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IUFM DE BOURGOGNE CONCOURS DE RECRUTEMENT: Professeur des écoles La construction du sens en lecture d'oeuvre intégrale MONTAGNE Emilie Directeur de mémoire: M. Chiffre Année de soutenance: 2006 N° dossier: 0400338A 1

La construction du sens en lecture d'oeuvre intégrale · 4 Umberto Eco: Lector in fabula 8. M. Picard ajoute à cela la prise en compte de la sensibilité du lecteur, de la dimension

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Page 1: La construction du sens en lecture d'oeuvre intégrale · 4 Umberto Eco: Lector in fabula 8. M. Picard ajoute à cela la prise en compte de la sensibilité du lecteur, de la dimension

IUFM DE BOURGOGNE

CONCOURS DE RECRUTEMENT:

Professeur des écoles

La construction du sens

en lecture d'oeuvre intégrale

MONTAGNE Emilie

Directeur de mémoire: M. Chiffre

Année de soutenance: 2006 N° dossier: 0400338A

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Page 2: La construction du sens en lecture d'oeuvre intégrale · 4 Umberto Eco: Lector in fabula 8. M. Picard ajoute à cela la prise en compte de la sensibilité du lecteur, de la dimension

Remerciements:

En premier lieu, je tiens à remercier mon directeur de mémoire, M. Chiffre, pour toute

l'attention qu'il a apportée à la réalisation de ce mémoire, mais également pour le temps qu'il y

a consacré, ainsi que pour ses conseils avisés et la motivation qu'il m'a insufflée.

Je remercie également les enseignants de l'école élémentaire Champs Perdrix, à

Fontaine d'Ouche, pour leur très sympathique accueil et leur soutien permanent au cours de

ces trois semaines, ainsi que Jean-Baptiste Durand, pour m'avoir laissé sa classe et sa

confiance.

Enfin, un merci tout particulier à Madame Michèle Colin, directrice de l'école

élémentaire Petit Bernard à Dijon, pour sa gentillesse et pour son geste généreux, sans lequel

je n'aurais pas pu obtenir un livre pour chaque élève. C'est en grande partie grâce à elle si

l'étude de l'oeuvre a pu se dérouler dans d'aussi bonnes conditions.

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SOMMAIRE:

Introduction.....................................................................................p 4

I. Lecture et compréhension...............................................................p 5

1. Qu'est-ce que lire?.......................................................................p 5

2. Qu'est-ce que lire un texte littéraire?...........................................p 8

3. Qu'est-ce que lire une oeuvre intégrale?.....................................p 11

II. Que disent les I.O?..........................................................................p 12

III. Préparation de l'activité.................................................................p 14

1. Quelle oeuvre et pourquoi?.........................................................p 14

2. Ce que j'ai préparé et pourquoi...................................................p 16

IV. Mise en place en classe et analyse de pratique.................................p 22

1. Les extra-chats..............................................................................p 22

a) Séance 1............................................................................p 22

b) Séance 2............................................................................p 23

c) Séance 3............................................................................p 25

d) Séance 4............................................................................p 26

e) Séance 5............................................................................p 28

f) Séance 6.............................................................................p 30

2. Le genre fantastique et la lecture offerte.......................................p 32

a) La lecture offerte: La bibliothécaire..................................p 32

b) Le genre fantastique..........................................................p 33

Conclusion.......................................................................................p 34

Bibliographie..................................................................................p 36

Annexes..........................................................................................p 37

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INTRODUCTIONDans nos sociétés modernes, bien que l'image prenne une place importante dans notre

quotidien, surtout par le biais de la télévision, il n'en demeure pas moins que lire, et

comprendre ce que nous lisons, reste une nécessité.

Le Ministère de l'Education Nationale1 met d'ailleurs un fort accent sur ce domaine,

tant par le temps préconisé pour la lecture dans les programmes, que par les objectifs fixés

aux enseignants.

En effet, ces derniers ont pour mission d'apprendre à lire aux enfants, « de les conduire à une

autonomie de lecteur: lire des textes, c'est-à-dire comprendre des enchaînements

d'informations parfois complexes », mais également d'installer « le plaisir de lire ». Pour cela,

« il faut aux enfants, à la fois des compétences assurées – pour que la lecture ne soit pas une

activité pénible- et des raisons de lire: l'école doit transmettre les unes et les autres, et c'est à

cette condition qu'elle travaille à prévenir l'illettrisme. »

Le défi est donc conséquent mais on ne peut plus motivant à mes yeux.

Comment mettre en place l'étude et la découverte d'une oeuvre intégrale, de façon

interactive et efficace?

Qu'est-ce construire le sens? Comment mettre en place cette construction dans une

démarche de projet?

Comment aider ces enfants qui lisent (ou plus exactement déchiffrent) ce qui est écrit,

mais n'arrivent pas à en comprendre le sens? A quoi est-ce dû?

Mais également, comment donner véritablement le goût de lire? Sur quels dispositifs

pédagogiques concrets s'appuyer?

Ce sont toutes ces questions qui m'ont engagée à rédiger mon mémoire sur ce thème,

ainsi qu'une interrogation personnelle de longue date: comment est-il possible de ne pas

aimer lire?

La présentation de ce mémoire s'articulera autours de trois grands axes. Après avoir

clarifié le cadre théorique qui entoure le concept de lire, ainsi que les processus qu'il sous-

tend, je présenterai l'oeuvre choisie et la ligne de conduite que je pense adopter pour mener

cette étude, en justifiant mes choix. Par la suite, je détaillerai la mise en place d'une oeuvre:

1 Ministère de l'Education Nationale, Qu'apprend-on à l'école élémentaire, p 10

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Les extra-chats de Thérèse Roche, et analyserai mes actions, pour en déduire les

enseignements à en retenir.

I. Lecture et compréhension

1. Qu’est-ce que lire ?

Si le verbe lire appartient à la liste des cinquante verbes les plus utilisés en français, sa

définition a pourtant fait couler beaucoup d’encre, sans réellement réussir à mettre tout le

monde d’accord.

On peut notamment citer, par exemple, celle de Borel Maisonny : « Lire c’est

retrouver la sonorisation d’un signe écrit ».

En d’autres termes, pour lui, l’acte de lire se réduit à une maîtrise de signes graphiques,

permettant leur traduction instantanée en sons pour le lecteur.

Pour Fourcambert, en revanche, « lire c’est attribuer directement un sens au signe

graphique ». Ici, l’accent n’est donc pas porté sur la maîtrise du code graphique, mais sur la

recherche du sens.

Cependant, ces deux définitions, si elles ne sont pas fausses, me semblent assez

réductives, voire incomplètes.

De Forges, lui, tente d’en donner une plus complète, en y incluant une notion nouvelle : selon

lui, « la lecture est un processus sélectif qui implique l’utilisation de repères linguistiques

minima, sur la base d’une attente du lecteur, déterminée par son expérience antérieure de

lecteur. »

On retrouve ici l’idée de maîtrise des signes graphiques (sans laquelle il est vrai toute

lecture est impossible, si ce n’est la lecture logographique, c'est-à-dire la reconnaissance de

mots, souvent de marques, par la calligraphie de leur nom, par le logo de l'enseigne, mais

celle-ci est très limitée et ne peut donc être considérée à part entière comme de la lecture), et

on trouve également la notion de culture littéraire qui prévaut dans les nouveaux programmes

de 2002: « (le programme de littérature au cycle 3) permet que se constitue une culture

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commune susceptible d'être partagée, y compris entre générations. » .

En effet, c’est notre expérience de lecteur qui crée un effet d’attente par rapport à des

structures, des situations,…souvent propres aux genres littéraires auxquels on est confronté.

Ainsi, dans un conte, on s’attend à ce que le récit commence par « Il était une fois »,

qu’il se passe il y a « fort longtemps », qu’un personnage, souvent héroïque, soit confronté à

un problème qu’il tente de résoudre, que ce héros triomphe d’épreuves diverses, et que tout se

termine bien. C'est ce que l'on nomme un horizon d'attente.

Néanmoins, tous les contes ne suivent pas cette structure, c’est ce qui peut faire leur

originalité ; mais pour être en mesure de percevoir celle-ci , il faut tout d’abord connaître la

structure que l’on pourrait qualifier de classique.

Ainsi, il est difficile de nier que définir l’acte de lire n’est pas chose aisée, et nécessite

la prise en compte de nombreux éléments si l’on veut aboutir à une définition précise et

complète.

Si l’on se place maintenant d’un point de vue purement cognitif, lire met en place des

processus qui s’automatisent avec l’entraînement.

Identifier un mot écrit, c’est extraire de sa représentation graphique la prononciation et la ou

les significations qui lui correspondent.

Chez les lecteurs experts, l’activité mentale qui mène à l’identification des mots écrits

est réalisée très rapidement, de manière automatique et irrépressible. Stroop a mis en évidence

ce phénomène, que l’on appelle depuis de son nom « l’effet Stroop » : lorsqu’un mot est fixé

par un lecteur expert, celui-ci ne peut s’empêcher de le traiter.

En effet, devant un mot de couleur écrit avec une encre d’une autre couleur, l’identification

de la couleur de l’encre est ralentie par celle, irrépressible, du nom de la couleur.

Cette activité là est très différente des processus de compréhension, qui, eux, sont

intentionnels et contrôlés.

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Toutefois, avant d’en arriver là, une étape incontournable est celle de l’apprentissage

de la lecture. Celui-ci se fait principalement au cours préparatoire, mais il est amorcé en

grande section de maternelle, et poursuivi pendant tout le cycle primaire ainsi que le

secondaire.

On détermine principalement deux voies de lecture : la voie lexicale (également

nommée voie directe) et la voie phonologique (autrement nommée voie d’assemblage ou voie

indirecte).

Le processus lexical effectue un traitement simultané du mot, c’est-à-dire que

l'ensemble des unités (ici les lettres) qui composent le mot est traité en parallèle,

conduisant à l'activation de connaissances mémorisées sur la forme orthographique ou

sonore des mots appris.

Le processus phonologique, quant à lui, se caractérise par un traitement analytique

séquentiel du mot ou pseudo-mot (stimulus d'entrée). Il repose sur la connaissance des

relations orthographe/prononciation et met en jeu un système de règles de conversion

graphème-phonème.

