Kierkegaard, En quoi l'homme de génie diffère-t-il de l'apôtre.pdf

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    Sren KierkegaardEn quoi lhomme de gnie diffre-t-il de laptre?

    TRAIT THIQUE-RELIGIEUXTraduit du danois par Johannes Gtzsche

    Copenhague1886

    Notice sur la vie et les uvres de Kierkegaard

    NOTICESUR LA VIE ET LES UVRES DE

    S. A. KIERKEGAARD

    PAR

    H. P. KOFOED-HANSEN,PRVT DE DIOCSE.

    http://fr.wikisource.org/wiki/Auteur:S%C3%B8ren_Kierkegaardhttp://fr.wikisource.org/wiki/Auteur:S%C3%B8ren_Kierkegaard
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    En quoi lhomme de gnie diffre-t-il de laptre?

    Lauteur dont nous offrons aujourdhui les uvres au public franais sous

    forme de traduction du danois, est sans contredit un des plus remarquables parmiles crivains religieux et philosophes du sicle prsent. Par malheur il rdigeait sescrits en danois, langue peu tudie hors du Danemark ; sans cela il serait dj lu etadmir partout en Europe. La renomme de S. A. Kierkegaard va pourtant toujoursen grandissant. Pendant ces dernires dizaines dannes plusieurs de ses crits ontt traduits en sudois, en allemand et, ce que je sache, aussi en hollandais. Et ilny a pas en douter, mesure que ses crits seront lus ltranger, on en reconnatra de plus en plus la valeur et limportance.

    lusage des personnes disposes suivre lexemple de quelques Allemandsqui ont tudi le danois afin dtre en tat de lire le texte original des uvres de S.A. Kierkegaard, nous allons tracer un aperu rapide sur la tendance et le mode dedveloppement de ses compositions. coutons dabord lauteur dans un post-scriptum des exhortations publies en 1851 :

    Un crivain, dont lactivit est graduelle et progressive, et qui a dbutpar lUn ou lAutre,cherche au pied de lautel le lieu de son repos dfinitif. Plus

    que personne lauteur a la conscience de ses dfauts et de ses pchs. Il naspirepoint au nom daptre. Pote et philosophe, dune faon particulire, ilest sans autorit et ne vous apporte rien de nouveau. Il ne prtend qu relireencore une fois le vieux livre primitif qui traite des rapports individuels desexistences humaines et, si cela est encore possible, saisir dune manire plus intimelesprit de la tradition que nous ont transmise nos pres.

    Kierkegaard prluda par une dissertation sur un trait assez volumineux : Delironie, par rapport Socrate. Puis en 1843 il dbuta par luvre ci-dessus

    mentionne : lUn ou lAutre,en deux volumes. Philosophe et pote,lauteurexpose lide de la vie, esthtique et thique, comme un point dappuiessentiel dans les troubles desprit et les conflits spirituels de la socit.

    Il publia ensuite plusieurs crits moins volumineux parmi lesquels noussignalons lattention le trait: Heures dangoisse,o lauteur se rfre Abraham et surtout lholocauste dIsaac afin de nous exposer lessence de la foi etlimportance de celle-ci quant aux rapports de lhomme avec Dieu.

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    Presque de front avec ce livre il fit paratre : Fragments philosophiques, unede ses plus vives sorties contre la philosophie dalors, surtout celle de Hegel.Aux Fragments philosophiques succda une uvre complmentaire plusvolumineuse : Post-scriptum peu scientifique et final. Le titre indique que les

    volumes publis forment le premier stade dans sa carrire dauteur. Ces deuxderniers ouvrages parurent sous le pseudonyme : Jean Climacus. Les critsantrieurs taient de mme pseudonymes. Dans le titre des deux derniers ouvragesil dclare en tre lditeur. Il indique par l quil sest personnifi plus directementdans ces crits ou, pour mieux dire, que le contenu en tait en rapport plus intimeavec sa philosophie sur la vie. Ils forment la transition ce quil se proposaitcomme but principal, savoir : dexposer le christianisme et la foi chrtienne dansleurs rapports avec la science et la socit. Il ralisa ce problme par deux ouvrages

    dAnticlimacus: Malade la mort et Le christianisme mis en pratique, dont ilse dclara aussi lditeur. Outre ces ouvrages parurent encore de nombreuses exhortations, intitules : Exhortations chrtiennes,Exhortationsdiverses,Les uvres de lamour chrtien.Par ces crits il explique etinterprte les paroles de la Sainte criture, dmontre leur importance pour lme

    par rapport Dieu et lternit, et nous apprend en faire lapplication.

