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La Pensée (Paris) Source gallica.bnf.fr / La Pensée

HILL, Christopher. Pensée

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artigo de Christopher Hill na revista pensée.

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  • La Pense (Paris)

    Source gallica.bnf.fr / La Pense

  • Centre d'tudes et de recherches marxistes (France). La Pense (Paris). 1939.

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  • LA PENSESOMMAIRE

    DU NUMERO a8 (JANVIER-FEVRIER ig5o).KARL MARX :

    Descartes et les sources du matrialisme franais 3Paul LABRENNE ;

    Une discussion sur l'astronomie en U.R.S.S 8I. PROKOFIEVA :S^ Confrence sur les questions idologiques de l'astronomie xoGeorges COGNIOT :

    O va la science sovitique ? aiHenri CLAUDE :

    La dvaluation de la livre 33Prosper ALFARIC :

    Le dcret anticommuniste du Saint-Office. II 4*Christopher HILL :

    L'oeuvre des historiens marxistes anglais sur l'histoire britannique du xvr3 etdu xviie sicles-

    5iSamuel BERNSTEIN :

    De l'utopisme au marxisme 63Charles PARAIN :

    Comment on fraude l'histoire. La Fronde parlementaire 71CHRONIQUE PDAGOGIQUE:

    Pour une lutte organise contre les mensonges des manuels, parRoger GARAUDY ." 81

    ^CHRONIQUE CONOMIQUE,par Jean BABY et Ren CREUSSOL. 85CHRONIQUE HISTORIQUE, par Jeanne GAILLARD g5CHRONIQUE PHILOSOPHIQUE :

    ,Rcentes traductions de Georges Lukacs, par Marc SORIANO 99CHRONIQUE POTIQUE :

    Les collections Pierre Seghers, par Jacques GAUCHERON io4CHRONIQUE D'HISTOIRE LITTRAIRE :

    Corneille et Pascal, par Pol GAILLARD 109CHRONIQUE ARTISTIQUE :

    Rflexions d'un vieil artiste, par Francis JOURDAIN '. n5DOCUMENTS :

    I.

    Premiers contacts avec la jeune Rpublique dmocratique allemande,par Jacques NICOLLE. ia3

    II.

    Un tmoignage sur le tratre Rajk, par Jeanne GAILLARD 12SLES REVUES :

    Par H.W., Maxime RODINSON, Ernest KAHANE et Jean DRESCH i3iLES LIVRES :

    Par Ren-Louis REY, Sylvain MOLINIER, Pierre-Bernard MARQUET, Jean DRESGHet Marcelle BARJONET i4x

    NOTES BIBLIOGRAPHIQUES :Par E. SCHATZMAN, E. KAHANE, S. MOLINIER, P. et J. GAILLARD, P. ALFARIC et

    R. MAUBLANC i53QUELQUES LIVRES RCENTS i5g

  • NOTE DE LA REDACTION

    Il est indispensable que notre revue dveloppe au cours de l'anne quicommence son influence et son rayonnement. Malgr la trs lgre augmentationdes prix du numro et de l'abonnement, la Pense reste incontestablement lamoins coteuse des revues, sous le rapport du format et du nombre des pages

    sans parler de la richesse de son contenu. C'est pourquoi nous adressons un pressantappel tous nos abonns et tous nos lecteurs pour qu'ils fassent connatre laPense tous ceux qui l'ignorent encore. Un bon moyen est cet gard de Zeuivmontrer un numro ancien, un numro de 1946 ou 1947 : on sera frapp de voircombien est durable l'intrt des articles qui y sont contenus, et mme combiencertains d'entre eux apparaissent plus justes, plus lucides, plus convaincants avecquelque recul. Pour poursuivre celte oeuvre, nous avons besoin de faire toujoursde nouveaux abonns en France et l'tranger : nous comptons fermement surtous UGS amis pour nous y aider.

    Dans nos prochains numros, nous donnerons une srie d'articles sur deuxgrands anniversairesqui tombent en 1950 : le tricentenaire de la mort de Descartes,le bicentenaire de la publication de VEncyclopdie; deux dates essentielles dansl'histoire du rationalisme franais.

    Nous pouvons annoncer aussi un article de Marcel Prenant sur Buffon, ainsique de nouveaux fragments de la Dialectique de la nature de Friedrich Engels.

    Au moment o les preuves du prsent numro sont envoyes l'imprimeriepour la mise en pages, les milieux universitaires et l'opinion dmocratique sonttlvement mus de l'inqualifiable chantage exerc par le minisire de l'Educationnationale sur trois hauts fonctionnaires de son administration, dont l'un, GeorgesTeissier, est membre du Comit directeur de la Pense. Il s'agit, sous menace dervocation, de les forcer quitter la prsidence d'honneur de l'Union franaiseuniversitaire, groupement n de la Rsistance et fidle l'esprit de la -Rsistance,sous prtexte que l'U.F.U. a pris nettement position contre la politique abjectede provocation mene par le gouvernement contre les dmocraties populaires, etspcialement contre la Rpublique de Pologne. Les menaces ministriellesprouvent quel) point le gouvernement que nous subissons actuellement trahit la foisl'intrt de la France, l'intrt de la paix, la libert de l'esprit et la vritabledmocratie.

    Nous reviendrons bien entendu dans notre prochain numro sur cette graveaffaire.

  • DESCARTESet les Sources du Matrialisme Franais

    par Karl MARX

    Descartes est mort Stockholm le 11 fvrier 1650. La Pense publiera dansses prochains numros plusieurs articles l'occasion de cet anniversaire. Maisds prsent nous avons tenu reproduire ici le dveloppement clbre consacraux origines du matrialisme franais, issu pour une part de Descartes, tel qu'onle trouve au chapitre VI, paragraphe III de la Sainte-Famille, chapitre rdig parKarl Marx. Etant donn les lacunes et les erreurs de la version Molitor (ditionCostes, 1927), nous en donnons une traduction nouvelle. Les trs nombreusesitaliques sont dans le texte original.

    ...Dans sa physique, Descartes avait prt la matire une force cratricespontane et conu le mouvement mcanique comme son acte vital. Il avaitcompltementspar sa physique de sa mtaphysique. A l'intrieur de sa physique,la matire est l'unique substance, la raison unique de l'tre et de la connais-sance.

    Le matrialisme mcanique franais s'est attach la physique de Des-cartes, par opposition sa mtaphysique. Ses disciples ont t antimtaphysiciensde profession, c'est--dire physiciens.

    Cette cole commence avec le mdecin Leroy, atteint son apoge avec le m-decin Cabanis, et c'est le mdecin Lamettrie qui en.est le centre. Descartes vivaitencore quand Leroy transposa l'me humaine,

    tout comme Lamettrie auxvin0 sicle,

    la construction cartsienne de Vanimal, dclarant que l'me n'taitqu'un mode du corps et les ides des mouvements mcaniques. Leroy croyait mmeque Descartes avait dissimul son opinion relle. Descartes protesta. A la fin duxvin6 sicle, Cabanis mit la dernire main au matrialisme cartsien dans sonouvrage : Rapports du physique et du moral de l'homme.

    Le matrialisme cartsien existe encore aujourd'hui en France. Il enregistreses grands succs dans la science mcanique de la nature, qui [...], moins quetoute autre science, est expose au reproche de romantisme.

    Ds sa premire heure, la mtaphysique du xvne sicle, reprsente, pour laFrance, surtout par Descartes, a eu comme antagoniste le matrialisme. Des-cartes le rencontra personnellement en Gassendi, le restaurateur du matrialismepicurien. Le matrialisme franais et anglais est demeur toujours en un rapporttroit avec Dmocrite et Epicure. La mtaphysique cartsienne a eu un autre con-tradicteur en la personne du matrialiste anglais Hohbes. C'est longtemps aprsleur mort que Gassendi et Hobbes ont triomph de leur adversaire, au momentmme o celui-ci rgnait comme puissance officielle dans toutes les colesfranaises.

    Voltaire fait observer que l'indiffrence des Franais-du xvni0 sicle l'garddes querellesdes Jsuites et des Jansnistesavait sa cause moins dans la philosophie

  • AKARL MARX

    que dans les spculations de Law. La chute de la mtaphysique du xvnr* siclene peut donc s'expliquer par la thorie matrialiste du XVIII0 sicle qu'autantqu'on explique ce mouvement thorique lui-mme par les conjonctures pra-tiques de la vie franaise en ce temps. Cette vie avait pour objectif le prsentimmdiat, la jouissance temporelle et les intrts temporels, en un mot le mondeterrestre. A sa pratique antithologique, antimtaphysique, matrialiste devaientcorrespondre des thories antithologiques, antimtaphysiques, matrialistes. C'estpratiquement que la mtaphysique avait perdu tout crdit. Notre tche se borneici indiquer brivement l'volution thorique.

    La mtaphysique du xvn sicle (qu'on pense Descartes, Leibniz, etc.)tait encore mlange d'une substance positive, profane. Elle faisait des dcou-vertes en mathmatiques, en physique et dans d'autres sciences dtermines, quiparaissaient de son ressort. Mais, ds le dbut du XVIII6 sicle, cette apparence s'taitvanouie. Les sciences positives s'taient spares de la mtaphysique et avaienttrac leurs sphres propres. Toute la richesse mtaphysique se trou-vait rduite aux tres de raison et aux choses clestes, juste au moment o lestres rels et les choses terrestres absorbaient tout l'intrt. La mtaphysiques'tait affadie. C'est l'anne mme o moururent les derniers grands mtaphy-siciens franais du xvn" sicle, Malebranche et Arnaud, que naquirent Helvtiuset Condillac.

    L'homme qui, thoriquement, fit perdre leur crdit la mtaphysique duxviie sicle et 8toute mtaphysique, fut Pierre Bayle. Son arme tait le scepti-cisme, forg l'aide des formules magiques de la mtaphysique elle-mme. Il apris lui-mme son point de dpart dans la mtaphysique cartsienne. C'est encombattant la thologie spculative que Feuerbach a t amen combattre laphilosophie spculative, prcisment parce qu'il reconnaissait dans la spcula-tion le dernier appui de la thologie et qu'il lui fallait forcer les thologiens renoncer leur pseudo-science pour en venir la foi grossire et rpugnante ; etc'est pareillement parce qu'il prouvait des doutes religieux que Bayle s'est mis douter de la mtaphysique qui tayait cette foi. Il a donc soumis la mtaphysique la critique, dans toute son volution historique. Il s'en est fait l'historien, pourcrire l'histoire de son trpas. Il a rfut surtout Spinoza et Leibniz.

    Pierre Bayle, en dcomposant la mtaphysique par le scepticisme, a faitmieux que de prparer au matrialisme et la philosophie du bon sens leuradoption en France. Il a annonc la socit athe qui devait bientt s'tablir endmontrant qu'une socit de purs athes pouvait exister, qu'un athe pouvaittre honnte homme, que l'homme se ravalait non par l'athisme, mais par lasuperstition et l'idoltrie.

