Kant - Critique de la raison pure. à A147-B187 (Oeuvres II, Gallimard, 1985)

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  • 7/23/2019 Kant - Critique de la raison pure. A147-B187 (Oeuvres II, Gallimard, 1985)

    1/81

    Logique transrendantale Introdullion

    81

    1

    rendre comme claircissement et non comme

    ~ r e u v e

    de notre thorie ~ t h t i q u e

    {8

    J] COI' .CLUSION

    DE L 'ESTHTIQUE

    TRA IOSCENDA IOTALE

    Nous avons maintenant un des lments re9uis

    pour

    la solution du problme gnral de la phtlo-

    sophie

    transcendantale : Con11nent des propositions

    IJNihtiques

    a priori sont-eUes

    possibles ?

    savoir

    des

    intuitions pures a priori l'espace et le temps; dans

    ces intuitions, lorsque dans un jugement a priori

    nous

    voulons sortir du concept donn, nous trou-

    vons

    ce qui ne peut tre dcouvert

    a priori

    dans

    e concept, mais bien dans J'intuition qui lui cor-

    respond, et peut tre li synthtiquement avec ce

    concept; mais ces jugements, pour cette raison,

    ne

    peuvent dpasser les objets des sens, et ne

    peuvent valoir que pour les objets de l'exprience

    possibles.

    [ JO/B 4} Deuxime partie m 74

    LOGIQ JE TRANSCENDANTALE

    lnlroduflion

    IDE D'UNE LOGIQYE TRANSCENDANTALE

    DE LA

    LOGIQUE EN GNRAL

    Notre connaissance vient de deux sources

    fondamentales de l'esprit, dont la premire

  • 7/23/2019 Kant - Critique de la raison pure. A147-B187 (Oeuvres II, Gallimard, 1985)

    2/81

    Bu

    w,,

    Crii(jlle

    Je

    la

    raion ~ ~ r e

    consifte recevoir les reprsentations (la rcep

    tivit des impressions),

    ct

    dont la seconde eft le

    pouvoir de connatre un objet au moyen de

    es

    reprsentations (la spontanit des concepts);

    par la premire un objet nous eft donn, par

    seconde il eft

    pens

    en rapport avec cette

    r e ~ r s e n -

    tation ( titre de simple termination de 1 esprit)

    Intuition et concepts conftituent donc

    les

    l m e n ~

    de toute notre connaissance, de sorte que ni

    des

    concepts sans intuition qui leur corresponde

    de

    quelque manire, ni une intuition sans concepts

    ne peuvent donner une connaissance. Tous delllt

    sont ou purs ou empiriques : empiriqms, l o r s ~ u u n e

    sensation (qui suppose

    fa

    prsence relle de 1 objet)

    y eft contenue; ~ ~ r s lorsque aucune sensation ne

    se mle la reprsentation.

    On

    peut appeler

    l

    sensation matire de la connaissance sensible. Par

    suite, l intuition {

    7 ]

    pure contient uniquement

    la forme sous laquelle quelque chose eft

    [

    r

    intuitionn, et le concept

    pur

    uniquement

    l

    forme de la pense d un objet en gnral. Seuls

    les intuitions ou les concepts purs sont possibles

    a priori les empiriques ne le sont

    qu a

    pofleriori.

    Si

    la rceptivit de notre esprit, qui consifte

    recevoir des reprsentations en tant qu il

    cft

    affel: de quelque manire, eft appele sensibilit,

    le .Pouvoir de produire soi-mme des reprsen

    tations, ou la lpontanit de la connaissance, cft

    l entendement.

    Notre nature eft telle que l intuition

    ne J?eut jamais tre que sensible, c eft--dire

    contient seulement la manire dont nous sommes

    affel:s

    par des objets.

    En

    revanche, le pouvoir de

    penser l objet de l intuition sensible ft l enten

    dement.

    De

    ces deux proprits, aucune n eft

    prfrable l autre. Sans la sensibilit, nul objet

    ne nous serait donn; sans l entendement, nul

    ne serait pens. Des penses sans contenu sont

    vides ; des intuitions sans concepts sont aveugles.

    Aussi eft-il tout autant ncessaire de rendre

    sensibles ses concepts (c eft--dire de leur joindre

    l objet dans l intuiuon), que de rendre intelligibles

    ses mtuitions (c eft--dire de les soumettre

    des

    concepts

    .

    Ces deux pouvoirs ou capacits

    ne

  • 7/23/2019 Kant - Critique de la raison pure. A147-B187 (Oeuvres II, Gallimard, 1985)

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    Logique lransendantale

    Introdullion

    Br

    3

    sauraient non plus changer leurs fonaions.

    L entendement ne

    peut

    rien intuitionner, ni les

    sens rien penser.

    De

    leur union seule

    peut

    rsulter

    [B 76 ; la connaissance. On ne peut

    pour

    autant

    confondre leurs rles, cependant; mais l y a de

    fortes raisons

    {

    J

    i

    pour

    les sparer

    et

    les di5tin-

    guer soigneusement un

    de

    l autre. Aussi diStin

    guons-nous la science des rgles de la sensibilit

    en gnral,

    ou e ~ t h t i q u e

    de

    la

    science des rgles

    de l entendement en gnral,

    ou

    logique.

    La logique

    son

    tour

    peut

    tre envisage dans

    une double perspeffive,

    comme

    logique

    ou de

    J usage gnral

    ou de

    l usage particulier de l enten

    dement. La premire contient les rgles absolument

    ncessaires

    de

    la pense, sans lesquelles

    l

    n y a

    aucun usage de

    l entendement,

    et

    se rapporte

    par

    consquent celui-ci sans avoir gard la diver

    sit des objets auxquels l peut s appliquer. La

    logique

    de

    l usage J?articulier

    de

    l entendement

    cont1ent les rgles qu1 servent penser exaaement

    sur une certaine espce d objets. On peut appeler

    la

    premire logique lmentaire et la seconde

    organon de telle

    ou

    telle science. Cette dernire

    eSt

    la plupart du temps mise en premier lieu dans

    les

    coles, comme propdeutique des sciences,

    bien que, d aprs la marche

    de

    la raison humaine,

    elle

    soit la dernire tape, que l on atteint seule- 111

    7

    6

    ment lorsque la science

    e t

    depuis longtemps

    acheve et n attend plus que la dernire main

    pour sa mise au point et sa perfeffion.

    Il

    faut en

    effet avoir

    un

    degr assez lev de connaissance

    des objets, si [

    }

    l on veut indiquer les rgles

    d aprs lesquelles

    on

    peut en tablir une science.

    La logique gnrale

    eSt

    ou logique pure ou

    logique applique. Dans la premire, nous faisons

    aMtraaion

    {

    JJ}

    de toutes les conditions empi

    riques sous lesquelles s exerce notre entendement,

    ar

    e x e m ~ > l e de

    l influence des sens,

    du

    jeu

    de

    imaginat1on, des lois

    de

    la mmoire,

    de

    la puis

    sance

    de

    l habitude,

    de

    l inclination, etc.,

    par

    consquent aussi des sources des prjugs, et

    mme en gnral de toutes les causes partir

    desquelles pour nous certaines connaissances

  • 7/23/2019 Kant - Critique de la raison pure. A147-B187 (Oeuvres II, Gallimard, 1985)

    4/81

    BI 4 Crititpe Je la raon p ~ ~ r e

    peuvent driver ou s insinuer subrepticement,

    parce que ces causes ne concernent l entendement

    que dails certaines circonftances de son application

    et que, pour les connaitre, l exprience cl requise

    Une lo ''JII' glnrale mais p re ne s occupe donc ~

    des prmcipes

    a priori;

    elle eft un

    tanon

    Je

    l mt,.

    dement

    et

    de la raison, mais seulement par rapport

    ce

    qu il y a de formel dans leur usage, quel que

    soit d ailleurs le contenu (empirique ou transn

    dantal). Mais une

    logifJIII

    ginrale

    cl dite ensuite

    apJiitJIIie, lorsqu elle v1se les rgles de l usage de

    entendement sous les conditions subjeves

    et

    empiriques que nous enseigne la p s y c h o l o ~ i e .

    Blle

    a amsi des principes empiri9ues, bien qu elle soit

    gnrale en tant qu elle a tra1t l usage de l enten

    dement sans diftinl:ion des objets. Aussi n cft-elle

    ni un canon de l entendement en gnral, ni un

    organon de sciences [B 8] particulires, mais

    seu-

    lement un oatharticon de l entendement coiDn1UQ1.

    Il

    faut donc, dans la logique gnrale, sparer

    entirement la partie qui doit conftituer la thorie

    pure de la raison de celle qui conftitue la lof 'leue

    applique (quoique

    [

    H l

    toujours gn

    ).

    La

    premire seule cl proprement une

    science,

    ~ u 1 q u e courte et aride, et telle que l e x i ~

    exposition scolaftique d une thorie lmentatte

    de l entendement. En elle, les logiciens doivent

    donc toujours garder deux rgles sous les yeux.

    1 Comme logique gnrale, elle fait abftraon

    de tout le contenu de

    la

    connaissance de l entende

    ment

    et

    de la diversit de ses objets,

    et

    elle ne

    s occupe que de la forme de la pense.

    z. Comme logique pure, elle n a point de prin

    cipes e m p i r i ~ u e s ; par consquent, elle ne tire rien

    (comme on s en cl parfois persuad) de la psycho-

    m. 77

    logie, qui n a donc absolument aucune influence

    sur le canon de l entendement. Elle

    cft

    une

    doari

    dmontre, et tout y doit tre pleinement certain

    a priori.

    Qyant

    ce que j appelle la logique

    p p l i ~

    (contrairement la sigiillication commune de ce

    mot, d aprs laquelle elle doit contenir certains

    exercices, pour lesquels la logique pure donne

    l

  • 7/23/2019 Kant - Critique de la raison pure. A147-B187 (Oeuvres II, Gallimard, 1985)

    5/81

    LogitjUe transmulantale Introdu/Jion

    81

    s

    rgle), elle eft une reprsentation de l entendement

    et des rgles de son usage ncessaire in

    concreto

    c dt--dire sous les conditions contingentes du

    sujet, [B 9] qui peuvent entraver ou favoriser

    cet usage et ne sont toutes donnes qu empirique-

    ent. Elle traite de l attention, de ses obftacles et

    de

    ses

    effets, de l origine de l erreur, de l tat de

    doute, de scrupule, de convition, etc.; la logique

    gnrale

    et

    pure se rapporte elle comme la

    orale pure,

    [

    J]

    qui contient seulement

    les

    Jois morales d une volont libre en gnral, se

    rapporte ~ ce q ~ eft proprement dol:rine de la

    vertu, qut examtne ces lots par rapport aux obs-

    tacles

    des sentiments, inchnations et passions

    auxquels les hommes sont plus ou moins soumis,

    et

    qui ne peut jamais donner une science vraie et

    dmontre, parce que, tout comme cette loque

    applique, elle a besoin de principes empirtques

    et psychologiques

    1

    DE

    LA

    LOGIQUE

    TRANSCENDANTALE

    a

    logique gnrale fait abftration, comme

    nous l avons indiqu, de tout contenu de la

    connaissance, c eft--dire de toute relation de

    celle-ci

    l objet,

    et

    elle ne considre que la forme

    logique dans le rapport des connaissances entre

    elles c eft--dire la forme de la pense en gnral.