    Toute la socit littraire dalors tait prise de vertige philosophique ; partouton prtendait que, pour bien saisir ce que cest que la vie par rapport au monde

    transcendant et ternel, on ne saurait sarrter au christianisme dans sa formeprimitive. On devrait dabord lever la doctrine une sphre plus idale,dbarrasser de leur forme trop paisse les ides qui font la substance de cettedoctrine et les laborer par lintelligence. Par les ouvrages cits plus haut ainsi que

    par plusieurs crits analogues, S. Kierkegaard combattit ces ides et les effortsquon faisait pour les raliser. Prenant pour point de vue la science, il tablitlincontestabilit de la foi, et affranchit le christianisme de laspculation.

    La perspicacit de son esprit critique lui fit pourtant reconnatre que, mme lo le christianisme paraissait le mieux tabli, la communaut de lglise actuelle, leculte, et ltat des mes taient peu conformes lesprit chrtien tel que lexpose le

    Nouveau Testament.

    Par ses rclamations il esprait que persuads, les suprieurs de lglise etsurtout lvque principal se prononceraient. Kierkegaard et alors consacr toutesa productivit littraire dfendre ltat actuel, pourvu quon reconnt combien onstait cart de lidal, et quon ft de srieux efforts pour y atteindre.

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    Ses esprances furent dues. Il ne trouva aucun appui, ni auprs du clerg, niauprs de lvque. Celui-ci vint mourir et son successeur, tant un jour en chaire,fit mention du dcd comme dun vritable aptre, nouvel anneau ajout lasainte chane des martyrs. qui remonte jusquaux temps des aptres. S.

    Kierkegaard riposta au nom du christianisme, par un article trs vif dans un journalrput. Il faisait valoir que la position et la manire de vivre des pasteurs de lgliseles rendaient peu dignes du nom daptre.

    Ses protestations ne trouvrent aucun cho auprs du clerg qui se refusa reconnatre, combien les rclamations de Kierkegaard taient fondes. Dans unesuite de pamphlets intituls : Ltat actuel,Kierkegaard sattaquaalors impitoyablement et sans trve ce qui, selon son dire, tait le christianismeofficiel. Il accusait le clerg protestant, et surtout les pasteurs en Danemark detourner la chose en plaisanterie. Le clerg pourtant naccepta point le dfi.

    Muni de toutes les armes de lironie il continua nanmoins cette polmiqueacharne pendant toute une anne : la mort larrta en novembre 1855.

    Nous terminons cet expos en citant les paroles dun auteur catholique,relatives S. A. Kierkegaard : En lisant ses sermons foudroyants, on dit : un saintnet point parl avec cette morgue et la logique impitoyable dun cur dur, et puisvous ajoutez : il a failli tre un saint.

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    EN QUOI LHOMME DE GNIEDIFFRE-T-IL DE LAPTRE?

    Comment lexgse et la spculation errone sont-elles parvenues embrouiller lide chrtienne?

    La rponse catgorique est celle-ci : Elles ont tout simplement fait reculer leparadoxe de la foi chrtienne dans la catgorie de lesthtique, de sorte que toutterme chrtien qui, en restant dans sa sphre est essentiellement catgorique, en est

    prsent rduit servir darmes au bel esprit.

    Mais, si vous abolissez le paradoxe religieux ou que vous le rameniez lasphre de lesthtique, laptre ne sera quun homme de gnie et,cen est fait duchristianisme.

    Or, la science errone a jet la perturbation dans le christianisme ; de l lerreursest glisse dans llocution religieuse, et souvent vous entendez le prdicateurcompromettre bona fide le christianisme en appelant votre attention sur

    lesprit mditatif de Saint-Paul, sur ses belles mtaphores, et ainsi de suite. Rienque de lesthtique. Saint-Paul sadapte trs peu au titre dhomme de gnie. Il ny aque lignorance dun prtre incapable de discerner, qui savise de vanter laptre entermes esthtiques. En prodiguant des louanges laptre, peu importe sur quoi,elle pense toujours bien faire. La simplicit dun tel prdicateur tient ce quil na

    point appris penser rationnellement, sans cela il aurait su quen prodiguant deslouanges immrites ou en relevant des qualits non essentielles, il fait oublier son auditoire ce que vaut rellement laptre.

    Sans hsiter, ce phraseur niais appelle lattention sur le style de Saint -Paul ousur louvrage manuel dont soccupait laptre. Il fera valoir quaucun faiseur detentes nait jamais atteint la perfection avec laquelle sacquittait Saint-Paul.