    -Pour reprendre l'expression d'un auteur franais, Pierre Bayle a t ledernier des mtaphysiciens au sens du xvn, et le premier des philosophes au sensdu xvni" sicle .A ct de la rfutation ngative de la thologie et de la mtaphysique du

    xvne sicle, il fallait un systme antimtaphysique positif. On avait besoin d'unlivre qui mt en systme la pratique sociale du temps et lui donnt un fondementthorique. L'ouvrage de Locke Essai sur l'entendement humain vint comme point nomm de l'autre ct de la Manche. Il fut accueilli avec enthousiasme, telun hte impatiemment attendu.

    On peut poser la question : Locke ne serait-il pas d'aventure un disciple deSpinoza ? L'histoire [....] rpondra :Le matrialisme est le produit indigne de la Grande-Bretagne. Dj son sco-lastique Duns Scot s'tait demand si la matire ne pouvait pas penser .

  • DESCARTES ET LES SOURCES DU MATERIALISME FRANAIS 5Pour oprer ce miracle, il eut recours la toute-puissance de Dieu ; autrement

    dit, il fora la thologie elle-mme prcher le matrialisme. Il tait de sur-crot nominaliste. Le nominalisme se trouve comme lment principal chezles matrialistes anglais, et il constitue d'une faon gnrale la premire expres-sion du matrialisme.

    Le vritable anctre du matrialisme anglais et de toute science exprimen-.taie moderne, c'est Bacon. Les sciences de la nature constituent ses yeux lavraie science, et la physique concrte en est la partie la plus notable. Il se rfresouvent Anaxagore et ses homoiomries, ainsi qu' Dmocrite et ses atomes.D'aprs sa doctrine, les sens sont infaillibles et la source de toutes les con-naissances. La science' est science d'exprience et consiste dans l'applicationd'une mthode rationnelle au donn sensible. Induction, analyse, comparaison,observation, exprimentation, telles sont les conditions principales de la matire ;le mouvement est la premire et la plus minente, non seulement en tant quemouvement mcanique et mathmatique, mais plus encore comme instinct,esprit vital, force expansive, tourment (pour employer l'expressionde Jacob Boehme) de la matire. Les formes primitives de la matire sont desforces naturelles vivantes, individualisantes, inhrentes elle, et ce sont ellesqui produisent les diffrences spcifiques.

    Chez Bacon, son premier crateur, le matrialisme cache encore, de navefaon, les germes de son dveloppement universel. La matire rit l'hommetout entier dans l'clat de sa potique matrialit. Mais la doctrine aphoristiqueelle-mme fourmille encore d'inconsquences thologiques.

    Dans la suite de son volution, le matrialisme devient exclusif. C'est Hobbesqui systmatise le matrialisme de Bacon. La matrialit perd sa fleur et devientla matrialit abstraite du gomtre. Le mouvement physique est sacrifi aumouvement mcanique ou mathmatique ; la gomtrie est proclame scienceprincipale. Le matrialisme se fait misanthrope. Pour pouvoir battre sur sonpropre terrain l'esprit misanthrope et dsincarn, le matrialisme est forc demortifier lui-mme sa chair et de devenir ascte. Il se prsente comme un trede raison, mais dveloppe aussi bien la logique inexorable de la raison.

    Partant de Bacon, .Hobbes procde la dmonstration suivante : Si la ma-trialit fournit aux hommes toutes leurs connaissances, il en rsulte que l'intui-tion, l'ide, la reprsentation, etc., ne sont que les fantmes du monde matrielplus ou moins dpouill de sa forme sensible. Tout ce que la science peut faire,c'est de donner un nom ces fantmes. Un seul et mme nom peut tre appliqu plusieurs fantmes. Il peut mme y avoir des noms de noms. Mais il seraitcontradictoire d'affirmer d'une part que toutes les ides ont leur origine dansle monde matriel et de soutenir d'autre part qu'un mot est plus qu'un mot etqu'en dehors des tres reprsents, toujours individuels, il existe encore destres gnraux. Une substance immatrielle est, au contraire, tout aussi contradic-toire qu'un corps immatriel. Corps, tre, substance, tout cela est une seule etmme ide relle. On ne peut sparer l'ide d'une matire qui pense. Elle estle sujet de tous les changements. Le mot infini n'a pas de sens, moins designifier la capacit de notre esprit d'ajouter sans fin. C'est parce que la mat-rialit seule peut faire l'objet de la perception et du savoir que nous ne savonsrien de l'existence de Dieu. Seule ma propre existence est certaine. Toute pas-sion humaine est un mouvement mcanique, qui finit ou commence. Les objetsdes instincts, c'est le- bien. L'homme est soumis aux mmes lois que lanature. Puissance et libert sont identiques.

    Hobbes avait systmatis Bacon, mais sans avoir tabli sur des raisons

  • 6. KARL MARX

    prcises son principe fondamental, aux termes duquel les connaissances et lesides ont leur origine dans le monde matriel. C'est Locke qui, dans son Essaisur l'entendement humain, a donn les raisons du principe de Bacon et deHobbes.

    De mme que Hobbes anantissait les prjugs thistes du matrialisme baco-nien, de mme Collins, Dodwell, Coward, Hartley, Priestley, etc., firent^tomberla dernire barrire thologique du sensualismede Locke. Pour le matrialistetoutau moins, le thisme n'est que le moyen commode et indolent de se dbarrasserde la religion.

    Nous avons dj fait remarquer combien l'ouvrage de Locke vint pointpour les Franais. Locke avait fond la philosophie du bon sens 1, c'est-l-diredclar par une voie dtourne qu'il n'existait pas de philosophes distincts dessens humains normaux et de l'entendement fond sur eux.

    Le disciple direct et l'interprte franais de Locke, Condillac, dirigea aussittle sensualismede Locke contre la mtaphysique du xvne sicle. Il dmontra queles Franais avaient bon droit rejet cette mtaphysique comme une simplelucubration de l'imagination et des prjugs thologiques. Il fit paratre unerfutation des systmes de Descartes, Spinoza, Leibniz et Maiebranche.

    Dans son ouvrage Essai sur l'origine des connaissances humaines, il dve-loppa les ides de Locke et dmontra que non seulement l'me, mais encore lessens, non seulement l'art de former des ides, mais encore l'art de la percep-tion sensible sont affaire d'exprience et d'habitude. C'est de l'ducation et descirconstances extrieures que dpend donc tout le dveloppement de l'homme.Condillac n'a t supplant dans les coles franaises que par la philosophieclectique.

    La diffrence entre le matrialisme franais et le matrialisme anglais, c'est ladiffrence des deux nationalits. Les Franais ont donn au matrialisme anglaisl'esprit, la chair et le sang, l'loquence. Ils le dotent du temprament qui luimanquait et de la grce. Ils le civilisent.

    C'est chez Helvtius, qui procde pareillement de Locke, que le matrialismeprend son caractre spcifiquement franais. Helvtius le conoit d'emble parrapport la vie sociale (Helvtius : De l'homme). Les aptitudes sensibles etl'amour-propre, la jouissance et l'intrt personnel bien compris sont les fonde-ments de toute morale. L'galit naturelle des intelligences humaines, l'unitentre le progrs de la raison et le progrs de l'industrie, la bont naturelle del'homme, la toute-puissance de l'ducation, voij les facteurs principaux de sonsystme.

    Les crits de Lamettrie nous donnent une combinaison du matrialisme car-tsien et du matrialisme anglais. Il utilise jusque dans le dtail la physique deDescartes. Son homme-machine est calqu sur Vanimal-machine de Descartes.Dans le Systme de la nature d'Holbach, la partie physique est galement unamalgame des matrialismes anglais et franais, tout comme la partie morale estfonde essentiellement sur la morale d'Helvtius. Le matrialiste franais qui serattache encore le plus souvent la mtaphysique et reoit, pour cela mme, lesloges de Hegel, Robinet (De la nature) se rfre expressment Leibniz.

    Nous n'avons pas parler de Volney, de Dupuis, de Diderot, etc.,.pas plusque des physiocrates, maintenant que nous avons dmontr la double origine du

    i. En franais dans le texte.

  • DESCARTES ET LES SOURCES DU MATERIALISME FRANAIS 7matrialisme franais issu de la physique de Descartes et du matrialisme anglais,ainsi que l'opposition du matrialisme franais la mtaphysiquedu xvn sicle, la mtsphiysigu de Descartes, Spinoza, Mabranche et Le'to-iz. Cette opposi-tion ne pouvait apparatre aux Allemands que depuis qu'ils sont eux-mmes enopposition l la mtaphysique spculative.

    De mme que le matrialisme cartsien a son aboutissement dans la sciencede la nature proprement dite, l'autre tendance du matrialisme franais dbouchedirectement sur le socialisme et le communisme.

    Quand on tudie les enseignements du matrialisme sr la bont originelleet les dons intellectuels gaux des hommes, sur la toute-puissance de l'exprience,de l'habitude,, de l'ducation, sur l'influence ds circonstances extrieures surl'homme, sur la haute importance de l'industrie, sur la lgitimit de la jouis-sance, etc., il n'est pas besoin d'une grande sagacit pour dcouvrir ce qui lerattache ncessairement au communismeet au socialisme. Si l'homme se constitutoute connaissance, perception, etc., dans le monde sensible et dans l'exprienceau sein du monde sensible, ce qui importe donc, c'est d'organiser le mondempirique de telle faon que l'homme y fasse l'exprience et y prenne l'habitudede ce qui est vritablement humain, qu'il s'prouve en qualit d'homme. Sil'intrt bien compris est le principe de toute morale, ce qui importe, c'est quel'intrt particulier de l'homtme se confonde avec l'intrt humain. Si l'hommeest non libre dans le sens matrialiste du mot, c'est--dire s'il est libre non parla forc ngative d'viter ceci ou cela, mais par la force positive de faire valoir savraie individualit, il ne faut chtier le crime dans l'individu, niais dtruire lesfoyers antisociaux du crime et donner chacun l'espace social ncessaire pour ledploiement essentiel de son tre. Si l'homme est form par les circonstances, ilfaut former les circonstances humainement. Si l'homme est, par nature, sociable,il ne dveloppe sa vraie nature que dans la socit, et la force de sa nature doitse- mesurer non par la force de l'individu particulier, mais par la force de lasocit.

    Ces thses, et d'autres analogues, se rencontrent presque textuellement mmechez les plus anciens matrialistes franais. Ce n'est pas le lieu de les discuter.Nous pouvons caractriser la tendance socialiste du matrialisme par l'apologiedu vice, de Mandeville, un disciple anglais assez ancien de Locke. Mandevilledmontre que les vices sont indispensables et utiles dans la soeit actuelle. Etcela ne Constitue pas une apologie de la socit actuelle.

    Fourier procde directement de la doctrine des matrialistes franais. LesBabouvisies taient des matrialistes grossiers, incultes, mais mme le commu-nisme dvelopp date directement du matrialismefranais. S'ous la forme qu'Hel-vtius lui a donne, celui-ci regagne, en effet, sa mre-patrie, l'Angleterre. Beii-iham fonde son systme de l'intrt bien compris sur la morale d'Helvtius, demme que Owen fonde le communisme anglais en partant du systme de Bentham.Exil en Angleterre, le Franais Cbet y est stimul par les ides communistes ducr et revient en France pour y devenir le reprsentant le plus populaire, quoiquele plus superficiel, du communisme. Les communistes franais plus scientifiques,iDezamy, Gay, etc., dveloppent, comme Owen, la doctrine- du matrialisme entant que doctrine de l'humanisme rel et base logiqie du- eomttnmaisme.

