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Luc Albrand, Alliance française de Bruxelles-Europe, CELF – juin 2010 1/20 La flottille de la liberté : entretien avec la députée européenne Nicole Kiil-Nielsen Date de diffusion 12/06/2010 Niveau supérieur / C1 Public : diplomates, journalistes, personnes intéressées par le Proche-Orient, la politique européenne, l’histoire Thèmes de l’émission : La question palestinienne Compétences : 1. Prendre des notes. 2. Repérer des informations précises de l’émission. 3. Repérer des éléments significatifs de modalisation. 4. Repérer et employer des stratégies de communication. 5. Argumenter, nuancer et modérer un débat. 6. Construire une présentation rigoureuse et contrastée. Objectifs communicatifs : 1. Parler de la politique étrangère européenne. 2. Parler du rôle de la société civile. 3. Interroger la narration historique. Objectifs linguistiques : 1. Aborder la modalisation puis l’employer. 2. Utiliser le vocabulaire de la nuance et de la modération. Objectifs interculturels : 1. Aborder un sujet sensible avec tact. 2. Négocier une narration historique. Éducation aux médias : 1. Décrypter la forme d’un discours. Sommaire de la fiche : 1. Mise en route p. 2 à 5 2. Compréhension de l’entretien p. 6 à 8 3. Analyse du discours/le point sur la modalisation p. 8 à 10 4. Production orale p. 11 à 14 5. Production écrite et orale p. 14 6. Ressources complémentaires p. 15 7. Liens pour aller plus loin p. 15 8. Transcription de l’entretien p. 17 à 19 9. Questions de compréhension orale p. 20

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Luc Albrand,

Alliance française de Bruxelles-Europe, CELF – juin 2010 1/20

La flottille de la liberté : entretien avec la députée européenne Nicole Kiil-Nielsen

Date de diffusion 12/06/2010

Niveau supérieur / C1

Public : diplomates, journalistes, personnes intéressées par le Proche-Orient, la politique européenne, l’histoire

Thèmes de l’émission : La question palestinienne

Compétences :

1. Prendre des notes. 2. Repérer des informations précises de l’émission. 3. Repérer des éléments significatifs de modalisation. 4. Repérer et employer des stratégies de communication. 5. Argumenter, nuancer et modérer un débat. 6. Construire une présentation rigoureuse et contrastée.

Objectifs communicatifs :

1. Parler de la politique étrangère européenne. 2. Parler du rôle de la société civile. 3. Interroger la narration historique.

Objectifs linguistiques :

1. Aborder la modalisation puis l’employer. 2. Utiliser le vocabulaire de la nuance et de la modération.

Objectifs interculturels :

1. Aborder un sujet sensible avec tact. 2. Négocier une narration historique.

Éducation aux médias :

1. Décrypter la forme d’un discours.

Sommaire de la fiche : 1. Mise en route p. 2 à 5 2. Compréhension de l’entretien p. 6 à 8 3. Analyse du discours/le point sur la modalisation p. 8 à 10 4. Production orale p. 11 à 14 5. Production écrite et orale p. 14 6. Ressources complémentaires p. 15 7. Liens pour aller plus loin p. 15 8. Transcription de l’entretien p. 17 à 19 9. Questions de compréhension orale p. 20

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Alliance française de Bruxelles-Europe, CELF – juin 2010 2/20

1. Mise en route Cette étape de mise en route vise à situer le Proche-Orient du point de vue géographique et historique ainsi que le rôle qu’y jouent, ou qu’y ont joué les États européens. Quels sont les pays que l’on situe ordinairement au Proche-Orient ? Que savez-vous de la Palestine ? À quoi pensez-vous lorsqu’on évoque la Palestine ? Quelles langues y parle-t-on ? Quels sont les liens qui unissent le Proche-Orient et l’Europe ? Quels évènements récents s’y rapportent ? Que s’est-il dit, dans vos pays, à propos de la flottille de la paix ? Comment l’évènement a-t-il été présenté ? Quels sont les mots d’origine étrangère qui se rapportent au conflit israélo-arabe ? Pistes de corrections / Corrigés : Les pays que l’on situe habituellement au Proche-Orient : Égypte, Irak, Israël, Jordanie, Liban, Syrie, Territoires palestiniens occupés. Palestine : La Palestine historique correspond aujourd'hui à un territoire incluant l'État d’Israël, les Territoires palestiniens et une partie du Royaume de Jordanie, du Liban et de la Syrie. Lorsque je pense à la Palestine, je pense à la Galilée, à la Judée, à la Bible, au royaume de David. Je pense à la violence et au terrorisme. Je pense à l’islamisme, à l’extrémisme. Je pense à Yasser Arafat, à l’OLP, à la guerre des Six Jours, aux tunnels, au Fatah et au Hamas. Je pense au gouvernement israélien, au mur, à la colonisation, au sionisme, aux Kibboutz, aux refuzniks. Je me souviens du prix Nobel attribué à Yasser Arafat, Shimon Peres et Yitzhak Rabin. Je pense à la culture palestinienne, à la poésie de Mahmoud Darwich, à la ville de Jérusalem, au Mur des Lamentations. En Palestine et en Israël, on parle l’hébreu, l’arabe palestinien. Les liens qui unissent le Proche-Orient à l’Europe : l’empire grec et romain, les croisades, les Ottomans, la campagne napoléonienne, le mandat britannique, les valeurs défendues par l’Union européenne. On a beaucoup parlé, récemment, de la flottille de la liberté, mais également des menaces pesant sur Haneen Zoabi, députée à la Knesset. Les mots qui se rapportent au Proche-Orient : Alya ou Aliyah : littéralement, ascension ou élévation spirituelle. Ici, immigration en Terre sainte. Intifada : mot arabe signifiant soulèvement. Kibboutz : communautés ou villages collectivistes. Knesset : parlement israélien. Refuznik : objecteur de conscience refusant de servir dans Tsahal. Tsahal : armée de défense d’Israël. Autres mots : diaspora, exode, Shoah, holocauste, etc.

