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LA 3. REECRITURES. VOLTAIRE Introduction : 18ème : passage du classicisme à période des Lumières. Nouvel âge, marqué par prédominance de la raison, de la science, respect, tolérance. Classicisme : clarté, rigueur, perfection. Nbx auteurs classiques sont ds imitation des Anciens. Principe que l’on retrouve ici dans l’œuvre de Voltaire, figure pourtant phare du mouvement des Lumières (héritage classique bien présent). Genre souvent utilisé dans reprises de mythes : tragédie, genre qui répond à codes et structures différents selon les époques avec évolution perceptible. Voltaire. (François Marie Arouet), écrivain philosophe français du siècle des Lumières (XVIIIème siècle). Né en 1694, c'est l'un des plus grand philosophe des Lumières, avec Diderot, d'Alembert et Rousseau. Ses écrits satiriques contre le Régent le conduisent à la Bastille. Très virulent contre le système, il est contraint de s'exiler en Angleterre. A son retour, il est élu en 1746 à l'Académie française. Il a voyagé en Europe pour diffuser les idées des Lumières. Le mouvement littéraire des Lumières est destiné à combattre l'obscurantisme. Les principales œuvres de Voltaire sont Zadig (1747), Micromégas (1752), Candide (1759). Il est mort en 1778. Œdipe Roi : tragédie écrite en 1717 alors que Voltaire est emprisonné à la Bastille pour avoir une satire hargneuse sur le gouvernement français (rappeler engagement de Voltaire dans le mouvement des Lumières etc). Reprend tragédie de Sophocle, y ajoute une dénonciation du pouvoir des puissants, de l’Eglise. + utilise lyrisme dans des tirades poétiques qui montrent bien combien Œdipe chemine inéluctablement vers le malheur. Extrait étudié : acte V, scène 4. Monologue d’Œdipe, en proie au désespoir, vient de découvrir, de comprendre qu’il est meurtrier de son père, fils de son épouse. Œdipe ici victime de son sort, du destin (accomplissement de l’oracle) + portée cathartique évidente pour le spectateur. PBQ : Comment la catharsis est-elle ici mise en œuvre ? Quels sentiments ce monologue exprime-t-il et suscite-t-il chez le spectateur ? Peut-on dire que cet extrait est classique, du point de l’esthétique comme de la morale ? I- Un héros victime d’une fatalité inéluctable / d’un destin inexorable. 1 ) Un destin en marche. - lexique de la fatalité : « oracle 1, inévitable 2, ascendant 7, piège 8, dieu 9, aveuglement 11, instrument 12 » - verbes d’action et de mouvement « tombais 8, m’entraînait 9, creusait 10, secouer + mise en valeur rejet 18, s’ouvre 20, approche, entraîne 25, irai 26, suis 27 » - passé / présent. Retrace l’avancée du héros. Vivacité de la scène, du monologue. « a pressé 2, ai réglé 6, as pu 7, tombais 8, fit 22 » « vois 3 déteste 6, connais 13, punissez 15, suis-je 16, suis 27 » + futur en fin de texte « irai » 26 : accomplissement inévitable d’un destin en marche - avancée inéluctable : rimes 1-2 + jeu de sonorités « misérable » 5 « impitoyables » 15 / 9-10 / 11-12. + Enjambements : effet d’insistance sur la progression incontrôlable, mouvement continu, que l’on ne peut arrêter : 9-10. 2) Omnipotence du Destin. Forme de pouvoir incontrôlable, d’une force mystérieuse, toute puissante et à peine dicible : - superlatif. «un dieu plus fort que toi » 9. « tu n’as pu résister » négation qui confirme la puissance. « tombais » 8 : chute inévitable. Antithèse « en voulant l’éviter » 8. Supériorité face au héros.