  • UNE DISCUSSION SUR 1/ASTRONOMIE

    EN U. R. S. S.par Paul LABRENNE

    Les savants et les philosophes sovitiques mnent actuellement dans tous lesdomaines de la science une lutte impitoyable contre les dviations idalistes.

    On connat surtout ce combat, hors des frontires de l'U.R.S.S., par la grandecontroverse qui a mis rcemment aux prises les gnticiens dits classiques etles partisans de Mitchourine et de Lyssenko. On connat moins bien, par contre,les discussions relatives aux autres grands problmes scientifiques.

    Pour combler en partie cette lacune, la Pense publie aujourd'hui la traductionintgrale d'un important article de N. Prokofieva paru en 1949 dans la grande revuescientifique sovitique Priroda 1 sur les problmes thoriques relatifs l'astro-nomie, en gnral, et plus spcialement, la cosmologie et la cosmogonie, ta structure de l'univers et son volution.

    Sans avoir l'importance pratique du dbat rcent consacr la biologie, cettediscussion, qui n'est d'ailleurs pas compltement acheve, n'en est pas moinsessentielle du point de vue du matrialisme dialectique.

    Les idalistes ont trouv en astronomie un terrain favorable leurs eritre-prises_ dans certaines thories relativistes contre lesquelles s'lvent les savantssovitiques. Non qu'il soit question pour eux de mettre en doute la valeur desdcouvertes gniales d'Einstein en ce qui concerne l'essentiel des thories rela-tivistes 2 ; mais les tentatives d'Einstein et de ses disciples pour donner une inter-prtation de l'univers considr comme un tout, ont trop souvent conduit un dveloppement hypertrophique du formalisme mathmatique et ont abouti,en fait, une srie de difficults ou de contradictions que les fidistes et autresennemis du matrialisme ont aussitt mises profit.

    Dj en 1920, M. Emile Borel, dans sa prface la traduction de la Thoriede l,a Relativit, faisait une distinction trs nette entre les grandes lois dcouvertespar Einstein et les considrations cosmologiques du grand physicien, qui luiinspiraient de srieuses rserves :

    Il me semble, en effet, crivaib,il, que. s'il existait des tres aussi petits par rapport unegoutte d'eau que nous le sommes par rapport, la Voie Lacte, il serait prsomptueux de leur partde prtendre dduire des observations faites l'intrieur de la goutte d'eau les proprits du globeterrestre, de ses minraux, animaux et vgtaux 3.

    Mais l'ivresse des formules a fait perdre toute prudence aux mathmaticiensastronomes. Le succs remport par les thories expansionnistes et crationnistesdu chanoine Lematfe auprs de nombreux savants rationalistes en Francemme, en est une preuve.

    N'est-il pas tonnant, par exemple, de voir un astronome aussi minent etun aussi ardent dfenseur du rationalisme que M. Paul Couderc admettre ces

    i. Priroda (la Nature), 1949, n 6. pp. 71-77.2. Cf. p. ex. l'article de S. I. VAVILOV, prsident de l'Acadmie des Sciences de l'U.R.S.S.,

    Lnine et la Physique moderne, La Pense, n 23, p. 31.3. A. EINSTEIN : la Thorie de la Relativit restreinte et gnraise. Prface de M. Emile

    BOREL, p. X, Paris, 1.921.

  • UNE DISCUSSION SUR L'ASTRONOMIE EN U.R.S.S. 9

    thories sans rserves dans les dernires ditions de l'Architecture de l'Univers,y compris l'affirmation d'une naissance du monde il y a quelques milliardsd'annes, et rpondre seulement certaines critiques par ce vritable aveu,d'impuissance :

    En rsum, les apparences d'une volution sens unique et trs rapide se sont accrues depuisune douzaine d'annes. Je ne prtendrai pas que cela est satisfaisant pour l'esprit, mais il convientavant tout de considrer les faits. L'essor de l'astronomie est si rapide, les dcouvertes imprvuesse succdent un tel rythme que je ne crois pas le moment venu de prophtiser : je laisse d'autresle soin de dire si l'univers observ est. rationne! ou non... 1

    Qui ne comprendrait, aprs avoir lu ces lignes, la lgitime colre de Jdanovcontre l'cole astronomique anglaise qui, d'Eddington Milne, a mis toute son.autorit au service des thses crationnistes et qui est, sans doute, la principaleresponsable des dfaillances de certains savants rationalistes :

    Sans comprendre la dmarche dialectique de la connaissance, les rapports de la vrit absolueet de la vrit relative, crit Jdanov 2, de nombreux successeurs d'Einstein, transposant dans l'uni-vers infini les rsultats de la recherche des lois du mouvement dans un domaine fini et limit dl'univers, vont jusqu' parler du caractre fini du monde, de ses limites dans le temps et dans l'espace,et l'astronome Milne a dj calcul que le monde a t cr il y a deux milliards d'annes. A cessavants anglais, on pourrait appliquer le mot de leur grand compatriote Bacon, disant qu'ils emploientl'impuissance de leur science calomnlier la nature.

    Ces thses idalistes affirmant une origine du monde, il y a un nombre finid'annes, peuvent tre rfutes du point de vue scientifique dans l'hypothse mmed'un espace fini et toujours dans le domaine du formalisme mathmatique, maisil faut envisager une volution cyclique du monde ou admettre, du moins, que ladilatation actuelle aurait t prcde d'une contraction. C'est ce qu'ont montren particulier, les travaux de Tolman et de Sitter 3.

    Les savants sovitiques veulent partir, au contraire, de la conception mar-xiste d'un univers infini aussi bien dans l'espace que dans le temps .*, hypothsequ'Einstein lui-mme a parfois considre. Ainsi disparaissent toutes les difficultsque font natre les essais, de reprsentation totale d'un univers ferm, La rces-sion relle ou apparente des nbuleuses spirales n'est plus qu'un phnomne

  • CONFRENCE SUR LESQUESTIONS IDOLOGIQUES

    DE L'ASTRONOMIEpar I. PROKOFIEVA

    Une confrence sur les questions idologiques de l'astronomie a t convoqueles 13 et 14 dcembre 1948 par la Section de Leningrad de la Socit d'Astronomieet de Godsie de l'U.R.S.S. (S.L.A.G.) Cette confrence a runi aussi bien lesastronomes de Leningrad, de Moscou et d'autres villes que des savants travaillantdans d'autres branches scientifiques.

    La confrence a group plus de 500 participants. Les reprsentantsde diversesspcialits y ont pris part ct des membres de la S.L.A.G. de l'U.R.S.S. Troisrapports ont t entendus : 1 celui du Professeur K. Ogorodnikov^ sur lalutte contre le formalisme dans l'astronomie , 2 celui du professeur M. Eigen-son : la lutt du matrialisme contre l'idalisme dans la cosmologie contem-poraine , 3 celui du professeur L. Gburvitch et du professeur A. Lbdinski : les problmes de la cosmogonie contemporaine .

    La confrence a t inaugure par un discours d'ouverture du professeurP. Gorchkov, prsident de l'a section de Leningrad de la Socit d'astronomie etde godsie de l'U.R.S.S., discours dans lequel le professeur Gorchkov a notqu'un certain nombre de runions avaient dj t consacres la question de lalutte du matrialisme contre l'idalisme dans le domaine de l'astronomie. Parmices runions, il faut mentionner celles qui se sont tenues l'observatoire dePoukovo, l'Universit d'Etat de Leningrad, dans la Maison des Savants. Aucours de ces runions, les participants avaient exprim le voeu de voir la S.A.L.G.de l'U.R.S.S. organiser une confrence, consacre aux questions idologiques del'astronomie.

    La lutte contre le formalismedans l'astronomie

    Le premier rapport entendu a t celui de K. Ogorodnikov, qui avait pour butde situer le formalisme dans l'astronomieet de tracer les mthodes de luttes contrece formalisme. Comme l'a fait remarquer le rapporteur, la session de l'Acadmied'agronomie Lnine de l'U.R.S.S., ainsi que la dcision du Comit central duParti communiste (bolchevik) de l'U.R.S.S. sur la musique et la littrature, ontmontr que deux tendances inconciliables existaient dans la science et dans lesarts : d'une part la tendance matrialiste, d'autre part la tendance formalisted'essence idaliste. Dans les ouvrages des reprsentants de cette dernire tendance,la forme prend le pas sur le contenu, l'tude du contenu d'un phnomne donnest remplace par l'tude de la forme donne ce phnomne par le chercheurlui-mme. Ainsi, dans l'astronomie, les schmas mathmatiques deviennent unbut en soi, se suffisant lui-mme. Sans doute l'abstraction est-elle: ncessairedans les recherches, mais on ne doit pas oublier que le schma n'est qu'un ins-trument aux mains du chercheur. On dcle l'existence du formalisme dans lefait qu'un petit nombre de nos intellectuels sont tombs sous l'influence d'idesqui nous sont trangres. Objectivement, le formalisme dans la science sovitiquetend soumettre cette science l'influence de l'idologie ractionnaire bourgeoise.

  • CONFERENCE SUR LES QUESTIONS IDEOLOGIQUES DE L'ASTRONOMIE 11Il apporte de l'eau, au moulin des milieux imprialistes anglo-saxons quis'appliquent dmontrer la supriorit de la science formaliste trangre surla science matrialiste sovitique, fonde sur la doctrine de Marx-Engels-Lnin-Staline.

    Les manifestations concrtes du formalisme peuvent tre assez varies. Dansle domaine de l'astronomie, on peut indiquer les tendances formalistes essen-tielles suivantes :

    1. La cosmologie relativiste qui se donne pour objet l'tude du monde dansson ensemble et qui est par consquent et de prime abord condamne l'chec.Elle est fonde sur la tentative mthodologiquement errone d'extrapoler pourl'ensemble de l'univers les proprits qui nous sont connues la suite de re-cherches effectues sur la partie finie de l'univers qui nous est accessible.

    L'expansion de l'univers est dduite partir de considrations purement go-

    mtriques. La cause et le mcanisme nergtique de cette expansion restentinconnus de nous. L'tude mme de la structure, c'est--dire de la forme de lamatire de l'univers, isole de son contenu, c'est--dire des processusphysiques, cette tude mme constitue une preuve de formalisme. Ces ides ontpntr dans la conscience d'un certain nombre de savants, comme le montre,par exemple, la thse prsente l'Universit d'Etat de Leningrad pour le titre dea candidat des Sciences physico-mathmatiques par un aspirant de l'Universitd'Etat de Moscou. L'objet de cette dissertation est l'tude de l'influence des termesrelativistes du champ d'attraction du noyau central d'une galaxie sur les vitessesradiales des toiles situes des distances variables de ce noyau central. On peutse demander quelle est la valeur pratique de ce travail si les erreurs commises dansl'valuation de ces vitesses sont plusieurs fois suprieures l'effet calcul.

