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La notion de ” villes interm´ ediaires ”, une approche diff´ erenci´ ee du rˆ ole des villes moyennes : entre structuration territoriale et sp´ ecificit´ es socio-´ economiques Fabien Nadou To cite this version: Fabien Nadou. La notion de ” villes interm´ ediaires ”, une approche diff´ erenci´ ee du rˆ ole des villes moyennes : entre structuration territoriale et sp´ ecificit´ es socio-´ economiques. 2010. <halshs- 00596204> HAL Id: halshs-00596204 https://halshs.archives-ouvertes.fr/halshs-00596204 Submitted on 26 May 2011 HAL is a multi-disciplinary open access archive for the deposit and dissemination of sci- entific research documents, whether they are pub- lished or not. The documents may come from teaching and research institutions in France or abroad, or from public or private research centers. L’archive ouverte pluridisciplinaire HAL, est destin´ ee au d´ epˆ ot et ` a la diffusion de documents scientifiques de niveau recherche, publi´ es ou non, ´ emanant des ´ etablissements d’enseignement et de recherche fran¸cais ou ´ etrangers, des laboratoires publics ou priv´ es.

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La notion de ” villes intermediaires ”, une approche

differenciee du role des villes moyennes : entre

structuration territoriale et specificites

socio-economiques

Fabien Nadou

To cite this version:

Fabien Nadou. La notion de ” villes intermediaires ”, une approche differenciee du role des villesmoyennes : entre structuration territoriale et specificites socio-economiques. 2010. <halshs-00596204>

HAL Id: halshs-00596204

https://halshs.archives-ouvertes.fr/halshs-00596204

Submitted on 26 May 2011

HAL is a multi-disciplinary open accessarchive for the deposit and dissemination of sci-entific research documents, whether they are pub-lished or not. The documents may come fromteaching and research institutions in France orabroad, or from public or private research centers.

L’archive ouverte pluridisciplinaire HAL, estdestinee au depot et a la diffusion de documentsscientifiques de niveau recherche, publies ou non,emanant des etablissements d’enseignement et derecherche francais ou etrangers, des laboratoirespublics ou prives.

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Colloque « Villes petites et moyennes, un regard renouvelé »

09/12 – 10/12/2010 à Tours, France.

La notion de « villes intermédiaires », une approche différenciée du rôle des

villes moyennes : entre structuration territoriale et spécificités socio-

économiques.

NADOU Fabien

Fabien Nadou, Doctorant en aménagement, Ecole Polytechnique de l’Université de Tours,

Département Aménagement, Université de Tours, UMR CITERES 6173. 33, Allée Ferdinand

de Lesseps 37204 TOURS CEDEX 03, France, [email protected]

Résumé

Dans le contexte de compétition accrue des territoires, certaines villes n’ont-elles pas un rôle

primordial dans la structuration et dans la cohésion territoriale pouvant être qualifiées et désignées

de « villes intermédiaires »?

Les métropoles sont souvent présentées comme les « fers de lance » de l’économie actuelle et celles

qui répondent aux défis imposés par la mondialisation. Mais qu’en est-il des villes intermédiaires ?

Ce rôle d’intermédiation, que tiennent certaines villes dans la hiérarchie urbaine du territoire

national, renvoie à la fois au positionnement de ces villes : la proximité avec l’aire d’influence la plus

grande et la plus proche et la relation souvent privilégiée avec les petites villes et le milieu rural

environnant. Et renvoie également aux fonctions développées et présentes en rapport avec ces deux

types d’espaces: appui, distribution, réseautage, etc.,

L’absence de définition précise et stabilisée des villes intermédiaires nous impose de rechercher avant

tout si une délimitation statistique et/ou démographique apporterait un éclairage (section 2), avant de

voir, au travers de critères fonctionnels et discriminants, quelles sont les formes d’existence des villes

intermédiaires (section 3). Nous illustrerons notre démarche par un travail empirique sur quelques

cas de villes étudiées au sein des territoires des régions Centre et Poitou-Charentes (section 4).

Mots-clés : villes intermédiaires, villes moyennes, typologies spatiale et fonctionnelle, connectivité,

régions Centre et Poitou-Charentes.

Abstract

In the context of increased competition for territories, some cities have they any role in the structuring

and territorial cohesion can be classified and designated as "middle sized cities?

The cities are often described as the "spearhead" of the current economy and those that meet the

challenges imposed by globalization. But, what about intermediates cities?

This intermediation role, kept some cities in the urban hierarchy of the national territory, refers to

both the positioning of these locations: proximity to the area of greatest influence and the closest

relationship and often privileged with small cities and rural environment. And also refers to functions

and developed herein in connection with these two types of space: support, distribution, networking,

etc..,

The lack of precise definition and stabilized intermediate cities compels us to seek first of all if a

statistical delineation and / or demographic bring illumination (Section 2), then see, through

functional and discriminating criteria, what are the forms of existence of intermediate cities (section

3). We illustrate our approach with empirical work on some cases of cities studied in the territories of

the Centre and Poitou-Charentes (Section 4).

Key-words: intermediates cities, medium-sized cities, spatial and functional types, connectedness,

Centre and Poitou-Charentes regions.