    Pour ce qui est du gnie, Saint-Paul nest point lgal de Platon, ni deShakespeare ; il occupe une place trs infrieure parmi les auteurs des joliesmtaphores ; son style lui assigne une modeste place, et quant au faiseur detentes je ne saurais prciser quel degr de perfection lartisan est parvenu

    slever.

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    Je demande pardon au lecteur de cette plaisanterie ; on ne se dbarrasse dusrieux dun niais quen riant ses dpens.

    Reprenons notre srieux : Platon, Shakespeare et les faiseurs de tentes nont

    rien de commun avec laptre Saint-Paul.Lhomme de gnie et laptre diffrent qualitativement. Ce sont des notions

    qui appartiennent chacune sa sphre qualitative : lImmanenceetla Transcendance.

    1. Or, lhomme de gnie nous enseigne peut-tre du nouveau, mais sa doctrinesvanouit, nayant pour soutien que lhumanit qui se lest assimile. La notiondegnie disparat demme devant lide de lternit.

    Laptre nous enseigne, lui aussi, du nouveau, mais cest quelque chose de

    permanent, car cest le paradoxe et non pas une anticipation relative au procd

    du dveloppement de lesprit humain.

    Aussi laptre diffrera-t-il jamais des autres hommes de toute la distance

    que peut faire natre un paradoxe.

    2. Ce quun homme de gnie est il lest par lui-mme : par ce quil est en lui;laptre tient tout de par son autorit divine.

    3.La tlologie de lhomme de gnie nest quimmanente, tandis que celle delaptre est absolue et paradoxale.

    I. La mditation est essentiellement immanente tandis que le paradoxe et la foiforment eux une sphre qualitative. Au point de vue de limmanence, toutediffrence dans les relations de lhomme lhomme en tant quhomme nest quunlment devant la mditation vraie et ternelle. Valide momentanment, savalidit se rduit pourtant rien devant lidentit ternelle. Le gnie commelindique le mot (ingenium), linn, (prunus), la primitivit, loriginalit (origo),cest limmdiatet, le don de la nature.On est homme de gnie ds la naissance.Bien avant quil soit possible de juger si lhomme de gnie va ou ne va pointconsacrer Dieu ses moyens remarquables, il est homme de gnie et restera telquand mme il ne se rfre point Dieu. Lhomme de gnie va peut-tre semtamorphoser et parvenir avoir la conscience de lui-mme. Le motdeparadoxeappliqu la nouvelle ide que propage alors lhomme de gnie,nindique quun tat transitoire, lanticipation qui a pass en paradoxe pour

    svanouir ensuite. Lhomme de gnie devance de plus dun sicle, peut-tre, ses

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    contemporains, et ceux-ci finissent par adhrer au paradoxe qui, par consquent, neleur parat plus tel.

    Quant laptre il en est tout autrement, le mot mme nous le dit. On nest

    point aptre ds la naissance. Laptre est lenvoy de Dieu.Durant toute sa vie savocation est pourtant un fait paradoxal et par consquent sans identit avec sapersonnalit. LHomme aura atteint lge mur bien avant quil ait conscience de savocation comme envoy de Dieu. Il nen a pour cela ni plus desprit ni plus desagacit, etc. ; il reste tel qu il est, cela prs que, par le fait paradoxal il estmaintenant lenvoy de Dieu, et en vertu du paradoxe par consquent diffrent detous les autres hommes. La nouvelle doctrine prche par lui, est essentiellement

    paradoxale tant quelle est proclame dans le monde ; nulle immanence ne pourralassimiler. Il nen est point de laptre comme de lhomme de talent qui a pris lesdevants sur ses contemporains. Laptre est peut-tre regard comme un hommesimple quun fait paradoxal appelle proclamer la nouvelle doctrine. Que laspculation pense pouvoir assimiler celle-ci : elle ne vient jamais bout dassimilerla manire dont la doctrine se manifesta, le paradoxe, proprement parler, tant

    prcisment la protestation contre limmanence. La manire dont la doctrine semanifesta est pourtant le point essentiel qualificatif par excellence, ce quoi il fautfaire attention moins quon ne soit ou un imposteur ou un imbcile.

    II. Esthtiquement, on apprcie lhomme de gnie rien que par sa valeurintrinsque, tandis que laptre tient toute sa valeur de lautorit divine qui lui a ttransfre. Ici le point essentiel qualificatif cestlautorit divine.

