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Le savoir-vivre en entreprise Business oblige! «J’aime la règle qui corrige l’émotion.» Georges BRAQUE Sommaire Introduction ........................................ ........................... XI Savoir être ou le respect des valeurs............................ 1 Savoir converser ........................................... ................ 7 Quelques conseils............................................. ......... 7 Les sujets à éviter .............................................. ........ 9 Savoir passer à table ............................................... ..... 13 Préparer un déjeuner d’affaires ................................. 13 La commande ............................................ ............... 15 L’addition s’il vous plaît! .......................................... 17 Propos de table ............................................... .......... 18 Savoir gérer une réception............................................ 21 Si vous l’organisez.......................................... ........... 21 Et si vous êtes invité(e)............................................ .. 22 Savoir déjouer les pièges du pouvoir............................ 25 Les importants (pour qui se prennent- ils?) ................ 26 Le rendez-vous avec une personne «importante»...... 26 Chefs, donnez l’exemple! .......................................... 27 L’homo politicus............................................ ........... 28 Galerie de portraits ........................................... ............ 31 Le bosseur drogué............................................... ...... 32 Le frimeur.............................................. ................... 33 L’indécis ........................................... ........................ 34 L’obsessionnel....................................... .................... 34 Le parano .............................................. ................... 35 Le combinard ou business plouc par excellence ........ 35 Le globe- trotter.............................................. ........... 36 Le cancrelat ........................................... ................... 37 Le planqué.............................................. .................. 38 L’opportuniste ...................................... .................... 39 Le rond-de- cuir................................................. ........ 40 Le «speedé» ............................................ ................. 41 Le plus que parfait ............................................. ....... 41 Le nouveau riche ............................................... ....... 42 Le big boss................................................. ............... 43 Le branché.............................................. .................. 44 Savoir renoncer aux tics… de «language».................. 47 Le bien parler .............................................. ............. 47 Le savoir-vivre techno : la nouvelle solitude de l’ubiquité .......................................... ........................ 51 Le portable ............................................ ................... 51 On ne s’écrit plus, on s’envoit un mail ?.................... 54 La techno courtoisie .......................................... ....... 58 Le standard : soignez l’accueil de vos correspondants! 60 Danger SDA ................................................. ............ 61 Parle-moi, je te dirai ce que j’entends! ...................... 62 Savoir recevoir en affaires............................................ 65 L’hospitalité professionnelle ..................................... 65 Sachez accueillir les voyageurs .................................. 67 La conférence .......................................... ................. 69 Le savoir-vivre de l’écrit ............................................. .. 71 La nostalgie de l’écrit ............................................. ... 71 Les cartes de visite .............................................. ...... 73 Savoir accueillir au bureau........................................... 75 L’accueil ........................................... ........................ 76 Savoir-vivre et tabac ............................................... .. 78 Savoir voyager.............................................. ................. 81 Les voyages et invitations «promo».......................... 81 En avion ............................................... .................... 85 Au sol ................................................. ...................... 86 Offrir un cadeau : respecter l’éthique et l’élégance ...... 87 Que peut-on offrir, et à qui? ..................................... 88 Femme d’affaires et affaire de femmes…..................... 91 Muflerie au masculin ............................................ .... 92 Homme/femme en entreprise : pour une relation courtoise ........................................... ........................ 95 Tordre le cou aux préjugés masculins ....................... 97 Un savoir-vivre de circonstance.................................... 99 Les médecins............................................. ................ 99 La vendeuse ............................................ .................. 100 La secrétaire (assistante, collaboratrice) .................... 102 L’attente ........................................... ........................ 104 Savoir gérer un appel d’offre......................................... 105 Respecter le travail de l’autre .................................... 105 Avoir des valeurs ............................................. ......... 107 Lors de la soutenance orale… ................................... 109 L’éthique du fournisseur ......................................... . 109 Bien se tenir ............................................... ................... 111 Attention au look! ............................................... ..... 111 «Trop sympa!» ............................................. ........... 114 Le désordre ............................................ ................... 116 L’exactitude : la politesse des rois….......................... 118 Le retard .............................................. ..................... 119 Formuler des excuses ............................................. ... 121 Le remerciement ........................................ ............... 121 Conclusion........................................... .......................... 125 S’il y a bien une chose dont je suis certaine en écrivant ce petit guide, c’est qu’aucun lecteur ne se sentira concerné par ce qui va suivre, sinon pour y reconnaître les autres. Je suis consciente du privilège que j’ai, de n’être lue que par des gens irréprochables et qui n’ont d’autres objectifs que de faire profiter leur prochain de leur conception (la bonne!) du savoir-vivre. Si le lecteur constate que son attitude diverge considérablement dans quelques situations particulières de ce qui est «conseillé» dans ce guide, c’est que je me suis trompée sur ce qui se fait ou ne se fait pas! Bref, j’ai le plaisir d’écrire sur un sujet qui ne concerne strictement personne, mais qui, selon l’avis général, intéresse tout le monde. Avant d’être des règles, savoir-vivre et communication d’entreprise (indissociables) devraient être des témoignages d’attention et de délicatesse. Malgré l’émergence d’une consideration nouvelle pour tout ce qui concerne les resources humaines, il nous faut nous rendre à l’évidence : l’entreprise fait figure de Madame Sans-Gêne dans un monde où le liberalism économique a induit un libéralisme des usages laissant libre cours à une décontraction revendiquée dans les relations humaines. La revalorisation du rôle du chef d’entreprise, la recherche de cadres de plus en plus «supérieurs», la métamorphose des secrétaires en «assistantes» et des femmes de ménage de bureaux en «techniciennes de surface», n’ont pas pour autant élevé le niveau de courtoisie. Le constat est sans appel : l’entreprise est mal élevée! Serait-ce à cette fameuse conjoncture que nous devons l’accroissement d’une nouvelle classe sociale professionnelle, celle des business ploucs? Issus de tous les horizons, on les retrouve partout. «Ils n’en mourraient pas tous, mais tous étaient atteints.» Le président le plus élégant d’une prestigieuse multinationale peut être atteint du virus et toute trace d’éducation s’évanouir. L’arrivisme fait oublier les rudiments élémentaires de l’éducation; le pouvoir transforme en mufles, les médias créent des mégalos, et tout cela nous plonge dans une ambiance curieuse de relationnel douceâtre au detriment des principes de base d’un comportement courtois. Au fait : «faire la gueule» est mal élevé et le sourire est le «geste» le plus courtois qui soit! On se croit bien élevé parce qu’on se souhaite tout et n’importe quoi à longueur de journée : «bonne journée… bonne fin d’appétit (sic : au restaurant au moment du dessert…)

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Le savoir-vivre en entreprise Business oblige!Jaime la rgle qui corrige lmotion. Georges BRAQUESommaireIntroduction ................................................................... XISavoir tre ou le respect des valeurs............................ 1Savoir converser ........................................................... 7Quelques conseils...................................................... 7Les sujets viter ...................................................... 9Savoir passer table .................................................... 13Prparer un djeuner daffaires ................................. 13La commande ........................................................... 15Laddition sil vous plat! .......................................... 17Propos de table ......................................................... 18Savoir grer une rception............................................ 21Si vous lorganisez..................................................... 21Et si vous tes invit(e).............................................. 22Savoir djouer les piges du pouvoir............................ 25Les importants (pour qui se prennent-ils?) ................ 26Le rendez-vous avec une personne importante...... 26Chefs, donnez lexemple! .......................................... 27Lhomo politicus....................................................... 28Galerie de portraits ....................................................... 31Le bosseur drogu..................................................... 32Le frimeur................................................................. 33Lindcis ................................................................... 34Lobsessionnel........................................................... 34Le parano ................................................................. 35Le combinard ou business plouc par excellence ........ 35Le globe-trotter......................................................... 36Le cancrelat .............................................................. 37Le planqu................................................................ 38Lopportuniste .......................................................... 39Le rond-de-cuir......................................................... 40Le speed ............................................................. 41Le plus que parfait .................................................... 41Le nouveau riche ...................................................... 42Le big boss................................................................ 43Le branch................................................................ 44Savoir renoncer aux tics de language.................. 47Le bien parler ........................................................... 47Le savoir-vivre techno : la nouvelle solitudede lubiquit .................................................................. 51Le portable ............................................................... 51On ne scrit plus, on senvoit un mail ?.................... 54La techno courtoisie ................................................. 58Le standard : soignez laccueil de vos correspondants! 60Danger SDA ............................................................. 61Parle-moi, je te dirai ce que jentends! ...................... 