Ces deux processus sont complémentaires, et peuvent être représentés ainsi:

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2 Valdois S, Bosse M-L : Lecture de mots et dyslexie : approche cognitive

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Au début, l’apprenti lecteur accède à la lecture par la voie indirecte, c’est-à-dire qu’il

déchiffre les mots lettre par lettre, les compare avec des mots proches pour le construire.

J.Giasson précise que le « décodage permet au lecteur débutant d’identifier de façon

autonome un mot qui ne fait pas partie de son répertoire de mots lus instantanément. » 3

Le lecteur expert, lui, ne décode pas chaque mot, mais reconnaît plutôt instantanément

les mots rencontrés : le mot a déjà été rencontré dans d’autres lectures et est donc identifié

rapidement (au niveau des lettres, du sens et de l’image acoustique) par la voie lexicale.

Le lecteur expert reconnaît donc la plupart des mots qu’il rencontre alors que le lecteur

débutant, faute de posséder un lexique mental suffisant, doit déchiffrer la plupart des mots.

Le seul moyen de passer du stade du déchiffrement quasi systématique, au stade de la

reconnaissance directe, est « simple » : c’est lire ; plus un lecteur novice lit, plus il va

rencontrer de mots et en mémoriser, et donc, moins il aura recours à la voie phonologique au

fil de ses lectures.

2. Qu’est-ce que lire un texte littéraire ?

Cette question amène tout d’abord à s’interroger sur ce qu’est un texte littéraire ? ce

qu’est la littérature ?

Le Petit Larousse définit celle-ci comme « un ensemble d’œuvres écrites ou orales auxquelles

on reconnaît une finalité esthétique ».

Un texte littéraire serait donc un texte ayant des qualités esthétiques.

U.Eco, pour sa part, considère un texte comme « un tissus d’espaces blancs,

d’interstices à remplir »4. Il y aurait donc ce que le texte exprime explicitement, et qu’il est

déjà nécessaire de comprendre, mais également « les blancs », ce qui est induit, à interpréter.

U.Eco affirme que le lecteur joue donc un rôle de « coopération interprétative » : il

s’approprie le texte de façon active en y apportant ses propres connaissances culturelles.

3 Giasson J: La compréhension en lecture 4 Umberto Eco: Lector in fabula

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M. Picard ajoute à cela la prise en compte de la sensibilité du lecteur, de la dimension

affective.

Selon lui, la lecture littéraire est un jeu interactif entre la participation (par exemple lorsque le

lecteur s’identifie aux personnages), et la distanciation ( le lecteur lit avec ce qu’il sait des

œuvres et apprécie, critique…).

Ainsi, l’idée selon laquelle le sens est dans le texte, le lecteur n’ayant plus qu’à le

transposer dans sa tête, est révolue, et remplacée par une autre, plus consensuelle, selon

laquelle le lecteur crée le sens du texte en se servant à la fois de celui-ci, de ses propres

connaissances, et de son intention de lecteur.

Giasson insiste sur le fait que la compréhension est fonction du lecteur (notamment

des processus de lecture qu’il met en œuvre), du texte (sa structure, son contenu et l’intention

de l’auteur), et enfin, du contexte (l’intérêt pour le texte, les interventions de l’enseignant, le

bruit…).

Cependant, le lecteur ne peut pas , pour autant, comprendre n’importe quoi d’un texte,

partir dans un « délire interprétatif » : il doit découvrir les repères donnés par l’auteur pour

construire le sens du texte, et non réinventer celui-ci comme il l’entend.

C’est pourquoi les jeunes lecteurs doivent apprendre des stratégies de bases, applicables à

tous types de textes, mais également des stratégies plus spécifiques au texte narratif : analyser

la structure de l’histoire, faire des liens entre les actions et les motivations des personnages.

Ces stratégies sont à mettre en place lors de la lecture de textes, mais aussi et d’autant

plus, lors de la lecture d’œuvres intégrales, car elles permettent de suivre le fil de l’histoire, de

ne pas « décrocher ».

La mise en place de stratégies sous-entend qu’en aucun cas, le lecteur n’est passif

devant son texte. Au contraire, c’est en étant actif, en s’interrogeant continuellement sur ce

qu’il lit que, d’une part, il va construire le sens du texte, et que d’autre part, il va être capable

de reconnaître qu’il rencontre, à un moment donné, un problème de compréhension.

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Il est alors en mesure de remédier à ce problème de compréhension, en s’interrogeant à

nouveau, en revenant en arrière…

Il est plus aisé de rechercher des indices quand on sait de façon assez précise ce que l’on n’a

pas compris, et à partir de quel endroit le sens se fait plus flou.

Les questions qu’un lecteur se pose le plus souvent sont :

- De quoi parle l’histoire ?

- A quoi ressemble cette personne, cet objet, cet endroit ?

- Qu’est-il arrivé jusqu’à maintenant ?

Elles permettent de faire ressortir les idées principales du texte, et ce qui est explicite.

Mais la compréhension d’un texte littéraire ne se limite pas à cela : elle requiert bien

davantage, notamment de comprendre la structure du récit (quand il s’agit d’un récit), et de

savoir faire des inférences sur les personnages, leurs intentions, leurs réactions, la situation,

etc…

Ces compétences s’avèrent essentielles pour assurer une bonne compréhension de ce qui est

lu, surtout dans le cadre d’une œuvre intégrale.

3. Qu’est-ce que lire une œuvre intégrale ?

D’après ce que l’on a dit précédemment, lire une œuvre intégrale c’est donner du sens

à ce qui est écrit et à ce qui ne l’est pas (en faisant des inférences), en s’interrogeant sans

cesse, ce qui a pour conséquence de rendre le lecteur actif.

La lecture d’œuvre suivie doit être perçue comme une enquête que le lecteur mène tout le

long : il traque le moindre indice, émet des hypothèses, les vérifie (ou non), fait des

déductions.

Pour cela, nous nous basons sur la structure du récit, et ce, même inconsciemment.

Je vais prendre un exemple extrait de Les textes littéraires à l’école de J.Giasson.

Voici un passage narratif :

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« Par un beau jour d’été, Anansi l’araignée se promenait le long de la rivière

lorsqu’elle vit son ami Tortue s’approcher avec un poisson. Anansi aimait manger du poisson

mais elle était trop paresseuse pour en pêcher elle-même. »

Pour nous lecteurs experts et familiers des histoires, ce court passage nous permet

d’anticiper qu’Anansi et Tortue seront les personnages principaux, qu’Anansi voudra se

procurer du poisson, mais qu’un problème surgira, et que la fin de l’histoire nous dira si elle

réussit ou non.

Pour faire ces anticipations, nous nous servons du schéma du récit.

Denhière définit celui-ci de la sorte : « En général un récit a pour caractéristiques de

commencer par poser un personnage principal ou des personnages et un cadre spatio-

temporel. Ensuite d’indiquer, par exemple, l’état du personnage principal : soit un manque ou

un désir. Et, pour que l’histoire ne soit pas trop triviale, il faut qu’il y ait une difficulté, ce

qu’on appelle une complication. Donc le récit va nous mettre en scène ce personnage, les

actions qu’il tente pour parvenir à ses fins, l’obstacle qui se dresse ou l’événement qui retarde

et enfin la façon dont va se résoudre l’épisode. »5

Les histoires présentent donc une structure qui permet de comprendre et d’anticiper les

faits du récit, d’où l’intérêt de sensibiliser très vite les jeunes lecteurs au repérage du

personnage principal, de l’élément perturbateur, des complications, et de la résolution.

C’est ce que je vais travailler principalement lors de mon stage en responsabilité : la

compréhension d’une œuvre littérale par l’étude du schéma narratif et l’analyse des

personnages.

Il me semble en effet que cette entrée ne doit pas être négligée car elle va permettre

une meilleure construction du sens, souvent même une identification du lecteur au

personnage, donc l’entrée de l’affectivité dans le rapport au livre, et une recherche d’indices

riche, permettant de prédire les actions, comportements et réactions de ce personnage.

5 Giasson J: Les textes littéraires à l'école

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C’est par ailleurs un excellent moyen d’enrichir leur vocabulaire et de travailler

l’inférence, car, parmi les indices donnés par l’auteur pour présenter les personnages, certains

sont explicites et faciles à repérer, d’autres en revanche, sont implicites et demandent

davantage d’attention.

II. Que disent les I.O ?

Depuis plusieurs années, les instructions officielles mettent l'accent sur la maîtrise du

langage et de la langue française, ne serait-ce que par la part importante qui leur est consacrée

dans les emplois du temps: en effet, « les temps de lecture et d'écriture quotidiens ne doivent

pas, au total, être inférieurs à deux heures. »

La littérature n'est pas en reste car il lui est attribué au minimum 4h30 par semaine et

au maximum 5h30, ce qui est conséquent.

Les nouveaux programmes, ceux de 2002 développent plusieurs orientations:

➢ Tout d'abord, l'initiation de l'enfant au patrimoine culturel qui est le nôtre; cela

comprend les oeuvres reconnues par l'histoire littéraire (on peut citer en exemple Le

magicien d'Oz de Frank Lyman Baum), mais également les oeuvres devenues usuelles

dans les pratiques , dont les oeuvres contemporaines plus récentes, par exemple

Cyber@ la sorcière du net de Jean Molla.

➢ Ensuite, donner une culture littéraire commune, qui se construit au cycle2 et au cycle3.

Pour cela, les instructions officielles mettent à la disposition des enseignants une liste

d'oeuvres classées par genres: albums, bandes dessinées, théâtre, romans et récits illustrés,

contes, fables, et enfin poésies.

Cette liste, riche et variée, est une liste de référence dans laquelle les enseignants peuvent et

doivent aller puiser afin de « faire découvrir chaque année à leurs élèves: deux classiques de

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l'enfance et huit oeuvres contemporaines de littérature de jeunesse, en choisissant un ouvrage

dans chacune des six catégories qui constituent la base d'organisation de la liste ».