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Informations complémentaires : Le premier exode Après la domination égyptienne, qui s’étend sur près de quatre siècles à partir du milieu du XVIe siècle av. J.-C., apparaissent, dans les zones montagneuses moins exposées aux invasions des Peuples de la Mer, les premiers Israélites. Vers 700 av. J.-C., après l’invasion assyrienne, Jérusalem prend une importance considérable. Mais c’est avec le roi babylonien Nabuchodonosor, en 586 av. J.-C., que l’histoire de la diaspora du peuple de Juda, ainsi qu’il est relaté dans la Bible, commence véritablement. Juda devient Jehoud, la Judée. Même si Cyrus le Grand, le nouveau maître perse de Babylone, autorise par édit, en 539 av. J.-C., le retour des Israélites en Palestine, ceux-ci hésitent : le pays est appauvri par les guerres. La victoire d’Alexandre le Grand sur les Perses, en 333 av. J.-C., qui installe pour près de trois siècles la domination grecque (séleucide) sur toute la région, entraîne la révolte des Hasmonéens (les Macchabées de la Bible, épaulés, en 164 av. J.-C., par les Romains), et la restauration de l’État de Juda. Sous la monarchie hasmonéenne, les habitants adoptent le judaïsme. Mais au premier siècle av. J.-C., une crise de succession conduit le gouverneur Antipater à s’allier avec les Romains. Pompée entre à Jérusalem en 63 av. J.-C. Au début de l’ère chrétienne, la population de Judée (désormais appelée Palestine, en référence aux Philistins) est composée en majorité d’habitants d'origine grecque en partie convertis au judaïsme, d’un tiers de Juifs autochtones, et de quelques groupes de Nabatéens. En Judée/Palestine, les Romains suscitent de nombreuses révoltes du peuple juif (Zélotes, en 66-70, notamment). Les derniers bastions juifs sont réduits par Titus, fils de Vespasien, en 73 (forteresse de Massada), ce qui, d’ailleurs, n’achève pas le cycle des persécutions (Trajan massacre les Juifs d’Égypte en 114 et 117), ni celui des révoltes juives (132, après l’interdiction de la circoncision). Cette dernière révolte entraîne l’abolition définitive du royaume de Judée, en 135. La Terre sainte La conversion, pendant la période byzantine, de Constantin 1er au catholicisme, modifie notablement l’image de la Palestine : considérée désormais comme Terre sainte, elle héberge une majorité chrétienne, une forte minorité juive, des Arabes païens et une communauté samaritaine. L’Islam faisant également de Jérusalem un lieu sacré, la cité devient un symbole géopolitique de première importance. Elle tombe d’ailleurs aux mains des musulmans, et la Coupole du Rocher est construite à l’emplacement du temple juif, détruit par les Romains en 70. Les musulmans dominent la région jusqu’à la première croisade, en 1096, Jérusalem est prise, occasionnant le massacre tant des musulmans que des Juifs, en 1099. Le royaume franc durera deux siècles. En 1187, Saladin reprend Jérusalem. L’Occident lève contre lui la troisième croisade, connue comme l’armée des Rois, qui échoue à reprendre Jérusalem, mais parvient à défendre ses intérêts du Levant, notamment les ports. La défaite des Croisés et la tolérance ottomane encouragent, par la suite, les Juifs à se réinstaller en Palestine. Cette tolérance ottomane se vérifiera notamment lorsque trouveront refuge en Palestine tant les populations arabes, chassées du croissant fertile par l’avancée mongole, que, à la fin du XVe siècle, les Juifs séfarades, expulsés d’Espagne. Les débuts du sionisme Le XIXe siècle voit l’arrivée massive d’Arabes de Transjordanie. En 1854, un compte-rendu de Karl Marx, envoyé spécial pour le New York Tribune au Moyen-Orient, indique que les Juifs représentent les deux tiers de la population de Jérusalem. Mais la réalité de la capitale n’est pas significative au niveau national. Les chiffres de 1881, synthétisés récemment par Benny Morris, montrent l’écrasante supériorité démographique musulmane : 400 000 musulmans, entre 13 000 et 20 000 Juifs et 42 000 chrétiens, la plupart orthodoxes grecs. C’est précisément en 1881 que débute la première vague d’immigration juive, à la suite de l’assassinat du tsar Alexandre II. Deux leviers principaux sont mis en œuvre par le mouvement sioniste pour permettre l’installation des migrants : des bases de collectes socialistes ou communistes, d’une part, des investissements personnels (le baron Edmond de Rothschild achète des terres et finance les premières colonies), d’autre part. Des méthodes collectivistes sont appliquées et, dès 1909, les premiers kibboutz voient le jour. Dès 1903, le sixième Congrès sioniste adopte le principe d’une installation en Palestine, confortant ainsi Les idées de Theodor Herzl (1896, Der Judenstaat), même si, jusqu’à la Shoah, le sionisme demeure un mouvement minoritaire parmi les Juifs.

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En territoire palestinien, les incidents opposant Juifs et Arabes se multiplient (Jaffa, par exemple, où est basée la Compagnie pour le développement de la Palestine). La création d’Israël La capitulation ottomane permet aux Alliés, après la conférence de San Remo (19 au 26 avril 1920), de prendre le contrôle du Proche-Orient. Les Britanniques déçoivent les espoirs de leurs alliés arabes alors que la déclaration de Balfour assure le peuple juif du soutien britannique. Cependant, aux vues des tensions croissantes et de plus en plus motivées par la question religieuse, les Britanniques fixent progressivement des quotas à l’immigration juive, jusqu’au livre blanc de Mac Donald, en 1939 qui propose d’interdire toute immigration juive dans un délai de 5 ans. La Seconde Guerre mondiale redessine les clivages autour de la lutte pro ou anti-juive. Le Grand Mufti de Jérusalem, Haj Amin al-Husseini, rencontre plusieurs dirigeants nazis, pendant que David Ben Gourion négocie avec les délégués sionistes américains, à la conférence de Biltmore. À la fin de la guerre, les Britanniques, usés par l’activisme juif, abandonnent leur mandat sur la Palestine. L’ONU reprend le flambeau, par le truchement d’une commission d'enquête, l'UNSCOP (United Nations Special Committee on Palestine). Le 29 novembre 1947, l’Assemblée générale de l’ONU vote, avec le soutien des grandes puissances, une résolution sur le partage de la Palestine. Deux États, un juif et un arabe, sont créés. Contrairement à la droite nationaliste sioniste, aux pays arabes, et à l’ensemble des organisations politiques palestiniennes, l’Agence juive soutient le plan (ainsi que le parti communiste palestinien, aligné sur Moscou). Les réfugiés palestiniens Dès les premiers jours, la légitimité de l’État juif est mise en cause, tout comme le tracé de ses frontières, si bien qu’éclate, en décembre, la guerre civile. En janvier 1948, des volontaires arabes entrent en Palestine. De leur côté, les forces juives se rassemblent pour former Tsahal, la force de défense d’Israël. Le 14 mai 1948, la Déclaration d’indépendance, qui proclame la création de l’État d’Israël, ne met pas un terme à la guerre. En dépit de la réaction arabe, soutenue par les Britanniques, Israël affirme, avec l’aide logistique du bloc de l’Est, sa domination régionale, de juillet à octobre 1948, ce qui provoque de nouveau un exode massif : à la fin de la guerre, plus de la moitié des Palestiniens sont des réfugiés. La plupart d’entre eux passeront sous tutelle jordanienne après l’annexion de la Cisjordanie. Deux lois vont jouer un rôle déterminant sur la suite des évènements : La loi sur les propriétés abandonnées qui gèle, pour les réfugiés palestiniens, toute opportunité de retour (elle autorise la saisie des biens de toute personne absente du 29 novembre 1947 au 1er septembre 1948), et la loi du retour (1950), qui garantit à tout Juif (ainsi qu’à son éventuelle famille non juive) le droit d’immigrer en Israël. Cette loi rencontre d’autant plus de succès que la décolonisation du nord de l’Afrique, à la fin des années cinquante et au début des années soixante, encourage les Juifs du Maghreb à immigrer vers Israël. Les frontières de 1967 Le renforcement des nationalismes arabes conduit les États de la région à la guerre des Six Jours (05 juin au 10 juin 1967) qui voit non seulement la déroute des armées respectives de l’Égypte, de la Jordanie et de la Syrie, mais encore une large amputation territoriale (Cisjordanie, péninsule du Sinaï, bande de Gaza et plateau du Golan). La navigation par le détroit de Tiran est assurée et Jérusalem, qui était divisée entre Israël et la Jordanie depuis 1949, passe entièrement sous contrôle israélien. La guerre du Kippour, en 1973, donne une nouvelle occasion à Israël d’affirmer sa supériorité militaire : ses forces repoussent du plateau du Golan et du Sinaï, avec l’aide de Washington, l’attaque simultanée des armées syrienne et égyptienne. Après la guerre du Kippour, les relations israélo-égyptiennes se normalisent et aboutissent, en 1978, aux accords de Camp David. Le long siège de Beyrouth, en 1982, et surtout les massacres des camps palestiniens de Sabra et Chatila, sapent l’image d’Israël en Occident. (Principales sources : Le Monde diplomatique, lemonde.fr, Wikipédia, TV5MONDE, Persee.fr, Courrier International, Délégation générale de Palestine en France)

