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La plume du Circaete n°1 - Mission Fir/LPO - mars 2003 N° 1 - mars 2003 1 EDITORIAL EDITORIAL EDITORIAL EDITORIAL EDITORIAL La plume du circaete Feuilledeliaisonduréseaud’étudeetdeconservationducircaèteJean-Le-Blanc Qui a vu voler le circaète Jean-le-Blanc de près ne l’oubliera jamais. Ce vieux solitaire des vallées discrètes doit précisément son surnom à la majesté de sa présence. Depuis les jeunes années où je l’ai observé pour la première fois, mon admiration s’ est maintenue, comblée périodique- ment par de nouvelles découvertes. Nous voudrions promouvoir ce joyau de l’esprit humain qui consiste à observer la nature avec un soin critique, en fouillant les détails, en recherchant des explications satisfai- santes et ainsi parvenir à une découverte dont on devra le plus souvent partager le mérite avec d’autres ; ce qui n’enlèvera rien à la satisfaction apportée. Il y a naturellement des petites et grandes découvertes mais toutes s’ enchaînent inévitablement et chacun apporte de l’eau au moulin. Certains pensent que vouloir comprendre et expliquer la nature la déflore, que le mystère a son charme et, qu’ à vouloir tout clarifier, on perdra de vue l’esprit qui l’anime. Il n’ en est rien, car si le champ des connaissances s’ élargit, cela augmente aussi la frontière de ce champ avec l’inconnu : une bonne observa- tion soulève toujours plus de questions qu ‘elle n ‘en résout ! Pour être efficaces, les apports de chacun doivent s’échanger et se valoriser mutuellement pour l’ enrichisse- ment de tous. On a pu dire que « tout ce qui ne communique pas n’existe pas ». Un effort est donc à faire pour profiter des progrès considérables des moyens dont on peut disposer actuellement. Il faut essayer de promouvoir des avancées solides et précieuses, de les prolonger dans l’avenir au lieu de les laisser sombrer dans l’oubli. Cela devrait se faire par le dialogue et la critique, procédés délicats mais fructueux à condition de reposer sur des faits plutôt que sur des sentiments. L’attrait de curiosité suscité par le circaète est en partie provoqué parson régime alimentaire à base d reptiles : il en résulte une confrontation entre l’activité permanente de l’oiseau et le serpent inactif quand il fait froid. L’adaptation de ces deux régimesestunexploitdel’évolution. Le talent développé par le prédateur pour détecter sa proie n’ a d’égal que celui du reptile pour lui échapper. Ce sujet offre un vaste champ d’investigation ici et ailleurs. Le caractère routinier et peu opportuniste du circaète va se heurter à des changements considérables de son environnement. Il devient urgent de suivre sur une longue durée comment cela va se passer. Malheureusement une recherche, bien plus délicate, devrait concerner plutôt les reptiles que l’oiseau ; il faudrait mieux connaître la situation actuelle pour mesurer l’évolution qui dépendra surtoutdesproies. Comme on le voit, la tâche ne manque pas pour mieux valoriser ce qui se fait déjà en le classant et en le rendant plus facilement accessible. C’est l’ effort que je souhaite. Yves BOUDOINT Dessin : Paul Barruel

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La plume du Circaete n°1 - Mission Fir/LPO - mars 2003

N° 1 - mars 2003

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EDITORIALEDITORIALEDITORIALEDITORIALEDITORIAL

La plumedu

circaeteFeuille de liaison du réseau d’étude et de conservation du circaète Jean-Le-Blanc

Qui a vu voler le circaète Jean-le-Blanc de près ne l’oubliera jamais.Ce vieux solitaire des vallées discrètes doit précisément son surnom à la majesté de sa présence. Depuis lesjeunes années où je l’ai observé pour la première fois, mon admiration s’ est maintenue, comblée périodique-ment par de nouvelles découvertes. Nous voudrions promouvoir ce joyau de l’esprit humain qui consiste àobserver la nature avec un soin critique, en fouillant les détails, en recherchant des explications satisfai-santes et ainsi parvenir à une découverte dont on devra le plus souvent partager le mérite avecd’autres ; ce qui n’enlèvera rien à la satisfaction apportée. Il y a naturellement des petites et grandesdécouvertes mais toutes s’ enchaînent inévitablement et chacun apporte de l’eau au moulin.Certains pensent que vouloir comprendre et expliquer la nature la déflore, que le mystère a son charme et,qu’ à vouloir tout clarifier, on perdra de vue l’esprit qui l’anime. Il n’ en est rien, car si le champ desconnaissances s’ élargit, cela augmente aussi la frontière de ce champ avec l’inconnu : une bonne observa-tion soulève toujours plus de questions qu ‘elle n ‘en résout !Pour être efficaces, les apports de chacun doivent s’échanger et se valoriser mutuellement pour l’ enrichisse-ment de tous. On a pu dire que « tout ce qui ne communique pas n’existe pas ». Un effort est donc àfaire pour profiter des progrès considérables des moyens dont on peut disposer actuellement.Il faut essayer de promouvoir des avancées solides et précieuses, de les prolonger dans l’avenirau lieu de les laisser sombrer dans l’oubli. Cela devrait se faire par le dialogue etla critique, procédés délicats mais fructueux à condition de reposer sur des faits plutôt que sur dessentiments.L’attrait de curiosité suscité par le circaète est en partie provoqué parson régime alimentaireà base d reptiles : il en résulte une confrontation entre l’activitépermanente de l’oiseau et le serpent inactif quand il fait froid. L’adaptation de ces deuxrégimes est un exploit de l’évolution.Le talent développé par le prédateur pour détecter sa proien’ a d’égal que celui du reptile pour lui échapper. Ce sujet offreun vaste champ d’investigation ici et ailleurs.Le caractère routinier et peu opportuniste du circaèteva se heurter à des changements considérablesde son environnement. Il devient urgent de suivre sur une longuedurée comment cela va se passer. Malheureusement une recherche,bien plus délicate, devrait concernerplutôt les reptiles que l’oiseau ; il faudrait mieux connaîtrela situation actuelle pour mesurer l’évolution qui dépendrasurtout des proies.

Comme on le voit, la tâche ne manque pas pour mieux valoriserce qui se fait déjà en le classant et en le rendant plusfacilement accessible. C’est l’ effort que je souhaite.

