12
Lombalgie chronique… La lombalgie chronique est un état douloureux lombalgique habituel qui retentit sur la vie courante (sports, loisirs), la vie professionnelle et l’équilibre psychique. Elle se distingue du lumbago (discal) par l’absence de symptomatologie franche, les douleurs et l’examen rachidien étant variables d’un moment à l’autre. Elle reconnaît des causes diverses que sous- tendent trois grands facteurs: le facteur organique surtout dominé par les troubles statiques vertébraux au premier rang desquels l’hyperlordose lombaire mais aussi les fréquentes anomalies de la charnière lombosacrée qu’aggravent l’obésité, le syndrome trophostatique de la femme ménopausée, l’insuffisance musculaire, la sédentarité, les microtraumatismes professionnels ou sportifs… (tous ces facteurs aggravants s’associent de façon variable mais caractéristique chez ceux que A. Fournié a appelés « les Tarzans du dimanche »); le facteur médico-socio-professionnel, avec parfois le désir de trouver des avantages sociaux ou des indemnités rémunératrices surtout chez l’accidenté du travail; le facteur psychologique qui est habituel mais qui peut prendre des proportions majeures chez des personnalités fragiles et prédisposées (il est bien connu que le rachis est une zone privilégiée de somatisation surtout l’étage cervical et lombaire). Prendre en charge une lombalgie chronique est une situation particulièrement difficile à débrouiller. Il faut toujours la considérer sous les trois angles principaux (organique, médico- social, psychologique) qui constituent ce que nous appelons le « triangle des lombalgiques » dans lequel il faut bien comprendre que l’angle organique peut être le moins important. La prise en charge apparaît donc comme multidisciplinaire. Le dernier congrès de l’ISSLS, réuni à Miami en 2009, fait parfaitement le point sur ce sujet complexe. Professeur Bernard Fournié LETTRE D’INFORMATION (3 numéros par an) octobre 2009 N° 31 L A L E T T R E Éditorial Éditorial : B. Fournié 1 Vue par le rhumatologue : lombalgie chronique : B. Auvinet 1 Vue par le radiologue : imagerie dans la lombalgie chronique de l’adulte : J. Prère 7 Opinion : Ch. Mansat 12 SOMMAIRE A) Démarche diagnostique L’évaluation du patient débute par un interroga- toire,un examen clinique général,et plus particu- lièrement ostéoarticulaire et neurologique. Cette évaluation a pour but d’identifier une éventuelle cause secondaire,d’évaluer la lombalgie dans sa composante douloureuse,son retentissement sur l’activité physique quotidienne et professionnel- le, sans oublier la composante anxieuse et/ou dépressive. 1- Anamnèse Douleur et handicap sont 2 notions qu’il ne faut pas confondre.Le handicap représente l’impossi- bilité d’avoir un certain nombre d’activités,qu’el- les soient professionnelles, domestiques ou de loisirs. L’évaluation de la douleur doit comporter les prin- cipaux items suivants : la localisation de la douleur qui dans la lombal- gie commune est le plus souvent centrale en barre,ou à prédominance latérale, son caractère permanent ou intermittent, l’aggravation progressive ou non, l’intensité de la douleur,(éventuellement à l’ai- de d’une échelle visuelle analogique) le rythme de la douleur mécanique, inflamma- toire ou mixte, les conditions d’aggravation ou de déclenche- ment de la douleur, l’impulsivité à la toux,à l’éternuement ou à la défécation. Cette anamnèse de la douleur et du handicap sera complétée par une évaluation plus générale des Vue par le rhumatologue : lombalgie chronique La lombalgie chronique dite aussi commune est un syndrome douloureux chronique (continu ou récurrent) de la région lombaire qui dure depuis plus de 3 mois avec ou sans radiculalgies. Elle doit retenir toute notre attention,ne serait-ce que pour les coûts humains et socio-économiques qu’elle engendre.

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Lombalgie chronique…La lombalgie chronique est un état douloureuxlombalgique habituel qui retentit sur la viecourante (sports, loisirs), la vie professionnelleet l’équilibre psychique. Elle se distingue dulumbago (discal) par l’absence desymptomatologie franche, les douleurs etl’examen rachidien étant variables d’unmomentà l’autre.Elle reconnaît des causes diverses que sous-tendent trois grands facteurs: le facteurorganique surtout dominé par les troublesstatiques vertébraux au premier rang desquelsl’hyperlordose lombaire mais aussi lesfréquentes anomalies de la charnièrelombosacrée qu’aggravent l’obésité, le syndrometrophostatique de la femmeménopausée,l’insuffisancemusculaire, la sédentarité, lesmicrotraumatismes professionnels ousportifs…(tous ces facteurs aggravantss’associent de façon variable maiscaractéristique chez ceux que A. Fournié aappelés « les Tarzans du dimanche »); le facteurmédico-socio-professionnel, avec parfois ledésir de trouver des avantages sociaux ou desindemnités rémunératrices surtout chezl’accidenté du travail; le facteur psychologiquequi est habituel mais qui peut prendre desproportions majeures chez des personnalitésfragiles et prédisposées (il est bien connu que lerachis est une zone privilégiée de somatisationsurtout l’étage cervical et lombaire).Prendre en charge une lombalgie chronique estune situation particulièrement difficile àdébrouiller. Il faut toujours la considérer sous lestrois angles principaux (organique, médico-social, psychologique) qui constituent ce quenous appelons le « triangle des lombalgiques »dans lequel il faut bien comprendre que l’angleorganique peut être le moins important.La prise en charge apparaît donc commemultidisciplinaire. Le dernier congrès de l’ISSLS,réuni àMiami en 2009, fait parfaitement lepoint sur ce sujet complexe.Professeur Bernard Fournié

L E T T R E D ’ I N F O R M A T I O N ( 3 n u m é r o s p a r a n ) octobre 2009

N° 31

L A L E T T R E

Édi tor ia l

Éditorial : B. Fournié 1

Vue par le rhumatologue : lombalgie chronique :B. Auvinet 1

Vue par le radiologue : imagerie dans la lombalgie chroniquede l’adulte : J. Prère 7

Opinion: Ch. Mansat 12

SOM

MA

IRE

A) Démarche diagnostiqueL’évaluation du patient débute par un interroga-toire,un examen clinique général,et plus particu-lièrement ostéoarticulaire et neurologique.Cetteévaluation a pour but d’identifier une éventuellecause secondaire,d’évaluer la lombalgie dans sacomposante douloureuse,son retentissement surl’activité physique quotidienne et professionnel-le, sans oublier la composante anxieuse et/oudépressive.

1- AnamnèseDouleur et handicap sont 2 notions qu’il ne fautpas confondre.Le handicap représente l’impossi-bilité d’avoir un certain nombre d’activités,qu’el-les soient professionnelles, domestiques ou deloisirs.L’évaluation de la douleur doit comporter les prin-cipaux items suivants :� la localisation de la douleur qui dans la lombal-gie commune est le plus souvent centrale enbarre,ou à prédominance latérale,

� son caractère permanent ou intermittent,� l’aggravation progressive ou non,� l’intensité de la douleur,(éventuellement à l’ai-de d’une échelle visuelle analogique)

� le rythme de la douleur mécanique, inflamma-toire ou mixte,

� les conditions d’aggravation ou de déclenche-ment de la douleur,

� l’impulsivité à la toux,à l’éternuement ou à ladéfécation.

Cette anamnèse de la douleur et du handicap seracomplétée par une évaluation plus générale des

Vue par le rhumatologue :lombalgie chronique

La lombalgie chronique dite aussi commune est un syndrome douloureux chronique (continuou récurrent) de la région lombaire qui dure depuis plus de 3 mois avec ou sans radiculalgies.Elle doit retenir toute notre attention,ne serait-ce que pour les coûts humains et socio-économiquesqu’elle engendre.

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N° 31 - PAGE 2 - LA LETTRE DE L’OBSERVATOIRE DU MOUVEMENT

antécédents familiaux et personnels à la recher-che notamment de traumatismes physiques,psychologiques et socioprofessionnels ; sansomettre l’historique des traitements antérieu-rement prescrits.Lorsque l’origine vertébrale,le retentissementpsychosocial et les troubles allégués aurontété identifiés, l’évaluation par auto-question-naire apporte un complément. L’auto-ques-tionnaire de Dallas (DRAD) validé par lasection rachis de la Société Française deRhumatologie fait état d’éléments à la foisphysiques et psychologiques.