Luc Albrand,

Alliance française de Bruxelles-Europe, CELF – juin 2010 5/20

Le processus de paix En 1987 débute à Gaza la première Intifada, la guerre des pierres. L’année suivante, Yasser Arafat, leader, depuis 1969, de l’OLP (Organisation de libération de la Palestine), se fait élire à Alger, par le Conseil national palestinien, Président de l’État indépendant palestinien. Les négociations conduites à Oslo débouchent, en août 1993, à la Maison-Blanche, sur un accord de paix. Yasser Arafat, qui réinstalle l’Autorité palestinienne à Gaza l’année suivante, reçoit avec Shimon Peres et Yitzhak Rabin le prix Nobel de la paix. Ce faisant, l’armée israélienne se retire de 70 % de la bande de Gaza et de Jéricho. L’assassinat d’Yitzhak Rabin, en 1995, par un extrémiste juif, ne gèle pas le retrait israélien de Cisjordanie, renforcé, le 23 octobre 1998, par l’accord de Wye Plantation. Le retrait israélien de Gaza Ces évènements encourageants sont brutalement interrompus à partir de septembre 2000, avec l’enlisement des négociations de Camp David II et, à la suite de la visite d’Ariel Sharon à l’esplanade des mosquées/mont du Temple (dont le statut, comme celui de Jérusalem, était en discussion à Camp David), le déclenchement de la seconde Intifada. Après la rencontre d’Ariel Sharon et du successeur de Yasser Arafat, Mahmoud Abbas, à Charm el-Cheikh, Israël procède au retrait et au démantèlement des colonies juives de la bande de Gaza (été 2005). Cet évènement capital de l’histoire contemporaine est accompagné du démantèlement de plusieurs colonies en Cisjordanie, ainsi que de la construction de la barrière de sécurité. La reprise du conflit La paix, que l’on pouvait croire proche, est menacée par deux évènements successifs : d’une part, fin 2005, Ariel Sharon, acteur principal du plan de désengagement israélien de la bande de Gaza, est victime de deux attaques qui le plongent dans le coma, d’autre part, le Hamas (parti islamiste qui ne reconnait pas Israël et appelle à sa destruction), est élu dans la bande de Gaza. Les fonds versés par Israël à l’autorité palestinienne sont gelés, un blocus, décidé conjointement avec l’Égypte, est établi autour de la bande de Gaza. L’attaque, en juin 2006, d’un poste armé de Tsahal à la frontière sud d’Israël, et l’enlèvement du caporal Guilad Shalit, entraînent la riposte d’Israël (opération Pluie d'été). Après 2006, la détérioration de la situation se poursuit. De graves crises minent tant le gouvernement israélien (le Président Moshe Katsav est contraint à quitter son poste suite à une affaire de mœurs, Ehoud Olmert, mis en cause dans des affaires de corruption, démissionne, Tzipi Livni, élue de justesse à la tête du parti Kadima, échoue à former un gouvernement) que le gouvernement palestinien (opposition entre le Fatah du Président Mahmoud Abbas et le Hamas du Premier ministre Ismaïl Haniyeh, limogeage de ce dernier, prise de contrôle par le Hamas de la bande de Gaza, scission du territoire palestinien). En Israël, les élections sont favorables au candidat de droite, Benyamin Netanyahou, sans lui permettre de dégager une majorité claire. À la fin de l’année, les tensions se ravivent, c'est le début de l'opération Plomb durci. Les Israéliens envoient des troupes dans la bande de Gaza et suscitent de nombreuses protestations dans la communauté internationale. Au printemps 2010, la réaction d’Israël face aux bâtiments de la flottille de la liberté, qui tentaient de briser le blocus, tend les relations non seulement avec les pays arabes, mais avec la Turquie, et, à un moindre degré, avec les États-Unis. Le Moyen-Orient en cartes http://www.tv5.org/TV5Site/info/continent-3-moyen-orient.htm http://www.tv5.org/TV5Site/info/geofiche-108-israel.htm http://www.lexilogos.com/palestine_carte.htm

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2. Compréhension de l’entretien Cette étape permet aux apprenants de repérer des informations précises dans l’émission. Distribuer et demander de lire les questions (cf. p. 19). Première écoute / prise de note / réponse aux questions. Les apprenants se consultent pour vérifier les réponses. Si nécessaire, une deuxième écoute peut être effectuée.

Pistes de corrections / Corrigés :

L’invité Née le 21 août 1949, Nicole Kiil-Nielsen est à la fois conseillère principale d’éducation au lycée Émile-Zola de Rennes, et femme politique française. Militante féministe et anti-nucléaire depuis la fin des années 1960, elle est à l’origine proche de la LCR (Ligue communiste révolutionnaire). Elle adhère, dès la fin des années 1980, aux Verts. Lors des élections municipales de 2001, elle obtient son premier mandat électif. Le 07 juin 2009, elle est élue députée européenne. Page personnelle : http://www.nicolekiilnielsen.eu/

L’intervenant

Manuel Musallam a été curé de Gaza de 1995 à 2009. Auteur d’Un Curé à Gaza, entretiens avec Jean-Claude Petit, éditions de l’Aube. Lien audio RFI, Interview du curé de Gaza du 06/06/2010 : http://www.rfi.fr/general/20100606-1-grande-interview-pere-manuel-musallam-cure-gaza-1995-2009

Les questions

1) Comment Paul Germain introduit-il son sujet ? Il joue sur les acceptions du verbe secouer (agiter le milk-shake, mais également être secoué, être malmené). 2) Pourquoi interroge-t-on Nicole Kiil-Nielsen, qui est écologiste, sur la crise de Gaza ? Parce que les dates de sa visite à Gaza, au sein d’une délégation parlementaire, coïncidaient avec celles des évènements relatifs à la flottille de la liberté.

3) À quoi se réfèrent les intervenants lorsqu’ils parlent de flottille ? Une flottille est, selon le Grand Robert, une réunion, flotte* (1. Flotte) de petits bâtiments. — Flottille de pêche (d’un port, d'un armateur, sur les lieux de pêche). — En parlant de petits navires de même type d'une escadre. Ici, il s’agit précisément de la flottille internationale composée de six bateaux, qui acheminait des centaines de militants pro-palestiniens et 10 000 tonnes de matériel et d'aide humanitaire, et contre laquelle, le 31 mai 2010, l’armée israélienne a donné l’assaut. Pour plus d’informations, voir p. 8 du présent document, ou consulter les liens suivants : http://www.lemonde.fr/proche-orient/article/2010/05/31/assaut-israelien-contre-la-flottille-en-route-vers-gaza_1365247_3218.html http://www.lexpress.fr/actualite/monde/proche-orient/gaza-qui-se-trouve-derriere-la-flottille-de-la-paix_896619.html

4) Quel est, à ce sujet, le point sur lequel le journaliste et la députée se trouvent en désaccord ? Quelle est

la réaction de l’invitée ? La question porte sur les intentions pacifistes des militants. L’invitée botte en touche : plutôt que de répondre directement, elle évoque le rôle que devrait jouer l’Union européenne.

Luc Albrand,

Alliance française de Bruxelles-Europe, CELF – juin 2010 7/20

5) Quels éléments vous permettent de dire que les Gazaouis ont besoin d’une aide humanitaire ? - La population de Gaza vit sous le seuil de pauvreté. - 80 % des Gazaouis n’ont pas de travail. - Les Gazaouis ont le droit de survivre. - Il y a beaucoup de jeunes, beaucoup d’enfants qui manquent de calories et d’activités. - Au moins 60 % de jeunes de moins de 18 ans actuellement. - Les jeunes sont privés d’aliments de base.

6) Pourquoi, selon Nicole Kiil-Nielsen, la société civile est amenée à intervenir ? Pour deux motifs : d’une part, les médias permettent à chacun de connaître la situation palestinienne, d’autre part, en dépit de la situation dont chacun a connaissance, les politiques n’interviennent pas (elle parle de l’inertie des politiques).

7) Pourquoi pense-t-elle que l’Europe a le devoir d’intervenir ? Citez deux arguments. Comment ? Elle pense que l’Europe a joué un rôle historique dans la région, et notamment lors de la création de l’État d’Israël. Elle pense que l’Europe a une responsabilité en ce qui concerne le droit international et les droits humains. Il s’agit d’ailleurs, au sein de l’Union européenne, d’une position commune. L’Europe, parce qu’elle est le premier partenaire économique d’Israël, peut avoir recours à des pressions, voire à des sanctions économiques.

8) Quels sont les deux points qu’oublie, selon l’internaute, Nicole Kiil-Nielsen, lorsqu’elle critique la violence

d’Israël ? - Israël est en guerre contre le Hamas qui veut sa destruction. - Elle oublie de critiquer un pays arabe tel que l’Égypte, qui a aussi construit un mur d’acier entre sa

frontière et Gaza.

9) Pourquoi, selon Nicole Kiil-Nielsen, le cas de l’Égypte est-il particulier ? - Parce qu’il y a beaucoup de touristes (6 millions chaque été sur le Sinaï). - Parce que l’Égypte est partagée entre ses intérêts nationaux et ses relations avec son partenaire. - Parce qu’Israël est un voisin puissant. - Parce qu’en politique intérieure, il y a la question de l’essor des Frères musulmans.