Yves BOUDOINT

Dessin : Paul Barruel

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La plume du Circaete n°1 - Mission Fir/LPO - mars 2003

SUIVI DESUIVI DESUIVI DESUIVI DESUIVI DEPOPULAPOPULAPOPULAPOPULAPOPULATIONSTIONSTIONSTIONSTIONS

Haute-LoireHaute-LoireHaute-LoireHaute-LoireHaute-LoireRégion Région Région Région Région AuvAuvAuvAuvAuvergneergneergneergneergne

La population de circaètes de la Haute-Loire(sud Auvergne) est de l’ordre de 80 couples.Les oiseaux se répartissent essentiellementle long des deux vallées majeures et tributai-res associées que forment la Loire et l’Al-lier. Ces cours d’eau entaillent le départe-ment selon des axes sud-nord, respective-ment à l’est et à l’ouest.Le peuplement de la vallée de la Loire, quis’élève à environ 23 couples, n’est pas régu-lièrement suivi dans son ensemble. Seuls, 3 à 4 couples aux portes du Puy, chef-lieu dudépartement, font l’objet d’observations maisuniquement dans un but photographique.Cette pratique devrait être coordonnée(identification des photographes) sinon ré-glementée dans la mesure où elle a conduitdans le passé à des échecs (mort du poussin)et ne correspond à aucun suivi scientifiquedéfini.Le peuplement de la vallée de l’Allier, fort de47 couples environ, n’est pas suivi dans satotalité. Un noyau de 12 couples – soit 1/6 dela population altiligérienne – est étudié de-puis maintenant 7 ans dans la région deLangeac. Ces oiseaux sont cantonnés sur lescontreforts du massif de la Margeride, auxconfins des départements de la Lozère et duCantal.Généralement, les circaètes de Haute-Loirenichent dans des vallées situées dans lecollinéen supérieur (de 650 à 800 mètresd’altitude) et le montagnard infé-rieur (de 800 à 950 m). Leurs acti-vités de chasse ont lieu à toutesaltitudes, de 500 à 1500 m (montMouchet) à l’ouest du départe-ment, de 650 à 1750 m à l’est.En 2002, le premier contact dansles gorges de l’Allier a eu lieu le10 mars, soit trois jours en avancepar rapport à la moyenne de cestrente dernières années. En ce quiconcerne le noyau de Langeac, tousles sites étudiés ont été occupésdans les 10 jours qui suivirent cettedate. Contrairement aux annéesantérieures où étaient menées defront des observations biologi-ques sur la nidification et des ob-servations de comportements, l’ac-cent a porté sur le suiviéthologique, plus particulièrementsur les comportements de couplesnon nicheurs et les agressionsintraspécifiques. La localisation desaires et le déroulement des repro-ductions ont provisoirement étérelégués au second plan car bien

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étudiés les 6 saisons précédentes. Des don-nées éthologiques d’une grande richesse ontainsi pu être collectées dans un secteur àforte densité où 5 couples nichent sur 8,5km². Une fois encore, les observations ontrévélé l’extrême variabilité individuelle desfaits et gestes.Parmi les 12 couples suivis, 2 n’ont pas niché,vraisemblablement suite au recrutement d’unnouveau partenaire : le mâle dans un cas, lafemelle dans l’autre. Le taux de réussite s’estélevé probablement à 0,5 (0,6 si on ne tientcompte que des reproductions entreprises),soit un des plus faibles des 7 années. Deuxéchecs ont été constatés suite à la dispari-tion de l’œuf. Les raisons exactes sont in-connues. Un toutefois est à mettre en rela-tion avec la présence rapprochée de couplesvoisins : en effet, le nid se trouve dans uncouloir aérien de circaètes ; la femelle quit-tait souvent le nid pour invectiver les indivi-dus en route vers leurs secteurs de chasse.Une fréquence élevée de changement de nida été notée. Alors qu’en moyenne elle s’élèveà 43%, elle a atteint 70% cette année. Aucunedestruction liée aux activités humaines n’està signaler. Il est vrai que les couples suivissont répartis dans une des régions où la den-sité humaines est parmi les plus basses dudépartement (plusieurs communes comptentmoins de 100 habitants).En Haute-Loire, les activités forestières cons-tituent la principale source de perturbationspour les circaètes : ouvertures de pistes –martelage d’arbres – coupes – débardage –plantations. Les coupes automnales et hiver-nales n’affectent pas forcément les oiseauxmalgré un bouleversement parfois importantde l’aspect du site. Un couple a ainsi niché àmoins de 100 mètres de la lisière d’une coupe

à blanc effectuée quelques mois auparavant.Un autre dont la reproduction avait été com-promise en 1998 et 1999 suite à des travauxforestiers a pu enfin nicher avec succès ens’installant plus en amont dans la vallée. Unaccord sur un report de travaux avait ététrouvé avec le technicien ONF chargé de lagestion du site. Bien que rendu inutile suiteau déplacement du couple, cet accord tradui-sait une volonté de protection non répan-due chez tout le personnel.Une menace qui prend localement de l’am-pleur et sur laquelle il conviendrait d’êtreattentif, est la pratique des sports mécani-ques en pleine nature (moto verte – quad).Effrayés par la mise en place du réseau Natura2000 parce que mal compris – à dessein ounon , des groupes s’organisent et défendentde façon agressive leurs activités en utilisantle procédé classique de la désinformation.On ne peut que regretter de voir les gorgesde l’Allier servir régulièrement de terrain àdes épreuves de championnat national et/ouinternational de courses d’enduro, alorsqu’elles sont concernées par un projet deréserve naturelle, qu’elles constituent un élé-ment du réseau Natura 2000, et qu’elles com-portent des ZNIEFF et des ZICO parmi lesplus riches de France.Pour l’instant, la population de circaètes dela Haute-Loire paraît être stable en dépit d’in-cidents relevés ça et là.