62Savoir recevoir en affaires............................................ 65Lhospitalit professionnelle ..................................... 65Sachez accueillir les voyageurs .................................. 67La confrence ........................................................... 69Le savoir-vivre de lcrit ............................................... 71La nostalgie de lcrit ................................................ 71Les cartes de visite .................................................... 73Savoir accueillir au bureau........................................... 75Laccueil ................................................................... 76Savoir-vivre et tabac ................................................. 78Savoir voyager............................................................... 81Les voyages et invitations promo.......................... 81En avion ................................................................... 85Au sol ....................................................................... 86Offrir un cadeau : respecter lthique et llgance ...... 87Que peut-on offrir, et qui? ..................................... 88Femme daffaires et affaire de femmes..................... 91Muflerie au masculin ................................................ 92Homme/femme en entreprise : pour une relationcourtoise ................................................................... 95Tordre le cou aux prjugs masculins ....................... 97Un savoir-vivre de circonstance.................................... 99Les mdecins............................................................. 99La vendeuse .............................................................. 100La secrtaire (assistante, collaboratrice) .................... 102Lattente ................................................................... 104Savoir grer un appel doffre......................................... 105Respecter le travail de lautre .................................... 105Avoir des valeurs ...................................................... 107Lors de la soutenance orale ................................... 109Lthique du fournisseur .......................................... 109Bien se tenir .................................................................. 111Attention au look! .................................................... 111Trop sympa! ........................................................ 114Le dsordre ............................................................... 116Lexactitude : la politesse des rois.......................... 118Le retard ................................................................... 119Formuler des excuses ................................................ 121Le remerciement ....................................................... 121Conclusion..................................................................... 125Sil y a bien une chose dont je suis certaine en crivant ce petit guide, cest quaucun lecteur ne se sentira concern par ce qui va suivre, sinon pour y reconnatre les autres.Je suis consciente du privilge que jai, de ntre lue que par des gens irrprochables et qui nont dautres objectifs que de faire profiter leur prochain de leur conception (la bonne!) du savoir-vivre.Si le lecteur constate que son attitude diverge considrablementdans quelques situations particulires de ce qui est conseill dans ce guide, cest que je me suis trompe sur ce qui se fait ou ne se fait pas! Bref, jai le plaisir dcrire sur un sujet qui ne concerne strictement personne, mais qui, selon lavis gnral, intresse tout le monde.Avant dtre des rgles, savoir-vivre et communication dentreprise (indissociables) devraient tre des tmoignages dattention et de dlicatesse. Malgr lmergence dune consideration nouvelle pour tout ce qui concerne les resources humaines, il nous faut nous rendre lvidence : lentreprise fait figure de Madame Sans-Gne dans un monde o le liberalism conomique a induit un libralisme des usages laissant libre cours une dcontraction revendique dans les relations humaines. La revalorisation du rle du chef dentreprise, la recherche de cadres de plus en plus suprieurs, lamtamorphose des secrtaires en assistantes et des femmes de mnage de bureaux en techniciennes de surface, nont pas pour autant lev le niveau de courtoisie. Le constat est sans appel : lentreprise est mal leve!Serait-ce cette fameuse conjoncture que nous devons laccroissement dune nouvelle classe sociale professionnelle, celle des business ploucs? Issus de tous les horizons, on les retrouve partout. Ils nen mourraient pas tous, mais tous taient atteints.Le prsident le plus lgant dune prestigieuse multinationalepeut tre atteint du virus et toute trace dducation svanouir. Larrivisme fait oublier les rudiments lmentaires de lducation; le pouvoir transforme en mufles, les mdias crent des mgalos, et tout cela nous plonge dans une ambiance curieuse de relationnel doucetre au detriment des principes de base dun comportement courtois.Au fait : faire la gueule est mal lev et le sourire est legeste le plus courtois qui soit!On se croit bien lev parce quon se souhaite tout et nimporte quoi longueur de journe : bonne journebonne fin dapptit (sic : au restaurant au moment du dessert)bonne soire bonne sance bonne runion bon RTT! On na plus le temps de dire autre chose. Un tic socital compensatoire.Toute ressemblance avec des personnes existantes na strictement rien de fortuit.1 Savoir tre ou le respect des valeursDans lhumanit, il ny a que les dtails qui changent.Alfred CAPUSSelon Kant, la politesse, cela ne se fait pas, est antrieure la morale, cela ne doit pas se faire1. Ce qui revient dire que les consignes basiques dune ducation qui commence ds la petite enfance sont le socle sur lequel sancre la morale. Mais notre comportement est bien souvent schizophrne : tel tre exquis en famille sera un rustre parfait avec des trangers; tel chef dquipe respectueux de ses employs sera un tyran domestique; un ami dlicat et plein dattentions fera un patron excrable Le poidssymbolique quon attache aux tres et aux situations dicte la plupart de nos attitudes. Or, ces valeurs connaissent un bouleversement correspondant celui de la technologie, et si lon peut aisment grer les consquences dune volution technique, les volutions sociologiques, elles, sont insidieuses et infiniment plus complexes.Lentreprise est un corps social mal dfini qui nobit rellement aucune rgle de comportement individuel.1. Emmanuel Kant, Rflexions sur lducation, Paris, Vrin, 1996.2Aujourdhui extrmement composite, ce corps social professionnelest constitu, dune part, des hritiers de ces messieurs les ronds-de-cuirs chers la fin du XIXe qui persistent et signent, indiffrents aux ordinateurs qui ctoient leurs encriers et, dautre part, dune nouvelle gnration qui baigne dans une culture dentreprise sans limites territoriales, sans contraintes techniques et pour qui les ressources humaines se grent comme le reste, larrach.Lhonntet est le commandement de base dans la hirarchiedes valeurs. Ses contours sont devenus trs lastiques malgr le grand retour de lthique. La gratte dans lentreprise est devenue monnaie courante, on emprunte extrmement facilement. On trouve encore plus aisment (vous ferez beaucoup rire en demandant o sont les objets perdus lorsque vous ramasserez quelque chose dans la rue, ft-ce devant limmeuble de votre bureau). La fauche est devenue un sport national. Le vocabulaire luimme est complice puisquil fournit pour tous ces actes une multitude de sympathiques euphmismes. Si vous les remplacez par le mot vol, ceux que vous prenez tmoin haussent les paules, signifiant par l que vous exagrez et que vous faites preuve dun moralisme excessif. Lincivilit nest dj plus condamnable svrement. Le rus et le dbrouillard suscitent la sympathie et ladmiration tandis que le consciencieux fait figure dimbcile.Lhonneur, on nen entend plus beaucoup parler, en tout cas dans le monde de lentreprise. La fluidit des masses salaries a banalis le licenciement. Pour nos parents, tre renvoy constituait laffront suprme, le dsaveu absolu.En 2007, vous avez statistiquement toutes les chances de3 ltre une ou deux fois dans votre vie professionnelle; tant et si bien que la honte dhier est presque une gloire aujourdhui. tre vir se revendique haut et fort comme une manifestation de sa forte personnalit, de laudace dont on a fait preuve en ayant occup un poste risques, dune aptitude tre dans le mouvement, au sens dynamique du terme (nous excluons bien sr de cette remarque ceux qui sont licencis et victimes des contraintes dune situationconomique). La fiert, la solidit de lemploi, la fidlit lentreprise sont des valeurs teintes tout simplement parcequon ne sait pas trs bien par quoi les remplacer. Le savoirvivrenous met sur le bon chemin.Le respect de la parole donne, voil qui fait sourire, et l aussi il y a de quoi tre troubl. La complication croissante de la jurisprudence, la multitude des tractations financires des OPA ou de simples rachats, ou encore la complexit de contrats en tout genre imposent une double lecture permanente des engagements pris et une mfiance systmatique.Les protocoles daccord, rdigs par des professionnels, necontiennent plus la moindre faille, et tous les piges possiblessont soigneusement tudis et dissimuls pour viter de revenir sur ce qui a t prvu. Le respect des engagements na de sens que pour les perdants; dans la rgle actuelle du jeu, les accords sont faits pour tre rompus et lon a une bonne rputation que lorsquon tient un partenaire sa merci. Plus que jamais, la fin justifie les moyens, et lon ferme complaisamment les yeux sur les mthodes.La dignit, valeur satellite de lhonneur, garde un peu plus de sens mais sans faire lunanimit. On lattribue volontiers aux coincs qui sy drapent faute dtre cools.Cest aussi, pense-t-on, la valeur refuge des perdants.4 Le dsintressement. Si vous affirmez que vous en faites preuve, on en dduira que vous naimez pas les challenges, que vous ne ferez pas dargent ou, plus lgamment, que vous serez un mauvais gestionnaire. Mais un homme qui ne demande jamais de service quelquun finit par se faire la rputation dun homme qui nen rend pas. La modestie nest pas au tableau dhonneur. Peut-tre manquez-vous de confiance en vous? Pire, nest-ce pas simplement que vous ntes pas mdiatique? Tous ces renversements brouillent les pistes et relguent le savoir-vivre traditionnel aux entrepts des PME de province; la capitale et les grandes villes tant les principaux foyers du virus de la goujaterie, la concentration y est maximale et leffet dentranement considrable.Les services. force de faire payer les services, on ne sait plus rendre service. Mal remise dune Rvolution qui a assimil le service une exploitation aristocratique, la notion de service nest plus que marketing Il sagit dune disparition plus grave quelle nen a lair. Qui ramasse un gant perdu dans la rue? Qui cde sa place? Qui laisse passer? Qui tient la porte? Qui se donne la peine de faire quelque chose, gratuitement, pour quelquun que lon connat peine? Qui se donnerait la peine de rapporter au commissariat un objet trouv? Et de labsence de gratuit du geste dcoule, pernicieusement, une forme de malhonntet.Les valeurs. Si la valeur nattend pas le nombre des annes, les valeurs, elles, sont tellement revendiques quelles en perdent tout leur sens. On confond la valeur de largent, les valeurs dentreprise ou le more value for money, grand principe marketing qui consiste en donner plus pour son argent au consommateur, etc. Les vraiesvaleurs doivent se partager et se respecter; elles ne dcoulentpas dune charte interne ou dun axe de communicationLes valeurs de lentreprise ne sont que la somme de la valeur morale et comportementale individuelle de chacun des collaborateurs. Encore faut-il respecter les hommes, leur conscience et leur libre arbitre sans tout sacrifier sur lhtel de la performance.La politesse. Certes, ce nest pas en soi une valeur, mais cest en tout cas une qualit qui permet la vertu. Laffranchissementde rgles, considres comme bourgeoises, a laiss un vide qui nest pas simplement celui dun code mondain rserv aux coincs. La bonne ducation est comme ces lgumes oublis des potagers dantan que lon redcouvre actuellement. Lcole et encore moins la fac refusent dduquer pour se recentrer sur leur