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La Crise du personnage dans le théâtre moderne › cantookhub-media...de la nouvelle société industrielle, qui se met à produire les agents de sa propre contestation, le théâtre

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  • Tour à tour critique, auteur dramatique, essayiste et historien duthéâtre, Robert Abirached a étroitement participé à la vie théâtrale enFrance depuis une trentaine d'années. Directeur du théâtre et desspectacles au ministère de la Culture de 1981 à 1988, il est aujourd'huiprofesseur à l'Université de Paris-X-Nanterre où il dirige le départementdes arts du spectacle.

  • ENTRE LE MOT ET LE CORPS

    Entre le mot et le corps, entre la puissance et l'acte,entre le songe et le réel, il ne suffit pas de dire que lepersonnage de théâtre est écartelé. Cette tension cons-titue très exactement l'originalité de son état. Ecrirepour la scène, c'est d'abord jouer de la dialectiquequ'elle suppose et en prévoir les articulations efficacesimpossible à l'auteur de simuler que son dessein s'achèvedans le livre qu'il offre c'est un fantôme provisoire qu'ila créé et délibérément placé, en position d'attente, dansune zone intermédiaire. Consignés pour mémoire dansles pages d'un texte, Œdipe, Lear, Harpagon, l'Alcadede Zalamea, Figaro se meuvent sans doute à la fron-tière du monde où l'on rencontre la princesse de Clèves,Manen Lescaut, Rastignac ou David Copperfield, maisils n'y entrent pas, ils ne peuvent pas y entrer souspeine de se dissoudre ils ont besoin d'être reconnuscharnellement, sous les dehors les plus imprévus, par unpublic qui les confondrait peut-être, pour un soir, avecMounet-Sully, Laurence Olivier ou Charles Dullin. NiRaskolnikov ni Fabrice del Dongo ni Perkins ne peuvent,inversement, être portés sur la scène sans y perdrel'essentiel de leurs qualités et, singulièrement, ce qu'onappelle leur psychologie si on les y reconnaît, c'est àforce de multiplier autour d'eux les références et deprojeter en ombre portée sur les planches ce qu'on aappris d'eux dans les livres dont ils sont les héros. Leroman, même le plus antiromanesque, est le lieu de l'in-terprétation son langage, même le plus objectif, produit

  • La crise du personnage dans le théâtre moderne

    un sens, fait lever des phantasmes, organise un monde,et il n'a besoin pour cela que de créatures d'encre etde papier. Le théâtre, s'il peut aboutir à des effetsanalogues, est d'abord le lieu de la représentation illivre au spectateur des doubles du personnage, qui nesont pas lui et ne sont pas eux-mêmes. Si quelqu'un yinterprète, c'est l'acteur, à travers une alchimie men-

    tale et physique dont il soumet le résultat au public.Tartuffe n'est ni grand ni petit, ni beau ni laid, ni

    brutal ni doucereux il peut devenir l'un et l'autre,selon les incarnations de ses mises en scène succes-

    sives. « Gros et gras, le teint frais et la bouche ver-meille » ? Dorine le voit ainsi, ce qui nous informe bienplus sur son sentiment que sur l'objet qu'elle décritchacun, dans son activité imaginaire, tire bon gré malgré, au fil des rencontres, des personnages à partir desa perception on les perçoit en filigrane à travers toutdiscours sur autrui. L'imposteur de Molière, quant à lui,s'il est prêt à revêtir la défroque qu'on lui donnera pourle temps d'un spectacle, ne se confond avec aucune de sesincarnations possibles le peindre avec l'exactitude quesouhaitait La Bruyère dans son portrait d'Onuphre'1reviendrait à lui interdire l'accès de la scène en lui reti-

    rant ce statut fantomatique que nous venons de dire etqui caractérise, aux lisières de la réalité et de l'imagi-naire, le personnage de théâtre. Onuphre est transparentà son auteur, qui l'en croit plus complexe. On nous lemontre qui va de sa chambre à l'église et dans les rues dela ville on nous informe du secret de ses raisonnements

