INVESTISSEMENT ET PERFORMANCE

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    Universit Lumire Lyon 2

    INVESTISSEMENT ET PERFORMANCE

    De la conception stratgique la gestionoprationnelle

    Mmoire pour le Master professionnelManagement du secteur public : collectivits et partenaires

    Soutenu par

    Emeric GREGOIREle 6 septembre 2007

    JURY : Olivier NYS Directeur Gnral Adjoint de la ville Lyon Directeur du mmoire Claire TOPENOTResponsable du service programmation de la ville de Lyon Matre de stage Guillaume DEFAYAssistant de vrification la Chambre Rgionale des Comptes Rhne-Alpes

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    Table des matires

    Remerciements . . 5Citations . . 6

    INTRODUCTION . . 7

    PARTIE 1 A LORIGINE DE LINVESTISSEMENT, UNE VISION STRATEGIQUE DES MISSIONS

    DE LA COLLECTIVITE . . 13

    Chapitre 1 : La ncessaire adoption de dmarches stratgies dans les collectivits . . 13I. Les origines du concept de stratgie . . 13

    II. La justification du recours une dmarche stratgique dans les collectivits . . 14

    III. Pour une appropriation des mthodes de lanalyse stratgique . . 17

    Chapitre 2 : Des approches varies de segmentation . . 21

    I. La segmentation en politiques publiques . . 22

    II. La segmentation stratgique par le budget . . 25

    Chapitre 3 : La stratgie financire, pierre angulaire de la russite des investissements . . 28

    I. Les principes rgissant la section dinvestissement . . 28II. Le recours lanalyse financir . . 30

    III. Le dbat sur larbitrage pargne / emprunt pour financer les investissements . . 35

    PARTIE 2 LES ANALYSES DOBJECTIVATION DES CHOIX DINVESTISSEMENT . . 38

    Chapitre 1 : Lanalyse fonctionnelle et technique de l investissement . . 39

    I. Lanalyse technique et fonctionnelle des projets . . 40

    II. Anticiper les travaux ncessaires par le suivi technique et fonctionnel de lexistant. . 43

    Chapitre 2 : Lvaluation conomique et financire des investissements . . 45

    I. Des outils pour chiffrer le cot rel dun investissement62 . . 46

    II. Evaluer le rendement de linvestissement . . 50

    Chapitre 3 : Le choix du montage juridique . . 53

    I. Rappel des principes de base sur la gestion des biens publics . . 53

    II. Le choix de lexternalisation de la ralisation et de lexploitation des ouvragespublics . . 55

    III. Lexternalisation par le recours des biens privs . . 64

    Chapitre 4 : la recherche dune gestion optimise du patrimoine, un pralable aux choixdinvestissements . . 66

    I. De linventaire . . 67II la stratgie patrimoniale . . 68

    PARTIE 3 LA PERFORMANCE PAR LE PILOTAGE DES DEPENSES DINVESTISSEMENT . . 73

    Chapitre 1 : La programmation pluriannuelle des investissements . . 73

    I. Les PPI, des instruments de garantie de bonne gestion . . 73

    II. Des conceptions plus ou moins pertinentes des PPI . . 75

    III. Une prcieuse aide la hirarchisation des projets . . 76

    Chapitre 2 : La gestion en AP-CP, garantie dune rgulation des dpenses de qualit . . 77

    I. Une adaptation rcente du droit budgtaire aux soucis de pluriannualit . . 78II. Les AP-CP un atout pour la visibilit de laction . . 79

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    Remerciements

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    Remerciements

    Merci lensemble des personnes qui mont conseill et soutenu pour raliser ce mmoire.

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    Citations

    Cette esprance en des temps meilleurs, sans laquelle un dsir srieux defaire prosprer le bien gnral naurait jamais chauff le cur de lhomme, atoujours eu de linfluence sur le travail des bons esprits. [] Car dire que ce quina pas russi jusque l ne russira jamais ne justifie mme pas quon renonce un dessein pragmatique ou technique, encore moins un dessein moral quiest un devoir tant quon ne peut tablir dmonstrativement limpossibilit de saralisation. Emmanuel KANT, Thorie et Pratique, 1793, 3 partie 5

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    INTRODUCTION

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    INTRODUCTION

    Linvestissement public local, par son importance considrable et les enjeux auxquels ildoit rpondre ne peut laisser dautre choix aux dcideurs publics que de rflchir saperformance.

    Linvestissement se dfinit comme lensemble des dpenses des collectivits quiconsistent accrotre la consistance de la valeur de leur patrimoine, de manire

    durable1(dpenses dquipements, c'est--dire de travaux, achats de terrains et btiments,acquisition de matriels durables, mais aussi de manire indirecte, les participations aufinancement des investissements dentits extrieures qui assument des missions dintrtlocales, ainsi que les remboursements de dette puisquils rduisent le passif en augmentantles actifs nets).

    En 2006, les dpenses dinvestissement des collectivits et de leurs groupementsdpassent les 40 milliards deuros (hors remboursement de dette). Elles reprsentent 11%de la formation brute de capital fixe nationale (FBCF), c'est--dire de linvestissementcivil national, et plus de 70% de linvestissement public civil. Ces dernires annes, leurprogression est reste dynamique (+8% par an depuis 2003, en moyenne).

    De multiples raisons expliquent le fort poids de linvestissement public local : transfertsde comptences successifs de lEtat sur les collectivits territoriales, volution des normesrelatives aux quipements (engendrant dimportantes hausses de travaux), contexteconomique (croissance du cot de limmobilier et de la construction, augmentation du

    prix des matires premires), volutions dmographiques (augmentation et vieillissementde la population), changements sociologiques (talement urbain, rduction du nombre

    doccupants par foyers) et surtout, croissance et diversification des attentes sociales2.

    Lenjeu de linvestissement est immense : rpondre la demande sociale, fairefonctionner les services publics, contribuer au dveloppement du territoire.

    Structures et infrastructures conditionnent lpanouissement des populations enrpondant aux besoins sociaux. Tout au long de sa vie, un individu frquente sans cessedes quipements publics locaux, et utilise quotidiennement les infrastructures publiques.

    Les investissements publics permettent le fonctionnement de lensemble des activitsde service public et dintrt gnral. Il sagit daccueillir les activits et leur donner des

    moyens matriels de qualit pour fonctionner.Les investissements permettent des populations daccder des prestations dont

    le march les exclut, parce que leur pouvoir dachat est insuffisant (quipements socio,mdico-sociaux, sportifs, culturels, ducatifs, logements).

    Les investissements permettent le dveloppement du territoire, dans la mesure o ilsvisent attirer les entreprises sur le territoire, celles-ci pouvant tre alors sources de revenuspour la collectivit, sources dinvestissements privs et demplois. Les infrastructures de

    1 Il sagit l de la dfinition comptable de linvestissement, telle que donnes par les instructions budgtaires et comptablesdes collectivits territoriales. Une circulaire du 26 fvrier 2002 NOR/INT/B/02/00059/C dresse une liste non exhaustive des lments

    considrs comme de linvestissement.2 Cf. annexes sur les chiffres de lvolution de linvestissement et leurs explications

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    transport (rpondant aux impratifs de vitesse), les quipements dducation (assurantune qualit de la main duvre), les offres de terrains et locaux adapts (rpondant auxcontraintes des projets des entreprises), et lensemble des investissements contribuant la qualit de vie, concourent lattrait des capitaux sur le territoire, et donc son

    dveloppement.Face lincapacit de rsorber le chmage de masse, face aux phnomnes de

    concurrences qui sexercent entre collectivits, et face la dichotomie entre lvolution desressources et des charges des collectivits territoriales, celles-ci ont pris conscience delimportance de leurs interventions dans le domaine du dveloppement conomique. Celui-ci contribue au dveloppement de tout territoire.

    La difficult est alors de faire en sorte que les investissements rpondent bien auxattentes de lensemble des acteurs du territoire, temporellement et spatialement. Cesattentes sont rputes de plus en plus exigeantes, parce que les bnficiaires desinvestissements sont nombreux, et revtent des exigences de plusieurs natures.

    Les usagers des services et quipements publics attendent de ceux-ci quils soient dequalit, quils soient aptes rpondre leurs besoins.

    Lusager qui est lecteur, attend des services quils concident avec lesengagements lectoraux. Latteinte des objectifs dtermine lefficacit de laction publique.Linvestissement doit donc tre efficace.

    Mais ce nest pas tout. Lusager est galement citoyen et contribuable. A ce titre, il est endroit dattendre de sa collectivit quelle face le meilleur usage possible des deniers publics.Des pressions sexercent sur les lus locaux, pour savoir sils parviennent atteindre leursobjectifs au moindre cot. Les erreurs de gestion sont trs mdiatises, notamment viales rapports des Chambres rgionales des comptes, sous lattention des associations decontribuables de plus en plus actives. Cest donc bien lefficience des services qui tend

    devenir une priorit.Qualit, efficacit et efficience forment souvent les piliers de ce qui est communment

    appel la performance.

    La qute de performance intresse davantage les collectivits lorsquelles se heurtent des limites financires. Face un avenir financier qui sassombrit, elle pourrait segnraliser. Aprs 8 annes conscutives de dsendettement (1996-2003) les prospectivesfinancires laissent entrevoir un prochain retour de balancier qui pourrait savrerdouloureux (la pression fiscale arrive ses limites, la part des ressources propres saffaiblit,

    les transferts financiers de lEtat sont insuffisants)3.

    Plus quauparavant, les collectivits vont se retrouver dans des situations o il ne sera

    pas possible de satisfaire tout le monde, et o les erreurs seront injustifiables !Les lus doivent sans cesse arbitrer, oprer des choix. La difficult est alors de

    savoir sur quels critres faire ces choix ? Pourquoi consacrer aujourdhui les ressourcesdisponibles dabord la rfection de lhtel de ville plutt qu un nouvel quipement sportif ?

    La rflexion est dautant plus importante, quen matire dinvestissement, les dcisionsprises engagent la collectivit sur le moyen et le long terme et sont souvent irrversibles.