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1. Introduction (section 1)

La notion de villes intermédiaires n’est pas exclusive à la France mais est reconnue dans la majeure

partie des pays européens. Elle trouve également une place dans la quasi-totalité des pays à travers le

monde (Bellet et Llop, 2003). Nous nous intéresserons ici au contexte territorial français et notre

propos tentera de définir, dans une approche conceptuelle, ce que sont les villes intermédiaires et dans

quelle mesure elles apparaissent dans la hiérarchie urbaine de notre territoire. La mise en lumière de

cas particuliers rattachés au contexte des régions Centre et Poitou-Charentes viendra illustrer de façon

empirique un échantillon plus complet par ailleurs. Ainsi, cette contribution s’inscrit dans une

perspective plus large, au travers d’une thèse de doctorat, qui vise à démontrer que les villes

intermédiaires sont les villes de demain, c’est à dire porteuses d’enjeux forts en termes de

développement économique local, de cohésion sociale et d’aménagement du territoire. Qu’elles sont

en capacité d’être des interfaces pertinentes, notamment du développement territorial durable, au sein

des différents systèmes régionaux car leur dimension intermédiaire les placent au cœur des logiques

nationales et locales. L’histoire de l’évolution des villes montre, dans leur répartition et dans leur

distribution, qu’il existe de grandes villes, voire de très grandes (métropoles) et des petites villes. Mais

pas seulement, les systèmes urbains, comme de nombreux autres systèmes, sont constitués aussi d’un

entre-deux. Souvent nommé par l’analyse statistique par les villes dites « moyennes », cette analyse

ne constitue pas en réalité une vision complète et objective de cet « entre-deux », car elle ne s’attache

pas suffisamment, par exemple, aux franges supérieures de la catégorie et à leurs fonctions socio-

économiques et de structuration des territoires de ces dernières.

Dans le système urbain d’une « région », entendue au sens de la science régionale, l’importance ne

tient pas dans la taille démographique des villes qui compose le système, mais plutôt dans les

fonctions rattachées à ces villes et qui agissent dans le système. D’autant plus que les situations d’un

pays à l’autre, d’une région à l’autre peuvent varier. Indéniablement les contextes régionaux sont à

prendre en compte. Ainsi, une ville de 20.000 habitants en Norvège, dans le Nord de l’Ecosse ou bien

au Portugal peut avoir des fonctions au sein de son espace qui correspondraient à celles que l’on

trouve habituellement dans des villes de plus de 100.000 habitants en Allemagne ou en France

(Carrière, 2008).

Pourquoi choisir de parler de villes intermédiaires ? Tout simplement parce que le spectre de la ville

intermédiaire tend à élargir la vision simple de la hiérarchie urbaine telle que l’on la perçoit

habituellement : métropoles, villes moyennes, villes petites. La notion de ville intermédiaire

positionne la ville autrement, comme un « changement de contexte et d’état d’esprit » tel que le

soulignait Jean-Eudes Roullier dans la préface de « Villes intermédiaires pour l’Europe ? » (Gault,

1989), et il ajoute : « intermédiaire traduit l’idée de mise en relation et de réseau ». La ville

intermédiaire constitue en quelque sorte une forme de mitoyenneté1 territoriale qui combinerait un

positionnement géographique ou spatial privilégié entre la métropole (ou l’espace « métropolisé ») et

l’espace rural (ou l’espace « non-métropolisé ») ; avec un rôle structurel capital dans la cohésion du

territoire, par la présence de fonctions socio-économiques importantes. La perspective de la ville

intermédiaire permet de choisir dans la recherche de définition de ce que peut-être une ville moyenne,

une ville de « l’entre-deux ».Un positionnement qui se propose d’aller au-delà des critères habituels de

définitions pour ce type de villes. Ces critères qui sont établis sur la base d’une hiérarchie trop souvent

nationale et statistique, ne soulignent pas assez le contexte régional dans lequel la ville moyenne

s’inscrit. Quels sont les critères d’identification des villes intermédiaires ? Qu’est-ce qui fait qu’une

ville, a priori moyenne pour beaucoup, presque ordinaire (Commerçon, George, 1999) pourrait-on

dire, soit considérée comme intermédiaire, révélant ainsi la réalité de son rôle spécifique ? Les villes

intermédiaires ne correspondent pas à un échelon administratif et juridique identifié dans la hiérarchie

urbaine de notre pays. Elles correspondent davantage, et surtout, à une notion pour désigner les

caractéristiques de certaines villes du système urbain, qui ne sont, avant tout et par défaut, ni des

métropoles, ni des villes petites. Leurs situations, leurs tailles et leurs fonctions en font des pôles

d’intermédiation entre des territoires métropolisés et des espaces périphériques disposant d’un

rayonnement à une échelle à minima régionale (Bock et Carrière, 2007).

1 Expression empruntée à Bernard Vermot-Desroches, Professeur à l’Université du Québec à Trois-Rivières

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Si l’on s’en tient à une définition minimale de la ville intermédiaire dans cet avant-propos, nous

pourrions nous appuyer sur celle énoncée par Jean-Paul Carrière (2008) : « la ville intermédiaire

polarise son territoire en proposant des services divers et variés. Parmi ceux-ci, on retrouve des

fonctions administratives, culturelles, de santé, d’enseignement et de diffusion de la connaissance, de

recherche, etc. Au niveau économique, elle se doit d’être compétitive et dynamique, mais également

de représenter un poids relatif conséquent dans son environnement régional, et d’être le siège de lieux

de décision ».

En réalité, la ville intermédiaire est celle dont la lisibilité peut se faire au niveau national, c’est celle

qui a réussi à émerger de son espace régional en s’imposant comme un pôle socio-économique de

référence. Son rôle d’intermédiation repose sur un critère qui constitue véritablement une fonction

« pivot » : la connectivité. Nous distinguerons deux formes de connectivité ; à la fois une connectivité

externe (vers l’Etat et les marchés) avec des fonctions stratégiques, mais aussi interne (vers son espace

de proximité) avec des fonctions utilitaires incontournables (centre de services).