2- Étude clinique de la statique et de lamobilité rachidienneTroubles de la statique : il sera recherché àtitre systématique une inclinaison latérale,unehyperlordose lombaire,ou un effacement decette dernière.Cette attitude d’effacement delordose est à différencier de l’attitude dite asthé-nique,purement fonctionnelle.Les attitudes en baïonnette,correspondent àdes déséquilibres susceptibles de se modifierlors de la flexion ou de l’extension du rachisqui soit les faire disparaître,soit les exagèrent ;c’est toujours un signe d’organicité.Étude de la mobilité- Mouvements de flexion :il ne faut pas se suffi-re de la mesure de la distancemain-sol qui estla somme des mobilités coxo-fémorale etlombaire.Pour pallier à ceci,la mesure de l’in-dice de Shöber,qui consiste à dessiner un traitinférieur en regard de la première épine sacréeet un 2° trait 10 cm au-dessus.Lors du mouve-ment de flexion du rachis,la mobilité augmen-te de 5 cm en moyenne.

- Mouvements de déflexion : il convient d’ob-server comment le patient va se relever de laposition fléchie ; à la recherche d’un méplattemporaire,voire d’une inversion du rythmespinal (Mc Culloch).Lorsque le patient se relè-ve de la position penchée en avant genouxtendus,au lieu demaintenir les genoux en recti-tude pendant qu’il replace son tronc en exten-sion, il les fléchit pour maintenir la cyphoselombaire pendant tout le temps où le tronc setrouve en porte à faux,ce n’est qu’en fin deverticalisation qu’il remet ses genoux en exten-sion.- Mouvements d’extension- Mobilité latérale- Mouvements de rotation (sujet assis sur unechaise pour bloquer le bassin),ceux-ci rendentcompte essentiellement de la mobilité de lacharnière dorsolombaire

3- La recherche de points douloureuxRecherchés sur un patient en procubitus, ilssont de 2 types,soit vertébraux soit à distance.L’exploration des signes lésionnels vertébrauxporte sur les apophyses épineuses,les ligamentssur et inter épineux et sur l’épicentre desmassifs articulaires postérieurs.L’exploration des signes à distance,dans le tissucellulaire sous cutané se fait par la manœuvrede pincé roulé (R.Maigne) dans une zonecorrespondant au dermatome de la branchepostérieure du nerf rachidien examiné.Rappelons que l’un des temps fort de l’exa-men clinique pour le clinicien est de provo-quer la douleur spontanément ressentie parle patient et d’évaluer la mobilité.

4- Les compléments indispensables del’examen cliniqueL’examen clinique ne saurait être complet,sansl’examen des articulations sacro-iliaques etcoxo-fémorales,associé à un examen neuro-logique.La difficulté du temps de l’examen de lahanche et des sacro-iliaques réside dans le faitque les mouvements infligés au fémur peuvententraîner le bassin et par conséquence desmouvements parasites au niveau lombaire quivont induire en erreur le clinicien.L’examen neurologique, en l’absence dedouleur radiculaire et de symptômes urinai-res,il se limite à l’exploration des réflexes ostéo-tendineux ainsi que de la force musculairesegmentaire.Un examen plus complet s’im-pose si on note soit un déficit moteur,soit desréflexes diminués,soit des signes sphinctériens.Palpation de l’abdomen,des fosses lombaireset des gros troncs artériels,ces gestes doiventrester familiers à tout clinicien.Enfin,en fonction des orientations cliniques,une évaluation de lamusculature lombo-abdo-minale peut apparaître nécessaire.Au terme de cet examen clinique réalisé defaçon systématique,le clinicien aura identifiédifférentes orientations:lombalgie inorganique,lombalgie viscérale, lombalgies inflammatoi-res ;ou reconnu un dysfonctionnement méca-nique,plus ou moins associé à un caractèresocioprofessionnel et/ou dépressif.

B) Réponse corporelled’origine non lésionnelleUn certain nombre de symptômes et signes denon organicité ont été identifiés notammentparWaddell,nous citerons :� l’absence complète de période indoloredepuis des années,

� l’intolérance et inefficacité de tous les trai-tements prodigués,

� la douleur provoquée à la palpation super-ficielle non anatomique,

� le signe de distraction: lors de l’élévation dela jambe tendue la manœuvre provoque ladouleur ; à l’inverse la flexion du tronc enposition assise,les 2 genoux en extension nela provoque plus,

� un déficit neurologique discordant (moteur,sensitif).

C) Lombalgies viscéralesRarement un tableau de lombalgies chroniquespeut être en relation avec une étiologie viscé-rale,du fait d’une composante référée de ladouleur à point de départ viscéral.Celle-ci peutêtre d’autant plus trompeuse qu’elle s’associeparfois à une hyperalgésie locale et à unecontracture musculaire.En règle générale, la douleur somatique réfé-rée est en relation métamérique avec le vis-

ANTI-DÉPRESSEURS

ANTALGIQUESNIVEAU II

RELAXANTSMUSCULAIRES

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PARACÉTAMOLTENS

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Éducation et conseils

d’activité physique

La pyramide thérapeutique

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N° 31 - PAGE 3 - LA LETTRE DE L’OBSERVATOIRE DU MOUVEMENT

cère concerné tant et si bien qu’une douleurréférée du tractus génital féminin se localiseen région lombaire basse médiane,qu’unedouleur référée du tractus urinaire se localiseen région lombaire basse latéralisée au flanchomotéral,qu’une douleur à point de départgastrique et/ou pancréatique est référée versla charnière dorsolombaire,qu’une douleurréférée d’origine artérielle a des irradiationsdorsales ou pseudo-radiculaires (inguino-pubiennes).A contrario l’atteinte des articulations costo-vertébrale de la jonction thoracolombairepeut être à l’origine d’une douleur pseudo-viscérale.

D) Le minimumradiographiqueCelui-ci comporte des radios du rachis de faceet de profil,complété par un cliché du bassinde face (position debout).Les autres inciden-ces (3/4,flexion et extension de profil) ne serontjustifiées que s’il existe une suspicion cliniqueorientée.En règle générale il n’est pas nécessaire defaire d’autres examens radiographiques.L’indication d’un scanner ou d’une IRM doitrester exceptionnelle en fonction du contex-te clinique. Il n’y a pas lieu de prescrire demyélographie ou demyéloscanner.Il est recom-mandé de ne pas prescrire de nouveauxexamens dans l’année qui suit les premierssauf évolution d’un ou des symptômes,ou pours’assurer de l’absence de contre-indication àune nouvelle thérapeutique.

Rappelons que les études transversales ontmontré que les lésions d’arthrose vertébralesconstatées ne sont pas corrélées avec leslombalgies.Pire que cela,elles sont capablesd’égarer le diagnostic.La démarche diagnos-tique devant une lombalgie chronique est avanttout clinique.

E) Le minimum biologiqueL’usage nous amène à recommander unmini-mum biologique,orienté par les antécédentspersonnels et familiaux du patient. Il peutcomporter la recherche d’un syndrome inflam-matoire,d’une anomalie hématologique ourénale,d’un bilan phospho-calcique,d’unedysproteinémie.Le minimum biologique correspond à ladémarche du diagnostic différentiel qui doitcomporter la recherche d’une fracture de fati-gue,principalement chez les sujets âgés.

F) DémembrementétiologiqueLa lombalgie chronique exprime une souf-france du joint intervertébral tel qu’il a étédécrit par Junghans (figure).Celui-ci compor-te le disque intervertébral,les articulations zygo-matiques, les différents ligaments periverté-braux (interépineux, surépineux, intertrans-versaires, jaunes, longitudinal commun anté-rieur et postérieur).Bien qu’il soit acquis que la détérioration desdifférentes structures de ce segment mobilesoit consécutive à la dégénérescence initialedu disque,chacune des structures du segmentmobile,peut être à l’origine de lombalgies ditescommunes.