➢ Apprendre à comprendre et à interpréter est également l'un des enjeux majeurs du

cycle des approfondissements. C' est une compétence qui est en partie visée dès le cycle2:

« être capable de comprendre les informations explicites d'un texte littéraire ou d'un texte

documentaire, appropriés à l'âge et à la culture des élèves ».

Au cycle des apprentissages fondamentaux, on ne parle pas encore d'interprétation,

mais plutôt de compréhension explicite des textes, car les enfants ne sont encore que des

lecteurs novices, pour qui la lecture est encore trop coûteuse d'un point de vue cognitif pour

pouvoir saisir l'implicite et faire des déductions. Sortir du texte est encore très difficile pour

eux, d'ailleurs, une autre compétence à atteindre pour eux, est d'être capable de « dégager le

thème d'un texte littéraire (de qui ou de quoi parle-t-il?) ».

En revanche au cycle3, les compétences visées sont beaucoup plus nombreuses et

pointues:

- Lire en le comprenant un texte littéraire long, mettre en mémoire ce qui a été lu

(synthèses successives) en mobilisant ses souvenirs lors des reprises.

En effet, « la compréhension des textes suppose d'abord un usage judicieux de la mémoire,

susceptible d'intégrer les informations qui sont données successivement au cours de la lecture.

Il faut conduire les enfants à ce va-et-vient incessant entre ce qui vient d'être lu du texte et ce

qui est en cours de lecture, sans lequel ne se constituent que des îlots de compréhension isolés

les uns des autres. »

L'objectif ici est donc de construire le sens tout au long de la lecture, de lier les actions, les

différents moments de l'histoire entre eux, pour que les élèves en saisissent la cohérence.

- Lire personnellement au moins un livre de littérature par mois.

- Participer à un débat sur l'interprétation d'un texte littéraire en étant susceptible de

vérifier dans le texte ce qui interdit ou permet l'interprétation défendue.

Il s'agit ici d'une compétence très riche qui requiert, outre le fait déjà conséquent d'avoir une

interprétation à donner d'un texte, d'oser prendre la parole, de défendre son point de vue par le

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biais d'arguments concrets à rechercher que sont les extraits de texte. Derrière ceci, il y a tout

l'apprentissage des règles de conduite à appliquer lors d' un débat, lié à la prise d'informations

dans un texte littéraire et à l'interprétation.

- Avoir compris que le sens d'une oeuvre littéraire n'est pas immédiatement

accessible, mais que le travail d'interprétation nécessaire ne peut s'affranchir des contraintes

du texte.

Cela rejoint ce qui est dit plus haut : si le sens d'un texte n'est pas toujours donné de façon

explicite, et nécessite une part d'interprétation, en revanche, on ne peut pas, pour autant, faire

dire à celui-ci ce que l'on veut, et partir dans un délire interprétatif.

III.PREPARATION DE L'ACTIVITE

Ayant effectué mon premier stage en responsabilité en classe de toute petite section,

petite section de maternelle, la mise en place de la lecture d'oeuvre intégrale et de la

construction du sens n'a pas été très évidente, dans la manière dont je l'envisageais.

La lecture d'un album simple par jour était réalisée, et la construction du sens passait

surtout par des échanges oraux au cours et après la lecture, visant à résumer l'histoire, à la

commenter, pour ceux qui le désiraient, et en étaient capables. Cette lecture d'album amenait

donc souvent à un travail de langage.

1. Quelle oeuvre et pourquoi?

La mise en place d'une lecture d'oeuvre intégrale, et d'activités autours, visant la

construction du sens s'est donc réalisée lors du deuxième stage en responsabilité.

Celui-ci s'est déroulé dans une classe de quinze CM2 de l'école Champs Perdrix, à Fontaine d'

Ouche.

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Il s'agissait d'une classe à forte hétérogénéité, dans laquelle un tiers des élèves était

suivi pour des difficultés d'ordre scolaires, et un autre tiers s'avérait excellent.

La majorité des lacunes résidait dans la lecture, la production d'écrits, et les mathématiques.

Le choix d'une oeuvre relativement courte (94 pages) et à l'écriture assez simple s'est donc

avéré pertinent pour m'assurer qu'elle soit traitée intégralement en trois semaines.

L'oeuvre choisie est Les extra-chats, de Thérèse Roche. Ce roman d'un auteur

contemporain appartient au genre fantastique, genre qui n'avait pas encore été abordé par la

classe au cours de l'année.

De nombreuses raisons ont orienté mon choix vers cette oeuvre:

– Tout d'abord, l'histoire: captivante, surprenante, riche en rebondissements, à la fois drôle

et inquiétante, laissant, à la fin, planer le doute et le mystère sur l'identité des « deux G ».

– Ensuite, les personnages: attachants, ambigus, étranges, parfois comiques et caricaturaux.

– En outre, le style d'écriture est à la fois abordable et très simple pour des enfants, car

l'oeuvre est écrite au début avec un langage assez oral, mais cela amène un fort contraste

avec celui usité par les deux nouveaux élèves de l'histoire, qui relève, lui, d'un registre de

langue soutenu, voire un peu suranné. Par ailleurs il est très intéressant de constater

l'évolution du langage employé par le narrateur (en l'occurrence le personnage principal,

un enfant de CM): au début de l'oeuvre, il écrit comme il parle, puis il progresse, pour, à la

fin du livre employer des phrases complexes, des mots appartenant au registre soutenu. Il

y a une réelle évolution à ce niveau là.

C'est donc un style d'écriture complètement adapté à un public d'enfants n'ayant pas un

répertoire lexical très étendu, car tout à fait compréhensible et faisant écho à leur langage à

eux, et qui, cependant, l'enrichit considérablement sous couvert de l'humour et de deux

personnages un peu « décalés ».

De plus, le récit est écrit à la première personne du singulier, avec une focalisation

interne: nous vivons, découvrons, ressentons donc les évènements en même temps que le

narrateur, ce qui facilite sans nul doute l'identification à celui-ci par les enfants, d'autant plus

qu'il s'agit d'un garçon de leur âge.

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– Par ailleurs, ce roman s'avère très riche en thèmes transversaux, qu'ils soient d'ordre plutôt

existenciels, pour les enfants (par exemple la question de l'argent de poche, de son

utilisation; de la relation avec les parents et les études,...), ou bien qu'ils soient davantage

philosophiques ( tels la peur de l'avenir en opposition à un passé rassurant, l'inquiétude de

la disparition des livres au profit de la communication par les ondes: télévision, radio,

Internet...).

– L'étude de cette oeuvre permettait également d'aborder celle d'un nouveau genre, le

fantastique, et d'en découvrir les caractéristiques.

– Enfin, les illustrations sont humoristiques, très réussies, et participent à la compréhension

de l'histoire, car tout en restant fidèles au texte, elles apportent vraiment un moyen de

plonger dans les pensées du narrateur.

Toutes ces raisons ont donc contribué à mon choix pour cette oeuvre.

2. Ce que j'ai préparé et pourquoi.

Lors de la préparation de la séquence, je me suis longuement interrogée sur ce que je

voulais que mes élèves retirent de l'étude de cette oeuvre, et j'en suis arrivée à la conclusion

que je désirais leur apprendre à se détacher du texte, à prendre des indices dans celui-ci, à ne

pas faire aveuglément confiance à l'auteur (et/ou au narrateur, suivant les cas), et surtout à

construire le sens de ce qu'ils lisent en s'interrogeant, en émettant des hypothèses, en faisant

des retours en arrière dans le livre, et liant les informations entre elles. Je voulais également

qu'ils prennent un réel plaisir à lire ce livre. La fiche de préparation de la séquence se trouve

en annexe 1.

Je vais donc commencer l'approche du livre par l'étude minutieuse de sa couverture et

du paratexte. Je tiens à ce qu'émergent: le titre de l'oeuvre, le nom de l'auteur, celui de

l'illustrateur, et celui de la collection. Je pense important de passer quelques instants sur ce

titre: Les extra-chats; titre pour le moins étrange, qui est un premier indice de ce que l'on va

rencontrer lors de la lecture car il laisse présager la présence d'extra-terrestres, et de chats, ou

bien, extra peut être employé dans le sens de génial, exceptionnel...

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Cela permettra également, je pense, d'amorcer une idée sur le genre du roman: fantastique, de

science fiction,...?

L'étude du titre, par le biais d'un travail d'hypothèses au sujet de celui-ci, me paraît une

étape indispensable à l'entrée dans un roman, pour donner une véritable envie de se plonger

dans l'oeuvre, car elle devrait déclencher chez les élèves ( et les lecteurs en général), l'envie de

savoir si leurs hypothèses sont exactes ou non. Je prendrai soin lors de la séance, de coucher

par écrit, sur une grande affiche, les hypothèses des élèves, afin que l'on puisse y revenir dès

que besoin.

La description de la couverture qui va suivre cette première étape, devrait les conforter

dans l'idée qu'il s'agit d'une une oeuvre fantastique, où l'on risque de rencontrer des

personnages, voire des phénomènes un peu étranges.

En effet, la couverture du roman représente une enfant rousse, au faciès félin, vêtue de façon

peu habituelle. Jusque là rien de très étonnant. Toutefois, si l'on prête attention à son ombre,

on découvre que celle-ci correspond à celle d'un chat!

A l'inverse, en face d'elle, se trouve un chat noir sur un banc, dont l'ombre représente

un enfant, qui ressemble beaucoup à la petite fille, à croire que les ombres sont inversées,

qu'elles se sont trompées de personnages!!

L'oeil étant désormais focalisé sur les ombres dans l'illustration, on constate que toutes

les autres ombres sont normales: à la feuille qui tombe correspond une ombre de feuille, le

banc a lui aussi sa « bonne ombre ».

Le caractère étrange de l'illustration ne porte donc que sur ces deux personnages.

A ce stade de la découverte de la couverture, je pense qu'il est intéressant de chercher

le lien entre le titre de l'oeuvre, et sa première de couverture: pourquoi cette illustration pour

ce titre? Quel rapport? C'est là encore un moyen de confirmer ou au contraire d'infirmer

certaines de leurs hypothèses.