    2'. C'est dans la cosmogonie sovitique que le formalisme se manifeste de lafaon- l'a plus dangereuse, car ses manifestations ont, dans ce domaine, un carac-tre actif. Nous ne possdons aujourd'hui aucune hypothse cosmogonique quipuisse tre recommande sans restriction aux vulgarisateurs. Il faut ajouter que leplus grand danger rside dans ce qu'on pouvait appeler le nihilisme cosmogo-nique 1 qui fait croire l'impuissance de la science et fraye ainsi la voie aufidisme.

    L'cole de mcanique cleste du professeur N. Mossi'ev, de l'Universitd'Etat de Moscou, s'est livre pendant un grand nombre d'annes l'tude del'origine et de l'volution des corps clestes. Au cours des vingt annes de tra-vail de cette cole, son influence sur le dveloppement de la cosmogonie a t plusque modeste. Les raisons de cette situation deviennent claires lorsqu'on examineles principes de travail de cette cole. Les reprsentants de cette cole se livrent l'tude des schmas purs , comprenant ces schmas d'une faon mtaphy-sique, c'est--dire sans tenir compte du caractre relatif de nos connaissances.L'cole du professeur N. Mossi'ev maintient fermement ces positions errones.C'est ainsi qu'au cours de la discussion sur l'hypothse cosmogonique de l'acad-micien O. Schmidt, discussion qui s'est droule au dbut de 1947 l'Institutd'Etat Sternberg d'Astronomie (Moscou), l'cole de N. Mossev s'est livre unecritique purement formaliste de cette hypothse.

    3. Un nombre considrable d'ouvrages trangers consacrs l'tude de lastructure interne des toiles ont un caractre purement thorique. Par suite dunombre restreint de donnes connues, une hypothse sans fondement succde une autre hypothse sans plus de fondement. Malgr leur grand nombre, cesouvrages se caractrisent par leur inutilit.

    4. Dans les autres domaines de l'astronomie, il n'y a que des reprsentantsisols qui soient contamins; par le formalisme.

    i. Par nihilisme , il faut videmment entendre, ici dsespoir sans issue Nous avons laisstel quel ce terme expressif dans le reste de l'article (P.L.).

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    C'est ainsi que dans le domaine de la dynamique stellaire, des exemplesvidents de formalisme nous sont donns par les ouvrages de Chandrasekhar, enparticulier par les ouvrages les Fondements de la dynamique stellaire et les Pro-blmes stocastiques de la physique et de l'astronomie. On peut dire de ces deuxlivres que pour un gramme de vrit, on y trouve des tonnes de calculs parfai-tement inutiles, c'est de la recherche pour la recherche.

    Le formalisme dans la science se manifeste galement par l'abandon dessujets pratiques et actuels et par une tendance accrue une abstraction sanscontenu.

    Le formalisme ne se manifeste pas uniquement dans les ouvrages thoriques.On peut en trouver des manifestations dans les travaux exprimentaux quand, cestravaux sont effectus sans but final clairement tabli. Ce sont alors des observa-lions pour des observations.

    L'autre face du formalisme, c'est l'abaissement de la science sovitique devantla science trangre, abaissement qui se manifeste par les louanges adressessans fondement suffisant aux ouvrages des savants trangers, abaissement quise manifeste de plus par le silence fait autour des ouvrages des auteurs sovi-tiques et par la sous-estimation de l'importance de ces ouvrages.

    Les astronomes sovitiques ont pour tche essentielle la dnonciation et lasuppression des lments formalistes dans leurs propres ouvrages. Pour cela ilsont leur disposition la puissante mthode de la critique et de l'autocritique, m-thode dont l'efficacit a dj t vrifie dans la pratique de l'dification socialiste.

    La lutte du matrialisme contre l'idalismedans la cosmologie contemporaine

    Dans son rapport, le professeur M. Eigenson a soulign qu' l'poqueactuelle, quand le monde est divis en deux camps ennemis, le camp du socia-lisme, du progrs et de la dmocratie dirig par l'U.R.S.S. et le camp du capita-lisme monopoliste, de l'imprialisme et de la raction dirig par les Etats-Unis,les questions idologiques acquirent une importanceparticulire.

    Les importantes dcisions prises rcemmentpar le Comit central du P.C. (b)de l'U.R.S.S. sur les questions idologiques enseignent aux hommes sovitiquescomment il faut dfendre la puret de la doctrine marxiste-lniniste dans tousles domaines de la culture et de la science. Il n'existe pas de science mondiale unique. A la science matrialiste sovitique s'oppose la pseudo-science idaliste enputrfaction du dernier rgime exploiteur de l'histoire, le capitalisme monopo-liste.

    Comme la physique et la biologie, l'astronomie est l'une des bases essen-tielles de la conception matrialiste du monde. Il en rsulte que les problmesidologiques qui se posent en astronomie sont des problmes d'une importancevitale pour le peuple sovitique et pour l'ensemble de l'humanit progressiste.Une crise idologique prolonge se droule dans l'astronomie bourgeoise con-temporaine, crise qui fait partie de la crise gnrale de la culture bourgeoise, quireflte dans le domaine idologique la faillite du rgime capitaliste dans sonensemble. Cette crise se manifeste avec le plus d'vidence dans la cosmologie et lacosmogonie bourgeoises contemporaines. Cependant les manifestations de cettecrise ne se limitent nullement ces branches thoriques suprieures de l'astro-nomie.

    L'astronomie sovitique d'avant-garde se tient fermement sur la positionmatrialiste suivant laquelle l'univers est infini. La critique scientifique sovitiquea rvl que dans la crise idologique que traverse actuellement l'astronomiebourgeoise dans la nouvelle tape historique, on assiste un retour de la thorieanthropocentrique et gocentrique, thorie idaliste ractionnaire suivant la-quelle la terre et l'homme jouent un rle central et exceptionnel dans l'univers.L'astronomie extragalactique sovitique a dmontr dfinitivement que notre

  • CONFERENCE SUR LES QUESTIONSIDEOLOGIQUES DE L'ASTRONOMIE 13galaxie tait parfaitement semblable aux-autres galaxies. Notre galaxie n'est pasplus exceptionnelle que notre soleil.

    De mme que la physique bourgeoise du xxe sicle, l'astronomie bourgeoisecontemporaine s'est rvle incapable d'expliquer les nouveaux faits observs etdcouverts par la science sovitique. Cette impuissance de la cosmogonie bour-geoise s'est exprime dans la

    thorie de 1' univers fini et en expansion deLemaitre-Eddington-Milne et d'autres encore. Les fondements scientifiques decette thorie ont t les prtendus paradoxes cosmologiques et le phnomnedu dplacement vers le rouge des spectres des galaxies lointaines. La sciencesovitique a rsolu d'une faon matrialiste les paradoxes optique et gravitationnelet a montr la possibilit de l'interprtation matrialiste de la loi du dplacementvers le rouge. Cette loi est soit le rsultat d'un certain processus physique concer-nant les pilotons, soit la consquence d'une modification relle des' dimensionsde la mtagalaxie finie qui se trouve dans l'univers infini. Le choix dfinitif del'une de ces deux interprtations doit devenir l'objet essentiel des tudes desastronomes sovitiques.

    L'astronomie sovitique a montr que la prise en considration du fait cosmo-logique fondamental de la structure du monde astronomique prive de tout con-tenu scientifique les tentatives faites par les savants bourgeois idalistes dedfinir le rayon de l'univers . Le caractre limit de chaque systme cosmiqueconcret et rel et en particulier du systme suprieur que nous connaissons au-jourd'hui, la mtagalaxie, est utilis par les savants bourgeois qui s'occupent decosmologie pour affirmer mensongrement que l'ensemble de l'univers est limitlui aussi. En ralit, le nombre des rayons de courbure est indtermin enchaque point, tant donn qu'il existe en ce point une quantit indtermine destructures diffrentes d'ordre macroscopique et microscopique. Par consquent,toutes ces tentatives des astronomes idalistes sont dnues de fondement, mmesi l'on se place au point de vue de la thorie de la relativit. En fait, la cosmo-logie relativiste contemporaine n'est qu'un moyen assez compliqu pour dcrireun systme cosmique limit existant rellement, celui de la mtagalaxie. Cesderniers temps on a pu voir s'introduire dans notre littrature ce genre de tentatived'interprtationidaliste des rsultats de la thorie de la relativit.

    La cosmologie scientifique doit seulement tre considre comme la partiethorique de l'astronomie non galactique, fonde sur tous les matriaux fournispar l'observation des galaxies,, et non pas comme une thorie de l'univers ,autonome, une sorte de tout absolument mtaphysique et isol de la pratique desobservations.

    Il est indispensablede renforcer nos travaux de recherche dans le domaine dela cosmologie et d'entreprendre de nombreuses observations des galaxies, obser-vations qui sont actuellement possibles du fait de la reconstruction des observa-toires astronomiques sovitiques. La cration d'une nouvelle base d'observationpuissante qui servira de fondement aux recherches thoriques et statistiques denos savants, doit permettre l'astronomie extragalactiquesovitique de prendre lajiremire place mondiale. De nouveaux travaux opinitres pour la cration desfondements de la cosmologie matrialiste doivent avoir pour consquence lafaillite dfinitive de la cosmologie bourgeoise antiscientifique.

    Les problmes de la cosmogonie contemporaine

    Dans leur rapport, les professeurs L. Gourvitch et A. Lbdinski ont faitl'analyse de la cosmogonie contemporaine partir de positions mthodologiques.Ils ont montr que le dveloppement de l'astronomie contemporaine exige quesoient poss et rsolus les problmes de la formation et de l'volution descorps cosmiques, tant donn que nous nous heurtons chaque pas la ncessitde la connaissance de l'histoire de ces phnomnes.

  • li I. PROKOFIEVLa cosmogonie comprend les thories suivantes : 1 l'volution des galaxies.

    2 l'volution des toiles et des amas d'toiles, 3 l'volution du systme solaire.Pour ce qui est du premier problme, on est encore en train d'accumuler les

    matriaux indispensables pour rsoudre la question de l'origine et de.l'volution des galaxies. Les hypothses contemporaines se fondent sur desdonnes ayant trait - l'aspect extrieur des. nbuleuses, les lois internes restantinconnues de nous. Ainsi, on ne sait pas si les branches spirales s'enroulent ouse droulent dans le processus du dveloppement des nbuleuses spirales. On esten train de poser avec nettet le problme de l'origine et de l'volution destoiles isoles, des toiles doubles et des amas d'toiles. On ne doit pas considrertoutes les varits d'toiles actuellement observes comme des stades successifsdu dveloppement d'une seule toile, comme le faisait Jeans. Comme l'a indiquV. Ambartsoumian, il est possible d'tablir les diffrentes branches de l'volutionen se fondant sur les donnes statistiques stellaires et en tenant compte de larpartition des toiles dans les galaxies. Bien qu'on n'ait pas encore proposd'hypothse physique satisfaisante sur l'origine et le dveloppement des toileset des amas d'toiles, sans doute cause de l'insuffisance des donnes d'obser-vations, il n'en serait pas moins erron d'en conclure qu'il est indispensabled'ajourner l'dification de ces hypothses jusqu'au moment o l'on aura runi toutes les donnes indispensables. Premirement, ce moment n'arriverajamais et deuximement, pour l'dification des hypothses, il est indispensable demener de front les tudes thoriques et l'accumulation des donnes pratiques. Lascience dispose de donnes beaucoup plus nombreuses pour la rsolution de latroisime, question, celle des origines et de -l'volution du systme plan-taire. Sans doute ne connaissons-nous qu'un seul modle de semblables systmes etcela conduit certains savants des conclusions pessimistes sur l'impossibilit d'unecosmogonie plantaire, mais nous connaissons par contre un certain nombre delois rgissant notre systme solaire, par exemple l'identit des sens de la rotation,la loi de Bode-Titius, etc. On connat galement la situation du systme solairedans la galaxie et la possibilit des influences rciproques entre ce systme et lesautres corps clestes. Par consquent on peut estimer qu'un travail systmatiquedans le domaine de la cosmogonie plantaire serait rationnel et opportun.