Insuffisance disco-articulaireConsécutive initialement à une dégénéres-cence discale et ultérieurement à une arthro-se vertébrale, c’est la première cause deslombalgies communes,différents facteurs favo-risants ont été identifiés,à chaque fois qu’unfacteur favorisant est découvert, son imputa-bilité devra être discutée :� la maladie de Scheurmann,d’autant plusqu’elle touche la charnière dorsolombaireet le segment lombaire haut,

� la scoliose idiopathique apparue lors del’adolescence. Indolore au cours de l’ado-lescence ; à l’âge adulte elle se décompen-se avec la survenue d’une arthrose,qui elle-même va engendrer une aggravation desdéformations,dont la dislocation qui s’ex-prime sous la forme d’une translation sur lesclichés de face qui a été corrélée à la douleurlombaire (Jackson),

� la bascule du bassin:cette bascule du bassinpar inégalité de longueur des membres infé-rieurs ne doit être prise en considération quesi elle est supérieure à 2 cm,et ne sera rete-

nue que si le patient souffre en positiondebout et qu’il n’existe aucune autre anoma-lie,pouvant expliquer la lombalgie,

� troubles statiques sagittaux : le spondylolis-thésis,acquis lors de l’enfance par spondy-lolyse isthmique,est rarement douloureuxpar lui-même, hormis les conséquencesbiomécaniques dégénératives, qu’il peutentraîner aux étages sus et sous-jacent.À ladifférence du spondylolisthésis par arthrosearticulaire postérieure qui représente uneforme aggravée d’arthrose disco-articulairepostérieure,et qui peut être responsable d’unesténose canalaire à lui seul,

� les anomalies transitionnelles,qu’ils s’agis-sent de lombalisation de la première vertè-bre sacrée ou d’hémisacralisation, ou desacralisation de la 5e vertèbre lombaire,

� la maladie de Paget : le plus souvent leslésions pagétiques sont asymptomatiques.Le problème qui se pose au clinicien est deconnaître le rôle de cette maladie de Pagetdans la genèse de la douleur,

� angiome vertébral :un angiome vertébral esttoujours non douloureux,dans des cas excep-tionnels,quelques lombalgies peuvent luiêtre rattachées,en relation avec atteinte asso-ciée de l’arc postérieur.

Participation de l’arc postérieurLa prévalence des lombalgies d’origine arti-culaire postérieure est estimée entre 20 et 30 %de l’ensemble des lombalgies.Mais aucuneétude n’a montré l’existence d’un syndromeclinique prédisant avec certitude la responsa-bilité de ces articulations dans la lombalgie.Enpratique le clinicien devra appuyer son diagnos-tic sur un faisceau d’arguments cliniques etd’imagerie ; tout en sachant que la causalitén’est jamais certaine,hormis le critère du goldstandard,c’est-à-dire la disparition de la douleuraprès anesthésie intra-articulaire.Néanmoinsil reste usuel de prédire une origine articulai-re postérieure quand la lombalgie est exacer-bée en extension,ceci étant déduit du fait quel’hyper extension augmente les contraintescompressives sur la surface articulaire posté-rieure. Cet élément sémiologique n’est pasformel,en effet l’hyper extension entraîne aussides contraintes d’étirement de la partie discovertébrale antérieure.La participation de l’arc postérieur a été miseen exergue par R.Maigne qui retient la possi-bilité d’un blocage ou d’un étirement doulou-reux des articulations zygomatiques,se tradui-sant par une souffrance du rameau sensitif dela branche postérieure du nerf rachidienconcerné. Les reconnaître peut conduire àincriminer un niveau situé plus haut que larégion lombaire basse, comme la charnièredorso-lombaire.Nous rappelons que toute lombalgie inexpli-quée doit faire rechercher une origine dorsale

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N° 31 - PAGE 4 - LA LETTRE DE L’OBSERVATOIRE DU MOUVEMENT

nulus fibrosus et le noyau.Cependant les dépôtscalciques peuvent aussi se localiser dans lesligaments péri vertébraux et en particulier dansles ligaments jaunes.

La hernie discale à forme lombaireC’est un tableau plus particulier aux adoles-cents,la modestie de la douleur contraste avecl’importance des signes cliniques caractériséspar un syndrome rachidien franc avec attitu-de en baïonnette et une limitation marquéede la mobilité en particulier de la flexion.Onremarque des éléments qui évoquent un conflitentre la hernie et la dure-mère : une douleurimpulsive à la toux,un signe de Lasègue lombai-re bilatéral,voire une douleur réveillée par laflexion du cou (cyriax).A contrario de nombreuses hernies discales,parfois calcifiées parfaitement asymptoma-tiques, sont de découvertes fortuites lors descanner ou d’IRM.

Tableaux particuliersLa discarthrose destructrice rapide (DDR,Revel)Par analogie aux arthroses destructives rapi-des de la hanche ou du genou,en relation avecune chondrolyse rapide, la DDR a été définiepar un affaissement discal > 50 % enmoins de2 ans.C’est un tableau clinique qu’il convientde savoir identifier par ses particularitéscliniques et ses difficultés thérapeutiques.- la duréede l’épisodede lombalgie permanenteou invalidante est de 9mois enmoyenne- la douleur est toujours estimée plus intenseque dans les lombalgies communes- les réveils nocturnes sont fréquents:2 fois sur3- la raideur matinale supérieure à une demi-heure est présente 2 fois sur 3,- il n’y a jamais d’altération de l’état général nide fièvre- à l’examen tous les mouvements lombairessont douloureux- la raideur objective reste modérée- Il existe une prédominance féminine,- l’âge moyen est de 50 ans,- l’aspect radiographique est caractérisé parune condensation en miroir sur les tableauxvertébraux adjacents aux disques concernés.Cette discolyse rapide porte sur L5S1,L4L5,L3L4 et plus rarement L1L2Ce tableau clinique antérieurement connu sousle nom de discarthrose pseudo-pottique devraamener le clinicien à éliminer un certain nomb-re de diagnostics différentiels tels que les infec-tions microbiennes ou bacillaires,en priorité,mais aussi beaucoup plus rarement : ochro-nose, spondylarthropathie destructrice desdialysés, spondylarthropathie ankylosante,sarcoïdose, infiltrations malignes discoverté-brales.

La poussée arthrosique congestivearticulaire postérieureElle constitue probablement une causefréquente de lombalgies d’origine articulairepostérieure à l’instar des articulations péri-phériques,c’est à ce stade que les traitements

locaux et les infiltrations intra synoviales decorticoïdes sont le plus efficaces.

La sténose canalaire lombaire présente 2 typesde manifestations cliniques, la douleur lom-baire et la douleur radiculaire ; il peut arriverque la première prime sur la seconde, ladouleur apparaît à la marche,cède au repos,sans radiculalgie.

Le syndrome trophostatiqueLe syndrome trophostatique de la post-méno-pause identifié il y a plus de 60 ans par De Seze,concerne des femmes de plus de 50 ans,souf-frant de lombalgies chroniques mécaniques,présentant une obésité,une lordose accentuéeavec bascule du bassin en antéversion,et deshanches en légère flexion.Les mouvementsd’extension du rachis sont douloureux.Dansce tableau, l’ensemble des éléments dusegment mobile peut être considéré respon-sable de la douleur.

Maladie de BaastrupCelle-ci fut rapportée à une lésion siégeantdans l’espace situé entre les 2 apophysesépineuses,qui entre en contact avec créationd’une néo-articulation ; la douleur est centra-le,le diagnostic est fait lors de l’examen palpa-toire,avec une douleur élective au niveau del’espace concerné.

Hyperostose ankylosante ou maladie deForestierLa forme classique de cette affection longtempslatente est notoirement plus enraidissante quedouloureuse.La radiologie fait le diagnostic.Il convient de rechercher des pathologies asso-ciées : diabète,hyperglycémie, tendance à lasurcharge pondérale et obésité.

Les camptocormies ou atrophie spinalemusculaire progressive du sujet âgéLa perte de lordose s’accompagne d’uneprojection antérieure du tronc,cette antéflexionest facilement réductible par appui sur unmeuble ou sur une canne ; elle disparaît endécubitus dorsal.La douleur est modérée ou absente mais lagêne peut être considérable.L’examen neuro-logique ne révèle aucune anomalie sauf si lacamptocormie est secondaire à une affectioncaractérisée par un syndrome extra pyramidalou une myopathie des ceintures.

La chrondrocalcinose vertébraleC’est à la radiographie qu’incombe d’identi-fier cette forme étiologique qui peut entraînerdes lombalgies,s’apparentant à la discopathieérosive avec pincement discal,irrégularité desplateaux vertébraux et vide discal.Les aspectsradiographiques classiques comportent desdépôts calciques siégeant au sein des 3éléments cartilagineux que sont la plaque carti-lagineuse recouvrant le plateau vertébral,l’an-

Une pathologie très fréquenteLa fréquence des lombalgies ne cesse de croître dansles pays occidentaux. En France, leur prévalence, ausens très large du terme, atteint 60 à 90%. L'incidenceen est de 5% par an, c'est-à-dire environ troismillionsd'individus. 13%des accidents de travail, 7 % des arrêtsde travail (soit 3,6 millions de journées de travailperdues par an) peuvent être rapportées à des lombal-gies. On estime que chaque nouveau lombalgiquecoûte entre 600 et 3000 euros à la collectivité et à 1,37milliards d’euros, le coût total annuel de la patholo-gie lombaire en médecine de ville. 30 % des actes dekinésithérapie, soit 1,1 million de séances de réédu-cation, sont prescrits chaque année pour la seulelombalgie.Cette grande fréquence n'est pas propre à la Francepuisque, aux Etats-Unis, le nombre de personneshandicapées par des douleurs de dos a augmenté,depuis 1956, quatorze fois plus vite que le chiffre dela population…Les sciatiques et autres radiculalgies compliquent 2à 4 % des lombalgies.