J'ai ensuite l'intention de leur faire rechercher les chapitres et la table des matières dans

le livre. Ces éléments, assez récurrents dans les romans, peuvent apporter des informations sur

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l'histoire et permettre de nouvelles hypothèses. Or, il s'avère que l'oeuvre Les extra-chats n'est

pas découpée en chapitres: elle est écrite d'un bloc, ce qui est assez étonnant pour un roman.

Je souhaite donc faire s'interroger les élèves sur cette absence de chapitres et leur faire

émettre des hypothèses pour l'expliquer.

Nous apprendrons, à la fin de l'oeuvre, la véritable raison de cette absence de chapitres: ce que

nous lisons correspond au récit que Julien Douard a écrit, dans une rédaction, pour relater son

aventure avec les deux G.

Toutefois, il me semble peu probable que les enfants trouvent une telle explication.

La découverte devrait se poursuivre par le paratexte de la quatrième de couverture, et

notamment par le « résumé », ou plus exactement, par la « mise en bouche » de l'histoire: va-

t-elle, à son tour vérifier certaines suppositions émises? Sans doute.

Une fois tout ce travail achevé, il me semble qu'il est, enfin, temps d'entrer dans la

lecture, lecture que je ferai moi-même, sans qu'ils ouvrent leur livre, ceci afin de pallier les

différences de vitesse de lecture entre les élèves, pouvant aller de un à sept, ce qui est énorme.

La lecture magistrale permettra donc à tous d'en être au même point de l'histoire.

Elle est par ailleurs préconisée par les instructions officielles dans la mesure où

« entendre le maître [...] lire à haute voix peut aider à rendre plus clair un passage dont la

construction syntaxique est complexe, à se donner une meilleure représentation phonique d'un

mot mal maîtrisé, à alléger la tâche de prise d'informations »6.

Pour toutes ces raisons, je mettrai en place, le plus souvent possible, des situations de lecture

magistrale.

Avant de débuter la lecture, je demanderai aux élèves d'être attentifs, de repérer les

personnages principaux et les relations qu'ils entretiennent, ceci afin de poser les bases de

l'histoire, et pour qu'elles soient bien claires pour tout le monde.

Lors de la deuxième séance, nous resterons sur l'étude du passage allant de la page

sept à la page vingt et un, car c'est à mon avis un passage clé de l'oeuvre, là que nous

découvrons les deux nouveaux élèves Gudule et Gédéon, et que LA question, celle que nous

6 Documents d'accompagnement des programmes; Lire et écrire au cycle 3; p 10

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allons nous poser tout au long de l'oeuvre se présente: Gudule et Gédéon sont-ils des enfants

normaux ou des extra-terrestres?

J'ai donc prévu au cours de cette séance de travailler avec les élèves autours de cette

question, et d'utiliser pour cela un tableau (cf annexe 2), qui devra être complété par une

recherche d'indices. Il comprend deux colonnes: la première « Ce qui laisse penser que les

deux G sont des extra-terrestres » et la seconde intitulée: « Ce qui laisse penser que ce sont

des enfants normaux ».

Des groupes de quatre élèves seront formés, chaque groupe possèdera un tableau sur

une feuille de format A4, et aura à chercher dans le passage de la page sept à vingt-et-un, des

éléments étayant chacune des propositions, les reformuler brièvement avec leurs propres

mots, puis citer un bref extrait justifiant leur argument, entre parenthèses, et en indiquant la

page d'où il est tiré.

Je pense par là, non seulement travailler avec eux, la recherche d'indices, mais

également la façon de citer, de justifier ses arguments, car les enfants à cet âge là, ont encore

du mal à ne sélectionner que le morceau de phrase le plus représentatif, et ont tendance à citer

un passage entier. C'est aussi une compétence qui est attendue et travaillée au collège.

Cette phase de recherche sera suivie d'une phase de mise en commun aboutissant à un

tableau complété collectivement (cf annexe 4), qui devrait permettre de conclure qu'à ce

stade de l'oeuvre, il semble y avoir davantage d'arguments incitant à croire que Gudule et

Gédéon sont des extra-terrestres.

Pour la troisième séance, les élèves auront à lire de la page vingt et un à la page trente-

neuf jusque « dans la villa ». Je leur donnerai à lire personnellement, d'une part pour avancer

dans l'oeuvre, et d'autre part parce que ce passage apporte de nouveaux éléments sur Gudule

et Gédéon, tantôt étranges, tantôt relevant d'une grande banalité. De plus, ce passage relate le

stratagème que met en place Julien pour effectuer sa filature, ce qui donne un petit côté

policier à l'oeuvre. Enfin, il se termine à un moment de suspens fort: l'enfant est devant la

villa...que va-t-il y découvrir?

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Après avoir complété notre tableau de la séance précédente avec les nouveaux indices,

je leur demanderai d'émettre des hypothèses sur ce que Julien va faire, va découvrir, dans

cette demeure. Je passerai ensuite à la lecture magistrale de la « réponse » de l'auteur,

m'arrêtant à la page quarante-quatre, à « ...leur blouse? ».

Ce moment de l'histoire est très riche en suspens, en émotions; il est même pour le

moins déroutant! Il semblerait que Gudule et Gédéon soient...des chats!!

Je ferai alors un retour sur nos hypothèses afin de les valider ou de les invalider.

La séance s'achèvera, enfin, sur une mise en voix par les élèves, du passage qu'ils

avaient à préparer chez eux, en insistant sur les intentions à mettre en place dans la lecture:

parler de façon plutôt snobe pour les deux G, plutôt détendue pour Julien, faire ressentir les

émotions décrites par le narrateur telles que la stupéfaction devant la réussite scolaire

exceptionnelle des nouveaux, la suspicion qu'il a vis-à-vis d'eux, etc.

La quatrième séance commencera par une brève lecture magistrale jusqu'à la page

cinquante et la mise en évidence du fait que Julien est très préoccupé par sa découverte, qu'il

n'est pas du tout serein.

Il auront ensuite à lire seuls jusqu'à la page soixante, et à compléter une fiche en

rapport avec ce passage (cf annexe 5).

Je prévois une différenciation pédagogique, du fait de la présence d'élèves en grande

difficulté, en encadrant ce groupe d'élèves, pour les mettre sur la voie, ne pas les laisser seuls

et anxieux devant leur feuille blanche. J'ai d'ailleurs conscience qu'il y a, dans cet extrait, des

informations difficiles à comprendre dès la première lecture, qui demandent une grande

concentration, la capacité de reformuler les phrases et de se poser les bonnes questions pour

comprendre. C'est pourquoi, pour l'explication des galaxies Gutenberg et Marconi, j'ai prévu

un questionnaire à choix multiple, car il élimine le problème de formulation de la réponse.

En revanche, je trouve important qu'il y ait dans le questionnaire, des questions dont la

réponse n'est pas donnée mots pour mots dans le livre, des questions qui incitent à réfléchir, à

formuler, à produire. C'est le cas notamment, de la première question, qui cherche à vérifier

qu'ils ont compris l'évènement général du passage. Les questions numéros deux et sept ont

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pour but de leur faire inférer les sentiments des personnages à des moments précis, à eux de

mettre un nom précis sur ceux-ci.

Un travail sur le carnet de lecture est prévu pour les plus rapides, ainsi que la

correction collective de la fiche, en expliquant ce que désignent les galaxies Gutenberg et

Marconi.

Enfin, la séance se termine par la lecture magistrale du livre jusqu'à la page soixante-

quatorze. Les élèves auront à lire chez eux à partir de là, jusqu'à la page quatre-vingt-neuf

« ...madame Atlantis. ». Ils auront également pour tâche de titrer ce passage, qui est en

quelque sorte le dénouement de l'histoire, du moins, c'est ce qu'ils croiront sans doute.

La séance cinq débutera par un tour d'horizon des titres qu'ils auront trouvé pour cet

extrait du livre, puis je reviendrai sur la compréhension de ce passage.

Je m'attends à ce qu'ils n'aient pas perçu les indices de la supercherie, c'est pourquoi nous en

reprendrons la lecture ensemble, je les ferai s'arrêter sur les différentes incohérences et

contradictions, faire des retours en arrière dans le livre,... pour leur montrer que nous avons

été entraînés sur une fausse piste, que le sens premier, qui nous a été donné (a priori sur un

plateau), n'est qu'un leurre, et que la vérité est beaucoup plus subtile à décoder.

J'espère qu'ils arriveront d'eux mêmes à continuer ce travail de pistage, dans ce

passage, au minimum, au cours de leurs autres lectures, dans l'idéal.

La séance se terminera par un petit écrit sur le carnet de lecture, leur demandant leur

ressenti par rapport à la conspiration montée contre Julien, et la réaction qu'ils auraient eu,

eux, s'ils avaient été à sa place.

Enfin, la sixième et dernière séance, débutera par la lecture des dernières pages du

roman, suivie d'un questionnement visant à mettre en évidence, d'une part, la confirmation de

la supercherie faite à Julien, d'autre part, la présence d'éléments suspects qui continuent à

faire croire que Gudule et Gédéon sont des extra-terrestres. En outre, c'est dans ces pages que

l'on apprend que nous venons de lire la rédaction de Julien.

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Pour conclure, je leur demanderai de coucher sur leur carnet de lecture leur sentiment

vis-à-vis de cette oeuvre, ce qu'ils en ont pensé, s'il y a des mots ou phrases qui leur ont

particulièrement plu,.. Quelques productions seront peut-être proposées à la lecture à voix

haute, pour en faire profiter toute la classe. Si toutefois ce n'est pas le cas, je n'imposerai pas à

qui que ce soit de lire sa production, car je conçois le carnet de lecture comme quelque chose

de personnel, sur lequel je n'ai pas à intervenir.

J'espère également que des échanges seront possibles autour de l'oeuvre.

IV. MISE EN PLACE EN CLASSE ET ANALYSE

1. Les extra-chats

a) Séance 1

L'étude de l'oeuvre a débuté dès le premier jour du stage.

Un élément me semblait important: que les élèves jouent le jeu de la découverte pas à pas du

livre, sans devancer ce qui devra être fait en classe. C'est pourquoi j'ai abordé le sujet tout de

suite, en leur expliquant que s'ils ne respectaient pas le rythme que je donnais, l'étude de

l'oeuvre perdrait de son intérêt pour eux, dans la mesure où ils devront attendre ceux qui

n'auront pas lu jusqu'au bout. Je leur ai également signalé qu'ils risqueraient de tuer tout le

suspens de l'oeuvre pour les autres élèves.