10) Quel regard porte l’invitée sur l’État d’Israël ? Considère-t-elle qu’il s’agisse d’un État démocratique ? C’est un État démocratique puisqu’il permet aux journalistes présents sur son sol de le critiquer : la liberté de parole est respectée. Comme toutes les démocraties, Israël connaît des fluctuations. Actuellement, cet État est dirigé par un gouvernement d’extrême droite qui menace certains droits, comme le droit des associations, projet dont s’est ému le Parlement européen. 11) Pourquoi la responsabilité de la paix repose-t-elle essentiellement sur l’État d’Israël ? Parce qu’Israël est le pays le plus puissant de la région. Parce que c’est à Israël de répondre aux attentes de la communauté internationale en respectant les frontières de 1967, afin qu’il y ait un État palestinien viable. 12) Quel est le principal argument d’Israël pour justifier le blocus ? Quelle valeur donne l’invitée à cet argument ? Pourquoi ? L’État d’Israël invoque les menaces que fait peser sur lui le Hamas. Cet argument, pour Nicole Kiil-Nielsen, n’est pas fondé. La population de Gaza n’a pas voté pour le Hamas puisqu’elle est majoritairement composée de jeunes qui étaient mineurs à l’époque des élections.

13) Citez deux motifs pour lesquels, toujours selon Nicole Kiil-Nielsen, la politique israélienne est paradoxale. - Parce qu’en imposant le blocus sur Gaza, Israël renforce le pouvoir du Hamas. En effet, celui-ci contrôle

et taxe les marchandises qui transitent par les tunnels.

Luc Albrand,

Alliance française de Bruxelles-Europe, CELF – juin 2010 8/20

- Parce que le blocus contre Gaza ne punit pas le Hamas, mais les habitants, lesquels, étant âgés en majorité de moins de 18 ans (60 % d’entre eux), ne sont pas responsables de l’élection, il y a trois ans, du Hamas.

Informations complémentaires :

Le 27 décembre 2008 débute, par des raids et bombardements aériens, la guerre du Plomb durci. À partir du 03 janvier 2009, cette guerre prend la forme d’un raid terrestre dans la bande de Gaza, afin de réagir aux roquettes Quassam tirées par le Hamas. Le cessez-le-feu du 18 janvier ne met pas totalement fin aux échanges de tirs. Cette opération militaire a suscité une large réprobation dans l’opinion internationale, en raison du caractère jugé disproportionné de la riposte israélienne. La flottille de la liberté, selon le nom que lui ont donné les militants embarqués, était composée de 6 navires partis d’Istanbul afin de briser le blocus israélien. Ces bâtiments transportaient 700 militants propalestiniens de près de 50 nationalités, et 10 000 tonnes d’aide humanitaire. L’assaut, donné par l’armée israélienne le 31 mai 2010, provoque la mort de neuf militants turcs ou d’origine turque, et la réaction de la communauté internationale. La Turquie décide de geler ses relations avec Israël, cependant que la députée arabe israélienne, Haneen Zoabi, qui faisait partie des militants à bord, est inquiétée à la Knesset. Le 20 juin 2010, Israël décide d’alléger considérablement le blocus.

3. Analyse du discours / le point sur la modalisation L’étape 3 permet de travailler les particularités du discours. Sélectionnez l’activité ou les activités que vous désirez faire réaliser à vos apprenants. Plusieurs éléments peuvent en effet être pris en compte, juste soulignés par l’enseignant, ou faire partie d’une étude plus poussée en classe suivant les objectifs poursuivis et le temps dont l’enseignant dispose. Activité 1 : Modalisation. Activité 2 : Analyse du discours : la structure de la phrase. Activité 3 : Analyse syntaxique : le rôle des incises. Activité 1 – Modalisation Cette activité vise à montrer que le discours de Nicole Kiil-Nielsen, qui exprime à la fois prudence et détermination, répond précisément à la doxa politique. a. Distribuez la transcription. Organisez la classe en groupes afin de réécouter le document sonore. Demandez de rechercher, dans le discours de l’invitée, les éléments de phrase qui soulignent la désillusion, la prudence, la certitude. Quelles formes s’imposent dans le discours de Nicole Kiil-Nielsen ?

b. Quel usage Nicole Kiil-Nielsen fait-elle du verbe croire (lignes 48 à 68) ? À votre avis, qu’est-ce que cela démontre ? Pistes de corrections / Corrigés :

La désillusion : malheureusement, hélas, je suis désolée (qui est aussi, ici, une marque d’indignation).

La prudence : je ne m’aventurerai pas à commenter, je ne dis pas, je pense que, j’estime que, moi je le souhaite, j’espère, je n’en sais rien, je n’oublie pas, quand même, ce que j’ai envie de dire, je ne comprends pas bien.

La certitude : vraiment, évidemment, effectivement, ce que je sais, je crois (qui véhicule ici, non le doute mais l’idéal), ce n’est pas impossible, on sait bien, je sais, j’en suis convaincue.

Luc Albrand,

Alliance française de Bruxelles-Europe, CELF – juin 2010 9/20

Le discours de Nicole Kiil-Nielsen, bien que très énergique, démontre en fait un grand souci de prudence. Le verbe croire donne un caractère idéologique à son discours (on croit à des valeurs, par exemple).

Activité 2 – Analyse du discours : la structure de la phrase

Nicole Kiil-Nielsen s’emploie à véhiculer un message politique. Pour cela, elle a recours à trois stratégies facilement identifiables, l’évitement (elle louvoie), le recentrage (elle revient à ce qu’elle entend dire) et la démonstration, qui passe par la reformulation.

a. Repérez, dans son discours, des éléments caractéristiques de ces stratégies.

Quelle est celle à laquelle l’invitée a le plus recours ? Recherchez dans la transcription les expressions et formules qui permettent de recentrer le débat. b. Cherchez, dans les constructions syntaxiques, l’articulation de la phrase (lignes 9-17, 40-44, ou 105-110) par exemple), mais ses autres interventions peuvent être pareillement analysées.

Pistes de corrections / Corrigés :

a. Chacune des interventions (et surtout les plus longues) de Nicole Kiil-Nielsen donne des exemples de ces stratégies. Dans l’extrait suivant, la députée commence par éviter la question (de manière claire), puis elle construit sa démonstration.

Lignes 22-28. Écoutez, je n’en sais rien, je n’étais pas dans ces bateaux donc je ne m’aventurerai pas à commenter ceci ou cela. Mais ce que je sais, c’est que si l’Union Européenne, si les gouvernements européens faisaient leur travail, s’il y avait des solutions politiques, des réponses apportées à la situation de cette région, à ce blocus qui est vraiment inadmissible, eh bien, la société civile, les organisations ne seraient pas obligées de s’aventurer dans des expéditions de ce type. Je pense que si les citoyens sont obligés de prendre les choses en main, c’est parce que, grâce aux médias, grâce aux télévisions qui envoient des images, ils savent que la vie à Gaza est insoutenable, ils ne le supportent plus, seulement l’inertie des politiques fait qu’on en arrive à des initiatives de ce type.

Pour rendre son argumentaire plus efficace, elle a recours à l’anaphore (en répétant des segments de phrases qui permettent un effet d’accumulation (si… si…, Grâce à…)

Elle multiplie les phrases longues, abondamment illustrées par des exemples, et structurées en périodes. Ou encore dans l’extrait suivant : Lignes 76-87. Je n’oublie pas, je n’oublie pas de critiquer la Syrie ou l’Égypte, enfin différents pays dans la région, qui, hélas, ne sont ni des démocraties ni des pays acceptables de ce point de vue-là. Mais je pense que la situation de l’Égypte est tout à fait particulière, on sait bien qu’en Égypte il y a de nombreux touristes, 6 millions de touristes chaque été sur le Sinaï, et que l’Égypte est partagée entre ses propres intérêts nationaux et les relations avec son partenaire, son voisin, Israël, qui est quand même un voisin qui dispose d’une des armées les plus puissantes du monde, donc c’est très difficile, il y a aussi la question, en politique intérieure, des Frères musulmans, de la montée des Frères musulmans en Égypte, donc la situation en Égypte est délicate, je ne dis pas que je suis satisfaite par le fait que l’Égypte est, soit en train d’installer un mur d’acier, pas du tout, mais je sais que la situation est très difficile pour le gouvernement égyptien. Mais je pense que la responsabilité d’Israël est quand même entière, quand on a l’armée la plus puissante du monde, quand on a l’arme nucléaire, quand on est puissant comme Israël, eh bien, je suis désolée mais, on a les moyens de faire la paix et de répondre positivement aux attentes de la communauté internationale qui consiste à tout simplement dire, eh bien oui, nous allons respecter les frontières de 1967, il y aura un État palestinien viable.