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N° 31 - PAGE 5 - LA LETTRE DE L’OBSERVATOIRE DU MOUVEMENT

L’hypermobilité sectorielleDu point de vue biomécanique ce syndromese caractérise par une hypermobilité entredeux vertèbres,mais seulement dans certainssecteurs,ce qui le différencie de la laxité.L’interrogatoire doit faire préciser les 2 facteursd’aggravation caractéristiques de ce syndrome.L’un statique,c’est le rôle néfaste de la posi-tion debout légèrement penché en avant,ditequart penché.L’autre est dynamique,la douleurapparaît en se relevant de la position fléchie,le patient présente alors parfois de véritablesélancements à types de douleurs brèves etbrutales (épisodes aigus d’instabilité).L’examen clinique doit s’intéresser principa-lement aux mouvements de déflexion.L’étude radiologique dynamique va permettrede rapporter les symptômes à une hypermo-bilité,qui apparaît sur des clichés pris en posi-tion extrême de flexion-extension et de flexionlatérale.Les signes radiographiques associent3 anomalies :� Excès de bâillements� Écrasement de la partie antérieure du disque� Glissement linéaire antéro-postérieur d’uncorps vertébral par rapport à son homolo-gue.

Rôle des muscles lombairesPlus que le syndrome de loge décrit chez l’a-dulte jeune sportif,le rôle des muscles dans lalombalgie chronique devra être abordé parleur rôle sur la mécanique rachidienne,c’estalors une étape du traitement de rééducation.

G) Lombalgies chroniques :aspects psychologiquesOn ne peut expliquer l’incapacité du lombal-gique uniquement en terme de lésion et dedouleur,il faut se référer à unmodèle plus largeintégrant les composantes physiques,psycholo-giques et sociales,connu sous le nomde syndro-me douloureux chronique (Bourault 1997).Que le médecin exerce seul ou au sein d’uneéquipe plurisdisciplinaire, il lui faudra savoirélargir son évaluation à un ensemble defacteurs somatiques et psycho-sociaux.Le fonc-tionnement pluridisciplinaire tel que le réali-sent les structures de prise en charge de ladouleur l’a intégré.Amener le patient à comprendre et à accep-ter le bien fondé d’une telle approche n’estpas toujours une tâche aisée et réclame unsavoir-faire.

H) La dépression masquéeOn parle de dépression masquée lorsque lesplaintes somatiques ou autres équivalentsdépressifs viennent exprimer une souffrancemorale indicible ; la présence de ces plaintesorganiques peut faire errer le diagnostic d’au-tant plus longtemps que les patients ignorent

qu’ils sont déprimés et souvent refusent lediagnostic de dépression.Tous ces symptômes ont en commun uncertain nombre de signes qui peuvent en fairereconnaître la nature d’équivalent dépressif,une description d’abord imprécise avec uneassociation inhabituelle de symptômes quisurviennent sur un fond anxieux avec irrita-bilité;on retrouvera une fatigue associée à deséléments d’inhibition psychiques et physiques;enfin les caractéristiques sémiologiques ontun maximummatinal.

I) Lombalgies dans le cadredes polyalgies

1/La fibromyalgieUne lombalgie chronique peut être la plainteprépondérante du patient fibromyalgique, leclinicien averti saura reconnaître cette entitépathologique qui associe douleur,fatigue,trou-bles du sommeil, ainsi que de nombreusesautres manifestations cliniques (Voir les lett-res de l’OdM).

2/Le syndrome douloureux myofascial régionalIndividualisées par Travel en 1952, il s’agit dezones douloureuses à différents endroits ducorps, la douleur est déclenchée par l’excita-tion de points gâchette.Ladouleur s’installeprogressivement,elle est sour-

de avecdesparoxysmes et souvent asymétrique.Plusieurs régions peuvent être douloureuses enmême temps,il peut s’y associer une raideur.Lors de l’examen clinique,c’est le point gâchet-te qu’il convient de déterminer, il permet deporter le diagnostic myofascial régional. Ladouleur référée reste toujours la même pourun point gâchette déterminé.Au niveau lombaire, elle suit les musclesparaspinaux et les muscles fessiers.Si le pointgâchette siège au niveau de la charnière dorso-lombaire,l’irradiation douloureuse évoque unsyndrome de Maigne.

Approches thérapeutiquesLa diversité des étiologies des lombalgiesméca-niques,le renvoi à l’image de soi,l’implicationde facteurs anxio-dépressifs et socio-profes-sionnels rendent compte de la diversité desméthodes thérapeutiques que le clinicien devrasavoir mettre en œuvre, en les adaptant àchaque patient en particulier.� D’autre part deux approches sont possibles :soit une approche symptomatique c’est-à-dire traiter la douleur et rechercher une récu-pération fonctionnelle lombaire sans objec-tif biomécanique particulier,

� soit avoir une approche que l’on peut appe-ler étiopathogénique en cherchant à locali-ser la structure anatomique et le mécanisme

COMPRESSION BRÈVE- visco élasticité

COMPRESSION PROLONGÉE- déshydratation- augmentation pression

hydrostatique

EAU

EAU

APESANTEUR- Hyperhydratation

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N° 31 - PAGE 6 - LA LETTRE DE L’OBSERVATOIRE DU MOUVEMENT

responsable de la douleur,en particulier afind’y adapter un traitement local.

Ces deux approches sont complémentaires.

L’objectif du traitement est de permettre aupatient de contrôler et de gérer sa douleur,d’améliorer sa fonction et de favoriser sa réin-sertion sociale et professionnelle.

Traitements médicamenteux

Par voie générale� Le paracétamol : c’est l’antalgique de pre-mière intention dont la posologie doit êtreoptimisée, jusqu’à 4 g/jour en 4 prises systé-matiques.Les anti-inflammatoires peuventêtres prescrits à visée antalgique pendant lesphases d’exacerbation douloureuses.Le trai-tement doit être de courte durée

� Les antalgiques de niveau II réduisent ladouleur lombalgique,ils peuvent être propo-sés après échec des antalgiques de niveau Ipour le traitement à visée antalgique delombalgie chronique.L’association paracé-tamol-codéïne semble la plus judicieuse.

� L’utilisation des antalgiques de niveau III peutêtre envisagée au cas par cas en respectantles contre indications ;ce type de traitements’adresse aux patients pour lesquels les autresmodalités thérapeutiques ont échoué et aprèsélimination d’un contexte dépressif.La duréedu traitement doit être limitée,l’arrêt du trai-tement doit être progressif.

� Parmi lesmyorelaxants,seul l’effet antalgiquedu tetrazepam a fait l’objet d’une étude; cetype de traitement peut être préférentielle-ment prescrit chez un patient ayant une recru-descence de la douleur pendant une pério-de qui ne devrait pas dépasser 2 semaines.

� Les anti-dépresseurs tricycliques ont un effetantalgique modeste chez le lombalgique ;regain d’intérêt pour les IRS-NA ;il appartientau prescripteur d’évaluer le rapport bénéfi-ce/risque quant à l’intérêt d’utiliser un anti-dépresseur à visée antalgique à l’exceptiond’un contexte de dépression.

� Les corticostéroïdes par voie générale nesont pas recommandés.

Par voie localeLes infiltrations représentent une possibilitéde traitement de seconde intention,et parmicelles-ci sont discutées les infiltrations intra-articulaires postérieures de corticoïdes,et desinfiltrations par le hiatus sacro-coccygien.

Traitement nonmédicamenteux

Traitement non invasif� Le repos au lit n’est pas recommandé� Lesmassages peuvent être proposés au débutd’une séance de rééducation en préparationdes autres techniques.

� La stimulation électrique transcutanée(TENS) semble avoir un effet antalgiquependant la période d’application, ils sontutiles dans les syndromes myofasciaux.

� La balnéothérapie peut avoir un effet antal-gique et sur la fonction à court terme.

� Éducation et information apparaissent parti-culièrement intéressantes afin de limiter laperception de l’invalidité liée à l’état delombalgie chronique,dans la perspective,d’un retour vers les activités.

� L’exercice physique est efficace à courtterme; il est impossible de conclure sur uneéventuelle supériorité d’un type d’exercicephysique par rapport à un autre; il faut noterque des résultats ne sont obtenus que chezles patients motivés et observant.

� Des manipulations vertébrales peuvent êtreprescrites pour le traitement à visée antal-gique,il s’agit d’un actemédical qui doit êtreprécédé d’un bilan clinique et paraclinique.