    Mais

    comme

    l

    y a des intuitions

    }?ures

    aussi bien

    que des intuitions empiriques (atnsi que le fait

    voir l eSthtique transcendantale),

    l

    pourrait bien

    se trouver aussi une diffrence entre la pense pure

    et l

    pense [B

    o]

    empirique des objets. Dans ce

    cas l y aurait une logique dans laquelle on ne

    ferait pas abftration de tout contenu e la connais

    sance; car celle qui contiendrait simplement les

    rgles

    de la pense pure d un objet excfurait toutes

    ces

    connaissances dont le contenu serait empirique.

    Cette

    logique rechercherait aussi l origine de nos

  • 7/23/2019 Kant - Critique de la raison pure. A147-B187 (Oeuvres II, Gallimard, 1985)

    6/81

    8J 6

    Critifjll8

    e la railon pun

    connaissances des objets, [ 6} en tant

    qu'eUe

    ne peut tre attribue aux objets; la logique

    gn6-

    rale,

    au

    contraire,

    n a

    rien faire avec cette

    origine de la connaissance, mais considre les

    reprsentations, qu elles soient primitivement

    en

    w.

    7

    a

    nous

    a

    priori

    ou

    lu elles soient seulement donnl ea

    empiriquement, sunplement selon les lois

    d a p r ~

    lesquelles l entendement les emploie en rapport

    les unes avec les autres, quand

    l

    pense; elle traite

    donc seulement de la forme intelligible qui peut

    tre procure aux reprsentations, quelle que

    puisse tre d ailleurs leur origine

    1

    Et ici je fais une remarque qui a son importance

    pour

    toutes les considrations suivantes, et qu il

    faut bien avoir devant les yeux : toute connai ..

    sance

    a priori

    ne doit pas tre nomme transcen-

    dantale (ce qui a trait l possibilit de la connais-

    sance

    ou

    son

    usage

    a priori

    mais seulement

    elle

    par laquelle nous connaissons que et comment

    certaines reprsentations (intuitions ou concepts)

    sont appliques ou

    sont possibles uniquement

    I l

    priori. Ainsi, n l espace, [B r] n aucune dter-

    mination gomtrique

    a priori

    de l espace ne sont

    des reprsentations transcendantales; la connais-

    sance de l origine non empirique de ces repr-

    sentations et la possibilit qu elles

    ont

    de pouvoir

    tout

    de mme se rapporter

    a

    priori des objets

    de l exprience peuvent seufes tre nommes

    transcendantales.

    De

    mme, l usage de l espace

    concernant des objets

    en

    gnral serait transcen-

    dantal, mais, limit uniquement aux objets

    de

    sens, il eft nomm empirique. La

    [

    l ] diffrence

    du transcendantal et de l empirique n appartient

    donc qu la critique des connaissances et ne

    concerne point la relation de ces connaissances

    leur objet.

    Par

    consquent, prsumant qu il

    peut

    bien y

    avoir des concepts capables de se rapporter

    I l

    priori

    des objets, non comme intuitions pures ou

    sensibles, mats seulement comme a:s de

    l

    pense pure, et qui par consquent sont bien

    de

    concepts,

    mais

    dont l origine n eft ni empirique,

    ni

    efthtique, nous nous faisons d avance l ide

  • 7/23/2019 Kant - Critique de la raison pure. A147-B187 (Oeuvres II, Gallimard, 1985)

    7/81

    Logique

    transendantale

    IntrodRflion 8 7

    d une science de l entendement pur

    et

    de la

    connaissance rationnelle par laquelle nous pensons

    des

    objets tout

    fait a priori. Une telle science, qui

    dterminerait l origine, l tendue et la valeur

    objeaive de telles connaissances, devrait porter le

    nom de

    logique

    lransendantale

    car elle a affaire

    seulement aux lois de l entendement et

    de la

    raison, mais uniquement en tant qu elle

    {

    82} se

    rapporte des objets a priori et

    non, comme la

    Iog que gnrale, indiffremment aux connais

    sances empiriques aussi bien que pures.

    DE LA

    DIVISION

    DE LA LOGIQUE GNRALE

    EN

    ANALYTIQUE

    ET

    DIALECTIQUE

    La vieille et clbre

    qudtion

    par laquelle

    on

    se fiurait pousser dans leurs retranchements les

    logictens

    et on

    cherchait

    les amener,

    ou

    devoir

    se laisser surprendre dans un pitoyable diallle

    1

    ,

    ou bien devoir avouer leur 1gnorance,

    {

    18

    et par suite la vanit de tout leur art, eft celle-ci :

    Qg efl-e

    q la 11iriti ? La dfinition nominale de

    la

    vrit, qui en fait la conformit de la connais

    sance avec son objet, eft ici accorde et suppose;

    mais

    on

    veut savoir quel eft le critre universel

    et sr de la vrit de toute connaissance.

    C eft dj une grande et ncessaire preuve de

    sagesse et de pntration que de savoir ce que

    l on doit raisonnablement demander.

    En

    effet, si

    la queftion eft absurde en soi et si elle appelle des

    rponses oiseuses, elle a encore parfois, outre la

    confusion de celui qui la soulve, l inconvnient

    de porter des rponses absurdes l auditeur qui

    n eft pas

    sur

    ses gardes,

    et

    de donner ainsi le riai.

    cule speb.cle de deux personnes, dont l une trait

    le bouc

    [B

    8J} (comme disaient les anciens),

    tan-

    dis que l autre tend

    un

    tamis.

    ID,79

  • 7/23/2019 Kant - Critique de la raison pure. A147-B187 (Oeuvres II, Gallimard, 1985)

    8/81

    818 Critique

    e

    la raon pure

    Si

    la vrit

    consi fte

    dans l'accord d'une connaa.

    sance avec son objet, cet objet doit tre par

    l

    diftingu des autres ; car une connaissance t

    fausse, si elle ne s'accorde pas avec l'objet alUJuel

    elle

    ft

    rapporte, alors mme qu'elle contient

    quelque chose qui pourrait bien valoir pour

    d'autres objets.

    Or,

    un critre universel de la

    vrit serait celui qui vaudrait pour toutes ca

    connaissances, sans diftinl:ion de leurs objets

    Mais il eft clair, puisqu'on

    y

    fait

    a b f t r a l i o ~

    de tout contenu de la connaissance (du

    r a ~ p o r t

    son objet), et que [ ] a vrit a trait )Uifte-

    ment ce contenu, qu'il eft tout fait impossible

    et absurde de demander une marque de

    fa

    vrit

    de

    ce

    contenu des connaissances, et

    qu on

    ne peut

    donc proposer une caratriftique suffisante et en

    mme temps universelle de la vrit. Comme nous

    avons dj nomm ,elus haut le contenu d'une

    connaissance sa matire, on devra dire : On

    ne

    peut demander aucune caratriftique universelle

    de la vrit quant sa matire, parce que

    c'e ft

    en

    soi contraditoirel.

    m

    1o

    En

    ce qui concerne la connaissance considre

    simplement selon l forme (ab ftral:ion faite

    de

    tout contenu), il eft galement clair qu'une logique,

    en tant qu'elle expose les rgles universelles et

    { 84] ncessaires de l'entendement, doit prsen

    ter dans ces rgles mmes des critres de la vrit.

    Car ce qui les contredit eft faux, puisque l'enten

    dement

    s y

    met en contradil:ion avec les ralea

    universelles de sa

    ~ e n s e

    c'eft--dire avec

    lui-

    mme. Mais ces cr1tres ne concernent que

    l

    forme de la vrit, c'e ft--dire de la pense en

    gnral; et, s'ils sont ce titre tout fait juftes,

    ils

    ne sont pas suffisants. En effet, une connais

    sance a beau tre tout fait conforme la forme

    l o ~ i q u e c'e ft--dire ne pas se contredire

    elle-

    meme, elle peut cependant toujours contredire

    l'objet. Le critre purement logique de la vrit,

    savoir l'accord d'une connaissance avec les lois

    universelles

    et

    formelles de l'entendement et de

    la raison, eft donc bien la ronditio sine qua non

    et

    par

    consquent la condition ngative de toute

  • 7/23/2019 Kant - Critique de la raison pure. A147-B187 (Oeuvres II, Gallimard, 1985)

    9/81

    Logigue lransenJantale

    InlrodRflion

    819

    {

    6o] vrit; mais la logique ne saurait aller plus

    }oin et l erreur qui atteint non la forme, malS le

    contenu,

    la

    logique ne peut la dcouvrir au moyen

    d aucune pierre de touche.

    Or, la 1ogique gnrale rsout tout le travail

    formel de l entenaement et de

    la

    raison en ses

    lments, et elle les prsente comme les principes

    de toute apprciation logique de notre connais

    sance.

    Cette partie de la logique peut donc tre

    nomme

    a n a j t i t p ~ e , et elle cft la pierre de touche,

    du

    moins ngative, de la vrit, puisqu il faut

    d abord contrler et eftimer d aprs ces rgles

    toute connaissance selon sa forme, avant de l exa

    miner selon le contenu pour tablir

    [

    8 ] si,

    l gard de l objet, elle contient une vrit posi-

    tive. Mais, comme la simple forme de la connais

    sance, aussi d accord qu ei.le puisse tre avec

    les

    lois

    logiques, ne suffit nullement pour tablir la

    vrit matrielle (objeaive) de la connaissance,

    personne ne peut

    se

    hasarder juger des objets

    avec

    la simple logiq_ue

    et

    en ffirmer

    q ~ e l q u e

    chose, sans en avott auparavant entrepns une

    tude approfondie en dehors de la

    l o ~ q u e

    pour

    ensuite essayer simplement de

    les

    utiliSer et de

    les

    lier en un tout cohrent selon les lois logiques,

    mieux encore, de les examiner simplement d aprs

    elles. Cependant, il y a quelque chose de sduisant

    d ns la possession d un art si spcieux, celui de

    donner toutes nos connaissances la forme de

    l entendement, quelque vide et [ r] pauvre

    au on puisse tre

    l gard de leur contenu, que

    1on use de cette logique gnrale, qui cft sim

    plement un

    anon

    pour l viluation, comme d un

    organon

    pour produire rellement, du moins en en

    m

    donnant l illusion, des affirmations objeaives, ce

    qui cft en fait abuser de cette logique.

    a

    logique

    gnrale, donc, comme prtendu organon, s ap-

    pelle Jia/efliptel.