Bernard JOUBERT28, rue du 11 novembre

43300 Langeac

Dessin : Paul Barruel

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La plume du Circaete n°1 - Mission Fir/LPO - mars 2003 3

Le circaète Jean-Le-BlancLe circaète Jean-Le-BlancLe circaète Jean-Le-BlancLe circaète Jean-Le-BlancLe circaète Jean-Le-Blancdans le départementdans le départementdans le départementdans le départementdans le départementde l’Isèrede l’Isèrede l’Isèrede l’Isèrede l’Isère

L’enquête nationale 2000-2001 des rapacesdiurnes nicheurs, organisée par la LPO, a ré-vélé un grand vide sur la situation du circaèteJean-Le-Blanc en Isère. Aucune informationsur des aires n’était connue (situation, alti-tude, … ) ainsi que sur les dates d’arrivée etde couvaison de cet oiseau. L’effectif de cetteespèce ne pouvait être donné. Seul, le ParcNational des Ecrins connaissait depuis 3 ou4 ans l’existence d’un couple avec aire con-nue dans la zone du Parc et des observationsanciennes indiquaient des jeunes avec adul-tes dans la zone sud du département.

Ces maigres renseignements nous ontpoussé à approfondir notre connaissancesur le circaète. Le premier travail, commencéen l’an 2000, a consisté à rechercher les cou-ples avec leur site de nidification (aire). Cettepremière année a été peu fructueuse. Tousdeux néophytes auprès de cette espèce, toutétait à apprendre. De plus, nous devions tra-vailler sur des données anciennes. La pour-suite des recherches sur les années 2001 et2002 se sont avérées plus satisfaisantes. Lenombre de sites connus passant d’une annéesur l’autre de 12 à 20.

La zone étudiée se situe à une trentaine dekilomètres de Grenoble au sud du 45ème pa-rallèle nord. Cette zone de moyenne mon-tagne comprenant la Matheysine (communeprincipale La Mure), le Trièves (communesMonestier de Clermont, Clelles, Mens) et leBeaumont (commune de Corps) est délimi-tée par des massifs de haute montagne : àl’ouest par le Vercors, à l’est par les Ecrins etau sud par le Dévoluy. Des torrents commele Drac, la Bonne et la Gresse traversent lazone et offrent aux circaètes des ravins pro-pices à leur installation. Notre prospections’étend également dans le massif des Ecrins(côté ouest) dans la vallée de Valbonnais jus-qu’à Valjouffrey. Elle est loin d’être exhaus-tive. Nous ne pensions pas trouver une telledensité.

L’année 2002 nous a permis de suivre 15 si-tes de nidification donnant 10 jeunes à l’en-vol. Le projet, pour l’année 2003, de conti-nuer à recenser les sites, ne nous permettrade suivre qu’en échantillon réduit la repro-duction de quelques couples.

Françoise CHEVALIER, 2 rue Paul Valéry38100 Grenoble

Tél. 04.76.17.22.52 – [email protected] DAEYE, 33 rue Maréchal Joffre

38600 FontaineTél. 04.76.26.36.11 - [email protected]

Etude et protectionEtude et protectionEtude et protectionEtude et protectionEtude et protectiondu circaète Jean-le-Blancdu circaète Jean-le-Blancdu circaète Jean-le-Blancdu circaète Jean-le-Blancdu circaète Jean-le-Blancdans les Cévennesdans les Cévennesdans les Cévennesdans les Cévennesdans les Cévennes

Depuis onze années, nous suivons une po-pulation de circaètes dans le sud du massifcentral. Débutée en 1992, notre étude a sus-cité l’intérêt du Parc national des Cévennes.Un protocole d’inventaire des couples decircaètes a été mis en place en 1996 au seinde cet organisme, complétant ainsi nos don-nées et permettant des actions de protec-tion plus efficaces. La participation des gar-des moniteurs du PNC nous permet le con-trôle d’une centaine de couples et le suivid’une soixantaine d’entre eux chaque année.Qu’ ils en soient d’entrée remerciés et assu-rés de notre plus profonde gratitude car sanseux notre travail n’aurait pas une telle por-tée.

1- Zone d’étude.

L’étude d’une population de rapaces doit,pour être représentative et significative, cou-vrir une superficie suffisamment grande(>10.000 ha) ou concerner une trentaine decouples minimum. La superficie de la zoned’étude est bien évidemment variable en fonc-tion de l’espèce étudiée (3.000 ha pour labuse variable à plus 50.000 ha pour le cir-caète).

Essentiellement centrée sur la moitié sud dudépartement de la Lozère, notre zone d’étudeglobale est extrêmement vaste. Elle couvreentièrement la moitié sud du départementde la Lozère et se poursuit au nord, sanslimite réelle, en Aubrac et Margeride. Lagrande diversité des milieux rencontrés surcette zone, a permis de définir cinq secteursbiogéographiques. Chaque secteur est repré-sentatif d’un climat, d’une roche et d’une cou-verture végétale particulière.

Plus précise, une zone d’étude principale, oùse font essentiellement les recherches, en-globe dans sa quasi totalité le Parc national

des Cévennes, déborde timidement au sudest de l’Aveyron et au sud-ouest de l’Ardè-che. Un quart de la superficie, constitué parl’Aigoual sud et les Cévennes méridionales,se situe dans le nord-ouest du départementdu Gard.

Quatre des secteurs biogéographiques denotre étude sont concernés par cette zoneprincipale et présentent des caractéristiquesécologiques différentes. Le cinquième sec-teur concerne l’Aubrac et la Margeride.

- Les Causses : ce secteur présente un facièsde plateaux calcaires. Entaillé par les pro-fonds canyons du Tarn, de la Jonte et du Tarnon,il trouve sa limite au nord de part et d’autrede la vallée du Lot. La couverture forestièredominée par le pin sylvestre est très inégale-ment répartie, les stations sèches accueillentle chêne pubescent et les ubacs dans les gor-ges quelques forêts de hêtres. Les plateauxsont caractérisés par la présence de vastespelouses steppiques maillées d’une multitudede parcelles agricoles aux superficies mo-destes et une quasi absence d’eau. Sur le pla-teau, l’altitude varie d’ouest en est de 900 à1200 mètres, le fond des gorges serpenteentre 800 et 400 mètres (1000 mètres au colde Perjuret).

- Le Mont Lozère : d’aspect plus montagneuxmais aux formes arrondies, il possède unréseau hydrographique plus important, don-nant au relief un aspect plus tourmenté. Laroche dominante est le granit. Les altitudes ysont plus élevées. La couverture forestière,importante dans les pentes, est constituéede pins et de hêtres. Elle tend à disparaîtresur les parties sommitales du massif, laissantplace aux landes et pelouses de l’étagesubalpin. Nous trouvons ici le sommet deFiniels (1699 mètres) point culminant de laLozère.