mission qui est dinstruire; les parents baissent souvent les bras et lon entre alors dans la vie professionnelle pour gagner sa vie, de plus en plus dsarm par cet univers impitoyable.En mme temps, on veut tout prix tre heureux dans lentreprise. Pour cela, encore faudrait-il savoir y vivre7 Savoir converserSi lon ne parle pas affaires, de quoi peut-on parler avec des interlocuteurs que bien souvent on ne verrait en aucun cas sans motif professionnel? Mais il y a des moments o la conversation prend une tournure gnrale; la prudence devient alors la rgle et il convient de matriser non seulement ses paroles mais les sujets abords.Quelques conseilsInformez-vous. Prenez le temps de lire la dernire dition dun ou deux quotidiens : votre aptitude commenter lactualit vous classera dans la catgorie des individus bien informs et meublera la conversation. Veillez ne pas afficher votre appurtenance politique. Respectez galement linculture possible de votre partenaire dans un domaine que vous connaissez bien; il nest pas forc de savoir ce quon donne lOpra. Tout le monde a son dada, et ne profitez pas trop du vtre pour briller bon compte. Exercez-vous changer de sujet si vous tes sur un terrain glissant : ce nest pas le moment de dfendre des convictions personnelles ou de ramener un gar votre point de vue (que ce soit sur les avantages de Chamonix ou sur le rayonnement de la cultura islamique). Dominez votre souci de lexactitude et votre sens du mot juste qui vous font complter et corriger dtails et anecdotes de votre interlocuteur. Surtout, si vous savez mieux, nen montrez rien, vous y gagnerez toujours.8 Situez votre interlocuteur. Essayez de situer votre interlocuteursocialement pour viter des impairs. Tmoignez de lintrt pour la vie que mne votre interlocuteur, sans toutefois aborder le sujet de sa vie prive. Si vous tes en rendez-vous avec votre patron ou toute autre personne que vous estimez plus importante que vous, masquez votre timidit mais ne prenez pas dinitiative.Respectez les rgles de la conversation. Respectez les sujets de conversation abords sans imposer les vtres. Veillez ne pas monopoliser la conversation et ne pas parler exclusivement de ce qui vous intresse. Si vous posez une question, attendez la rponse. Ne coupez pas la parole (quel que soit votre enthousiasme); en revanche, sachez la prendre et ne vous laissez pas submerger par un bavard.voquez autrui avec discrtion. Soyez particulirement prudent sur les commentaires que vous pouvez faire sur autrui. Cest un pige dans lequel il faut absolument veiller ne pas tomber. vitez le name-droping (littralement :faire pleuvoir les noms). En revanche, renseignez-vous avant, si vous le pouvez, pour savoir si vous nauriez pas un ami ou une relation commune; cela peut se rvler bien pratique, condition toutefois dviter den faire le thme du djeuner. Napportez pas la contradiction, ni un soutien trop nergique quelquun au dtriment dun tiers. Celui que vous aurez isol dans une dialectique sen souviendra toujours et vous aurez un ennemi professionnel de plus.Respectez lautre. Pas de flagornerie : rien de plus exasprantquun vis--vis laudatif qui fait rfrence en permanence vos talents; en revanche, sachez recevoir simplement un compliment sans le commenter ou en rajouter sur vousmme.Lorsque vous tes plus de deux, adressez-vous le plus9 souvent possible au groupe et non un seul en particulier. Si vous faites un apart, veillez ce quil ne se prolonge pas, quitte y revenir par la suite. Ne volez pas les effets des autres. Ne terminez jamais une phrase leur place, et encore moins une histoire drle! propos, tes-vous sr quelle lest vraiment? Et si vous ne savez pas bien la raconter, abstenez-vous. Dans un groupe, reprez les timides et essayez de les mettre laise. Le nombre de budgets perdus parce quon na littralement pas vu lun des interlocuteurs est incalculable.Essayez de mesurer le degr dintrt que vous portevotre auditoire. Nous sommes tous capables de sentir sil estauthentique ou non. Si votre auditoire est gagn par lennui,ne vous enfoncez pas, courtez!Les sujets viterLe mdical est la mode, et nous ferions bien de nous inspirer des Anglais qui font de leur pudeur nationale un rempart efficace. La description de la gastro chez nous a hlas remplac la crise de foie, plus discrte dans ses symptmes. On cachait soigneusement les pratiques addictives et depuis quon les expose la tlvision, on a droit aux rcits des cures de dsintoxication en tout genre, aux sevrages anti-tabac, anti-drogue, anti-cholestrol Les top challenges du rgime basse calorie de la stagiaire intressent plus que latteinte des objectifs commerciaux du service commercialLargent : transparence oui, talage non.La politique : lentreprise na pas vivre vos indignations et vos partis pris, ni mme entendre votre argumentation militante.10 La psychologie : limpudeur est totale, elle est mme la mode. Rappelez-vous que le coach de lentreprise nest pas l pour vous conseiller sur votre vie sexuelle et que les stages de formation ont pour objectif damliorer vos performances et non de voir exposer votre oedipe.Les croyances : si votre voyante vous jure que vous ne signerez plus de contrat et que linformatique sarrtera brutalement la nouvelle lune, nen faites pas profiter vos collgues. Mme pudeur, sil vous plat, concernant vos convictions religieuses.La famille : laissez de ct la carrire de votre mari, vos tentatives infructueuses dinsmination artificielle et les soucis que cause le petit dernier. Tout le monde sen portera mieux.Le sexe : vos attirances (surtout si elles concernent des collgues!), vos dviances, vos malheurs ou vos succs amoureux ne regardent personne.Les romances professionnelles : personne ne sera dupe sivous avez absolument besoin de votre assistante au congrs Venise. Le pire serait encore de vous vanter davoir les faveurs de la directrice de la communication ou du patron. Gardez le secret jusqu ce que lofficialisation soit un choix de vie.Lhumour : souvenez-vous quil vaut mieux renoncer unbon mot que perdre un client (personnellement, je trouveque cela se discute, mais lexprience ma toujours donntort). La blague est viter moins davoir un vraitalent de conteur. On a gnralement le choix entre : lhumour vulgaire ou lourd; lhistoire raciste (Belges, Noirs, Juifs, blondes);11 le trop subtil (personne ne comprend); la plaisanterie grasse sur quelquun dans lentreprise (alui revient dans la journe); les accents (vous cherchez encore sil a voulu imiter un Polonais ou un Marseillais); votre interlocuteur a oubli la chuteDans tous les cas, arborez un sourire poli et distant en changeant de sujet si la blague est dplace. Si votre blague vous tombe leau, ne vous appesantissez pas!Bref, la discrtion et la pudeur lveront le niveau de vos conversations de bureau et rendront la machine caf plus frquentable.Les rgles dor de la communication professionnelle Utiliser les prnoms aprs deux trois rencontres, en demandantlautorisation. Respecter des rgles de comportement du milieu professionnelde votre interlocuteur. Avoir le sens de la hirarchie et respecter les collaborateurs tous les niveaux. Favoriser une ambiance feutre (le silence et des changes mi-voix donnent une impression de concentration, et mme de luxe). Faire preuve de considration envers les subordonns (mortau petit chef !). Montrer de la rserve lorsquil sagit de sexprimer sur laconcurrence. Respecter la vie prive de ses collgues, notamment si lon estcontraint de leur imposer une charge de travail supplmentaire.Les piges viter La bise ds la premire rencontre. Le tutoiement systmatique au bout dun quart dheure. Manifester une fausse familiarit. Faire preuve dobsquiosit envers ses suprieurs (un clientne doit jamais ressentir quil est moins important vos yeux que votre direction). Les clats de voix ou de rire tonitruants. Les formes de dnigrement. On tmoigne de la richessedune entreprise en valorisant ses collaborateurs, de mmeque dnigrer un concurrent nest pas le meilleur moyendasseoir sa supriorit. Le rcit du pourquoi de vos arrts maladie (avec descriptiondes symptmes). La claque dans la main faon club de foot.13 Savoir passer tableLe djeuner daffaires est utile cause de la relation qui unit les sentiments et lestomac. Auguste DETOEUFIl est vident quen France la table prend une importance toute particulire. Ce moment de convivialit est aussi le rvlateur, inconscient ou implicite, de trs nombreuses composantes de la personnalit, de lorigine, des coutumes et des comportements. Professionnellement, cest loccasion de tisser des liens; en affaires, cest le lieu dexercer, toutes antennes dehors, ses capacits dobservation et dintuition. Tout est important : le choix du lieu, du men et la faon de se tenir. Cest peut-tre loccasion de faire un examen de table et de porter un jugement sur son propre laisser-aller? Rappelez-vous : Ne mets pas tes coudes sur la table ne sauce pas ne trempe pas ton pain dans ta soupe. Lenfance est loin, un petit retour en arrire ne nous fera pas de mal.Prparer un djeuner daffairesO? Il faut savoir choisir lendroit. vitez les restaurants bonds, mme sils sont la mode, et ceux qui sont dserts (on peut 14 supposer que ce nest pas sans raison). Sachez que lusage veut que ce soit celui qui choisit le restaurant qui rgle laddition.Comment? La politesse veut que vous teniez compte de la distance dans le choix du restaurant : on vous sera peuttre plus reconnaissant dune moins bonne table situe dans le quartier de votre invit, que dun lieu plus somptueux mais plus loign et o il est impossible de se garer.La veille, confirmez le lieu du djeuner et donnez ventuellementdes instructions pour faciliter le dplacement :emplacement des parkings, chasseur, station de mtro, itinraireAvant de partir djeuner, vrifiez que la rservation a bien t faite.La ponctualit : arrivez lheure! Rester seul table dix minutes est le maximum supportable. Vous tes le premier, vous savez que vous tes invit et le matre dhtel vous demande si vous voulez boire quelque chose : vous avez juste droit une demi-bouteille deau, tout autre commande serait dplace ! De mme, ne prenez pas la banquette dassaut, ou alors levez-vous quand votre invit arrive en faisant mine de la lui cder.La discrtion : connatre le patron du restaurant vous emplit dune fiert certainement lgitime. Est-il utile pour autant de lui taper dans le dos pendant un quart dheure et de ponctuer ces dmonstrations dclats de rire complices (de qui se moque-t-on?). vitez les clins doeil de ce mme patron lorsque cest avec une femme que vous djeunez et narborez pas un regard complice. Si vous connaissez tout le monde, nallez pas serrer la main chacun en gagnant votre table; votre hte, lui, ne connat personne, il peut15 se montrer vex ou agac, juste titre Mme si cela peut savrer susceptible de jouer en votre faveur, notamment sil sagit dun lieu frquent par certains milieux professionnels quil est valorisant davoir pntrs, sachez ne pas vous en vanter!La fermet : liminez les endroits o le service est dune lenteur et dune prtention qui gnent le droulement de la conversation. Si vous tes la puissance invitante et que le matre dhtel vous ignore superbement, interpellez-le; soyez rapide et ferme pour passer commande. Mais si vous tes invit et exaspr par la lenteur des prmices, ne prenez aucune initiative personnelle et inventez-vous un rendez-vous urgent pour faire ragir la puissance invitante.La commandeA priori, rien de plus simple une fois bien assis, que decommander ce qui vous plat, pensez-vous? Erreur! Cestl que les piges commencent.Le menu : ne vous plongez pas dans la carte pour en ressortirvingt minutes aprs. Certes, cest important, mais pas ce point-l et pas pour tout le monde. En revanche, si votre hte semble traiter le menu comme un ouvrage de rfrence, intressez-vous.Lapritif? Au risque dapparatre rabat-joie ou de soulever une protestation collective des viticulteurs et autres lobbies alcooliss, je suggre de faire limpasse sur cette pesante habitude. On boit dj trop dans les djeuners daffaires, et celui qui dbute par un apritif contraint impli citement les autres le suivre.16 Heureusement, la tendance est la sobrit.Le choix : il faut savoir choisir. Certains restaurants ont des menus affaires, et cest lidal : pas dattention prter au prix des plats et leur nombre, pas besoin de calquer son comportement sur celui des