    Pour diverse que soit la signification selon

    laquelle les anciens se servaient

    ae

    cette appella

    tion d une science

    ou d un art, on peut cepen

    dant dduire avec sret, de son usage rel, que

    l

    dialeaique n tait [ 86} rien d autre pour eux

  • 7/23/2019 Kant - Critique de la raison pure. A147-B187 (Oeuvres II, Gallimard, 1985)

    10/81

    zo Critique Je la raon pt

    que la

    lo,ique

    Je

    l apparence.

    Un

    ~ t

    s o p i ~ q u

    de

    donner a son 1gnorance, et meme aux lllusioaa

    calcules, un vernis de vrit, en imitant l

    mthode de profondeur que la logique

    pres .

    crit en gnral, et en utilisant sa topique pour

    embellir toutes ses allgations vides. Or, on Peut

    prendre note de cela, comme d un avertissement

    sr

    et

    utilisable : que la logique gnrale, ollli-

    Jre comme o r ~ a n o n ,

    eft toujours une logique de

    l apparence, c cft--dire dialeaique. Car,

    COltllne

    elle ne nous enseigne absolument rien sur le

    contenu de la connaissance, mais seulement les

    simples conditions formelles de l accord avec l en

    tendement, qui sont d ailleurs tout fait

    incliff-

    rentes l gard des objets, prtendre l employer

    comme

    un

    inftrument (organon),

    pour

    agrandir

    et

    largir sa connaissance, du moins ce que l on

    allgue, ne peut aboutir rien d autre qu du

    bavardage, o l on affirme avec [ 62} quelque

    apparence, ou bien o l on contefte son chOix

    tout ce que l on veut.

    Un tel enseignement n eft en aucune manire

    conforme

    la dignit de la pbiloso.J?hie. Aussi,

    si l o n ~ attribu le nom de

    d i a l e a i ~ u e

    a

    la

    logique,

    c eft plutt titre de critique Je apparence

    ialt -

    tique,

    et c eft ce titre que nous voulons ici

    l

    voir prise

    1

    { 8 ] IV

    DE LA DIVISION

    DE LA LOGIQUE TRANSCENDANTALE

    EN

    ANALYTIQUE

    ET DIALECTIQUE TRANSCENDANTALES

    Dans une logique transcendantale, nous isolons

    l entendement {comme plus haut dans l eftbtiquc

    transcendantale la sensibilit),

    et

    nous prenons

    simplement la partie de la pense qui a son ori-

    gine uniquement dans l entendement. Mais l usage

  • 7/23/2019 Kant - Critique de la raison pure. A147-B187 (Oeuvres II, Gallimard, 1985)

    11/81

    Logiljlle t r t l f l s t ~ n d a n t a l e

    ntroJtlilion

    u

    de cette connaissance pure repose sur cette condi-

    tion que des objets, auxquels elle puisse s appli- m 1z

    quer,, n o l ~ soient donns dans .l mtuition. Car

    sans

    mtultlon, toute notre connatssance manque

    d objets, et refte par suite compltement vide. La

    partie de la logtque transcendantale, donc, qui

    expose les lments de la connaissance pure de

    l entendement et les principes sans lesquels abso

    lument aucun objet ne peut tre pens, t l ana

    lytique transcendantale, et en mme temps une

    logique de la vrit. Car aucune connaissance ne

    peut la contredire sans perdre en mme temps

    tout {

    6J}

    contenu, c eft--dire toute relation

    quelque objet et par l toute vrit. Mais comme

    il

    t

    trs attrayant et sduisant de se servir seule-

    ment de ces connaissances pures de l entendement

    et

    de

    ces principes, et mme au-del des limites

    de l exprience, qui eft pourtant la seule et unique

    pouvoir nous fourmr la matire (les objets)

    [B } laquelle ces purs concepts de l entende-

    ment peuvent tre appliqus : l entendement court

    alors fe risque de faire,

    par

    des ratiocinations vides,

    un

    usage matriel des principes formels de l en

    tendement pur et de juger sans diftinaion pro-

    pos

    d objets qui ne nous sont pourtant pas donns,

    et ne peuvent peut-tre mme tre donns en

    aucune manire

    Comme la logique ne devait

    tre proprement qu un canon

    pour

    l valuation de

    l usage empirique, c eft en abuser, quand on la

    fait valoir comme l organon d un usage universel

    et

    sans reftriaion,

    et

    que l on se risque avec le

    seul entendement

    pur

    juger synthtiquement,

    affinnet et dcider propos d objets en gnral.

    ~ ~ t t de l entendement pur serait donc alors

    que.

    La

    seconde parue de la logique trans-

    cendantale doit donc tre une critique de cette

    apParence dialeaique, non comme un art de sus

    ater dogmatiquement cette apparence (un

    art,

    malheureusement trs courant, des multiples jon

    gleries mtaphysiques}, mais comme une crinque

    ae l entendement et de la raison l gard de leur

    usage supraphysique, pour mettre dcouvert

    l apparence fausse

    o

    conduisept{

    A 6 }

    des ambi-

  • 7/23/2019 Kant - Critique de la raison pure. A147-B187 (Oeuvres II, Gallimard, 1985)

    12/81

    8zz Critique de la rai on pure

    tions sans fondement, et ramener leurs prtentions

    d invention et d extension, que la raison se figure

    atteindre simplement au moyen de principes trans-

    cendantaux, la simple valuation de l enten-

    dement pur et la prservation de l illusion

    sophiftiquel.

    [

    9}

    m,a, LOGIQUE TRANSCENDANTALE

    Premire divi ion

    ANALYTIQYE TRANSCENDANTALE

    Cette analytique eft la dcomposition de toute

    notre connaiSsance a priori dans les lments de

    la connaissance pure ie l entendement. n cela

    les points suivants sont d importance : x. Qye les

    concepts soient des concepts purs et non

    empi-

    riques. 2.. ~ i l s n appartiennent pas

    l intuition

    et

    la sensibilit, mais

    la pense et

    l enten-

    dement. ,.

    ~

    ce soient des concepts lmen-

    taires, et qu ils soient bien ditingus de ceux qui

    en

    drivent

    ou en

    sont composs.

    4 ~

    la table

    en soit complte, et qu ils couvrent pleinement

    le

    champ entier de l entendement pur. Or, ce

    carac-

    tre complet

    d une

    science ne peut tre admis avec

    assurance sur la supputation

    d un

    agrgat tabli

    simplement coup d essais; elle n eft par auite

    possible qu au moyen d une ide tI to11t de

    l

  • 7/23/2019 Kant - Critique de la raison pure. A147-B187 (Oeuvres II, Gallimard, 1985)

    13/81

    Ana Jiiflle

    transcendantale

    connaissance a priori de l'entendement et par la

    division ainsi atermine des concepts qui la

    conftituent, donc par

    {A

    6J leur

    ohision

    en 1111

    IJflme.

    L'entendement pur se spare complte

    ment non seulement de tout lment empirique,

    mais

    mme de toute sensibilit. Il

    e ~

    donc une

    unit

    o n s i ~ t e par

    elle-mme, se suffisant elle

    mme,

    {B

    1o1 et qui

    n a

    pas tre augmente

    d'additions extrieures'. Aussi l'ensemble de sa

    connaissance conrutue-t-il un

    s y ~ m e

    saisir et

    dterminer sous une ide, et dont le cara8:re

    complet et l'articulation peuvent fournir en mme

    temps une pierre de touche de l'exa8:itude et de

    l'authenticit de tous les lments de la connais

    sance qui y entrent.

    Toute

    cette partie de la

    logique transcendantale se compose de deux livres,

    dont

    l un

    contient les rontepts, l'autre les

    prinpes

    de l'entendement pur.

    LIVRE

    PREMIER

    ANALYTIQUE DES

    CONCEPTS

    J'entends

    par

    l'analytique des concepts

    non

    leur

    analyse

    ou

    le procd ha ituel dans les recherches

    philosophiques, consiftant dcomposer les

    m

    14

    concepts qui se prsentent, d'aprs leur contenu,

    et les clarifier, mais

    la

    dtomposition, encore peu

    tente, titi po1111 ir mime e l entendement,

    pour

    explo-

    rer la possibilit des concepts a priori, {A

    661

    en

    les cherchant dans l'entenaement seul, comme en

    leur lieu de naissance et en analysant en gnral

    l'usage pur de cet entendement; l e ~ en effet l

    tiche propre

    d une

    philosophie

    {B r

    transcen

    dantale;

    fe

    r e ~ e

    e ~

    le traitement logique des

    concepts dans l philosophie

    en

    gnfaf. Nous

    poursuivons donc, dans 1'entendement humain,

    les

    concepts purs jusqu'en leurs premiers germes

  • 7/23/2019 Kant - Critique de la raison pure. A147-B187 (Oeuvres II, Gallimard, 1985)

    14/81

    ritiqueJe la rauon pure

    et dispositions,

    o

    ils se trouvent prpars,

    j u s ~

    qu ce qu enfin l occasion de l exprience ils

    soient dvelopps et prsents par ce mme e n t e n ~

    dement en leur puret, affranchis des conditions

    empiriques qui leur sont inhrentes

    CHAPITRE PREMIER

    DU IL CONDUCTEUR

    SERVANT A DCOUVRIR

    TOUS LES CONCEPTS

    PURS

    DE

    L EN TEN D EMEN T

    Lorsqu on met en jeu

    un

    pouvoir de connais

    sance, il se dgage, suivant les diverses cit-

    conftances, diffrents concepts, qui font connaitre

    ce pouvoir, et que

    l on

    peut rassembler en une

    liSte plus ou moins dtaille, suivant qu on a mis

    les observer \ lus de temps

    et

    plus ae pntra

    tion.

    A

    quel potnt cette recherche sera-t-elle ache

    ve, on ne peut jamais, par ce processus pour

    ainsi dire mcanique, le dterminer avec sret.

    Et encore les [ 7} concepts que

    l on

    ne trouve

    ainsi que par occasion se prsentent sans aucun

    ordre et sans [B 92] unit syStmatique, mais sont

    finalement groups seulement d aprs des res-

    semblances, et d aprs la grandeur de leur contenu,

    en allant des simples aux plus composs,

    dis Poss

    en sries, qui ne sont rien moins que syStmattguea,

    quoiqu elles soient tablies d une certaine

    faon

    m t h o i ~ u m n t

    La philosophie transcendantale a l avantage,

    mais aussi l obligation, de rechercher ses concepts

    d aprs

    un

    principe; parce qu ils sortent purs et

    sans mlange de l entendement, comme unit abso-

    111 a lue,

    et

    doivent donc tre eux-mmes

    lis

    ensemble

    d aprs un concept

    ou

    une ide.

    Or,

    une telle liai-

    son en

    un

    ensemble fournit une rgle d aprs

    laquelle on peut dterminer a priori pour chaque

    concept

    pur

    de l entendement, sa place,

    et

    pour

  • 7/23/2019 Kant - Critique de la raison pure. A147-B187 (Oeuvres II, Gallimard, 1985)

    15/81

    Ana Jtique transendantale

    leur somme son caral:re complet, toutes choses

    qui autrement dpendraient au caprice et

    du

    hasard.