    En analysant esthtiquement ou philosophiquement la substance de la doctrineje ne dduis point et ne dois pas dduire : ergo, lhomme qui prche cette doctrine,a t lu par une rvlation, donc il est un aptre. Par contre il faut dire : Llu quila doctrine a t confie par une rvlation, tire ses arguments prcisment delautorit que lui transmet cette rvlation. Il ne me faut point couter Saint-Paul

    cause de son esprit, mais je dois lui obir parce quil est llu de Dieu. Saint-Paulde faire valoir son autorit divine, que son auditoire la respecte ounon. Saint-Paulest un nigaud sil sen rapporte son esprit et quil entame une discussion purementesthtique ou philosophique sur lessence de la doctrine. Il faut quil fasse valoiruniquement son autorit divine par laquelle il empche la philosophie etlesthtique dattaquer insolemment la substance et la forme de la doctrine. Saint-Paul ne va point par de jolies mtaphores appeler lattention sur lui et ce quilenseigne. Il dira plutt : Peu importe que la mtaphore soit belle ou commune et

    suranne. Il te faut seulement bien retenir ceci : Ce que javance ma t confi parune rvlation. Cest Dieu ou le Seigneur Jsus-Christ qui te parle, et tu nauras

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    point laudace de critiquer la forme de sarvlation. Je ne puis, et je nose point tecontraindre lobissance, mais, me servant des liens par lesquels ta conscience terattache ton Dieu, je te rends responsable tout jamais de la manire dont tuenvisages la doctrine que jai prche dautorit divine, parce quelle ma t

    rvle.

    Lautorit est le point essentiel qualificatif. Vous sentez bien que, rien quedans les relations de la vie de lhomme ici-bas, il y a dj entre une ordonnance de

    par le Roi et les paroles du pote ou du philosophe une grande diffrencequandmme celle-ci disparat devant limmanence. Lordonnance de par le Roicommande avec autorit et prvient par consquent toute insolence de la part de lacritique ou de lesthtique. En ce sens lautorit du pote ou du philosophe estnulle. Leur proposition nest juge que selon son rapport lesthtique et la

    philosophie qui en apprcient la substance et la forme. La perturbation jete dansles ides chrtiennes provient de ce que dabord on a failli rvoquer en doutelexistence de Dieu, et quensuite on sestrebell contre toute autorit quon estvenu bout doublier ainsi que sa dialectique. Le Roi existe; on peut senconvaincre par les sens. Il pourra au besoin nous donner une preuve palpable de sonexistence. Mais il nen est point littralement ainsi pour ce qui concerne Dieu. Ledoute en a tir parti en traitant Dieu de pair avec tous ceux qui nont pointdautorit tels que les hommes de gnie, les philosophes et les potes, dont on

    nestime les paroles que par leur porte esthtique ou philosophique. Le poteparle-t-il bien le voil un gnie ; et vient-il trouver une expression tout faitheureusecest Dieu qui parle!!!

    Or, de cette faon on carte Dieu ; il est nul. Appelle-t-il lhomme par unervlation et lenvoie, muni dautorit divine, aux autres hommes, ceux-ci luidemandent : Qui ta envoy? Et lui de rpondre : Dieu. Pourtant Dieu ne lui vient

    point en aide comme le pourra un roi en le faisant escorter par des soldats ou desofficiers de police, ou en lui remettant une bague, ou sa signature royale qui estconnue de tout le monde. Bref, Dieu noblige point les hommes en leur dmontrant

    par des preuves palpables la validit de laptre. Le miracle noffre aucunegarantiematrielle, vu quil simpose notre foi. Et puis cest du non-sens que dedemander une garantie matriellede la validit de laptre (lment paradoxal dunrapport spirituel) ou de lexistence de Dieu qui est esprit. Donc, laptre prtendtre lenvoy de Dieu. On lui rpond: la bonne heure ! Nous allons examiner lasubstance de ta doctrine. Que celle-ci soit vraiment divine nous ladopterons etcroirons la rvlation : On donne ainsi le change et Dieu et laptre. Au

    lieu que lautorit divine de ce dernier allait prserver la doctrine de tout exameninsolent, on en critique la substance et la forme afin de savoir si elle provient dune

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    rvlation. Et, en attendant que, au premier tage, les savants dlibrent sur leproblme, Dieu et laptre vont faire antichambre dans la loge du portier. Au lieuque, par son autorit divine llu de Dieu met la porte tous les insolents quiraisonnent au lieu dobir, les hommes en font un candidat qui, lexamen pass, va

    colporter une nouvelle doctrine.