    Comme le soulignent certains auteurs, les critres de dcision sont nombreux etdivers, lanalyse en est complexe. Les lus prfrent souvent retenir celui qui, linstant

    3 Cf. notamment lanalyse de Michel Klopfer, 2007-2008 : un retour au surendettement ?, La Gazette des communes du22janvier 2007, p.52 57.

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    INTRODUCTION

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    propice, se prsente comme un argument suffisamment fort pour tre ensuite opposable

    de manire convaincante toutes les contestations 4. Le critre dterminant peut trelurgence rvle par un groupe de pression influent, un effet de mode, une opportunitde subvention ou demprunt Latout dune collectivit est certes davoir des lus ractifs,

    en contact permanent avec leur territoire. Cependant, nombre dquipements qui ontt crs selon ces critres de dcision sont aujourdhui dans un triste tat dabandon,ou de sous emploi, (parce que les impacts et lenvironnement de lquipement ont malt valus, parce que lquipement savre peu fonctionnel, parce quil devient tropcoteux, parce que la collectivit ne sait pas le valoriser), alors quau mme moment,la croissance des actifs des collectivits est telle quelle dpasse celle de linflation. Detrop nombreuses dcisions politiques sont encore intuitives, htives, impulsives, voireclientlistes, et engagent parfois des collectivits dans des dbordements inconsidrs,encore plus redoutables en priode de difficults conomiques attentes sociales nonsatisfaites, drapages financiers, dmotivation des agents

    Comment viter tous ces phnomnes ? Comment viter le risque de choix

    irrationnels et contribuer amliorer les lments qui dtermineront les dcisionspolitiques ?

    La recherche de performance de linvestissement est au centre de ces proccupations.

    Les collectivits territoriales connaissent une vritable effervescence autour de la notionde performance. Certains diront quil ne sagit que dun simple moyen de communication.Dautres ny voient quun effet de mode, avec quelques annes de retard sur lentreprise.

    Comme le souligne Annie Bartoli5, chaque priode porte son vocabulaire et est sans cesse la recherche de modernit. Or il est vrai que la modernit est lie une poque prsente,dont les caractristiques peuvent vite devenir obsoltes.

    Lutilisation de la notion nest pas toujours neutre. Elle intervient dans un contexte de

    forte remise en cause de laction publique o, sur fond de crise financire de lEtat, lidedominante est celle de lincapacit du secteur public assumer ses missions et dun secteur

    priv dot de toutes les vertus6. Lidalisation du modle de lentreprise a conduit desexprimentations doutils et mthodes managriales au sein du secteur public local, qui ontbien souvent chou, faute davoir su prendre en considration les spcificits du servicepublic. Si la performance publique peut sinspirer des outils du secteur marchand, elle ne

    peut se rduire des pratiques consistant singer lentreprise7.

    Depuis la rforme budgtaire de lEtat en 20018, les gouvernements successifssemblent donner pour synonyme la performance, la capacit des pouvoirs publics gnrer des conomies. Le premier indicateur de cette performance est alors le respect des

    4 RIGALDIES Bernard et CHAPPOZ Yves, Le projet de territoire, Editions du Papyrus, coll. Les guides Actelus, 1996, 117pages, rfrence p.19.

    5 Annie Bartoli, Le management dans les organisations publiques, Dunod, 2 dition 2005, 416 pages.6 Cf. GRAIL Cdric, LESCAILLEZ Vincent et MENUT Philippe, Lamlioration des performances des collectivits territoriales :

    de lintention la pratique, CNFPT INET, AFIGESE, ACUF, octobre 2006, 217 pages, consultable sur : www.afigese.asso.fr/travaux/

    GUIDEPILPERF.pdf7 Cf. entretien avec ANDREU Sol, Sloigner du bien public en singeant lentreprise, La lettre du cadre territorial n304

    du 15 octobre 2005, p.22-238 Loi organique n2001-692 du 1eraot 2001, loi organique relative aux lois de finances, JO du 2 aot 2001

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    critres du Pacte de solidarit et de croissance (imposant un dficit public infrieur 3% du

    PIB et une dette en dessous de 60% du PIB)9.

    Au-del de la priorit donne laspect financier de la performance, lapproche gnrale

    du secteur public est celle dune recherche de culture de rsultats . Celle-ci sousentend que la performance consiste fixer des objectifs et dterminer des moyenspour les atteindre. Des indicateurs sont labors pour valuer latteinte de ces objectifsdans le respect des moyens allous. Les carts constats doivent donner lieu desactions correctrices sur les objectifs, sur les moyens ou sur lorganisation. On retrouve

    l les principes managriaux classiques, thoriss par exemple par Deming10. La culturede rsultats entend responsabiliser les dcideurs publics, en insistant sur le contrlede lefficacit et de lefficience des actions publiques. Elle est mise en uvre par desdmarches de contrle de gestion. Elle est souvent illustre par le triangle suivant :

    Mais aujourdhui, des critiques slvent contre les insuffisances de cette approche dela performance par la culture des rsultats.

    Avant mme de pouvoir prtendre des rsultats, il faut dabord tre en mesure dechoisir les objectifs vers lesquels sorienter, et de choisir les moyens allouer pour yparvenir.

    Certes, la culture du rsultat permet de dpasser la logique des moyens, qui nincite pasles organisations se poser la question de lefficacit et de lefficience des actions publiques.Mais elle ne suppose pas quune rflexion pralable ait t mene sur la finalit mme du

    rsultat atteindre. En aucun cas la culture du rsultat ne garantit la pertinence des objectifsfixs. Un rapport parlementaire de la commission des finances de 2005 reproche le manque

    de rflexion sur la finalit des objectifs fixs par les politiques publiques nationales 11. Cesobjectifs ne feraient pas suffisamment lobjet de relles analyses stratgiques , et seraient

    9 Cf. DURAND Jean-Marc, La loi de finances 2006 sous le signe de la LOLF, Economie et Politique, n612-613, juillet aot2005, p.4 7

    10 La roue de Deming pose les conditions de la performance dune organisation : plan (prvoir, fixer des objectifs), do (agir, raliser), check (contrler, valuer), act (rectifier les carts constats).

    11 Rapport dinformation de la Commission parlementaire des finances n220, LOLF : culte des indicateurs ou culture de laperformance ? , prsid par Jean Arthuis, mars 2005

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    INTRODUCTION

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    trop peu tourns vers la logique de performance. Le rapport invite lEtat rechercher identifier les priorits de laction publique , et renforcer (sa) cohrence .

    Ce rapport semble implicitement avancer lide quun objectif, un rsultat atteindre,na de sens que sil a vritablement t remis en cause, que sil a t conu stratgiquement.

    Un rcent discours du Premier ministre12 invite, dans le mme sens, sinterrogersur la raison dtre de chaque politique publique () Lexamen critique est la cl de votede la modernisation de lEtat . Pour lui, la finalit des politiques publiques est de rpondre la demande du moment : Laction publique doit sapprcier la lumire des attentesactuelles des citoyens . Cela sous-entend quil faille, pour chaque action, pour chaqueobjectif fix, se poser les questions suivantes : Que faisons- nous dj ? Quels sont lesbesoins et attentes des citoyens ? Faut-il continuer de faire de la sorte ? Qui pourrait mieuxassurer cette politique ? Qui doit la financer ? Comment mieux faire moindre cot ? Lafinalit est de rendre lEtat sa capacit daction . Laction des collectivits locales doitrelever dune mme dmarche. Se donner les moyens de choisir une orientation, se mettre

    en capacit de choisir son action, constitue la condition premire de la performance. Cestde cette culture des choix que dcoulera ensuite la logique de rsultat.

    La performance dune organisation peut alors se mesurer son aptitude se mettreen capacit de dcider en connaissance de cause. Une collectivit territoriale performanteest donc dabord celle qui parvient en toute lucidit choisir :

    le primtre de ses actions,

    la qualit de ses actions,

    le cot de ses actions,

    les moyens et ressources pour y parvenir,

    et le dispositif de pilotage pour valuer et corriger les carts de conduite.

    La question du choix se pose autant au niveau global (macro performance) quau niveaudune action prcise, dune groupe ou dun individu (micro performance). Cest au niveauglobal de linvestissement que portera notre rflexion.

    Ce mmoire propose dapprhender linvestissement sous langle de la performanceglobale, en partant de son niveau dorientation le plus lev (la conception stratgique),jusqu sa mise en uvre pratique (par les outils de gestion oprationnelle). Il sattardera examiner lensemble des critres qui, tourns vers la recherche defficacit et defficience,doivent servir de base lobjectivation de la dcision politique. Il se penchera galementsur les techniques de gestion extra budgtaires qui garantissent la ralisation financire desinvestissements.

    Un investissement ne tombe pas du ciel. Il dcoule dabord dune vision dudveloppement du territoire. Le choix des objectifs moyen et long terme qui orientent lacollectivit pour de nombreuses annes constitue la stratgie gnrale. Celle-ci slabore enfonction de lenvironnement de la collectivit et de sa situation interne. Si elle place lusagerau cur de sa rflexion, elle assure dj le dbut de la russite des investissements. Pourtre mise en uvre, la stratgie est dcline en plans dactions, souvent au travers dellaboration de politiques publiques et du budget. On parle alors de planification stratgique.Ce niveau le plus haut de dcision dfinit le primtre des actions publiques, leur niveau de

    12 Discours de Franois Fillon lors de la runion de lancement de la rvision gnrale des politiques publiques, Centredes Confrences Internationales Klber, le 10 juillet 2007, consultable sur : www.performance-publique.gouv.fr/presse/doc/

    DP_RGPP_discoursPM_RGPP.pdf

    http://www.performance-publique.gouv.fr/presse/doc/DP_RGPP_discoursPM_RGPP.pdfhttp://www.performance-publique.gouv.fr/presse/doc/DP_RGPP_discoursPM_RGPP.pdf
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    qualit, et les moyens allous de manire globale. Lanalyse financire qui accompagne lastratgie permet danticiper la capacit financire de la collectivit investir (partie 1).