Les entrées par les fonctions urbaines se sont multipliées dans les études consacrées aux villes,

révélant leur importance dans l’identification et la caractérisation de ces dernières, notamment

concernant les métropoles (Damette, 1994, Halbert, 2003). Notre approche consistera, avant tout, à

interroger l’existence des villes intermédiaires. Nous préciserons l’importance d’une délimitation

morphologique, notamment par la taille et la localisation, pour prétendre à s’inscrire dans une

quelconque hiérarchie et à rechercher leur positionnement par rapport aux autres catégories, comme

les métropoles (section 2). Puis, au travers d’une grille d’analyse de différents critères d’identification

et d’une recherche d’une typologie fonctionnelle sur les villes intermédiaires, nous mettrons en

perspective les formes de leur existence (section 3). Enfin, un éclairage particulier sur des villes des

régions Centre et Poitou-Charentes viendra illustrer cette recherche de définition des villes

intermédiaires, et interrogera le caractère d’intermédiation des villes choisies (section 4).

Nous emploierons, tout au long du présent texte, le terme de « villes » intermédiaires. Il est préférable

de rappeler que la notion de « ville » en statistique n’existe pas, et que différentes unités de mesure

peuvent être utilisées pour caractériser ce qui fait « ville ». Dans notre exercice, nous entendrons

« villes intermédiaires » en ayant utilisé pour la caractériser la notion d’aire urbaine (aire urbaine

intermédiaires). Même si la notion d’aire urbaine oublie dans sa conception les niveaux les plus faibles

de notre hiérarchie urbaine (Damette et Scheibling, 2004) et plus de 10 millions d’habitants, elle

correspond sans doute mieux au contexte des mobilités spatiales des agents d’aujourd’hui. Elle révèle

de façon plus précise la réalité de l’inscription socio-économique des territoires, en tous les cas celle

du rayonnement et de l’influence des villes répertoriées2.

2. Une tentative de délimitation des villes intermédiaires : les villes intermédiaires existent-

elles ? (section 2)

En partant d’une définition simple et littérale de l’adjectif intermédiaire, en latin inter signifie entre, et

medius veut dire qui est au milieu; intermédiaire c’est ce qui est donc entre-deux, qui tient le milieu

(Dictionnaire Larousse, 2006). Ce qui revient à être différent d’être à « la moyenne », d’être

« moyen ». Pourtant, nous verrons dans une mise en perspective de la littérature relativement récente

que la notion de villes intermédiaires s’est surtout construite sur la base des villes moyennes. De ce

fait, la délimitation du cadre d’analyse en termes de taille pour définir les villes intermédiaires passe

très souvent par une extrapolation du vecteur « villes moyennes » et des données effectuées qui y sont

liées. La prégnance de raisonnement et le biais induit par le retour constant à la ville moyenne

interroge véritablement l’existence de notre objet d’étude que sont les villes intermédiaires. Cette

recherche d’existence des villes intermédiaires nous conduira à regarder si en termes de taille et de

morphologie nous pouvons dégager ce que sont les villes intermédiaires, et quelles sont les situations

identifiables (hétérogénéité éventuelle, localisation différente).

2 L’INSEE, recense depuis 1999, 354 aires urbaines sur le territoire français, qui regroupent environ 80% de la

population totale soit un peu plus de 51 millions d’habitants.

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2.1 La nécessaire approche par la taille et la démographie : une mise en perspective de la

littérature. Bien que non suffisante pour définir ce qu’est aujourd’hui une ville, et d’autant plus pour ce qui est de

la notion de ville intermédiaire, l’approche en termes de taille de population doit être néanmoins prise

en compte afin de limiter un cadre d’analyse et un objet à étudier au sein du système des villes

existant.

Il existe clairement une hiérarchie urbaine (Pumain, 1976) dont les caractéristiques premières tiennent

aux différences de taille de population que l’on trouve entre chaque groupe de villes.

Définir la ville intermédiaire revient à connaître cette hiérarchie, dont le sommet se trouve représenté

par les « villes mondiales » (Sassen, 1999), les grandes villes jusqu’aux petites villes, et donc à se

positionner dans l’éventail existant. Ce qui n’est évidemment pas simple au regard des situations

variables que l’on trouve en fonction de l’échelle territoriale choisie : rien que sur le territoire

européen les densités de population étant différentes d’un pays à un autre, la prise en compte des

données de ce qui correspond à la notion de ville est tout aussi hétérogène. Par exemple, les seuils de

continuité du bâti peuvent varier de 50 à 250 mètres (ESPON, 2008), ce qui implique des difficultés

dans la délimitation de l’unité territoriale.

A propos des villes moyennes, Saint-Julien (2003) précise sur cette question : « leur étalonnage ne

sera pas le même dans un tissu urbain dense et dans une zone peu urbanisée où les relais urbains

concurrents n’existant pas ou bien sont très éloignés, dans une zone enclavée ou à l’inverse dans un

espace doté d’infrastructures de transport et de communication de qualité ».

En outre, comme l’ont montré certains travaux de comparaison des villes moyennes en Europe,

notamment entre la France, l’Espagne et le Royaume-Uni (Santamaria, 2000), la référence statistique

de l’unité de base à déterminer est rendue très délicate par le contexte administratif de chaque état. En

France, c’est plutôt la commune qui fait office de base, alors qu’en Espagne le municipio est plus

élargi et le district au Royaume-Uni est encore différent dans son périmètre.

Plusieurs travaux repérables s’attachent à définir quantitativement à quoi peut correspondre la

délimitation statistique d’une ville intermédiaire. De toute évidence les seuils et plafonds retenus en

conclusion de ces travaux montrent, au même titre que du caractère et des situations des villes

intermédiaires, une forme marquée d’hétérogénéité.

A l’échelle européenne les études menées dans le cadre de l’ORATE (ou ESPON) sur les « Small or

medium-sized towns3 » (Smesto, 2008), nous invitent à considérer les villes intermédiaires comme

étant celles dont la population est comprise entre 30.000 et 200.000 habitants.