� Les tractions vertébrales ne sont pas recom-mandées.

� L’efficacité des écoles du dos n’est apparuequ’en association avec des séances d’exer-cices physiques ayant une efficacité antal-gique; les prises en charge multidisciplinai-res associant des séances d’éducation,deconseils et d’exercices physiques et une priseen charge psychologique sont recomman-dées pour le traitement à visée antalgique,fonctionnel et dans une moindre mesurepour le retour au travail des lombalgiqueschroniques.

� Le thermalisme peut être proposé dans laprise en charge d’une lombalgie chronique,car il a un effet antalgique et contribue àrestaurer la fonction.

� L’intérêt d’une contention lombaire reste àdémontrer dans la lombalgie chronique,ellene doit pas être un traitement de premièreintention.

� Les thérapeutiques comportementalesdoivent être associées à un autre traitement(exercices physiques,kinésithérapie…)

Traitement invasif� L’efficacité de l’acupuncture n’est pas démon-trée dans la lombalgie chronique

� La thermo-coagulation de la branche mé-diane du rameau dorsal postérieur du nerfspinal semble avoir un effet antalgique à courtet moyen terme sur une population sélec-tionnée par des tests de provocation;c’est untraitement d’indication exceptionnelle

� Il n’y a pas d’étude attestant de l’intérêt éven-tuel de l’arthrodèse dans la lombalgie chro-nique isolée ; elle est réservée à quelquesindications exceptionnelles.

ConclusionDu « Docteur, j’ai mal dans le dos » à l’établis-sement du diagnostic et la prise en charge

thérapeutique,c’est pour le médecin un véri-table défi.Pour y répondre efficacement,troiscomposantes sont nécessaires :� Avoir acquis une solide base de connais-sances,

� Connaître les subtilités du raisonnementmédical qui va comporter successivementla prise de données, l’abstraction et l’ab-duction c’est-à-dire à partir de la constata-tion de conséquences,aller à la recherchede leur raison d’être ; la classification noso-graphique provisoire des hypothèses ; laconfirmation par déduction et induction.

� Entretenir un climat de confiance avec lepatient

Enfin, il convient d’insister sur la nécessitéd’une part d’une prise en charge précoce,afind’éviter la pérennisation des manifestations,et d’autre part d’une approche pluridiscipli-naire pour répondre à tous les aspects psycho-logiques et socioprofessionnels dus à la chro-nicité des symptômes.

� B.Auvinet,Rhumatologue,Polyclinique du Maine,53010 LAVAL

Facteurs de risquesde chronicité

de la lombalgie

Âge supérieur à 45 ans

Antécédents de lombalgie ou dechirurgie lombaire

Présentation initiale de la lombalgie• Intensité de la douleur lombaire• Irradiation douloureuse auxmembres inférieurs• Importance du handicap fonctionnel

Prise en charge initiale de la lombalgie• Prise en charge tardive• Prescription de repos au lit strict• Arrêt de travail initial prolongé• Absence d'informations et de conseils

Contexte socioprofessionnel• Bas niveaux d'éducation et de ressources• Statut familial défavorable• Poste de travail avec importantes contraintesmécaniques

• Insatisfaction au travail

Contexte psychologique• Troubles de la personnalité (hypocondriaqueou hystérique)

• État de détresse psychologique• Anomalies de la perception du handicap• Stratégies adaptatives (coping) inappropriées

Contexte médico-légal• Accident du travail• Conflit médico-légal

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Mais la lombalgie chronique dégénérative,avecparfois,ou souvent,des irradiations tronquéesnon systématisées, sans radiculalgie électivetouche 70 % de la population à une périodede sa vie et devient certainement,à tort dirontbeaucoup, le motif de… 90 % des examensprescrits !Le premier rôle de l’imagerie reste bien sûrd’éliminer la lombalgie symptomatique devantune lombalgie subaiguë (voire chronique).

La lombalgie symptomatiquede l’adulte « chronique »,tumorale, infectieuse etinflammatoire

La clinique est théoriquement différente decelle de la lombalgie dégénérativemécanique(subaiguë plus que vraiment chronique,pas dedéclenchement mécanique,pas de sédationau repos et la nuit).Il y a des cas douteux (réels).Les recommandations de bonne pratique,quepersonne ne respecte plus,demandent de fairepratiquer en premier des radios standards.Devant une suspicion clinique,la première ligneest l’IRM.Juste quelques exemples.(On ne trai-tera pas ici des tumeurs osseuses primitives,des angiomes,des tassements vertébraux).Métastase (surtout si révélatrice) et myélome.L’infiltration médullaire du spongieux précè-de la lyse des travées osseuses du spongieuxet surtout la lyse des corticales du corps et del’arc postérieur.La radiologie ne dépiste queles cas avancés (La lyse pédiculaire métasta-tique classique en radio est très tardive,traduitune atteinte évoluée,comme la lacune lytiqueet le tassement secondaire). Le scanner estmoins tardif (petites lyses des travées) mais levrai dépistage et le diagnostic précoce relèventde l’IRM seule (infiltration précoce de lamoel-le osseuse hématopoïétique).Suspicion de discite et spondylodiscite subai-guë ou torpide devant une lombalgie subai-guë continue et fébrile.Les altérations en radioet scanner sont tardives (érosions osseuses,abcès péri vertébral) et précoces en IRM(œdème et inflammation osseux enmiroir –ondiscutera plus loin les similitudes et différen-ces avec certaines lésions dégénératives– alorsque les altérations visibles du disque sontmoinsprécoces).Dans les discites hématogènes spon-

tanées la contamination arrive par la plaquechondrale dans le disque avasculaire sansmoyen de défense.Dans les discites iatrogè-nes, la contamination est discale, mais lapremière réaction inflammatoire se fait d’aborden seule zone vascularisée (cartilage et os)avant la pénétration vasculaire inflammatoiredans le disque.Suspicion de rhumatisme inflammatoire axialchez un adulte,avec horaire inflammatoire.Ladiscussion des différences ou similitudes d’ima-gerie avec la pathologie dégénérative méritede s’y attarder :Pelvispondylite inflammatoire.Dans 95 % descas il s’agit de l’enthésopathie inflammatoiresans lésion discale spécifique. Les signescommuns à la radio et au scanner,érosion flouede la face inférieure des coins vertébraux(vertèbre au carré),début d’ossification fineet floue du ligament commun sont relative-ment tardifs et le syndesmophyte radiologiqueplus encore (menant ensuite à l’ankylose sansaffaissement discal). En IRM les signes sontplus précoces :œdème osseux localisé à l’in-sertion du ligament commun et de l’annulusexterne (séquences d’inversion récupérationT2) et hyper vascularisation inflammatoire(séquence T1 avec contraste).L’intérêt de cediagnostic précoce peut se discuter,mais c’estun bon modèle d’imagerie de lésion spéci-fique inflammatoire.Dans 5 % des cas, il s’agit d’une vraie disciteinflammatoire.La lésion initiale est unpetit granu-lome inflammatoire de la plaque chondrale,visible en IRM par une petite prise de contras-te localisée du cartilage et de la corticale adja-cente,plus tard en scanner puis en radio par

une petite érosion corticale à bords flous sanscondensation périphérique.La discolyse estensuite plus ou moins rapide.La libération defacteurs proinflammatoires par la lésion carti-lagineuse (cytokines,TNF alfa) provoque lasécrétion de protéases (par les cellules disca-les?) et le catabolisme rapides des glycanes etdu collagène II, constituants principaux dunucléus.On reviendra sur ce phénomène pourdiscuter de la pathologie dégénérative.Polyarthrite rhumatoïde.La colonne lombaireest peu touchée, et dans ce cas presquetoujours par arthrite articulaire postérieure(identique à une arthrite inflammatoire d’unediarthrose synoviale périphérique).La lombal-gie fréquente dans cette population fait inter-venir seulement la voie sensitive de la bran-che postérieure vers la racine somatique et lesanastomoses avec la voie sensitive sympathiqueantérieure.Le disque reste intact. Il ne s’agitpas d’une déstabilisation du segment mobilepar insuffisance de contention postérieure.Onne voit pas demobilité accentuée olisthésiqueou rotatoire. (Le disque est bien le principalstabilisateur du segment).

