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GUERRE 19141918 – CUZION : le destin tragique des frères Brulé Monument aux morts de Cuzion

GUERRE 19141918 CUZION · fin de la guerre et est un des derniers morts de la guerre de son ... Leur père, Louis Achille a ainsi vu disparaître ses deux fils dans cette guerre meurtrière

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GUERRE 1914­1918 – CUZION :le destin tragique des frères Brulé

Monument aux morts de Cuzion

Une famille ordinaire

À la veille du déclenchement de la grande Guerre, la famille du boucher AchilleBrulé, à Cuzion, est une famille ordinaire. Le père, veuf, est boucher au centre dubourg ; il a 58 ans mais son fils aîné, Paul Louis, l'assiste et, peut­être, reprendra­t­ille commerce. La fille la plus âgée,Gabrielle, Estelle, est mariéedepuis 1907 avec Albans Viard, filsdu maréchal­ferrant.

Les deux autres enfants sont encorecélibataires, Marcel René n'a pasencore 22 ans, et effectue sonservice militaire. Il a été incorporé le10 octobre 1913 dans le 1er bataillonde chasseur à pied. Sa sœur Marie­Antoinette Alphonsine va sur ses24 ans.

Seule ombre au tableau, la mère,Virginie Estelle Sommier, estdécédée deux ans auparavant, en1912, à l'âge de 58 ans.

Avant l'été 1914, les rumeurs de guerre enflent.Le fils aîné, Paul Louis, qui fréquente une jeune couturière d'Éguzon, CharlotteFeuillade, décide de hâter les événements. Les deux amoureux se marient le 4 juin àÉguzon, en présence de l'oncle de la mariée, Alexis Bernard, qui est un notable,puisqu'il a été élu conseiller d'arrondissement.

acte de mariage de Louis Paul Brulé et Charlotte Feuillade en 1914 à Éguzon

Maison de la famille Brulé à Cuzion

La tourmenteJuillet 1914, le jeu des alliances conduit auxdéclarations de guerre entre Allemagne et Autrichecontre Russie et Serbie. En France, sinistre présage,Jean Jaurès est assassiné à Paris par le nationalisteRaoul Villain le 31 juillet. Le 1er août, à la suite de laréponse russe refusant d'arrêter sa mobilisation,l’Allemagne déclare la guerre à la Russie. En France,le gouvernement décrète la mobilisation générale cemême jour du 1er août, pour prendre effet le 2 août.Dans l'Indre, les moissons ont à peine commencédans beaucoup d'endroits. Le samedi à 16 h, c'estla fin de l'année scolaire car les vacances d'été sedéroulaient sur août et septembre.En fin d'après­midi, les mairies sont prévenuespar télégramme ou par les gendarmes de l'ordrede mobilisation, les cloches des églises sonnentle tocsin. Les garde­champêtres et les élus collentles affiches de mobilisation. Le dimanche matin,sur la place des villages, devant les églises et les mairies, les discussions sontanimées. Les hommes prennent leurs dispositions pour rejoindre dès le lundileur lieu de regroupement militaire : ceux des classes 1911­1912­1913 (entre 21et 23 ans) sont déjà au service militaire, ceux des classes 1900 à 1910 (âgés de24 à 34 ans) sont mobilisés immédiatement ; ceux des classes 1893 à 1899 (âgésde 35 à 41 ans) les rejoindront ensuite.Les Français sont plongés dans la grande tourmente de la 1ère Guerre mondiale

Le fascicule de mobilisation

Le décès de René (MarcelGeorges) Brulé

Le régiment de René débute sescampagnes en 1914, début août,en Alsace par la garde des colsdu Hantz et du Las ; mi­août,opérations d'Alsace : Saint­Blaise, La Chipotte, Schirmeck ;fin août, bataille de Sarrebourg :Saint­Quirin, Vallerysthal­Trois­Fontaines, Bréménil, Pexonne(26/08), La Chipotte (30/08 au04/09/14).En septembre, René avec sonrégiment est engagé dans lacampagne de Champagne :Sompuis, Cernon, Bussy­le­Château, moulin de Souain.René BRULÉ est blessé grièvement dans cettecampagne et décède le mercredi 16 septembre 1914des suites de ses blessures à l'ambulance n° 621ème CA, à Suippes (51600). Selon la mémoirefamiliale, il aurait eu les deux jambes coupées.Il est inhumé à une date inconnue dans la nécropolenationale "la Crouée" de Souain­Perthie­les Hurlus­Ossuaire N° 5.