    Premire setllon

    DE

    L USAGE LOGIQUE

    DE

    L ENTENDEMENT EN GNRAL

    L entendement a t dfini plus haut de manire

    simplement ngative : un pouvoir de connatre

    non sensible

    Or, nous ne pouvons, indpendam

    ment de la sensibilit, avoir part

    aucune[A 8}

    intuition. L entendement n cft donc pas un pou

    voir d intuition. Mais en dehors de[B

    9

    l intui

    tion,

    l

    n y a pas d autre faon de connatre que

    par concepts. Donc la connaissance de tout enten

    aement,

    du

    moins de l entendement humain, eft

    une connaissance par concepts,

    non

    intuitive,

    mais

    discursive. Toutes les intuitions, comme

    sensibles, reposent sur des affeons, les concepts

    donc sur des font:ions. Or, j entends par fonon

    l unit de l aon qui ordonne des reprsentations

    diverses sous une reprsentation commune. Les

    concepts se fondent donc sur la spontanit de la

    pense, comme les intuitions sensibles sur la

    rceptivit des impressions. Or, l entendement ne

    peut faire aucun autre usage de ces concepts que

    ae juger par leur moyen. Comme aucune reprsen

    tatJ on

    ne se rapporte immdiatement

    un

    objet,

    s

    ce n eft l intuition,

    un

    concept n cft jamais

    rapport immdiatement

    un

    objet, mais quelque

    autre reprsentation de celui-ci (qu elle soit une

    intuition

    ou dj mme

    un

    concept). Le j u ~ m n t

    eft donc la connaissance mdiate d un obJet, par

    suite la reprsentation d une reprsentation de

    celui-ci. Dans chaque jugement eft

    un

    concept,

    qui vaut

    pour

    plus1eurs concepts, et qui en cette

    pluralit, comprend aussi une reprsentation

    donne, qui eft en effet rapporte immdiatement

    l objets. Ainsi par exemple, dans le jugement :

    Tom lu torps sont Jivibles,

    le concept de divisible

    m,a6

    se rapporte-t-il divers autres concepts; mais

  • 7/23/2019 Kant - Critique de la raison pure. A147-B187 (Oeuvres II, Gallimard, 1985)

    16/81

    816

    Criliflll

    dl la

    rao11 piiTe

    parmi eux

    i l

    eft [

    6

    ] rapport ici particulire

    ment au concept

    du

    corps, et celui-ci certains

    phnomnes

    qui se prsentent nous. Donc

    [ B 94 ces objets sont reprsents mdiatement

    par

    le

    concept de la divisibilit. Tous les jugements

    sont d'aprs cela des fonons de l'unit parn

    nos reprsentations, puisque juftement, au

    lieu

    d'une reprsentation immaiate,

    on

    emploie

    P our

    connaltre l'objet une reprsentation plus

    tiiiJit

    qui comprend sous elle celle-ci et plusieurs autres,

    et qu'ainsi beaucoup de connaissances

    p o s s i b l ~

    sont rassembles en une. Or, no1 1s pouvons rame

    ner tous les

    aaes

    de l'entendement des juge

    ments, si bien que

    l e11tmdlmml

    en gnral peut

    tre

    reprsent comme

    un

    po1111 ir dl j11ger

    Car

    il t

    d'aprs ce qui prcde

    un

    pouvoir de penser.

    Penser

    ft

    la connaissance par concepts. Mais les

    concepts se rapportent, comme prdicats

    de u ~

    ments possibfes, quelque reprsentation d

    un

    objet more indtermin. AinSi le concept

    du

    corps signie quelque chose,

    par

    exemple

    un

    mtal, qui peut tre connu

    par

    ce concept.

    D

    eft

    donc

    un

    concept

    du

    seul

    fa.tt

    que d'autres repr

    sentations sont contenues sous lui,

    au

    moren

    desquelles i l peut se rapporter des objets.

    C t

    donc le praicat d un jugement possible, p r

    exemple tout mtal eft un corps. Les fonons de

    l'entendement peuvent donc &re toutes trouves,

    si

    on

    peut prsenter de faon complte les fonc

    tions ae l'unit dans les l'ugements

    8

    Or, que

    cela

    soit

    tout

    fait ralisable, a Seaion suivante le fera

    voir.

    [ 70

    B

    9J

    J e x i ~ m

    setlio11

    9

    DB LA PONCTION LOGIQ .B

    DB L ENTENDEMENT DANS LBS JUGEMJ .N'l'S

    Si nous faisons abftral:ion de tout contenu d'un

    jugement en gnral, et prtons attention

    la

    simple forme de l'entendement, nous trouvons que

  • 7/23/2019 Kant - Critique de la raison pure. A147-B187 (Oeuvres II, Gallimard, 1985)

    17/81

    Analytiq e

    transcendantale

    la fonl:ion de la pense dans ce jugement peut se

    mettre sous quatre titres, dont chacun contient

    sous lui trois moments. Ils peuvent tre convena

    blement reprsents dans le tableau suivant ;

    z

    Qg_alit

    Affirmatifs

    Ngatifs

    Infinis

    Qg_antit

    des j gements

    Universels

    1

    Particuliers

    Singuliers

    Modalit

    Problmatiques

    Assertoriques

    Apodil:iques

    3

    Relation

    C a t g o r i ~ u e s

    Hypothtiques

    D1sjonl:ifs

    [B 9 } Comme cette division semble s carter

    sur quelques points,

    la vrit non essentiels, de

    l

    technique accoutume des logiciens, [ 7 les

    observations suivantes ne seront pas inutiles

    pour prvenir tout malentendu.

    J .

    Les logiciens disent avec raison que

    pour

    ce

    q u i e ~

    de l usage des jugements dans les raison

    nements, les jugements singuliers peuvent tre trai

    ts

    l gal des jugements universels. Car, prcis

    ment parce qu ils

    n ont

    aucune extension, leur pr

    dicat ne peut pas tre rapport simplement

    quelq' -e

    c h s ~

    de ce u i e ~ contenu sous

    Je

    concept

    du sujet, mals tre exclu d autre chose. Il vaut

    donc de ce concept sans exception, tout comme

    s il tait

    un

    concept

    ~ n r a l

    qui aurait une exten

    sion

    pour

    toute la s1gnification de laquelle vau

    drait

    1e

    prdicat. Si nous comparons en revanche

    un jugement particulier avec

    un

    gnral, simple-

    III,

    87

  • 7/23/2019 Kant - Critique de la raison pure. A147-B187 (Oeuvres II, Gallimard, 1985)

    18/81

    818

    W,88

    CrilifJNI e la raon pure

    ment comme connaissance, d'af.rs la quantit,

    il se rapporte

    celui-ci comme 'unit

    l'infinit

    et

    l

    en t donc en lui-mme essentiellement

    d i ~ l :

    Donc, si j'apprcie un jugement singulier

    non seulement d'al?rs sa valeur interne, mais

    aussi comme connaJ.ssance en gnral, d'aprs la

    quantit qu"il a en comparaison avec d'autres

    connaissances,

    l t

    assurment d i ~ i n l : des

    j u ~ e -

    ments gnraux {j11itia ommNnia et

    mr1te

    dans une table complte des moments de la

    pense en gnral (quoique, sans doute,

    ~

    dans

    la logique

    rdtreinte

    simrlement [B } l'usage

    des jugements entre eux une place particulirel.

    z. Pareillement faut-il encore, dans une loique

    transcendantale,

    d i ~ i n g u e r

    les jNgemenls

    inftnu

    dea

    j t ~ g e m e n l s a.flirmatifs, [ ] bien qu"ils soient dans

    l

    logique gnrale compts

    bon

    droit parmi ces

    derruers, et ne

    c o n ~ t u e n t

    pas un membre parti

    culier de la division. La logique gnrale en effet

    fait a b ~ r a l : i o n de tout contenu du prdicat (bien

    qu"il soit ngatif) et regarde seulement

    s il eft

    joint au sujet, ou

    s il

    lui

    e ~

    oppos. La premire,

    au contraire, considre le jugement aussi d'aprs

    la valeur

    ou

    le contenu de cette affirmation logique,

    au moyen

    d un

    prdicat simplement ngatif, et se

    demande quel gain

    e ~

    ainsi procur au regard de

    l'ensemble de 1a

    connaissance.

    Si

    j'avais dit de

    l"me qu'elle n e ~ pas mortelle, j'aurais du moins

    par un

    jugement ngatif cart une erreur. Or,

    par la proposition : l"me

    e ~

    non mortelle, j ai

    rellement affirm d'aprs la forme du

    j u ~ e m e n t

    en plaant l'me dans }"extension illimtte des

    tres non mortels. Mais parce que ce qui

    ~

    mortel

    contient une part de toute l'extension des tree

    possibles, et ce qui non mortel l'autre, ma

    proposition

    n a

    rien dit d'autre, sinon que l'me

    fait partie de la foule infinie des choses qui res

    tent quand j'enlve tout ce qui

    e ~ mortel Mais

    par l la sphre infinie de tout le possible

    t

    seule

    ment limtte dans la mesure

    o

    ce qui

    e ~

    martel

    en e ~ spar[B 98} et que l"me e ~ place d ns le

    rdte de "extension de son es_Pace. Mais cet

    espace demeure, malgr ce qut

    e ~

    retranch,

  • 7/23/2019 Kant - Critique de la raison pure. A147-B187 (Oeuvres II, Gallimard, 1985)

    19/81

    Analytique transcendantale

    819

    toujours infini, et

    on

    pourrait en enlever encore

    plusieurs parties, sans

    que

    pourtant le concept

    de

    [

    } l me s accroisse le moins du monde, et

    soit dtermin affirmativement. Ces jugements

    infinis au r e ~ a r d de l extension logique sont donc

    rellement limitatifs au regard du contenu de la

    connaissance

    en

    gnral,

    et

    dans cette mesure ils

    ne doivent pas tre laisss de ct dans la table de

    tous les moments de la pense dans les jugements,

    parce que la fonl:ion de l entendement qui s y

    exerce peut bien tre importante dans le champ de

    sa

    connaissance pure

    a priori

    3

    Tous

    les rapports

    de

    la pense dans les juge-

    ments sont ceux

    a

    du

    prdicat au sujet, b

    du

    fondement la consquence,

    c

    de la connaissance

    divise et de tous les membres de la division entre

    eux

    Dans la premire espce du jugement,

    on

    considre

    en

    leurs rapports rciproques deux

    concepts seulement, dans la seconde deux juge-

    ments, dans la troisime plusieurs jugements. m a

    9

    La proposition hypothtique : S il a une j u ~ i e

    parfaite, le mchant o b ~ i n e ~ puni, contient

    proprement le rapport de deux propositions : Il y a

    une

    j u ~ i e parfaite,

    et:

    Le mchant obrun p u n i .

    Si ces deux propositions sont vraies

    en

    soi, cela

    r e ~ e

    ici

    non

    dcid.