Dessin : Y. Tariel

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- Les Cévennes : dominé par les schistes etfortement soumis à l’érosion, ce secteurprésente un relief extrêmement découpé.Cette formation « fractale » de serres etvalats favorise la configuration d’une multi-tude de pentes escarpées favorables à la ni-dification des circaètes. Les conditions éco-logiques sont très variables, avec des altitu-des allant de 300 à 1100 mètres et des expo-sitions diverses. La végétation est dominée,suivant l’exposition et l’altitude, par le chênevert, les pins, les châtaigniers ; les hêtres ap-paraissant dans les stations les plus froides.

- L’Aigoual : ce massif granitique et schisteuxcumule les caractéristiques des Cévennes etdu Mont Lozère avec un relief extrêmementdécoupé et une altitude notable (300 à 1565mètres). Le climat montagnard, sous forteinfluence méditerranéenne, n’est pas aussi« continental » que celui du Mont Lozère. Lacouverture forestière, très étendue, présenteune grande variété d’essences tant résineu-ses que feuillues.

La zone centrale et la zone périphérique duParc national des Cévennes totalisent 327.000ha (90.000 de Z.C. et 237.000 ha de Z.P.).Les quatre secteurs de notre zone princi-pale d’étude couvrent une superficie de 250000 ha.

Zone d’étude : 250 000 haLes quatre secteurs biogéographiques

- CÉVENNES : 60 000 ha- CAUSSES : 80 000 ha- AIGOUAL : 45 000 ha- MT LOZÈRE : 65 000 ha

Ce qui représente- 100 % de la zone centrale = 90 000 ha- 65 % de la zone périphérique = 153 000 ha- et 7 000 ha de la zone M.A.B (réserve debiosphère)

2- Cadre de l’étude.

La protection d’une espèce passe par la con-naissance de sa biologie et de ses exigencesécologiques.

Dans un premier temps, nous avons essayéd’approcher le nombre de couples nicheurspar un inventaire le plus exhaustif possible.Cet inventaire constitue le point zéro du ni-veau de population actuelle et permet desurveiller la tendance évolutive du nombrede couples nicheurs.Cette évolution pouvant être lente pour uneespèce longévive comme le circaète, le suivide la reproduction et de son déroulementpermettra d’anticiper d’éventuels problèmesà venir ; l’effectif nicheur n’accusant que trèstardivement un bilan négatif généralisé de lareproduction sur de nombreuses années.Enfin, la mise en place de mesures de protec-tion sur les sites de nidification clôt les troisvolets.

Outre ce programme de base, d’une impor-tance majeure pour la protection de l’espèce,mené de concert avec le Parc national desCévennes et quelques ornithologues locaux,notre programme de recherche porte surdes points plus précis de la biologie du cir-caète.

- Le grand nombre de couples suivi permet ladescription précise de l’habitat de reproduc-tion des circaètes et de dresser ainsi la typo-logie des sites de nidification dans notre ré-gion. Ce volet est important pour établir laprotection à long terme de ces zones.

- Le suivi de la reproduction, effectué sur unnombre conséquent de poussins, a permisde lancer un programme de baguage sousl’égide du Muséum National d’Histoire Na-turelle de Paris (CRBPO).Ce programme de baguage et de marquageindividuel, à l’aide de bagues métalliques etde plastique coloré, a pour but de cernerl’organisation sociale des circaètes. Cettepartie de la dynamique des population doitnous renseigner sur :

- la longévité de l’espèce (espérance de vie,table de mortalité...),- le retour des jeunes la première année surleur lieu de naissance,- l’installation des jeunes près de leur lieu denaissance (philopatrie),- l’âge de la première reproduction,- la fidélité du couple,- la fidélité au site.

Ce volet de l’étude est de loin le plus com-plexe et nécessite un engagement à longterme. Les résultats ne pouvant devenir si-gnificatifs qu’au bout d’une dizaine voir unevingtaine d’années.

- Les nombreux contacts avec des poussinsde circaète (contrôles, baguages) vont de pairavec des relevés biométriques etmorphométriques.Les relevés biométriques ont d’ores et déjàpermis de déterminer l’âge du poussin à quel-ques jours près ; ceci à partir de la crois-sance de l’aile pliée. Cet outil nous sera d’unegrande utilité pour analyser le déroulementpluriannuel de la reproduction (dates deponte).Par la morphométrie, réalisée à partir de di-verses mesures effectuées sur la tête et lespattes, nous allons essayer de déterminer lesexe du poussin ; la couleur de l’iris est éga-lement prise en compte. L’analyse est encours et sera avantageusement accompagnéepar la détermination du sexe d’un lot de pous-sins par la génétique. Une plume en pousse,prélevée chez chaque poussin mesuré, per-mettra ce test absolu par un laboratoire. Les applications de la connaissance du sexedes oiseaux marqués compléteront les ré-sultats issus de l’observation et affinerontles interprétations du comportement ( mo-dalité de l’émancipation, philopatrie ...).

- Dans le cadre du suivi sanitaire des popula-tions animales du PNC, chaque oeuf non fé-condé et tous les cadavres de poussin ou

Photo : Bernard Joubert

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d’adulte sont transmis à un laboratoire pouranalyses toxicologiques et dans une moin-dre mesure bactériologiques.A long terme, des corrélations apparaîtrontpeut-être entre mortalité et polluants chi-miques.

- D’autres analyses secondaires nous ontpermis d’évaluer le temps de recherche pourl’inventaire des couples, la méthode la plusappropriée, autant d’informations utiles àl’établissement de protocoles de recherche.Nous avons également entrepris une étudecritique de l’impact de nos recherches surles couples suivis (réaction des adultes audérangement occasionné par la visite del’aire).

3-Quelques résultats d’étude

INVENTAIRE:Voir le tableau ci-dessus pour les densitéstrouvées par zone.Dans le cadre du recensement 2000-2001des rapaces diurnes, une large zone de 392000 ha englobant l’espace Parc national desCévennes a été prospectée et permet d’éva-luer la population à 146/213 couples ; notreévaluation s’inscrit parfaitement dans cettefourchette. La Lozère accueille, à elle seule,120/190 couples de circaète avec les deuxtiers de l’effectif dans la moitié sud du dépar-tement.