Dans le contexte français, les observations pour qualifier les villes intermédiaires sont en réalité bien

souvent des émanations des critères de taille établis dans le cadre des politiques en faveur des villes

moyennes (par exemple le VIe plan 1970-1977), qui considéraient, de façon très extensive (Taulelle,

2010), comme villes moyennes celles ayant une population comprise entre 20.000 et 200.000

habitants. Cet héritage en termes de villes moyennes est resté, jusqu’au début des années 2000, bien

prégnant dans les études et la recherche d’une taille critique pour les villes intermédiaires ;

l’assimilation de raisonnement et de vocable ville intermédiaire/ ville moyenne restant fréquent.

Dans une approche renouvelée, le groupe de prospective « Territoires 2040 pour la France » mis en

place par la DATAR, notamment au travers des travaux de l’axe « villes intermédiaires et leurs

espaces de proximité », traduit la volonté de dépasser les cadres anciens de définition autour des villes

moyennes et tente une approche de délimitation des villes intermédiaires plus complète. Ce glissement

dans les termes avait commencé avec le livre Blanc de la Datar en 2005 « villes moyennes, villes

d’intermédiation », qui annonçait un changement de vision sur le rôle de la ville moyenne. Au final, la

ce groupe de prospective retient aujourd’hui une population comprise entre 30.000 et 500.000

habitants dans l’aire urbaine pour le cadre des villes intermédiaires.

Finalement, nous pourrions entrer dans un jeu statistique (Bellet et Llop, 2003) assez fastidieux et

peut-être stérile à vouloir chercher une délimitation statistique arrêtée de la ville intermédiaire ; nous

l’avons vu : nous arrivons à des périmètres très contrastés, surtout sur les bornes supérieures. Ainsi, les

études montrent un certain degré de consensus sur les seuils inférieurs du cadre, tournant autour des

3 Les villes retenues comme point d’observation étant par exemple pour la France, Laval et Saumur ; pour

l’Allemagne, Witten ; Lleida pour l’Espagne ; pour l’Autriche, Salzburg et Ravenne pour l’Italie.

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20, 25 ou 30.000 habitants (parfois 50.000 en Argentine et 200.000 en Amérique du Nord) ; mais ce

seuil correspond davantage à celui des villes moyennes. Si l’on suit la Fédération des Maires des

Villes Moyennes, qui rassemble par ses adhésions les villes moyennes en France, l’une des deux

conditions pour y adhérer est que la ville en question soit comprise entre 20.000 et 100.000 habitants.

Et si l’on y ajoute les travaux récents de la dernière décennie ; sur le système des villes à l’échelle

européenne (Cattan, Pumain et al., 1999), ou bien sur des analyses comparatives entre villes

européennes ( Cicille et Rozenblat, 2003), et aussi sur des thématiques plus spécifiques, comme le

polycentrisme en Europe (Carrière, 2005) ; nous pouvons admettre un plafond de 100.000 habitants

pour les villes moyennes traditionnelles.

L’approfondissement de l’intégration politique et économique européenne et les échanges qui y sont

liés, accentués ces vingt dernières années, nous conduisent à envisager avec grand intérêt de raisonner

à l’échelle continentale (Dupuy, 2000) pour établir des hiérarchies. De ce fait, nous préférons retenir

dans notre acception des villes intermédiaires un seuil minimal de 100.000 habitants dans le contexte

français, qui correspond bien, dans une perspective d’intégration des territoires et des politiques

publiques, au seuil minimal retenu à l’échelle européenne (ESPON projects, Secondary Growth Poles

and Territorial Development, 2010-2012).

En revanche, les limites supérieures du cadre varient beaucoup plus selon l’inscription territoriale

dans laquelle l’organisation se trouve pour définir : la Banque Mondiale fixe son plafond à 1 million

d’habitants, l’Union Européenne l’estime jusqu’à 500.000 habitants, de même que pour la DATAR en

France, longtemps attachée à 200.000 pour les villes moyennes, mais qui retient désormais 500.000

habitants pour les villes intermédiaires4. Il nous semble que ce plafond de 500.000 habitants soit

adapté à la limite supérieure des villes intermédiaires, au-delà c’est en termes de métropoles qu’il

faudrait raisonner.

En réalité, dans le contexte français les villes intermédiaires (aires urbaines intermédiaires cf.

introduction) comprises entre les 100.000 et 500.000 habitants (tableau 1) sont relativement peu

nombreuses en nombre absolu, une soixantaine5 (c’est un cinquième des 354 aires urbaines

référencées), mais cela représentent tout de même un poids de 20% de la population totale nationale.

De Saint-Quentin la plus petite en population (101.281 habitants en 2007) à Metz la plus grande

(439.451 habitants en 2007) ; elles sont en majorité comprises entre 120.000 et 350.000 habitants

(Damette, Scheibling, 2004) représentées par 47 villes qui représentent près de 75% de l’intervalle. A

l’exception de cas tels que Reims (plus grande ville de Haute Marne), de Béthune, ou de Brest, du

Havre et de Dunkerque (3 ports internationaux), elles sont également très souvent les préfectures de

leur département, ce qui leur procure un rôle administratif d’importance, rappelant ainsi l’ancrage et le

poids des préfectures dans le territoire français. Tableau 1 : répartition des aires urbaines françaises par tranche de population

Intervalle de population Nombre

concerné

Plus de 1 million 5

De 500.000 à 999.000 10

De 200.000 à 499.999 28

De 100.000 à 199.999 36

De 50.000 à 99.999 59

De 20.000 à 49.999 119

De 10.000 à 19.999 92

Moins de 10.000 6

total 354 Source : Insee, rgp, les aires urbaines 1999.

4 Datar, (2010), groupe de prospective Territoires 2040, « villes intermédiaires et leurs espaces de proximité ».

5 64 au total (en incluant Genève-Annemasse) est le nombre exact selon classement des aires urbaines en 2007

(INSEE, recensement de la population). Nous pouvons citer à partir de l’intervalle retenu: Tours, Blois, Poitiers,

La Rochelle, Niort, Angoulême, Angers, Le Mans, Limoges, Brest, Besançon, Mulhouse, Orléans, Reims,

l’ensemble Bayonne-Anglet-Biarritz, Pau, Perpignan, Valence, Nîmes, Avignon, Saint-Etienne, Clermont-

Ferrand, Dijon, Troyes, Annecy, Chambéry, Metz, Nancy, Le Havre, Caen, Amiens, Béthune, Dunkerque,

Valenciennes.