Au début, ils se sont montrés sceptiques, surtout les quelques élèves qui, adoraient lire

et trouvaient frustrant d'être autant « balisés ». Ceux-là se sont, à mon avis, sentis un peu

brimés, entravés dans leur liberté et leur désir de lire. J'ai alors comparé l'étude de l'oeuvre au

football, jeu sacré pour eux, mettant en évidence que dans ce sport il y a des règles à respecter

pour le bon déroulement des matchs, et que si elles ne le sont pas, il y a tricherie.

Cette comparaison a eu un fort impact sur eux, et ils se sont alors prêtés au jeu de la

lecture de bonne grâce.

L'entrée dans l'oeuvre s'est faite de façon un peu lente, notamment au moment du

travail par hypothèses: j'ai eu le sentiment qu'ils n'avaient pas vraiment l'habitude de travailler

de la sorte, ou alors, autre explication possible, qu'ils manquaient d'imagination. Toujours est-

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il que l'émergence d'hypothèses n'a pas été aussi aisée et rapide que je ne le pensais, mais elle

a malgré tout, fini par aboutir (annexe 6).

De même, le lien entre le titre de l'oeuvre et l'illustration de la première de couverture,

a été un peu laborieux à mettre en évidence, peut-être parce qu'ils cloisonnent un peu trop

illustrations et écriture, et n'ont pas forcément tout de suite à l'esprit qu'ils sont liés par le sens.

Cependant, tout au long de cette séance, j'ai senti, avec une grande joie, leur intérêt et

leur curiosité croître vis-à-vis de cette oeuvre. J'ai eu la sensation d'avoir fait le bon choix.

Le lecture magistrale a permis de poser les bases de l'histoire: les personnages

principaux, leurs relations (amis, camarades,...). En outre, ils ont vite remarqué d'eux-mêmes

le style d'écriture, surtout par la surprise de trouver dans un livre, du langage relevant du

registre de langue familier. Cela s'est avéré d'autant plus marquant à leurs yeux, du fait du

contraste avec le langage employé par les nouveaux élèves qu'ils ont trouvé assez drôle, voire

étrange: « C'est sûr que c'est du français? Moi je me demande! » a déclaré un élève a propos

du langage des deux G.

b) Séance 2

La deuxième séance s'est avérée un peu plus laborieuse, pour plusieurs raisons:

➢ Tout d'abord, la consigne n'a pas été comprise tout de suite, et il a fallu la réexpliquer,

la reformuler. Je n'ai pas pensé à prendre un exemple que l'on aurait traité en collectif.

De ce fait, ce que j'attendais d'eux n'était pas très clair dans leur tête, ce qui explique

que plusieurs productions présentent des arguments non reformulés, non justifiés, ou

bien pas d'arguments du tout, seulement des passages recopiés.. (annexe 3).

Cela dit, je conçois maintenant que c'était une tâche très difficile, en amont même du

fait de transcrire les arguments.

➢ Ensuite, pour réussir cette tâche, les élèves devaient être capables de lire en

recherchant des indices en même temps. Avec un tiers de l'effectif en grande difficulté

en lecture, j'aurais dû prévoir une différenciation dans le nombre de pages à étudier,

pour réduire le champ de recherche attribué aux élèves ayant le plus de mal. J'ai

remarqué que, souvent, ces enfants survolaient rapidement le texte, sans voir les

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éléments qu'ils cherchaient. Peut-être aussi ne savaient-ils pas exactement ce qu'ils

cherchaient...ou plus délicat encore, COMMENT chercher!? Se pose alors un réel

problème devant lequel je me suis sentie démunie, et encore aujourd'hui, je n'ai pas de

réponse toute prête, si ce n'est qu' à mon avis, apprendre à chercher dans un texte, est

un travail de longue haleine, qui, s'il commence à l'école élémentaire, va néanmoins se

poursuivre au collège. Je pense que cela passe par la recherche d'informations

explicites dans un texte, par l'apprentissage de « la lecture en diagonale », par

l'entraînement à extraire l'idée principale d'un texte, puis d'un paragraphe... Autant de

compétences et de difficultés que je n'avais pas anticipées.

➢ De plus, le travail par groupes hétérogènes de quatre enfants a eu un effet pervers: tous

n'étaient pas à la tâche, tous ne participaient pas aux débats que pouvaient créer la

situation; souvent les élèves les plus à l'aise en lecture dirigeaient l'activité. Les autres

se laissaient porter et attendaient patiemment que cela se termine. Lors de mes

passages dans les groupes, j'essayais de stimuler les plus inactifs, de les mettre en

activité, mais je pense que cela n'a pas suffit.

Si c'était à refaire, je constituerai des groupes moins hétérogènes et prendrai avec moi

celui des élèves les plus en difficultés, pour les guider davantage au début, puis les

laisser travailler un peu plus en autonomie, afin de voir s'ils ont compris la démarche à

mettre en place, et me permettre à moi de circuler dans les autres groupes.

➢ En outre les intitulés des colonnes du tableau donné à compléter, n'étaient pas précis

et mal rédigés: « ce qui laisse penser » est une expression très vague et qui n'exprime

pas clairement ce qui était à chercher. De la même façon, l'utilisation d'abréviations

dans les intitulés ( « E.T » pour extra-terrestres) était peu judicieuse et constituait une

entrave à la compréhension. Lors de la séance suivante, j' ai donné à chacun le corrigé

établi ensemble, tapé, en ayant pris soin de reformuler les intitulés des colonnes.

Ainsi, « Ce qui laisse penser que les « 2G » sont des E.T » est devenu: « Les mots ou

expressions qui montrent que les deux G sont des extra-terrestres » (annexe 4).

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➢ Par ailleurs, le support que j'ai utilisé pour la correction, le même tableau que le leur,

mais au format A3, s'est avéré peu lisible pour la classe. Il aurait été plus efficace

d'avoir un support deux fois plus grand.

➢ Enfin, je pense ne pas avoir mené la correction de façon suffisamment dynamique, en

faisant vraiment entrer les élèves dans les débats. C'était pourtant un moment

privilégié pour eux d'apprendre à construire une argumentation.

J'aurais dû davantage créer un climat de débat réglé, en demandant à l'élève qui avance

un argument de le prouver par une référence au livre, référence à laquelle nous nous

serions tous reporté pour vérifier.

Cela aurait permis, d'une part, un retour au livre, une relecture des passages, et d'autre

part, de faire participer et de mobiliser toute la classe, pas seulement l'élève qui

propose une réponse. Cela aurait également permis au groupe classe de valider ou non,

d'une part l'argument, d'autre part l'adéquation entre la citation et l'argument en

question.

c) Séance 3

Lors de la troisième séance, que j' intitulerais « filature et découverte », j'ai pu me

rendre compte que tous les élèves avaient respecté la règle du jeu: ne pas lire au-delà de ce qui

avait été demandé. Avec beaucoup de mal pour certains qui m'ont avoué « mourir d'envie de

savoir la suite! »

Ils n'ont eu aucun mal à résumer ce qu'il se passe dans ces pages, et avaient dans

l'ensemble assez bien compris ce passage. Je mettrais toutefois un petit bémol à cela: certains

n'avaient pas saisi la ruse qu'avait mise en place Julien pour s'octroyer le temps nécessaire à sa

filature: le mensonge à ses parents et son ami comme alibi.

Les élèves ont également trouvé d'autres éléments venant compléter le tableau de la

séance deux, ce qui me laisse penser que malgré tout le mal que j'ai eu et mes lacunes dans la

mise en place lors de la séance précédente, ils ont su en tirer quelque chose, au moins à l'oral.

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J'ai pu cette fois diriger le débat comme j'aurais dû le faire la veille, et j'ai senti une plus

grande cohésion dans le groupe et un véritable investissement intellectuel, concentrationnel, et

même affectif.

Lors de la phase d'hypothèses, j'ai également senti un mieux: elles étaient plus

nombreuses, plus inventives que lors de la première séance, et pourtant, pour la plupart

plausibles. Une plus grande fluidité s'est donc faite sentir à ce niveau là.

Peut-être avaient-ils commencé à s'interroger chez eux, après avoir arrêté la lecture comme

convenu. Ils étaient réellement captivés et attendaient avec impatience de découvrir la suite du

récit, suite que je leur ai lue.

Pendant la lecture, pas un son n'a été prononcé, mais j'ai pu intercepter des échanges

de regards d'étonnement, d'incrédulité face à la chute de ce passage. Ils vivaient complètement

l'histoire, l'identification au personnage de Julien était complète.

Le retour à nos hypothèses s'est fait dans l'effervescence: pas un ne s'attendait à un tel

dénouement.

Enfin, ils ont mis en voix le passage qu'ils avaient à lire chez eux: j'ai fait dire

plusieurs fois de suite certaines phrases qui étaient très propices à une interprétation marquée,

chacun la faisant telle qu'il la ressentait, et cela a abouti ensuite à une légère progression dans

l'interprétation. Pas sur toutes les phrases du texte évidemment, mais sur des phrases qu'ils

identifiaient comme plus théâtralisables que les autres. Par exemple, à la page vingt-deux

« - Pour que tu ressembles à une pie? Ah non, merci, tu jacasses assez comme ça! » ou encore

« ça m'agace! » page vingt-cinq,...

Cette troisième séance s'est donc très bien déroulée.

d) Séance 4

La quatrième, maintenant, que je titrerais « les confidences », a été elle aussi assez

satisfaisante: je leur ai distribué la fiche, nous avons lu et explicité chaque question, précisé

sous quelle forme la réponse était attendue: une phrase, une croix devant la réponse qui leur

semble correcte, ainsi que la présentation d'une citation pour justifier sa réponse.

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Je n'ai finalement pas mis en place la différenciation pédagogique prévue dans la

mesure où, jusqu'ici, l'oeuvre avait été bien comprise, et où je connaissais la difficulté de

l'extrait, qui était de comprendre ce qu'étaient les galaxies Gutenberg et Marconi. Le reste du

passage s'avère être peu résistant. Je voulais par ailleurs, me rendre compte réellement de

leurs capacités.