    Quentendez-vous par autorit ? Provient-elle de la supriorit de la doctrineou des ides sublimes quelle nous rvle ? En aucune faon ! Nulle estlautorit qui se sert dun rduplicatif pour indiquer que la doctrine est sublime, vuquil ny a plus de diffrence entre le matre et llve, pourvu que celui -ci pntre

    bien fond la doctrine et se lapproprie en entier. Mais pour avoir pntr bien fond la doctrine il ne sensuit point quon en ait acquis lautorit, qui constitue untitre, une qualification manant dune autre source. Voilpourquoi elle se fait

    valoir qualitativement ds que la substance de la parole ou de laction est traite

    par les esthtiques comme chose indiffrente.

    Je vais citer un exemple bien simple : Que deux hommes dont lun est ledpositaire de lautorit, disent un autre homme: Allez ! il y a identit quant laforme et la substance, et le dire de lun vaut autant que celui de lautre par rapport lesthtique, mais nullement par rapport lautorit. Celle-ci est nulle ds quellenest point le et quelle nindique rien quune exaltation de lidentit. Le

    matre pntr du sentiment davoir tout sacrifi pour la doctrine prche par lui,agira avec fermet ; lautorit ne lui vient pourtant point de la conscience davoirfait son possible. Sa vie ne nous prouve point lexcellence de la doctrine, car ellenen est quune simple rduplication. En rglant sa vie sur la doctrine il nedmontre point que celle-ci est excellente mais simplement quelle lui parat telle,tandis quun officier de police, quil soit un fourbe ou un honnte homme, atoujours de lautoritds quil entre en fonction.

    Pour mieux dfinir la notion de lautorit si importante dans la sphre

    paradoxale-religieuse, je poursuis la dialectique sur lautorit.La sphre delimmanence nadmet point lautorit ou ladmet tout au plus comme un lment

    transitoirequi svanouit dj dans la finit qui, son tour, va svanouir avectoutes ses diffrences.Devant la spculationtous les rapports de lhomme lhomme en tant quhomme, sont bass sur la diffrence quant lidentitimmanente, cest--dire sur une conformit essentielle. Une qualit spcifique nesaurait faire infrer quun homme diffre de tous les autres hommes. (Ce seraitmettre fin toute spculation comme cela arrive tout naturellement dans la sphre

    du paradoxe religieux et de la foi). Devant la spculation toute diffrence entrelhomme et lhomme en tant quhomme svanouit comme un lment de la totalit

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    et la qualit de lidentit. Dans les relations politiques, sociales,domestiques ou disciplinaires il me faut respecter la diffrence (lautorit) et luiobir ; la religion mdifie par la promesse que dans lternit les diffrences serontnulles, celles qui mhumilient ainsi que celles qui mexaltent. Sujet de mon roi je

    dois lui obir et lhonorer; il mest pourtant permis de mdifier religieusement parla pense que le ciel est ma vritable patrie et, si par hasard jy rencontre feu saMajest, je ne suis en aucune faon tenu la sujtion.

    Or, tel est le rapport de lhomme lhomme en tant quhomme.Mais entreDieu et lhomme il y a une diffrence ternelle et essentiellement

    qualificativequon ne saurait escamoter quau moyen dune spculation audacieuseet blasphmatoire, et la voici :

    Dieu et lhomme diffrent tant que dure llment transitoire de la vie terrestre.De son vivant lhomme doit obir Dieu et ladorer, tandis que dans lternit ladiffrence estconvertie en une ressemblance fondamentale qui fait lhomme lgalde Dieu ainsi que le sont la feue Majest et son valet de chambre.

    Or, il existe et existera ternellement une diffrence essentiellementqualificative entre Dieu et lhomme.Le rapport paradoxal-religieux(quon nesaisit que par la foi mais point par la spculation) nat de ce que Dieu confie unhomme lautorit divinepar rapport, bien entendu, la mission dont il est charg.Lhomme ainsi lu devient tranger la proportion : lhomme lhomme en tantquhomme. Il ny a aucune diffrence de quantit (homme de gnie, hommedespritetc.) entre lui et les autres hommes. Il sy rapporte paradoxalement, ayantune qualit spcifique dont limmanence ne saurait jamais reproduire lidentitternelle, cette qualit tant essentiellement paradoxale et contraire la spculation( laquelle elle succde au lieu de la prcder). Supposons quun homme ait conu

    par lui-mme la doctrine que nous apporte de par une ordonnance divine lenvoyde Dieu, ces deux hommes resteront pourtant jamais dissemblables, lenvoy de

    Dieu se distinguant de tous les autres hommes par sa qualit spcifiquementparadoxale (lautorit divine) ainsi que de lidentit essentielle qui est la notionconstitutive et immanente sur laquelle sont bases toutes les diffrences entre leshommes. La notion dAptreappartient la sphre transcendante du paradoxereligieux, et se manifeste par consquent dune manire qui diffre qualitativementde la relation entre laptre et les autres hommes, savoir: ils se rapportent lui parla foi tandis que la spculation est toujours dvolue limmanence. Pourtant la foiest tout aussi peu un lment transitoire que ne le serait la qualification paradoxale

    de laptre.