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2.2 Le rapport à la hiérarchie existante : vers une typologie spatiale des villes intermédiaires

Les villes intermédiaires constituent un pivot et un lien d’intermédiation important entre les espaces

nationaux et régionaux, entre les métropoles d’un côté et les petites et moyennes villes de l’autre et

parfois même, des villes de même taille mais qui ne possèdent pas les mêmes niveaux de fonctions

supérieures (Bock et Carrière, 2007).

Ces situations diverses de localisation peuvent être considérées comme des explications parmi d’autres

(Histoire, fonctions économiques) dans l’évolution des villes intermédiaires et leur rôle joué sur leur

espace et dans le système urbain existant.

Le caractère hétérogène des villes intermédiaires tient à leur situation au sein du système territorial

auquel elles appartiennent, de ce fait elles dépendent fortement de la nature et de la composition du

système en question. Outre leur caractère d’intermédiation supposé ici, les villes intermédiaires sont

confrontées aux autres villes qui composent le système urbain. La présence ou non d’une métropole,

un maillage dense ou non de petites villes et/ou d’autres villes intermédiaires au sein du même espace

va conditionner la ville intermédiaire dans une trajectoire, dans une inscription territoriale en quelque

sorte, que l’on peut nommer en trois types : influencée, satellisée, ou bien éloignée.

Cette catégorisation émane des travaux de Rolland-May (2001) dans une étude très précise consacrée

aux « territoires de marge(s) » d’Alsace, dans laquelle l’auteur conceptualise les notions de bordure,

de périphéries et de marges pour distinguer les différents types de franges territoriales. De cette

catégorisation, adaptée au contexte alsacien nous tenterons de transposer à notre recherche ces trois

types à des fins heuristiques. De façon peut-être trop audacieuse, nous nous risquerons à les utiliser

pour rechercher d’éventuels et différents types de positionnements vers lesquels les villes

intermédiaires s’orientent. Cette tentative dans la volonté de rechercher les positionnements des villes

intermédiaires, reflète d’une part, la contribution voulue à la vision d’ensemble ainsi que d’effort de

délimitation et d’inscription dans la hiérarchie urbaine du territoire. Et d’autre part, cette démarche

typologique participera à la cohérence d’une construction d’idéaux-types qui caractérisent les villes

intermédiaires, au travers de critères fonctionnels transversaux, pour certains discriminants, à faire

ressortir (cf. section 3).

La figure 1 permet de distinguer d’un point de vue de la localisation:

- Les villes intermédiaires « influencées » :

Cette situation correspond aux villes intermédiaires, autonomes et qui apparaissent plutôt en position

de force sur leur espace régional. Par leurs positions et leurs rôles dans leur environnement, elles sont

capables et cherchent à développer des ressources endogènes pour assurer leur existence et leur

lisibilité vis-à-vis de l’extérieur. Elles entretiennent des relations d’échanges avec d’autres unités

urbaines comparables ou de moindre importance et sont inscrites dans des réseaux socio-économiques

et culturels qui leurs font bénéficier de l’influence de la métropole dominante du système qui se trouve

à proximité. Mais cette proximité peut aussi parfois entraîner la ville intermédiaire sur une trajectoire

d’« aspiration », en tous les cas « sous influence » par cette dernière, qui peut être susceptible de lui

menacer son autonomie et de limiter son rayonnement. Nous pouvons citer par exemple les aires

urbaines de Reims, du Mans, de Rouen, d’Orléans, de Tours, d’Amiens et de Poitiers qui restent sous

« influence » du Bassin parisien et de la métropole parisienne.

- Les villes intermédiaires « satellisées » :

De façon marquante, nous retrouvons dans cette configuration la ville intermédiaire comme espace

péri-urbain, en périphérie de la métropole d’envergure. Elle apporte sa contribution à l’ensemble du

système, en termes par exemple d’actifs et de main-d’œuvre, d’infrastructures et d’équipements

spécialisés (hôpitaux, universités, centres culturels et sportifs). Elle apparaît de ce fait comme un

élément de complémentarité du fonctionnement d’ensemble du système territorial. Son autonomie est

avérée, mais, du fait de sa situation, son rôle est inhibé par la métropole et son rayonnement est parfois

peu visible car rapidement étouffé par le système dominant. Ainsi, des villes comme Saint-Etienne

avec le Grand Lyon, Angers avec l’ensemble nantais, ou bien Nîmes avec Montpellier et Chartres dans

le giron proche de Paris, peuvent être citées.

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- Les villes intermédiaires « éloignées » :

En situation d’éloignement, les villes intermédiaires considérées possèdent les mêmes propriétés qu’en

situation de « bordure » mais le système apparaît comme beaucoup plus fermé sur l’extérieur. Compte

tenu de leur éloignement, elles développement des qualités de résistance et des spécificités qui les

conduisent à un certain particularisme, à un caractère particulier. Cependant, bien que dans cette

configuration les villes intermédiaires soient plutôt tournées vers leur système territorial proche, elles

ont besoin d’apports en ressources exogènes pour ne pas entrer dans un processus de désagrégation.