La lombalgie chroniquemécanique dégénérative

Si on respecte les recommandations de bonnepratique professionnelle,l’imagerie de la lombal-gie chronique sans radiculalgie,sans suspicionclinique de cause symptomatique,se limite àune radio face profil de la colonne lombaire.« L’imagerie nemodifie pas le traitement médi-cal et physique.Les lésions arthrosiques sontles mêmes chez les lombalgiques et les nonlombalgiques (c’est vrai).Montrer les lésionsanatomiques est délétère,aggrave le vécu dulombalgique. » (En particulier la mention dehernie discale non chirurgicale voire asymp-tomatique).À l’inverse : « Montrer des altéra-tions anatomiques courantes par imageriesophistiquée rassure le patient en écartant unelésion grave,et lui fait mieux accepter un trai-tement physique long, d’efficacité parfoisincomplète. » (Version cynique : 90 % deslombalgiques « exigent » une image,et pensentque le traitement seramieux adapté à leur cas)Disque,cartilage,plateau vertébral et os souscortical, ligaments,capsule articulaire posté-rieure,muscles forment un ensemble méca-nique assurant la mobilité avec absorption etredistribution des contraintes.Lors dumouve-ment,la précontrainte stabilisante se fait prin-cipalement par le disque (pression osmotiquedu nucléus et résistance à l’étirement et latorsion de l’annulus),moins par la contractiondumultifidus et la pression abdominale (sangleabdominale),peu par les articulaires posté-rieurs et les ligaments.Le vieillissement (donc l’altération des capa-cités mécaniques) commence très tôt au

…vue par le radiologue :imagerie dans la lombalgie

chronique de l’adulteL’imagerie « noble » ne s’intéresse habituellement qu’à la lombalgie symptomatique,tumorale, infectieuse et inflammatoire,aux radiculalgies sciatiques et crurales (conflitdiscoradiculaire ou ostéoradiculaire),à la claudication médullaire et radiculaire (sténosecanalaire et foraminale).

Fig 1 troubles statiques,anomalietransitionnelle et arthrose (asymptomatique)

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té du segment),est considérée comme insta-bilité anormale si le déplacement axial dé-passe 3 mm (Fig. 2). Ceci reste malheureu-sement souvent peu fiable en phase algiquechez l’adulte jeune (où il existe souvent unbloc fonctionnel antalgique).Par contre, rarement chez le jeune adulte,ousur rachis âgé très dégénératif,ces clichés dyna-miques peuvent illustrer une faillite de la stabi-lité segmentaire du disque mais aussi descompartiments articulaires et ligamentairespostérieurs (Fig.3).La déstabilisation sera tar-dive, souvent en déformation sténos ante,etfait discuter une stabilisation chirurgicale.Les variantes transitionnelles surtout asymé-triques surchargent les contraintesmécaniquessur l’étage sus-jacent.La valeur statistique restedécevante.Plus intéressants sont les troubles statiquesdorsolombopelviens dans le plan frontal (ma-jorent les contraintes mécaniques sur un côtéou l’autre),et dans le plan sagittal (hyperap-pui discal en réduction de lordose,hyperap-pui articulaire postérieur en hyperlordose).Cette analyse sur clichés de l’ensemble durachis et du bassin indispensable dans la sco-liose et avant arthrodèse reste de peu d’utilitédans la lombalgie commune.Dernier et gros défaut de la radiographie stan-dard : elle ne voit pas le disque,son anatomieinterne (en dehors du vide discal), sa formeexterne,et analyse très mal la qualité de l’os etsurtout l’appareil musculaire.

Le scannerIl analyse mieux que la radiographie standardle pincement intersomatique les plateaux verté-braux et l’arthrose articulaire postérieure,maison sait qu’il n’y a pas d’intérêt majeur dans lediagnostic de la lombalgie (Fig.4).L’intérêt du scanner c’est surtout la forme dudisque lui-même,la taille du canal et les fora-mens, et reste donc plus intéressant pour laradiculalgie que pour la lombalgie.La protrusion antérieure régulière de l’annu-lus discal qui accompagne ou pas les ostéo-phytes,reste sans valeur diagnostique dans lalombalgie.Les protrusions régulières postérieures de l’an-

niveau du disque,déjà à 15-20 ans,puis touchel’ensemble de ces éléments.Le vieillissement progressif et harmonieux,inéluctable,n’est pas symptomatique. (Pertede la souplesse et de l’amplitude des mouve-ments sans douleur.)Le vieillissement plus rapide ou disharmonieuxtouchant spécifiquement un des éléments ouplusieurs éléments de l’ensemble mécaniquepeut provoquer des douleurs mécaniques :inadaptation entre souplesse et amplitudeconservées des mouvements et défaut d’ab-sorption et de redistribution des contraintes.(Concept d’instabilité du rachis - non synony-me d’hyper mobilité- mais demobilité inadap-tée aux capacités des éléments mécaniques)Faut-il faire une imagerie? La réponse peut êtremédicalement:non.La pression (sociale?) obli-ge à dire que c’est l’imagerie la plus prescrite.Que peut-on dire d’utile ? On dispose de laradiographie standard statique debout ou endécharge,du scanner,de l’imagerie par réso-nance magnétique.On peut utiliser la radio-graphie standard en dynamique et dans cer-taines indications discutées de la discographie(qui n’est plus un examenmorphologiquemaisun test de reproduction d’une douleur présu-mée d’origine discale.)

La radiographie standard du rachis lombaireClassiques : hauteur de l’espace intersoma-tique,éversion des berges antérieures et posté-rieures des plateaux vertébraux (coins verté-braux),ostéophytes de traction sur l’insertiondes ligaments communs,ostéophytes d’appuidirectement sur la berge des plateaux,petitesou plus larges érosions osseuses des plateaux(assimilées grossièrement à des fractures ducartilage), sclérose osseuse sous chondrale(majoration des contraintes sur les vertèbrespar mauvaise absorption discale.Ceci parti-cipe à son tour à l’altération discale elle-mêmepuisque le disque est nourri à travers le carti-lage vertébral.On peut aussi apprécier l’ar-throse articulaire postérieure (arthrose clas-sique de diarthrose) grossièrement sur la faceet le profil,plus précisément sur les trois quarts(mais en doublant l’irradiation délivrée).Il y a un classement en stades du degré de ladégénérescence segmentaire essentiellementdiscale (stade 0:pas d’anomalie;stade 1:débutd’ostéophytes sans véritable pincement inter-somatique;stade 2:pincement intersomatiquemodéré et ostéophytes antérieurs;stade 3:pince-ment intersomatique plus franc,ostéophytes,sclérose osseuse sous corticale;stade 4:affais-sement discal et érosion des plateaux.) et luiassocier éventuellement un classement desstades d’arthrose des articulaires postérieures.Tout cela n’est pas vraiment discriminant.Onretrouve lesmêmes altérations chez les lombal-giques et les non lombalgiques.(Fig.1,tous leséléments statiques et morphologiques sont

présents chez un non lombalgique.Ce sontmes propres radios !)La seule différence est statistique : au mêmeâge civil,il y a plus d’altérationmorphologiqueet notamment de pincement intersomatiquechez les lombalgiques que chez les non lombal-giques (60 % contre 40 %).Plus significative :l’accentuation rapide du pincement inter soma-tique- déstabilisation rapide du segment mo-bile – sur des examens successifs.On a pu discuter deux éléments intéressants :Le vide discal central signale une perte de larésistance et de la précontrainte aumouvementplus que le pincement global.Il est parfois malévalué en radiographie statique simple,mieuxétudié sur la comparaison de cliché en char-ge et en décharge.Sur les clichés dynamiques du rachis,la mobi-lité segmentaire olisthésique (perte de rigidi-

Fig 2.listhésis en charge,absent couché sur lescanner

Couché Debout

Fig 3.Deux exemples de faillite de stabilitésegmentaire chez un jeune (en haut) et chez unarthrosique agé (en bas) en radio dynamique.

Fig.4.Scanner:pincements discaux,érosionsdes plateaux,protrusion discale,arthrosearticulaire postérieure,ostéophytes.

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nulus,plus ou moins prononcées ne sont pasnon plus un signe déterminant.C’est un signeprésent chez 20% et les asymptomatiques avant50 ans,50 % des asymptomatiques après 60ans.La seule différence est statistique avec unefréquence de 60 % chez les lombalgiques con-tre 40 % chez les asymptomatiques (Fig.4).Les hernies discales vraies ne sont pas nonplus un signe spécifique de la lombalgie.Onrencontre de façon systématique entre 20 et30 % de hernie discale chez les témoins asymp-tomatiques de plus de 40 ans.Il y a simplementplus de hernie discale chez les lombalgiquesque chez les non lombalgiques.La seule différence concerne la taille de lahernie discale qui est supérieure chez leslombalgiques que chez les non lombalgiques,et surtout le caractère trans-ligamentaire toute-fois difficile à affirmer au scanner,beaucoupplus fréquent chez les lombalgiques.(Les hernies médianes postéro-latéralescréent une irritation mécanique avec hyper-vascularisation sur le ligament commun verté-bral et l’espace épidural adjacent mais cecin’est pas vu en scanner. Les hernies forami-nales et extra foraminales sont responsablesd’une compression veineuse et d’une conges-tion veineuse autour du fourreau dural et desracines,mais ceci est également non appré-ciable en scanner.)L’intérêt donc du scanner est la sciatique ou laclaudication douloureuse des membres infé-rieurs,mais pas réellement la lombalgie.Lesconstatations du scanner pour la lombalgie pureont peu d’impact sur le choix thérapeutique.Le scanner analysemieux l’arthrose articulairepostérieure,mais là aussi sans spécificité,étudiepar contre les kystes synoviaux articulaires etles luxations articulaires qui sont toujours plusintéressants pour la sciatique que pour lalombalgie.