    Une solution correcte des problmes cosmogoniques n'est possible que surla base du matrialisme dialectique. Il est indispensable de tenir compte desliaisons entre tous les phnomnes et de ne pas isoler la cosmogonie de l'ensembledes connaissancesphysiques et astronomiques. On ne doit pas oublier non plus larelativit de nos connaissances. Les lois physiques ont t. tablies pour desespaces et des dures limits. Il peut se trouver que certaines lois ne puissenttre extrapoles de grandes dures. Un astrophysicien doit tre un matre de laphysique ; dans son laboratoire , c'est--dire dans l'univers, l'tude desphnomnes cosmiques s'tend sur des intervalles de temps extrmement longs etse droule dans des conditions qui sont tout fait inaccessibles au physicien dansson laboratoire terrestre ; aussi l'astrophysicien a-t-il le droit de corriger les loisde la physique terrestre et de stimuler autant que possible les dcouvertes denouvelles lois physiques.

    L'hypothse de Jeans n'tait pas seulement errone, mais elle tait de plustout fait infonde du point de vue mthodologique, puisque Jeans forait lesfaits afin de les faire entrer dans un schma tabli l'avance. Chaque fait devaleur constitue une brique pour le futur difice de la thorie en construction.Les savants sovitiques, en particulier V. Fessenkov, V. Ambartsoumian,-G. Schein, ont amass un grand nombre de ces lments de la cosmogonie future.Ce sont le mcanisme de dsintgration des astrodes, la composition chimique de

    1 la terre, l'tude de la dissipation des atmosphres, l'tude de la lumire zodiacale,l'tude des groupements et des amas d'toiles, celle des toiles doubles, l'tude del'ge des galaxies, la dcouverte de la rotation des toiles, la dcouverte des parti-cularits de la composition isotopique des toiles teintes.

  • CONFERENCE SUR LES QUESTIONS IDEOLOGIQUES DE L'ASTRONOMIE 15Cependant, pour difier un systme harmonieux partir d'une multitude de

    faits, il est indispensable de faire une hypothse. Ds le XVIII" sicle, malgr lesdonnes peu nombreuses qu'on possdait alors, on vit apparatre l'hypothse deRant-Laplace qui a t, comme le dit Engels, le plus grand progrs fait parl'astronomie depuis l'poque de Copernic 1. Aujourd'hui que nous possdonsdes donnes beaucoup plus nombreuses, l'importance de l'hypothse est devenueparfaitement vidente.

    Deux hypothses de dpart sont possibles dans le problme de l'origine dusystme solaire

    : 1 Les plantes et le soleil sont apparus dans un seul processusgnral, ou bien, 2 la formation des plantes s'est produite indpendamment dela formation du soleil. Du point de vue mthodologique, ces deux hypothsessont admissibles.

    Les hypothses du premier type, au nombre desquelles se trouvent l'hypo-thse de Kant-Laplace et celle de V. Fessenkov 2 se heurtent aux difficults rela-tives la quantit de mouvement des plantes, difficults qu'il n'a pas encoret possible de surmonter. Dans les hypothses du deuxime type, l'apparitiondu systme plantaire se trouve conditionne par un fait fortuit : celui d'uneaction extrieure sur le soleil. Comme l'enseigne la mthode du matrialismedialectique, le hasard n'est qu'une forme particulire de manifestation de lancessit et par consquent les hypothses de ce type sont admissibles en rglegnrale. Au nombre de ces hypothses se trouvent celle de Jeans et cellepropose par 0. Schmidt 3. De l'hypothse de Jeans nous avons dj dit qu'elle sedistingue par son caractre de parti-pris, par l'ignorance des faits qui sont encontradiction avec elle (ainsi Jeans affirme que les toiles sont liquides quand ila besoin de cette particularit pour la division des toiles). De plus cette hypo-thse est encore inadmissible du point de vue matrialiste, parce que l'apparitiondu systme plantaire est attribue un hasard ce point incroyable que lesystme solaire devient un phnomne exceptionnel dans la galaxie. Enfin,comme l'ont montr Russel et N. Pariiski, l'hypothse d'une collision d'toilesn'carte nullement les difficults relatives la quantit de mouvement.

    Dans son hypothse 0. Schmidt suppose que les toiles peuvent accumulerd'une faon rgulire les matriaux servant la formation des plantes. Danscette hypothse le hasard

    c'est--dire la rencontre d'une toile avec unnuage nbuleux

    est une manifestation du processus gnral ncessaire de laformation des plantes partir des toiles. SoUs ce rapport, l'hypothse de0. Schmidt est parfaitement matrialiste. L'originalit de l'hypothse de0. Schmidt rside dans son caractre inductif. Elle s'efforce d'englober de lafaon la plus complte possible toutes les donnes pratiques actuellement ras-sembles et arrive en effet expliquer un plus grand nombre de faits quetoutes les hypothses exposes jusqu'ici (elle explique en particulier le mouve-ment des satellites des plantes, les particularits physiques des plantes et deleurs satellites). C'est en cela que rside la force de cette hypothse. Cependantle caractre inductif de l'hypothse de Schmidt est galement l'origine de lafaiblesse de cette hypothse, car le mcanisme de l'accumulation des poussirescosmiques et de la formation des plantes reste obscur. Pour le moment cettehypothse ne s'est heurte aucune objection tablissant son manque de fonde-ment. N. Mossev attache dans sa critique la plus grande attention la questionde la formation des toiles doubles, alors que la partie la plus intressante decette hypothse est celle qui concerne les plantes. N. Mossev estime que

    i. ENGELS : Anti-Dhn'ng, dition Costes (trad. Bracke), tome I, p. 70. [P.L.].2. La thorie de Fessenkov explique la naissance des plantes par jection de matire partirdu soleil au moment de transformations internes. Cf. le Journal astronomique de !U.R.S.S., 1945,

    O?' 4, p,, 281 et suivantes. Cf. galement l'Origine des mondes, dit. 1947, pp. 158-159 [P.Li.].3. Le professeur O. Schmidt est aussi le clbre hros des explorations arctiques [P.L.].

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    l'hypothse de Schmidt n'est pas originale, "mais les rapporteurs ne partagentpas cette opinion. Suivant les calculs effectus par I. ChkloYski, le phnomnede l'accumulation apparat comme impossible. Mais si l'on prend une autresignification de la vitesse, comme cela a t fait par T. Aguikian, ce phno-mne devient possible. L'effet de l'accumulation dpendra alors beaucoup plusde la vitesse relative du soleil que de la densit de la nbulosit. Cet effet seraplus grand dans le cas d'une faible vitesse du soleil par rapport au nuage demtores ; de pareils phnomnes sont parfaitement possibles.L'approfondissement des points encore insuffisamment tudis de l'hypo-thse de Schmidt et le calcul plus prcis de certaines valuations doiventconstituer une tche d'actualit pour les astronomes sovitiques. Ce n'est qu'la suite de ces recherches qu'on pourra se rendre compte si l'hypothse deSchmidt est juste ou errone, mais en tout cas son rle positif est indiscutableds aujourd'hui.

    Face aux tendances positives dans le dveloppement de la cosmogonie so-vitique (V. Fessenkov, V. Ambartsoumian, 0. Schmidt) se tient tout fait part l'cole de N. Mossev. Les reprsentants de cette cole possdent lesexcellentes mthodesde la mcanique cleste et auraient pu travailler utilement la cosmogonie. Cependant ils ne peuvent le faire parce qu'ils se tiennent sur despositions errones, formalistes et mtaphysiques. Leurs recherches s'difient partir de donnes purement abstraites : ils tudient la cosmogonie sans suivreaucune hypothse cosmogonique sense. Les travaux de cette cole sont consacrs des questions qui peuvent tre un jour utiles quelqu'un ; ils rsolvent desproblmes mathmatiques dans l'espoir que leur solution pourra servir un jour quelque thorie encore inconnue.

    En ce qui concerne la cosmogonie des pays trangers, quelques ides nou-velles ont t nonces depuis Jeans : de nouvelles variantes de l'hypothse deJeans, l'hypothse de Weizsacker 1, l'hypothse de Halfven et d'autres encore.Cependant toutes ces hypothses sont soit tout fait errones, soit insuffisantespour expliquer les faits essentiels et ne peuvent, par consquent, servir au dve-loppement de la cosmogonie. Le nihilisme l'gard de la cosmogonie est untrait caractristique de l'occident. Ce nihilisme s'explique par des raisons mtho-dologiques : c'est parce qu'ils se tiennent sur des positions mtaphysiques queles savants bourgeois ne peuvent expliquer les phnomnes.de l'volution.

    Nous possdons la mthode du matrialisme dialectique, la seule mthodegrce laquelle il est possible de comprendre le dveloppement de l'univers,et par consquent, nous pouvons et nous devons crer une cosmogonie scien-tifique. Il ne peut y avoir aucun doute sur notre succs final. Il est indispensablede dvelopper l'tude de la cosmogonie dans les tablissements astronomiquessovitiques, de la dvelopper aussi bien en accumulant les diffrents faits qu'enentreprenant des synthses thoriques, tout en luttant simultanment contretoutes les dviations formalistes et idalistes. Il est de plus indispensable queles diffrentes coles astronomiquessovitiques collaborent entre elles, vu l'impor-tance exceptionnelle, la difficult et la complexit de la tche de l'dification d'unethorie cosmogonique.

    Discussions et rsolution finale

    Des dbats anims ont suivi l'expos des rapports. A ces dbats ont pris partle professeur A. Jirmounski, V. Lvov, V. Bronstein, les professeurs V. Krat,V. Charonov, P. Slavenas, B. Vorontzov-Veliaminov, les chargs de coursB. Lvine, G. Khilmi, le professeur M. Zverev, le charg de cours Pariiski, les

    i. Sur la thorie cosmogonique de Weizsaker, cf. l'article de E. Schatzman dans la Pense,n 12 [P.L.].

  • CONFERENCE SUR LES QUESTIONS IDEOLOGIQUES DE L'ASTRONOMIE 17

    professeurs M. Eigenson, V. Ogorodnikov,A. Lebedenski, L. Gourevitch ; au coursdes dbats on donna galement lecture de la lettre de N. Mossev.