Leurs ressources propres ne suffisent pas à leur pérennité. Nous pouvons citer Limoges, Clermont-

Ferrand, Dijon, Brest et Bayonne-Anglet-Biarritz

Figure 1 : les différentes situations spatiales des villes intermédiaires

Cette typologie de situations spatiales dans lesquelles nous trouvons les villes intermédiaires, nous fait

comprendre leur position dans la hiérarchie existante. L’intérêt de cette typologie est de nous montrer

également l’hétérogénéité des positions dans lesquelles les villes intermédiaires sont inscrites dans la

hiérarchie existante, essentiellement par rapport aux métropoles. Tantôt aspirées par ces dernières en

situation de périphérie, tantôt plus à distance mais sous influence en vertu des flux et des réseaux de

l’économie ; les villes intermédiaires peuvent également être en marge de l’influence directe de la

métropole. Mais, cette première typologie, qui peut s’avérer intéressante pour constater de

l’hétérogénéité des villes intermédiaires (au même titre que l’analyse en termes de taille), reste

insuffisante pour notre recherche avancée de définition.

Les éléments liés à cette première typologie seront repris pour aborder les formes d’existence et réelles

des villes intermédiaires (section 3). Non pas en tant que facteur explicatif de cette existence, mais

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8

bien pour remettre les villes intermédiaires dans le rapport qu’elles ont avec les autres types de villes.

Le choix des cas étudiés s’effectuera aussi en fonction de leur inscription dans la typologie.

Cette première partie, consacrée à essayer de délimiter un cadre d’analyse des villes intermédiaires de

façon morphologique (taille et localisation), nous amène à deux réflexions :

La première concerne la difficulté de définir précisément un cadre statistique de base notamment

démographique appliqué à la ville intermédiaire et applicable de façon homogène d’un point de vue

spatial. La place de la ville dans son système urbain régional, voire national, est une donnée

d’importance a priori. Comme nous l’avons évoqué précédemment, la ville intermédiaire est partie

prenante d’un système, les périmètres et les hiérarchies existantes au sein du système doivent être

connus afin de bien évaluer les situations médianes, cet « entre-deux » que constituent les villes

intermédiaires.

La deuxième remarque nous conduit à affirmer que l’étude par la taille ne suffit pas à définir les villes

intermédiaires. Au même titre que la métropole, que la ville petite et moyenne, les villes

intermédiaires doivent se définir par leurs fonctions socio-économiques au sein du système urbain et le

rôle qu’elles tiennent dans leur territoire.

3. Les formes de l’existence des villes intermédiaires: comment les villes intermédiaires

s’affirment-elles ? (section 3) La délimitation par la taille apparaît insuffisante pour identifier et définir précisément ce que sont les

villes intermédiaires ; et l’intervalle assez large qui en a été déduit (100.000-500.000 habitants) n’est

peut-être pas, dans un premier temps, révélateur des situations d’intermédiation réelles dont les villes

en question font preuve. Deuxièmement, il n’est peut-être pas non plus adapté pour qualifier et définir

les villes intermédiaires. Il nous faut aller au-delà en proposant une grille de lecture plus fine reposant

sur des critères fonctionnels transversaux à la typologie dégagée précédemment, et qui revêtent les

dimensions de l’intermédiation. La deuxième définition littérale que l’on peut trouver sur la notion

d’intermédiaire est « personne qui s’interpose, servir d’intermédiaire » (Dictionnaire Larousse 2006).

En extrapolant cette acception aux villes intermédiaires nous dirions qu’elles s’interposent entre deux

logiques, qu’elles servent à mettre en relation deux logiques : la connexion par les fonctions qu’elles

exercent entre des logiques plutôt locales avec un rayonnement sur leur hinterland, et celles plus

globales avec une ouverture sur l’extérieur (l’Etat et les instances nationales et internationales, les

métropoles et les marchés économiques extérieurs). Comment se matérialise l’intermédiation ? Autour

de quels critères l’intermédiation prend-elle corps et substance ?

Notre démarche consiste à faire ressortir des critères discriminants du caractère d’intermédiation ;

repérant ceux qui jouent un rôle de pivot et donc à « forte valeur-ajoutée » de la notion

d’intermédiation, de ceux qui apparaissent plus basiques mais néanmoins essentiels à l’éventail de

critères à regarder.

Ainsi, les situations observées permettront plus tard dans une étude plus longue d’établir un panorama

des villes intermédiaires, plus complet à la recherche de définition.

3.1 Les critères d’identification des villes intermédiaires : quelle « plus-value » à la définition ?

L’identification par critère pré- établi (tableau 2), nous permettra de regarder s’il n’existe pas une

forme d’idéal- type de la ville intermédiaire, nécessaire à la formalisation d’une définition. Ces critères

nous semblent être une base pertinente de la lisibilité nécessaire pour constituer une ville

intermédiaire. Les études de cas de différentes aires urbaines sélectionnées dans l’intervalle de taille

de 100.000 à 500.000 habitants, nous conduiront à vérifier quelles sont les villes qui tendent vers ces

idéaux-type et leur typologie associée (cf. section 2, influencée, satellisée, éloignée), ou bien celles qui

s’en écartent.

Notre analyse porte sur le choix de sept grands critères : démographique, économique et touristique,

institutionnel et politique, de connectivité/accessibilité, social/éducation/santé, culturel et loisirs,

environnemental. Au travers d’une série d’indicateurs, encore perfectibles à ce stade de la réflexion

ces critères permettront de mesurer, le degré d’intermédiation qui participe à la définition des villes

intermédiaire. Ils seront également intéressants pour vérifier si les villes, issues de l’échantillon, en

fonction des critères établis répondent aux dimensions de l’intermédiation.

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9

Nous établissons que les tous les critères n’ont la même valeur et ne pèsent pas de la même façon dans

la détermination du caractère d’intermédiation. La figure 2 illustre de façon schématique comment

l’intermédiation-type s’articule et donne la substance aux formes réelles des villes intermédiaires.