René un des premiers jeunes gens tués à Cuzion

René est incorporé depuis presqu'un an au 1er bataillon dechasseur à pied dont le casernement en 1914 est àSenones, Saint­Dié et qui fait partie de la 43e divisiond'infanterie (21e corps d'armée).

Bataille de Sarrebourg

Bataille de Sompuis

Casernement du 1erbataillon de chasseurs à piedà Senones (Saint­Dié)

Les souffrances de Paul LouisBrulé

1914Paul Louis Brulé rejoint son lieu derassemblement dès le 3 août, sansdoute sans enthousiasme, car sonépouse Charlotte lui a appris qu'elleattendait un enfant.Il est mobilisé au 85e régimentd'infanterie dont le casernement en1914 est à Cosne et qui fait partie dela 16e Division d'infanterie (8e corpsd'armée).Il connaît déjà ce régiment puisqu'il ya fait son service militaire du 7octobre 1909 au 24 septembre 1911.Le régiment de Paul part en Lorrainedébut août : Domèvre, Blâmont puisbataille de Sarrebourg (20 août) : Lorquin, Xouaxange, La Maladrerie. Il y subit de lourdespertes : 1137 hommes sont mis hors de combat mais Paul échappe à ce début de guerremeurtrier.En septembre­octobre, toujours en Lorraine : La Mortagne, Mattexey (25/08), Clézentaine,Saint­Pierremont, bois du Feing (28/08), Xaffévillers (09/09), Domptail. Il participe à labataille de la Woëvre (septembre) : Doncourt, Saint­Hilaire­en­ Woëvre puis secteur deSaint­Mihiel (septembre à décembre) : bois d'Ailly, camp des Romains.

1915En 1915, il reste toute l'année dans le secteur de Saint­Mihiel : bois d'Ailly, Croix­Saint­Jean,La Tête à Vache, bois Brûlé, La Louvière.

Le 6 mars 1915,Charlotte, sonépouse, met aumonde une fille,Renée MarieLouise

1916En 1916, Paul participe à la bataille de Verdun (février) : ferme de Thiaumont, Haudramontpuis Woëvre (mars à juillet) : Combres, Ravin de la mort, Le Trottoir ; Verdun (juillet : laLauffée, secteur de Tavannes (juillet), sortie est du tunnel de Tavannes puis les Éparges(août). En décembre, il est engagé dans la bataille de la Somme : Proyart, Berny­en­Santerre.

1917Au printemps 1917, il participe à la bataille de la Marne : offensive du 16 avril, Mont Cornillet,Bois de la Grille, cote 142, tranchée de Whan puis Woëvre (mai­juin) : Mouilly. Durant le moisd'avril, le régiment a perdu la moitié de ses effectifs. En juin 1917, le ras­le­bol monte dansbeaucoup d'unités, le régiment connaît des actes d'indiscipline collective.Commence alors à partir de juillet la participation du régiment à la bataille de Champagne.

Caserne Billot du 85e R.I. à Cosne­sur­Allier

Ironie du sort, cinq jours après sa mort, le 12 octobre 1918, vientau monde son deuxième enfant, un fils, Jean Brulé.La mort de Paul est, semble­t­il, annoncée à Cuzion avec quelquesjours de décalage, après la naissance de son fils.Cette annonce, selon la mémoire familiale, a été terrible, Les cheveuxde sa femme auraient blanchi d'un coup. Pour son père, mêmedouleur : en apprenant cette mort, il serait tombé de l'échelle dugrenier et se serait cassé l'épaule.Enfin, toujours selon ces sources familiales, "Quand on a sonné songlas, on a aussi sonné l'armistice". Est­ce complètement exact ? Peuimporte, cela traduit simplement la profondeur de la douleur ressentipar une famille.

1918En fin d'année 1917, Paul est blessé et est hospitalisé à l'hôpital de Villers Daucourt(Marne) du 8 décembre 1917 au 1er janvier 1918 à cause d'une « blessure étendue del'avant­bras gauche ».Il bénéficie alors sans doute en janvier d'une courte permission pour voir son épouse.Charlotte tombe enceinte et attend un deuxième enfant pour octobre 1918.

Jusqu'en juillet 1918, le régiment continue de participer à la bataille de la Champagne :Ville­sur­Tourbe, Maisons de Champagne, ravin des Noyers, Main de Massiges.Puis de juillet à septembre, c'est de nouveau la bataille de la Marne : Rosnay (débutaoût), plateau des Limons, Courcelles, Sapicourt, Saint­Thierry (30/09), Loivre, route 44,Orainville, Pont­Givard (début octobre).