REPRODUCTIONOnze années de suivi permettent de fixer letaux moyen de reproduction des circaètesde notre zone d’étude à 0,54 ; cette moyennea été établie à partir de l’analyse de 404 casde reproduction. Ce taux varie d’une annéeà l’autre entre 0,33 pour l’année la moinsbonne et 0,78 pour la meilleure. Les troisdernières années étant bien centrées sur lamoyenne.

BAGUAGENous avons bagué jusqu’à présent 217 pous-sins de circaète sous l’égide du CRBPO. 172d’entre eux portent également une combi-naison colorée, sous la forme de bagues plas-tiques, apposées aux pattes en plus de la ba-gue métallique du muséum de Paris. Les ré-

sultats de reprise sont faibles pour les ba-gues métalliques : deux oiseaux retrouvés(1%), mais semblent un peu plus riches avecl’observation des marques colorées : 10 ob-servations (5,8%) sur notre zone d’étude.Toutefois, seulement huit ont pu être identi-fiées avec une quasi certitude. Les contactsaugmentent lentement d’année en année :deux en 2000, trois en 2001 et cinq en 2002.Aucun juvénile d’un an n’a encore été revu,les âges des oiseaux débutant à trois ans.Cette année, une jeune femelle de trois anss’est établie pour sa première reproductionà 14 km de son site de naissance.

BIOMETRIENos recherches sur la biométrie de l’ailepliée ont beaucoup avancé ces deux derniè-res années. Nous avons pu travailler sur 10poussins d’âge connu ou presque, jusqu’à l’âgede 60 jours environ. L’analyse des résultatsn’est pas encore terminée et des questionsse posent encore avant de pouvoir valider untableau de correspondance longueur de l’ailepliée / âge du poussin; notamment sur un éven-tuel dimorphisme sexuel dans la taille. D’oreset déjà, nous avons pu optimiser un premiertableau de correspondance permettant d’es-timer les dates de ponte et d’établir l’étale-ment de celles-ci par tranche d’une semaine,sans trop de risque d’erreur.

MORPHOMETRIELes analyses statistiques sont encore en courspour savoir s’il est possible de reconnaîtrele sexe d’un jeune circaète par une série demesures de la tête et des tarses. Une cen-taine de poussins a été sexée par électro-phorèse, ce qui facilitera l’interprétation desrésultats.

TOXICOLOGIELe Parc national des Cévennes mène un suivisanitaire de la faune sauvage avec la collabo-ration du cabinet vétérinaire de MM. REVELLIet DAMPERAT, chargé des autopsies et de latransmission des prélèvements à l’analyse.

Les premiers résultats sont variables en fonc-tion de la provenance des échantillons. Cer-tains présentent des taux assez forts de con-tamination chimique. Les éléments retrou-vés sont le Plomb, le Cadmium, les PCB, desOrganochlorés et Organophosphorés.

Tableau n° 1 : inventaire des couples et densités en 2002.Tableau n° 1 : inventaire des couples et densités en 2002.Tableau n° 1 : inventaire des couples et densités en 2002.Tableau n° 1 : inventaire des couples et densités en 2002.Tableau n° 1 : inventaire des couples et densités en 2002.

Secteur certain probable possible total superficie cple/100km² ha/cpleCévennes 39 4 8 51 60 000 8.5 1176Causses 30 10 13 53 90 000 5.9 1698Aigoual 36 3 2 41 45 000 9 1098Mont Lozère 12 9 7 28 70 000 4 2500

ZONE 117 26 30 173 265 000 6.5 1532

Il n’est pas encore possible d’interpréter cesinformations avec un échantillon aussi faible.Les analyses vont continuer dans les annéesà venir.

BACTÉRIOLOGIETous les résultats d’analyse montrent que lespoussins de circaètes sont porteurs de sal-monelles dès leur plus jeune âge. Lessérotypages révèlent 3 souches différentes :- des salmonelles du groupe Newport, com-munes chez de nombreux oiseaux et poten-tiellement pathogènes pour l’homme.- des salmonelles du groupe SIIIb (arizonae)que l’on rencontre également chez ... les rep-tiles !- des salmonelles du groupe IV (oudanae)rencontrées très rarement chez nous et pro-bablement exotiques.

PROTECTIONLe suivi de la population nous permet d’in-tervenir assez souvent dans le cadre de laprotection des sites de nidification. Cetteaction, très suivie par le Parc national desCévennes, porte essentiellement sur la sur-veillance des travaux forestiers (coupes, pis-tes, martelages...), la création des sentiers derandonnée, les épreuves sportives.... La con-certation permet dans presque tous les casde préserver la quiétude des sites. L’Officenational des Forêts est très à l’écoute de cesactions de protection des espèces et nousne pouvons que nous en réjouir. Un ou deuxsites en moyenne font l’objet d’une inter-vention chaque année.

Nous produisons enfin chaque année un rap-port d’activité, précisant les résultats obte-nus et disponible sur demande.

Jean-Pierre et Isabelle MALAFOSSE Lotissement la combasse

48000 Saint-Etienne du Valdonnez 04 66 48 08 34

[email protected]

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La plume du Circaete n°1 - Mission Fir/LPO - mars 20036

Première année de suivi d’unePremière année de suivi d’unePremière année de suivi d’unePremière année de suivi d’unePremière année de suivi d’unepopulation de circaète Jean-le-population de circaète Jean-le-population de circaète Jean-le-population de circaète Jean-le-population de circaète Jean-le-Blanc en GirondeBlanc en GirondeBlanc en GirondeBlanc en GirondeBlanc en Gironde