    C e ~

    seulement la consquence

    qui e ~ pense par ce jugement. Finalement, le

    jugement

    [B

    n disjonl:if contient un rapport

    de

    deux

    ou

    plusieurs propositions les unes

    l gard des autres,

    non

    de conscution, mais

    d opposition logique, en tant

    que

    la sphre de

    l une exclut la sphre de l autre,

    en

    mme temps

    pourtant que de communaut, en tant que ces

    propositions remplissent ensemble la sphre de

    la

    connaissance proprement dite;

    [

    7 4J

    l contient

    donc

    un

    rapport des parties de la sphre

    d une

    connaissance, puisque la sphre de cnaque partie

    e ~ un complment de la sphre des autres

    pour

    obtenir l ensemble complet de la connaissance

    ainsi divise, par exemple le monde

    e x i ~ e

    ou

    bien

    a. dans une connaissance divise

    de tous

    les membres

    de

    la

    division

    ene

    eux. A

  • 7/23/2019 Kant - Critique de la raison pure. A147-B187 (Oeuvres II, Gallimard, 1985)

    20/81

    m,,..

    CrilifJII fil

    la

    ra;,on

    p ~ ~ n

    par un hasard aveugle, ou bien par une ncessit

    Interne ou bien par une cause extrieure. Chacune

    de ces propositions occupe une partie de la sphre

    de la connaissance possible sur l exiftence d un

    monde en gnral, toutes ensemble elles en occu

    pent

    la

    sphre entire. Enlever la connaissance de

    l une de ces sphres signifie la placer dans l une

    des autres, et au contraire la placer dans une

    sphre signifie l enlever des autres. Il y a donc

    dans un jugement disjonaif une certaine commu

    naut des

    connaissances qui consifte en ce qu elles

    s excluent rci.Proquement les unes les autres,

    mais

    par l dterm10ent cependant en son tout la vraie

    connaissance, puisque prises ensemble elles cons

    tituent tout le contenu d une unique connaissance

    donne.

    t

    voil tout ce que je trouve ncessaire

    de faire remarquer ici en vue de ce qui suit

    1

    4

    La modalit des jugements

    cft

    une fonlion

    tout fait/articulire, qui possde cc caraarc

    difiin if

    [ roo] de ne contribuer en rien au

    contenu du jugement (car en dehors de la quantit,

    de

    la

    qualit et du rapport,

    il

    n y a plus rien qui

    conftitue le contenu d un jugement), mais de

    concerner seulement la valeur de la copule, en

    relation avec la pense en gnral. Les }111 11111nts

    probllmalifJIIII sont ceux o on admet l affirmation

    ou la ngation comme simplement possib/11

    il

    y a

    choix). Les jugements sont a u ~ r t o r i f j l l l l , quand

    affirmation et ngation sont considres comme

    ri1U11

    (vraies). [ J] Sont apodiaiques ceux dans

    lesquels elles sont regardes comme

    n i t ~ s s a i r 1 s .

    Airisi, les deux jugements dont le rapport confti

    tue le jugement h y p o t h t i c ~ u e

    n l ~ t l i l l l l s

    tOIIII-

    tplll l l ,

    de mme ceux qw par leur alipn rci

    proq Qc forment

    le

    jugement disjonlif (membres

    e

    la division) sont-ilS tous seulement problma

    tiques. Dans l exemple prcdent, la proposition:

    D y a une juftice parfaite n cft pas dite assertori

    quement, mais pense seulement comme un juge-

    *

    Comme si la pense tait

    dans

    le premier cas une

    fonaion de l entendement, dans le second du j u ~ m e n t

    dans le troisime de la raison. Une remarque qui s Claircira

    ensuitel.

  • 7/23/2019 Kant - Critique de la raison pure. A147-B187 (Oeuvres II, Gallimard, 1985)

    21/81

    Ana JtifJIIe lrtlll.rentlantale

    ment dcider, que quelqu'un peut admettre,

    et

    seule la consquence ft assertorique. Par suite de

    tds jugements peuvent tre videmment faux, et

    cependant, pris problmatiquement, conditions

    de la connaissance de la vrit. Ainsi, le jugement:

    le

    monde

    exifle par

    un

    h ~ ~ ~ r d

    aveugle,

    el:-il

    dans

    le

    jugement disjon8:if seulement de s i ~ n i f i c t i o n

    problmatique, c'el:--dire que quelqu un pour

    rait bien pour

    [B 1 1}

    un moment admettre cette

    proposition, et qu'elle sert de fait (comme indica

    tion du faux cnemin, dans le nombre de tous

    ceux que l'on peut prendre) trouver le vrai. La

    proposition problmatique et donc celle qui

    exprime une possibilit seulement logique (qui

    n'et pas objeaive), c'e ft--dire le libre choix que

    l'on pourratt faire de donner valeur une telle

    proposition, une rception simplement arbitraire

    de celle-ci dans l'entendement

    1

    La

    proposition

    assertorique a trait la ralit logique ou la

    vrit, comme lorsque, dans

    un

    raisonnement

    hypothtique, [

    7 }

    l'antcdent intervient pro

    blmatiquement dans la majeure et assertorique

    ment dans la mineure, et indique que la proposi

    tion e ft dj lie l'entendement conformment

    ses lois. La proposition apodit:ique pense la pro

    position assertorique comme dtermine par ces

    lois mmes de l'entendement,

    et

    par suite comme

    affirmation a priori

    et

    exprime de cette manire

    une ncessit logique.

    Or,

    comme tout ici s'incor

    pore graduellement l'entendement, de sorte que

    l'on juge d'abord quelque chose problmatique

    ment, qu on l'accepte ensuite assertoriquement

    comme vrai, et qu on

    l'affirme enfin comme ins

    parablement li l'entendement, c'e ft--dire

    comme ncessaire et apodiaique, on peut nom

    mer ces trois fonaions de la modalit autant de

    moments de la pense en gnral.

    Bp

  • 7/23/2019 Kant - Critique de la raison pure. A147-B187 (Oeuvres II, Gallimard, 1985)

    22/81

    Criti(jlll e la raon

    pllf e

    Troime

    seflion

    {

    102

    1

    DES CONCEPTS PURS

    DE

    L ENTENDEMENT

    OU DES CATGORIES

    La logique gnrale fait abftraon, comme

    l

    a

    t dj plusieurs fois dit, de tout

    contenu de la

    connaissance, et attend que des reprsentations

    Iu,,, lui soient donnes d ailleurs, d o que ce soit,

    pour les transformer d abord en concepts, ce qui

    se fait analytiquement.

    En

    revanche

    la

    logiquetranscendantale trouve devant elle

    un

    divers de

    la

    sensibilit a priori, que l efthtique [ 77] trans

    cendantale lui prsente, pour donner aux concepts

    de l entendement une matire sans laquelle elle

    serait sans aucun contenu, donc compltement

    vide. Or, l espace et le temps contiennent un divers

    de la pure intuidon a priori, mais

    p ~ r t i e n n e n t

    cependant aux conditions de la rceftiv1t de notre

    esprit, sous

    le

  • 7/23/2019 Kant - Critique de la raison pure. A147-B187 (Oeuvres II, Gallimard, 1985)

    23/81

    Analytique transcendantale 8 3 3

    la synthse t cependant ce qui

    proprement

    ras-

    semble les lments pour conStituer les connais-

    sances,

    et

    les runit

    en un certain[

    A 78} contenu;

    elle

    eSt donc

    la premire chose

    laquelle nous

    ayons prter attention, si nous voulons juger

    de

    la premire origine

    de

    notre connaissance.

    La synthse

    en

    gnral

    eSt

    comme nous le ver-

    rons plus tard, le simple effet de l imagination,

    une fonon de l me, aveugle mais indispensable,

    sans

    laquellem

    nous n aurions absolument aucune

    connaissance, mais dont nous ne prenons que

    rarement quelque conscience. Mais ramener cette

    synthse

    des concepts eSt une fonon qui revient

    l entendement

    et par

    laquelle

    d abord

    l

    nous

    procure la connaissance

    au

    sens propret.

    [B ro ] La synthse pure, reprsente de mflnire

    gnrale, donne

    le concept pur

    de

    l entendement.

    Or,

    j entends

    par

    cette synthse celle qui repose

    sur

    un

    fondement de

    l unit

    synthtique a priori: m

    9

    ainsi

    notre

    numration

    (on

    le remarque davantage

    surtout dans les plus grands nombres)

    eSt

    une

    syn-

    thse d aprs des

    concepts, puisqu elle a lieu d aprs

    un

    fomfement

    commun

    de

    l unit

    (par exemple de

    la

    dizaine). Sous ce concept l unit devient

    donc

    ncessaire dans la synthse

    du

    divers.

    Diverses reprsentations sont ramenes analy-

    tiquement som

    un

    concept (une tche dont traite

    la

    logique

    gnrale). Ramener

    non

    des reprsenta-

    tions, mais la synthse pure des reprsentations

    des concepts, c eSt ce qu enseigne la logique trans-

    cendantale.

    La

    premire chose

    qui

    doive

    nous

    tre

    donne

    en vue de

    la connaissance de tous les

    objets

    a priori eSt

    le divers de l intuition

    pure;

    [ ~ ] la synthse

    de

    ce divers par l imagination

    eSt la deuxime chose, mais elle ne

    donne

    encore

    aucune connaissance. Les concepts, qui donnent

    l unit cette synthse

    pure,

    et consiStent unique-

    ment dans

    la

    reprsentation

    de

    cette

    unit

    nces-

    saire, forment la troisime chose

    pour

    la connais-

    sance

    d un

    objet

    qui

    se prsente,

    et

    reposent sur

    l e n t e n d e m e n t ~ .

    a.

    , une fonction de entendement,

    IIIIJlS

    laquelle A

  • 7/23/2019 Kant - Critique de la raison pure. A147-B187 (Oeuvres II, Gallimard, 1985)

    24/81

    Critique

    de

    la

    railon pure

    La mme fonl:ion qui donne l unit aux repr-

    sentations diverses dans un jugement, donne aussi

    { B r o } la simple synthse de reprsentations

    diverses dans une

    intuition

    l unit, qui, exprime

    gnralement, s appelle le concept pur de 1 enten-

    dement. Le mme entendement donc, et bien par

    les mmes a.l:es par

    l e s ~ u e l s

    il tablissait dans les

    concepts, au moyen de unit analytique, la forme

    logique

    d un

    jugement, apporte aussi dans

    ses

    reprsentations, au moyen de l unit synthtique

    du divers dans l intuition en gnral, un contenu

    transcendantal, en raison de quoi ces reprsenta-

    tions s appellent purs concepts de l entendement,

    qui se rapportent

    a priori

    aux objets, ce que ne

    peut faire la logique gnrale

    De

    cette manire,

    on

    trouve exal:ement autant

    de concepts purs de l entendement qui se rap-

    portent a priori aux objets de l intuition en gn-

    ral qu il ' avait dans la table prcdente de fonc-

    tions logtques, dans tous les jugements possibles :

    car les fonl:ions en queftion puisent l entende-

    ment, et en mesurent compltement le pouvoir.