    La planification stratgique labore, le choix de chaque investissement sopre, toutau long du mandat. De trs nombreux lments interfrent dans chaque dcision. Quisera le bnficiaire exacte de linvestissement ? Quelles fonctions donner au projet ? Dansquelle mesure ce que lon possde permet-il de rpondre aux besoins ? Quel seront lesconsquences financires des projets ? Comment faudra-t-il exploiter ces biens ?

    Ces questions ncessitent de connatre des lments relevant de domaines trsdiffrents : conomiques et financiers, juridiques, techniques, tudes marketing ,patrimoniales Elles font intervenir des expertises diverses quil faut relier et coordonner.Lapproche patrimoniale peut constituer ce ciment entre les diffrentes analyses.

    Ces analyses sassimilent des filtres la dcision de lancement de chaqueinvestissement. Dans un contexte o les ressources sont limites, ces analyses permettentune slection et une hirarchisation des projets refltant de manire cohrente leurs effets

    temporels. Elles constituent des clairages sur lefficacit socio-conomique de chaqueinvestissement et de chaque bien possd (partie 2).

    Les contraintes financires ne permettant de raliser tous les projets, il faut alorspouvoir hirarchiser, prioriser ceux-ci. Cest l lobjet de la programmation pluriannuelledes investissements (PPI), qui constitue galement un outil de contrle et de pilotage,pour sassurer de la bonne excution des investissements. La PPI gre laide doutilsfinanciers pluriannuels (via les autorisations de programmes et crdits de paiements)garantit la bonne rgulation des dpenses dinvestissements en comportant une dimension la fois physique et financire (partie 3), et assure la ralisation des projets dfinitivementslectionns.

    Le schma suivant synthtise lapproche gnrale qui fait lobjet de notre tude.

    A consulter sur place au Centre de Documentation Contemporaine de l'Institutd'Etudes Politiques de Lyon

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    Ltymologie de la stratgie nous renvoie un concept militaire. La stratgie, ce fut dabord lart d'organiser et de conduire un ensemble d'oprations militaires prvisionnelles et de

    coordonner l'action des forces armes 13. Ce nest que dans les annes 60 que le conceptapparat dans le secteur conomique, pour dfinir lensemble des choix d'objectifs et demoyens qui orientent moyen et long terme les activits d'une organisation, d'un groupe .

    En effet, dans un contexte de comptition conomique, les entreprises sont amenes coordonner leurs forces, et orienter lensemble de leurs actions vers des objectifscommuns.

    Le concept merge aux Etats-Unis dans le milieu industriel, notamment suite auxrecherches de la Business School dHarvard et dauteurs tel que H. Igor Ansoff. Il sagitalors daider le secteur industriel planifier budgets et productions, sur la base decalculs conomiques, de prospectives, et de mthodes cots/avantages. Les dmarches

    stratgiques ont connu de nombreuses volutions avant dintgrer le secteur public14.

    La stratgie tend fixer les grandes orientations du groupe moyen et long terme,compte tenu de toutes les contraintes qui se prsentent lui, tant externes (du fait delenvironnement) quinternes (du fait des caractristiques qui lui sont propres). Elle a pourfinalit dorienter les forces de lorganisation vers un cap prcis, de dployer, de positionnerles ressources disponibles dans un milieu marqu par la concurrence, afin dassurer laprennit, la croissance, la rentabilit de lentreprise. Cest dabord au regard des choixstratgiques que se dcident les grands investissements dune organisation.

    II. La justification du recours une dmarche stratgique dans les

    collectivits

    De prime abord, il semble difficile de saisir la raison pour laquelle le secteur publicadopterait une dmarche stratgique linstar de lentreprise. Certes, collectivits etentreprises recherchent satisfaire une demande, gographiquement et temporellement.Mais si lentreprise recourt lanalyse stratgique, cest parce quelle volue dans unenvironnement concurrentiel, fluctuant, o sa prennit nest pas assure (la dure de viemoyenne dune entreprise en France est de 5 ans), et o tout est tourn vers le souci derentabilit.

    Alors pourquoi chercher introduire des dmarches danalyse stratgique dans desorganisations qui, loppos de lentreprise, se caractrisent par :

    une situation de monopole sur leur territoire, des actions dictes par les lois rglements,

    une solvabilit perptuelle (sans possibilit de faire faillite), un environnement stable

    13 Dfinition encyclopdie Larousse14 Dans les annes 70, les recherches gagnent le marketing. La stratgie acquiert une dimension qualitative. Elle apprhende

    de nouveaux modes de management, des mthodes de contrle de gestion, daudit, des dmarches projet Elle atteint mme le

    secteur public anglo-saxon. Les annes 80 sont celles du management qualit, qui vise faire face une clientle plus volatile

    et des employs moins attachs aux structures pour lesquelles ils travaillent. Les impulsions viennent alors essentiellement du

    Japon. Pendant les mmes annes se dveloppe la financiarisation de lconomie et du management. Une vritable ingnierie du

    financement de projets se dveloppe. Elle concerne bien sr linvestissement public, et se traduit par un rapprochement du secteur

    public et priv. La stratgie des annes 90 intgre limportance de lorganisation interne des entreprises. Dcentralisation de certaines

    fonctions, responsabilisation des acteurs, contractualisation des mthodes de contrle sont prioriss.

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    PARTIE 1 A LORIGINE DE LINVESTISSEMENT, UNE VISION STRATEGIQUE DES MISSIONS DE LA

    COLLECTIVITE

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    labsence de souci de rentabilit

    Ces caractristiques ne sont que des priori de plus en plus loigns de la ralit subiepar les collectivits.

    1) Un milieu concurrentiel

    Certes, la concurrence subie par les collectivits nest pas de la mme nature que celle delentreprise. Lenjeu pour une collectivit nest pas sa survie. Elle nencourt pas la disparitionde la carte administrative. La concurrence laquelle elle est confronte se situe deuxniveaux diffrents :

    On la trouve dabord au niveau des lus. Ceux-ci cherchent viter lchec lectoral.La concurrence sexerce entre les diffrentes quipes qui saffrontent pour obtenir laresponsabilit de la gestion de la collectivit.

    La concurrence se trouve ensuite entre collectivits. Quelle soit verticale (entrecollectivit de catgories diffrentes) ou horizontales (entre collectivits de mmecatgorie), cette forme de concurrence semble saccrotre. Lvolution de la dcentralisationet de la libre administration a conduit une situation o les collectivits interviennent sur desdomaines identiques. Elles cherchent souvent satisfaire les mmes types de demandes.La logique de transferts de blocs de comptences par catgories de collectivits sembledpasse. Aujourdhui, laction publique est transversale. Les comptences et actionsdes collectivits senchevtrent constamment. Cette transversalit de laction publiquesobserve par exemple dans le domaine social, en rponse la croissance du chmage,prcarit et de lexclusion. Les enchevtrements existent galement dans le domaineculturel, o ils sexpliquent plutt pour des raisons de prestige. On les retrouve aussidans le domaine de linterventionnisme conomique. Mais cest surtout dans le domainede linterventionnisme conomique, dont lobjectif est dattirer les flux conomiques sur

    le territoire que se dveloppe la concurrence. Face aux difficults conomiques et limpuissance de lEtat de rduire le chmage, des lus adoptent un vritable discoursentrepreneurial pour amener les entreprises et capitaux publics sur leur territoire. A cetgard, les quipements dinfrastructures de transports, la concentration des servicesaux entreprises, lamnagement spatial, le niveau ducatif de la population, les tauxdimposition constituent de vritables avantages concurrentiels.

    Pour faire face ces formes de concurrence, les collectivits doivent se poserla question de lanalyse stratgique. Plus globalement, ce sont les phnomnes delibralisation des changes, de mobilit des capitaux, de drglementation associs auxdsengagements de lEtat et sa perte de capacit rguler lconomie, qui sont les causesde cette situation de concurrence entre collectivits.

    2) Des champs daction trs vastes

    Si les actions des collectivits relvent de comptences obligatoires, c'est--dire imposespar le lgislateur, bon nombre dentre elles relvent de leur clause gnrale de comptence.

    Ainsi, les collectivits interviennent dans des domaines trs varis15. Le choix de cesinterventions ncessite des analyses sur les destinataires de loffre, sur la quantit, la qualitet les modalits de gestion des services proposs. Ces questions relvent galement dela stratgie (comme une stratgie de marketing). La stratgie de lentreprise lui permet

    15 mme si ces interventions sont trs encadres juridiquement, dans le souci de respect de lintrt local, de la libert de commerceet dindustrie, et de libre concurrence.

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    damliorer sa capacit de rponse aux attentes de son march. La stratgie dunecollectivit lui assure une meilleure aptitude rpondre aux besoins de la population.

    3) Des risques financiers rels

    Certes, une collectivit ne peut pas faire faillite. Mais les exemples de grands scandalesfinanciers intervenus suite de graves erreurs de gestion de certaines collectivits dansles annes 90, dmontrent que les collectivits sont loin dchapper tout risque financier.Les consquences dune mauvaise gestion sont lourdes : risque de mise sous tutelle duprfet, de restrictions budgtaires avec rduction de la masse salariale, cession certainsbiens, ou suppression de certains services facultatifs. Les marges de manuvre dont ellesbnficient financirement justifient une approche stratgique.

    On objecte souvent le fait que le service public na pas se soucier des objectifs derentabilit. Certes, la stratgie de lentreprise a pour objectif daccrotre sa rentabilit (toutesses activits sont tournes vers cet objectif). Mais la stratgie dune collectivit lui permetdanalyser ses actions en termes de cots. Les exigences accrues defficience du servicepublic ncessitent trouvent galement des rponses via lanalyse stratgique.

    4) Un environnement mouvant

    Par ailleurs, lenvironnement dans lequel les collectivits voluent est mouvant. Leur gestionest impacte par :

    les fluctuations conomiques (faisant varier les ressources fiscales, dterminant lesconditions des emprunts),

    les volutions de la demande sociale (exigence de qualit au moindre cot),

    les changements de technologie,

    les modifications juridiques (notamment dans le domaine de lachat public et delinterventionnisme conomique, ou du fait des incertitudes sur lvolution de ladcentralisation).

    Les instabilits environnementales ne sont donc pas inconnues des collectivits. Celles-cise doivent dtre ractives face ces volutions.