    et des motifs de ses comportements au nom de la logi-que, on lui interdit de s'en prendre aux épouses et aux fil-les, mais on lui autorise cousines et neveux mieux onnous assure qu'il « vient à ses fins sans ouvrir la bouche ».Parfaitement déterminé, il se suffit à lui-même, alors quele théâtre se définit par la relation triangulaire qu'il meten œuvre entre le personnage, l'acteur et le spectateur.De l'imaginaire à son inscription dans l'espace charnelde la scène, du champ de la mémoire collective à l'em-pire des signes, le chemin passe par la médiation ducomédien, pris en charge à son tour par l'ordre généralde la représentation c'est là que le triangle se refermeet que trouve son sens le cérémonial complexe du jeu.

  • Entre le mot et le corps

    A la scène seulement, le personnage rencontre sa maté-rialité, le signe sa signification et la parole son destina-taire.

    De ces premières remarques, il serait insuffisant dedéduire qu'il existe une différence entre théâtre et récitelles nous incitent surtout à saisir, sous les innombra-bles avatars du personnage dramatique, une structurepermanente contre laquelle aucune révolution n'a réus-si à prévaloir jusqu'à ces dernières années. On peut sui-vre, à travers l'histoire du théâtre, la succession des sys-tèmes dramatiques, le progrès des techniques du jeu etde la scénographie, les remises en cause des notions d'in-dividu, de personne et de langage, l'évolution des appro-ches de la réalité sociale il n'en demeure pas moins quel'exercice du théâtre en Occident a toujours obéi à lamême définition globale, ratifiée par la conscience col-lective, et qu'on ne peut rejeter radicalement sans récu-ser la civilisation qui l'a produite.

    Sémantiquement, comme on l'a remarqué, le mot depersonnage est imprécis. Il désigne à l'origine, dit Littré,une dignité ou un bénéfice ecclésiastique, avant de vou-loir dire, par extension, une personne considérable etcélèbre en troisième lieu seulement, il renvoie à une

    « personne fictive, homme ou femme, mise en action dansun ouvrage dramatique », puis, en peinture ou en tapis-serie, aux figures des histoires qui y sont représentéesc'est assez tardivement, semble-t-il, qu'il s'est enfin appli-qué au poème narratif et au roman. Toutes ces accep-tions ont ceci de commun qu'elles indiquent une miseen rapport de l'homme réel avec des images de lui agran-dies ou exemplaires, obtenues par imitation et soumisesà reconnaissance. Plus précisément encore, si l'onremonte plus haut et qu'on étende l'enquête à diverseslangues de l'Europe, on s'aperçoit que, pour désignerles figures exhibées sur la scène, on a eu tantôt recours àdes mots descriptifs de leur activité et tantôt à des subs-tantifs« métaphoriques» qui témoignent de la dupli-cité de leur état. Ainsi Aristote parle-t-il dans La Poéti-que de 7rpâT-rovre

  • La crise du personnage dans le théâtre moderne

    disants, locuteurs), ce qui revient à ne point distinguerentre le rôle et sa mise en jeu de la même façon, onemploie couramment encore acteur pour personnageau xvii* siècle français. Les Anglais ont retenu le greclatinisé character, après avoir longtemps conservé commel'Europe érudite le latin persona, bientôt naturalisé enAllemagne ce qui veut dire gravure et masque, qui,tous deux, suggèrent implicitement le relief et le visageabsents qu'ils sont prêts à susciter ou à accueillir.

    Le personnage est donc à la fois pensé comme unefigure issue de la réalité et comme une entité autonomequi agit dans un espace tout ensemble concret et fictifparole et corps, mouvement offert au regard et formeen elle-même dérobée. La langue ne nous en apprend pasplus long, mais elle nous interdit, en revanche, de nouscontenter des formules approximatives qui assimilentle personnage à un être de chair et d'os, lui attribuentune existence suffisante à elle-même, jouent des traitsde ressemblance dont il porte la trace pour lui deman-der des effets d'illusion, le confondent avec une idée

    impalpable à préserver de toute accointance avec lavie, ou le décrivent encore comme un contenant quidemande à être rempli. A vrai dire, personne, à notreconnaissance, ne s'est interrogé sur le statut exact dupersonnage dans l'opération théâtrale, sinon par le biaisd'allusions plus ou moins rapides ou de définitionsincomplètement fondées l'effort d'élucidation entreprisdepuis Diderot au sujet de l'acteur n'a guère trouvé derépondants sur ce point.