autres Ne choisissez pas tout prix ce qui symbolise le luxe (caviar, homard) et qui est onreux. Ne choisissez pas les plats qui ncessitent une longue prparation. Vingt minutes dattente pour un souffl, cest trop long et agaant. Commandez le mme nombre de plats que les autres. Annoncez la couleur ds le dbut : Je ne prends pas dentre, mais jopterai pour une salade ou un dessert Lobjectif est de bien grer le temps car il sagit dune rencontre professionnelle et pas uniquement dun moment de plaisir. vitez lail! Par courtoisie pour vos rendez- vous de laprs-midi. Renoncez aux plats trs sophistiqus qui donnent limpression que vous tes l pour vous en mettre plein la lampe. La diffrence est subtile entre le fait de faire honneur un repas et celui de se comporter en gueuletonneur.Piti : oubliez votre rgime! Ne prenez pas le matre dhtel pour un ditticien. Si vous suivez un rgime, faites-le en toute discrtion. De mme, avalez vos mdicaments rapidement et discrtement. On ne parle pas de sa sant et encore moins table. Une vieille rgle anglosaxonne qui a du bon.vitez la cantonade. Le joyeux drille ne lest que pour luimme.Sous prtexte de gnrosit ou de convivialit, ne choisissez pas le menu pour les autres. Vos gots ne sont pas indiscutables, et commander (mme) du homard pour tout ce monde est de mauvais got. Une seule exception, un homme qui invite une 17 femme commandera pour elle un met, trop luxueux pour quelle nose le suggrer elle-mme (foie gras, homard, caviar).Le prix : ne vous montrez pas radin! Proposez votre invit de choisir la carte, mme si vous prenez le menu. Fromage ou dessert? Mme si pour vous il ny a pas de repas sans fromage, sachez quen rgle gnrale, il nest plus de bon ton den prendre au restaurant, moins que ce ne soit pour remplacer le dessert. Rien nest plus exasprant que ceux qui prennent de tout; autant chez des amis, il peut sagir de convivialit et de bonne ducation, autant au restaurant, dans ce type de circonstance, ce peut tre gnant.Laddition sil vous plat!Du tact : quand on vous prsente la note, de grce, vrifiez- la discrtement. Si vraiment vous faites partie des rats mfiants, vous ferez a au calme, dans votre bureau, et vous pourrez toujours tlphoner si on vous a compt deux Badoit au lieu dune Vittel. Lorsque vous tenez payer sans quil y ait bagarre pralable, clipsez-vous discrtement (sous prtexte daller vous laver les mains) et rglez rapidement la note la caisse (voil unebonne occasion de lplucher si vous y tenez). vitez les commentaires sur le montant. Les rflexions Ils ne sembtent pas Cest vraiment pas cher pour ce quon a pris sont gnantes. Vous, Monsieur, vitez les manifestations de familiarit avec les vendeuses de cigarettes ou les demoiselles du vestiaire.18 Linvitation. Si vous tes invit et que cest la socit de votre hte qui paye, remerciez chaleureusement, sous peine de laisser penser que vous tenez les entreprises pour des vaches lait. De mme, si vous invitez, ne ricanez pas grossirement en disant : cest la socit qui paye.Les pourboires. Si vous devez donner des pourboires, faites- le discrtement; vous ntes ni producteur de cinma, ni milliardaire texan. En revanche, ne rien laisser du tout est trs pingre.Propos de tableSe tenir : parler la bouche pleine et mcher bruyamment sont deux mauvaises habitudes que lon combat chez les enfants et qui se retrouvent tout ge! Ne nous attardons pas sur ce thme, sinon pour dplorer que la tenue table laisse encore trop dsirer et souffre de la dcontraction ambiante. On voit des convives qui se balancent sur leur chaise, stalent sur la table, jouent avec tout ce quils trouvent (mie de pain, tiquettes de bouteilles, serviettes en papier), posent fourchettes et couteaux bien carts ( la perpendiculaire de lassiette au lieu de les laisser parallles dans lassiette) ou bien les manches dirigs vers vous. Au passage, vitez de saucer copieusement (de quoi manquer une affaire si par hasard votre invit est Anglais), et si la ngociation sannonce subtile, vitez la salade grandes feuilles!Les usages : le droulement de la conversation doit traditionnellement faire lobjet dun crescendo identique celui du menu. Bien que les temps aient chang et que lacclration du rythme des emplois du temps lait balaye, la tradition est de ne pas19 aborder lobjet du djeuner avant le dessert. Le caf serr avec laddition sil vous plat ! a dtrn le dessert. Il convient donc de bousculer le plan de la ngociation, faute de quoi il faudra se quitter sur le trottoir, lissue dun djeuner devenu sans objet, sur la promesse : On sappelle et on en parle.La faon daborder les choses est variable selon les pays et les coutumes, mais en France elle est fonction de lheure et du type de repas pris en commun.Au petit-djeuner, nhsitez pas attaquer demble votre sujet. Il est convenu que lheure est au travail, en consquence, vous ne manquerez pas de convivialit en sortant votre dossier sur les miettes de croissant. Sil y a bien un moment o lon ne doit pas tre en retard, cest celui-l.Lquilibre de la commande est subtil : ne dvorez pas mais essayez de ne pas vous contenter seulement dun cafComment se comporter? La puissance invitante (lexpression veut tout dire !)passe en premier. Si cest une femme, lhomme la prcderatoujours sauf dans lembrasure dune porte quil tiendra pour elle. Laissez choisir la table votre invit et une fois assis, cest luiqui doit se saisir de la carte en premier. Lorsque le matre dhtel vient prendre la commande, cestcelui qui invite qui prend la parole en premier et quidemande son invit ce quil a choisi. Si cest une femme quiinvite, elle prendra le rle de lhomme mais se laissant guiderpour les vins (formule consacre!). Essayez davoir un minimum de culture vinicole, cela faitpartie de la bonne tradition franaise que de savoir choisir un vin. Si vous tes press(e) (au djeuner), indiquez demble, envous excusant, votre hte et au garon vos contraintes horaires. Ne parlez pas trop fort (gnant) et ne chuchotez pas (ridicule). Ne regardez pas sans arrt sil y a quelquun que vous connaissez. Ne faites pas de commentaires sur les tables voisines. Pas de grand geste damiti un copain au fond de la salle. La discrtion, souhaitable pour tout le monde, va parfois lencontre de ce que vous pouvez estimer tre de la convivialit.Vous ne devez avoir dyeux que pour celui qui vous invite ou que vous invitez. Ne regardez pas (trop) votre montre ! Ma grand-mre, lorsquejai eu 16 ans, minitia avec solennit au fait quune femme ne devait jamais porter de montre le soir. Le fait den porter une, mexpliqua-t-elle, signifie que tu ne fais pas confiance au jeune homme qui taccompagne pour te reconduire une heure dcente ! Pire, en portant une montre, tu pourrais regarder lheure et ainsi lui laisser penser que tu tennuies... Je me prends me laisser bercer par la nostalgie La mme grand-mre minterdisait de mappuyer au dossierde ma chaise (ne parlons donc pas de tous ceux qui sont couchssur leurs assiettes!).21 Savoir grer une rception Si vous lorganisezLheure : ne la fixez pas au moment dun repas. Le fait dappeler la rception cocktail ne vous fera pas pardonner le buffet vide au bout dun quart dheure. Lentreprise qui reoit doit tre en mesure de nourrir ses invits si elle invite aux heures des repas.Se faire annoncer : dans certaines runions slectives, retrouvezle charme des aboyeurs; il permet tout le monde de reprer qui est qui, et lhte aura au moins le bnfice de rencontrer ses invits, ce qui nest plus que rarement le cas.O? Ne voyez pas trop petit : les salons enfums o lon scrase ne sont pas synonymes de succs, cest manquer de considration envers ceux que vous avez convis (ne voyez pas trop grand non plus).Informez! Nayez pas peur de marquer laspect professionnelde la runion. force de vouloir paratre dsintress, on ne sait plus chez qui lon mchouille les petitsfours et pour quel motif. Si le cocktail se double dune manifestation (projection, discours), joignez un programme au carton, quelques lignes suffiront.22En interne : mlez le maximum de membres de lentreprise la manifestation avec un briefing pralable qui les incitera se mler aux invits, les aborder et se faire reconnatre. Rien de plus ridicule que ces groupes qui se forment pour finir par ressembler des quipes de foot : invits dun ct et encadrement dune entreprise de lautre. Noubliez pas que si vous vous devez dabord vos invits, la communication interne est galement une marque de politesse envers vos collaborateurs. Ils doivent sinon participer, du moins tre avertis de ce qui se passe.Enfin, sil est convi, le personnel aura droit au mme traitement que les invits et non une sous-rception comme cest parfois le cas.Les invits : pointez les invits larrive, mais laissez-leur le carton dinvitation en souvenir (ils napprcient pas toujoursquon le leur confisque). vitez les invitations tiroir : coupon bleu si on est invit au dner, rouge si on a accs un buffet dhonneur, etc. Cest extrmement dsobligeant pour linvit de base qui ne fait pas partie des VIP.Et si vous tes invit(e)La rponse : cest un simple cocktail, mais mme si vous en avez trois ou quatre par semaine, prenez la peine de rpondre et ne dites pas oui, alors que vous avez la ferme intention de ne pas y aller.Larrive : soignez votre arrive en vous prsentant une heure dcente; de 18 heures 20 heures ne veut pas dire quil faille arriver 20 h 30. Ne franchissez pas le seuil de la porte, lair hautain, en cherchant le personnage intressant que vous pouvez bien connatre; consacrez tout de mme quelques minutes 23 chercher qui reoit et saluer ceux qui organisent.Le look : tenue de ville ne signifie pas une tenue de fin dejourne aprs un dur labeur. Les jeans ou les cols rouls ne sont pas considrs comme tant des tenues de ville. La cravate sera de rigueur et un soupon dlgance sera le bienvenu.Le buffet : si vous avez vraiment faim, demandez une assiette. Remplissez-la, assumez le regard du matre dhtel et dgagez les abords du buffet.La courtoisie : lorsque vous vous entretenez avec quelquun (mme si cest un raseur), regardez-le dans les yeux et feignez de vous intresser un minimum ce quil dit au lieu de balayer les environs du regard dans lespoir de trouver un interlocuteur plus digne dintrt. Adoptez lattitude des Amricains et de beaucoup dautres en vous prsentant demble et pas seulement ceux que vous neconnaissez pas; rappelez galement qui vous tes de vagues relations professionnelles qui ne sont peut-tre pas dotes de votre mmoire. Oubliez la phrase goguenarde et cule : Je suis sr(e) que vous ne vous souvenez pas de moi? Ayez piti, en rgle gnrale, de la mmoire des autres. Dans des cercles professionnels o lon circule beaucoup, il est terriblement stressant dessayer en permanence de mettre un nom sur un visage que lon a dj aperu. En toutes circonstances, la courtoisie consistera donc rafrachir la mmoire de vos interlocuteurs. Pliezvous aux coutumes de la puissance invitante : signez les livres dor, suivez la queue pour fliciter les hros de la fte, ne rentrez pas langlaise pour filer de la mme faon.Un peu de pudeur : ne sautez pas sur le premier venu en lui confiant que vous ne connaissez personne et en le harcelant de questions, il sagit peut-tre du directeur gnral. Prenez la rsolution de renoncer aux ragots.Le cocktail est un lieu fort tentant pour ce type de commentaires, mais ils nuisent avant tout ceux qui les colportent.Ne parlez pas avec assurance de personnes que vous ne connaissez pas. Combien de fois subit-on un quart dheure de commentaires premptoires sur un tiers pour entendre en conclusion : Personnellement, je ne le connais pas, maisTourner sa langue... : ne lancez pas en lair, sous leffet de lexcitation, des promesses que vous ne tiendrez pas : Je le connais trs bien, je lui parlerai de vous Je vous enverrai le livre demain matin Appelez-moi cher ami Vous ne le prendrez jamais au tlphone! Et remercier? Mais oui! Pour un simple cocktail, il est bienvenu denvoyer un petit mail disant que lon a apprci (lavantage cest que vous serez peu prs le seul et que cest vous que lon apprciera).25 Savoir djouer les piges du pouvoirLes bonnes manires prcdent les bonnes actions.Andr COMTE-SPONVILLENous avons tous dans notre entourage de ces tres dtestablesqui vous tournent le dos lorsquils se sentent en position de force et qui vous collent lorsquils ont besoin dun interlocuteur ou dun public. Le snobisme est bien souvent