J'ai donc opté pour une aide en pointillés: je passais dans les rangs, les observais

travailler, avec d'autant plus d'attention pour les enfants en difficultés, et me suis aperçue que

mon pronostic était vérifié.

Dans le fond, ils avaient à peu près bien su répondre aux questions, sauf à celle concernant la

galaxie Marconi. J'ai même été surprise de voir que, dans la majorité des cas, les élèves

avaient bien compris ce que désignait la galaxie Gutenberg. Marconi a posé davantage de

problèmes, peut-être parce que certains ont pris la question de Julien « Marconi? Ça veut dire

qu'on va entrer dans l'ère des nouilles? » (page cinquante-trois) pour la réponse, et n'ont pas

été chercher plus loin dans le récit:

Néanmoins, ce qui leur a le plus posé de problèmes, a été de donner un titre au

passage.

Dans la grande majorité des cas, ils ont donné un titre qui correspondait à l'extrait étudié

précédemment, par exemple: « la découverte », qui est très souvent apparu, sous cette forme,

ou d'autres ressemblantes.

J'ai également pu constater, qu'à ce stade de l'oeuvre, ils étaient tous absolument

convaincus de l'origine extra-terrestre de Gudule et Gédéon.

A la suite de la correction de la fiche, je leur ai lu de façon magistrale les pages

soixante à soixante-quatorze. Cette lecture vise d'une part à reposer les élèves car l'activité qui

a précédée était soutenue d'un point de vue cognitif, d'autre part à avancer dans l'oeuvre par le

biais de la lecture plaisir. On rencontre dans ces pages, lorsque l'on y prête attention, quelques

menus évènements, quelques petites remarques, qui commencent à intriguer le lecteur quant

au comportement de Véronique et des deux G: ils complotent dans leur coin, changent de

conversation à l'approche de Julien...

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Lors de la synthèse orale et collective réalisée après la lecture magistrale, les élèves

m'ont cité ces quelques indices, qui les ont étonnés. Ils proposent notamment comme

explication le fait qu'ils sont peut-être en train de se moquer de Julien, de lui préparer une

farce ou une surprise.

Enfin, le travail prévu sur le carnet de lecture n'a pas été effectué, pour la raison

suivante: nous n'en avons pas eu le temps et, quand bien même, les élèves n'auraient sans

doute pas été très motivés ou du moins très investis dans la tâche, compte tenu de l'effort qu'il

venaient de réaliser: lire et comprendre un passage d'une quinzaine de pages, répondre à un

questionnaire sur celui-ci, par écrit en rédigeant les réponses, et réaliser la correction

collective de la fiche.

Afin de préparer la séance suivante, ils auront à lire chez eux les pages soixante-

quatorze à quatre-vingt-neuf, et à donner un titre à cet extrait. Cela me permettra d'une part de

m'assurer que tous auront lu ces pages, comme demandé, et d'autre part de les entraîner à

trouver un titre correspondant à ce qu'ils viennent de lire, le résumant.

J'ai choisi ce passage parce qu'il est un des passages clé du roman, tant du point de vue

du sens, que du style d'écriture et de la prise d'indices. En effet, le texte semble, finalement,

nous affirmer que Gudule et Gédéon sont des enfants qui se transforment en chats douze par

jour, comme ils le décrivent dans leur lettre.

Toutefois, en prenant le temps, et le soin, de s'intéresser à la façon dont sont écrites ces

pages, on découvre qu'il est en réalité dit l'inverse dans la mesure où la supercherie est

nettement sous-entendue.

Au moment où je leur donne ces pages à lire chez eux, je me pose la question de

savoir s'ils vont repérer, ne serait-ce que quelque chose n'est pas très clair dans ce goûter, s'ils

vont être capables de trouver d'eux-mêmes des incohérences, de faire le lien entre les

informations qu'ils lisent et d'autres déjà lues.

e) Séance 5

La séance cinq arrive, et m'offre les réponses à mes questions.

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Tout d'abord, tous les élèves, sans exception, ont lu les pages et cherché un titre approprié: ils

ont d'ailleurs fait preuve d'une grande imagination, mais en même temps d'une grande rigueur

puisque tous les titres proposés convenaient à l'extrait: « Le goûter de la vérité » a, par

exemple, été proposé.

La synthèse que je leur demande d'élaborer, pour cet extrait, me permet de constater

qu'ils sont tous absolument certains, à n'en pas douter une seule seconde, de l'origine extra-

terrestre des deux G, puisqu' eux-mêmes l'avouent dans leur lettre, et que Valérie le confirme

également. Ils sont d'ailleurs très exaltés par cette annonce.

Visiblement, aucun n'a perçu le jeu de l'auteur, aucun n'a relevé de paroles ou d'actions

contradictoires et/ou incohérentes. La prise d'indices qu'ils ont effectuée lors de la dernière

lecture magistrale n'a donc pas été transposée lors de leur propre lecture: ils ne se sont pas

détachés du tout du sens premier.

Pour m'en assurer une dernière fois je leur pose la question suivante: « N'avez-vous rien

remarqué de surprenant dans ce passage, outre le fait que les deux G soient des extra-

terrestres? ». la réponse fut unanime: « non! ».

Je leur ai alors suggéré de relire ensemble ce passage, en les prévenant que je risquais

de les arrêter à certains moments de la lecture.

La lecture est donc faite par les élèves. Mes interventions ont lieu à chaque phrase

permettant de mettre en doute l'intégrité de Véronique. Pour commencer, je leur demandais si

dans cette phrase il n'y avait rien d'étrange, par rapport, tant à la situation qu'à ce qui a

précédé.

Par exemple, ne trouvent-ils pas étrange que Véronique aperçoive un livre de japonnais à

l'autre bout de la pièce, et sache, avec autant de précision de quoi il s'agit? Les élèves, pour la

plupart à ce moment là, n'y voyaient rien d'étonnant, et cherchaient à l'expliquer par des

raisons tout-à-fait plausibles: « peut-être qu'elle a une très bonne vue », ou bien, « peut-être

qu'elle est déjà venue mais qu'elle ne l'a pas dit à Julien pour éviter qu' il ne soit jaloux ».

Leurs explications s'avéraient valables et réalistes, je n'ai donc pas insisté, et ai relancé

la lecture, jusqu'au prochain élément d'incohérence.

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Parmi ces éléments, il en est pour lesquels ils pouvaient trouver des justifications terre-

à-terre, auxquelles je n'avais pas pensé moi-même; mais d'autres étaient absolument

injustifiables, notamment le fait que les enfants-chats affirment dans leur lettre que leurs

parents ne savent rien de leur métamorphose (page quatre-vingt-cinq) , alors que quatre pages

plus tôt il est écrit tout à fait l'inverse...et cette fois, le texte est présent pour le prouver, il n'y a

donc pas de justification possible.

La « machine » a alors commencé à se mettre en marche, et quelques élèves, d'eux-

mêmes repéraient, ou soupçonnaient des comportements, paroles, phrases pour le moins

étranges.

Les autres, néanmoins, avaient encore beaucoup de difficultés à se détacher du sens

premier, et je pense même qu'il leur était difficile d'accepter l'idée qu'ils avaient été éconduits

par le texte, et qu'ils ne devaient pas se fier à la première interprétation possible.

A la fin de la relecture approfondie et minutieuse de cet extrait, quelques-uns n'étaient

toujours pas convaincus de la farce faite à Julien, et continuaient à chercher des explications

logiques pour justifier l'attitude de Véronique notamment.

C'est ce qui est apparu dans les productions réalisées dans leur carnet de lecture, les

avis étaient encore divergents bien qu'une majorité de la classe ait assimilé l'idée de la farce.

f) Séance 6

Cette dernière séance était très attendue par la classe qui avait hâte de connaître le

dénouement de l'histoire. La séance précédente les avait en réalité pas mal perturbés, et ils ne

savaient plus vraiment que croire, ni qui croire. Ils espéraient donc, et attendaient, enfin une

réponse claire à toutes les interrogations que nous nous étions posées depuis le début de

l'oeuvre.

C'est donc dans un silence incroyable (et rare avec cette classe!) que j'ai lu les

quelques pages qui nous séparaient de la fin.

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Des réactions spontanées se sont faites sentir à différents moments de la lecture, par

exemple lors de l'aveu officiel de la supercherie, lors du retour de la lettre envoyée aux deux

G, sur laquelle est mentionné « inconnu à l' adresse indiquée ».

La phase de synthèse autours de la fin de l'histoire se déroula sans mal, et ils

découvrirent enfin pourquoi il n'y avait pas de chapitres dans cette oeuvre.

Ce qui m'a surprise sur le moment, c'est qu'aucun d'entre eux ne mentionne la fin pour

le moins énigmatique de l'oeuvre. Il a fallu patienter quelques minutes, laisser les enfants

s'exprimer, pour que, finalement, UN élève, parmi ceux les plus en difficultés dans la classe

me dise: « Mais Madame, en fin de compte, on ne sait pas si Gudule et Gédéon sont des extra-

terrestres ou des humains, on ne sait pas quoi penser!! »

Exact, et cela semblait le perturber un peu...

J'ai donc pris le temps avec eux, de réfléchir à la façon d'interpréter une oeuvre telle

que celle-ci. Nous en sommes arrivés à la conclusion que, dans la mesure où des arguments

étaient présents pour les deux possibilités, le choix de la fin revenait à chaque lecteur, de

façon personnelle et individuelle. Chacun est libre de fermer ce livre en choisissant la fin

qu'il préfère, ou celle qui lui semble la plus probable du fait des éléments découverts au cours

de la lecture, que la fin choisie soit réaliste ou fantastique.

Cette remarque venait illustrer parfaitement la définition du genre fantastique en

littérature que nous avions travaillée en parallèle lors des ateliers de lecture. Ainsi, ils avaient

un parfait exemple concret, d'un roman qui met le lecteur dans une perpétuelle hésitation entre

la réalité et l'étrange.