    Si tous ces lments justifient le recours des dmarches danalyse stratgique,on comprend bien que celle-ci ne pourra se calquer exactement sur les mthodes delentreprise. Sil existe des similitudes entre le secteur marchand et non marchand, lescaractristiques de ce dernier sont bien trop spciales. Il ne faut pas omettre que lactiondune collectivit est avant tout guide par lintrt gnral. La raison dtre du secteur public

    est dabord dassurer la cohsion sociale et territoriale. Les mthodes demanderont doncforcment des adaptations. Les collectivits doivent chercher dvelopper des modlesqui leurs sont propres.

    Le concept de stratgie peut mme tre redfini lorsquil est utilis dans le secteurpublic local. De manire gnrale la stratgie reprsente lensemble des dcisionsfondamentales qui permettent la meilleure insertion possible de lorganisation dans sonenvironnement afin dassurer son dveloppement optimale. La stratgie dune collectivit

    publique est lexpression de la volont de dterminer les grands axes du dveloppement

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    futur des politiques publiques, et donc la faon de piloter lallocation des ressources moyen

    terme pour rpondre au mieux aux besoins de sa population. 16

    La stratgie rejoint ce que les dcideurs publics locaux appellent souvent le projet de

    territoire. Celui-ci a pour objet de dterminer les grandes orientations souhaites pour leterritoire, sur le moyen et long terme.

    La stratgie peut alors se concevoir comme une mthodologie qui participe lmergence et la ralisation dun projet de territoire construit, rflchi. Le but est dechercher dynamiser le territoire en rpondant aux attentes du moment et en anticipant lesbesoins futurs, compte tenu dun ensemble dvolutions.

    Se pose maintenant la question de la nature de la dmarche entreprendre. Lescritres qui lgitiment lapproche stratgique supposent une dmarche sappuyant surdes facteurs internes (capacits humaines, techniques et financires de la collectivit) etexternes (environnement social, conomique, juridique, dmographique), tourns vers lademande sociale.

    III. Pour une appropriation des mthodes de lanalyse stratgique

    1) Les dmarches de lentreprise

    De nombreux modles proposent des mthodes danalyse stratgique dans entreprise.Le plus connu dentre eux est certainement le modle SWOT (strenghts/weakness,opportunities/threats) qui confronte une analyse externe sur les opportunits et menaces

    de lenvironnement, une analyse interne sur les forces et faiblesses de lentreprise17.

    Lanalyse externe permet de dgager des facteurs cls de succs (FCS), qui

    sont les lments stratgiques que lentreprise doit matriser pour tre comptitive dansune activit donne (ex : matrise des cots, innovation technologique, dveloppementmarketing). Linstabilit de lenvironnement conduit souvent la redfinition des FCS que

    les volutions ont rendus obsoltes18. Lanalyse externe suppose une tude globale delenvironnement (sur les facteurs conomiques, dmographiques, sociologiques, juridiques,politiques, technologiques) et une approche plus sectorielle qui se focalise sur les

    concurrents et partenaires de lentreprise19.

    Lanalyse interne vise connatre les capacits de lentreprise. De nombreux auteursont avanc des mthodologies, qui se rapportent leur conception de la performance delorganisation (on retrouve alors les grands modles des ressources, de la satisfaction desacteurs, des processus et des objectifs rationnels). Lobjectif est de dgager des avantages

    16 Dfinition propose par Bruno Carlier et Christophe Ruprich-Robert, in Guide du contrle de gestion dans les collectivitslocales, Berger-Levrault, 2005, 380 pages, citation p. 24-25.17 Pour une synthse des thories et pratiques de la stratgie dentreprise : Frdric Leroy, Les stratgies de lentreprise, Dunod,2004, 128 pages.

    18 La redfinition des FCS suppose que lentreprise se trouve alors dans une situation d hypercomptitivit , notiondveloppe, notion dveloppe par dAveni (1995)

    19 Lanalyse sectorielle la plus pratique en France sinspire des thories de Porter qui suppose que les conditions deconcurrence sont influences par 5 forces : pression des fournisseurs, pression des clients, produits de substitution, barrires lentre

    et menaces de nouveaux entrants, rivalits entre concurrents. M. Porter, Choix stratgiques et concurrence, Economica, 1982

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    concurrentiels (en combinant matrise des cots, diffrenciation de loffre, efficacit etefficience organisationnelle, ).

    Cest la confrontation des analyses externes et interne qui permet dadopter les choixstratgiques.

    A consulter sur place au Centre de Documentation Contemporaine de l'Institut d'EtudesPolitiques de Lyon

    La dmarche du modle SWOT peut tout fait inspirer les mthodes danalysestratgique des collectivits territoriales. Il devra bien entendu tenir compte descaractristiques propres au secteur public.

    2) Lintgration au monde des collectivits

    Beaucoup de collectivits ne cherchent pas adopter de mthodologie pour mettre enuvre leur projet de territoire. Elles se contentent du programme lectoral, ou plan demandat, et de diverses tudes, parpilles. Ces documents ne sont la plupart du temps que

    des projets dintention qui ne comportent pas de relle stratgie de dveloppement.

    Ds la fin des annes 70, des auteurs, comme Jean Bouinot prconisaient la miseen place de dmarches stratgiques au sein des collectivits locales, en sappuyant surune connaissance des besoins de la population, des objectifs et des moyens. Bouinotproposait une transposition des pratiques de lentreprise au secteur public local. Il insistaitsur limportance dtablir un bilan des forces et faiblesses de la commune en terme decapacits internes de lorganisation municipale et de capacits externes de son contexte

    urbain 20.

    La stratgie de territoire comporte une dimension horizontale dans la mesure o ellene peut pas saffranchir des stratgies des territoires environnants et des collectivits avec

    lesquelles elle partage son territoire (la rglementation insiste de plus en plus sur cetteinterdpendance des territoires (les schmas de cohrence territoriales sont par exemplelabors au niveau intercommunal, les schmas rgionaux peuvent concerner toutes lescollectivits dune mme rgion).

    Comme pour lentreprise, la dmarche suivie par une collectivit sera dabord dechercher connatre lexistant interne et externe, pour ensuite dfinir les grandesorientations.

    Pour dterminer les grandes orientations sur le moyen ou long terme, ainsi que lesressources qui permettront datteindre ces objectifs, une collectivit doit tre consciente deses atouts et de ses handicaps (forces et faiblesses), elle doit prendre position au regarddes contraintes et occasions que prsente son environnement (opportunits et menaces).

    Les forces et faiblesses sapprcient linstant t . Lanalyse porte non seulementsur les caractristiques propres la collectivit (ressources humaines, financires ettechniques), mais aussi sur le positionnement de la collectivit vis--vis de ses partenaireset concurrents (comptences concurrentes, politique contractuelle), et sur la performancedes politiques menes jusque l. Les interrogations portent alors sur :

    les bnficiaires des services, quils soient directs (usagers) ou indirects (partenairesou autres services internes),

    20 Jean Bouinot, La nouvelle gestion municipale, comptabilit et management dune commune, dition Cujas 1977, page 91,cit par Eric Portal, La planification stratgique dans les collectivits territoriales franaises, LGDJ, 2002, 345 pages

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    les acteurs en prsence (lus, autres collectivits, autres entits intervenantavec la collectivit, acteurs potentiels), les convergences et divergences de leursinterventions respectives,

    la collectivit elle-mme : domaines de comptences, pertinence, efficacit,

    efficience, qualit des services, impact des actions engages, comptences etexpertises internes, moyens et marges de manuvre.

    Lanalyse interne doit permettre de connatre avec exactitude les domaines dactivits de lacollectivit, les moyens ncessaires pour assumer les cots, et les marges de manuvredont elle dispose (mtiers, ressources, partenaires).

    Elle doit apporte des rponses aux questions suivantes :

    Quelles prestations sont offertes ? Qui sont les bnficiaires ? Quel en est le cot ? Quelles ressources (humaines, financires, techniques) sont mises en uvre ?

    Existe-t-il des ressources non mobilises ? Les bnficiaires sont-ils satisfaits ? Si non, pourquoi ? (dfaut de quantit, de

    qualit, defficacit, defficience ?) Loffre est-elle pertinente compte tenu des prestations extrieures ? Quels besoins ne sont pas satisfaits ? Pourquoi ?

    Ces questions supposent lexistence doutils dvaluation des cots des activits, desdiffrents mtiers exercs au sein de la collectivit, de diagnostic organisationnel, ouencore danalyse marketing. Certains auteurs proposent des approches par fonction : offre,production, demande, en prenant videmment en compte la rationalit non marchande qui

    caractrise le secteur public21.

    Les opportunits et menaces sapprcient via une prospective de lenvironnement.Lanalyse porte sur :

    les volutions lgislatives et rglementaires, tant au niveau national queuropen, tantsur le droit positif que sur les aspects institutionnels.

    Les volutions technologiques : quels nouveaux services, quelles nouvellesfonctionnalits ? Quels outils de communication, quelles volutions sur ledveloppement des rseaux ?

    les volutions politiques : chances lectorales, volution de lopinion, sujetsdactualit,

    les volutions dmographiques : volution et composition de la population (solde

    migratoire, volutions par tranches dges, par catgories socioprofessionnelles)

    22

    , les volutions conomiques, au niveau national et local : analyses par secteursdactivits ou filires, pressions concurrentielles, mergences de nouveauxmarchs

    Lanalyse des opportunits et des menaces ncessite le recours des techniquesprospectives. La prospective est plus quune simple veille sur ces volutions. Elle dbouchesur la formulation dhypothses, qui vont mettre en vidence des futurs possibles. Ellepropose diffrentes visions pour lavenir, souvent sur du trs long terme (10, 20 ou 30 ans),dpassant ainsi lhorizon temporel de la stratgie.

    21 Notamment larticle de Bernard Dafflon, Comment organiser la performance des politiques publiques : prsentation dun conceptnouveau, Politique et management public vol.17 n2, juin 1999, page 106

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    Elle ne se contente pas de prvoir. Certes, il sagit danticiper les volutions futures enformulant des hypothses, des scnarii. Mais la prospective tend galement sinterrogersur la natures des actions mener dans chacun des cas.