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    Or, pour ce qui est de lautorit dans les rapports de lhomme lhomme entant quhomme, la spculation nadmet aucune diffrencedurableoupermanente,lautorit, ntant quun lment transitoire.

    Pourtant lternit abolit toutes les autorits ici-bas ; mais, en est-il de mmequant la sphre transcendante ? Citons un exemple bien simple et cependant trsclatant : Le Christ dit : Il y a une vie ternelle, et puis une autre personne rpteles mmes paroles. Les deux nonciations se valent esthtiquement quant ladduction, le dveloppement, lesprit mditatif et labondance de penses ;toutefois elles diffrent qualitativement. Le Christ, lhomme Dieu, possde laqualit dautorit spcifique que lternit ne saurait assimiler, de mme quelle nesaurait rabaisser le Seigneur au niveau de lgalit essentiellement humaine. Cest

    pourquoi le Christ enseignait avec autorit, et il ny a que le blasphmateur quidemande si le Christ est un esprit mditatif. De cette manire on carte ( desseinou involontairement) le Christ en rvoquant en doute son autorit. Le censurantavec un sans-gne impertinent, et Le traitant en colier qui on fait rciter sa leon,tandis que cest Lui qua t confr tout pouvoir aux cieux et sur la terre.

    De nos jours trs peu de dissertations religieuses sont tout fait correctes quant ce point. Mme les meilleures dentre elles se mlent un peu de ce quon seraitsens dappeler une rvolte (inconsciente ou prmdite)en dfendant lide

    chrtienne et la soutenant avec la plus grande nergie mais malheureusement on nela classe pas dans des catgories rgulires. Citons un exemple, le premier venu.Un prdicateur[1]disserte sur le texte de Jean VIII 4741 : Celui qui est deDieu coute les paroles de Dieuet Si quelquun garde ma parole il ne mourra

    jamais ; et lorateur de continuer : Les paroles du Seigneur nous fournissent lasolution de trois grandes nigmes auxquelles de tout temps les hommes se sontrompu la tte pour en trouver le mot. Nous y voil. Les trois grandes nigmes quiont fait rompre la tte aux hommes nous ramnent aussitt la spculation etlesprit mditatif. Pourtant comment prtendre quune simple affirmationapodictique soit leffet de la mditation ? Laffirmation apodictique tient toute savaleur de celui qui la nonce; elle ne demande point quon cherche lapprofondir; il faut simplement la croire. Comment lhomme pourrait-il prtendreavoir trouv par la mditation une simple affirmation qui est le mot de lnigme? Ilsagit de savoir: Y a-t-il une vie ternelle ?On nous rpond : Assurment.Lesprit mditatif nest pour rien dans cette rponse. Celle-ci ne provient-elle pointdu Seigneur, ou que le Christ ne soitpas ce quil prtend tre, il faut toujours quelesprit mditatif y soit, si toutefois laffirmation est le fruit de la mditation.

    Supposons que Mr. X. vienne nous affirmer quil y a une vie ternelle. Cette simpleaffirmation ninduira personne appeler Mr. X. un esprit mditatif. Or, le point

    http://fr.wikisource.org/w/index.php?title=En_quoi_l%E2%80%99homme_de_g%C3%A9nie_diff%C3%A8re-t-il_de_l%E2%80%99ap%C3%B4tre_%3F&printable=yes#cite_note-0http://fr.wikisource.org/w/index.php?title=En_quoi_l%E2%80%99homme_de_g%C3%A9nie_diff%C3%A8re-t-il_de_l%E2%80%99ap%C3%B4tre_%3F&printable=yes#cite_note-0http://fr.wikisource.org/w/index.php?title=En_quoi_l%E2%80%99homme_de_g%C3%A9nie_diff%C3%A8re-t-il_de_l%E2%80%99ap%C3%B4tre_%3F&printable=yes#cite_note-0http://fr.wikisource.org/w/index.php?title=En_quoi_l%E2%80%99homme_de_g%C3%A9nie_diff%C3%A8re-t-il_de_l%E2%80%99ap%C3%B4tre_%3F&printable=yes#cite_note-0
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    essentiel nest pas laffirmation, mais bien le fait que cest le Seigneur qui lanonce. On confond les ides en se servant de la mditation comme dun appt