Éléments permettant de recentrer le débat : Écoutez, je viens de le dire, j’ai constaté, je n’oublie pas, je ne dis pas, eh bien, comme vous le savez, c'est-à-dire, il faut le dire, mais je veux revenir sur, je ne me situe pas à ce niveau-là, en fait.

Éléments permettant de poursuivre le débat : donc, il y a aussi la question de…

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b. Les phrases s’articulent en périodes, qui renforcent ou illustrent le propos, et qui s’opposent.

Lignes 9-17. Écoutez, concernant la flottille, nous avons été très choqués parce que quand nous étions à Gaza, nous savions que cette flottille s’approchait, et les Gazaouis étaient vraiment très heureux de savoir qu’il y avait cette solidarité internationale qui s’organisait, et malheureusement, quand nous avons appris que l’armée avait tiré sur ces militants pacifistes, vraiment, nous avons été très choqués, d’autant que la situation à Gaza est évidemment déplorable et que les personnes qui ont fait cette flottille, qui l’ont organisée, le savent, la population de Gaza vit sous le seuil de pauvreté, 80% n’a pas de travail, il y a beaucoup de jeunes, beaucoup d’enfants, qui n’ont pas beaucoup de, et de calories, et d’activités, donc, ils ont le droit de survivre, effectivement, grâce à l’aide humanitaire, les Gazaouis survivent mais n’ont pas droit à la vie, et c’est vraiment très triste.

Lignes 40-44. Écoutez, je suis tout à fait d’accord avec vous, je partage ce point de vue. Je viens de le dire, la faute est au politique, effectivement, nous devons protéger le peuple de Gaza, comme le peuple d’ailleurs de Cisjordanie, c’est le rôle de l’Europe qui a une responsabilité historique dans cette région en raison de la création de l’État d’Israël et du contexte dans lequel ça s’est fait, donc, moi j’estime que la légitimité de l’Europe, elle est entière, et sa responsabilité également.

Lignes 105-110 (…) mais je veux revenir sur la question du Hamas, ce que j’ai envie de dire par rapport à cela, c’est que le Hamas est renforcé par le blocus à Gaza, j’ai vu les tunnels, nous avons vu les tunnels, l’économie des tunnels renforce les islamistes, et ceux du Hamas et des autres factions, qui s’enrichissent en faisant payer une taxe à tous ceux qui achètent les produits qui transitent par ces tunnels, donc je comprends pas bien la position d’Israël parce qu’en fait, ils ne font que renforcer les extrémistes y compris en tirant, comme ils l’ont fait, sur la flottille de la paix. Activité 3 – Analyse syntaxique : le rôle des incises Pour rendre son discours plus convaincant, Nicole-Kiil-Nielsen multiplie les exemples et les incises. Mais que resterait-il de ses arguments si exemples et incises étaient supprimés ? Par groupe de deux, reprenez les arguments significatifs afin de rédiger un tract à l’usage des députés européens. Choisissez des formules efficaces pour retranscrire ses idées et en faire des slogans.

Pistes de corrections / Corrigés : Paragraphe 1. Écoutez, concernant la flottille, nous avons été très choqués parce que quand nous étions à Gaza, nous savions que cette flottille s’approchait, et les Gazaouis étaient vraiment très heureux de savoir qu’il y avait cette solidarité internationale qui s’organisait, et malheureusement, quand nous avons appris que l’armée avait tiré sur ces militants pacifistes, vraiment, nous avons été très choqués, d’autant que la situation à Gaza est évidemment déplorable et que les personnes qui ont fait cette flottille, qui l’ont organisée, le savent, la population de Gaza vit sous le seuil de pauvreté, 80% n’a pas de travail, il y a beaucoup de jeunes, beaucoup d’enfants, qui n’ont pas beaucoup de, et de calories, et d’activités, donc, ils ont le droit de survivre, effectivement, grâce à l’aide humanitaire, les Gazaouis survivent mais n’ont pas droit à la vie, et c’est vraiment très triste. Les arguments : L’armée israélienne tire sur des militants pacifistes. La Population de Gaza vit sous le seuil de pauvreté. Les Gazaouis survivent mais n’ont pas droit à la vie… etc.

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4. Production orale Cette étape vise à bâtir progressivement une présentation argumentée, construite et nuancée, afin d’être capable d’aborder un sujet délicat avec tact, tout en respectant la diversité des interlocuteurs (reformulation, précision, concession et négociation). Certaines formulations utilisées par Nicole Kiil-Nielsen peuvent être reprises (expression de la prudence, notamment). Activité 1 : Argumentation. Activité 2 : Production orale avec plan contrasté. Activité 3 : Nuancer et modérer une présentation/un débat. Activité 1 – Argumentation

Cette étape vise à préparer une argumentation sur le rôle joué par Lady Catherine Ashton, Haut représentant pour les Affaires étrangères de l’Union européenne.

a. Lancer un débat sur le thème suivant (voir lien d’Agoravox, dans articles récents, p. 15.)

La politique étrangère européenne s’est-elle dotée d’un visage, ou dispose-t-elle de moyens réels d’action ?

b. Organiser un débat sur le thème suivant : que pensez-vous du rôle que joue désormais la société civile ?

Pistes de corrections / Corrigés : a. Pistes envisageables : - Limites de sa représentativité. - Limites de son champ d’action. - Sa légitimité politique est contestée. - Conflit entre le pouvoir public et le pouvoir civil.

Informations complémentaires :

Catherine Margaret Ashton est née le 20 mars 1956 dans le Lancashire. Personnalité politique britannique, elle devient, le 1er décembre 2009, après avoir été première vice-présidente de la Commission européenne, haut représentant de l’Union pour les Affaires étrangères et la politique de sécurité. Sa nomination a fait l’objet de critiques virulentes au sein même du Parlement européen, du fait que l’intéressée n’a ni exercé de mandat électoral ni occupé de poste dans le secteur privé.

De nombreux éléments historiques, essentiellement situés au cours de la première moitié du XXe siècle (mais pas seulement), tels que les racines du sionisme, l’accord de Sykes-Picot, les mandats britannique et français, la Shoah, les récentes migrations de Juifs européens (Pologne, Allemagne, France, etc.) et la réconciliation franco-allemande, donnent une densité spécifique à l’action de l’Union européenne au Proche-Orient. Berceau de la culture judéo-chrétienne dont le rôle, en Europe, ne peut être occulté, le Proche-Orient compte désormais pour première puissance régionale un État en partie peuplé d’immigrants qui ont tourné le dos à l’Europe, symbole pour eux, ainsi que le souligne Avi Primor, de souffrances et de persécutions. Aujourd’hui, l’Union européenne place au centre de ses exigences le respect de la démocratie et des droits de l’homme, position qui s’est traduite dans le conflit israélo-palestinien par de nombreuses prises de position plutôt défavorables à l’État d’Israël (alors que l’UE constitue le premier partenaire économique de l’État juif) et par une participation active dans les négociations (comme celles, achevées le 30 avril 2003, qui ont permis de définir, au

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sein du Quartette diplomatique États-Unis, Russie, ONU, UE, la feuille de route pour la paix). Il n’en demeure pas moins que le rôle de l’UE dans la résolution du conflit paraît extrêmement faible, en comparaison avec celui que joue d’autres acteurs, tels que les États-Unis. Par ailleurs, la création, avec le traité de Lisbonne, du poste de Haut représentant de l’Union pour les Affaires étrangères et la politique de sécurité, qu’occupe aujourd’hui Catherine Ashton, n’a pas permis de dégager une ligne unanime de la politique étrangère européenne. (Sources principales : le Taurillon, Wikio.fr, Persée, Canal académie, Wikipédia)

b. Pistes envisageables : - Le rôle capital que joue désormais la société civile aux États-Unis et en Europe. - L’importance des lobbies. - Les consultations dans les institutions et agences européennes. - L’apparition, avec Internet, de mouvements spontanés. Etc.