lantichambre de la grossiret et, dans ce vaste champ de la mondanit, nous ctoyons le pire enmatire de mauvaise ducation. Les professionnels des tractations communico-mondaines sont bien souvent ceux qui lon peut faire le plus de reproches. Ainsi, pourquoi certains responsables de la communication dune entreprise ou des relations publiques sont-ils par exemple les plus difficiles daccs? Pour entrer en relation aveceux, il faut appartenir la catgorie de ceux qui peuvent leur tre utiles, de ceux qui, selon de mystrieux critres, leur semblent importants.Bien se comporter professionnellement ncessite davoir une juste perception du mtier que lon exerce et de ce quil implique et reprsente aux yeux des autres.26 Les importants (pour qui se prennent-ils?)Inaccessibles. Leurs secrtaires sont dresses comme des cerbres : sans ssame, vous ne passerez pas le barrage et elles en sont fires. Ils ne rpondent pas vos invitations, submergs quils sont par les cartons, ou bien, ils rpondent oui tout et ne viendront jamais.Condescendants. Ils sauront vous signifier la chance que vous avez de vous entretenir avec eux pendant les quelques instants quils vous accordent : Je vous coute, lancent-ils. Ils ne diront rien dautre. Ils arrivent trs en retard et repartent avant tout le monde, mchoires crispes, poignes de main distribues la chane, regard survolant le troupeau et le sourire absent. En toutes circonstances, ils ne remercient jamais personne. Tout leur est d. Ils demanderont des passe-droits et des invitations, sans vergogne, convaincus que leur sollicitation est une marque dintrt dont vous ne pouvez qutre flatt. propos des services quon leur rend, ils demeurent amnsiques mais sauront rappeler publiquement ceux quils vous ont rendus. Ils nhsiteront pas travestir devant vous la vrit pour le plaisir de rendre plus savoureuse une anecdote dont vous avez pourtant t le principal tmoin.Le rendez-vous avec une personne importanteSi vous tes en position de force, nen profitez pas et soyez encore plus courtois et attentionn. Avez-vous pens que votre interlocuteur joue quelque chose dimportant pour lui? Votre niveau de courtoisie ne doit pas dpendre du niveau hirarchique de votre27 interlocuteur. Nabusez pas de votre position dominante! Labus de pouvoir nest pas seulement une faute juridique mais un trait de caractre inadmissible. Ce nest pas parce que vous tes le client que vous tes oblig dinfliger votre fournisseur votre humeur, vos caprices et vos opinions premptoires. Il y a toujours un petit chef qui sommeille et, au-del du trait de caractre, il sagit surtout dun manque de classe. Lge doit inspirer une certaine courtoisie. Si vous tes hirarchiquement en-dessous de votre interlocuteur, pas de flagornerie!Chefs, donnez lexemple!Le savoir-vivre ne doit pas tre rserv des situations exceptionnellesou extrieures la vie quotidienne au bureau; il doit conditionner notre attitude de chaque instant. tre le chef, en soi, cest tout un programme. Le pouvoir hirarchique monte la tte aussi vite que le champagne. Dans ce cas prcis, rien de tel quune promotion pour transformer un tre civilis en grande gueule rudoyante. Ce nest pas pour rien quexiste lexpression petit chef, une formule dicte par les attitudes du personnage, et non en raison de ltenduede son pouvoir. Un grand patron peut trs bien se comporter en petit chef. Exquis avec ses clients et ses relations, il peut avoir la rputation inverse auprs de ses collaborateurs ou de ses fournisseurs.Le petit chef entre brusquement dans un bureau en lanant quelques mots aussi brefs que secs sans prter aucune attention au visiteur prsent dans la pice. Il joue au boss sympa en sasseyant sur les bureaux avec deux ou trois28 blagues la bouche; sous-entendu : Cest moi qui organize les rcrs! Il pntre dans le bureau dun collaborateur (absent ou non) et sassoit sa place, signifiant ainsi, grossirement, quil a pris possession des lieux. Il saisit distraitement un objet sur le bureau dun collaborateur, joue avec et fouille nergiquement dans les paperasses des autres. Il fait des remontrances un collaborateur en prsence dun tiers qui nappartient pas lentreprise (mieux vaut rgler les comptes en tte--tte, moins que cela ne fasse partie dune tactique de dynamique de groupe). Il engueule unsalari devant un client ou un fournisseur. Ce qui nuit autant lentreprise quau coupable. Il est frquent quil prenne une collaboratrice pour une serveuse de bar-restaurant sous prtexte quil sagit dune femme. Enfin, il jouit de son pouvoir en toutes circonstances et martyrise, en particulier, ses fournisseurs et ceux qui dpendent de lui.Vous emmenez un junior ou un collaborateur sous vos ordres en rendez-vous : mettez-le en valeur et ne jouez pas au dominant, mme si vous avez peur quil ne fasse une gaffe. Laissez-le sexprimer en le mettant en confiance.Rien de plus discourtois que de signifier son pouvoir hirarchique et de jouer lesclavagiste ou au matre qui condescend emmener un subalterne avec lui.Lhomo politicusCe tour dhorizon des cuistres ne serait pas complet si lon oubliait certains de nos lus. Chaque milieu professionnel a ses moutons noirs, mais il faut bien admettre quil en est o la concentration est plus forte, et le monde politique est de ceux-l.29 Les lus : videmment, ces malheureux sducteurs des urnes ont toutes les excuses valables, et nous devons faire preuve dindulgence leur gard; sollicits, aduls, oublis, mpriss, ils sont soumis en permanence au dur rgime de la douche cossaise. Toutefois, autorisons-nous quelques conseils (ils prsentent mme un intrt lectoral).Vous, mesdames et messieurs les politiques : Faites donc preuve dun minimum dattention lorsque vouschangez quelques mots avec un concitoyen. Ne jouez pas les courants dair permanents en franchissantles journes comme on saute un steeple-chase. Le savoir tre--lheure est valable aussi pour un ministre. Ne vous croyez pas lheure de vrit lorsquon vous poseune question. Rpondez sans faire un meeting! Abandonnez cette maudite langue de bois qui est limpolitessemajeure de toute la classe politique franaise envers sa clientle.Elle est la manifestation du mpris et le symbole dunemystification grossire, mme lorsque ce nest pas le cas. Marquez un peu de considration relle envers vos collaborateurs. Conservez cette modestie qui vous permettra de ne pas vouscaricaturer vous-mme, en jouant au ministre ! (au dput,au snateur, etc.) cartez les flagorneurs car, trs vite, vous ne vous apercevrezplus quils le sont. Lorsque vous inaugurez les chrysanthmes (mme si celavous ennuie), ne demandez pas votre chef de cabinet ovous tes. Ne vous dcommandez pas sans vergogne, dcevant sans tatdme tous ceux qui ont organis une manifestation autour de vous. Vous tes au service de ltat ! Pensez-y lorsque vous vouscomportez comme si la terre entire tait la vtre.Et nous, humbles citoyens, essayons de respecter quelques rgles de base qui aideront nos lus rester simples et courtois : Lorsque vous avez la chance den croiser un, prsentez-voustoujours et immdiatement (nom, prnom, lieu de dernirerencontre). Un homme politique nest pas un ordinateur,et le nombre de gens quil voit ncessiterait quil le soit. Ne bousculez pas tout le monde pour lapprocher. Nentranez pas le malheureux dans un coin pour lui exposervotre cas qui a quatre-vingt-dix chances sur cent dtreextrmement banal. Contentez-vous dannoncer une lettreou demandez-lui qui vous adresser. Ayez la pudeur de vos opinions, vous ntes pas journaliste 100 minutes pour convaincre . Ne prenez pas lassistance tmoin pour vous faire remarquer. Napportez la contradiction que lorsque les circonstances vous yautorisent (campagne lectorale, runions spciales). Ne colportez pas de on-dit alors quil vient tout juste dequitter la pice. Ne faites pas publiquement de sous-entendus. Ayez conscience que le temps, pour un homme politique, estce quil y a de plus prcieux. Respectez donc le sien et ne lecontraignez pas courter brutalement des entretiens. Nimposez pas votre prsence en vous incrustant pour lui parleralors quil est en pleine discussion avec quelquun dautre.31 Galerie de portraitsLa politesse est le semblant de vertu do les vertus proviennent. ARISTOTEIl nest pas de savoir-vivre sans savoir tre. Le savoir treest lharmonie qui prside toutes nos attitudes. Ce quelon appelait lhonnte homme correspond avant tout une recherche dquilibre la fois culturel, moral etsocial. Trouver lharmonie intrieure est aujourdhui lesocle sur lequel se btit notre rapport lautre. Cest cequi nous permet de rsister un sicle de pressions, de tensionset de sollicitations.Lorsque tout est fait pour agir dans linstant, pour consommersans restrictions, pour dire, en temps rel, ce que lon a envie de dire nimporte qui et nimporte o, il faut reconstruire une hygine de vie personnelle et sociale; cest la rencontre du savoir tre et du savoir-vivre, un quilibre nouveau trouver, en particulier sur les lieux de travail.Ces quelques portraits sont destins faire prendre conscienceque le savoir-vivre est avant tout une attitude dans la vie. Vous les reconnatrez, ils font partie de notre entourage. moins quil ne sagisse de vous-mme?32 Le bosseur droguLa peur de lennui est la seule excuse du travail, disait Jules Renard. On ne devrait pas le montrer du doigt, ni lui en vouloir, pourtant, ce que lon retient de cet acharn cest son gocentrisme et son incapacit hirarchiser. Ses motivations sont diverses, mais en gnral, il veut russir et surtout ne fait confiance personne. Dlguer quivaut pour lui dserter; or, cest un guerrier. Il fait la guerre au temps : il relve des dfis que lon ne lui demande pas derelever, doit tre le premier au bureau et y revenir aprsdner.Il sacrifie tout son alination volontariste. Il commencera se poser des questions lorsque son neveu de neuf ans lui dira bonjour monsieur le seul soir de lanne o il rentrera 8 heures Sa femme est prvenue, elle passe aprs. Toute rvolte de sa part sera vcue comme une intolrance, dautant quelle na pas se plaindre, il lentretient avec largesse (quand aurait-il, lui, le temps de dpenser son argent?). Quand il croit tre amoureux, ses efforts pour se rendre disponible sont admirables (pendant 8 jours). Lerendez-vous au salon de th prs de son bureau entre 16 h 45 et 17 h 50 sera intense, mais attention aux symptoms suivants : Il tte le vibreur de son portable travers la poche de son veston. Son regard erre de table en table dans lespoir fou de trouver un client qui lobligerait repartir. Il tire un peu la manche de sa chemise pour vous cacher quil regarde lheure. Mais il vous aime, nen doutez pas, et ds quil est avec vous, il na quune hte, cest de vous fixer un nouveau rendez-vous entre 20 h 15 et 21 h 50 (il faut bien se nourrir).33 Quand il (ou elle) vous emmne en week-end, sachez quil y a une confrence la cl; le reste du temps, il se cultivera au pas de course suivant une trajectoire minute dont il ne dviera pas. Il compense son indisponibilit par un empressement marqu, vous arrachant des mains tout ce que vous pouvez faire seule. Il vous servira une tasse de caf, hlera un taxi votre place, empoignera votre valise, voire votre sac main. Il faut quil comble chaque minute de la vie qui scoule. Il ne sait pas vivre : personne na de place dans sa vie.Vous avez rsist et vous vivez avec lui? Dbrouillezvous pour tre sa cliente, cest votre seule chance pour quil conserve quelque intrt pour vous. Lorsquil rpondra son portable sur loreiller, pousezson concurrent!Le travail est sa drogue : si vous le lui supprimez, il somatiseet consulte aux urgences de lhpital (forcment, il ne va pas traner dans une salle dattente).Le frimeurLe frimeur est le plus exasprant dentre tous. Laftershaveprovoquant, le nez au vent et le menton en claireur, il est ce point rod quen dix minutes vous savez tout sur ses responsabilits et par l mme sur son talent.En fait, cest lui qui dirige lentreprise. Son boss nest quune potiche et il prfre tre au second plan pour des raisons quil ne peut vous livrer (on lui en sait gr!). Vous aurez un mal fou capter son attention car il ne prte de rel intrt qu son propre discours. Au moment o vous rassemblez toute votre nergie pour enfin34 prendre la parole, il se lve pour partir en vous assurant avec conviction du plaisir quil a pris vous couter.Lindcis Lindcis nest pas dun abord professionnel beaucoup plus facile. Il bnficie de laura du