Ainsi, nous distinguons : un critère « pivot » discriminant de la notion d’intermédiation, la

connectivité sous deux formes, « interne » et « externe » ; de critères structurants, l’économique et le

tourisme, le politico-institutionnel, le social/ l’éducation/la santé qui vont s’articuler autour de la

connectivité et qui vont donner du corps aux fonctions « utilitaires » et « stratégiques » des villes

intermédiaires. Des critères plus transversaux, tels culturels/ loisirs et environnementaux, apportent

quant à eux la complémentarité nécessaire dans les fonctions développées ; et enfin un critère de base,

la démographie qui permet de situer les villes intermédiaires sur le curseur de l’attractivité.

Figure 2 : caractérisation de l’intermédiation-type

Source: Nadou, F., 2010, UMR CITERES 6173, Polytech’Tours, 2010.

La connectivité est l’élément central et fort de la dimension et de la substance d’intermédiation des

villes intermédiaires. Elle est au cœur du système et leur permet de jouer pleinement leur rôle. En

géographie, la connectivité peut se définir de façon minimaliste, comme ce qui rend compte des

connexions qu’offre un lieu pour relier les autres lieux de son environnement (hypergéo, 2007).

Deux acceptions se dégagent alors pour les géographes. Pour ceux qui sont attachés aux réseaux, la

connectivité est « la propriété d’un réseau d’offrir des itinéraires alternatifs entre les lieux. Elle

reflète alors le caractère plus ou moins maillé ou arborescent d’un réseau ». Du côté de ceux qui

s’intéressent à la métropolisation, la connectivité est plutôt rattachée aux relations qui sont permises

par la connexion via un réseau technique, par opposition à la proximité « qui concerne les espaces

immédiatement accessibles sans emprunter les réseaux à longue portée, c’est-à-dire les espaces en

contact ». Dans cette définition, la connectivité « rend compte de ce qui est connecté, sous-entendu au

réseau par opposition à ce qui n’est pas relié». Il ressort ici l’importance pour les territoires et

notamment les villes d’être connectés ou pas au réseau (par exemple la connectivité pour les villes

passent généralement par être reliées au TGV). La ville étant vue ici comme une machine, dont la

connectivité va s’accroître au fur et à mesure qu’elle va pouvoir accroître ses connexions dans

différents réseaux.

Régionale Nationale

Utilitaires Stratégiques

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On peut constater que ces deux définitions sont étroitement liées aux réseaux. Dans notre introduction

nous avions évoqué cette dimension de réseau dans l’idée de raisonner en termes villes intermédiaires.

Dans un autre domaine comme la géométrie, la connectivité est plutôt considéré comme l’élément

« de voisinage immédiat », une proximité spatiale, ce qui apparait plus en contradiction avec

l’acception géographique précédente.

La connectivité peut donc tout aussi bien représenter un rapprochement certain par le réseau, comme

un rapprochement spatial, donc en contact direct.

C’est en ce sens que la notion de ville intermédiaire nous intéresse et qu’elle prend son essence autour

du critère de la connectivité, dont les formes peuvent s’exprimer autour de la proximité spatiale vers

leurs espaces de proximité justement (connectivité interne) et autour des logiques de réseaux détachés

de leur espace, tournés vers l’extérieur (connectivité externe).

Par la connectivité interne, elles rayonnent (lisibilité) sur leur espace régional en étant le pôle qui

rassemble l’ensemble des services et équipements dont l’hinterland a besoin. Elles sont alors

considérées comme des centres de services. De ce fait, les villes intermédiaires offrent une série de

services pour les populations du territoire lié, à la fois publics (éducation, santé, justice) et à la fois

privés (commerces, services bancaires et assurantiels). Leurs systèmes politico-institutionnels leur

permettent d’être des centres administratifs et politiques de référence de l’espace proche (souvent au

cœur de l’intercommunalité et porteuses des projets liés). Les villes intermédiaires assurent des

fonctions économiques qui permettent aux populations actives du territoire régional d’être sur le

marché du travail et de l’emploi, créant ainsi des richesses, des activités et du développement. Elles

ont un rôle de production et de création de biens et services échangeables sur le marché local et

régional proche. Leur système social, d’éducation et de santé vont ainsi jouer un rôle de structuration

dans la qualité de centre de services. Elles permettent également aux non-actifs du territoire d’accéder

aux services et activités culturelles et de loisirs qu’ils recherchent. En plus d’être inscrites comme

lieux d’implantation d’activités de l’économie productive, elles sont aussi des lieux de production de

l’économie présentielle/résidentielle, désormais composante importante du développement territorial.

La connectivité interne permet de raccrocher les villes environnantes aux réseaux globaux de services,

d’emplois, d’équipements, qui sans la ville intermédiaire seraient plus difficilement atteignables pour

les villes petites et moyennes du fait de fonctions moins complètes.

La connectivité externe se fonde sur les critères du système politico-institutionnel et économique, qui

vont structurer et donner matière à ce que la ville soit lisible à une échelle plus globale, qui va en tous

les cas dépasser le cadre strictement régional. En étant le pôle économique de référence sur leur

territoire, les villes intermédiaires vont pouvoir tirer profit de leurs avantages comparatifs (Bolay,

Rabinovich, 2003) : en termes de localisation, de ressources humaines et techniques, de centre

touristique ; elles vont ainsi se connecter sur les marchés extérieurs et se rapprocher des centres

décisionnels grâce à leur poids institutionnels et éventuellement à des positionnements de leaders

politiques, qui vont pouvoir porter le discours de leur territoire sur la scène nationale.

Ainsi, les villes intermédiaires de référence seraient celles dont l’intermédiation-type reflète la

capacité de ces dernières à être lisibles à minima sur leur espace régional par des fonctions utilitaires,

mais également à une échelle nationale en développant des fonctions stratégiques se rapprochant de ce

point de vue des métropoles. Les situations observées (section 4) nous montrerons que cette

intermédiation-type n’est pas aussi clairement repérable.

Reprenons l’ensemble des critères afin d’en dégager une première synthèse (tableau 2), qui nous sera

utile dans les liens à cerner entre toutes les dimensions dans une étude plus approfondie.