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LA 3. REECRITURES. VOLTAIRE

Introduction : 18ème : passage du classicisme à période des Lumières. Nouvel âge, marqué par prédominance de la raison, de la science, respect, tolérance. Classicisme : clarté, rigueur, perfection. Nbx auteurs classiques sont ds imitation des Anciens. Principe que l’on retrouve ici dans l’œuvre de Voltaire, figure pourtant phare du mouvement des Lumières (héritage classique bien présent). Genre souvent utilisé dans reprises de mythes : tragédie, genre qui répond à codes et structures différents selon les époques avec évolution perceptible. Voltaire. (François Marie Arouet), écrivain philosophe français du siècle des Lumières (XVIIIème siècle). Né en 1694, c'est l'un des plus grand philosophe des Lumières, avec Diderot, d'Alembert et Rousseau. Ses écrits satiriques contre le Régent le conduisent à la Bastille. Très virulent contre le système, il est contraint de s'exiler en Angleterre. A son retour, il est élu en 1746 à l'Académie française. Il a voyagé en Europe pour diffuser les idées des Lumières. Le mouvement littéraire des Lumières est destiné à combattre l'obscurantisme. Les principales œuvres de Voltaire sont Zadig (1747), Micromégas (1752), Candide (1759). Il est mort en 1778. Œdipe Roi : tragédie écrite en 1717 alors que Voltaire est emprisonné à la Bastille pour avoir une satire hargneuse sur le gouvernement français (rappeler engagement de Voltaire dans le mouvement des Lumières etc). Reprend tragédie de Sophocle, y ajoute une dénonciation du pouvoir des puissants, de l’Eglise. + utilise lyrisme dans des tirades poétiques qui montrent bien combien Œdipe chemine inéluctablement vers le malheur. Extrait étudié : acte V, scène 4. Monologue d’Œdipe, en proie au désespoir, vient de découvrir, de comprendre qu’il est meurtrier de son père, fils de son épouse. Œdipe ici victime de son sort, du destin (accomplissement de l’oracle) + portée cathartique évidente pour le spectateur. PBQ : Comment la catharsis est-elle ici mise en œuvre ? Quels sentiments ce monologue exprime-t-il et suscite-t-il chez le spectateur ? Peut-on dire que cet extrait est classique, du point de l’esthétique comme de la morale ?

I- Un héros victime d’une fatalité inéluctable / d’un destin inexorable. 1 ) Un destin en marche. - lexique de la fatalité : « oracle 1, inévitable 2, ascendant 7, piège 8, dieu 9, aveuglement 11, instrument 12 » - verbes d’action et de mouvement « tombais 8, m’entraînait 9, creusait 10, secouer + mise en valeur rejet 18, s’ouvre 20, approche, entraîne 25, irai 26, suis 27 » - passé / présent. Retrace l’avancée du héros. Vivacité de la scène, du monologue. « a pressé 2, ai réglé 6, as pu 7, tombais 8, fit 22 » « vois 3 déteste 6, connais 13, punissez 15, suis-je 16, suis 27 » + futur en fin de texte « irai » 26 : accomplissement inévitable d’un destin en marche - avancée inéluctable : rimes 1-2 + jeu de sonorités « misérable » 5 « impitoyables » 15 / 9-10 / 11-12. + Enjambements : effet d’insistance sur la progression incontrôlable, mouvement continu, que l’on ne peut arrêter : 9-10.

2) Omnipotence du Destin. Forme de pouvoir incontrôlable, d’une force mystérieuse, toute puissante et à peine dicible : - superlatif. «un dieu plus fort que toi » 9. « tu n’as pu résister » négation qui confirme la puissance. « tombais » 8 : chute inévitable. Antithèse « en voulant l’éviter » 8. Supériorité face au héros.

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- inconnu + enjambement : mise en valeur du mystère de cette force, l’homme ne pouvant la connaître, la reconnaître ne saurait la maîtriser. Doit s’y soumettre : force de l’impératif : « punis-moi » 23. Même la vertu devient son contraire : allégorie 5-6. - nombreuses hyperboles : « impitoyables dieux » 14. « tous mes forfaits » 13 « le voilà donc rempli cet oracle exécrable » + allitération en k. « tonnerre en éclats semble fondre sur moi » 19. -présence de forces supérieures multiples : l’homme ne peut échapper à son destin. Dieux 9-14 + passage du singulier au pluriel, effet de gradation. Euménides 17. « tonnerre »

3) Œdipe : jouet malmené par le destin. - passif, objet de toutes les actions. « m’entraînait » 9, « fondre sur moi » 19, « punis-moi » 20, « entraîne moi 25 ». Crainte qui agit pr lui, allégorie et non lui-même. Verbe d’action = chute. 8. Sinon verbes d’état, de connaissance ou de perception 3, 11, 13, 21. mais quasiment aucune action. Souvent mouvement final. - « malgré moi » jouet du destin Œdipe : victime, ce que montrent bien l’écho sonore avec impitoyables en 15 qui qualifie les dieux et les désigne comme responsables de ce qui lui arrive. + rime funeste - déteste 5-6. - périphrase « esclave et instrument » : homme, jouet du destin. 12. Petitesse et faiblesse qui s’opposent à la toute puissance du destin et des divinités. - champ lexical de la cruauté : « exécrable 1, affreux 3+16 (répétition), misérable, funeste 5, impitoyables 14, secouer, vengeurs 18, enfer 20, détesté 23, demeures sombres 25 ». + murs teintés de sang 17 qui emprisonnent Œdipe dans son crime.