Informations complémentaires

Le Livre Blanc de la gouvernance de l’Union européenne donne de la société civile cette définition : La société civile regroupe notamment les organisations syndicales et patronales (les partenaires sociaux), les organisations non gouvernementales (ONG), les associations professionnelles, les organisations caritatives, les organisations de base, les organisations qui impliquent les citoyens dans la vie locale et municipale, avec une contribution spécifique des Églises et communautés religieuses.

Autres pistes de débat : le boycott des artistes israéliens, et parallèlement, la stigmatisation des artistes se produisant en Israël (Brian Molko, par exemple). Voir à ce sujet : www.lesinrocks.com/.../interview-de-brian-molko-en-israel-alors-que-des-artistes-boycottent-le-pays/ www.lemonde.fr/.../ne-boycottons-pas-les-artistes-israeliens_1370026_3232.html Activité 2 – Production orale avec plan contrasté

Organiser un débat autour des relations ambigües qu’entretiennent l’histoire et la politique. Les manuels d’histoire divergent en fonction du pays où ils sont publiés. Quel est le sentiment des apprenants ?

Comment l’histoire s’écrit-elle d’un côté ou de l’autre d’une frontière ?

Demander des exemples. Choisir, si nécessaire, un modérateur.

Pistes de corrections / Corrigés :

Les exemples sont aussi nombreux que le nombre de conflits potentiels. L’écrivain français Jean-Pierre Faye, entre autres, s’est penché sur cette question (Jean-Pierre Faye, Introduction aux langages totalitaires, Théorie et transformation du récit, Hermann, 2003).

Les exemples les plus célèbres que l’on peut citer :

- La figure du Cid.

- La dépêche d’Ems.

- Les origines de la Première Guerre mondiale.

- Les guerres de décolonisation, etc.

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Activité 3 – Nuancer et modérer une présentation, un débat

Cette activité vise à nuancer et à modérer un exposé à l’aide d’un plan contrasté. L’activité peut donner lieu à des préparations et à une présentation en classe, ou bien, si les connaissances des élèves sur ce sujet le permettent, une production plus spontanée. Un débat peut éventuellement être organisé, et un modérateur nommé. Il est essentiel de préparer les expressions (et locutions) permettant de traduire la nuance et la modération. Choisissez collectivement un sujet et préparez-le. Cherchez le vocabulaire et les expressions de la nuance et de la modération. Présentez brièvement (3 à 5 minutes) les deux aspects de votre sujet. Modérez les interventions des autres apprenants. Lors de votre présentation, les deux points de vue doivent être clairement présentés, en utilisant des articulateurs chronologiques et logiques. Les sujets suivants, parce qu’ils sont très commentés et qu’ils se prêtent particulièrement à controverse, offrent de larges pistes de recherche :

- L’origine juive au Proche-Orient.

- L’influence napoléonienne sur l’épanouissement juif.

- Le rôle du mandat britannique. Pistes de corrections / Corrigés : L’origine juive au Proche-Orient L’histoire de la Palestine a longtemps été influencée par les récits bibliques. Les recherches du début du XXe siècle tendaient plutôt à légitimer la tradition qu’à une véritable exactitude scientifique. Cependant, des recherches archéologiques récentes, grâce, notamment, à la datation au carbone 14, permettent de faire le départ avec plus de précision : l’apparition des peuples semi-nomades israélites ne daterait que de 1200 av. J.-C. Les évènements bibliques antérieurs à 700 av. J.-C. (arrivée en Canaan des Hébreux de l’Exode, conquête de Canaan, monarchie unie de David et Salomon, etc.) seraient par conséquent sujets à caution. La polémique n’est pas éteinte pour autant. Le récent débat entre Israël Finkelstein, dont les thèses contenues dans The Bible Unearthed, qualifiées d’anti religieuses, anti israéliennes, voire anti juives, reprennent les découvertes récentes, et William G. Dever, qui, dans Who where the Early Israelites and where did they come from ?, défend la véracité historique des récits bibliques en soulignant que l’origine du peuple israélite serait bien contemporaine de l’époque cananéenne, dans la mesure où n’existait, entre Cananéens et proto-Israélites, qu’une différence d’ordre sociologique : les premiers étaient les habitants des cités, administrés par les Égyptiens, tandis que les seconds étaient d’origine paysanne. Israël est mentionné (mais l’interprétation des hiéroglyphes fait débat) sur la stèle Mérenptah. La maison de David est différenciée de la maison d’Omri, ainsi qu’est désignée la dynastie d’Israël dans les archives assyriennes) sur la Stèle de Tel Dan, postérieure à 900 av. J.-C.

L’influence napoléonienne sur l’épanouissement juif Napoléon fait une apparition brève au cours de la campagne d’Égypte, le temps de susciter pour longtemps la polémique : il aurait reconnu, le 20 avril 1799, la propriété de la Terre Sainte au peuple juif. Ce point, naturellement, est l’objet de controverses entre historiens. Si l’intérêt qu’a porté l’Empereur, pour des motifs divers (en 1806, des révoltes éclatent en Alsace contre les Juifs, auxquels on reproche notamment la pratique des intérêts usuraires), aux Juifs de l’Empire n’est pas discutable (rétablissement du culte des Israélites, le 30 mai 1806). Henry Laurens, historien et spécialiste du monde arabo-musulman, fait cependant remarquer que « Bonaparte, qui s'est voulu le défenseur de l'Islam et de l'arabisme, est passé injustement à la postérité comme l'un des fondateurs du sionisme, ce qu'il n'a jamais été et qu'il n'a jamais prétendu être ».

Le rôle du mandat britannique La chute de l’empire ottoman constitue un élément-clé (au même titre que les références biblico-historiques) du futur conflit palestinien, comme en témoigne l’abondante littérature qui lui est consacrée. La victoire de Beer-Sheva, qui assure aux Britanniques le contrôle de Jérusalem, et la capitulation ottomane, n’est que

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l’aboutissement des visées colonialistes franco-britanniques dont l’accord de Sykes-Picot (partage du Moyen-Orient en cinq zones) donne un aperçu significatif. Les motivations de la déclaration de Balfour (du nom du ministre britannique des Affaires étrangères) sont moins claires. Cette lettre ouverte, publiée le 2 novembre 1917, qui assure aux Juifs le soutien du Royaume-Uni dans son projet d’établir en Palestine leur nation, trompe en effet la confiance des Arabes, lesquels s’étaient joints aux Alliés pour défaire l’empire Ottoman contre la promesse d’un grand État musulman. La déclaration sera pourtant incluse à la conférence de San Remo (19 au 26 avril 1920), où sont définis les mandats respectifs de la France (Syrie, Liban) et du Royaume-Uni (Palestine, notamment), et sera approuvée par la Société des Nations, deux ans plus tard. L’accord signé lors de la conférence de paix de Paris, en 1919, entre Fayçal ibn Hussein, chef victorieux (en Syrie) de la révolte arabe, et Chaim Weizmann, leader du mouvement sioniste et futur Président de la République, reste lettre morte. Dès lors, le conflit judéo-arabe, que W. Churchill attribue, dès 1921, non à la présence des Juifs mais au projet d’État national, se durcit. Cette tension se manifeste également par un rejet du mandat britannique de la part des organisations palestiniennes et une ambigüité croissante de la politique britannique. En dépit de la perte de la Transjordanie (futur Royaume Hachémite de Jordanie, après l’annexion de la Cisjordanie, en 1949), qui devient un émirat autonome, et des quotas fixés par les Britanniques, l’immigration juive se poursuit (Pologne, 1924, Allemagne, avec l’accession d’Hitler). Les tensions avec les Palestiniens, de plus en plus motivées par des questions religieuses, conduisent les Britanniques à une frilosité dont le livre blanc de Mac Donald, en 1939 (proposition d’interdire toute immigration juive dans un délai de 5 ans) donne la mesure.