    Au cours des dbats le professeur A. Jirmounski a indiqu que jusqu'ici la terre et le ciel taient considrs sparment l'un de l'autre. L'astro-nomie n'tait pas lie la gologie. Cependant le professeur A. Zavaritski qui a

    .

    tudi un grand nombre de mtorites a montr que la composition de la terretait identique celle des corps clestes. La thorie de O. Schmidt, qui nejouissait pas jusqu'ici d'une grande popularit parmi les gologues, a t ren-force aujourd'hui par l'hypothse sur la formation de la terre de l'acadmicienV. Obroutchev, qui fait intervenir la thorie des pulsations. On doit considrerque la collaboration entre les gologues et les astronomes peut tre trs utile audveloppement de la cosmogonie.

    V. Lvov a indiqu que la confrence devait tre une tape dans le dveloppe-ment de l'astronomie sovitique

    le prlude d'un important tournant idolo-gique. Sous ce rapport, les rapporteurs auraient d souligner d'une faon plusnette le rle ngatif de la cosmologie relativiste, cette tumeur cancreuse quicorrompt la thorie astronomique contemporaine et qui est le principal ennemiidologique de l'astronomie matrialiste. C'est ainsi que dans le 4e volume du coursde Physique thorique de l'acadmicien L. Landau et du professeur E. Lifchitz, ct de l'expos de lois physiques indiscutables, 'on tudie l'espace homogneet isotrope qui constitue une dformation consciente du monde astronomiqueobjectif et rel. On ne trouve pas dans Te livre de Landau et de Lifchitz d'expres-sions du genre de cration ou dilatation de l'univers ; cependant les fon-dements de la cosmogonie relativiste, avec toutes les dductions fidistes quien dcoulent, y sont exposes sans aucune restriction critique. On peut lire enoutre, sous la plume du professeur D. Ivanenko, que la cosmologie relativisteapparat comme une conqute du matrialisme . En particulier, le professeurIvanenko estime que l'un des grands mrites de A. Friedman (qui a effectu unesrie de travaux de valeur sur la mtorologie thorique) est le fait qu'en 1922il a dvelopp un modle d'univers en expansion qui a t repris ensuite parLemaitre. Ainsi la cosmologie relativiste a trouv des chos dans la sciencesovitique. Les racines mthodologiques de la cosmologie relativiste rsident dansla matrialisation de l'espace quatre dimensions de Minkovski, qui est en faitun instrument mathmatique formel de calcul. On examine ensuite un mondehomogne et isotrope qui n'existe pas en ralit.

    En ce qui concerne la cosmogonie, il est indispensable d'indiquer le grandrle positif de l'application de la mthodologie du matrialisme dialectique cette science. Ainsi l'ide matrialiste dialectique du caractre rversible desprocessus universels fondamentaux exclut la possibilit de l'origine simultanede l'volution de toutes les toiles et de toutes les galaxies. La mme ide prive defondement la conception d'une chelle unique de mesure des temps pour tousles astres (en particulier la conception de l'chelle courte ).

    A la lumire de l'ide de transformation rversible, il ne reste rien de lafameuse thorie de l'univers en expansion.Le professeur V. Krat a soulign qu' la base de la cosmologie relativisteil y avait une extrapolation tout fait injustifie des proprits du fini l'infini.C'est cette incomprhension de la liaison dialectique qui- mne l'idalisme.L'erreur idologique commise dans le 4 volume du cours de L. Landau tE. Lifchitz tmoigne du fait qu'une certaine partie de nos savants ne com-prennent le marxisme que comme des lves et ne savent pas appliquer en pra-tique les mthodes du matrialisme dialectique.

    On observe l'existence de deux tendances dans la cosmogonie : l'une deces tendances prend pour point de dpart les lois internes du dveloppement,tandis que l'autre' porte tous les phnomnes au compte de facteurs extrieurs.Il est parfaitement vident qu'une thorie qui ne tient pas compte du facteurinterne du dveloppement est une mauvaise thorie. Il n'est pas aussi difficile

  • ,18 ,/. PROKOFIEVA

    de surmonter les difficults relatives au moment de la quantit de mou-vement dans les hypothses du premier type sur l'origine du systme solaireque le prtendent L. Gourvitch et A. Lbdinski dans leur rapport. Ainsi si l'onestime que le soleil perd sa masse par coulement de la matire, comme le-supposeV. Krat. il apparat possible de surmonter cette difficult.

    Le professeur B. Vorontzov-Yliaminov a indiqu qu'il tait indispensabled'unir les deux tendances

    -

    existant dans la cosmogonie. Le, problme de l'vo-lution des toiles instables sera visiblement

    .

    rsolu le premier, tant donnque nous observons dans ces toiles certaines tendances de dveloppement. Ondoit rechercher des tendances volutives analogues dans la galaxie ainsi quedans le systme solaire,

    B. Lvine et G. Khilmi ont soulign que la critique de la thorie de0. Schmidt par N. Mossev est une critique purement formelle et par con-squent sans profit. Par contre au cours de cette confrence, la thorie de0. Schmidt a t critique avec srieux et cette critique contribuera au dve-loppement de la thorie. B. Lvine a indiqu galement que toute une sriede recherches accomplies par V. Fessenkov correspondent parfaitement aux prin-

    cipes exposs dans l'hypothse de 0. Schmidt.Le professeur V. Charonov a indiqu uh certain dfaut dans le travail de

    la confrence. Il a fait remarquer que la discussion s'tait concentre sur lethme particulier des diffrences de points de vue entre 0. Schmidt et N. Mos-sev, alors que l'astronomie est contamine par le formalisme et qu'elle estsouvent isole des problmes concrets contemporains. Charonov a dclar qu'il

    ;estimait .qu'aucun des rapporteurs i n'avait indiqu de .moyens concrets pourlutter contre le .formalisme.

    Le professeur Egenson a dclar que les questions de cosmogonie int-ressaient tous'les astronomes, tant donn qu'en principe l'astronomie n'estqu'une partie de la cosmogonie. La tendance la plus dangereuse est le nihilismecosmogonique qui ouvre la voie l'obscurantisme religieux. : La thorie de0. Schmidt est'la seule hypothse dveloppe qui possde les caractres d'unevrit relative. Il est regrettable de constater que ceux qui ont accus Schmidtd'idalisme l'ont critiqu partir de positions errones. La thorie de.Jeans estmauvaise, non parce que le hasard y joue un certain rle, mais, parce que lesystme plantaire s'y transforme en un phnomne exceptionnel. 'La densitdes nbulosits opaques dans la galaxie est telle que la probabilit de la pr-sence d'une toile galactique dans une nbulosit est extrmement grande : c'estpourquoi les nbulosits opaques ne. doivent,pas tre considres comme desphnomnes extrieurs et ,ne constituent en fait mie la. priphrie d'un mmesystme cosmique. Ce qui n'est pas clair dans" la thorie, de Schmidt, c'est .qu'onne sait pas si la terre tait ou non froide l'origine.

    K. Ogorodnikov a dclar qu'il tait regrettable de constater queJ'ensemblede l'Institut d'Etat Sternberg d'astronomie soutenait ; les thories "de N. Mos-sev. Il est inadmissible de permettre au mort de saisir le vif , comme celas'est produit lors de la discussion consacre ; l'hypothse de Schmidt au sein dbl'Institut Sternberg. Les travaux effectus l'Universit de Leningraddmontrentque du,point de vue de la,physique et de la dynamique des toiles, le phnomne.de l'accumulation de la poussire cosmique.par une toile, phnomne .admispar l'hypothse de 0. Schmidt, est parfaitement possible.

    Parlant de la question de l'origine des: toiles, le, professeur L. Gourivitcha dclar- qu'il n'existait pas aujourd'hui d'hypothses satisfaisantes sur

    ,

    cesorigines et qu'on avait seulement pos un certain nombre de questions.

    Du point de vue de la, cosmologie- dite relativiste, le monde-se dilate,'partird'un, tat originel dans lequel devaient,visiblement se ^passer, toutes^ sortes'de..miracles

    ..et. auxquels,sont lies les. origines des toiles. Ce point de ,vue* estvidemment inadmissible : l'univers infini est compos.

    d'une multitudeude

  • CONFERENCE SUR LES QUESTIONS IDEOLOGIQUES DE L'ASTRONOMIE 19mtagalaxies au sein desquelles des oscillations sont possibles comme cela sepasse dans un gaz compos de molcules qui peuvent se disperser. Ce tableauest admissible .du point de vue du matrialisme dialectique et explique uncertain nombre de faits.

    L'cole de N. Mossev, tout en s'opposant l'hypothse de 0. Schmidt,ne collabore ni avec l'cole de V. Fessenkov ni avec celle de V. Ambartsoumian.Depuis qu'elle existe, l'cole de N. Mossev n'a apport aucune modificationaux hypothses cosmogoniques. Elle a gnralement utilis la rigueur math-matique pour l'tude de questions qui ne mritaient aucunement cet honneur.

    Dans son discours de clture, le professeur A. Lebedinski a indiqu que lalettre envoye par N. Mossev confirmait tout ce qui avait t dit propos decette cole. Les points de vue cosmogoniques de V. Fessenkov, V. Ambartsou-mian et 0. Schmidt sont sans doute diffrents. Cependant les deux premierspoints de vue n'excluent pas l'hypothse de O. Schmidt.L'indication donne par Vorontz-Veliaminoy est juste. Comme il l'a dclar,il faut chercher les tendances l'volution des diffrents corps clestes.La matire est accumule par l'es toiles. Mais inversement, il y a aussi unedispersion de matire partir des toiles.

    Tous les participants la confrence ont remarqu l'unanimit que lacritique de la thorie de 0. Schmidt au cours de la runion qui s'est droule l'Institut Sternberg a t une critique formelle et que la lettre du professeurN-. Mossev porte la connaissance de la confrence confirmait une fois deplus l'exactitude de tout ce qui avait t dit au cours de cette confrence proposde cette cole.

    Dans son discours de clture, le prsident de la S.L.A.G. de l'U.R.S.S., leprofesseur N. Gorchkhov, a soulign l'importance de la confrence qui venaitde se tenir.

    La confrence a adopt une rsolution dont nous voulons citer les passagessuivants

    :

    Diffrentes manifestations du formalisme ont t observes dans certaines branches de l'astro-nomie.

    L'essentiel du formalisme consiste en ce que l'tude du phnomne lui-mme y est remplacepar l'tude de schmas logiques formalistes. Comme exemple de formalisme en astronomie, on peutciter les recherches de la cosmologie dite relativiste, certains travaux effectus dans le domaine dela cosmogonie, des travaux sur la structure interne des toiles, sur la dynamique des toiiles, etc.

    Les astronomes sovitiques ont pour tche de dnoncer et d'liminer toutes les manifestations duformalisme dans l'astronomie, grce au dveloppement d'une critique et d'une autocritique parti-culires.

    La thorie ractionnaire et idaliste de l'expansion de l'univers fini domine dans la cosmologiecontemporaine trangre. Malheureusement,' cette thorie antiscientifique a pntr dans les pagesde notre presse spcialise, phnomne qui doit tre considr comme une manifestation d'abaisse-ment devant la science ractionnaire de l'Occident bourgeois. Il est indispensable de dnoncer sanscesse cet idalisme astronomique qui aide l'obscurantisme religieux. l'encontre de la cosmologiebourgeoise, la science sovitique doit intensifier son effort dans le domaine de l'astronomie extragalac-tique pour expliquer d'une faon matrialiste le phnomne de la dviation vers le rouge du spectredes galaxies ainsi que les autres phnomnes observs dans les galaxies.