    La prospective est donc la phase o lon commence identifier les buts stratgiques,lavenir souhait par la collectivit. Elle est intgre dans une approche systmique,elle consiste en une dmarche quasi-heuristique (de dcouverte) didentification des

    vnements qui pseront sur lavenir et des scnarios possibles qui en dcouleront. 23

    Elle permet dlaborer des scnarii qui sont des extrapolations de tendances. Seront ainsidtects les scnarios refuss, et celui voulu.

    Beaucoup de collectivits ne sengagent pas dans des dmarches stratgiques trsformalises, avec une mthodologie adapte. Certaines le font, mais volontairement, ellesnexpriment pas leur stratgie de manire claire et prcise. Ceci sexplique par le fait quelapproche stratgique prsente des limites.

    Ne pas afficher de stratgie prsente lavantage de ne dplaire personne. Pardfinition, une stratgie ncessite des choix, des arbitrages, qui ne peuvent satisfaire tousles acteurs.

    Ne pas dvoiler sa stratgie permet galement de ne pas tre jug sur les ventuelschecs par rapport aux objectifs qui ont t fixs.

    Les orientations stratgiques ne doivent tre ni trop prcises, ni trop vagues, de sorte conserver des marges de manuvres face aux volutions imprvues.

    Une stratgie engage les ressources de la collectivit dans une certaine direction, etdtermine les modes de fonctionnement et dorganisation. Il est souvent difficile de changercompltement de cap en modifiant les directions choisies.

    Ainsi, une stratgie trop dtaille risque de devenir un handicap pour laction locale.Elle peut se prsenter comme un cadre rigide qui ignore les volutions de lenvironnement.Cest notamment ce que souligne H. Mintzberg quand il explique quune stratgie peutnuire lorganisation en touffant les initiatives originales, en occultant la complexit et lesincertitudes de lenvironnement, en se prsentant comme une rsistance au changement.

    Une stratgie trop pointilleuse ne permet pas une organisation daffronter limprvu.

    A linverse, une stratgie trop creuse risque de ne pas tre la hauteur des enjeux.Des objectifs insuffisamment dfinis, des ressources non orientes ne permettent pas dedonner du sens laction. La stratgie ne mobilisera pas.

    Les enqutes menes sur la gestion locale nous montrent que les collectivits qui

    optent pour une dmarche stratgique anticipe sont rares24. La plupart prfrent les suitesde petites dcisions qui au fil du temps finissent par former une stratgie densemble,lorganisation sadaptant progressivement. Nombreuses sont galement les collectivits quine ragissent que dans lurgence, sous les contraintes dun environnement non analys.Globalement, les collectivits adoptent des dmarches par ttonnements successifs. Lesapproches sont donc souvent heuristiques, avec le mrite de laisser de la place limagination et dviter la routine.

    23 Eric Portal, ibid. p.7924 Constat de Bruno Carlier et Christophe Ruprich-Robert, in Guide du contrle de gestion dans les collectivits locales, dition

    Berger-Levrault, 379p. Rfrence p.31. et Eric Portal, ibid

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    On peut cependant souligner que le lgislateur a entendu inciter les rgions sorienter dans des dmarches stratgiques, dans la logique du prolongement de la

    planification nationale25. Les communes sont galement invites adopter de tellesapproches pour la gestion de lespace (via les documents durbanisme imposs : schmas

    directeurs, Plan Locaux dUrbanisme26). Les chartes intercommunales de dveloppementet damnagement (CIDA) et les chartes des pays relvent galement de dmarches

    stratgiques27. Nanmoins, les exigences de planification lgales ne se traduisent pasforcment par de vritables approches stratgiques telles que celles que nous avonsdcrites.

    Un des premiers grands projets issus dune relle analyse stratgique fut le projetde la communaut urbaine de Lyon (Lyon 2010). Il sest traduit par une arborescencede documents de planification en tant porteur dune ambition collective pour le futur. Ilretraait non seulement les engagements politiques, mais dterminait aussi les outils deprogrammation qui ont permis de mettre en uvre les politiques publiques.

    Pour trouver une application, la stratgie doit tre dcoupe en catgories de politiques,dactions, de programmes Ce dcoupage est ordinairement appel segmentation.

    Chapitre 2 : Des approches varies de segmentation

    La segmentation consiste oprer des regroupements dactivits qui peuvent gnrer entreelles des synergies. Elle vise viter la dispersion des ressources dans des domainestrop disparates. Elle assure une cohrence au sein de chaque domaine dactivit, et unemeilleure lisibilit pour chaque march. Il sagit de mieux grer la diversit du groupe.

    Chaque segment peut alors faire lobjet dune stratgie qui lui est propre, qui dcline

    en partie la stratgie globale de lorganisation. A cet gard, de nombreux thoriciens28

    ont dvelopp le concept de matrices de portefeuille, en proposant des mthodespour positionner des ensembles dactivits selon des critres communs, ceux-ci tantessentiellement des critres de croissance de la demande et de cots de production, tournsvers le souci de rentabilit. Ces outils permettent de dcider de la priorit des activits poursuivre ou crer, et dceler les activits quil est judicieux dabandonner.

    25 Le plan de la rgion dtermine les objectifs moyen terme du dveloppement conomique social et culturel de la rgionpour la priode dapplication du plan de la nation. (art.14 Loi n82-653 du 29 juillet 1982 portant rforme de la planification, art.

    L.4251-1 du CGCT). Le comit interministriel damnagement et de comptitivit du territoire a substitu le 6 mars 2006 les contrats

    de projets aux contrats de plan Etat-rgions. Ces contrats de projets ont notamment pour but de dvelopper linvestissement. Les

    rgions laborent galement des schmas rgionaux damnagement et de dveloppement du territoire (loi du 4 fvrier 1995 modifie

    par la loi du 25 juin 1999).26 Lart. L122-1 du code de lurbanisme par exemple demande aux communes dtablir le schma directeur qui fixe les

    orientations fondamentales de lamnagement des territoires intresss .27 La loi n83-8 du 7 janvier 1983 prvoit que Les communes peuvent laborer et approuver des chartes intercommunales

    de dveloppement et damnagement qui dfinissent les perspectives moyen terme de leur dveloppement conomique, social

    et culturel, dterminent les programmes dactions correspondants, prcisent les conditions dorganisation et de fonctionnement des

    quipements et des services publics. 28 Les thories sur les matrices de portefeuille se sont dveloppes partir du Boston Consulting Group (BCG) dans les

    annes 60, des analyses de Mc Kinsey, ou encore dArthur D.Little.

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    Le Boston Consulting Group et Arthur D.Little ont contribu lintgration de lasegmentation stratgique dans le secteur public.

    Pourquoi chercher intgrer dans le secteur public des techniques de segmentationdont lobjectif premier est de dtecter les activits insuffisamment rentables ?

    Les domaines dintervention des collectivits ne sont plus uniquement ceux fixspar la loi. Lutilisation de la clause gnrale de comptences a permis aux collectivitsde dvelopper de nombreuses activits facultatives. Les actions des collectivits sedispersent dans de trs nombreux domaines diffrents. Il est alors ncessaire doprerdes regroupements pour assurer la cohrence et la lisibilit des actions. Le dcoupage vapermettre doptimiser lallocation des ressources entre des actions qui peuvent voluer ensynergie. Il permettra dapprcier le cot global de ces activits et danalyser leurs impacts.

    La difficult rside dans le niveau de division choisi pour analyser les activits. Lasegmentation stratgique doit tre pertinente et sappuyer sur des units homognes. Ledanger est de diviser les activits trop finement, ce qui empche de mettre en vidence les

    liens entre actions et les synergies possibles.A linverse, une segmentation trop large des activits ne permet pas danalyse adquate

    pour lallocation des ressources.

    Il nexiste pas de segmentation type. Tout dpend de la catgorie de collectivit, de sataille, de limportance et de la nature des besoins satisfaire, du contexte dmographique,sociologique, conomique, historique, et des orientations politiques propres chaqueorganisation. Cest chaque collectivit de trouver le dcoupage optimal. La segmentationsopre par politiques publiques. Il arrive de plus en plus quelle soit intgre sous formebudgtaire.

    I. La segmentation en politiques publiques

    1) Les diffrents niveaux de dcoupage

    La segmentation stratgique repose souvent sur le dcoupage en politiques publiques.Cela semble logique dans la mesure o une politique consiste en un ensemble cohrent etorganis de prestations publiques articules autour dun objectif stratgique. Une politiquepermet de structurer des actions menes.

    Des politiques diffrentes peuvent tre axes sur les mmes cibles, sur le mme typedoffre de service, ou tre dtermines par des facteurs cls de succs identiques. Bienquautonomes, des politiques peuvent voluer en synergie.

    La segmentation en politiques publiques permettra de dterminer les actions surlesquelles la collectivit doit ou souhaite investir, et celles sur lesquelles elle dsire sedsengager totalement ou partiellement. Elle assure une meilleure visibilit en claircissantles diffrents domaines dinterventions, et en permettant une allocation et un suivi desressources par grandes masses dactions.

    Les regroupements seffectuent par activits qui relvent de la mme demande sociale,de la mme technologie, du mme type de ressources ncessaires Ils sont souventdtermins par les comptences obligatoires, mais galement par la volont politique deslus et le pass de la collectivit.

    A lintrieur de chaque politique publique est galement opre une segmentation. Ilsagit daffiner le dcoupage de chaque politique en actions pour rpondre au mieux aux

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    besoins. A chaque action correspond une analyse prcise des cibles. Toutes les prestationsfournies sont ainsi connues. Les ressources sont alloues de manire plus prcise. Lesrsultats sont analyss de manire plus pertinente.

    Chaque politique publique dispose donc de ses propres segments dactivits, lesquelsregroupent des ensembles de prestations. Activits et prestations constituent les marges demanuvre des politiques publiques. Elles sont les outils de mise en uvre de la stratgiedfinie pour le segment. Cette dclinaison permet de se rapprocher des cibles avec de plusen plus de prcision.