L’examen par résonance magnétiqueL’altération du centre discal:hyposignalT2 pardéshydratation, liée à la dégradation des gly-canes,l’augmentation du collagène II.Il s’agit du vieillissement normal,(90 % d’eauàmoins de 20 ans,80 % à 30 ans,70 % après 60ans,comme l’annulus discal qui reste stable à70 %) avec perte de la pression osmotiquehydrostatique (pas tout à fait parallèle à la bais-se de hauteur).Il n’y a pas de signification vraiment fiable àcette déshydratationmême si elle survient plusprécocement dans la vie.On retrouveenappréciation visuelle ouenmesu-re du temps de relaxation T2,22 % de disque« noir » chez les asymptomatiques demoins de30 ans et 100 % au moins à un étage chez lesasymptomatiques de plus de 60 ans (Fig.5).La seule (et grosse) différence entre les symp-tomatiques et les non symptomatiques est larapidité de la perte du signal hydrique centro

discal (et du pincement discal associé) chezun même patient.Les altérations de l’annulus discal.La perte depression osmotique hydrostatique entraîne unedistension de l’annulus qui devient convexede façon circonférentielle,antérieure,posté-rieure ou latérale favorisant les ostéophytes detraction.Ceci reste banal comme en radio et en scan-ner quand ceci est progressif.Comme la déshy-dratation centrodiscale, le pourcentage delombalgiques augmente seulement quand cephénomène est rapide.Les fissurations circonférentielles et tangen-tielles de l’annulus interne : elles sont visiblesquand le signal discal reste élevé chez lesjeunes, puis ne sont plus visibles quand ledisque est « noir ».Chez les personnes âgéesseule la discographie les met en évidence.C’est un signe de vieillissement normal dedisque,commun aux lombalgiques et aux non

Fig.6.Fissures circonférentielles de l’annulus…

… et fissures tangentielles de l’annulus

Fig.5.Déshydratation commune et pincementdiscal en IRM

lombalgiques,et n’ont pas de correspondancedouloureuse statistique en discographie.Cesfissures altèrent la qualité mécaniquemais defaçon progressive et ne s’accompagnent pasde néo innervation intradiscale (Fig.6).Les fissures radiaires de l’anneau fibreux inté-ressent la totalité de l’annulus et font commu-niquer le centre discal normalement avascu-laire et non innervé avec les espaces péridiscaux.Sur le plan mécanique l’interruptionradiaire des fibres annulaires altère de façonmarquée la capacité de résistance à la torsionde l’annulus (majoration de la laxité en torsionde 30 %) (Fig.7).Surtout elles permettent la pénétration intradiscale à partir de la périphérie discale de vais-seaux et de nerfs normalement absents ducentre discal,avec libération de facteurs proinflammatoires,prolifération demacrophageset de lymphocytes et sécrétion de protéasespar les cellules discales (catabolisme et déshy-dratation plus rapides).La valeur spécifique a été discutée.Tous âgesconfondus,il y a 30 à 50% de fissures radiaireschez les asymptomatiques.Mais chez l’adulte de moins de 40 ou 50 ans,avec peu de déshydratation et de pincementdiscal, 90% des fissurations radiaires sontprésentes chez les lombalgiques,et seulement10% des asymptomatiques, (avec une disco-graphie très douloureuse dans plus de 90 %).En IRM les fissurations les plus larges et méca-niquement les plus délétères sont en hypersi-gnal T2 franc,avec une prise de contraste plusmarquée traduisant la néo vascularisation intra-discale (Fig.8).Il faut encore avoir une visiondynamique.Dans cette population à mobilitésegmentaire conservée,la stabilité initiale (entorsion) est altérée.Surtout la discolyse seraplus rapide,avec inadaptatation à la fonction.

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Chez le sujet plus âgé à disque pincé et déshy-draté,moins mobile, elles sont présentes defaçon égale chez les symptomatiques et lesasymptomatiques (50%-50%),de toute façonplus difficiles à voir par la perte l’hypersignalT2 (certaines sont même en hyposignal T2quand il y a une contamination par le vidediscal).La signification mécanique n’est plusle même.La hernie discale en IRM.On sait qu’elle nesurvient jamais sur un disque initialement sainet complique la progression de fissurationscirconférentielles amincissant l’annulus etsurtout de fissurations radiaires.Comme en scanner il y a 30 % de hernie dis-cale chez les asymptomatiques (20 % asymp-tomatiques avant 50 ans 50% asymptomatiquesaprès 60 ans).Il n’y a pas de différence significative entre leshernies symptomatiques et les hernies asymp-tomatiques pour le signal de la hernie discale(hyposignal T2 ou hypersignal T2),ni pour laprise de contraste de la hernie elle-même.Les seules différences statistiques concernentla taille de la hernie discale,en général supé-rieure chez lombalgiques que chez les nonlombalgiques,et surtout la prise de contrastepéri herniaire,beaucoup plus fréquente chezles symptomatiques, traduisant une réactionauto-immune inflammatoire de réaction del’organisme (fait surtout des hernies trans-liga-mentaires) (Fig.9).Les plateaux vertébraux et l’os sous chondral.L’IRM n’apporte rien de plus que la radiogra-phie et le scanner pour les remodelages descoins vertébraux,les ostéophytes de traction etd’appui,et les érosions corticales des plateaux.Elle est surtout intéressante pour les remanie-ments signalétiques de l’os sous chondral.Si la présentation est identique en scanner(sclérose avec densification) elle est variableen résonance magnétique.Le Modic2 (sclérose graisseuse hyperT1 etT2)et leModic3 (sclérose densifiante hypoT1 etT2)sont une réaction osseuse,en général progres-sive,un peu plus fréquente chez les lombal-giques que les non lombalgiques dans lamêmetranche d’âge sans rien de spécifique (Fig.10).

Quand on peut disposer de documents radio-logiques antérieurs,ceci se fait progressivement,avec également une diminution de hauteurdiscale lente et progressive.Le Modic1 est un œdème osseux avec des fis-sures ou rupture du cartilage,des fractures destravées osseuses (équivalent à des fractures defatigue) une prolifération de vaisseaux et denerfs,et une augmentation de libération intraosseuse de facteurs inflammatoires sur lesanalyses histochimiques,Les formes larges en miroir sont relativementrares (5 % des lombalgiques) mais très spéci-fiques (96 % de lombalgie quand il y a unModic1) (Fig.11).Il s’agit d’une lésion du jeune et de l’âgemoyen,rarement retrouvée chez les plus âgés, avecquelques particularités cliniques (la douleurn’est pas seulement mécanique à la mobili-sationmais aussi présente au repos et souventle matin).Quand on dispose d’un dossier radiologiqueantérieur,ceci survient souvent dans un contex-te d’accélération du pincement discal.Le terme « discopathie inflammatoire » parfoisutilisé,est à éviter.Il ne s’agit certainement pasd’une inflammation initiale mais essentiel-lement d’un œdème avec nécrose et régéné-ration pseudo inflammatoire.D’ailleurs le disque lui-même n’est pas inflam-matoire et l’analyse anatomopathologique dudisque lui-même montre une augmentationdu catabolisme avec nécrose discale peu vascu-laire.Il n’y a pas de prise de contraste du disquelui-même en résonance magnétique.On observe le même type de phénomène surles plateaux vertébraux dans les suites d’unediscectomie chirurgicale,avec pincement ra-pide et une réactiondemême typedes plateaux.On peut considérer qu’il s’agit de la réactionosseuse à unemajoration rapide des contrain-tes mécaniques par discolyse accélérée.Il y a un phénomène d’auto entretien: la proli-fération de vaisseaux intra osseux s’accom-pagne d’un apport de macrophages et delymphocytes qui eux-mêmes sécrètent lesfacteurs pro inflammatoires migrant dans lesdisques provoquant à leur tour la sécrétion de

Fig.7.Fissures radiaires de l’annulus.Discograhie et IRM

Fig.8.Fissure radiaire de l’annulus en IRMavec produit de contraste.

