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Actualités pharmaceutiques n° 523 février 2013 59 juridique fiche © 2012 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés http://dx.doi.org/10.1016/j.actpha.2012.12.001 La gestion des déchets d’activités de soins à risques infectieux produits par les patients en auto-traitement (DASRI-PAT) Une filière spécifique d’élimination des déchets de soins perforants des patients en auto- traitement a été mise en place. Ces déchets sont essentiellement produits dans le cadre d’un traitement ou d’une surveillance diabétique. Le système repose sur le principe du “pollueur-payeur”. Les officines peuvent se porter volontaires afin de participer au dispositif de collecte. © 2012 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés « E n l’absence de dispo- sitif de collecte de proximité spécifique, les officines, mais également les pharmacies à usage intérieur et les laboratoires de biologie médicale sont tenus de collecter gratuitement les déchets d’activités de soins à risque infectieux perforants produits par les patients en auto-traitements, apportés par les particuliers qui les détiennent ». C’est ainsi qu’est décrit, par le Code de la santé publique, le système des déchets d’activités de soins à risques infec- tieux produits par les patients en auto-traitement (DASRI-PAT) [1]. On entend par déchets d’activités de soins à risque infectieux perfo- rants les matériels et matériaux piquants ou coupants destinés à l’abandon, qu’ils aient été ou non en contact avec un produit biologique, et issus des activités de diagnostic, de suivi et de traitement préventif, curatif ou palliatif dans les domaines de la médecine humaine. Champ d’application des DASRI-PAT F Le champ d’application des DASRI-PRAT comprend seule- ment les déchets émis par les patients en auto-traitement, dans le cadre d’un traitement médical ou d’une surveillance mis en œuvre en dehors d’une structure de soins, et sans l’intervention d’un profession- nel de santé. En effet, l’élimination des DASRI produits par les professionnels de santé ou dans le cadre d’un établis- sement de soins n’entre pas dans le système de collecte. Elle doit être réalisée sous leur propre responsa- bilité, par le biais d’une autre filière d’élimination. De même, les déchets produits par les particuliers dans le cadre de soins à leurs animaux domes- tiques, n’entrent pas dans le champ d’application. Les DASRI-PAT seront donc princi- palement constitués d’aiguilles, de guides de cathéter pour pompe à insuline, de kits de perfusion, de lancettes, de seringues et de sty- los utilisés dans les pathologies suivantes : algie vasculaire de la face et migraine, anémie secon- daire à l’insuffisance rénale chro- nique, choc anaphylactique, déficits immunitaires traités par immuno- globulines par voie sous-cuta- née, diabète, dysfonction érectile d’origine organique, hémophilie sévère A et B, hépatites virales, infection au virus de l’immuno- déficience humaine (VIH), inferti- lité ovarienne, insuffisance rénale chronique, insuffisance surrénale aiguë, maladie de Parkinson, mala- die veineuse thrombo-embolique, maladies auto-immunes, ostéo- porose post-ménopausique grave, retard de croissance de l’enfant, ou encore déficit en hormone de crois- sance [2]. F Les DASRI-PAT sont donc majoritairement produits par les diabétiques traités par insuline, ou sous antidiabétiques oraux, et pra- tiquant un contrôle glycémique. F Les patients en auto-traite- ment seraient environ 1,4 mil- lion, ce chiffre tendant à croître. Ces déchets représentent un peu plus de 1 000 tonnes par an, ce qui représente une part négli- geable de l’ensemble des DASRI (170 000 tonnes/an). F Cependant, les autorités ont estimé nécessaire la mise en place d’une filière spécifique d’élimination, compte tenu des risques que ces produits peuvent occasionner aux personnes appe- lées à manipuler les déchets ména- gers, et a même fait l’objet d’un des engagements du Grenelle de l’Environnement en 2007, complé- tant ainsi les filières d’élimination des déchets produits par les pro- fessionnels ou les établissements de santé. L’application du concept “pollueur-payeur” F La philosophie du système repose sur le principe dit de res- ponsabilité élargie du producteur, c’est-à-dire sur le concept du “pollueur-payeur”, les producteurs étant amenés à prendre en compte les coûts de la post-consommation dès la conception de leur produit. Mots clés • Auto-traitement • Collecte • DASRI-PAT • Déchet de soins • Diabète • Officine Caroline MASCRET

