’absence de confiance réciproque.

Le chapitre 4 consacré au PS prolonge, en quelque sorte, cetteréflexion en prenant au sérieux la notion de culture d’organisation.Pour une telle entreprise, le « cas » socialiste apparaît particuliè-rement adapté dans la mesure où les questions d’organisation ysont problématiques. Elles s’avèrent à la fois bien plus visibles quechez les concurrents de la droite française et bien moins légitimesque chez les homologues de la gauche européenne. Penser entermes de culture d’organisation suppose de travailler au croise-ment des normes et des pratiques. Deux accès à la culture partisanesont donc privilégiés : l’entrée par les rituels et par les praticiens.La première entrée s’appuie sur l’analyse des congrès et permet decomprendre les normes partisanes ; la seconde conduit à saisir lespratiques à travers ceux qui les mettent en œuvre, ceux que l’onpourrait qualifier de « professionnels de l’organisation ». L’analysede leurs trajectoires et de leurs systèmes de croyances, complétéepar un travail d’observation, conduit à comprendre la manièredont ils s’accommodent de ces normes. Au bout du compte, laforme d’occultation des enjeux organisationnels qui apparaîtproduit bien des effets sur les conceptions que les militants et lesdirigeants ont de leur parti. C’est aussi la définition d’une oligar-chie partisane cumulant pouvoir de décision politique et maîtrisetotale de l’organisation que l’on est conduit à interroger.

Le chapitre 5 se donne pour objectif de reconsidérer l’approcheorganisationnelle en militant pour les jeux d’échelle, c’est-à-dire

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18 Partis politiques et système partisan en France

pour l’appréhension d’un parti « par le bas », le local, et « par lehaut », le national. Dans le cas de l’UDF, « l’approche par le bas »permet de doter d’une consistance sociale la notion de notables, sisouvent mobilisée lorsque l’on parle du centre droit. Les notablesUDF ne se réduisent pas à leur mandat électoral, leur position localeest aussi tributaire de leur place dans des réseaux associatifs catho-liques. Ces derniers leur ont souvent fourni une matrice communede socialisation tout comme ils influent sur leurs modes de mobili-sation – distanciée et intermittente. « L’approche par le haut »permet de saisir la fragmentation, le mouvement ondulatoire et laplasticité de l’UDF, mais elle met également au jour une structured’emboîtement. Si l’UDF « tient », c’est moins par des mécanismesde coercition ou d’appareil que par des jeux croisés et plus subtils,alliant le contrôle et l’autocontrôle, la déstabilisation si nécessairedes équilibres locaux, et la déconnexion partielle des lignes deconduite et des modes de légitimité selon les sites partisans.

Avec l’UMP, c’est la question du pluralisme qui est traitée à partir ducadre proposé par Giovanni Sartori. Question fondatrice de touteréflexion sur le phénomène partisan, elle se trouve au cœur de l’analysehistorique de la droite partisane française, et s’inscrit au centre duprojet (et des difficultés) de l’UMP depuis 2002. Partir de GiovanniSartori suppose de prendre en compte à la fois le degré d’institutionna-lisation des tendances, leur consistance idéologique et leur éventuelengagement dans la compétition pour l’autorité partisane. À la lecturedu chapitre 6, il apparaît que le pluralisme intrapartisan de la droitefrançaise est loin de correspondre au modèle sartorien. Ce constatrenvoie d’abord au progressif abandon des instruments d’expressiondu pluralisme initialement prévus au profit de liens d’association plusopaques, mais il s’explique également par la difficile traduction de lastructuration idéologique dans la compétition interne. Toutefois, laformation de courants idéologiques (principalement les courants

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Extrait de la publication

INTRODUCTION 19

libéral, social et souverainiste) et l’expression de cristallisations idéolo-giques, d’ailleurs souvent rendues visibles en réaction aux prises deposition de la direction du parti, signalent que des formes de (re)struc-turation idéologique sont en cours qui peuvent redonner au cadrepartisan un rôle dans la fabrication des clivages.

L’analyse des idéologies partisanes est un domaine, longtempsclassique, aujourd’hui largement laissé en jachère. L’étude du FN acontribué à une forme de réinvestissement de ce sujet exacerbant unebataille taxinomique sur la qualification idéologique de cette organi-sation. Mais s’intéresser à l’idéologie partisane, c’est égalementtravailler sur la manière dont elle est produite, diffusée, utilisée, etenfin reçue. S’agissant des modes de production et de diffusion,l’exemple frontiste ouvre des pistes de réflexion sur la variété des liensqu’un parti noue avec le champ intellectuel. Entre une institutioncomme le Conseil scientifique du FN, tel qu’il est analysé dans lechapitre 7, et les groupes informels d’experts du PS, des investisse-ments et un système d’échanges évidemment très différents avec lemonde intellectuel sont repérables. De même, le développement au FNd’un système de formation interne, visant à la fois la diffusion doctri-nale et l’inculcation militante, conduit à s’interroger sur la manièredont les autres partis prennent en charge cette entreprise. De tellescomparaisons débouchent logiquement sur la question de l’éventuellespécificité du FN et sur sa particulière « intensité idéologique ». Àl’aune de la littérature frontiste, de l’effort qu’il déploie pour légitimerses positions et former ses adhérents, voire de la persistance de sesthèmes de mobilisation, le FN dénote une évidente « intensitéidéologique ». Mais intensité ne signifie pas cohérence, comme lesignale l’étude de l’univers idéologique des militants frontistes et desusages stratégiques de ses dirigeants.