Fig.9.hernie discale.Prise de contrastepériherniaire en IRM.

Fig.10.Modic2 graisseux asymptomatique.

Fig.11.Modic 1 large

protéases avec majoration de la discolyse(cercle vicieux).Certains phénomènes sontdonc communs avec les discites des rhuma-tismes inflammatoires axiaux mais l’originephysiopathologique est différente.Il y a par contre très peu d’association instan-tanée du Modic1 et des fissures annulairesradiaires discales.La fissure annulaire altère le

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fonctionnement mécanique mais le Modic1est une réaction osseuse à une discolyse ra-pide,probablement avec unemobilité segmen-taire et une souplesse encore conservée ce quirenforce l’idée que ce sont les modificationsrapides des conditionsmécaniques et non pasles altérations structurales elles-mêmes qui sontliées à la lombalgie.La durée spontanée est de deux à quatre ans(ou plus) probablement par ce phénomèned’auto entretien,et l’évolution se fait en règlevers le Modic2 ou le Modic3 de guérison sclé-reuse,la diminution des lombalgies,avec pertede souplesse relative,nouvelle réadaptationentre les qualitésmécaniques et la fonction.Lastabilisation chirurgicale (arthrodèse ou stabi-lisation semi-rigide) se discute,abrège la pério-de douloureuse avec évolution rapide vers larégression de l’œdèmeosseux ou souvent trans-formation en sclérose graisseuse de Modic2.Si le Modic1 complet et large est relativementrare (5 %) on observe beaucoup plus souvent(10 à 15%des lombalgiques) des petits Modic1plus discrets ou localisés souvent autour d’éro-sions des plateaux qui correspondent à des frac-tures de cartilage et ont la même signification,La durée de la lombalgie est plus courte.Outre ces petits Modic1, le phénomène deModic « 2 plus » (ou « 1,5 ») sclérose graisseuseplus ou moins dominante mais prise decontraste après injection partielle ou plus dif-fuse est également relativement correctementcorrélé à la présence d’une lombalgie.(Fig.12).Il s’agit soit de forme de cicatrisation progres-sive du Modic1 après deux ou trois ans (dimi-nution progressive parallèle de la lombalgie),soit d’une forme de novo, avec des plagesd’œdème et d’hypervascularisation dans unesclérose graisseuse préexistante déjà présente(Modic « mosaïque).Ceci correspond à desépisodes de déstabilisation dans une histoireclinique plus progressive. (Fig. 13).Dans cedernier cas de la lombalgie est moins intenseque dans le Modic1,et moins durable.Le Graal serait de pouvoir analyser la plaquecartilagineuse surtout chez le jeune (épaisseur,continuité,comportement signalétique) Celareste difficile encore en résonance magné-tique.On en approche par la prise de contras-te localisée surtout en regard d’érosion osseuse(fissure ou rupture de la plaque) et seulementen discographie par les fusées de contrastedans les fissures de plaque.Les articulaires postérieures en résonancemagnétique.L’analyse des surfaces articulaireset de l’état de la corticale osseuse est inférieu-re à ce qui peut se faire en scanner.L’hydarthrosecorrespond à une augmentation de mobilitésegmentaire (moins bonne stabilisation par ledisque).Le kyste synovial qui en est la compli-cation,reste plus intéressant dans la compres-sion radiculaire que dans la lombalgie.(Fig.14)On retrouve au contraire des articulations péri-

Fig.13.Modic « mosaïques » avant et aprèscontraste chez un jeune (en haut) et chez unagé (en bas).

Fig.15.Atrophie musculaire postérieure

Fig.14.Hydarthrose articulaire postérieure etkyste synovial en IRM

Fig.12.« Modic2 plus ».Avant et aprèscontraste,avec affaissement discal (en bas ounon (en haut).

phériques peu de réaction œdémateuse souscorticale.Les muscles.À la fois cause et conséquencede la déstabilisation.On étudie en IRM commeen scanner le volume musculaire,le degré dedégénérescence graisseuse mais pas la forcemusculaire.La corrélation est seulement statis-tique.À âge égal,même degré de dégénéres-cence discale et articulaire postérieure, il y aplus d’atrophie musculaire chez les lombal-giques que chez les non lombalgiques (dé-conditionnement) (Fig.15).

Au total l’imagerie est très riche dans la patho-logie dégénérative du rachis mais reste peusignificative (sauf pour la fissure radiaire largedu jeune,le Modic1 total ou partiel).La radiographie et le scanner sont de peu d’in-térêt,pour déterminer la cause de la lombalgie.(Même la hernie discale n’est pas une causeanatomique vraiment déterminante pour lalombalgie seule.)

Ce qui est le plus significatif,c’est la vitesse del’altération dégénérative.On peut se contenterd’une radiographie standard de profil à inter-valles espacés, et d’une IRM pour les deuxéléments spécifiques (fissure et Modic1 ou 2« plus »).Le symptôme (la lombalgie) serait l’inadap-tation momentanée (plus ou moins longue)de la fonction à la capacité anatomique (défautde stabilité avant restabilisation en perte demobilité).

L’illustration : le lombalgique par faillite dis-cale avec arthrose articulaire postérieurependant quelques années,qui va se restabili-ser sans déformation,guéri,ou en déformationavec subluxation articulaire,spondylolisthésisou rétrolisthésis dégénératif,sténose,qui souf-fre alors de sciatique ou de claudicationdouloureuse mais plus ou peu de lombalgies.

� Jean PrèreNouvelle Clinique de l’Union

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Lettre n° 32Endocrino-rhumatologie

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La douleur chronique non cancéreuse comme la lombalgie chronique ont fait l’objet de trèsnombreux travaux et recommandations diverses qui ne vont pas dans le sens souvent souhai-té des praticiens d’une clarification.La prévalence de la lombalgie chronique est estimée à 26,9 % et les cervicalgies (20,6 %).Sonévolution vers la chronicité est observée dans près de 10 % des cas à l’origine de 85 % descoûts médicaux directs et indirects.Elle concerne 15 % des accidents du travail et près de10 % des arrêts de travail.Le coût pour la collectivité est élevé.L’identification des facteurs de risque de passage à la chronicité a fait l’objet de plusieursétudes.Les facteurs les plus importants sont les antécédents de lombalgie,les facteurs socio-économiques, les facteurs liés à la prise en charge initiale (repos prolongé,arrêt de travail,médicalisation abusive,imagerie complexe),revendicationsmédico-légales (indemnisation,conflit avec l’employeur),facteurs psychologiques (anxiété,dépression,catastrophisme,kiné-siophobie soit près de 50% des cas).La complexité de cette prise en charge vient également de la non-corrélation entre l’invali-dité douloureuse lombalgique et les images observées (radiographie,IRM,scanner).La douleurlombalgique est complexe à la fois nociceptive,neurogène et psychogène.

Les objectifs de la stratégie thérapeutique se situent à 4 niveaux différents:�prise en charge de la douleur par des moyensmédicamenteux généraux et locaux et non-médicamenteux en respectant une juste hiérarchie,

� restauration de la fonction par une kinésithérapie adaptée,� accompagnement psychologique avec une juste évaluation des conséquences person-nelles,familiales et sociales,

� réinsertion professionnelle éventuellement avec contact précoce avec lemédecin du travail.

Le contrôle de la douleur est l’élément central, il impose avant tout de comprendre cettedouleur,de l’évaluer,de la classer et d’adapter une thérapeutique qui sera le plus souventmultidisciplinaire.Les antalgiques sont au centre de cette prise en charge avec une juste évaluation du rapportbénéfice/risque.Aucun traitement n’est totalement anodin, il faut donc minimiser la doseprescrite à la recherche du seuil d’efficacité et ne pas hésiter de passer précocement au niveauII en particulier le paracétamol codéine bien toléré dont la pharmacocinétique est assezproche,ce qui n’est pas le cas de toutes lesmolécules.Le niveau III n’a pratiquement pas d’in-dications dans la lombalgie chronique.L’utilisation de certains antidépresseurs tricycliquesou IRSNA permet d’optimiser l’action du traitement.Un terrain anxio-dépressif est retrouvédans près de la moitié des lombalgiques chroniques.

Au total une prise en charge et un traitement qui n’est pas simple mais qui doit être adaptéen fonction du contexte et qui peut évoluer avec le temps.L’analyse du comportement psycho-logique du contexte professionnel permet d’identifier les patients à risque et d’éviter peut-être l’évolution prolongée ou le passage à la chronicité.

Christian Mansat

Opinion