    Nous voulons nommer ces concepts, aprs

    r i ~ o t e

    [ 8o] atgories,

    puisque notre vise

    e ~ en

    son

    origine identique la sienne, quoiqu elle s en

    lotgne beaucoup dans l excution.

    95

    {

    ro6} TABLE DES CAT:GORIES

    z

    De

    /a

    qualit :

    Ralit

    Ngation

    Limitation

    De /a fjlllllltiti :

    Unit

    Pluralit

    Totalit

    3

    De /a relation :

    Inhrence et

    s u s i ~ n c e mb-

    ftantia et aJens

    Causalit

    et

    dpendance (cause

    et effet)

    Communaut al:ion

    rciproque

    entre l agent et le patient)

  • 7/23/2019 Kant - Critique de la raison pure. A147-B187 (Oeuvres II, Gallimard, 1985)

    25/81

    Ana JiifJIIIIranmntJantale

    4

    De la modalit :

    Possibilit - Impossibilit

    Exiftence- Non-exiftence

    Ncessit - Contingence

    Telle eft donc la lifte de tous les concepts ori

    ginellement purs

    de la synthse, que l entende

    ment contient

    a priori

    en lui, et grce auxquels

    seulement

    l eft un

    entendement

    pur;

    par leur

    moyen seulement en effet, l peut comprendre

    quelque chose dans le divers de Pintuition, c eft-

    dire penser

    un

    objet de cette intuition. Cette divi

    sion eft obtenue syftmatiquement partir d un

    principe commun, savoir le [ I r ] pouvoir de

    JUger (qui eft la meme chose que le pouvoir de

    Eenser), et ne provient pas de faon rhapsodique

    aune recherche, entreprise au petit boriheur, de

    concepts purs, que

    l on

    n cft jamais sr d avoir

    en nombre complet,

    [

    ro7] puisque celui-ci

    eft

    conclu l ar induon seulement, sans songer

    qu on

    ne voit Jamais de cette faon pourquoi ces concepts

    prcisment, et non

    pas d autres, se trouvent dans

    l entendement. C tait un dessein digne d un esprit

    aussi pntrant que celui d AriRole, que de recher

    cher ces concepts fondamentaux. Mais comme l

    n avait aucun principe, l les rassembla prcipi

    tamment, comme ils lui venaient, et l en produi-

    sit d abord dix, qu il nomma tallgories (prdica- m

    9

    ments). Par la suite, il crut

    en

    avoir encore trouv

    cin9

    qu il ajouta sous le nom de poftprdicaments.

    Mats sa table refta encore lacunaire.

    En

    outre, il

    s y trouve aussi quelques

    moJ11

    de la pure sensibi-

    lit ljiiiJIIdo,11bi,

    sit111,

    galement

    pri111, si11111J ainsi

    qu un mode empirique

    mo/111)

    1

    qt

    n appartient

    pas ce regiftre gnalogique

    de

    l entendement,

    ou encore des concepts drivs sont compts

    parmi les primitifs allio, pauio), et quelques-uns

    ae

    ces

    derniers manquent compltement.

    Apropos de ces derniers concepts, il faut donc

    encore remarquer iue les catgories, comme vrais

    t O ~ ~ t e p t s s o w h t s de entendement pur, ont leurs

  • 7/23/2019 Kant - Critique de la raison pure. A147-B187 (Oeuvres II, Gallimard, 1985)

    26/81

    8J Crilifjlll e

    la

    railon p ~ ~ r e

    oJIept r

    drivs, galement purs, qui ne peuvent

    en aucune faon tre laisss de ct dans un sys-

    tme complet de la philosophie transcendantale,

    [

    82}

    mais que je puis me contenter de mention-

    ner simplement dans

    un

    simple essai critique.

    [B

    ro }

    ~ i l

    me soit permis de nommer ces

    concepts purs, mais drivs, de l entendement les

    priditab/e r

    de la raison pure (par opposition aux

    prdicaments). ~ n on a les concepts primitifs

    et originaires, on peut ajouter aisment les concepts

    drivs et subafternes, et dessiner entirement

    l arbre gnalogique de l entendement pur. Comme

    je n ai pas m occuper ici du caral:re complet

    du

    syftme, mais seulement des principes en vue

    d un syftme, je rserve ce complment pour un

    autre travail. Mais

    on

    peut atteindre

    peu prs

    ce

    but, si on prend les manuels d ontologie et si

    on

    subordonne par exemple la catgorie de causa-

    lit les prdicables de la force, de

    l aaion,

    de

    la

    passion; celle de la communaut, ceux de la pr-

    sence, de la rsiftance; aux prdicaments de la

    modalit ceux de

    la

    naissance, de la disparition,

    du

    changement, etc.

    Les catgories lies aux

    modes de la sensibilit pure ou encore lies entre

    elles donnent une foule de concepts a priori dri-

    vs; les remarquer, et si possible les exposer de

    faon complte, serait un effort utile et non dsa-

    grable, mais

    dont on

    peut se passer.

    Je

    me dispense aussi dessein dans ce trait

    des

    dfinitions de ces catgories, bien 9.ue je puisse

    tre en leur possession.

    Je

    pousserai. dans

    ce

    ~ u i

    suit [

    J]

    la division de ces concepts jusqu au

    point suffisant

    pour

    la mthodologie que j la-

    bore [B

    1 1]

    1

    Dans

    un

    syftme de

    i

    raison pure,

    on pourrait

    bon

    droit les exiger de moi : mais

    ici ils feraient seulement perdre de vue le point

    111

    91

    principal de la recherche, en suscitant doutes

    et

    attaques, que

    l on

    peut, sans rien enlever

    la

    vise

    essentielle, trs bien renvoyer

    un

    autre travail.

    En

    attendant, il ressort clairement

    du

    peu que j ai

    dit sur cette queftion qu il eft non s e u i e m e n ~ b ~ ~

    sible, mais mme facile, d tablir un vocab

    complet avec toutes les explications requises. Les

  • 7/23/2019 Kant - Critique de la raison pure. A147-B187 (Oeuvres II, Gallimard, 1985)

    27/81

    Ana Jiitjlle

    trtlllstemianlale

    cases sont l;

    i l

    faut seulement les remplir, et une

    topique syftmatique

    1

    comme la prsente, rend

    miila1s de manquer la place qui revient propre

    ment chaque conceet, et rend en mme temps

    ais de remarquer facdement celle qui eft encore

    vide.

    Sur cette table des catgories,

    on

    peut faire

    d opportunes considrations, qui pourraient bien

    avoir des

    consCJuences

    importantes par rapport

    la forme scientifique de toutes les connaissances

    rationnelles. Car que cette table soit,

    dans

    la par

    tie thorique de

    la

    philosophie, singulirement

    utile et mme indispensable

    pour

    tracer complte

    ment le plan d11 1 111 tjlll forme 11ne science, en tant

    qu elle repose sur des concepts a priori et

    pour

    la

    Jiviler

    mathmatiquement

    J

    aprls

    des

    _principes

    dtermins, c eft ce qui ressort aj de SOl-mme

    du fait que la table en queftion contient de faon

    complte tous les concepts lmentaires de l en

    tendement,

    et

    mme la forme

    d un

    syftme

    [B

    o} de

    ces concepts dans l entendement

    humain, et .donne des o n s i ~ n e s

    pour

    tous les

    mom1nls

    d une science spculanve se proposer

    et

    mme pour son ordre, comme j en ai ailleurs donn

    une preuve. Voici donc quelques-unes de ces

    remarques.

    La premire eft que cette table, qui contient

    quatre classes de concepts de l entendement, peut

    se diviser d abord en deux parties, dont la pre

    mire se rapporte aux objets de l intuition

    wure

    aussi bien qu empirique), mais la seconde 1 exis

    tence de

    ces

    objets (soit en relation les uns avec

    les autres, soit en relation avec l entendement).

    La premire classe, je

    la

    nommerais la classe des

    catgories malhimatifjlles, la seconde celle des cat

    gories Jynamitjlles. La premire classe na pas,

    comme

    on

    le voit, de corrlats, qui se trouvent

    seulement dans la seconde. Cette diffrence doit m t6

    a.

    a para(lrapha et fl sont d

    add

    e

    B.

  • 7/23/2019 Kant - Critique de la raison pure. A147-B187 (Oeuvres II, Gallimard, 1985)

    28/81

    C r i t i q t ~ e

    de

    l raon pure

    bien avoir

    un

    fondement dans la nature de l en

    tendement.

    Deuxime remarque.

    Il y a partout un mme

    nombre de catgories de chaque classe, savoir

    trois, ce qui demande galement rflexion, puisque

    autrement toute division

    a priori

    par concepts

    cfoit

    tre une dichotomie. A cela s ajoute encore ~ u e

    la troisime catgorie rsulte toujours de la ha

    son de la seconde classe avec la premire

    [Brrr]

    Ainsi

    la totalit

    n eSt pas autre chose que

    la pluralit considre comme unit, la

    limitation

    rien d autre que la ralit lie la ngation,

    l

    communaut eSt la camaliti d une subStance dans

    la dtermination des autres, de faon rciproque,

    enfin la ncessit n eSt rien d autre que l exiStence

    qui eSt donne par la possibilit elle-mme. Mais

    que l on ne pense pas que la troisime catgorie

    soit

    pour

    autant un concept seulement driv et

    non un concept-souche de l entendement pur. Car

    la liaison de la premire catgorie et de la seconde

    pour produire le troisime concept exige

    un aae

    particulier de l entendement, qua n eSt pas iden

    tique celui qui a lieu dans le premier et le second.

    Ainsi le concept

    d un nombre

    (qui appartient la

    catgorie de la totalit) n eSt-il pas toujours pos

    sible l o sont les concepts de la multitude et de

    l unit (par exemple dans la reprsentation de

    l infini), ou bien

    du

    fait que je 1ie ensemble le

    concept d une came et celui d une s u b f 1 a n c ~ e ne

    comprends pas encore immdiatement l in uence,

    c eSt--dire comment une subStance peut evenir

    cause de quelque chose en une autre subStance,

    l en rsulte

    qu un al:e

    particulier de l entende

    ment eSt requts; et l en eSt de mme dans les

    autres cas.

    Troime

    remarque.

    Pour une seule catgorie,

    celle de la ommunauti, qui se trouve sous le troi

    sime titre, l accord avec la

    [B 2}

    forme d un

    jugement disjonl:if, qui lui correspond dans la

    table des fonl:ions logiques, n eSt pas aussi

    vi-

    dent que dans les autres.