Les expressions de la nuance et de la modération (quelques exemples) :

Ce n’est pas si simple…

Ne soyez pas si affirmatif/positif

Cela mérite réflexion…

Certes…

Cela/il se pourrait, cependant…

C’est une question à prendre avec des pincettes…

Ce sujet/point est délicat/complexe…

Sur cette question, nous marchons sur des œufs…

Il serait préférable de ne pas aborder ce sujet…

L’analyse est fine, cependant…

Je vous invite à plus de retenue/de modération

Il faut savoir raison garder… etc.

5. Production écrite et orale Activité 1 – Jeux de rôle

Jouez au Bar de l’Europe. Par groupes de deux, préparez une émission sur l’un des thèmes abordés précédemment (l’influence de la politique européenne sur le Proche-Orient, le rôle de la société civile, la narration historique, voire l’art de la modération).

Attribuer le rôle de Paul Germain et celui de l’invité aux membres du binôme. Cherchez une métaphore culinaire pour introduire le sujet. Travaillez vos relances (pour le journaliste), votre style de réponse (pour l’invité) en fonction du registre (soutenu, standard) et de l’objectif (politique, social, etc.). Faites une présentation courte (3 minutes maximum) en demandant au groupe de réagir.

Luc Albrand,

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Activité 2 – Conversation Choisir l’un des dessins dans le lien suivant. Que vous inspire-t-il ? Échangez vos opinions. http://www.tv5.org/TV5Site/publication/galerie-164-21-Boukhari_Palestine.htm

6. Ressources complémentaires de Courrier International

http://www.courrierinternational.com/dossier/2010/06/09/l-attaque-de-la-flottille-de-gaza http://cartoons.courrierinternational.com/dessin/2010/06/03/la-flottille-de-la-paix-vue-d-israel http://www.courrierinternational.com/article/2010/06/15/un-leger-mieux-pour-les-habitants-de-cisjordanie www.courrierinternational.com/fiche-pays/territoires-palestiniens http://www.courrierinternational.com/article/2010/06/17/au-dela-des-cliches http://www.courrierinternational.com/article/2010/06/17/lettre-ouverte-a-bernard-henri-levy

7. Liens pour aller plus loin

Sites institutionnels

http://www.mfa.gov.il/MFA/Facts+About+Israel/Israel+in+Maps/ (en anglais) www.palestine-diplo.com/ http://paris1.mfa.gov.il/mfm/web/main/missionhome.asp?MissionID=31&

Vidéos

http://www.youtube.com/watch?v=n3sqFWVwnpE http://www.youtube.com/watch?v=cXFObiCwdfs http://www.dailymotion.com/video/xdia5s_michel-collon-attaque-de-la-flotill_news http://www.youtube.com/watch?v=DRf0aB3BNEY

Audios

http://www.europe1.fr/International/Shek-pas-d-excuses-205818/?gclid=CPno8eXhwqICFVKX2AoduR0X6A http://www.rfi.fr/general/20100606-1-grande-interview-pere-manuel-musallam-cure-gaza-1995-2009

Articles de presse récents

http://www.cartooningforpeace.org/ http://www.agoravox.fr/actualites/international/article/palestine-4-71820 http://www.lemonde.fr/idees/article/2010/06/08/la-guerre-des-juifs-ne-doit-pas-avoir-lieu_1369167_3232.html http://www.courrierinternational.com/article/2010/06/02/gaza-sera-notre-vietnam http://www.tv5.org/TV5Site/publication/galerie-164-21-Boukhari_Palestine.htm

Revues, articles de revues, livre

Dever, William G., Aux origines d'Israël. Quand la Bible dit vrai, Éditions Bayard, 2005. Édition originale : Who where the Early Israelites and where did they come from ?, éditions Eerdmans, 2003

Faye, Jean-Pierre, Introduction aux langages totalitaires, Théorie et transformation du récit, Hermann, 2003, ISBN 978-2-253-12929-5. Finkelstein, Israël, la Bible dévoilée, éditions Bayard, 2002, Folio histoire, Gallimard, 2004, titre original: The Bible unearthed : archaeology's new vision of ancient Israel and the origin of its sacred texts, New York, Free Press, 2001. Gresh, Alain et Vidal Dominique, Palestine 47, un partage avorté, éditions complexe, 1994, P. 77.

Laurens, Henry, Orientales I. Autour de l’expédition d’Égypte, Paris, CNRS Éditions (Coll. Moyen-Orient), 2004, 306 p., ISBN 2-271-06193-8

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Morris, Benny. Histoire revisitée du conflit arabo-sioniste (titre original Righteous Victims. A History of the Zionist-Arab Conflict, 1881-1999.), Éditions Complexe (CNRS-IHTP), 2003, ISBN 2-87027-938-8, p. 18.)

Philippe Bernard, Le prix de la paix, Israël-Palestine un enjeu européen ? Philippe Bernard, Riveneuve, Paris, 2010

Primor, Avi, L’Europe, Israël et le Proche Orient, Outre-Terre, Revue française de géopolitique, numéro 9, avril 2004, pp. 329-340

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Transcription

Paul Germain

Nicole Kiil-Nielsen bonjour, vous êtes française, écologiste, et députée, ici, au Parlement européen, à Bruxelles. Alors au Bar de l’Europe, je vous ai servi un milk-shake bien secoué, secoué comme vous l’avez été, en fait, en 5 allant à Gaza avec une délégation parlementaire, c’était au moment du déclenchement de l’affaire de la flottille humanitaire, qu’est-ce qui vous a le plus choqué, dans cette affaire ?

Nicole Kiil-Nielsen

Écoutez, concernant la flottille, nous avons été très choqués parce que quand nous étions à Gaza, nous savions que cette flottille s’approchait, et les Gazaouis étaient vraiment très heureux de savoir qu’il y avait cette 10 solidarité internationale qui s’organisait, et malheureusement, quand nous avons appris que l’armée avait tiré sur ces militants pacifistes, vraiment, nous avons été très choqués, d’autant que la situation à Gaza est évidemment déplorable et que les personnes qui ont fait cette flottille, qui l’ont organisée, le savent, la population de Gaza vit sous le seuil de pauvreté, 80% n’a pas de travail. Il y a beaucoup de jeunes, beaucoup d’enfants, qui n’ont pas beaucoup de, et de calories, et d’activités, donc, ils ont le droit de survivre, 15 effectivement, grâce à l’aide humanitaire, les Gazaouis survivent mais n’ont pas droit à la vie, et c’est vraiment très triste.

Paul Germain

Alors, vous parlez de militants pacifistes, est-ce que certains ne cherchaient pas quand même la provocation davantage qu’apporter une aide à Gaza ? 20

Nicole Kiil-Nielsen

Écoutez, je n’en sais rien, je n’étais pas dans ces bateaux donc je ne m’aventurerai pas à commenter ceci ou cela. Mais ce que je sais, c’est que si l’Union Européenne, si les gouvernements européens faisaient leur travail, s’il y avait des solutions politiques, des réponses apportées à la situation de cette région, à ce blocus qui est vraiment inadmissible, eh bien, la société civile, les organisations ne seraient pas obligées de s’aventurer dans 25 des expéditions de ce type. Je pense que si les citoyens sont obligés de prendre les choses en main, c’est parce que, grâce aux médias, grâce aux télévisions qui envoient des images, ils savent que la vie à Gaza est insoutenable, ils ne le supportent plus, seulement l’inertie des politiques fait qu’on en arrive à des initiatives de ce type.

Paul Germain 30

Alors je vous arrête, parce que, vous le voyez, il y a de la neige qui apparaît ici, et derrière cette neige, quelqu’un qui veut vous poser une question et qui connaît très, très, très bien Gaza. On l’écoute.

Manuel Musallam

Bonjour Madame la Députée, je suis le père Manuel Musallam, ancien curé de Gaza, j’ai passé quatorze ans là-bas, avec la guerre du Plomb durci. J’ai une question à vous poser, madame. Nous autres en Palestine, nous 35 n’avons pas besoin de pitié. Nous avons besoin de protection de notre peuple. Pourquoi, jusqu’à maintenant, l’Europe n’était pas capable de nous protéger et de finir cette guerre qui a duré soixante-deux ans, et qui s’étale pour plus de temps encore.