    Il faut attacher une attention particulire la solution des problmes cosmogoniques, qui ontune norme importance dans la lutte pour la conception matrialiste du monde, et plus spcialement la question de l'origine de la terre : en dehors de son importance idologique, cette question joue

    .

    aussi, en effet, un grand rle dans des sciences application pratique (gologie, gophysique, go-"chimie, gographie).

    Dans les pays capitalistes, la cosmogonie est en train de traverser une crise profonde, lie ladcomposition gnrale

    .

    de la science bourgeoise et l'impossibilit de rsoudre les problmesidologiques sur la base des conceptions idalistes.

    De ce fait, un nihilisme d'un genre particulier s'est tabli parmi les savants trangers, nihilismequi revient nier la possibilit de la cration d'une cosmogonie l'poque actuele. A l'encontre decette tendance, la cosmogonie sovitique peut et doit se dvelopper avec succs en s'appuyant surle matrialisme dialectique.

  • 20 7. PROKOFIEVA

    Au cours de ces dernires annes, les savants sovitiques ont obtenu d'importants rsultatsdans le domaine de la cosmogonie : i L'acadmicien O. Schmidt a tabli une nouvelle hypothsequi a pos avec acuit de nouveaux problmes devant la science sovitique et qui a exig la rvisionde nombreuses questions qu'on croyait dj rsolues. 20 Les recherches effectues par l'acadmicienV. Fessenkov sur la matire diffuse dans le systme solaire ont une grande importance pour la cosmo-gonie.

    Dans le domaine de la cosmogonie des toiles et des systmes stellaires, on a publi les rsultatsdes travaux de V. Ambartsoumian, membre correspondant de l'Acadmie des sciences de l'U.R.S.S.,qui a tabli les rapporte d'volution et les chelles de temps pour les diffrents corps constituant lagalaxie. Ces travaux posent d'une faon nouvelle les problmes relatifs l'volution des toiles.

    On a appris tout rcemment la remarquable dcouverte faite par l'acadmicien G. Schin. L'aca-dmicien Schein a dcouvert, la concentration extrmement leve de l'isotope C 13 dans les toilesteintes.

    Face aux tendances positives qui se manifestent dans le dveloppement de la cosmogonie sovi-tique, on trouve galement la tendance formaliste, dirige par le professeur N. Moisseev. Il fautestimer que le caractre formaliste des ouvrages de N. Moisseev et de son cole dans le domainede la cosmogonie est le. rsultat d'une conception errone applique d'une faon consciente et suivie,conception suivant laquelle ce n'est pas la ralit qui fait l'objet central des recherches fondes surune hypothse physique concrte, mais l'analyse mathmatique de schmas formels. Mme dans lesrecherches qui pourraient tre intressantes pour l'astronomie, l'cole du professeur N. Moisseev laissede ct l'utilisation pratique des rsultats obtenus. C'est partir des mmes positions formalistesque le professeur N. Moisseev .critique l'hypothse saine et fconde de O. Schmidt, se donnantpour but de discrditer totalement cette hypothse.

    On doit dvelopper dans les instituts sovitiques s'occupant d'astronomie l'tude des problmescosmogoniques, tant en accumulant les diffrents faits d'observation qu'en laborant de grandesthories, et cela en luttant simultanment contre toutes les dviations idalistes et formalistes. Dufait de l'importance extrme, de la difi'cult et de la complexit de la tche de construction d'unethorie cosmogonique, il est indispensable d'organiser une collaboration troite entre les diversescoles astronomiquessovitiques et aussi d'tablir des rapports suivis entre les astronomes et les repr-sentants des disciplines voisines. Il est dsirable que l'cole du professeur N. Moisseev et queN. Moisseev lui-mme entreprennent la rsolution des problmes qui se posent devant la cosmogoniesovitique.

    La runion gnrale de la section de Leningrad de la Socit d'Astronomie et de Godsie del'U.R.S.S. demande la Socit d'Astronomie et de Godsie de l'U.R.S.S. et au Conseil astrono-mique de l'Acadmie des sciences de l'U.R.S.S. d'organiser dans un proche avenir une confrencepour l'ensemble de l'U.R.S.S., confrence qui sera consacre aux questions de cosmogonie et dont lethme central doit tre l'examen du problme des origines du systme solaire, tant donn qu'il existedans cette question des divergences importantes entre les diffrents points de vue.

  • OU VA LA SCIENCE SOVIETIQUE ?

    par Georges COGNIOT

    Plusieurs vnements rcents ont attir l'attention sur les diffrences profondes,les diffrences de principe qui sparent les conditions de la science en rgimecapitaliste et ses destines en Union sovitique.

    Avant tout, l'opinion a t vivement frappe par la puissance de la sciencesovitique. Les milieux savants du monde entier sentent la valeur des ralisationspacifiques obtenues en U.R.S.S. dans le domaine de l'nergie atomique. Ils saventqu'il faut prendre la lettre les indications donnes par G. Malenkov dans lel'apport prsent la sance solennelle du Soviet de Moscou le 6 novembre 1949 l'occasion du XXXIP anniversaire de la Rvolution d'Octobre :

    ...Si l'nergie atomique, dans les mains des imprialistes, est la source d'une production d'ins-truments de mort, un moyen d'intimidation, un instrument de chantage et, de violence, elle peut etdoit tre, dans les mains des hommes sovitiques, un puissant moyen pour raliser un progrs techni-que sans prcdent, un nouveau dveloppement rapide des forces productives de notre pays.

    Le ministre des Affaires trangres de l'Union sovitique, Vychinski, a prciscette allusion dans le discours qu'il a prononc le 10 novembre devant le comitpolitique de l'Assemble de l'O.N.U. Il a dclar que l'Union sovitique, en decourts dlais, tait parvenue utiliser l'nergie atomique des fins pacifiques d'unegrande envergure et d'une haute importance conomique. Il a ajout :

    En Union sovitique, nous n'utilisons pas l'nergie atomique pour accumuler des stocks de bombes,bien que je sois convaincu que, le cas chant,

    si malheureusement ce cas se prsente,

    nous enaurons autant qu'il sera ncessaire. Nous utilisons l'nergie atomique en conformit de nos plans cono-miques, pour les besoins de nos intrts conomiques. Nous avons mis l'nergie atomique au servicede grands objectifs de dveloppement pacifique ; nous entendons l'employer faire sauter les mon-tagnes, modifier le cours des fleuves, irriguer 'lies dserts et frayer des routes toujours nouvelles la vie en des parages rarement fouls par l'homme. Voil ce que nous faisons, en matres de notreterre, d'aprs notre pllan 1...

    Toutefois, ce n'est pas seulement cette tonnante puissance de la sciencesovitique qui est en cause. Pareille efficacit a ses raisons, qui frappent elles-mmes l'attention. Et Malenkov s'en est expliqu galement dans son discours duXXXIP anniversaire d'Octobre :

    i. Le 28 octobre 1949, dans un ditorial de son organe mensuel Atomi'c Scienttst News. l'Asso-ciation britannique des savants atomiques a soulign toute l'importance des progrs accomplis enU.R.S.S. : on aurait d s'attendre l'explosion atomique en Union sovitique, qui sembleproduire un. effet de secousse de bien des cts . Et la revue ajoute : Les comptences ont rptmaintes fois que le dveloppement de la bombe atomique en Russie exigeait seulement du temps,et vrai dire un temps passablement restreint . La revue souligne combien la politique amricainemet en danger l'Europe occidentale : Nos pays avec leur densit de population relativement leveet leurs grands besoins d'importations en produits alimentaires et en matires premires sont trs vul-

    .

    nrables l'attaque, ne ft-ce que par un petit nombre de bombes atomiques . La revue conclutqu'en bonne logique, le gouvernement britannique et ceux qui sont dans la mme situation devraienttout faire pour rtablir la confiance et l'espoir dans la p?a.

  • 22 GEORGES COGNIOT

    Ces derniers temps, !a coHaborarion entre la science et la production, les savants et les ouvriersd'avant-garde, les ingnieurs, technibiens, agronomes et les kolkhoziens s'est incontestablement dve-loppe. La science vritable, !ie la vie, rompt impitoyablementavec toutes les traditions dsutes ;eHe ne souffre ni la routine, ni l'indiffrence l'gard des germes de ce. qui est nouveau. La scienced'avant-garde, dans les conditions de la socit socialiste, tourne hardiment ses regards vers l'avenir.L'Etat socialiste cre les conditions les plus favorables au dvelopement de la science...

    Ainsi la science sovitique se distingue par un caractre totalement original :le contact troit avec la pratique perptuellementmouvante et changeante, avec ceque le monde contient de jeune et de puissant.

    La science est lie organiquement la vie, la facult l'usine, l'acadmie auxchamps kolkhoziens.

    Science et capitalisme

    La vieille universit des pays capitalistes en est toute droute et effare et onl'a bien vu propos du rapport de Lyssenko sur la situation dans la sciencebiologique . Le remaniement de la biologie et de l'enseignement de la biologie la lumire de la doctrine de Mitchourine et de son cole ne reprsentait riend'autre que la reconnaissance de l'unit de la thorie et de la pratique. Maisprcisment, c'est l qu'tait le scandale : toutes les conditions cres pour lascience de nos pays d' occident par le rgime capitaliste ne rpugnent-ellespas cette unit p

    Le capitalisme a, d'un ct, utilis largement la science pour le dveloppementdes forces productives; mais, d'un autre ct, en tant que rgime fond surl'exploitation, sur l'antagonisme des classes, il s'est servi de la science pourcreuser l'abme entre le travail physique et le travail intellectuel. Il a diviset oppos la science et le travail productif. Il a eu besoin de savants coups de lavie relle et de travailleurs sevrs de la science. Seule une minorit de savants aassez de courage et de force pour se librer de la domesticitdgradante du capitalmonopoliste. Ces grands hommes, honneur de la pense, sont exposs aux plus,viles attaques des privilgis et de leur meute de laquais. Les campagnes contreJoliot-Curie en France, les mesures contre Bernai en Angleterre * rappellent

    i. Le professeur J.B! Bernai' (Birkbeck Collge, Londres) a t cart le 4 novembre der-nier du conseil de la British Association for the Advancement of Science, titre de sanction pour undiscours qu'il avait prononc au congrs de la Paix de Moscou et dans lequel il avait affirm que lascience amricaine et britannique, au point de vue politique et financier, est oriente vers la guerrepar ceux de qui elle dpend pour son budget. Dans une lettre au secrtaire de la British Association,publie par la presse anglaise le 8 novembre, J.B. Bernai crit :

    ...