    C'est une telle analyse que nous nous proposons, ambi-tieusement, de tenter dans cette étude, en partant de lanotion de mimésis proposée par Aristote 2si le théâtreest imitation, il applique en effet, pour mettre en rap-port le monde et la scène, un ensemble de protocolesqui lui sont spécifiques, à travers un système d'échan-ges dont il est possible de décrire les modalités et lesfinalités originales. Tant que la mimésis elle-même n'estpas exposée à contestation, on peut affirmer que lestatut du personnage ne se modifie pas fondamentale-ment dans le théâtre européen, compte tenu de la diver-sité des dramaturgies, de l'évolution des sensibilités etde la différence des comportements sociaux à travers

  • Entre le mot et le corps

    les lieux et les âges. Jusqu'au xvnf siècle, il est du moinsconstant que le théâtre représente les actions des hom-mes dans leur exemplarité qu'il se situe à distance duréel, mais toujours en référence à lui qu'il ne produitpas des images insignifiantes, mais appelées, diverse-ment, à modifier le regard des spectateurs sur la vie,les choses et les gens que le rôle préexiste à l'acteurqui l'exprime, et que le jeu lui-même se déploie dansun espace toujours plus ou moins figuré et dans unetemporalité plus ou moins arbitraire. Ce qui varie selonles pays et les moments de l'histoire, c'est, bien entendu,l'esthétique de la représentation, le style du jeu, le con-tenu attaché aux termes de réalité, de vérité et de fic-

    tion, la composition du public et le mode de créancequ'il accorde à l'image théâtrale, mais il existe des sché-mas généraux et des structures permanentes qui fondentl'unité du phénomène dramatique en Europe on lessaisit à l'état pur, si l'on peut dire, de l'antiquité gréco-latine à l'âge classique, mais les multiples révisions quiles ont ensuite affectés n'ont pas mis en cause leurs élé-ments constitutifs. Aussi l'esquisse théorique qui ouvrecette étude ne vaut-elle pas seulement pour un passérévolu par-dessus les frontières des pays et des pério-des, elle prétend rendre compte des données spécifiquesdu théâtre occidental qui ont été soumises au travail del'histoire, sans que l'histoire, semble-t-il, ait prévalu contreelles.

    Vienne, en effet, une transformation intellectuelle, poli-tique et sociale assez décisive pour qu'elle modifie pro-fondément la place de l'homme dans le monde, l'idéequ'il se fait de lui-même et l'ambition qu'il se désigne,et voici que change la portée attribuée à la mimésisl'avènement progressif de la bourgeoisie, loin de ruinerl'idée de l'imitation dans les arts et singulièrement authéâtre, aboutit à première vue à la renforcer définiti-vement mais, en la tournant vers la description del'individu et en la chargeant de tendre un miroir à lasociété, les dramaturges de l'âge moderne pervertissent lanotion aristotélicienne alors même qu'ils croient l'accor-der aux temps nouveaux. La mimésis, maintenue et rui-

  • La crise du personnage dans le théâtre moderne

    née, se vide peu à peu de son sens premier si elleacquiert une force nouvelle au service de l'art roma-nesque, elle n'est pas seulement impuissante à enrayerla décadence du théâtre on peut dire que, réduite à sesfaux-semblants, elle contribue positivement à perpétuerl'inadéquation de la scène au monde. Les effets de cetabâtardissement continuent de se faire sentir jusqu'ànos jours.