Paul Louis Brulé est hospitalisé et décède le lundi 7 octobre1918 de « maladie contractée en service » (grippe espagnole?), à l'âge de 30 ans, à l'ambulance 5/5 à l'Hôpital AUBAN, àÉpernay (51200).Il est inhumé à une date inconnue à Épernay (51200) dans laNécropole nationale "LA FERME DE SUIPPES", carré 14818à EPERNAY, tombe individuelle n° 210.

Deuxorphelins !

Louis Achille Brulé

Louis Paul Brulé est donc décédé, le 7 octobre 1918, un mois avant lafin de la guerre et est un des derniers morts de la guerre de sonvillage... Il laisse une veuve avec deux enfants en bas­âge.Son frère René Marcel est décédé le 16 septembre 1914, un peu plusd'un mois après le déclenchement de la guerre et il était une despremières victimes du conflit à Cuzion...Leur père, Louis Achille a ainsi vu disparaître ses deux fils danscette guerre meurtrière. Seules les deux filles ont survécu à leursfrères...

Pour compensation de la perte de son premier fils etde cette douleur, le père, Achille Louis Brulé, reçut unan après la mort de celui­ci, le 16 septembre 1915 unsecours exceptionnel de 150 F.Il reçut en 1920 la médaille militaire décernée à titreposthume à son fils Marcel (suivant la lettre du31/12/1920 du Chef de bataillon, commandant le 1erbataillon de chasseurs à pied à Kissembourg), cela nele consolera pas de cette perte cruelle.

Une famille éprouvée...

Les noms des deux frères Brulé figurent sur lemonument aux morts de Cuzion. Celui de PaulLouis est porté également sur le monumentd'Éguzon, son lieu de résidence.Sur ce dernier, œuvre du sculpteur ErnestNivet, le soldat regarde, accablé, la liste de sescamarades tués au combat, tandis qu'au verso,le vers d'Horace, « Bella matribus detestata »(« la guerre détestée des mères ») évoque ladouleur des familles.

Fiche matricule Marcel Georges René Brulé - AD36 FRAD036_R_2463_1912_FM_0811

Fiche matricule Louis Paul Brulé - AD36 FRAD036_R_2429_1908_FM_0302

On voit ainsi au 75 e RI, lequel devait marcher dans la nuit du 7 au 8 juin, une « certaineeffervescence » se produire vers 21 h dans les creutes (sorte de cavernes) où il est stationné,laquelle s’amplifie entre 22h et 23h lorsque les sous­officiers et officiers en prennentconscience et tentent d’agir : « nous sommes entrés et nous avons crié : la 3 e Cie, en tenue,à ce moment les lumières se sont éteintes et le vacarme a commencé, je n’ai pu distinguerpersonne ». Dans cette unité, où un caporal sera exécuté pour ces faits, tout rentreprogressivement dans le calme vers deux heures du matin. La turbulente mutinerie du 85eRI, au cours de laquelle des coups de feu sont tirés, ne dure elle aussi qu’une nuit, de21h à trois heures du matin environ.

Il faut toutefois noter que cette volonté de « faire nombre » peut aller jusqu’à la violence,lorsque des mutins frappent ou menacent de leurs armes les soldats qui voudraient sedésolidariser du mouvement, comme au 85 e RI : « Ils m’ont menacé, si je continuais [àvouloir partir], de me faire subir le sort d’un autre, dont je ne me rappelle pas le nom, qu’ilsm’ont dit avoir frappé. J’ai vu du reste à ce moment­là que les issues étaient gardées et qu’ilm’était impossible de ressortir. »

Source : Dossier Chauveau, Justice militaire de la 27 e DI, Déposition du soldat Chevrolat,13 juin 1917, SHD 11J1080 ­ (Improviser l’indiscipline : stratégies, contraintes et craintes desmutins de 1917 par André Loez Doctorant, Université Montpellier­III – Lycée Georges Braque,Argenteuil Membre du CRID 14­18 ­ http://crid1418.org/doc/textes/improviser_mutins.pdf )

Les troubles de l'année 1917

Annexes...

Livret réalisé par Daniel Durand – 21/10/2014 ­ reproduction autorisée (licenseCC­BY­NC­ND).Sources : archives personnelles + Archives départementales Indre (fiches

matricules et état­civil – photos sites internet sur la guerre de 1914­1918

Arbre généalogique des Brulé

Sur la dernière page, vous trouverez un arbre généalogique autour d'Estelle Brulé, mariéeà Albans Viard, et soeur de Marcel René et Louis Paul qui permettra aux plus jeunes deresituer les frères Brulé dans l'arbre familial.