Luc Albrand,

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Nicole Kiil-Nielsen 40

Écoutez, je suis tout à fait d’accord avec vous, je partage ce point de vue. Je viens de le dire, la faute est au politique, effectivement, nous devons protéger le peuple de Gaza, comme le peuple d’ailleurs de Cisjordanie, c’est le rôle de l’Europe qui a une responsabilité historique dans cette région en raison de la création de l’État d’Israël et du contexte dans lequel ça s’est fait, donc, moi j’estime que la légitimité de l’Europe, elle est entière, et sa responsabilité également. 45

Paul Germain

Et vous croyez, vous, à l’efficacité d’une action européenne ?

Nicole Kiil-Nielsen

Je crois oui, pourquoi, parce que nous sommes le premier partenaire économique d’Israël et comme vous le savez, malheureusement, les sanctions économiques, ou tout au moins, les pressions au départ, et les sanctions 50 s’il le faut, eh bien c’est ce qui marche d’habitude. En Afrique du Sud ça a fonctionné, et je pense que si l’Europe, et moi je le souhaite, disait, nous suspendons l’accord commercial avec Israël, eh bien Israël admettrait peut-être de discuter et d’apporter des solutions.

Paul Germain

Mais ça voudrait dire que vingt-sept pays se mettent d’accord, c’est totalement impossible, vous le savez bien… 55

Nicole Kiil-Nielsen

C’est pas impossible…

Paul Germain

Vous n’y croyez pas !

Nicole Kiil-Nielsen 60

Si, j’y crois, sinon je ne serais pas là. Malheureusement, c’est difficile, je sais bien, mais j’y crois, parce que nous avons une responsabilité face au respect du droit international, tous les pays qui sont au sein de l’Union européenne sont sur cette position, respect du droit international, respect des droits humains, je crois qu’il y a des choses qui sont précises et qui sont fondamentales. Il ne s’agit pas d’être propalestinien, pro-israélien, moi je me situe pas à ce niveau-là. Il s’agit du respect du droit de la justice, et puis de l’humanité, du droit des 65 hommes, moi je crois que là, maintenant, je l’ai constaté lors des réunions que nous avons eues ces jours-ci, sur l’ensemble des bancs de l’Assemblée, les différents courants politiques, tout le monde est profondément choqué et souhaite un sursaut, et un changement de l’attitude de l’Europe, j’espère, j’espère, et je compte, j’espère que les morts qui viennent de, hélas, de se produire, vont servir à quelque chose.

Paul Germain 70

Alors, je signale que Manuel Musallam, que l’on vient d’entendre, vient de publier Un Curé à Gaza. La question d’une internaute, à présent, c’est la question d’Elizabeth Tricot, de Dunkerque. Madame Nicole Kiil-Nielsen critique la violence d’Israël, elle oublie deux choses. Israël est en guerre contre le Hamas, qui veut sa destruction, et elle oublie de critiquer un pays arabe, comme l’Égypte, qui a aussi construit un mur d’acier entre sa frontière et Gaza. 75

Luc Albrand,

Alliance française de Bruxelles-Europe, CELF – juin 2010 19/20

Nicole Kiil-Nielsen

Je n’oublie pas, je n’oublie pas de critiquer la Syrie ou l’Égypte, enfin différents pays dans la région, qui, hélas, ne sont ni des démocraties ni des pays acceptables de ce point de vue-là. Mais, je pense que la situation de l’Égypte est tout à fait particulière, on sait bien qu’en Égypte il y a de nombreux touristes, 6 millions de touristes 80 chaque été sur le Sinaï, et que l’Égypte est partagée entre ses propres intérêts nationaux et les relations avec son partenaire, son voisin, Israël, qui est quand même un voisin qui dispose d’une des armées les plus puissantes du monde, donc c’est très difficile, il y a aussi la question, en politique intérieure, des Frères musulmans, de la montée des Frères musulmans en Égypte, donc la situation en Égypte est délicate, je ne dis pas que je suis satisfaite par le fait que l’Égypte est, soit en train d’installer un mur d’acier, pas du tout, mais je 85 sais que la situation est très difficile pour le gouvernement égyptien. Mais je pense que la responsabilité d’Israël est quand même entière, quand on a l’armée la plus puissante du monde, quand on a l’arme nucléaire, quand on est puissant comme Israël, eh bien, je suis désolée mais, on a les moyens de faire la paix et de répondre positivement aux attentes de la communauté internationale qui consiste à tout simplement dire, eh bien oui, nous allons respecter les frontières de 1967, il y aura un État palestinien viable. 90

Paul Germain

Et quand Israël dit, le Hamas veut notre destruction ?

Nicole Kiil-Nielsen

Écoutez, le Hamas à Gaza, moi ce que j’ai vu à Gaza, c’est au moins 60 % de jeunes de moins de dix-huit ans actuellement, c’est-à-dire de jeunes qui n’ont pas pu voter il y a trois ans, ils n’ont certainement pas voté pour le 95 Hamas et actuellement, on ose les punir, on ose les priver des aliments de base, non, écoutez, je pense qu’Israël est beaucoup plus puissant que le Hamas et j’en suis convaincue.

Paul Germain

Alors, on constate aujourd’hui que ceux qui critiquent le plus Israël, eh bien, ce sont les journalistes en Israël, ça c’est quelque chose qui est réconfortant pour vous ? 100

Nicole Kiil-Nielsen

Oui, Israël est effectivement, de ce point de vue-là, une démocratie, il y a une presse indépendante en Israël, malgré le fait qu’actuellement le gouvernement israélien est un gouvernement d’extrême droite qui s’attaque à tous ces droits, aux droits des associations, il y a en ce moment un projet qui concerne les ONG qui est très inquiétant, nous nous sommes exprimés, au Parlement européen, sur cette question-là, c’est une démocratie et 105 comme toutes les démocraties, elle a ses fluctuations, et en ce moment le gouvernement israélien est un gouvernement d’extrême droite et très dangereux, donc il faut le dire. Mais je veux revenir sur la question du Hamas, ce que j’ai envie de dire par rapport à cela, c’est que le Hamas est renforcé par le blocus à Gaza, j’ai vu les tunnels, nous avons vu les tunnels, l’économie des tunnels renforce les islamistes, et ceux du Hamas et des autres factions, qui s’enrichissent en faisant payer une taxe à tous ceux qui achètent des produits qui transitent 110 par ces tunnels, donc je comprends pas bien la position d’Israël parce qu’en fait, ils ne font que renforcer les extrémistes y compris en tirant, comme ils l’ont fait, sur la flottille de la paix.

Paul Germain

Merci, Nicole Kiil-Nielsen d’être passée au Bar de l’Europe, et je vous invite quand même à goûter ce milk-shake, au revoir, à très bientôt. 115

Merci.

Luc Albrand,

Alliance française de Bruxelles-Europe, CELF – juin 2010 20/20

Questions de compréhension orale

1) Comment Paul Germain introduit-il son sujet ? 2) Pourquoi interroge-t-on Nicole Kiil-Nielsen, qui est écologiste, sur la crise de Gaza ?

3) À quoi se réfèrent les intervenants lorsqu’ils parlent de flottille ?

4) Quel est, à ce sujet, le point sur lequel le journaliste et la députée se trouvent en désaccord ? Quelle est la réaction de l’invitée ? 5) Quels éléments vous permettent de dire que les Gazaouis ont besoin d’une aide humanitaire ? 6) Pourquoi, selon Nicole Kiil-Nielsen, la société civile est amenée à intervenir ?

7) Pourquoi pense-t-elle que l’Europe a le devoir d’intervenir ? Citez deux arguments. Comment ?

8) Quels sont les deux points qu’oublie, selon l’internaute, Nicole Kiil-Nielsen, lorsqu’elle critique la violence d’Israël ?

9) Pourquoi, selon Nicole Kiil-Nielsen, le cas de l’Égypte est-il particulier ?

10) Quel regard porte l’invitée sur l’État d’Israël ? Considère-t-elle qu’il s’agisse d’un État démocratique ? 11) Pourquoi la responsabilité de la paix repose essentiellement sur l’État d’Israël ? 12) Quel est le principal argument d’Israël pour justifier le blocus ? Quelle valeur donne l’invitée à cet argument ? Pourquoi ?

13) Citez deux motifs pour lesquels, toujours selon Nicole Kiil-Nielsen, la politique israélienne est paradoxale.