La seconde partie déplace le regard des organisations, en tantque telles, vers le système partisan français, dans son ensemble.

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20 Partis politiques et système partisan en France

Toutefois, la même logique est suivie puisqu’il s’agit de présenter etde discuter trois manières d’analyser la transformation du systèmepartisan français.

L’approche cognitive, adoptée dans le chapitre 8, est centrée surles perceptions des électeurs et, plus précisément, sur leur utilisationd’un ensemble de repères et d’informations pour se situer, à moindrecoût, dans l’univers politique. Dans cette perspective, les partis cons-tituent des outils essentiels, même s’ils sont utilisés de manière parti-culière dans un système multipartisan et polarisé comme celui de laFrance. En effet, le lien partisan est généralement entendu comme lelien établi entre un électeur et son parti préféré. En réalité, les élec-teurs français sont confrontés non pas à un ou deux partis mais à unsystème, c’est-à-dire à un ensemble structuré de relations entre orga-nisations. Leur perception se fonde sur un éventail plus ou moinslarge de partis et conduit à une évaluation prenant en compte leurdistance relative. Chaque électeur peut se repérer en fonction d’unparti, dont il se sent particulièrement proche, ou inclure d’autrespartis, dont il est plus éloigné. Il peut aussi suivre une logique stric-tement négative et prendre position d’abord « contre » (le PCF a long-temps incarné ce parti repoussoir pour une partie de l’électorat,aujourd’hui le FN remplit ce rôle). Une telle analyse permet de relati-viser partiellement ou de nuancer l’idée d’une marginalisation despartis dans le mode de repérage des électeurs. Elle fournit égalementun argument de plus pour étayer la thèse selon laquelle la politisation– y compris non professionnelle – est autant affaire de rejet qued’adhésion, d’adversaires que de partenaires.

L’analyse néo-institutionnelle constitue une approche différentedu système des partis français et des organisations qui le composent.Elle est menée, dans le chapitre 9, à partir d’une mise à l’épreuve dela notion de « présidentialisation ». La présidentialisation du systèmefrançais et l’émergence de ce que l’on a pu appeler des « partis

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Extrait de la publication

INTRODUCTION 21

présidentiels » s’appuient sur une vision assez déterministe, celle del’institutionnalisme classique. En réalité, l’architecture institutionnelleest rarement monolithique et univoque : le néo-institutionnalisme sedonne justement pour objectif de saisir la complexité des logiques àl’œuvre. Dans le cas de la Cinquième République, cet objectif estd’autant plus pertinent que ces institutions reposent sur des principes– la présidentialisation et la responsabilité gouvernementale – etdonc des logiques généralement jugés contradictoires. Leur croise-ment conduit à un renforcement des partis au cœur du système poli-tique. Au-delà de la rhétorique et de la symbolique, loin d’être uneaffaire entre le peuple et une personnalité qui l’incarnerait, l’électionprésidentielle est une affaire de partis. Non seulement ceux-ci ontprogressivement établi un monopole dans la désignation des candi-dats mais, progressivement, la direction d’un parti a été considéréecomme une étape nécessaire, si ce n’est suffisante, dans la conquêteprésidentielle. Au terme de cette analyse, le système partisan françaisapparaît bien moins différent des autres systèmes européens. Lamédiatisation, la personnalisation et l’infléchissement idéologiquedes campagnes électorales n’y sont pas plus accentués, et l’influencedes partis n’y est pas plus faible.

Le chapitre 10 poursuit la réflexion sur l’impact des institutionssur le système partisan en s’intéressant aux règles électorales,entendues comme l’ensemble des lois qui ordonnent la compétitionélectorale, modes de scrutin bien sûr, mais aussi règles de finance-ment. À y regarder de plus près, il apparaît que les fluctuations – àcourt terme – et les transformations – à plus long terme – du systèmepartisan français ne sont pas toutes imputables au mode de scrutin.Plus précisément, s’agissant des élections législatives, les effets dumode de scrutin sont clairement perceptibles à l’échelle des circons-criptions législatives, où une forme de stabilité structurée autourd’une configuration reposant sur trois candidats dominants est

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