professionnel laborieux. Il ne prend pas de dcision la hte et, selon lui, chaque point mrite un petit approfondissement et quon se revoit. Vous tes tout dabord enchant(e) quil prenne des notes lorsque vous parlez, mais votre inquitude commence poindre lorsque vous remarquez quil crit toujours dix minutes aprs que vous vous tes tu(e). Sil vous consulte, il ne vous cache pas quil a dj vu huit de vos confrres et quil lui en reste six recevoir.Il doit prendre sa dcision trs vite (dans six mois), mais pense que dici l il aura fait le point. En interne, rien navance, il naffronte rien ni personne, sa lchet devient grossiret.LobsessionnelLobsessionnel prsente des points communs avec langoiss, ceci prs quil ne sattache pas aux resultants eux-mmes. Quil russisse ou non, le plaisir de lobsessionnel est dans la thmatique elle-mme. Il est gnralement ennuyeux au point quon le confond avec les meubles et que pour un peu on loublierait. Il est charg de la comptabilit? Alors tout pour lui sera objet de comptes. Ilmurmure devant chaque prix, griffonne sans cesse, calcule35 mi-voix; il divise, soustrait, multiplie. Tout est bon, il chronomtre sa fille vlo, fait un tableau comparatif des notes de supermarch et, en conduisant, peut vous dire combien il consomme dessence la vitesse laquelle il roule. Il calcule ses points de retraite, recompte laddition, mesure lavancement de ses collgues. Cest sa perception de la valeur des choses et des tresLe paranoLe parano manifeste son anxit dune tout autre faon : ila peu de pouvoir sur les vnements et il en convient haut et fort. On lui en veut. Bien que sa carrire ait t freine ds le dpart par lancien beau-frre de son cousin, il ne se laisse pas dcourager et lutte contre le gigantesque rseau despionnage dont il est la proie. Les plis doivent tre remis en main propre, chaque enveloppe est barde des mentions confidentiel ou personnel, et son attach-case est fortement serr entre ses genoux. Si par malheur vous tes dans un lieu public avec lui, il vous faudra quasiment vous coucher sur la table pour saisir quelques bribes de ses chuchotements sur lavenir des ordinateurs (le matre dhtel pourrait bien tre un ancien de chez IBM). Il vous tmoignera personnellement et rsolument son manque de confiance et vous souponnera ouvertement sans prendre de gants.Le combinard ou business plouc par excellence Il est la bte noire des services comptables car il lui estimpossible de payer normalement une facture. Cest le roi36 des changes marchandises et des dessous-de-table. Votre devis passera si vous lui proposez daller en discuter trois jours Marrakech. En attendant, il piste les dlits dinitis et ne sexplique toujours pas pourquoi leurs auteurs vont en taule au lieu dobtenir une promotion. Le combinard tombe des nues la simple vocation du sens de lthique. Cette race en voie de dveloppement est en passe de stendre une gnration entire pour qui la morale consiste obtenir gratos ce que les ringards vous facturent.Allez donc leur parler de savoir-vivreLe globe-trotterIl a remplac le VRP, il bouffe des kilomtres. Vous ne lapercevez que descendant dun avion ou montant dans un train. Il savoure haute voix les dcalages horaires quil a dans les pattes, ou bien ses trajets en voiture. Son visage extasi tmoigne du plaisir quil prouve voquer cette vie de chien. Sa vie de famille est inexistante, avouet-il loeil vif; cela dit, il a russi faire escale Paris pour la naissance de son dernier enfant (vous nosez pas luidemander o il tait neuf mois auparavant). Il vous raconte avec gnrosit la faon dont il sy prend pour envoyer des mails en avion. Son portable est tanche (pour son bain), et quant au problme qui vous proccupe tous deux, il vous en reparlera dans deux heures au tlphone de Londres. Cette errance professionnelle permanente lui permettra, en toute impunit, darriver en retard partout (dj bien quil soit l!), de jargonner dans un dialecte international. Ses dcalages horaires lui servent dalibi pour biller ouvertement pendant que vous lui parlez. Ilignore les rgles lmentaires du savoir-vivre local; force37 de ntre nulle part, il a pris les mauvaises habitudes de partout.Le cancrelat Le cancrelat, lui, ne connat pas cet panouissement du kilomtre lanc car il cumule les distances maximales dans lombre des couloirs. Comme tous ceux de sa race, il se reproduit beaucoup; fonctionnaire par got, il ne craint cependant pas le priv o il imposera son tat desprit.Son ambition sarrte au comit dentreprise et son admiration nva linstitution, au mpris de lindividu. Le cancrelat se cache derrire les on et les nous qui le protgent de toute implication. Sa modestie nest que dmission et sa prudence nest que lchet. Il fait en permanence rfrence ses chefs absents et vous regarde peine. Si par hasard vous traitez avec lui, il faudra vous dplacer; il vous recevra le dos vot souhait et le bureau coinc contre une armoire mtallique. Vous ne saurez jamais le poste quil occupe vraiment et quel est son pouvoir de dcision. Pour viter de se mouiller, il est prt toutes les vicissitudes. Son manque de considration pour tout autre que son suprieur lui dicte les attitudes les moins dlicates. Une race apparemment inoffensive qui la volupt dobir tient lieu de jugement et qui sautorise manquer dgard envers tous ceux qui ne portent pas de galons. Son rve : tre salari protg.38 Le planquIl manifeste galement beaucoup de reconnaissance lgard de son entreprise, dont la principale qualit, ses yeux, est de le payer ne presque rien faire. Proche du pistonn, il est dun bon naturel et de commerce agrable. Jouisseur de lentreprise, il a orient ses motivations vers le profit personnel. Travailler avec lui est trs confortable; il fixe gnralement ses rendez-vous lheure des repas dans dexcellents endroits; avec lui, pas de hte excessive au moment du caf, on a tout le temps. Les sminaires sont sa spcialit : en hiver Courchevel, au printemps dans le Midi et hors saison dans des capitals qui ne lui sont pas trangres.Son calendrier est barr de faon impressionnante. Ce sont les ponts, explique-t-il soucieux et, pour plus de scurit, il se rserve huit jours avant et huit jours aprs. Hier encore, il a refus un poste responsabilit. Il naurait plus le temps de vivre! Sans pudeur, il passera son temps ngocier des justificatifs, sternisant la caisse et dictant consciencieusement une vendeuse complaisante lintitul quil veut voir figurer sur la facture. Chez lui, la rubrique fournitures de bureau va des piles de rechange de son rasoir au dernier Goncourt pour sa femme. Il vit sur la bte et sen vante; si vous dnez chez lui, sachez que la salade est rembourse par sa socit. Dailleurs, il vous le dira, inconscient de la gne quil provoque, sr dtre sur la bonne voie. Il est le nouveau riche de lentreprise.39 LopportunisteDieu quil est sympathique (au bon moment!). Dans sa carrire, rien nest laiss au hasard. Il sait privilgier lintuition et reconnatre la lgitimit de lautorit. Il ignore ce que fidlit veut dire, car son seul mot dordre est le roi est mort, vive le roi. Il ignore la politique et cependant en fait toute la journe. force de retourner sa veste, il devient lui-mme rversible. Camlon de couloir,il vous ignorera demain sil a connaissance de votre prochaine disgrce. Humble sous-fifre ou PDG, son attitude diffre peu car les grades nont pas de prise sur son comportement que seul le pouvoir en place peut dterminer. Si vous avez la chance de pouvoir observer ces camlons en priode de mue, vous verrez comment le processus volue avec ses phases, ses froideurs, ses trous de mmoire et jusqu laphasie finale manifeste envers les partants.Mais lopportuniste connat parfois des passages difficiles,notamment quand lentreprise change de direction.Notre homme rivalisera alors damabilit avec tout le monde, chuchotant sa fidlit tous les candidats au pouvoir.Quand il aura chang de bord, il ne vous serrera plus la main, les bras malencontreusement encombrs de dossiers quil installera dans vos placards pour rendre service votre successeur. Quarante-huit heures aprs, il presente des troubles de la vue (il vous distingue peine), et puis cest lamnsie (il ne vous reconnat plus). La mort sensuivra, pas la sienne, la vtre! Lchet ou incorrection? La premire ne va jamais sans les manifestations de laseconde.40 Le rond-de-cuirLes fautes dducation du fonctionnaire sont dun tout autre ordre; elles sont provoques par la conscience quil a de sa permanence professionnelle, nous parlons bien sr de la scurit de lemploi dont il bnficie et non pas, on la bien compris, du temps quil passe assurer ses fonctions. Vous ne trouverez pas plus galitariste que lui car, ses yeux, enfants, femmes enceintes, vieillards ou cadres dynamiques doivent bnficier dun mmetraitement : la file dattente. Il la contemple sans satisfactionparticulire mais simplement comme une des composantesessentielles de sa mission quotidienne. Son manque de zle uniformment dispens frle chaque instant linsulte implicite. Sil vous adresse la parole, il ne vous regarde pas : ce serait marquer de la considration pour autrui (or, il nen a pas). Votre discours nveillera pas son intrt et il naura de cesse de vous rpondre par une alternative : Prenez un formulaire! ou bien Je ne suis pas l pour a.Il nest pas incorrect dans ses propos, mais son manque dimplication sassimile du mpris. Il considre quil est le mandataire dune autorit rgalienne et que face lui vous ntes quun qumandeur, ce quil tient vous faire savoir. Il ne fixe pas de rendez-vous, il convoque. Il ne sexcuse jamais car il nest pas responsable. Il ne remercie pas puisque ltat ne le lui a jamais appris. Il est votre service sans le savoir. Quand il nest pas content, il fait grve Ltat, cest lui.41 Le speedDernier produit de la mondialisation, le speed a envahi nos bureaux, nos vies et nos crans. Curieusement, cest la Bourse qui lui a confr ses lettres de noblesse. Cest peuttre en trader ou en golden boy quil sclatera le plus. Idal des jeunes, il a le prestige des romantiques du sicle dernier; il ne mourra pas de phtisie ou de langueur, mais dun infarctus ou dun abus de coke. Ce nest pas grave car, tels les hros marqus par le destin, il court la main sur le coeur pour en matriser les battements dsordonns, conscient de jouer sa sant et peut-tre sa vie au nom de la sainte consommation et dun systme montaire difi.Son incessante activit vous culpabilise et vous plonge, au bout de cinq minutes, dans les affres dune fbrilit impuissante, avec limpression dtre un mort vivant au pays des eldorados sur cran. Il court, crie, sagite, pitine (les autres), sacrifie tout et tous sur lautel des plus-values. Il ne manifeste dgards pour personne, trop soucieux de chaque minute qui passe et qui lui fait perdre de largent.Il ne dpense pas, il claque (a va plus vite). Quand il se lve au milieu dun djeuner pour courir passer un coup de fil (et ventuellement ne jamais revenir), on ladmire presque de ne pas prvenir et de ne pas sexcuser. Comment cette admirable course la russite saccommoderait-elle des freins quimpose le savoir-vivre?Le plus que parfaitTrop poli pour tre honnte. Cest un tueur, il en a le regard noir, implacable. Son ego lui tient lieu didal. Il est42 porteur de lambition de lhumanit; il fait dailleurs tout ce quil faut pour mriter la haute opinion quil a de luimme.Il est au-dessus du commun des mortels mais ne les mprise pas pour autant. Son arme : la courtoisie, celle qui dsespre, qui touffe, qui ne laisse rien au hasard. Il sen sert pour mettre une infranchissable distance entre lui-mme et lautre : il virevolte, sefface devant les portes, court ouvrir une portire, arrache le manteau que vous vouliez tranquillement enfiler. Il enfle son discours de je vous en prie, je nen ferai rien, souhaite tout tout le monde, tout le temps, bonne aprs-midi, bonne soire y compris au portier du restaurant qui nen demande pas tant. Courtois, exagrment courtois envers ceux qui laccompagnent et qui lentourent, il en fait trop.Voil qui fera oublier, pense-t-il, ses propos cinglants et son manque dattention relle autrui. En fait, on lui pardonne, car cest de lui dont il a peur.Le nouveau richeLe nouveau riche existe dans tous les milieux. Le problme, cest sa russite : il ne sen remet pas. De son propre aveu, il sest fait lui-mme (il aurait mieux fait de se faire aider). Il na de cesse que de vous raconter les tapes de son