    Puis, à mesure que se confirment les contradictions

    de la nouvelle société industrielle, qui se met à produireles agents de sa propre contestation, le théâtre va entrerdans une crise endémique ce qui est en cause, à partirde la fin du siècle dernier, c'est la notion même dereprésentation, qu'il apparaît de plus en plus difficiled'ajuster aux contours d'un monde en plein bouleverse-ment et d'un moi incertain de ses propres frontières etde sa propre nature. Comment restaurer le personnagedans ses pleins pouvoirs, alors que ses références tradi-tionnelles à la réalité sont en train de se brouiller de

    plus en plus irrémédiablement ? Au milieu d'un universéclaté, où le doute atteint pêle-mêle les idées, les croyan-ces, les traditions et les arts, déroutant du même couple public et le conduisant à se cloisonner en unités

    disparates, comment redonner vie pleinement à la pra-tique d'un jeu qui ne saurait se passer de spectateurset qui, depuis son apparition, n'a jamais cessé de s'adres-ser à des hommes réunis en collectivité ?

    Voilà la question qui se pose avec urgence dès lesannées 1880, tandis que la scène bourgeoise est encoreen pleine prospérité elle concerne la validité même dela mimésis et, par suite, l'existence du théâtre en tantqu'art, tel du moins qu'on l'a jusqu'ici pratiqué. Detoutes parts, les réponses fusent, les analyses se succè-dent, les innovations s'entrecroisent. En une cinquan-taine d'années chaotiques, on passe, pour reconstruirele personnage, de la dérision au lyrisme, du subjecti-visme morose à la découverte exaltée de terres incon-

    nues, de la révolte contre le passé à l'expérimentationde langages inouïs de 1880 à 1925, soit en fonction d'unenostalgie persistante des origines, soit au nom des impé-ratifs d'une nouvelle conquête de l'univers, tout a ététenté, ou presque, pour rendre à la scène une fonction

  • Entre le mot et le corps

    efficace dans le monde tel qu'il est devenu. Le « nouveauthéâtre » apparu dans les années cinquante fait la réca-pitulation de ces diverses approches et leur confère unecohérence inattendue, au milieu d'une société mieux dis-

    posée à les comprendre. En revenant aux mécanismesprimordiaux de la théâtralité, il n'en a que mieux montréla difficulté d'évacuer complètement la mimésis pourrésoudre la crise de la représentation à regarder d'unpeu près, les dramaturgies les plus récentes ont beaucoupmoins détruit le personnage qu'elles n'ont ébranlé sadéfinition bourgeoise et son statut littéraire.

    De toutes les théories avancées jusqu'à présent, il n'yen a à vrai dire que trois pour avoir mis en danger lesfondements mêmes du théâtre européen celles de Craig,de Brecht et d'Artaud. Les propositions du premier n'ontguère touché qu'un cercle limité de spécialistes, maispersonne, depuis la fin de la guerre, n'a pu contournerl'œuvre des deux autres, qui ont défini dans le détailles conditions d'une pratique scénique entièrement nou-velle c'est pourquoi on les verra ici tout à fait privi-légiés. Brecht annonce la fin d'une société et met en

    œuvre pour procéder à sa liquidation un nouvel espritscientifique Artaud conclut à la nécessité d'un théâtrebranché sur le dynamisme vital, qui saborde la culturetout entière de l'Occident. L'un prend congé d'Aristotepour en finir avec la forme dramatique du théâtre d'imi-tation, au profit d'une théâtralité qui permette de repro-duire activement le réel, en le donnant à déconstruire

    et à recomposer par le jeu. L'autre dynamite la scèneque nous connaissons, en mettant fin à l'intervention

    privilégiée de la littérature dans l'espace théâtral et endéniant au personnage tout droit à l'existence, pour lais-ser la parole aux forces de la vie et de la mort à traversle corps de l'acteur.