    Le schma suivant synthtise les diffrents niveaux de segmentation stratgiqueenvisageables pour une collectivit territoriale

    A consulter sur place au Centre de Documentation Contemporaine de l'Institutd'Etudes Politiques de Lyon

    La finalit de ce travail de segmentation stratgique est de pouvoir dfinir de manireprcise les primtres et le niveau de qualit des services publics.

    La segmentation permet de bien connatre les diffrents leviers dactions de chaqueniveau stratgique, tant du point de vue de la demande que de loffre. Elle claire surles besoins existants et sur la capacit de la collectivit y rpondre. Elle assure unetransparence sur lallocation des moyens.

    La dmarche sassimile souvent de relles approches marketing.Quand elle engageune dmarche de marketing, une entreprise cherche tudier le march et sy adapter(par une stratgie de segmentation, de positionnement, de ciblage) en dfinissant desmoyens daction sur ce march (par des politiques de produits, de prix, de distribution,de communication). Quand une collectivit tudie loffre et de la demande de servicespublics, les faons de se positionner, et quand elle recherche faire merger des synergiesen regroupant ses activits, elle ne fait rien dautre que du marketing, mais du marketing

    public territorial29.

    La segmentation stratgique est le pralable au dveloppement dune culture dersultat, dans la mesure o elle vise dterminer les objectifs diffrents niveaux, et allouer des ressources qui nont dautre but que datteindre les objectifs fixs.

    Mais pour assurer latteinte des objectifs dans les conditions de ressources dfinies,il faut pouvoir mesurer lefficacit et lefficience des actions. La collectivit doit se donnerla capacit de mettre en uvre des actions correctrices en cas dcarts de conduite. Pourcela, cest tout un systme de pilotage quil faut mettre en uvre.

    2) Le processus de segmentation

    a)la prise en compte de lexistant interne

    Llaboration de la segmentation stratgique peut soprer selon deux mthodes, souventcomplmentaires.

    29 Lapproche marketing est apparue dans le secteur non marchand avec les partis politiques et les organisations sociales,philanthropiques et caritatives (UNICEF, Croix-Rouge) avant de toucher lEtat dans les annes 70 (campagnes pour lconomie

    dnergie, contrelalcoolisme, pour la scurit routire). Elle sedveloppe avecles thses dauteurs comme Kotler, et atteint le secteur

    public local dans les annes 90, notamment suite aux impulsions du courant de la nouvelle gestion publique avec des auteurs comme

    Osborne ou Gaebler.

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    La dmarche top down consiste en une refonte de la stratgie suite unenouvelle rflexion sur les enjeux du projet de territoire. Elle intervient par exemple lors dunchangement de majorit politique, laquelle impose de nouvelles priorits. Elle peut intervenirsuite une raction face une volution du contexte externe de la collectivit (nouveaux

    transferts de comptences, inflexion de la croissancepeuvent conduire redfinir unestratgie et mettre plat les politiques publiques). Ce type de dmarche part de la hirarchie,et repose sur la conception de la stratgie prsente lesprit des dirigeants.

    La dmarche bottom up consiste en une formulation de la segmentation stratgique partir des actions existantes. Elle peut intervenir en rponse une volution interne :difficults financires, nouvelles mthodes de management. Cette dernire cause est la plusfrquente pour expliquer les formulations stratgiques des collectivits.

    Les deux mthodes sont souvent panaches. Quelque soit la dmarche choisie,llaboration de la segmentation stratgique doit sinscrire dans un processus prdtermin,claire, transparent. Elle doit se faire en prenant en considration lensemble desacteurs internes de la collectivit : lus, cadres dirigeants, cadres intermdiaires, agentsdexcution. Toute organisation se caractrise par des jeux dacteurs , qui sont lamanifestation de la divergence des visions et intrts des diffrents groupes dacteurs30.Il est alors impratif que lensemble des acteurs puisse accepter la stratgie, puisse selapproprier, car tous les acteurs sont appels mettre en uvre la stratgie.

    Pour lgitimer la stratgie et ses modes de dclinaison aux yeux de tous, il fautfixer les rgles du jeu de son laboration et de sa mise en pratique. La dmarche nedoit pas apparatre comme tant technocratique. Deux dimensions sont prendre enconsidration pour assurer la prennit de la stratgie : le facteur humain, et lorganisation.

    La segmentation stratgique cherche dgager des synergies. Dans sa miseuvre, elle appelle diffrents mtiers voluer en complmentarit. Le recensement

    des comptences existantes et des comptences ncessaires dtermine la politique deressources humaines, et les choix dexternalisation de certaines fonctions.

    La segmentation suppose des rflexions sur lorganisation des services. On comprendalors qu chaque type de stratgie correspond une organisation optimale. Le typedorganisation choisi dpendra galement de la rpartition souhaite des responsabilits.

    Comment gagner la confiance des acteurs, comment obtenir leur mobilisation,comment susciter leur motivation pour uvrer au projet de territoire ? Comment organiserla collectivit de sorte atteindre les objectifs stratgiques avec les moyens allous ?Comment la structure globale de la collectivit peut-elle assurer lefficacit des services ?Telles sont les questions auxquelles renvoient toutes dmarches stratgiques.

    Lacceptation de la stratgie suppose que sa dclinaison soit tablie dans un espritparticipatif. La dmarche bottom up permet de placer les agents au cur du processusstratgique. Il ncessite lcoute, lattention, la considration des personnels par lesdcideurs. Lacceptation dune stratgie suppose des efforts de partage, de dialogue, dengociation. Elle suppose des approches pdagogiques de la part des dcideurs.

    En posant la question de ladhsion des acteurs et de lorganisation interne, lastratgie se prsente comme une relle dmarche de management. Lefficacit des actions,loptimisation de lallocation des ressources conduisent souvent au dveloppement duneculture de gestion, qui sappuie sur la responsabilisation des acteurs. La mise en uvre

    30 Le concept de jeux dacteurs est un des apports des thoriciens de lanalyse stratgique, notamment analys par MichelCrozier et Erhard Friedberg dans Lacteur et le systme , dition du Seuil 1981

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    de la stratgie passe de plus en plus par destechniques de contractualisation entre lesdcideurs et les units organisationnelles, par la cration de groupes de travail, ou encorepar des dmarches processus bases sur la transversalit.

    Pour exemple, la nouvelle majorit politique du Grand Lyon a labor une stratgiedagglomration (Grand Lyon 2020), qui a dbouch sur une rorganisation des services

    en centres de responsabilits qui fonctionnent sur des mthodes de contractualisation :en change de leur engagement atteindre des objectifs, les centres se voient affecter

    un certain niveau de ressources. Lensemble du systme de pilotage a t modernis,avec le dveloppement dune fonction de contrle de gestion transversale (via la dmarche

    nommes Chrysalis).

    Lenjeu de lorganisation interne est de donner les moyens la collectivit dtre ractivepour mettre en uvre les politiques publiques de manire performante. La recherche delgitimit de la segmentation stratgique peut aussi faire appel au citoyen.

    b) la prise en compte du citoyen

    Pour lgitimer le projet de territoire, la population est de plus en plus implique dans les

    processus de dcisions31. Les modalits dintervention des citoyens sont assez larges32, etrpondent la fois aux besoins des lus de renforcer la lgitimit de leurs choix, et auxsouhaits des populations dtre considres comme des acteurs actifs de la dmocratielocale soucieux dtre informs et de pouvoir participer la gestion de leur territoire. Lalgitimit naturelle des lus locaux qui leur est confre par llection ne suffit pas. Commenous lavons vu, des volutions conjoncturelles et les analyses stratgiques interviennentaprs llection. Les choix du projet de territoire ne figurent pas, ou alors insuffisammentdans les programmes politiques. Les dcideurs doivent cependant tre conscients deslimites de certains de ces procds dans leur pertinence pour dresser la stratgie territoriale.

    Ces modes de participation de la population permettent aux lus de saisir les attentesdes citoyens du territoire. Mais les lus ne doivent pas toujours se limiter aux expressionsexplicites des besoins. Comme le soulignait dj un rapport interministriel des annes 70,ces expressions, en apparence prcises des besoins nindiquent le plus souvent quunebonne connaissance des mcanismes et normes administratives () et ne rvlent pasncessairement la totalit des vrais besoins () Elles sont le fait de catgories sociales bien

    informes et ayant accs aux institutions.33La participation aux dmarches de dmocratie

    participative suppose des citoyens un certain niveau de capital culturel et intellectuel, quiexclut de fait la majeure partie des populations socialement fragilises. Les lus doivent entre conscients et doivent chercher multiplier les moyens de dceler toutes les formes dedemande sociale du territoire.

    II. La segmentation stratgique par le budget31 Cf. David Huron et Jacques Spindler sur la lgitimit du management public local, dans Le management public local , LDGJ,1998, pages 7 19.32 Limplication des citoyens dans le processus de dcision se fait par voie dinformations (informations imposes par la loi,communication publique, avec des messages du type ici, votre commune investit pour vous visant tant informer le contribuable

    de lemploi des derniers publics, qu vendre le territoire.). Limplication du citoyen se fait galement par une participation indirecte (via

    les sondages dopinion ou les rfrendums locaux) ou directe (participation aux assembles, formes de dmocratie participative).33 Michel Cotten, Les quipements publics de quartier, tude RCB sur les services collectifs de voisinage en milieu urbain,

    tude prioritaire interministrielle, La documentation franaise, 1978, 149 pages, citation page 57.

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    La dmultiplication de la stratgie en politiques publiques conduit de plus en plus souvent baser la segmentation sur le budget. On pourrait tout fait penser que les nomenclaturesfonctionnelles prvues par les instructions budgtaires et comptables puissent constituerle socle mme de la segmentation stratgique. Mais la structure fonctionnelle prsente de

    nombreux inconvnients. Elle ne laisse pas suffisamment de libert aux collectivits dans laventilation de leurs actions. Elle se prsente comme un cadre rigide, identique pour toutesles collectivits relevant dune mme catgorie, et donc, qui ne prend pas en considrationles caractristiques propres chaque collectivit.