    Pour s assurer de cet accord, on doit remarquer

    que dans tous les jugements disjonl:ifs, la spnre

  • 7/23/2019 Kant - Critique de la raison pure. A147-B187 (Oeuvres II, Gallimard, 1985)

    29/81

    flll{yliqtlltransmul4nlale

    (l ensemble de

    tout

    ce qui eft contenu sous un td

    jugement) eft reprsente comme un

    tout

    divis en

    parties (les concepts subordonns}, et que, puisque

    l une ne peut tre contenue dans l autre, elles sont

    P-enses

    comme

    coorJonnies

    entre elles, non sllhor

    flonnies,

    si

    bien qu elles ne se dterminent pas

    ans

    tm

    s e ~ ~

    sens, comme dans une sirie, mais

    riprOqtll-

    1111111 comme dans un

    a l'igal

    (si un membre de la

    division ft

    }OS

    tous les autres en sont exclus, et

    inversement)

    On

    pense donc une pareille liaison dans un

    o

    des choses,

    lorsque l une n cft

    pas sllhorJonnie,

    comme

    effet,

    l autre, comme cause de son exiftence, mais

    ft

    coorJonnle

    dans

    un

    mme temps et dans

    un

    rap

    port rciproque, comme cause en vue de la dter

    mination des autres (par exemple, dans un corps

    dont les parties s attirent rciproquement les unes

    les

    autres, et aussi s opposent une rsiftance), ce

    qui eft une sorte de liaison tout autre que celle qui

    se rencontre dans le simple rapport de la cause

    l effet (du fondement la consquence), ral?port

    dans l ~ la consquence ne dtermine pas a son

    tour rciproquement le fondement,

    et

    par suite ne

    forme pas avec cdui-ci un tout (comme le crateur

    du monde et le monde). Ce mme procd de l en

    tendement, quand il se reprsente la sphre

    d un

    concept [B rrJ] divis, i l l observe aussi quand il

    pense une chose comme divisible, et de mme que

    les membres de la division dans le premier cas

    s excluent les uns les autres et sont cependant lis

    en une sphre, de mme se reprsente-t-illes

    par

    ties de cette chose comme des parties dont l exis

    tence (comme subftances) convient chacune

    l exclusion des autres, mais cependant comme lies

    en un tout.

    Mais il y a encore dans la

    ~ h i l o s o \ h i e

    transcen

    dantale des anciens

    un

    chap1tre

    qw

    contient de

    purs concepts de l entendement, qui, bien qu ils

    ne soient pas compts parmi les catgories,

    devraient nanmoins valoir d aprs eux coinme

    W,97

  • 7/23/2019 Kant - Critique de la raison pure. A147-B187 (Oeuvres II, Gallimard, 1985)

    30/81

    84o

    Critique

    Je

    la raon pure

    concepts a priori d objets; mais en ce cas ils aug

    menteraient le

    nombre

    des catgories, ce

    q_ui

    ne

    peut

    tre. Ils

    sont

    noncs dans la proposition

    si

    clbre chez les

    s c o l ~ i q u e s : ~ o d l i b e t

    ens efl

    unum,

    verum,

    bonum. Or, bien que l usage de ce principe

    ait abouti

    des consquences dplorables (don

    nant des propositions purement tautologiques), si

    bien

    que

    l on a coutume, dans les temps modernes,

    de ne l admettre dans la mtaphysique que par

    biensance, une pense qui

    s dt

    maintenue si

    longtemps mrite cependant toujours, si vide

    qu elle puisse sembler, qu on

    en

    recherche l ori

    gine,

    et

    autorise

    supposer qu elle a, dans quelque

    rgle de l entendement,

    son

    fondement, qui a t

    seulement, comme il arrive souvent, faussement

    interprt

    1

    Ces prtendus prdicats transcendan-

    m

    9

    a

    taux

    { B II ]

    des

    choses

    ne

    sont

    que des exigences

    logiques,

    et

    des critres de toute connasance

    des

    choses

    en

    gnral et ils lui

    donnent pour

    fondement

    les catgories de la quantit, c e ~ - - d i r e de l unit,

    de la pluralit et de la totalit; seulement, ces cat

    gories, qui devraient tre prises proprement

    en un

    sens matriel,

    en

    tant qu elles concernent la pos

    sibilit des choses elles-mmes, taient en fait

    employes par les anciens avec une signification

    seulement formelle, comme concernant l exigence

    logique de toute connaissance;

    et

    pourtant les

    anciens faisaient, sans y prendre garde, de

    ces

    critres de la pense des proprits des choses en

    elles-mmes. Dans toute connaissance d un objet,

    l

    y a

    en

    effet

    l unit

    du

    concept

    que l on

    peut

    nommer unit qualitative,

    en tant

    que

    l on ne pense

    par l que l unit de la synthse du divers des

    connaissances, la faon de l unit

    du

    thme dans

    un

    drame,

    un

    discours, une fable. En second lieu

    vient la

    vrit

    relativement aux consquences. Plus

    l

    y a de consquences vraies qui dcoulent

    d un

    concept donn, plus il y a de signes de sa ralit

    objelive. C e ~ ce que l on pourrait appeler la

    P,luralit

    ~ u a l i t a t i v e

    des

    c a r a . t r ~ q u e s .

    q ~ t

    appar

    tiennent a

    un

    concept comme a

    un

    prtnctpe com

    mun (qui ne

    sont

    pas penses en lui comme gran

    deur). Troisimement enfin vient la perfelion,

  • 7/23/2019 Kant - Critique de la raison pure. A147-B187 (Oeuvres II, Gallimard, 1985)

    31/81

    A n a J t i q t ~ e

    transcen antale

    841

    qui consifte en ce que, inversement, cette pluralit

    tout entire reconduise l unit

    du

    concept, et

    s accorde pleinement et exclusivement avec lui;

    c eft ce que l on

    peut

    appeler

    l intgralit

    tjlllllitative

    Qa

    totalit). Par o

    l on voit [B

    IIJ}

    que

    ces cri-

    tres logiques

    de

    la possibilit

    de

    la connaissance

    en gnral ne font que transformer ici les trois

    catgories de la grandeur, o l unit

    doit

    tre prise

    d une manire conftamment homogne dans la

    produt:ion du quantum, en

    vue

    de la liaison

    en

    une conscience

    de

    connaissances mme htro

    gnes,

    par

    la qualit

    d une

    connaissance prise

    pour

    principe

    1

    Ainsi le critre de la possibilit

    d un

    concept

    (non

    de

    son

    objet)

    eft

    la dfinition,

    o

    l unit

    du concept, la

    vrit

    de tout ce qui

    peut

    en tre immdiatement driv,

    l intgralit

    enfin de

    ce

    qui

    en

    a t tir,

    c o n f t i t u e n t

    ce

    qui

    eft

    requis

    pour

    l tablissement de

    tout

    le concept;

    ou

    bien

    encore le critre

    d une

    hypothse

    eft

    l intelligibi-

    lit

    du

    principe

    J explication

    admis, c eft--dire

    son

    unit (sans hypothse auxiliaire),la vrit des cons

    ~ u e n c e s

    qui en

    drivent (leur accord entre elles

    t

    1 exprience),

    et

    enfin

    ) intgralit

    du

    principe

    d explication par

    rapport

    ces consquences,

    qui

    ne renvoient rien de plus ni rien de moins que

    ce qui avait

    t

    accept dans l hypothse, et

    qui

    reproduisent analytiquement

    a pofleriori

    ce

    qui m

    99

    avait t pens synthtiquement

    a priori

    et

    s y

    accordent. Les concepts d unit, de vrit et de

    perfet:ion

    ne

    compltent

    donc

    nullement la table

    transcendantale des catgories, comme si elle tait

    pour ainsi dire dfet:ueuse, mais, le

    rapport

    de ces

    concepts des objets tant

    [B II }

    tout fait

    m s

    de ct, l emploi

    qu on en

    fait rentre simplement

    d ns les rgles logiques gnrales de l accord de

    la connaissance avec elle-mmel.

  • 7/23/2019 Kant - Critique de la raison pure. A147-B187 (Oeuvres II, Gallimard, 1985)

    32/81

    Critiljlle e la railon piiTI

    CHAPITRE II

    {A 8,1) DB LA

    DDUCTION

    DES

    CONCEPTS PURS

    DB

    L EN TEN D EMEN T

    Premire seflion

    13

    DES PRINCIPES

    D UNE

    DDUCTION

    TRANSCENDANTALE EN

    GNRAL

    es

    jurisconsultes, lorsqu'ils parlent de droits

    et d'usurpations, diftinguent dans une cause la

    que tion ae droit jlli jllf I), de la queftion de

    fait IJIIitl

    fatli),

    et comme

    ils

    exigent une preuve

    de chacune d'elles, ils a p ~ e l l e n t tliRflion cene qui

    doit faire paraitre le droit

    ou

    la lgitimit de

    la

    prtention. Nous nous servons d'une foule de

    concepts empiriques sans rencontrer de contradic

    teur, et nous nous croyons autoriss mme sans

    ddulion leur attribuer un sens et une significa

    tion imagine

    1

    , parce que nous avons toujours

    l'exprience en main [ r IJ] pour en dmontrer

    la ralit objea.ve. Il y a cependant aussi

    des

    concepts usurps, comme ceux de

    b o n h e ~ ~ r

    de

    tlu-

    tin

    qui,

    la vrit, circulent grice une complai

    sance presque ~ n r a l e mais auxquds

    on

    pose

    parfois la queftion :

    fl i

    ~ ~ r i l leur ddut:ion

    ne

    cause pas a.J.ors

    un

    mdiocre embarras, attendu

    qu on ne peut citer aucun principe [ IJ] clair

    de droit tir soit de l'exprience, soit de la raison,

    qui en juftifie l'usage.

    Mais parmi les nombreux concepts qui forment

    le tissu trs ml de la connaissance humaine,

    il

    y

    en a qudques-uns qui sont deftins un usage pur

    a priori (pleinement indpendant de toute

    exp-

    m

    oo rience), et dont le droit a toujours besoin d'une

  • 7/23/2019 Kant - Critique de la raison pure. A147-B187 (Oeuvres II, Gallimard, 1985)

    33/81

    Anafytique

    transcendantale

    dduaion,

    parce que des preuves tires e l exp-

    rience ne suffisent pas lgitimer

    un

    tel usage, et

    que

    l on

    doit pourtant savoir comment ces concepts

    peuvent se rapporter des objets qu ils ne

    prennent d aucune exprience. J appelle donc l ex-

    plication de

    la

    manire

    dont

    ces concepts peuvent

    se

    rapporter

    a priori

    ces objets leur ddut1ion

    trans-

    cendantale

    et

    je

    la

    d i ~ i n g u e

    de la

    dduaion empi-

    rique

    qui montre de quelle manire

    un

    concept a

    t acquis

    par

    l exprience et la rflexion

    sur

    celle-

    ci et qui ne concerne donc pas la lgitimit, mais

    le

    fait, d o rsulte la possession

    [B

    8} Nous avons dj deux concepts d espce

    toute diffrente, qui

    ont

    cependant en commun de

    se

    rapporter tous deux entirement a priori des

    objets, savoir les concepts d espace et de temps,

    comme formes de la sensibilit, et les catgories,

    comme concepts de l entendement.

    En

    vouloir

    chercher

    une dduaion

    empirique serait

    un

    travail

    vain, puisque le caraare

    d i ~ i n a i f

    de leur nature

    [ 8 } c o n s i ~ e j u ~ e m e n t

    se rapporter leurs

    objets sans avoir rien emprunt l exprience

    pour leur reprsentation.