Pour terminer l'étude de l'oeuvre, je leur ai proposé de mettre sur papier, dans leur

carnet de lecture, ce qu'ils pensaient de l'oeuvre, s'ils l'avaient aimée ou non, quel était leur

personnage préféré, ou celui qu'ils détestaient et pourquoi, de noter éventuellement une phrase

ou un mot qu'ils avaient particulièrement aimé,etc (annexe 8)

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Les productions lues m'ont permis d'apprécier l'impact affectif de cette oeuvre: ils

l'avaient tous « adorée » parce que les personnages sont drôles, proches d'eux, et parfois

insolites, et parce que le suspens est constant.

Je pense que beaucoup d'entre eux se sont réellement identifiés à Julien et ont vécu ses

aventures comme s'il s'agissait des leurs.

2. Le genre fantastique et la lecture offerte

a) Lecture offerte: La bibliothécaire, de Gudule

En parallèle à l'étude du roman fantastique Les extra-chats, j'ai tenu à leur lire La

bibliothécaire, un chapitre ou deux, suivant la longueur, tous les jours.

Je voulais par là, d'une part élargir leur culture littéraire, d'autre part, leur faire

découvrir un autre roman fantastique, mais également, (re)donner à la lecture la notion de

plaisir. Plaisir de s'entendre raconter une histoire, comme lorsque l'on est petit...

Ces moments étaient réellement des instants privilégiés, qui permettaient de faire une pause

dans le travail, ou, de se préparer à se mettre en activité, en douceur.

Quel que soit le moment de la journée où je leur lisais un extrait, j' insistais pour n'aient plus

rien sur la table, ni dans les mains, pour qu'ils écoutent, tout simplement. C'était presque

devenu un rituel.

Evidemment, bien que cette lecture porte le nom de lecture offerte, le choix de cette

oeuvre en particulier n'était pas anodin, plusieurs raisons m'ont convaincues:

➢ c'est une oeuvre très bien écrite, avec un registre de langue correct, voire soutenu, de

nombreux synonymes, souvent apposés les uns aux autres, ce qui permet de

comprendre leur signification en se référant aux autres.

➢ Par ailleurs, l'intrigue mêle suspens, humour, amour, et culture.

➢ Mais surtout, et c'est la principale raison qui m'a conduite à choisir ce roman, l'histoire

nous fait rentrer dans le monde des livres, au sens propre du terme: nos héros entrent

dans différentes grandes oeuvres, et en vivent quelques bribes, rencontrent les

personnages de celles-ci... Ainsi, on voyage d' Alice au pays des merveilles, à Poil de

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Carotte, puis on entre dans le monde de la poésie chez Rimbaud dans Poésies, pour

ensuite plonger dans l'univers tumultueux et intrépide de Gavroche sur la barricade,

pour y découvrir quel personnage fascinant et attachant il est, dans une des plus

grandes oeuvres de Victor Hugo: Les misérables. Enfin, sans prévenir, nous nous

retrouvons dans le désert, en compagnie du Petit Prince.

Notons d'ailleurs que deux de ces oeuvres, Alice aux pays des merveilles et le Petit

Prince, font partie de la liste officielle des instructions officielles.

C'est dire la richesse incroyable de cette oeuvre, ode aux livres, à la lecture, qui permet,

contrairement à la réalité, de revenir en arrière, de faire revivre les morts; mais ode également

à l'écriture, présentée ici comme l'un des moyens privilégiés de concrétiser ses rêves, de

donner vie à ses fantasmes.

Cette oeuvre a eu un franc succès auprès de mes élèves, bien qu'elle ne soit pas

toujours facile à comprendre et davantage destinée à un public de niveau collège, en terme de

lecture individuelle.

Elle leur a donné cependant envie de se plonger dans certaines de ces grandes oeuvres qu'ils

connaissaient seulement de titre, et qu'ils n'osaient sans doute pas aborder, de peur d'échouer,

ou parce qu'ils n'en ressentaient pas l'envie. Après La bibliothécaire, les élèves ont en quelque

sorte découvert les personnages de ces grandes oeuvres, voire « sympathisé » avec eux.

b) Le genre fantastique

Lors des ateliers de lecture, j'ai mis en place des activités tournant autours du genre

fantastique, et visant à terme à le définir, à en trouver les caractéristiques principales, et à

découvrir tout un panel de romans et albums appartenant à ce genre.

Pour cela, les activités mises en place consistaient à sélectionner dans une « salade de

titres » ceux qui leur paraissaient correspondre au genre fantastique, et pourquoi? puis de

produire eux-mêmes, un titre qui pourrait être celui d'un livre fantastique. Il y avait également

un activité consistant à associer première et quatrième de couverture d'un panel d'environ sept

ou huit livres (suivant le niveau des élèves), classés comme fantastiques.

Enfin, la formulation de la définition du genre s'est appuyée sur Qui sait? de Guy de

Maupassant.

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Tout ce travail a débouché sur une évaluation sur le genre fantastique, me permettant

de voir ce qu'ils avaient retenu, assimilé de tout ce que nous avions fait autour de ce thème.

L'évaluation s'est avérée très satisfaisante, d'autant plus aux vues des bons résultats obtenus

par les élèves les plus en difficultés (annexe 9).

CONCLUSION:

Les apports théoriques m'ont permis de comprendre pourquoi, alors que certains élèves

déchiffrent très bien, ils ne mettent pas de sens derrière les mots qu'ils lisent: ce phénomène

s'explique par le fait que pour construire le sens de ce qu'il lit, le lecteur se sert de ses

connaissances. Or, les enfants n'ont pas toujours ces apports, notamment si leur famille ne

leur permet pas de rencontrer les situations propices à donner du sens aux mots, aux

contextes. Dans ce cas, c'est ce manque qui est à combler par l'école.

En outre, dans ma démarche d'étude de l'oeuvre, je pense avoir privilégié la

construction du sens, par le biais du travail par hypothèses, par le questionnement autours des

personnages, de leurs gestes et paroles. Je pensais également m'appuyer sur la structure de

l'oeuvre, mais après coup, je me suis aperçue que je ne l'avais que très peu fait, privilégiant

davantage la construction du sens à la technicité. Toutefois, je pense que pour une oeuvre un

peu plus longue et difficile, s'appuyer sur la structure du récit offrirait un support de

compréhension et d'anticipation en plus.

En ce qui concerne le goût de lire, je pense qu'il faut, pour commencer, apprendre aux

enfants à choisir le livre qui leur plaira, en utilisant les premières et quatrième de couverture,

les illustrations, le titre et le nom de l'auteur, qui peut s'avérer être un bon indice de la qualité

et du style d'écriture de l'oeuvre. Cet apprentissage me paraît primordial afin de ne pas se

retrouver en situation d'échec devant un livre trop difficile pour eux, qu'ils seraient obligés

d'arrêter parce qu'il n'est pas adapté à leur âge. Arrêter la lecture d'un livre parce qu'il ne

correspond pas à notre attente de lecteur, ne nous plaît pas, est un des dix droits du lecteur

cités par Daniel Pennac7, et c'est tout à fait légitime. En revanche, arrêter une lecture parce

7 Daniel Pennac; Comme un roman; 1992

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que l'oeuvre est trop difficile, met le lecteur, surtout le jeune lecteur, en situation d'échec et

d'incapacité, ce qui peut l'éloigner de la lecture.

Il me semble par ailleurs primordial d'être à l'écoute des élèves, de leurs réponses et

interprétations, pour intégrer leur parole et pouvoir les aider, les guider. Ceci est transposable

dans les autres disciplines, où lire s'avère nécessaire, que ce soit pour les consignes ou pour

comprendre des documents.

Enfin, je pense avoir mis en place une démarche visant réellement la construction du

sens, et ce telle qu'elle est conçue et travaillée par les enseignants de collège. Le travail

effectué s'inscrit donc dans une optique de préparation des élèves à l'entrée dans le cycle

secondaire.

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Bibliographie

• CRDP de l’académie de Créteil (2000) : Lecture et écriture à l’école . tome 2 : cycle3Collection IUFM premier degré

• CRDP de l’académie de Versailles (2004) : La lecture et la culture littéraires au cycle des approfondissements ; Coll « Les actes de la DESCO »

• Giasson J: La compréhension en lecture (1990) ; De Boek université

• Giasson J : Les textes littéraires à l’école (2000) ; Gaëtan Morin Editeur

• Tauveron C : Le personnage: une clef pour la didactique du récit à l'école élémentaire (2001), Delachaux et Niestle

• Dufays J.L, Gemenne L, Ledur D : Pour une lecture littéraire; (1996), De Boeck

• Pennac D: Comme un roman, (1992), Gallimard

• Valdois S, Bosse M-L : Lecture de mots et dyslexie : approche cognitivehttp://eduscol.education.fr/index.php?./D0126/dyslexie_valdois.htm

• Ministère de l'Education Nationale, SCEREN: Qu'apprend-on à l'école élémentaire? (2002)

• Ministère de l'Education Nationale, SCEREN: Lire et écrire au cycle 3 (2003)

• Roche T: Les extra-chats; (2003), Lire c'est partir

• Gudule: La bibliothécaire; (2001), Hachette Jeunesse

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ANNEXE 1

Fiche de préparation Matière : Lecture d'oeuvre intégrale Niveau : CM2

Objectifs : - Etudier un genre: le roman fantastique: Les extra-chats de Thérèse Roche– Etudier les personnages (leurs actes, leurs pensée, leur description) pour mieux comprendre et faire

des hypothèses sur l'histoire.

Compétences visées : - Se servir des informations portées sur la couverture et la page de titre pour émettre des hypothèses.– Lire en le comprenant un texte littéraire long, mettre en mémoire ce qui a été lu (ynthèes sucessives)

en mobilisant ses souvenirs lors de reprises.– Reformuler dans ses propres mots une lecture entendue.– Participer à un débat sur l'interprétation d'un texte littéraire, en étant susceptible de vérifier dans le

texte ce qui interdit ou permet l'interprtation défendue.– Elaborer et écrire un texte d'au moins une vingtaine de lignes, avec ou sans support, en respectant

des contraintes orthographiques, syntaxiques, lexicales et de présentation.