    Ce sont les contraintes financires qui ont pouss les collectivits moderniser leurgestion via la structure de leur budget. Les refontes budgtaires inities vers le dbutdes annes 2000 se prsentent travers des structures en programmes et oprations,o les programmes correspondent aux grandes missions de service public, dclines enoprations, c'est--dire en actions menes par la collectivit. La loi organique sur les lois

    de finances du 1eraot 2001 (LOLF) 34 applique la mme logique au budget de lEtat. Elle

    tend simposer comme une vritable modle de modernisation budgtaire.Le nouveau cadre budgtaire de lEtat, vise en effet :

    1. amliorer la visibilit de laction publique

    2. responsabiliser les gestionnaires (les ministres) dans la conduite des politiquespubliques dont ils ont la charge

    3. clarifier les objectifs et les rsultats (et donc les priorits politiques)

    4. introduire un pilotage stratgique (indicateurs de suivis vots lors de llaboration desobjectifs et du choix des moyens allous)

    Les collectivits nont pas attendu la LOLF pour sengager dans des dmarches de

    modernisation de leurs outils financiers. Mais la LOLF a le mrite dinciter les collectivitsqui ne staient pas encore engages dans de telles dmarches faire de mme. Elle invitelensemble des collectivits formuler leur stratgie en termes de missions, programmeset actions.

    Larticle 7 de la LOLF et un guide mthodologique labor par plusieurs services de

    lEtat dfinissent les notions de la nouvelle architecture budgtaire35.

    - Une mission est selon la LOLF un ensemble de programmes concourant unepolitique publique dfinie . Le guide mthodologique expliquequunemission peut treinterministrielle. Elle constitue lunit de vote des crdits ().

    Au niveau dune collectivit territoriale, une mission peut correspondre des grandsdomaines de comptences. En principe, le niveau correspondant la mission rpond

    une problmatique ou un enjeu de dveloppement du territoire. Serge Huteau36 souligneque la mission dpasse souvent la seule segmentation au regard des comptences dela collectivit et permet de donner une lisibilit de son action au regard de caractristiques

    34 Loi organique n2001-692 du 1eraot 2001, loi organique relative aux lois de finances, JO du 2 aot 200135 Le Ministre dEtat, Ministre de lconomie, des finances et de lindustrie, le secrtaire dEtat au budget et la rforme

    budgtaire, la commission des finances de lAssemble nationale, la commissions des finances du Snat, le Cour des comptes,

    le Comit interministriel daudit des programmes, La dmarche de performance : stratgie, objectifs, indicateurs. Guide

    mthodologique pour lapplication de la loi organique relative aux lois de finances du 1er aot 2001 , juin 2004, dfinitions pages

    46 5036 Serge HUTEAU, Le management public tome 2, citation page 74

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    propres du territoire et de son volution. Il conseille de crer des missions indpendantesles unes des autres, pour sassurer de la bonne structure des politiques publiques.

    - Aux termes de lart.7 de la LOLF, un programme regroupedes crdits destins mettre en uvre une action ou un ensemble cohrent dactions relevant dun mmeministre et auquel sont associs des objectifs prcis, dfinis en fonction de finalits

    dintrt gnral, ainsi que des rsultats attendus et faisant lobjet dune valuation. Le guide mthodologique ajoutequunprogramme constitue le cadre de gestionoprationnelle des politiques de lEtat. Le responsable de programme a la facult dutiliserlibrement les crdits au sein de lenveloppe de programme fixe par le Parlement, sous

    rserve de ne pas dpasser le montant prvu pour les dpenses de personnel et le plafondministriel des autorisations demploi. La notion de programme, telle que dfinie par la loiorganique, est le niveau de laction publique o se dfinissent les stratgies.

    Pour une collectivit, chaque programme correspond une stratgie. La structurationdes programmes oblige donc sinterroger et prioriser lensemble des stratgies.

    Le programme relve dune responsabilit politique. Toutes les actions dun programmedoivent tre places sous la responsabilit dun mme lu. Serge Huteau insiste pour queles actions dun programme soient confies un mme service ou une mme direction.Cela sous-entend que lorganisation de ladministration soit cale sur la rpartition desresponsabilits des lus.

    - Enfin, la LOLF dfinit laction comme, la composante dun programme. Une actionpeut rassembler des crdits visant un public particulier dusagers ou de bnficiaires, ou un

    mode particulier dintervention de ladministration.

    Le guide prcise : au sein dun programme, la rpartition des crdits entre les actionsest indicative. Elle fait lobjet dune restitution prcise, en excution budgtaire .

    Comme pour lEtat, laction dune collectivit regroupe un ensemble dactivits,doprations ou de prestations homognes ou destines un usager ou service spcifique.

    On retrouve l toute la logique de la segmentation stratgique, qui doit sappuyersur les spcificits de chaque collectivit. Un rcent rapport au gouvernement sur la

    mise en uvre de la LOLF37 appelle lEtat favoriser lextension des principes de laLOLF aux collectivits territoriales , en dsapprouvant lide de ladoption dune LOLFlocale , comme cadre commun lensemble des collectivits. Parmi ses nombreusesrecommandations, ce rapport invite lEtat :

    Pour exemple, larrive dune nouvelle majorit politique la ville de Lyon en 2001a conduit llaboration dune nouvelle stratgie. Celle-ci a t dcline en politiquespubliques et structure en dans le cadre dune nouvelle architecture budgtaire dite plan

    des engagements financiers (PEF) qui consiste en un dcoupage en programmes etoprations. Pour pouvoir tre mis en uvre, le PEF a ncessit linstauration de nouveauxmodes de management, bass notamment sur les processus et la transversalit.

    En dfinissant les actions mener par politique publique, selon les analyses effectuessur les diffrentes cibles que sont les administrs, des dcisions dinvestissement sedgagent, et se prcisent. Avant de faire lobjet danalyses plus dtailles, ces les lusdoivent connatre la capacit financire de la collectivit investir. Cest l le rle de lanalysefinancire.

    37 Alain LAMBERT et Didier MIGAUD, La mise en uvre de la loi organique sur les lois de finances. A lpreuve de lapratique, insuffler une nouvelle dynamique la rforme , rapport au Gouvernement, octobre 2006, pages 53 55, synthse des

    recommandations page 65.

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    Chapitre 3 : La stratgie financire, pierre angulaire dela russite des investissements

    Lanalyse des grands quilibres financiers peut tre partie prenante la stratgie gnrale.Elle vise anticiper lvolution des ressources et des dpenses futures de la collectivit. Elleconsiste rechercher les moyens financiers de pour mettre en uvre les choix politiquessur le moyen terme, et alerter les dcideurs sur la possibilit dassumer financirementles choix politiques. Ainsi, elle conditionne les orientations stratgiques tout en contribuant sa mise en uvre.

    Le budget, souvent considr comme le document financier central, se prsente la fois comme un outil de conception des choix stratgiques (en tant un documentprvisionnel qui conditionne les orientations politiques) et comme un instrument deplanification oprationnelle (dans la mesure o il est le document qui autorise les dpenseset prlvements visant mettre en uvre les actions politiques). Le budget est cependant

    soumis au principe traditionnel de lannualit (il est vot chaque anne pour une seuleanne). Parce quelle a lambition daccompagner la stratgie, lanalyse financire dpassele cadre annuel, et porte souvent sur la dure du mandat.

    Lanalyse financire recouvre des domaines assez vastes et peut faire appel desmthodologies diverses. Nous la rattacherons donc au cur de notre sujet qui estlinvestissement. Lobjectif ici sera de dmontrer que lanalyse financire constitue unpassage obligatoire pour sassurer de laptitude de la collectivit assumer financirementles investissements qui simposent et ceux voulus. Une collectivit apte assumerfinancirement ses investissements est dote dune capacit dinvestissement suffisante. On parle aussi de faisabilit des investissements.

    Lanalyse financire doit permettre darbitrer entre les diffrentes sources de

    financement des investissements.

    Aprs un bref rappel des rgles budgtaires et comptables fondamentales qui rgissentlinvestissement, il conviendra de synthtiser les mthodes et principaux lments delanalyse financire qui permettent de connatre la capacit dinvestissement future et dagirsur celle-ci. Enfin, quelques pistes de rflexions seront souleves sur larbitrage entre lesdeux principales sources de financement des investissements : lpargne et lemprunt.

    Les rformes qui tendent rapprocher les nomenclatures budgtaires et comptablesdu plan comptable gnral de 1982 (PCG) du secteur marchand, permet aux collectivits desinspirer des outils danalyse utiliss dans lentreprise. Cependant, lanalyse financire descollectivits na pas pour objectif dvaluer la capacit des lments crer de la richesse.

    Elle sert tudier la structure financire de lorganisation et les marges de manuvre pourassurer la ralisation de politiques publiques et de missions dintrt gnral.

    I. Les principes rgissant la section dinvestissement

    Le droit des finances publiques locales impose un cadre juridique prcis pour grerbudgtairement linvestissement : celui-ci est retrac dans une section spcifique du budgetsoumise notamment au principe dquilibre rel.

    1) Structure de la section

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    Linvestissement est gr dans le budget de toute collectivit par une section part :la section dinvestissement. Celle-ci distingue les recettes et les dpenses qui lui sont

    propres38, en se divisant en comptes, rpartis en chapitres et articles (comme pour la sectionde fonctionnement). Recettes et dpenses peuvent tre regroupes par grandes masses.

    Les chiffres indiqus sont les montants de 2006 en milliards deuros pour lensemble descollectivits territoriales, issus de la DGCL :

    Les recettes dinvestissement :

    - recettes fiscales qui sont spcifiquement rattaches la sectiondinvestissement (comme la taxe locale dquipement) - recettes non fiscalesmanant de dotations, de fonds de concours, du fonds de compensation de laTVA (FCTVA), dalinations de patrimoine, - autofinancement (virement dela section de fonctionnement sur la section investissement) ou pargne brute -emprunt

    4,2 11,629,2 14,3

    Les dpenses dinvestissement :

    - dpenses directes (travaux, acquisitions) - dpenses indirectes (subventionsdquipement des tiers -remboursement en annuit du capital de la dette

    33,0 10,6 10,9

    2) Lobligation dquilibre rel

    La section dinvestissement doit tre quilibre indpendamment de la section defonctionnement. Cela signifie que lensemble des recettes dinvestissement doit couvrir

    lensemble des dpenses dinvestissement39. Apparue avec la loi du 2 mars 1982 cette rgleest codifie lart. L.1612-4 du CGCT. Auparavant, seul un quilibre global du budget tait

    exig, sans distinction entre les sections de fonctionnement et dinvestissement. (Il taitalors possible demprunter pour financer les dpenses de fonctionnement).