PRESENTATION DE L’AIRE D’OBSERVA-TIONLa région d’observation est située entreBordeaux et la côte océane, dans les limitesd’un quadrilatère joignant les bourgades deCastelnau-de-Médoc, Brach, Carcans-Plage etLe Porge-Océan, soit une surface d’environ1092 km2.LA POPULATION DE RAPACESLes rapaces nicheurs les plus communémentvisibles dans notre région sont : la buse va-riable, le milan noir, le faucon crécerelle, lefaucon hobereau, puis les trois espèces debusards - le busard Saint-Martin, le busardcendré et le busard des roseaux. Le circaèteJean-le-Blanc est, apparemment, assez bienreprésenté en Gironde, mais sa répartitionet ses effectifs sont encore très mal connus.Sur tous les espaces dégagés, l’observationde la plupart de ces espèces est relativementfréquente.MODE DE PROSPECTION POUR LA RE-CHERCHE DE NIDS DE CIRCAETE JEAN-LE-BLANC.Appliquant la méthode qui nous a été ensei-gnée par notre “maître” et ami JacquesBeauvilain (LPO), nous recherchons les nidsen essayant de repérer l’endroit approxima-tif de l’envol matinal d’un circaète. Ceci fait,nous inspectons les lisières et clairières enélargissant progressivement le cercle à par-tir du point initial. En cas d’insuccès, nousessayons un autre jour sous un autre angle(si c’est possible).Cette méthode s’applique souvent au hasard,dans une zone que nous supposons a priorifavorable, ou dans une zone où ont été vusdes circaètes, soit par nous-mêmes, soit pard’autres membres de la LPO.Pour l’instant nous n’avons pas découvert denouveaux couples à l’occasion de leur arri-vée au printemps, et dans les zones déjà con-nues nous ne les avons pas toujours vus lorsde leur installation.Pour 9 nids trouvés, la période de premierdécollage se situait en moyenne vers 9h -10h, des observations plus matinales n’ayantpour l’instant rien donné. Nous supposonsque, globalement, dans les secteurs de landeet de boisements de pin que nous connais-sons en Gironde, les ascendances thermi-ques et la mobilité des reptiles se produi-sent peut-être avec un certain décalage dansle temps par rapport à des régions pierreu-ses et accidentées.Plus tard, dans la journée, nous essayons derepérer un éventuel circaète transportant unserpent, mais jusqu’à présent cette opportu-nité ne s’est produite qu’une fois, en 1998.La principale difficulté, dans certains endroits,est le manque de recul par rapport au boise-ment de pins à prospecter. Nous avons éga-lement observé que dans certains cas et/ou

pour certains oiseaux, le premier décollagematinal se fait au ras des pins, puis l’oiseau vase percher plus loin. Si nous avons suivi cettemanoeuvre, nous essayons de “remonter àla source”, mais il est certain que dans notrerégion n’offrant pas de points d’observationélevés nous devons manquer une bonne par-tie des envols de circaètes.II s’est également produit depuis la tempêtede 1999 un phénomène d’éclaircie de la den-sité des massifs forestiers. De ce fait il y aassez souvent de grands espaces dégagés en-tre les pins, les circaètes sont donc suscep-tibles de nicher au coeur même d’un boise-ment, et non plus en majorité en lisière,comme c’était apparemment le cas dans lepassé. (Un adhérent LPO qui inspectait desnids dans le cadre de l’Enquête Rapaces adécouvert cette année un nid de circaète :c’était un ancien nid de buse en plein milieud’un boisement !).BILAN 2002 EN CHIFFRES7 nouveaux nids ont été trouvés.4 nids ontété retrouvés occupés au même endroitqu’en 2001,1 nid a été construit dans la mêmezone qu’en 2001, à environ 1,8 km de dis-tance,1 couple anciennement découvert estrevenu dans sa zone, le nouveau nid n’a pasété trouvé, 1 couple découvert en 2001, suivicette année, ne nous a pas permis de décou-vrir de nid,1 nouveau couple a été repéré,mais n’a pas été assez suivi,une ancienne zonea été prospectée, mais nous n’y avons jamaisvu qu’un seul oiseau un jeune volant a étéaperçu tardivement dans une zone, pas assezsuivie.Total : 17 zones prospectées,15 couples localisés,(= env. 1,4 couples trou-vés sur 100 km2) 12 nids trouvés.

Reproduction8 éclosions constatées pour 12 nids (soit67%). 6 jeunes volants pour 12 nids (soit 50%)(Rappel : en 1999, 80 ou 100% [doute dans uncas] sur 5 nids).Exemples de distance séparant deux nids pro-ches : 6,5 km, 6,2 km, 5,6 km, 4,5 km, 2,8 km,2,8 km, 2,8 km.MENACES POUR LES NIDSA notre connaissance, sur les sites que nousavons suivis, les seules menaces sont cellesde travaux forestiers dans les parages du nid(coupe, éclaircissage, débroussaillage) et éven-tuellement d’incendies.Pour le reste, les circaètes ont niché dansdes endroits très retirés et tranquilles, oùnous avons pu constater la quasi-absenced’êtres humains pendant toutes les longuespériodes où nous y avons effectué nos ob-servations.II faut aussi remarquer la fréquente fragilitédes aires, de très petites dimensions par rap-port à la taille de l’oiseau, et leur installationprécaire, ce qui les rend très vulnérables auxintempéries.OBSERVATIONS PARTICULIERES• Une ponte de remplacement a été consta-tée sur un nid où l’oeuf initial avait été re-trouvé à terre, cassé et vide, le 12 mai, à envi-ron 150 pas du nid (la femelle étant alorstoujours sur le nid). Ensuite un jeune poussina été vu le 20 juillet (âge estimé : 3 semaines),puis plus rien.En fait, il a dû décéder vers l’âged’un mois, d’après ce que nous avons pu cons-tater en montant au nid le 16 septembre.• Un nid a été retrouvé sur le sol, avec unjeune âgé d’environ 55 jours. Un nid artificiela été construit dans la partie haute d’un grandpin couché par la tempête (incliné à env. 10-