    Brecht et Artaud, chacun à sa manière et pour desraisons différentes, conduisent leur projet jusqu'au bordde l'utopie. Il reste toujours à savoir si l'on peut extirperun ensemble de coutumes si bien ancrées, dans des socié-

    tés aussi disparates que les nôtres et qui avancent àtâtons vers leur avenir, pour y instaurer un autre modede théâtre, sans attendre que le monde soit allé jusqu'auterme de sa mue. La perspective d'un semblable coup

  • La crise du personnage dans le théâtre moderne

    d'Etat se fait cependant de plus en plus séduisante,mais, une fois assuré l'empire presque absolu de l'imagesur la scène, le personnage menacé de mort et l'auteurchassé des coulisses ou réduit au rôle de comparse, iln'est pas très sûr qu'on sache encore au bénéfice de quiet pour quoi faire.

  • CHAPITRE PREMIER

    LA MIMÉSIS

    ESQUISSE D'UNE THÉORIE DU

    PERSONNAGE

  • Si le personnage de théâtre est régi par un statut quilui appartient en propre et qui le distingue des figuresproduites par l'écriture narrative ou par les arts plas-tiques, il serait hasardeux de lui supposer d'emblée unenature pour rendre compte de son originalité. Mieuxvaut observer son fonctionnement, c'est-à-dire l'ensem-

    ble des procédures qui gouvernent son activité, du livreà la scène et de la scène au livre ce qui impliqueimmédiatement qu'on ne puisse l'isoler de l'ensemblede la représentation, où il se manifeste devant un publicréuni pour le regarder. Pour s'offrir à la vue pour,littéralement, devenir théâtral le personnage doitêtre disposé de telle manière qu'il puisse se matéria-liser c'est cette disposition elle-même qu'il faut obser-ver, préalablement à toute analyse de contenu et à touteconsidération historique.

    La rhétorique latine, pour cerner les modalités par-ticulières de l'action du personnage, a eu recours àtrois mots qui témoignent ensemble, en images concrè-tes, de son appartenance à l'univers des signes et duparadoxe qui y est attaché persona, character ettypus1. Faux visage, interposé entre l'homme et lemonde constellation de marques laissées par le réelet qui peuvent faire effet de réalité présence,en filigrane, d'un patron originel et d'un modèle fon-dateur, qui sont établis dans l'imaginaire ces appro-ches métaphoriques ne sont pas simplement complé-mentaires, mais elles livrent les aspects indissociables

  • La crise du personnage dans le théâtre moderne

    d'un seul et unique phénomène, dont la complexitérequiert des descriptions successives. Nous procéderonsici d'une façon similaire, par analyses superposées,chacune tenant étroitement à celle qui la précède et nepouvant se passer du complément de celle qui la suit.

  • Persona, d'abord, c'est le masque. Voilà qui témoigne,à l'origine, d'une pratique théâtrale passée de Grèce àRome et retrouvée aux xvi* et xvn* siècles, par exemple,dans les divertissements élisabéthains et dans la comme-

    dia dell'arte oublié et s'oubliant derrière son person-nage, l'acteur perd alors son identité pour devenir toutentier comme un idéogramme en mouvement sonmasque, beaucoup plus qu'un emblème d'illusion, s'offreau spectateur pour le signe d'une réalité différente dela vie quotidienne, débridée jusqu'à la grimace dansla comédie, énigmatique jusqu'au symbole dans latragédie.

    Impossible au comédien masqué d'user de sa voixselon les lois ordinaires de l'énonciation, de marcher

    selon les normes admises de l'équilibre, de se donnerpour autre chose qu'un être surgi d'ailleurs, mêmesi cet ailleurs, tout proche, est allusif à l'exis-tence d'ici et de maintenant, mais plus évidemmentencore s'il témoigne d'un envers nocturne, solennel ousacré de la réalité. C'est pourquoi le masque théâtralne saurait se réduire à un déguisement il est l'insti-gateur de cette autre vie, irréductible au pittoresquesocial et à la caractérisation psychologique, si bienqu'on l'emploie aujourd'hui au service de la formationde l'acteur pour l'aider à se dépersonnaliser, puis, dansune seconde étape, à « trouver son personnage », commeon dit de quelqu'un qu'il trouve sa vérité secrète, dans

    LE PERSONNAGE OUVERT

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