    Lart. .L.1612-4 du CGCT ajoute que lquilibre de tout le budget doit tre rel. Ceciveut dire que :

    le remboursement en capital de la dette des annuits demprunt doit tre couvert pardes ressources propres dinvestissement (il doit sagir de ressources dfinitives, c'est--dire non affectes et acquises).

    lquilibre est rel lorsque les recettes et les dpenses ont t values de maniresincre (sans intention de sur-valuer des recettes ou sous-valuer des dpenses).

    Des exceptions existent pour rendre le principe applicable. Lquilibre de la section

    dinvestissement nest la plupart du temps assur quau moyen dun transfert provenant dela section de fonctionnement. Celui-ci nest pas obligatoire, mais fortement recommand. Cetransfert mane de lexcdent des recettes relles de fonctionnement sur les dpenses de

    fonctionnement hors remboursement des intrts des emprunts40. Cet excdent constituelpargne brute, ou autofinancement brut.

    38 Larticle 2311-1 du CGCT impose que le budget soit tabli en section de fonctionnement et section dinvestissement, tant enrecettes quen dpenses .39 On retrouve l le principe duniversalit qui sapplique lensemble du budget40 Il sagit de sassurer que le solde de la section de fonctionnement permette bien de financer les intrts des emprunts, avant departiciper au financement de linvestissement.

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    A consulter sur place au Centre de Documentation Contemporaine de l'Institut d'EtudesPolitiques de Lyon

    Dautres exceptions, plus accessoires, viennent temprer lobligation selonlaquelle lensemble des recettes dinvestissement finance lensemble des dpenses

    dinvestissement. Cest notamment le cas de lart. L.1612-6 du CGCT41 qui prvoit quenest pas en dsquilibre un budget () dont la section dinvestissement comporte unexcdent, notamment aprs inscription des dotations aux amortissements et aux provisions

    exiges . Cela signifie que la contrepartie des dotations aux amortissements et auxprovisions qui constitue une ressource de la section dinvestissement, na pas financerobligatoirement de nouveaux investissements.

    Ce bref aperu de la structure du budget local et de sa section dinvestissement permetde rappeler quels sont les agrgats de base qui seront exploites lors de lanalyse financire,pour connatre la capacit de la collectivit investir sur le court et moyen terme.

    La capacit dinvestissement peut certes svaluer par la somme de lexcdent des

    recettes de fonctionnement et des recettes affectes au financement des investissements.Mais le montant dgag ne prjuge en rien de la prennit de cette capacit. Le recours des mthodes et outils danalyse plus approfondies est alors ncessaire.

    II. Le recours lanalyse financir

    La grande varit des mthodes danalyse appellent une synthse des dmarchespossibles et des principaux lments utiliss pour valuer la capacit dinvestissement. Bienentendu, toute analyse financire srieuse sappuie non pas sur les budgets primitifs qui nesont que des prvisions, sur les comptes administratifs, qui traduisent les flux effectivementraliss, ainsi que sur le compte de gestion, parce quil intgre les stocks.

    1) Synthse des mthodes suivies

    Bien que quasiment gnralise, lanalyse financire nest pas utilise par toutes lescollectivits pour connatre avec le plus dexactitude possible leur capacit dinvestissementet les marges dont elles disposent pour ladapter de manire optimale.

    Lanalyse financire suppose dabord de rechercher les impacts prsents et futurs deschoix passs. Il sagit l dune dimension rtrospective. Celle-ci constitue la base de la

    prospective financire42. En mettant des hypothses de scenarii dvolutions des dpenseset recettes compte tenu des lments internes et externes de la collectivit, la prospectivetend clairer sur les mesures permettant dassumer les consquences financires des

    choix politiques. Il sagit de simuler lensemble des risques encourus par les volutionsde lenvironnement (vnements macro-conomiques, dmographiques, volution des tauxdintrt) et des choix politiques internes passs et prsents. Lanalyse prospective nestpas gnralise dans le secteur public local. De trs nombreuses collectivits se contententde simples prvisions en sappuyant sur des extrapolations des tendances passes.

    La vision pluriannuelle de lanalyse financire nest pas relaye par le droit positif. Ilpeut sembler regrettable quaucune rgle nimpose aux collectivits de simuler les grandsquilibres sur plusieurs annes et de sengager les respecter. En effet, lanalyse financire

    41 Issu des lois du 5 mai 1988 et du 22 juin 1994 pour pallier la contradiction des principes contradictoires de lquilibrebudgtaires, qui conduisait les lus tolrer des insincrits pour que lensemble des recettes couvre bien lensemble des dpenses.

    42 Le concept de prospective a t dfini dans le chapitre premier.

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    pluriannuelle constitue loutil qui prvoit et propose des volutions pour mettre en uvre leschoix politiques. Elle claircit sur la capacit de la collectivit assumer les investissementsvoulus et les investissements obligatoires. Elle recherche des marges de manuvre pouratteindre la capacit dinvestissement ncessaire.

    Concrtement, il sagit danticiper la compatibilit des investissements avec les grandsquilibres financiers long terme, et de proposer des corrections en jouant sur le volumedes investissements, ou sur les lments qui impactent la faisabilit financire desinvestissements.

    Diffrentes mthodes danalyse financire existent. Lanalyse ouverte consiste dterminer les dpenses avant les recettes. Ce nest quune fois le montant desinvestissements valu, que seront recherchs les moyens de les financer. Lanalyseouverte examine les consquences dun certain niveau dinvestissements raliser surles ressources futures. A linverse, lanalyse ferme tend valuer le montantdinvestissement ralisable, compte tenu dun niveau de ressources anticip. Les enqutesmenes sur les mthodologies danalyse financires locales dmontrent que le poidsdes contraintes financires et de la perte dautonomie financire conduit de nombreusescollectivits adopter une dmarche ferme43. Le niveau de ressources pralablementvalu constitue alors un plafond ne pas dpasser. Les dmarches sont nanmoinssouvent combines. Elles permettent toutes dvaluer la capacit dinvestissement.

    Lanalyse financire repose sur diffrentes sries doutils quil nous faut voquer.

    2) Les principaux lments danalyse

    Lanalyse financire se base sur deux types doutils : des soldes de gestion, qui permettentdanalyser les flux financiers de la collectivit, et des ratios danalyse, qui permettentdeffectuer des comparaisons dans le temps et dans lespace (c'est--dire des comparaisons

    avec dautres collectivits aux caractristiques similaires). Certains auteurs diront que lespremiers lments relvent de lanalyse interne, et les seconds de lanalyse externe.

    a) Lanalyse des soldes dpargne

    Ltude des soldes de flux rappelle lanalyse des soldes intermdiaires de gestion (SIG) delentreprise. Contrairement au secteur marchand, ltude des soldes de flux ne vise pas valuer la rentabilit conomique et financire. Il sagira pour la collectivit de se concentreressentiellement sur les diffrents soldes dpargne, lpargne constituant une source definancement des investissements.

    On distingue classiquement 3 niveaux dpargne qui se calculent de la manire

    suivante44

    : pargne de gestion (ou pargne dexploitation) = RRF DRF hors intrt de la dette

    pargne brute = RRF DRF

    pargne nette = RRF DRF dont remboursement du capital de la dette

    En excluant une partie des dpenses de fonctionnement (les intrts de la dette), lpargnede gestion ne permet pas dvaluer la masse dpargne qui pourra tre alloue aufinancement de linvestissement. En revanche, lpargne brute permet de dgager une

    43 Notamment lenqute dEric Portal dans La planification stratgique dans les collectivits territoriales franaises , LDGJ2002, 345 pages, rfrence p.108 123.

    44 RRF = recettes relles de fonctionnement, et DRF = dpenses relles de fonctionnement

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    capacit dinvestissement. Lpargne doit financer prioritairement le remboursement ducapital de la dette. Aussi, une fois le remboursement de dette effectu, il nous faut un soldequi permette de connatre ce quil reste pour financer les investissements directs (commeles dpenses dquipement) et indirects (subventions) hors remboursement de dette. Cest

    lobjectif de lpargne nette.Assurer une capacit dinvestissement optimale conduit alors rechercher une hausse

    ou un maintien du niveau dpargne brute ou nette. Pour cela, il sagit danalyser lvolutiondes dpenses et recettes de fonctionnement, puisque ce sont eux qui dterminent le niveaudpargne. Une progression des dpenses de fonctionnement plus rapide que celle desrecettes conduit automatiquement une baisse de lpargne. Il sagit de leffet ciseaux ,qui amoindrit alors la capacit dinvestissement. Lobservation des lments composant lasection de fonctionnement permet de dtecter quelles sont les marges de manuvre dont

    la collectivit dispose pour entretenir ou augmenter le niveau dpargne45. Depuis 10 ans,les collectivits parviennent accrotre leurs niveaux dpargne.

    Il est de plus en plus courant de voir des collectivits qui mettent en place desdmarches doptimisation de leurs ressources de fonctionnement, quand bien mmeelles ont de moins en moins de prise sur ces ressources. Les produits des impts

    locaux constituent la premire ressource de fonctionnement des collectivits. Ladoption destratgies fiscales visant mieux anticiper les volutions des bases fiscales et optimiserles phnomnes de taux des impts directs et indirects et des taxes, constitue un levierdaction sur les ressources de fonctionnement. Le dveloppement des rflexions sur lestarifications des services constitue aussi un levier daction. Les efforts doptimisation de lagestion du patrimoine permettent daccrotre les ressources du domaine (comme nous leverrons plus loin).

    Les dmarches dconomies sur les dpenses de fonctionnement sont g