La gestion des déchets d’activités de soins à risques infectieux produits par les patients en auto-traitement (DASRI-PAT)

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Actualités pharmaceutiques

• n° 523 • février 2013 • 59

juridique

fi che

© 2012 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés

http://dx.doi.org/10.1016/j.actpha.2012.12.001

La gestion des déchets d’activités de soins à risques infectieux produits par les patients en auto-traitement (DASRI-PAT)Une filière spécifique d’élimination des déchets de soins perforants des patients en auto-

traitement a été mise en place. Ces déchets sont essentiellement produits dans le cadre

d’un traitement ou d’une surveillance diabétique. Le système repose sur le principe

du “pollueur-payeur”. Les officines peuvent se porter volontaires afin de participer au

dispositif de collecte.

© 2012 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés

« E n l’absence de dispo-sitif de collecte de proximité spécifique,

les officines, mais également les pharmacies à usage intérieur et les laboratoires de biologie médicale sont tenus de collecter gratuitement les déchets d’activités de soins à risque infectieux perforants produits par les patients en auto-traitements, apportés par les particuliers qui les détiennent ». C’est ainsi qu’est décrit, par le Code de la santé publique, le système des déchets d’activités de soins à risques infec-tieux produits par les patients en auto-traitement (DASRI-PAT) [1].On entend par déchets d’activités de soins à risque infectieux perfo-rants les matériels et matériaux piquants ou coupants destinés à l’abandon, qu’ils aient été ou non en contact avec un produit biologique, et issus des activités de diagnostic, de suivi et de traitement préventif, curatif ou palliatif dans les domaines de la médecine humaine.

Champ d’application des DASRI-PAT

F Le champ d’application des

DASRI-PRAT comprend seule-

ment les déchets émis par les

patients en auto-traitement, dans le cadre d’un traitement médical ou d’une surveillance mis en œuvre en dehors d’une structure de soins, et sans l’intervention d’un profession-nel de santé.

En effet, l’élimination des DASRI produits par les professionnels de santé ou dans le cadre d’un établis-sement de soins n’entre pas dans le système de collecte. Elle doit être réalisée sous leur propre responsa-bilité, par le biais d’une autre filière d’élimination. De même, les déchets produits par les particuliers dans le cadre de soins à leurs animaux domes-tiques, n’entrent pas dans le champ d’application. Les DASRI-PAT seront donc princi-palement constitués d’aiguilles, de guides de cathéter pour pompe à insuline, de kits de perfusion, de lancettes, de seringues et de sty-los utilisés dans les pathologies suivantes : algie vasculaire de la face et migraine, anémie secon-daire à l’insuf fisance rénale chro-nique, choc anaphylactique, déficits immunitaires traités par immuno-globulines par voie sous-cuta-née, diabète, dysfonction érectile d’origine organique, hémophilie sévère A et B, hépatites virales, infection au virus de l’immuno-déficience humaine (VIH), inferti-lité ovarienne, insuffisance rénale chronique, insuffisance surrénale aiguë, maladie de Parkinson, mala-die veineuse thrombo-embolique, maladies auto-immunes, ostéo-porose post-ménopausique grave, retard de croissance de l’enfant, ou encore déficit en hormone de crois-sance [2].

F Les DASRI-PAT sont donc

majoritairement produits par les

diabétiques traités par insuline, ou sous antidiabétiques oraux, et pra-tiquant un contrôle glycémique.