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15°), soit à une hauteur de 2,50 m, avec dé-pôt d’un matelas d’ajoncs sur le tronc pouressayer d’en interdire l’accès aux carnivoresterrestres.Le jeune y a séjourné pendant 20 jours avantson envol, effectué sans problème.La proximité de bosquets de feuillus a per-mis d’aménager des affûts discrets et de fil-mer par la suite des nourrissages à l’aire, etceci pendant 5 semaines après le premierenvol.• Site de “Brach 2” (01/09) : nourrissage labo-rieux.Un adulte est venu livrer avec succès un ser-pent vers 13h45. Mais à 14h05, l’autre parentarrive à son tour pour nourrir le jeune. II sepose sur le nid, le jeune essaie de tirer leserpent, sans succès. Le parent s’envole, faitune boucle autour du nid et revient se poser.Deuxième essai, le jeune tente à nouveau detirer sur le serpent : nouvel échec. Puis ànouveau le parent s’envole, tourne quelquesinstants autour du nid, et se pose pour latroisième fois. A nouveau le jeune tire vi-goureusement sur le serpent, apparemmentsans arriver à l’extirper. Cependant, et bienque l’adulte reparte le jabot encore gonflé,nous voyons peu de temps après le jeunemanger par petits bouts. Nous supposonsqu’il avait réussi à “arracher” un morceau duserpent.• Le 22 septembre, nous avons encore vudans 3 zones visitées (sur 4) le jeune cir-caète voler aux abords immédiats du nid.Dans un cas, nous avons même assisté à lalivraison d’un serpent sur l’arbre du nid : cedernier étant tombé quelques jours aupara-vant (site de “Brach 2”), nous sommes venusvérifier sous l’arbre, et y avons trouvé deuxcouleuvres mortes, que le jeune avait dû lais-ser échapper.

Puis vers 18 h nous avons reconnu les cris de“quémandage” du jeune, et n’avons eu que letemps de nous cacher sommairement sousdes fougères pour assister au nourrissage, àune dizaine de mètres du pin où s’étaientposés les deux circaètes.• Site de “Brach 2” (suite, 28/09) : nourrissageen deux temps.Nous observons de très loin l’arrivée de deuxcircaètes dans la zone de nidification, un adultesuivi d’un jeune qui quémande. Ils descen-dent près de l’arbre du nid (celui-ci étanttombé au sol depuis peu de temps).L’adulte se pose sur une branche à 15h53, lejeune sur un pin en face à 5 mètres environ etcontinue de crier. Rien ne se passe pendant àpeu près une minute.Puis l’adulte s’envole et cercle longuementdans le ciel, on voit nettement un bout deserpent dépasser du bec. Vers 16h il retournese poser au même endroit qu’auparavant, lejeune décolle de son pin et vient “sauter”dans celui où se trouve l’adulte. II crie commelors d’un nourrissage habituel, nous suppo-sons que la “livraison” s’est bien passée.L’adulte repart, et plane plusieurs minutesdans le ciel. Le jeune finit par le rejoindre, ilsdérivent lentement, l’adulte au-dessus, puisle jeune semble se diriger vers une direction,l’adulte au-dessus le suit.Ils finissent par disparaître au loin dans unespirale ascendante où l’on devine à peine deuxautres silhouettes...• Un nid trouvé en 2001 et réutilisé en 2002est tombé à terre quelques jours avant l’en-vol du jeune. Celui-ci a été vu perché sur labranche du nid, puis en vol par la suite.• Un nid de buse variable, inaccessible par ledessus (branches), et situé en plein milieud’un boisement, a été utilisé avec succès parun couple de circaètes. Nous retournerons

le vérifier l’année prochaine, car nous avi-ons déjà observé une reproduction dans unnid de buse variable (d’un accès facile par lehaut) en 1999, mais il a été détruit par latempête.• Nous avons observé à plusieurs reprisesdes circaètes perchés par jour de vent nulsur des grands pins en bordure de fossés(pratiquement à sec) ou chemins. Dans uncas, en début d’après-midi, nous avons vutrès nettement un circaète plonger en obli-que depuis son perchoir et s’envoler peuaprès avec une extrémité de queue dépas-sant du bec (lézard ? petit serpent ?). Unevisite sur la zone où le circaète était perchénous a révélé des fientes sous plusieurs ar-bres alignés le long du fossé (végétation clair-semée dans du sable). D’autres fientes ontété trouvées dans une situation identique lelong d’un chemin sableux qui bordait unepetite rivière, dans le même secteur.Dans un autre cas nous avons vu, un matin devent nul, un circaète plonger (assez molle-ment) vers le sol (chemin + espaces déga-gés) depuis un perchoir, remonter quelquessecondes plus tard, se percher un peu plusloin, puis recommencer encore une fois lemanège.Nous envisageons donc l’hypothèse (à véri-fier par la suite) que dans les milieux fores-tiers de la Gironde certains circaètes se li-vrent à une action de chasse particulière enguettant depuis des perchoirs, en bordurede zones probablement assez riches enproies, quand le vent ne porte pas suffisam-ment.

Françoise GERARDINfrancoise.gerardinewanadoo.fr

Yves FORGETProspection :

Jacques BEAUVILAINPascal GRISSER

Participation amicale de Pierre PETIT

TarnTarnTarnTarnTarnMontagne Noire.Montagne Noire.Montagne Noire.Montagne Noire.Montagne Noire.Région Midi-Pyrénées.Région Midi-Pyrénées.Région Midi-Pyrénées.Région Midi-Pyrénées.Région Midi-Pyrénées.

Le cadre géographiqueLa Montagne Noire est située à 60 km à l’estde Toulouse et 70 km au sud d’Albi, préfec-ture du Tarn. Contrefort méridional du Mas-sif Central, elle est une montagne moyennede type massif ancien. La région dessine surla carte une sorte de « Finistère ». Elle formeun gigantesque dos de baleine de 70 km delong (d’est en ouest) sur à peine quelqueskilomètres de large dans sa partie centraleoù culmine le Pic de Nore à 1211 m d’alti-tude. De part et d’autre de ce sommet, lesversants s’abaissent vers les plaines qui s’éta-lent entre 100 et 300 mètres d’altitude. Enson versant sud, la Montagne Noire fait faceavec beaucoup de modestie aux puissantsmassifs des Pyrénées Orientales et del’Ariège, que précédent les montagnes

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Mission Fonds d’intervention pour les rapaces de la LPO, BP 944, 75519 PARIS CEDEX 15Tél : 01 53 58 58 38 - Fax : 01 53 58 58 39 - Mail : [email protected]

Conception, réalisation, maquette : Bernard JOUBERT, Jean-Pierre MALAFOSSE et Yvan TARIELCette lettre d’information est éditée par la MissionFonds d’intervention pour les rapaces de la LPO.