    pour attirer les hommes la foi. Le prdicateur qui sexprime correctement,dira : Nous en avons la parole du Seigneur : il y a une vie ternelle. Cela doit nous

    suffire, car le Seigneur a parl, non en esprit philosophique mais de par son autoritdivine.Passons outre et supposons que, sur la parole du Seigneur un hommecroie la vie ternelle. La foi le dispense alors de se creuser le cerveau par desmditations. Supposons ensuite quun autre homme veuille mditer srieusementsur la question de la vie ternelle. Ne pourra-t-il pas avec raison se refuser accepter la simple affirmation comme une rponse provenant de la mditation ? Ceque Platon nous dit sur la vie ternelle, provient dune mditation profonde etsrieuse ; voil prcisment pourquoi le pauvre Platon est dpourvu dautorit.

    Voici pourtant ltat de laffaire: le doute et lincrdulit, dont se nourrit lavanit de certains chrtiens, ont amen les hommes ne point vouloir obir lautorit. leur insu, peut-tre, lide de la rvolte sempare de lesprit mme desgens de bien, et les voil lancs dans le manirqui, vrai dire, est une perfidie

    prchant du sublime, du merveilleux quon entrevoitetc.De nos jours il fautqualifier daffectationllocution religieuse. Je ne fais point ici allusion lemploidexpressions onctueuses ni aux gestes, trop pittoresques peut-tre. Tout cela estmoins important, quoiquil soit toujours dsirable quon sen abstienne. Ce quon

    peut critiquer cest alors que la suite des ides de la dissertation religieuse soitaffecte, le prdicateur insistant sur des arguments sans valeur et exhortant la foi

    par des raisons incapables dtre lobjet de la foi. Nous qualifierons daffect lefilsqui dirait : Jhonore mon pre, non pas cause de ce quil est mon pre, mais

    parce quil est un homme de gnie, ou, que ses commandements soient ceux dunhomme desprit. Le fils se base tort sur un lment tout fait tranger aucommandement. Il obit en vertu de lesprit philosophique du pre, tandis quelobissance est djsape sa basepar la critique relative lesprit philosophique

    du commandement. Cest encore de laffectation que de rpter satit quil fautembrasser la foi chrtienne cause de lesprit philosophique de la doctrine. Laspculation moderne est atteinte daffectation pour avoir supprim dune

    part lobissanceet de lautrelautorittandis quelle prtend toujours treorthodoxe. Aprs avoir cit la parole du Seigneur, le prdicateur qui snoncecorrectement, ajoutera : Nous tenons cette parole de Celui qui, selon son dire,tout pouvoir aux cieux et sur la terre a t confr. Examine bien, mon cherauditeur, si tu veux obir cette autorit, embrasser la parole et y croire. Mais pourlamour de Dieu, ne vas point embrasser la parole parce quelle est spirituelle etmerveilleusement belle, car cest le fait dun impie, de vouloir critiquer Dieu. Or,

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    ds quon fait valoir llment de lautorit spcifiquement paradoxale, toutes lesproportions ont drog qualitativement ; embrasser la foi chrtienne serait alors uncrime audacieux.

    Comment laptre va-t-il maintenant nous prouver quil ait cette autorit?Fournir une preuve matriellenest point dun aptre; il na pas dautre preuve quesa parole. Il faut que cela soit ainsi, sinon le rapport du croyant avec lui est direct,mais non pas paradoxal. Dans le rapport transitoire de lhomme lhomme en tantquhomme on reconnat presque toujours lautorit son pouvoir temporel.Laptre na point dautre preuve que sa parole et, tout au plus lempressementavec lequel il souffre joyeusement cause de cette parole. Il dira simplement : Jesuis lenvoy de Dieu ; agissez avec moi selon votre guise ; quand mme vousdevriez me perscuter et me passer par les verges, je nai quune parole qui estcelle-ci : Je suis lenvoy de Dieu, et vous serez tout jamais responsables de lafaon dont vous agissez avec moi. Supposons quen effet laptre ft muni de

    pouvoir temporel, quil exert une grande influence et et des relations puissantesde manire pouvoir lemporter sur les opinions et les dcisions des hommes, sil fait valoir son autorit ce sera au dtriment de sa cause ; car il rend alors sesefforts identiques ceux des autres hommes, tandis que laptre tient toute sonimportance de son htrognit paradoxale, son autorit divine ne souffrant aucunealtration quand mme, selon le mot de Saint-Paul, les hommes ne lestiment gure

    plus que la fange quils foulent sous leurs pieds.