ascension, il prend tmoin son entourage en racontant pour la nime fois la conqute de son premier client. Pour illustrer son propos, il tale ses jouets qui vont de la grosse cylindre la villa de Saint-Tropez, en passant par son handicap au golf et la pche au gros sur son bateau. Sa fortune na dgale que son absence de gnrosit. Quand il invite, cest pour son propre plaisir;43le luxe dont il vous fait profiter na dautre objectif que le spectacle quil se donne lui-mme de sa propre fortune. Dans son entreprise, il ngociera mieux que dans les souksle moindre centime daugmentation de ses salaris. Il vous expliquera combien vous avez de la chance de gagner 30 % de plus que le SMIC en tirant sur son cigare (et il le pense!). Il se goinfre ds quil le peut en toute bonne conscience : stocks options ou golden en tous genres...vulgaire!Le big bossIl nentend pas ce quon lui dit force dcouter ce quil va dire, disait Henri de Rgnier. Cest aussi un cuistre, mais largent compte moins que sa carrire. Il est encor bloui dtre sorti de lENA, de Polytechnique ou de la cuisse de Jupiter. Le sentiment dtre une lite ne le quittera jamais. Rien ni personne ne le fera dvier de sa propre valeur; la condescendance rsume ses rapports humains.Sil daigne vous recevoir, il sennuie beaucoup avec quelquun de votre niveau et vous le fait sentir. Il a tellement confiance en lui quil peut faire confiance son entourage professionnel : il la choisi, et il ne peut pas se tromper. Son grand moment de gloire : le jour o il ser dcor de la Lgion dhonneur ou de lOrdre national du Mrite (au pire). cette occasion, un de ses pairs dira tout haut tout le bien que lui-mme pense de lui-mme. Il aura loccasion den rajouter dans son discours de rponse devant un auditoire son image, avec une fausse modestie qui atteint des sommets de prtention et de narcissisme.Son intelligence formate lempche mme de penser, il ne fait que44 raisonner. Il ruinera des empires avec certitude, distribuera bons et mauvais points avec componction. Il est labri de tout et de tous : on lui a appris ne surtout pas se remettre en question. Quel que soit son niveau dducation et le savoir-vivre artificiel caricatural de son milieu, il est vulgaire de suffisance et enfl de mpris.Le branchIl a la cool attitude du soir au matin, bureau, soires, vie de tous les jours. Cela lui permet une dsinvolture certainement sympathique mais qui glisse trs vite vers le discourtois pnible ! Labsolue certitude dtre dans le vrai qui domine chez le branch fait passer tout ce qui relve des bons usages pour conservateur et bourgeois.Le ringardos est son ennemi de classe; le branch, lui, dtient la vrit nouvelle des rapports sociaux qui ne doivent pas sencombrer dhabitudes pr-rvolutionnaires ses yeux.Au nom de la cool attitude, pas question dusages vestimentairesculs : cravate au muse, il confond les vestes avec les blousons, les chaussures avec des baskets, et heureusement quil ne pense pas uniquement lorsquil se rase car il ne penserait pratiquement plus! Son jeans est quasi greff sur lui, cest son uniforme de vie. Les journalistes sont les meilleurs en ce qui concerne la cool attitude, cela leur donne une sorte daura et finalement leur permet de rentrer partout, on nose pas les refouler : trop cools pour ne pas tre accrdits! Le branch est laise partout, cest son point fort; dailleurs, il a pratiquement gagn puisque ce sont les endimanchs qui se sentent ridicules dans leurs accoutrements passistes. Il est infiniment plus gnant aujourdhui dtre trop habill que pas assez.Le branch est chaleureux : il embrasse tout le monde, ds la deuxime fois quil rencontre quelquun (chez les moins de 20 ans, ds la premire fois). Au bureau, idem. Il tutoie aussi facilement, on se demande mme sil sait que le vouvoiement a cour. Il fera une exception face un client, mais du coup lui manifestera une grande indiffrence.Pas de concession est son mot dordre. Toutefois, le branch a son code lui, le seul quil connaisse ou reconnaisse; quelques tics de langage et le respect des marques, pas des marques de politesse, non : des marques de fringues cools!Il vit par procuration, cest--dire par SMS : de mystrieux interlocuteurs peuplent son monde tribal. Pour prendre cong, il ne connat que deux termes : CIAO ou SALUT. Il mane du branch une sorte de noblesse sereine, on se croit dans le meilleur des mondes (celui dHuxley!), cest le genre dindividu qui peuple les films de science-fiction dcrivant la fin de la civilisation. Professionnellement, il a trouv sa place : il est dans le cinma,dans les mdias, artiste, crivain, coursier ou en socio la fac (il y restera 10 ans).47 Savoir renoncer aux ticsde languageLa politesse nest quune gymnastique de lexpression.ALAINLe bien parlerJe me fais plaisir est une des nouvelles scories de la philosophie la Star Ac : du moment que je mclate, tout va bien. Voil qui justifie tout et nexclu rien. On le resent au bureau o le plaisir nest pas forcment llment discriminant. force de vouloir du moi dabord, on oublie le rapport lautre, et lindividualisme rig enprincipe fait que lenfer, cest les autres.On va manger! : on ne djeune plus, on ne gote plus, on ne dne plus Quant souper, nen parlons plus. Dsormais, on mange! Lappauvrissement du vocabulaire reflte-t-il un comportement? Manger devenant gnrique, on simagine facilement une vaste mangeoire internationale, base de produits packags, sans raffinement et sans convivialit. On va mangerensemble donne limage de deux individus se nourrissant pour faire le plein de carburant, ni plus ni moins. Lunivers de lentreprise, grce ses repas daffaires, va-t-il sauver un distinguo linguistique et culturel?48 Jaime pas trop est le tic de langage par excellence. Il a lamin ltymologie grammaticale de la formule. Trop, rappelons-le, est un adverbe comparatif et non un adjective qualificatif, servant dapprciation nuance tout terrain. Le politiquement correct du rejet, comme quoi une faute de franais peut rconcilier un peuple, est : trop cest trop!.Ya pas dsoucis : rjouissons-nous, les bureaux fleurissent de labsence de soucis. Le souci ayant remplac le problme et sachant quon ne dit plus oui, on rtorque quil ny a pas de problme et quon matrise le souci. Le smmum de ladhsion serait quun collaborateur vous dise :Jaime pas trop, mais y a pas de souci. Ce qui signifie que, mme si cela lembte, il fera ce que vous lui demandez.Certes, il ne sagit pas de dcourager les bonnes volonts en masse, mais la richesse des nuances et de la langue permet dexprimer plus, donc mieux. Cest lentreprise dexiger une certaine qualit de lexpression y compris dans les couloirs. La responsabilit de la publicit en la matire nest plus dmontrer : sous prtexte de favoriser le consensus populaire et de capter lambiance de la rue,faut-il vhiculer fautes de franais et de grammaire? De la mme faon que le BVP (bureau de vrification de la publicit) est suppos empcher les exploitations excessives (par exemple, du corps de la femme) censes faire mieux vendre, ne pourrait-il pas aussi surveiller les abus de langage? Un slogan, pour tre talentueux, doit-il comprendre une faute de franais et deux fautes dorthographe? quand un code thique du bien parler de la pub? Jusqu quand la faute de franais sera-t-elle estime crative?Au plaisir : ne pas confondre avec le best-seller de Jean dOrmesson, Au plaisir de Dieu. Au plaisir (sous entendu de vous 49revoir) est une expression populaire quil convient dviter. Elle est, tort ou raison, considre comme parfaitement vulgaire et classera irrmdiablement celui qui lemploie. Prfrez en partant : jai t ravi(e) de faire votre connaissance ou ravi(e) de vous revoir. Dans tous les cas, bientt jespre suffira largement.Les fautes de grammaire sont une entorse au savoir-vivre puisquil sagit dune faute envers lesthtique de la langue.Attacher une importance particulire aux participes passs, bien les accorder vous classe parmi ceux qui savent matriser la langue et, en consquence, son contenu et sa pense. force de communiquer, on ne sait plus parler; aprs stre fait chair, le verbe sest fait image. On assiste la rgression progressive dun vocabulaire que lon croit enrichir en psalmodiant les mots inscrits au palmars du mois et des expressions technico-amricaines. On prend un mot pour un autre, les adjectifs ne qualifient plus, les subjonctifs ont, sur le grand public, des effets comiques.Les expressions. On vitera avec soin les mots paillassons et les tics de langage qui dnaturent et dvalorisent tout ce qui est dit. Les exemples sont nombreux : Je veux direTu vois Cest vrai Faut voir Nimporte commentNote que Dans ma tte Il faudra renoncer aux superlatifslaudatifs : super, hyper, extra, gant, mga, cool, trop, top Lorsquon veut approfondir un concept, il suffit dajouter : quelque part. On vitera les surnoms, les diminutifs sympathiques et les petits mots tendres : les chouchou, mimi, minouche, pupuce insipides.Si lon tient jurer, soit, mais alors, allez-y carrment. Tout, plutt que les zut, mince et flte, demi-mesures bien pires que la bonne franche vulgarit (entre tre vulgaire ou ordinaire, il faut choisir).Les effusions : dans les tics, on peut inclure la gestuelle. Ainsi, il est devenu habituel de sembrasser tout le temps et en tout lieu. Ce sont les adolescents qui nous ont pass cette coutume certes chaleureuse mais pesante. On embrasse maintenant jusquaux inconnus que lon vous prsente. Lpidmie est moins rpandue dans le milieu professionnel, mais elle stend. Est-il indispensable lentre dun colloque dembrasser lhtesse daccueil mme si on la connat bien? Trop daffection tue laffectif. Aussi, revenons des pulsions normales. Personne na vraiment envie dembrasser quelquun quil ne connat pas, alors pourquoi se forcer? La coutume de lembrassade gnralise a en plus ses propres codes : faut-il tendre une joue? Deux, trois ou mme quatre joues? Si lon ne pratique pas au mme rythme, on se retrouve alors violemment projet dans le vide dune joue non offerte ou, au contraire, nous mettons en danger nos cervicales parce quon a oubli la troisime bise.De dsagrable, laffaire vire au cauchemar lorsquon se retrouve dans une manifestation rassemblant beaucoup de monde. Au bout dun quart dheure, les femmes en particulier se retrouvent dvores, secoues (et dmaquilles!), tenues par les paules et passes au suivant comme un ballon de rugby. Une chaleur communicative? Ce nest pas certain. Retrouvons la distance qui cre la raret et rend les manifestations damiti vraiment chaleureuses. Le baiser est un art de vivre, pourquoi le galvauder?51Le savoir-vivre techno : la nouvelle solitude de lubiquitLe portableOui, nous sommes accro, il est devenu le nouveau cordonombilical socital... Mais lindigestion est proche. La rglementation nest pas loin; reste alors une seule solution : le rgime muet.Le mobile est devenu portable ou plutt le portable est devenu mobile. On pensait quavec les SMS, on avait fait le tour de la question en matire de message. Et bien non, le bonheur est maintenant complet, on reoit ses mails sur son tlphone avant quon ny regarde la tl...Au moment o respect et relationnel sont les matres mots du discours ambiant, la relation interpersonnelle se dgrade de faon impressionnante. Il semble tout coup que soit mise entre parenthses la faon de sadresser lautre face aux nouveaux mdias. On a certes rgl quelques gnes ponctuelles exasprantes : dans les lieux publics les sonneries se font discrtes, dans le train les conversations se font plus sourdes, on voit fleurir de-ci de-ldes panneaux de mise en garde, un pis-aller.Le silence intrieur va devenir le challenge de la conqute dunouveau vivre ensemble. Quand ce ne sont pas les porta52 bles, cest la musique au mtre qui hante tout ce qui ressemble un lieu de loisir : partout le fond musical simpose plus ou moins fortement pour signifier que lambiance est au rendez-vous; en aucun cas il ne faut prendre le risque de se retrouver face soi-mme ou lautre. Le fantme, lintrus est toujours l; celui avec qui on na pas choisi dtre se manifeste silencieusement avec ou sans vibrations sonores; il dbarque par SMS, par Black-Berry, PDA (Pocket Digital Agenda), Palm ou Palm-pilote. Dornavant, votre interlocuteur pianote en vous parlant, en conduisant, en rendez-vous, en runion, en entretien, au restaurant. tre joint partout et tout le temps est la priorit actuelle dans toutes les circonstances, sans