LPO © 2003 – Reproduction interdite, quel que soit le procédé,sans autorisation écrite de l’éditeur.

moyennes des Corbières. Entre ces deuxensembles se trouve le couloir audois ouvertsur la Méditerranée. A l’ouest, la MontagneNoire disparaît sous les collines du Laura-gais. C’est à la limite de la plaine et de lamontagne, dans la région de Sorèze, sur lespremiers contreforts très vallonnés etmoyennement encaissés que j’observe lescircaètes depuis 1989.

Le suivi des oiseauxBien que connaissant de nombreux sites oùniche l’espèce dans le département du Tarn,mon objectif n’est pas de recenser le nom-bre de nicheurs, lesquels sont estimés à unetrentaine de couples.Mes observations portent sur un couple(deux, depuis peu), ce pour des raisons decommodité mais également sentimentales.Chaque année, je m’évertue à trouver le sec-teur du nid, entreprise pas facile dans unerégion où les postes d’observation au sol nepermettent pas souvent d’avoir une vue d’en-semble sur le vallon ou le secteur suivi. Cecidemande parfois la mise en place de postessur les sapins.L’épicéa, le Douglas et le sapin pectiné sontles trois essences dominantes des forma-tions de résineux où niche le circaète enMontagne Noire. Les oiseaux bâtissent tou-jours sur un sapin. Les branches supérieuresde cet arbre sont pratiquement perpendicu-laires au tronc, c’est-à-dire horizontales. Acondition de pouvoir bénéficier d’un déga-gement suffisamment vaste pour pouvoir te-nir debout, les circaètes placent donc leursnids sur ces branches.Suivre le même couple d’année en année estpassionnant. C’est en même temps réduc-teur car on sait que chaque couple, voire cha-que individu, possède son caractère propre,ses habitudes. De ce fait, mes observationsn’ont pas la prétention d’être généralisables.Si ma démarche reste surtout basée sur lesimple plaisir de regarder vivre uncouple, je collecte des informa-tions d’ordre éthologiques et dis-pose d‘intéressantes données surle régime alimentaire. Le Jean-le-Blanc a ce pouvoir de mobilisermon attention du lever au coucherdu soleil. Suivre les mêmes indivi-dus, c’est aussi faire connaissanceintime avec l’espèce.

Christian AUSSAGUEL.2, avenue Georges Brassens

31570 Sainte-Foy-d’Aigrefeuille

SUIVISUIVISUIVISUIVISUIVIPPPPPAR BALISEAR BALISEAR BALISEAR BALISEAR BALISE

Un second circaèteUn second circaèteUn second circaèteUn second circaèteUn second circaèteéquipé d’une balise équipé d’une balise équipé d’une balise équipé d’une balise équipé d’une balise ArgosArgosArgosArgosArgospar Bernd MEYBURG,par Bernd MEYBURG,par Bernd MEYBURG,par Bernd MEYBURG,par Bernd MEYBURG,au centre UFCS au centre UFCS au centre UFCS au centre UFCS au centre UFCS VVVVVendéeendéeendéeendéeendée.

C’est le second circaète, qui après avoir étésoigné au centre UFCS Vendée, est équipéd’une balise Argos par Bernd MEYBURG,pour le compte du GTMR. Le premier, aprèsavoir été dix mois en soin, avait été relâchéen juillet 1995. La balise Argos, solaire, avaitalors émis jusqu’à Noël 1995, permettantainsi de suivre le circaète dans sa migrationautomnale et sur son lieu d’hivernage à l’ex-trême sud du Mali. La durée de la migationavait été d’un mois pour un trajet de 4 045km. Les vitesses constatées furent : vitesseminimale : 100 km/jour, moyenne : 135 km/jour, maximale : 234 km/jour. L’aire occupéeen été fut de 92 km² et en hiver de ... 410 km²(la Vendée est plus riche en reptiles que leMali !) (Alauda, 63, 1996). Si la balise s’arrêtad’émettre après cinq mois, le circaète futretrouvé, vivant, près d’une mare, au Mali... 4ans après !Le second, récupéré en septembre 2001, futéquipé par Bernd et relâché en juillet 2002. Ilétait mi-novembre au Burkina-Faso, le 16 marsen Andalousie, le 21 mars près de Mont deMarsan.S’il est scientifiquement passionnant de pou-voir suivre ces voyageurs au long cours, grâceà cette technologie, ces oiseaux ne peuventnous offrir plus grande gratification que ceretour à la vie après une éclipse de 9 à 10mois pour cause de soins.

Christian PACTEAU54, rue de Gaulle

85580 Saint-Denis du Payre

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Données éthologiqesDonnées éthologiqesDonnées éthologiqesDonnées éthologiqesDonnées éthologiqessur la formation du couplesur la formation du couplesur la formation du couplesur la formation du couplesur la formation du couplechez le circaète Jean-le-Blanc.chez le circaète Jean-le-Blanc.chez le circaète Jean-le-Blanc.chez le circaète Jean-le-Blanc.chez le circaète Jean-le-Blanc.Bernard Joubert, article paru dans :Alauda 70 (1), 2001 : 3-8

Le circaète Jean-le-BlancLe circaète Jean-le-BlancLe circaète Jean-le-BlancLe circaète Jean-le-BlancLe circaète Jean-le-BlancMonographie de Bernard Joubert chez EveilNature, 21 x 21 cm, photos en couleurs, re-lié, 72 pages, 13,60 euros.

En vente dans le catalogue de la LPO au : 05 46 82 12 66, www.lpo-boutique.com

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Groupe national circaèteJP Malafosse : [email protected]

Lotissement la combasse 48000 Saint-Etienne du Valdonnez

ou Bernard Joubert : 28, rue du 11 novembre43300 Langeac

Recherche de donnéesRecherche de donnéesRecherche de donnéesRecherche de donnéesRecherche de donnéesNous connaissons mal les sites de nidifica-tion du circaète en région alpine française.Les dates d’arrivées et de départ, les altitu-des maximum des aires, la densité, le taux dereproduction sont ignorées. Un appel estlancé aux ornithologues ayant observé, dansles Alpes françaises du Nord - vallées deHaute-Savoie (74), de Maurienne (73) et dumassif de l’Oisans (38) - ce bel oiseau.

Françoise CHEVALIER, 2 rue Paul Valéry, 38100 Grenoble,