    III.Lhomme de gnie na quune tlologie immanente: celle de laptre estparadoxale.

    Cest bien de laptre plus que tout autre homme quon peut dire quil a unetlologie absolue. La doctrine nest point un problme rsoudre ; elle ne lui fut

    point communique pour lui personnellement, mais pour quil la divulgut avecautorit. Le facteur qui vous apporte une lettre, en ignore le contenu, il na qu

    vous la porter. Lambassadeur envoy une cour trangre, nest point responsabledu contenu de la dpche, il na qu la livrer fidlement; de mme laptre naqu vaquer sa charge. Laptre ne fut-il jamais perscut, il fait pourtantlimmolation de sa vieen restant pauvre tandis quil enrichit les autres.Il en estde lui, au figur, comme de la bonne mnagre qui assouvit peine sa faim pourfaire la cuisine toutes ces bouches affames. Dt-il vivre longtemps, sa vie se

    passera toujours de mme, les nouveaux auditeurs tant l, qui il doit prcher ladoctrine. Bien quune rvlation soit un fait paradoxal dpassant lintelligence

    humaine, on conoit pourtant quun homme soit appel par une rvlation divulguer la parole du Seigneur, et que lenvoy de Dieu agisse et souffre sans

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    trve et jusqu la fin de sa vie. Mais quun homme soit appel par une rvlation ne produire que des uvres littraires, faire lhomme desprit par moment et puisdevenir lditeur de ces doutes dun bel-esprit, cela touche de bien prs au

    blasphme.

    Pour lhomme de gnie il en est tout autrement. Le gnie na quune tlologieimmanente, il se dveloppe par lui-mme, le dveloppement du soi se manifestant

    par son activit. Le gnie aura alors sa valeur, et sera peut-tre dune haute porte,toutefois sans se poser tlologiquement par rapport lhumanit. Lhomme degnie vit en lui-mme ; il peut vivre ainsi en humoriste content de lui mme, sanstrop prsumer de soi, pourvu quil travaillesrieusement se former lesprit selonles inspirations de son gnie. Ne dites point que le gnie reste alors inactif ; ilachve peut-tre en lui plus de besogne que ne le feraient dix hommes daffaires,sans pourtant quaucune de ses oprations ait sonen dehors du gnie. Voil

    pourquoi le gnie est la fois humain et orgueilleux. Humain, en ce quil ne serapporte tlologiquement aucun autre homme, ne prsumant point quon ait

    besoin de lui ; orgueilleux, en ce quil se rapporteimmanemment lui-mme. Lemodeste rossignol nexige point quon lcoute; il a pourtant assez dorgueil pourignorer si on lcoute ou non. Ladialectique du gnie est une pierredachoppement, de nos jours surtout, o la foule, le public, ou un tre abstraitanalogue, tendent tout bouleverser. Un trs-honor public, la foule autoritaire

    demandent que lhomme de gnie mette en vidence quil existe pour eux ; ilsnenvisagent la dialectique du gnie que dun seul point de vue ; se heurtant lafiert, ils nen voient point lhumilit ni la modestie. De mme le trs -honor publicet la foule autoritaire se scandaliseront de lexistence de laptre. Bien que lamission de celui-ci soit exclusivement lintention des autres hommes, ce nest

    pourtant ni la foule, ni les hommes ou le trs-honor public, pas mme le trs-honor et trs-clair public, qui est son matre ou ses matres. Son matre cest

    Dieu, et de par son autorit divinelaptre commande et la foule et au public.

    Le contentement de soi, humoristique, de lhomme de gnie provient de lamodestie rsigne et la conscience de se savoir suprieur tous les autres hommes,tant la fois un objet de luxe et un ornement prcieux. Lhomme de gnie artiste,

    produit son chef-duvre, sans que pourtant ni lui ni son uvre naientleur en dehors deux-mmes. Ou bien, sil est auteur, il supprime tout rapporttlologique avec ses entours et se pose en humoriste comme pote lyrique. coupsr, le lyrique na point deen dehors de lui, et, que le pote crive une page oudes volumes de posies lyriques, peu importe pour la tendance de ses efforts. Le

    pote lyrique ne se soucie que de son uvre ; en la crant il se rjouit bien quelenfantement soitsouvent douloureux et laborieux. Mais il ne se rapporte point aux

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    autres hommes ; il ncrit point pour les instruire, ni pour les aider, ni pour fairerussir ses ides ; bref, il na point de ; et il en est de mme de tous leshommes de gnie. Le de laptre est leparadoxe absolu.