F Les patients en auto-traite-

ment seraient environ 1,4 mil-

lion, ce chiffre tendant à croître. Ces déchets représentent un peu plus de 1 000 tonnes par an, ce qui représente une part négli-geable de l’ensemble des DASRI (170 000 tonnes/an).

F Cependant, les autorités ont

estimé nécessaire la mise en

place d’une filière spécifique

d’élimination, compte tenu des risques que ces produits peuvent occasionner aux personnes appe-lées à manipuler les déchets ména-gers, et a même fait l’objet d’un des engagements du Grenelle de l’Environ nement en 2007, complé-tant ainsi les filières d’élimination des déchets produits par les pro-fessionnels ou les établissements de santé.

L’application du concept “pollueur-payeur”

F La philosophie du système repose sur le principe dit de res-ponsabilité élargie du producteur, c’est-à-dire sur le concept du “pollueur-payeur”, les producteurs étant amenés à prendre en compte les coûts de la post-consommation dès la conception de leur produit.

Mots clés• Auto-traitement

• Collecte

• DASRI-PAT

• Déchet de soins

• Diabète

• Offi cine

Caroline MASCRET

Actualités pharmaceutiques

• n° 523 • février 2013 •60

fi chejuridique

Le champ de contribution n’est pas seulement limité aux producteurs de dispositifs médicaux, mais a été élargi par la loi : les responsables de la mise sur le marché de médi-caments injectés devront égale-ment prendre en charge une partie de la collecte et du traitement des déchets. La réglementation, en visant les “exploitants de médica-ments”, pointe ainsi les fabricants, mais également les importateurs, les grossistes-répartiteurs et autres distributeurs. En revanche, pour les dispositifs médicaux, seuls sont visés les fabricants. La loi exclut donc de l’obligation de mise en place du dispositif les distributeurs et importateurs.

F Les indust r ie ls devront

remettre aux officines des col-

lecteurs destinés aux patients pour le dépôt de leurs déchets. Ces collecteurs seront remis gracieu-sement au patient lors de la déli-vrance de son traitement. Celui-ci devra remplir le collecteur jusqu’à la limite indiquée sur ce dernier avant de le fermer définitivement et de le ramener à un point de collecte.Les embal lages devront donc être munis de fermetures temporaires (en cours d’utilisation) et définitives (avant leur enlèvement pour entre-posage). Les DASRI-PAT devront être de couleur verte. Les phar-maciens qui ne mettraient pas de boîtes de collecte de DASRI à disposition de leurs patients s’ex-poseront à une contravention de 3e classe (68 euros).

Le dispositif de collecte F L’éco-organisme en charge de

la collecte aura l’obligation de mettre en place un point de collecte tous les 15 kms, et au moins un point pour 50 000 habitants, avec la présence d’un min imum de 5 000 points de collecte sur le terri-toire national. Ces dispositifs doi-vent être répartis et disposés à des endroits facilement accessibles à leurs utilisateurs.

F Dans le cas où le réseau de

points de collecte serait insuf-

fisant au regard du maillage terri-torial, les préfets de région, saisis par les ministres de la Santé et de l’Environnement, fixeront par arrêté la liste des officines qui auront l’obligation de collecter gratuite-ment les DASRI-PAT. Le fait pour un pharmacien désigné de ne pas collecter gratuitement les DASRI sera passible d’une amende prévue pour les contraventions de 4e classe (135 euros).

F Les officines peuvent se porter

volontaires afin de participer au dispositif de collecte. Le titulaire devra en faire la demande auprès de l’éco-organisme. Si l’éco-orga-nisme a déjà recours à des officines volontaires pour compléter le réseau, il ne pourra refuser l’accès à ce dernier à toute officine qui en ferait la demande. En revanche, si l’éco-organisme n’a recours à aucune officine, il pourra alors en refuser l’accès. Dans ce cas, si l’of-ficine persiste dans son désir de collecter les DASRI-PAT, elle devra assumer à elle seule la gestion des déchets.