II- Un héros tiraillé, empreint de duplicité. Originalité de Voltaire est qu’Œdipe ne se présente pas comme uniquement coupable, il exprime sa colère, sa rancœur contre les dieux. 1) Un parcours double, entre culpabilité et innocence. - antithèses : « crainte » donc réticence s’oppose à pressé + inévitable v.2. « inceste / parricide contre vertueux » Métaphore « mélange affreux » signe de la duplicité. Comme mélange de deux fluides qui entraîne réactions néfastes, signes des deux aspects contradictoires de ce qu’est Œdipe, dans son identité et à travers son parcours. Oxymore « misérable vertu » 5. + « stérile et funeste » s’opposent aux caractéristiques de la vertu. « tombais » / « évitais » 8. - « forfaits » à la césure comme « malgré moi » 11-13 et « pouvoir inconnu » 12 : accentue l’idée que les fautes ne sont pas de sa responsabilité, oscillation permanente. - crimes : dieux. Un dieu vers 9 associé au crime. + v.14 mes crimes sont les vôtres : effet de miroir induit par parallélisme entre déterminant et pronom possessifs. Idem rime entre Euménides et parricide comme si le crime justifiait leur essence, leur activité. -métaphore de l’obscurité. « noir ascendant » 7. « aveuglement » l.11. conduit à la faute mais sous l’effet de l’aveuglement donc se dédouane. 15-16. -image de la chute. Descente aux enfers malgré la volonté d’Œdipe : piège, éviter, m’entraînait dans. Inévitable donc Œdipe irresponsable.

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2) Œdipe entre colère et acceptation. - face à lui-même : « et je me vois enfin » v.3. + enjambement donc mise en valeur de la reconnaissance, de l’acceptation. « inceste et parricide » « voilà » présentatif 13 + 20 « je vois, je reconnais » verbes du savoir. Ne nie pas ses fautes, se place en juge de lui-même. Sauf qu’Œdipe ne se juge pas pleinement responsable. Dit aussi qu’il a été vertueux : voir répétition de « et pourtant vertueux » comme une épanorthose, comme si Œdipe avouait mais rectifiait aussitôt. Egalement perceptible dans l’effet de dédoublement : se voit ou voit un autre lui. -face aux dieux : reconnaissance du mot crime répété deux fois 9, 14 + criminelle « et vous m’en punissez ». Œdipe enrage, montre sa colère. + chp lexical de la religion et mise en évidence de l’intransigeance de celle-ci. Périphrase qui qualifie la vertu, vers 5 « nom stérile et funeste » = les dieux ne récompensent pas les qualités. + utilisation des pronoms de la 2e personne = pointe du doigt le véritable responsable. -face à son père et à sa mère : « souilla » 24 reconnaît la faute + «blessure mortelle » 21 « murs teintés de sang » « noir ascendant » qui peut désigner le père mais métonymie « main criminelle » 22 comme si elle ne lui appartenait pas. Idem avec la périphrase du monstre 23. + répétition avec enjambement, rejet de ce qu’Œdipe veut nier de lui-même ; de ce qu’il n’a pas voulu être. Animalisation du crime avec mention du flanc, répété en 22 : flanc du père et 24, flanc de la mère. Œdipe reconnaît ses fautes mais évoque une colère perceptible contre les dieux, attribue le crime aux dieux. Se déshumanise comme s’il n’acceptait pas de prendre la responsabilité, n’assumait pas. 3) errance et tiraillement. -perdu mais clairvoyant. verbes de connaissances, de savoir. Au moment où Œdipe voit, Œdipe se trompe, s’égare « : noir ascendant », « abîme » 7 et 10. Quand il va être aveuglé (punition), il sera sage et clairvoyant : 15-16. 21 je vois : effet d’opposition. Œdipe sait ce vers quoi il avance. Nuit qui tombe et met fin à une possible vie lumineuse pour Œdipe. Voile affreux qui plane comme des nuages sur don destin assombrit. Noir. Mérite l’enfer. -interrogation, rhétorique. 15, 16, 20. Sont le signe d’une ultime errance avant la sagesse. Œdipe sait qu’il est contraint d’avancer vers la sentence, vers la punition. Impératifs montrent la fermeté de sa décision, ici Œdipe est enfin maître de son destin. Pose des questions au moment où il a les réponses les plus claires, où s’affirme toute sa lucidité, loin du noir ascendant : 20 « je vois je reconnais » « punis-moi, venge-toi, approche, entraîne-moi » effet de gradation. - + symétrie « entraînais » malgré lui et là relève de sa propre demande, de son souhait. Même effet avec abîme 10 qu’Œdipe fuyait et là cheminement volontaire : « L’enfer s’ouvre » 20, personnification-allégorie. + futur : concrétisation : v 26. 27. Souffrance ultime mais héros résolu à assumer son destin. Conclusion : Voltaire travaille ici sur les émotions du lecteur, nous présente un héros certes affaibli, en proie à son destin et prêt à accepter sa sentence mais qui remet la faute sur les dieux. Montre ici le spectacle des passions humaines face au Destin. Peut-on aller jusqu’à dire que Voltaire dénonce ici la toute puissance de la religion qui conduit même les vertueux vers le crime. Ouverture. Cf Racine, Phèdre. « Vénus tout entière à sa proie attachée ».