Déroulement :

Séance 1: 45 à 50mn

1.Entrée dans la lecture par le paratexte et l'étude de la couverture. 30mn1ère de couverture: Image: ombres étranges ->monde irréel? Sont -elles toutes étranges?Titre: Que laise-t-il présager?– sur le genre de roman– sur le contenu: émettre des hypothèsesRapport titre/image? Auteur?

Feuilleter le livre: « Cherchons la table des matières, les chapitres. A votre avis pourquoi n'y en-a-t-il pas? »

4ème de couverture: Lecture silencieuse du résumé« comment s'appelle ce qui est écrit? Raconte-t-il toute l'histoire? Pourquoi? Nous permet-il de valider certaines hypothèses, ou au contraire d'en invalider? »Faire remarquer le nom de l'illustrateur.

2.Lecture orale par M du début ->p21 « moi aussi » 10mn« Je vais commencer la lecture du roman: soyez attentifs, à qui parle? Qui sont les personnages principaux? Leurs relations?»

Matériel/support

Un exemplaire du livre par enfant

grande affiche N°1

Forme de w

Collectif

Collectif

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3.Réponses: 5mnC'est Julien Douard qui parle. Les personnages principaux: Julien, Véronique (meilleurs amis, amoureux?),Gudule et Gédéon (frère et soeur, les nouveaux de la classe).Style d'écriture:Il écrit comme il parle.

Séance 2: p7 à 21Gudule et Gédéon

1.Résumé du passage lu lors de la dernière séance. 5mn« Quelle est la question que tout le monde se pose sur les nouveaux? »

2.Etude des deux G. 20mn« Nous allons essayer de le savoir en nous penchant plus précisément sur le texte. Pour cela, vous allez faire des groupes de 4, et remplir le tableau, sur une feuille: Ce qui laisse penser que G.G sont des extra-terrestres/ ce qui laisse penser que ce sont des enfants normaux. Cf tableau en annexeA chaque fois que vous trouverez un argument, vous devrez le justifier à l'aide du texte en en citant qqes mots ainsi que la page.Vous devez impérativement vous mettre tous d'accord dans le groupe avt d'écrire, tous les élèves d'un groupe doivent avoir la même chose. »

3.Mise en commun 20minRemplissage de l'affiche (cf annexe), éventuellement, débats...

Bilan: « Alors, pour l'instant, que laisse penser ce tableau: les jumeaux sont-ils ou non des E-T? »

Les élèves devront lire chez eux de la p21 à 39 « ds la villa. »

Séance 3: p 39 à 44Filature et découverte.

1.Résumé du passage lu chez eux. 10-15mnQu'apprend-on sur les 2G que l'on puisse mettre dans notre tableau? -p24: compte rendu du livre bibli– Matériel scolaire en parfait état, gde méticulosité p28– gêne qd Julien demande où ils habitent+ réponse vague– connaissance du système solaire p30– grande prudence en chemin: attendent feu vert p35

- Tableau à compléter préparé sur gde affiche N°2.- Ecrire ppales consignes au tableau: Trouver des arguments, les justifier (+ forme)- Donner un tableau A3 par gp

affiche N°2

p29

Collectif

Oral collectif

Ecrit groupe

oral coll

oral coll

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– aiment la réglisse p35

2.Hypothèses: 10mn« A votre avis, que va découvrir Julien? »

3.Lecture passage jusqu'à la p44 « leur blouse? » 10mnRapport avec les hypothèses, y compris celles du début.

4.Mise en voix du texte préparé chez eux 15min

Séance 4:Les confidences p50 à 60

1.Lecture p 44 à 50 par M. 5minDans quel état est Julien? (Comment se sent-il? Est-il serein?) Il est très préoccupé.

2. Lecture silencieuse p50 à 60 + fiche de lecture (cf annexe) 40mnDifférenciation péda: le gp en difft, fait la fiche avec moi

Pour ceux qui auront fini plus tôt, au carnet de lecture: Imagine que Julien soit invité chez les 2G pour le goûter, et ce qu'il va se passer lors de ce goûter.

3.Correction collective 15mnexplication de galaxies Gutenberg et Marconi.

p60 à 74 seront lues en classePassage qu'ils liront chez eux: p74 à 89+ titrer.

Séance 5Le goûter p74 à 89

1. Résumé oral 5min quel titre donneriez-vous? Sommes-ns désormais certains que les GG sont des E.T?

2. Mise en évidence de la supercherie 20min« Relisons ensemble le passage ».(lect orale par les élèves)M interromp la lecture à chaque indice pouvant mettre en évidence la supercherie.-> c'est Véronique qui mène le jeu p76;78;80;

affiche N°1

un livre par élèveune fiche par élève

un livre par élève

u

oral coll

écrit individuel

oral coll

oral coll

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-> incohérences: p81;82 (V doute, puis d'un seul coup sait tout, parents savent? Pq lettre parle-t-elle des livres: passe du coq à l'âne!)

3.Carnet de lecture. 20mnQue penses-tu de cette farce? Comment aurais-tu réagi à la place de Julien?

Séance 6Les réponses p89 à la fin

1.Lecture orale collective puis résumé 20min« Qu'apprenons-nous? »La confirmation de la supercherie.p 91-92« Julien le croit-il? Qu'est-ce qui pourrait prouver que malgré tout il a raison? »p94« Savons-nous maintenant pourquoi il n'y a pas de chapitres dans le livre? »p92Faire des retours en arrière.

2.Carnet de lecture 20mn Ce livre vous a-t-il plu? Pourquoi?Phrase qui vous a plue, personnage préféré?ce que vous n'avez pas compris,.. illustration

3. Lecture de quelques productions 5-10mn+ échanges autours du livre

un livre par élève

carnet de lecture

écrit individuel

Bilan/ prolongements possibles :

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ANNEXE 2Tableau type

CE QUI LAISSE PENSER QUE LES 2G

SONT DES EXTRA-TERRESTRES

CE QUI LAISSE PENSER QUE CE

SONT DES ENFANTS NORMAUX

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ANNEXE 3Retranscription des productions d'élèves

CE QUI LAISSE PENSER QUE LES 2G

SONT DES EXTRA-TERRESTRES

CE QUI LAISSE PENSER QUE CE

SONT DES ENFANTS NORMAUX

Groupe AIl porte des vêtements bizarreil bougent pas et il se portent droitla fille est étrange et Julien se sens géneGudul et Gédéon on un de ses vocabulaireSa peau de Gudul est tiède

Groupe B« A se demander de quelle planète lointaine ils arrivent! »« En plus il diffèrent totalement de nous: les vêtements, l'allure, la démarche, les manières. »« T'as vu? D'où y débarquent ses deux là? »leurs vêtements« c'est drôle, ç'aurait été une fille normale, j'aurais été plutôt content »La profondeur des yeuxLeurs prénoms

Il son frère et soeurils ont des cheveux roux, les cheveux de la soeur sont plus longIl on des blous noir qui vont jusque au jenou

c'est des jumeauxleurs cheveuxla peau de Gudulela façon de respirer

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ANNEXE 4

Les mots ou expressions qui

montrent que les deux G sont des extra-

terrestres

Les mots ou expressions qui

montrent que ce sont des enfants normaux

P7 à 21● Leurs vêtements: « Ils portent

des espèces de blouses noires [...] leur vêtement sombre. » p13

● Leur façon de parler « Ils ont un d'ces vocabulaires! » p17

● Leurs prénoms (?): « Nous aimons [...] le plus souvent » p17

● Excellents en cours « les résultats scolaires fabuleux des deux prodiges » p19

● Leurs yeux « leur profondeur étrange m'inquiétait » p20

● Leur peau est normale: « La peau de Gudule était tiède » p18

● Ils s'essoufflent comme nous: « comme nous [...] à la déli-délo » p19

● Leur apparence physique est normale: « leurs cheveux de flammes et leurs tâches de rousseur » p12

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ANNEXE 5

Les extra-chatsT. Roche

Lecture p50 à 60

1. Donne un titre à ce passage.

2. Comment réagit Véronique quand Julien lui raconte ce qu'il a découvert? Justifie en relevant une phrase ou un passage du texte.

3. Comment s'appellent les chats?

4. D'après M.Atlantis, que représente la galaxie Gutenberg? L'ère où le savoir est transmis par les ondes L'ère où le savoir est transmis par les livres Une galaxie différente de la nôtre où les chats savent lire

Une galaxie différente de la nôtre où l'on ne mange pas de pâtes

5. Qu'est-ce que la galaxie Marconi? L'ère où le savoir est transmis par les ondes L'ère où le savoir est transmis par les livres Une galaxie différente de la nôtre où les chats savent lire

Une galaxie différente de la nôtre où l'on ne mange pas de pâtes

6. Que craignent les scientifiques pour la galaxie Gutenberg?

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7. A la fin du passage, quel sentiment éprouve Julien quand Véronique lui apprend qu'elle est invitée chez les deux G le mercredi suivant? Justifie ta réponse à l'aide d'une phrase du texte.

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ANNEXE 6

Hypothèses émises par la classe:

Séance 1:

Ce livre est peut-être:

✗ un roman fantastique

✗ une histoire de sorcières qui se transforment en chats

✗ une histoire d'extra-terrestres qui prennent possession des gens

✗ La petite fille ressemble à un chat.

✗ Ce n'est peut-être pas un roman (absence de chapitres)

Séance 3:

Dans la villa, Julien va peut-être:

✗ rencontrer des parents bizarres

✗ trouver des portraits de famille qui ressemblent à des chats

✗ trouver des extra-terresters

✗ trouver la maison déserte, abandonnée

✗ voir une soucoupe volante (dans le jardin)

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ANNEXE 7

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ANNEXE 8

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ANNEXE 9

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LA CONSTRUCTION DU SENS

EN LECTURE D'OEUVRE INTEGRALE

Résumé: Ce mémoire présente tout d'abord une définition de la lecture et une explication

des processus qu'elle met en place, puis il propose la mise en place et l'analyse d'une séquence

en lecture d'oeuvre longue, effectuée avec une classe de CM2. Cette séquence vise à faire

construire aux élèves eux-mêmes, le sens de ce qu'ils lisent, par le biais notamment du travail

par hypothèses et de l'étude des personnages.

Mots-clés: – Compréhension

– Construction du sens

– Lecture longue

– Personnages

– Projet

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