F S’est posée la question d’une

distorsion de concurrence entre

officines en tant que points de col-

lecte. En effet, pour l’Ordre natio-nal des pharmaciens, la demande d’une officine de participer à la collecte serait de nature à perturber la concurrence entre officines. Le patient étant amené à renouveler sa prescription dans les pharmacies désignées comme point de collecte, ces pharmacies bénéficieraient d’un avantage concurrentiel, avec une incidence possible sur le chiffre d’affaires, les DASRI-PAT repré-sentant pratiquement 20 % du chiffre d’affaires de l’officine. Cet argument a été rejeté par l’Autorité de la concurrence qui a estimé que le prix des médicaments injectables et des dispositifs perforants étant réglementés, le patient choisit son officine autrement que sur le prix, et notamment en fonction de sa proxi-mité géographique.

Les conditions de stockage des DASRI-PATL’arrêté du 14 octobre 2011 détaille les règles d’entreposage des DASRI-PAT [3]. Il instaure des obli-gations différentes en fonction de la quantité de DASRI stockée.

F Lorsque cette quantité est infé-

rieure à 5 kg par mois, les DASRI doivent être entreposés à l’écart des sources de chaleur, dans des emballages étanches munis de dispo-sitifs de fermeture provisoire et défini-tive. Ces déchets doivent être évacués dans un délai maximal de 3 mois.

F Lorsque la quantité de DASRI

produite est comprise entre 5 et

15 kg par mois, les déchets doivent être entreposés dans une zone inté-rieure spécifiquement dédiée et identifiée, située à l’écart des sources de chaleur. Son accès doit être limité, et cette zone ne doit rece-voir que des emballages définitive-ment fermés. Les déchets doivent être évacués dans le délai d’un mois.

F Lorsque la quantité de DASRI

produite est comprise entre 15 et

100 kg par mois, les déchets doi-vent être stockés dans des locaux dédiés comportant une inscription apparente mentionnant leur usage. Ces locaux doivent présenter une sécurité optimale contre les risques de dégradation et de vol. Ils doivent, par ailleurs, être correcte-ment ventilés, éclairés et permettre une protection des déchets contre les intempéries et la chaleur. Leurs sols et parois doivent être lavables. Ces locaux doivent également être équipés d’une arrivée d’eau et d’une évacuation des eaux de lavage vers le réseau des eaux usées. Les DASRI doivent être évacués dans un délai de 7 jours. w

Déclaration d’intérêts :

l’auteur déclare ne pas avoir

de confl its d’intérêts en relation

avec cet article.

L’auteurCaroline MASCRETMaître de conférences en droit

pharmaceutique, Faculté

de pharmacie de Châtenay-

Malabry, Université Paris-Sud,

5 rue Jean-Baptiste-Clément

92296 Châtenay-Malabry,

France

[email protected]

Références[1] Article L. 4211-2-1 Code de la santé publique. Décret n° 2011-763 du 28 juin 2011 relatif à la gestion des déchets d’activités de soins à risques infectieux perforants produits par les patients en autotraitement. http://www.legifrance.gouv.fr/affi chTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000024277614

[2] Arrêté du 23 août 2011 fi xant, en application de l’article R. 1335-8-1 du Code de la santé publique, la liste des pathologies conduisant pour les patients en auto-traitement à la production de déchets d’activité de soins à risque infectieux perforants. JORF n° 0204 du 3 septembre 2011:14926 . http://www.legifrance.gouv.fr/affi chTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000024531422&dateTexte=&categorieLien=id

[3] Arrêté du 14 octobre 2011 modifi ant les arrêtés du 7 septembre 1999 relatifs aux modalités d’entreposage et au contrôle des fi lières d’élimination des déchets d’activités de soins à risques infectieux et assimilés et des pièces anatomiques. JORF n° 0250 du 27 octobre 2011:18144. http://www.legifrance.gouv.fr/affi chTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000024717831&dateTexte=&categorieLien=id