    St

    donc une

    dduaion

    de ces concepts e ~ ncessaire, elle devra toujours

    tre transcendantale.

    Cependant on peut, pour ces concepts comme

    pour toute connaissance, chercher dans l exp-

    rience, sinon le principe de leur possibilit, du

    moins les causes occasionnelles de leur produlion;

    les impressions nous donnent alors la premire

    occasion de mettre

    en

    branle leur gard la facult

    entire de connatre, et de conrutuer l exprience,

    qui contient deux lments trs htrognes,

    savoir une matire

    pour

    la connaissance tire des

    sens, et une certaine forme

    pour

    l ordonner, tire

    de la source intrieure de l intuition pure et de la

    pense, qui ne

    sont

    mises en exercice et ne pro-

    duisent des concepts

    qu

    l occasion de la pre-

    mires. Rechercher ainsi les premiers efforts de

    notre facult de connatre,

    pour

    s lever des per-

    ceptions singulires [B

    9]

    des concepts gn-

    raux,

    c e ~ une

    entreprise qui a sans doute une

    grande utilit, et il faut remercier

    l i l l u ~ r e

    Locke

  • 7/23/2019 Kant - Critique de la raison pure. A147-B187 (Oeuvres II, Gallimard, 1985)

    34/81

    844 Critifjlle

    e

    l raon p re

    d'en avoir le premier ouvert la voie

    1

    Mais il eft

    impossible d'arriver par cette voie une Jduflion

    des concepts purs a priori parce que, en vue de

    leur usage futur,

    CJ Ui

    iioit tre compltement ind-

    pendant de

    l e x ~ r t e n c e ,

    l faut qu'ils aient un tout

    m

    101

    autre ate de natssance

    produire que celui qui

    les

    fait driver d'expriences. Cette tentative [ 87

    de drivation physiologique, qui ne peut pas du

    tout tre proprement appele dduCtion, puis-

    qu'elle concerne une queftion de fait, je la nom-

    merai donc l'explication de la

    possession

    d'une pure

    connaissance. feft donc clair qu'il ne peut y avoir

    de ces concepts quune dduffion transcendantale,

    et nullement une ddul:ion

    e m p i r i c ; ~ u e ,

    et que

    celles de ce dernier type ne sont, rclattvement aux

    concepts purs a

    priori

    que de vaines tentatives,

    dont peut seul s'occuper celui qui

    n a

    pas compris

    la

    nature

    tout

    fait particulire de ces connaissances.

    Mais, une fois accord le seul mode de ddution

    possible

    u r

    la connaissance pure a priori, savoir

    cdui

    qut suit la voie transcendantale,

    l

    n'en

    rsulte pas qu'elle soit aussi absolument nces-

    saire. Nous avons suivi plus haut jusqu' leurs

    sources, au moyen d'une ddul:ion transcendan-

    tale, les concepts de l'espace et du temps, et en

    avons expliqu et dtermin l valeur [B 12 ]

    objeaive a priori. Toutefois, la gomtrie va d'un

    pas sr travers de pures connaissances a priori

    sans avoir besoin de demander la philosofihie un

    certificat propos de l'origine pure et lgitime de

    son concept fondamental d'espace.

    C eft

    que dans

    cette science l'usage du concept ne porte que slir

    le

    monde sensible extrieur, dont l'intuition a pour

    forme pure

    1espace,

    et dans lequd donc toute

    connaissance gomtri9ue a une vidence imm-

    diate, puisqu'elle se fonde sur une intuition

    priori, et que les objets sont donns par la connais-

    sance mme

    a

    priori (sdon

    [A 88]

    la forme) dans

    intuition.

    En

    revanche, avec les

    t o n r ~ p t s

    p ~ ~ r s de

    l entendement,

    nait "indispensable besoin de cher-

    cher non seulement leur ddul:ion transcendan-

    tale, mais aussi celle de l'espace, car comme elle

    traite' des objets non au moyen de prdicats de

  • 7/23/2019 Kant - Critique de la raison pure. A147-B187 (Oeuvres II, Gallimard, 1985)

    35/81

    Ana{ytitjlle transtentlantale

    84s

    l intuition et de la sensibilit, mais de la pure pen-

    se a priori, ces prdicats se rapportent de faon

    gnrale aux obJets, indpendamment de toutes

    les

    conditions de la sensibilit, et, comme ils ne

    sont pas fonds sur l exprience, ils ne peuvent

    montrer dans l intuition

    a

    priori

    aucun objet

    sur

    lequel ils fonderaient leur synthse avant toute

    exprience; par suite, non seulement ils veillent

    le

    soupon

    sur

    la valeur objeaive et les bornes de

    leur usage, mais ils rendent encore ambigu ce

    onept

    J efjae, par leur penchant en user au-del

    des {

    2 ] conditions de l intuition sensible, et 111 102

    voil pourquoi

    l

    tait ncessaire

    d en

    donner aussi

    plus liaut

    une

    dduaion

    transcendantale

    Le lec-

    teur doit donc tre convaincu de l indispensable

    ncessit d une telle dduaion transcendantale,

    avant d avoir fait un seul pas dans le champ de la

    raison pure; car autrement il procde l aveu

    glette, et doit, aprs avoir diversement err

    et l,

    retourner l ignorance

    d o l

    tait parti. Mais il

    faut aussi qu if

    se

    rende hien compte d avance de

    l invitable difficult, afin de

    ne

    pas se plaindre

    d une obscurit

    JU

    enveloppe profondment la

    chose mme,

    ou

    de ne pas se laisser

    trop tt

    dcou-

    rager par les obftacles carter,[A 9] car

    l

    s agit

    ou d abandonner compltement toutes les pr

    tentions des connaissances de la raison pure,

    comme ce qui conftitue le cham{lle plus attrayant,

    celui qui s tend au-del des linutes de toute exp

    rience possible, ou bien de porter cette recherche

    critique

    son point

    de perfetion

    n

    ne nous a pas t difficile de faire comprendre

    plus haut, propos des concepts de l espace et du

    temps, comment ils doivent, en tant que connais

    sances a priori, se rapporter cependant ncessai

    rement des objets, et comment ils rendaient {lOS-

    sible

    une

    connaissance synthtique de ces obJets,

    indpendamment de toute exprience. En

    effet,

    comme ~ uniCJuement au moyen de ces formes

    pures de la sensil:illit

    qu un

    objet peut nous appa

    raitre, c eft--dire tre un objet de Pintuition empi

    riq_ue l espace et le temps sont de pures intuitions

    qw contiennent a priori la [ r22] condition de la

  • 7/23/2019 Kant - Critique de la raison pure. A147-B187 (Oeuvres II, Gallimard, 1985)

    36/81

    846 Crilifjlle e la

    raon

    j>re

    possibilit des objets comme phnomnes, et la

    synthse qui s y opre a valeur objel:ive

    1

    Les catgories de l entendement pur, au

    contraire, ne nous reprsentent pas du tout

    les

    conditions sous lesquelles des obJets sont donns

    dans l intuition, par suite

    des

    objets peuvent assu

    rment nous apparaitre sans devoir se rapporter

    ncessairement aux fonl:ions de l entendement et

    sans que cdui-ci en contienne les conditions a

    priori.

    De

    l

    rsulte une difficult, que nous ne ren

    contrions pas dans le champ de la sensibilit, l

    savoir comment des tondilions s t ~ b j e i t l e s e

    la

    pensu

    pourraient avoir une

    ale r objeHitle

    c eft-l-dire

    fournir les conditions de

    la

    possibilit de toute

    connaissance

    [

    10] des objets : car des phno

    mnes peuvent assurment tre donns dans l in

    tuition sans les

    fonl:ions

    de l entendement. Je

    prends, par exemple, le concept de la cause, qui

    signifie une espce particulire de synthse, o A

    qudque chose se joint d aprs une rglel

    qudquc chose de tout

    fait diffrent

    B On

    ne voit

    pas clairement a }riori pourquoi des phnomnes

    devraient contentr

  • 7/23/2019 Kant - Critique de la raison pure. A147-B187 (Oeuvres II, Gallimard, 1985)

    37/81

    Ana Jii(jlle

    transtentlanta/e

    84 7

    la cause et de l effet, si bien que ce concept serait

    tout

    fait vide,

    nul

    et sans signification. Les

    phnomnes n en offriraient pas moins [ 9 } des

    objets

    notre

    intuition, puisque l intuition n a

    besoin

    en

    aucune manire des fonl:ions de la pense.

    Si

    l on

    pensait s affranchir de la peine

    de

    ces

    recherches

    en

    disant que l exprience offre sans

    cesse des exemples

    d une

    telle rgularit des ph

    nomnes, qui nous

    donnent

    suffisamment l occa

    sion

    d en

    abftraire le concept de cause et de vri

    fier

    ainsi en mme temps la valeur objel:ive

    d un

    tel concept, on ne remar9uerait pas que le concept

    de cause ne peut s tablir de cette manire, mais

    qu il doit ou

    ien

    avoir

    son

    fondement

    tout

    fait

    a priori

    dans l entendement,

    ou

    tre

    [B

    24}

    com

    pltement abandonn comme une

    pure

    chimre.

    En effet ce concept exige absolument que quelque

    chose A soit de telle sorte

    qu une

    autre chose B

    s ensuive

    ntessairllltenl

    et suivant

    tme rigle

    abso-

    /umentuniverseUe.

    Les phnomnes fournissent bien

    des cas d o l on

    peut

    tirer

    une

    rgle, suivant

    laquelle quelque chose arrive habituellement, mais

    ils

    ne peuvent

    jamais

    donner

    la consquence

    comme

    nitessaire;

    la synthse

    de

    la cause et

    de

    l effet s attache donc une dignit que

    l on

    ne peut

    pas

    du

    tout exprimer empiriquement, savoir que

    l effet ne s ajoute pas simplement la cause, mais

    qu il eft pos par elle et qu il en drive. La ftri8:e

    universalit de la rgle n cft pas du tout non plus

    une proprit des rgles empiriques, qui

    ne

    peuvent

    recevoir

    par

    indul:ion

    qu une

    universalit

    {

    9 ]

    comparative, c eft--dire la possibili d tendre

    leur emploi. L usage des concepts purs de l enten-

    m, ,.

    dement serait

    donc

    tout autre, si

    on

    voulait les

    traiter seulement

    comme

    des produits empiriques.

    14

    PASSAGE LA DDUCTION

    TRANSCENDANTALE DES CATGORIES

    Il n y a que deux cas .Possibles, dans lesquels

    une

    reprsentation synthtlque et ses objets peuvent

  • 7/23/2019 Kant - Critique de la raison pure. A147-B187 (Oeuvres II, Gallimard, 1985)

    38/81

    848 Ctitfjlle Je la

    raon

    p ~ ~ r e

    concorder,

    se

    rapporter ncessairement les uns aux

    autres, et pour atnsi dire

    se

    renc9ntrer

    1

    Ou bien

    c eft l objet qui seul ren