Graphe des relations familiales de : BRULÉ, Marie Gabrielle Estelle

BRULÉ, Jean Naissance : 22 février 1828 àMéobecq, 36118, Fra,la CroixBlanche Décès : 29 décembre 1883 àSaint-Gilles, 36196,Fra,Abloux

DEGUERCY, MargueriteNaissance : 14 avril 1832à Luzeret, 36106, Fra Décès : 6 mai 1875 àLuzeret, 36106, Fra

SOMMIER, Eusice Naissance : 8 novembre 1826à Selles-sur-Cher, 41242, Fra,Champcol Décès : 4 mai 1899 à Orléans,45234, Fra

DEBOURGES, Marie Rose Naissance : 31 janvier 1824 àFresselines, 23087, Fra Décès : 24 novembre 1868 àFresselines, 23087, Fra, laChaise-Gonnot

Union : 25 septembre 1855 à Luzeret, 36106, Fra avecDEGUERCY, Marguerite,

Union : 14 mars 1853 à Fresselines, 23087, Fra avecDEBOURGES, Marie Rose, Union : 20 septembre 1869 à

Fresselines, 23087, Fra avec PERRIN, Sylvaine,

BRULÉ, Louis Achille Naissance : 12 août1856 à Luzeret, 36106,Fra,bourg Décès : 20 mars 1932 àCuzion, 36062, Fra

SOMMIER, Virginie Estelle Naissance : 29 avril 1854Décès : 5 juillet 1912 àCuzion, 36062, Fra

Union : 6 novembre 1884 à Cuzion, 36062, Fra avecSOMMIER, Virginie Estelle,

Frères et soeurs de BRULÉ, Marie Gabrielle Estelle :BRULÉ, Marie Gabrielle Estelle, o : 5 janvier 1887 à

Cuzion, 36062, Fra, + : 27 janvier 1942 à Cuzion,36062, Fra - Union : 21 janvier 1907 à Cuzion, 36062,Fra avec VIARD, Albans Bruno,

BRULÉ, Louis PAUL, o : 1 juin 1888 à Cuzion,36062, Fra, + : 7 octobre 1918 à Épernay, 51230, Fra -Union : 2 juin 1914 à Éguzon-Chantôme, 36070, Fraavec FEUILLADE, Charlotte,

BRULÉ, Marie Antoinette Alphonsine, o : 12 juin1890 à Cuzion, 36062, Fra, + : août 1943 à - Union :12 janvier 1920 à Cuzion, 36062, Fra avec MOULIN,Sylvain Louis Henri,

BRULÉ, Marcel Georges RENÉ, o : 9 novembre1892 à Cuzion, 36062, Fra, + : 16 septembre 1914 àSuippes, 51559, Fra -

BRULÉ, Marie GabrielleEstelle,o 5 janvier 1887 à Cuzion,36062, Fra + 27 janvier 1942à Cuzion,36062, Fra

Mariage : le 21 janvier 1907 a Cuzion, 36062, Fra ; Conjoint: VIARD, Albans Bruno, (o 6 octobre 1881 à Cuzion, 36062,Fra - + 14 novembre 1948 à Roanne, 42187, Fra) Enfants :

VIARD, Renée Marie Estelle . (o 7 février 1908 à Cuzion,36062, Fra) - (+ 12 mai 1983 à Roanne, 42187, Fra) - Union :11 juillet 1931 à Riorges, 42184, Fra avec DELAFONT, JeanLouis,

VIARD, Camille Louis . (o 5 septembre 1909 à Cuzion,36062, Fra) - (+ 3 avril 1979 à Saint-Jean Saint-Maurice/Loire,42239, Fra) - Union : 26 septembre 1931 à Roanne, 42187,Fra avec LEVITRE, Raymonde,Union : 25 avril 1942 à Riorges, 42184, Fra avec FORET,Jeanne,

VIARD, Suzanne . (o 29 juillet 1911 à Cuzion, 36062, Fra)- (+ 9 novembre 2003 à Éguzon-Chantôme, 36070, Fra) -Union : 23 février 1933 à Roanne, 42187, Fra avec MELLET,Marcel Louis Georges,

VIARD, Andrée Marie . (o 28 février 1914 à Cuzion,36062, Fra) - (+ 25 novembre 1979 à Lyon, 69380, Fra) -Union : 8 janvier 1938 à Roanne, 42187, Fra avec DURAND,Antonin,