    (Les membres du conseil) prtent appui, en consquence, une politique que je crois dsas-treuse pour la science et l'humanit. Cette politique consiste faire servir un effort scientifiquebeaucoup plus important que les moyens consentis en vue d'amliorer les conditions de vie du peuplede ce pays, la production de nouvelles armes scientifiques nettement diriges contre les hommesde l'Union sovitique. Ces hommes, il y a quelques annes seulement, taient nos allis et sans leurssacrifices beaucoup plus lourds que les ntres, tous les savants d'ici qui se respectent, seraient maintenant

    -

    au camp de concentration ou morts. En Grande-Bretagne, la premire phase de l'application de cette politique a dj conduit l'abaissement du niveau de vie du peuple et arrt le dveloppement de l'enseignement scientifique

    et de la recherche. Elle entrave les applications de la science des fins constructives dans l'industrie,l'agriculture et l'hygine, en un temps o l'existence mme du pays comme puissance indpendanteexigerait qu'on en fasse usage plus que jamais en ce sens. D'autre part, l'usage plus grand que jamaisde la science des! fins militaires, loin de pourvoir la dfense du pays, ne fera qu'exposer plus sre-ment son peuple la destruction en empchant la conclusion d'un accord international gnral qui.rendrait la science disponible pour les emplois pacifiques.

  • OU VA LA SCIENCE SOVIETIQUE ? 23

    la fois la noblesse et la difficult de la position du savant qui veut s'allier auxforces de vie.

    De la coupure entre la science et les forces vives du monde rsulte le carac-tre routinier le plus souvent imprim la science en rgime capitaliste.

    ...Le capitalisme' monopoliste.... implante les innovations techniques s'il y trouve avantage, maisil en freine l'application si elles menacent de dprcier les capitaux investis et de rduire les profits.Comme l'crit Lnine, le progrs gigantesque de l'humanit se fait en faveur des spculateurs1.

    Les trusts de l'industrie sont autant de trusts des brevets, leurs coffres-fortsservent de cercueil aux ides neuves. D'aprs la Commission amricaine del'conomie nationale, la firme General Motors n'utilise qu'un pour cent desbrevets qu'elle possde. Elle ne dlient les autres que pour les striliser.

    La science fut autrefois servante de la thologie ; pour les monopoles lesplus puissants, le savant n'est qu'un valet d'armes, a l'armurier d'une guerrenouvelle et encore plus terrible . Et ce n'est pas un journaliste qui a trouvcette dfinition, c'est le physicien amricain MorissOn I 2.

    Les dirigeants de l'Amrique des trusts conoivent, eux aussi, de hardisprojets scientifiques. Le dment Forrestal n'a-t-il pas demand des centaines demillions de dollars pour pourvoir la terre de satellites artificiels partir desquelsl'artillerie du pays des Rockefeller et des Dupont pt bombarder n'importe quelpoint de la plante ? John Foster Dulles n'a-t-il pas, dans le cercle de ses intimes,rv haute voix de grandes choses faire ? Ce n'est pas d'hydro-techniqueou de boisements gigantesques qu'il voulait parler. Au gr des hommes destrusts, la science doit faire oeuvre de mort.

    Jusqu' ce jour de septembre 1949 o la confirmation de la possession dusecret atomique par l'U.R.S.S. a forc les va-t-en guerre d'Amrique tenir uncompte plus relatif de leur stock de bombes, ils ont eu tout le temps de stupfierl'univers par leur cynique mainmise sur la branche la plus avance de la sciencecontemporaine, par leur volont de la convertir en un moyen de destructioncolossal.

    ,Comment s'tonner aprs cela de la dmoralisation de la science dans lesconditions de l'Etat imprialiste ? Certes, il n'est pas question de nier ici l'apportpositif de l'Amrique la science. Mais nul ne peut contester ce fait que le rgimedes trusts a enlev aujourd'hui aux savants ce qu'ils avaient de plus prcieux : lajoie de crer et la foi dans leur oeuvre. Personne ne parle autant que lesAmricains de la disparition du sens de l'avenir et la philosophie dominantede leur pays est cette philosophie crpusculaire crui se dfinit elle-mme par leslignes descendantes. Le dollar peut acheter beaucoup de choses, le dollar ne trouvepas d'enthousiasme au march. Ainsi s'achve la faillite d'une civilisationd'argent:elle a commenc par saccager la nature pour le profit courte vue, appauvris-sant et rduisant en poussire les deux tiers du. sol arable

    pillage des richessesnaturelles

    par des gens d'une sauvagerie surprenante , dit le Directeur des

    Telles sont les ides que je soutiens aveo gravit et que j'ai amplement dmontres tant par crit

    qu'en public. En faisant de leur expression un motif de rejet de ma candidature, le conseil tente defixer un prcdent aux termes duquel la science officielle ne tolrera aucune critique srieuse de doc-trines qui sont essentiellement politiques.

    Ce qui lgitime nettement -l'affirmation, contenue dans mon discours, que l'usage de la science

    pour la prparation de la guerre est le premier pas vers la destruction de sa libert .i. M. RUBINSTEIN : La science et la technique dans la priode de passage du socialisme au com-

    munisme, dans Voprossy Ekonomiki (Questions d'conomie), n 4, Moscou, ovi8, p. 16.2. Cit par Oleg PISSAEJEVSKI : La science pour la vie, dans Oesterreichische Zeitung, 15 novembre

    1049.

  • 24 GEORGES COGNIOT

    mines aux Etats-Unis ; elle a continu en laissant 40 % des comts sans hpitauxet en fabricant 30 % d'illettrs dans la jeune gnration ; et aujourd'hui ellefinit, avec 15 milliards de dollars pour le budget annuel de la guerre, dans unmpris et une haine de l'homme qu'elle paie par le dgot et la honte d'elle-mme.

    Trois caractres essentiels de la science sovitique

    Situation bien diffrente en rgime sovitique. Les masses de travailleurs, aunom desquelles parlent un Malenkov et un Vychinski, sont animes d'une foibrlante dans l'avenir, dans leurs propres forces, dans la capacit de crer. Lergime socialiste dchane la puissance et l'initiative de l'homme ; le socialismelui-mme est la science sociale applique et il tient par toutes ses fibres laconception scientifique de l'univers.

    Quelles consquences dcoulent de l ?En premier lieu, les conqutes de la science sont immdiatement appliques

    la production, la vie. En Union sovitique, on a la singulire habitude de jugerdu progrs scientifique non seulement par le nombre des brevets, des thses ou desarticles de revue, mais .d'aprs la rapidit avec laquelle de nouvelles villes in-dustrielles et universitaires surgissent, des cits loignes des ctes se transformenten ports de mer, la physionomie de la steppe devient mconnaissable, le cotonde couleur commence pousser au Turkestan et les abricots mrir dans leNord \

    La liaison vivante entre les instituts scientifiqueset les entreprises industriellesou agricoles, liaison sans exemple ailleurs, repose sur un principe qui n'a riende "mystrieux : l'unit morale

    :et politique de toutes les couches de la population ;

    le service du peuple ; la volont d'arriver au. plus vite au communisme, dont unedes conditions est l'abondance des biens, par consquent la fcondit sans cessecroissante du travail. C'est parce que le monde socialiste, monde sans propritprive des moyens de production, ne connat plus les crises et le chmage, parceque l'activit consciente de ses citoyens est tout entire oriente vers l'accroisse-ment de la richesse sociale et des pouvoirs de l'homme sur la nature, que desperspectives illimites s'ouvrent ici la science 2.

    En second lieu, on assiste la rduction de la distance qui sparait l'ing-nieur et l'ouvrier, l'agronome et l'agriculteur, par ascension progressive desseconds au niveau des premiers.

    Lnine a enseign son peuple associer les plus hautes conqutes de lascience et de la technique au rassemblement en masse des travailleurs cons-cients, qui oeuvrent la grande production socialiste. En pratique, cela signifiait :faire avancer de front Ta technique et l'mulation socialiste.

    Staline a montr comment le travail stakhanoviste, tape, suprieure del'mulation socialiste, exige, chez l'ouvrier, le dveloppement de la facultd'analyse technologique, de l'aptitude calculer, de la pense inventive. Ce quiveut dire que le mouvement stakhanoviste ne saurait se limiter des rsultatsconomiques comme l'augmentation du rendement et le dpassement des plansde production : il prpare le terrain pour le passage graduel du socialisme au communisme ; il fournit les conditions relles d'une telle transition, du faitqu'il hausse les aptitudes techniques et gnrales de l'ouvrier au niveau decelles de l'ingnieur.

    i. O. PISSARIEVSKI, art. cit.2. M. RUBINSTEIN, art. cit, p. 40.

  • OU VA LA SCIENCE SOVIETIQUE ? 25

    D'un ct, le dveloppement du mouvement stakhanoviste garantit l'aug-mentation de la productivit du travail, qui est indispensable pour atteindre unepleine abondance des produits. De l'autre ct, il tablit une amiti cratriceentre le personnel ouvrier et le personnel technique ou scientifique, il formedes hommes nouveaux, il cre un type nouveau de travail inconnu jusque let qui reprsente la transition au travail de la socit communiste.

    Ainsi le stakhanovisme vient puissamment en aide la science. Mais,rciproquement, la science est sa condition. Pas de stakhanovisme sans tech-nique avance, sans utilisation aussi efficace que possible de l'quipement, ducombustible, du courant, des matires premires \ En tant qu'elle mcanisele travail, qu'elle le rend automatique, qu'elle l'lectrifie, qu'elle met sonservice la chimie, y compris la chimie de l'atome, qu'elle prside la pla-nification de l'conomie, la science est la source du courant puissant qui en-trane la socit vers la disparition graduelle des oppositions entre la ville et levillage et entre le travail intellectuel et le travail physique a.

    De l rsulte,

    et c'est ici la troisime caractristique du sort rserv la science en rgime ^socialiste,

    que, ds maintenant, les liens entre savantset producteurs de biens matriels sont particulirement serrs. L'idal quiinspire les uns et les autres est strictement identique : ils sont unis par lesocialisme, qui ne connat plus les classes antagonistes, au lieu d'tre sparset opposs par Je capitalisme.

    Au surplus, les cadres de savants sortent du peuple. .Trs souvent, ils n'ontmme pas apprendre le chemin de l'usine ou du kolkhoz puisqu'ils y ontvcu et travaill avant de franchir les portes de la Facult ou de l'Institut 3.

    La science qui se forme en Union sovitique est bien telle que Staline lavoulait

    :"

    .

    Elle ne s'isole pas du peuple, elle ne se tient pas l'cart du peuple, mais elle est prte leservir, lui remettre toutes les conqutes scientifiques ; elle sert le peuple non par contrainte, maisvolontairement et avec joie 4.

    Dans quelles directions principales la. science sovitique se dveloppe-t-elle?

    Examinons maintenant quelques-uns de ces grands * dveloppements de lascience qui sont ncessits par le socialisme. Nous nous guiderons avant toutsur la forte tude de M. Rubinstein, dj cite.

    Rubinstein signale d'abord la mcanisation du travail. Elle prend en rgimesocialiste non seulement une ampleur inconnue, mais une importance de prin-cipe toute nouvelle. Le capitalisme continue astreindre des dizaines de millionsd'hommes un travail de forat, parce que les bas salaires et la prsence d'unenorme arme de chmeurs rendent l'introduction des machines dsavantageuse.Le socialisme fait au contraire de la mcanisation une loi essentielle de l'orga-

    i. Est-il ncessaire de rappeler, une f