se proccuper de savoir vraiment pourquoi.Imposant le silence aux humains, franchissant toutes les barriresnaturelles ou sociales, le fantme dvastateur dun Autre virtuel simpose. Lhomo technicus est n, lhomo sapiens est en extinction..Il semble plus important de communiquer avec lAutre, celui qui nest pas l, quavec vous, et ce quel que soit votre grade. Lintrus a su se faire respecter! On voit des ministres se taire docilement lorsque le portable de leur visiteur sonne. Vous serez mme flatt lorsque sans le moindre petit geste dexcuse votre interlocuteur regarde la provenance du message qui arrive, prcd dun bip impratif, pendant que vous lui parlez et quil vous lance condescendant : Je ne prends pas! Ou si au contraire il scarte poliment(!) pour grer une autre conversation quelques mtres devous. Aucun doute, vous tes moins important. Dans des cas exceptionnels, avec ostentation, votre visiteur vous dira Jteins mon portable. Vous saurez alors toute lestime dans laquelle il vous tient. Soyez heureux si vous avez dj lhonneur du silencieux comme pour un revolver.53 Cest ainsi, irrvocablement, que le mnage trois est entrin.On est pacs avec son portable. Certains le lchent seulement au profit dun moment de dtente en se branchant sur autre chose, sur le pod-cast par exemple qui diffuse sur I-pod les missions de radios en diffr (rates en temps rel parce que justement on est sur son mobile).Au bureau, le face--face devient un instant pointu! Il faut saisir son collaborateur entre le moment o il lve les yeux de son cran et celui o il branche son oreillette.En runion, la tension monte, les changes se font brefs, entrecoups dinterruptions momentanes du contact; pendantque vous leur parlez, vos collaborateurs schappent vers des ailleurs inconnus. Cest lAutre, le fantme qui simmisce sans vergogne dans les runions et les rendezvous les plus confidentiels. Si toutefois vous dsesprez de capter plus de 5 minutes lattention de votre vis--vis, il vous reste la solution de sortir de la pice et de lappeler sur son portable!Ah! quel bonheur dtre toujours joignable : cest le refrain la mode chantonner. Nous ne discuterons pas de ce que lon peut mettre sous ce concept de joignabilit, ni de ce que cela entrane dans la gestion du temps de travail ou dintimit, restons sur la forme. Les relations pistolaires, appelons-les ainsi, deviennent de plus en plus tendues. Lubiquit et linstantanit font peut-tre gagner du temps, mais au prix de combien de malentendus et derreurs dues la prcipitation? Au bout du compte, rien ne va plus vite, les dcisions sont longues prendre, les rsultats se font toujours autant attendre.La susceptibilit est mise mal : qui na pas vcu le dramedu SMS pas arriv faute de messagerie encombre? La54 rponse qui ne vient pas est mal supporte, vcue comme un refus volontaire et vexatoire. Personne ne vous croit si vous prtendez ne pas avoir eu le message. Tous les rpondeurs jurent que lon va vous rappeler ds quon aura eu le message et il faut croire les rpondeurs, ils grent le monde! Pour se disculper, recourir aux vrais mensonges : on a oubli, perdu (selon le dlai de non-rponse) son portable, le rseau est en panne, vous avez bogu (a cest vrai).Votre messagerie, celle de votre portable en particulier, devra viter soigneusement les messages sympas pleins dhumour, voix de Marilyn Monroe ou rap en musique de fond. Si votre entreprise vous rembourse, ne serait-ce que quelques communications, cela signifie que votre tlphone portable est un outil professionnel et mrite un peu de classicisme et de respect du possible interlocuteur professionnel qui vous contactera.On ne scrit plus, on senvoie un mail ?La situation ne samliore pas avec les mails. Si les documentsschangent avec volupt (au kg de pices jointes), la rsolution des problmes et le traitement de linformation nen sont pas moins compliqus : vous tes dbord(e), les yeux brlants devant lcran, les paupires qui tombent!Vous vous en sortirez en tirant sur papier puis en garant les documents destins ne pas tre imprims, et l tout rentre dans lordre.Le style lapidaire est devenu la rgle. Plus grave est la nature de la relation qui sinstalle de clavier clavierOn ne se formalise plus de labsence de ladresse destinataire : cher Machin est devenu ringard, lapa-55 nage des vieux quadras; la formule de politesse sabrge dans le meilleur des cas. On gratte sur la frappe. On communique lconomie mais on multiplie les messages sans laisser de temps la rflexion. Cette interactivit frntique et instantane prend le rythme du parler sans en avoir la chaleur ni la temprance de la gestuelle, le sourire qui attnue, la nuance dans le regard. Dialogues de sourds, aveugles et muets, car les mots ont perdu leurs destinataires de linstant. La possibilit et lhabitude maintenant ancres de sexprimer au mpris du temps et de la distance permettent de ragir la plus petite contrarit.On ragit chaud, sous le coup de lmotion; on crit comme on parlerait quelquun en face de soi avec plus dagressivit, plus daudace (facile de ne pas avoir de raction sur le moment!), on est courageux distance.Lautre ne reoit cette dcharge verbale que quelques heures aprs ou le lendemain; la riposte nen sera que plus vive. Le dcalage motionnel est constant.La dyslxie informatique. Cest devenu un enjeu de sant publique! Tous en sont atteints. Nous avons sombr collectivement dans le phontique comme on sombre dans lalcoolisme.Concentrs sur la touche, les technos-crivains enchanent les mots, utilitaires, condenss et dtachs de toute dimensin police ou littraire. Bonjour en dbut de mail (de prfrence bjr pour les SMS), et cdt la fin reprsentent le maximum que lon puisse attendre en matire de courtoisie. Le cdt suivi dun nom de famille ma fait prendre un certain Truchot pour un commandant pendant trois semaines avant que je ne ralise que cela signifiaitcordialement.56 Le mailing SMS : un cauchemar en particulier la priode des voeux! Il est grossier denvoyer une formule dvidence passe-partout en nombre, tout son carnet dadresses! Dj sur ordinateur cest une nuisance, mais sur le mdia intime quest le tlphone portable, cest inadmissible.Perdus, branchs, assomms de bruit et de liens qui nen sont pas, il est devenu normal de ne pas dcrocher , puisquon ne raccroche jamais. Que sont devenus ces moments intenses o lon prend le temps de travailler avec le temps de la rflexion sans image et sans le son ?La disparition du crayon et de la plume au profit du pianotage est en soi un lment dstabilisant ; lorthographe ne vient plus de la mme faon, dailleurs la touche correction sen occupe. Le regard ne se perd plus au loin. La sensualit de lcriture disparu. Une nostalgie peut-tre pas si inutile pour savoir comment se sortir de ce progres exponentiel ! Il va falloir repenser notre modus vivendiet matriser la place des nouvelles technologies, sous peine de ne plus pouvoir penser, aimer, admirer, couter, lireQuel sevrage sera possible et quel prix? O faudra-t-il fuir? Que deviendront ces enfants sages des wagons de TGV, les yeux rivs sur des crans baby-sitters? Quand prendront-ils un livre entre les mains? De quelle cultura allons-nous les nourrir? Allons-nous enfin les laisser sennuyer, cesser de vouloir les occuper et les laisser face eux-mmes ce que nous nous employons viter tout prix pour nous-mmes! Quel antidote ces nouvelles technologies, cancers relationnels aigus? Comment allons-nous nous affranchir de ces cordons ombilicaux virtuels qui relient des solitudes nvrotiques57professionnelles autant que personnelles, rendez-vous sur mon blog (les nouveaux journaux intimes)? On sappelle?, je te le mail, envoie-moi juste un SMS Plus on communique, moins on se parle. Plus on se rencontre, moins on se voit. Plus il y a de sons, moins il y a de musique. Plus jamais isols et plus seuls que jamais. Est-ce du savoir-vivre?Labondance des mails entrane une saturation agressivequi non seulement affaiblit le contenu, mais rend la rponse de plus en plus alatoire. Il ny a pas de rgle dans la jungle technologique. Or, il sagit dun mdia de linstantan : quand on ne rpond pas, on inquite ou on irrite; on piste linterlocuteur sans savoir pourquoi onlabreuve dinfos qui finissent par tre une prison professionnelle transformant lemploy, le cadre ou le patron (le mail est dmocratique) en OS post, le regard riv sur le caractre gras qui vous sonne!Faites comme avec votre tlphone portable, oubliez-le.En revanche, si vous ne vous en servez pas, noubliez pas de faire crire le message dabsence qui signale tous ceux qui vous ont crit (terme inappropri, on crit plus, on maile) que vous naurez pas connaissance de leur message.La techno courtoisieLes erreurs fatales Envoyer sans discernement un poids de documentationqui met le destinataire au bord de la saturation technologiqueet bloque son mail quand il louvre. En ce qui concerne les publicits, il est contre-productif de ne pas rayer des listes le destinataire qui a fait la dmarche de demander ne plus recevoir de messages. Respectez votre promesse. Ne pas rpondre un correspondant rgulier professionnel ou occasionnel (plus dexcuse pour ne mme pas prendre la peine de signifier un fournisseur quil na pas t retenu lors dun appel doffre). Inonder votre entourage au bureau de petites blagues. Jongler sur des sites personnels sur votre lieu de travail. Placer en fond dcran une pin-up dshabille (votre ordinateurest un outil de travail non sexiste !). Ne pas respecter la hirarchie ; pourquoi iriez-vous drangerpar mail votre directeur tous les jours alors quavant vous luienvoyiez une note tous les six mois, en vous demandant sictait bien opportun? Le fax fait figure de vieux mdia sympathique datant du sicledernier. Il a la courtoisie de reproduire lcriture, maisattention toutefois une confidentialit trs hasardeuse quipeut gner le destinataire de votre message.59Les plus qui comptent Prparez une avant-page offrant une ligne de synthse,signifiant le degr durgence et donnant des informationscompltes pour la rponse. Soyez discret(e) sur vos jouets. Ltalage des gadgets de labureautique est tout aussi vulgaire que les chaussures encroco. Respectez les traditions; lomniprsence des tlphonesne doit pas dispenser de demander lautorisation de sen servir votre voisin ou votre interlocuteur.Les piges viter Envoyer des fax de 20 pages. En rajouter sur la notion durgence et dimportance. Faire parvenir des lments incomplets qui obligent chercherpartout les informations manquantes. Le fait dtre en compagnie de quelquun et de passer sontemps avec dautres sur votre portable. Donner la personne avec qui vous tes la sensation quelleest moins prsente que celui qui vous appelle au tlphone.60 Le standard :soignez laccueil de vos correspondants!Les rgles dor Ne pas laisser sonner plus de trois fois sans dcrocher. Savoir pallier les inconvnients des postes directs qui fontoffice de standard sans personne au bout. Offrir des systmes de messageries fiables et organiss. Considrer la musique dattente comme un lment essentielde laccueil direct (qualit du son, changement des textes,rflexion sur leur contenu, reprise frquente de la ligne par lastandardiste). Trouver quelquun dautre que le technicien de surface austandard partir de 18 heures. Faire passer des tests psychologiques aux standardistes poursassurer quelles sont capables dassurer la fonction dlicatede reprsentation de leur socit : pas dhumeurs, maisde la rapidit, de la patience, une exceptionnelle courtoisie,une bonne locution Vrifier que les standardistes sont capables de rpondre unappel en anglais ou en espagnol sans raccrocher sur-lechamp,muettes dangoisse la simple coute dun accenttranger. liminer le jpeux pas prendre de messages sous prtextequil existe des botes vocales. Rappelez lorsquon vous laisse un message !61Danger SDALa SDA (Slection directe larrive) est un systme qui consiste dcharger le standard en attribuant les quatre derniers chiffres du numro de lentreprise chaque collaborateur individuellement, pour que lappel aboutisse directement sur son poste. Il sagit dun des derniers piges de la technologie dtecter sous peine de cautionner un manque de savoir-vivre tlphonique gnral et irrmdiable.Par dfinition, linstallation de lignes directes implique que vous deveniez vous-mme le standard de lentreprise.Voici donc quoi vous condamnez votre interlocuteur lorsque vous ntes pas l et que votre sec