- Connectivité/accessibilité,

Est un critère indispensable et discriminant du caractère d’intermédiation. Il en donne la substance

(figure 2). Ce critère suppose que la ville présumée intermédiaire soit en relation avec le reste du

territoire à un niveau suffisamment remarquable, lui permettant d’établir des liens et des connexions à

différents niveaux. Nous distinguons la connectivité interne, celle qui va mettre en relation les villes

intermédiaires avec leur espace de proximité dont la lisibilité se fait à l’échelle régionale dont les

fonctions sont plutôt d’ordre « utilitaires »; de la connectivité externe qui va permettre à la ville d’être

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lisible à une échelle qui va au-delà du régional, dont les fonctions sont, plus stratégiques, permettant à

la ville de se rapprocher des marchés extérieurs et des centres de décision, favorables à son dynamisme

et son attractivité.

- L’économie et le tourisme,

Combinés, ils sont indispensables pour regarder et analyser la compétitivité, composante déterminante

dans le profil et le caractère fonctionnel des villes intermédiaires.

La mesure de ces critères doit passer par l’analyse d’indicateurs qui s’intéressent à la fois à des

dimensions individuelles (niveau de qualification, part des emplois supérieurs, etc.,) et à la fois à des

dimensions collectives et plus près de ce qui se passe du côté des entreprises et du tissu économique

(création d’activité, spécialisation économique, etc.,). Les villes intermédiaires jouent aussi pleinement

leur rôle dans leur capacité à combiner des activités productives et résidentielles.

- Institutionnel et politique,

Ces critères vont nous permettre de regarder le positionnement des acteurs du territoire, au travers de

la nature des lieux de décisions politiques et administratives. La présence ou non de telle ou telle

administrations de services décentralisés et déconcentrés peut nous servir d’éléments contextuelle et

structurant de la connectivité. C’est important dans l’observation de la capacité des acteurs à porter des

projets. A ce titre, l’indicateur du leadership politique peut nous aider à analyser en quoi il est

important que les villes intermédiaires disposent d’un leader politique et/ou institutionnel afin de voir

la connexion de son ancrage local avec des positions défendues à des échelles supérieures.

- Social, éducation, santé,

Expriment ce que les villes peuvent offrir comme services publics à la population (centre hospitaliers,

universités, logements). Ce sont des critères structurants dans le sens où ils apportent cohésion social

du territoire et participent à son développement social et économique. Ils marquent l’action des

politiques publiques (locales et nationales) et font le lien avec les activités économiques (par exemple,

systèmes éducatifs adaptés au système productif, localisation des activités en fonction du climat

social).

- Culturel et loisirs,

Ce critère offre la possibilité d’identifier les formes d’expression qui caractérisent une ville (Bolay, et

al., 2003), à la fois dans son histoire vécue et passée et à la fois sur les évènements du présent.

- Environnemental,

Identifie comment les villes intermédiaires prennent en compte les éléments du développement

durable, et par quels biais se réalise leur gestion face aux enjeux de sauvegarde des ressources et de la

prévention des risques écologiques. L’impact des activités touche à la fois les dimensions urbaines des

villes intermédiaires et à la fois leur territoire proche, il est intéressant de regarder comment s’effectue

les combinaisons et la gestion entre l’urbain et le rural. Leur potentiel en la matière peut provenir

qu’elles n’ont a priori pas les problèmes environnementaux que les métropoles (Bellet, LLop, 2003).

- La démographie,

Constitue un élément d’évaluation de base du dynamisme de la ville intermédiaire. Comme nous

l’avons évoqué en première partie, il n’apparait pas déterminant pour identifier les villes

intermédiaires, néanmoins les indicateurs populationnels replacent les villes étudiées dans un contexte

global de comparaison et d’attractivité entre les villes, nécessaires dans une étude plus précise.

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Tableau 2 : Synthèse de l’analyse d’identification des villes intermédiaires

Critères Dimensions de l’intermédiation Exemples d’indicateurs d’analyse

Critère

discriminant

Connectivité /

accessibilité

Nœud de communication, de

transport et de réseaux : les échelles

de connexions avec le reste du

territoire

- Lignes TGV

- Lignes aéroportuaires

- Autoroutes

- Réseaux de télécommunication

Critères

structurants

Economique et

touristique

Capacité de combinaison des sphères

productive, publique et

résidentielle : la compétitivité et le

dynamisme économique

- Variation des taux de création

d’activité

- Part des emplois supérieurs

- Niveau de qualification

- Nombre de nuitées annuelles

Institutionnel et

politique

Lieux de décision politique et

présence d’instance administrative et

juridique : la présence d’un pouvoir

décisionnel

- Administrations décentralisées et

déconcentrées

- Leadership politique

Social,

Education,

Santé,

Expression du cadre et de la qualité

de vie offerte à la population. Elle

est au cœur de la fonction de

« centre de services »

- Universités/ centres de recherche

- Centre Hospitaliers et

polycliniques spécialisées

- Structures d’accompagnement

Social

- Diversité des logements

Critères

transversaux

Culturel, Loisirs

et équipements

Le rayonnement passe par la

complémentarité avec les secteurs

économiques et touristiques

- Salles de spectacles et grands

équipements sportifs (+ présences

équipes professionnelles dans un

championnat national)

Environnemental

L’articulation du développement

durable et la recherche des

combinaisons urbaines/rurales

- Sites de traitement

- Agenda 21, plan Climat

Critère de base

Démographique Dynamisme du territoire : capacité

de renouvellement des générations et

d’attraction

- Solde migratoire

- Part des jeunes de moins de 20ans

et des 65 ans et plus

- Variation de la population (1999-

2007)

Source :Nadou, F., 2010, UMR CITERES 6173, Polytech’Tours.

3.2 Le choix des villes observées

Nous procédons ici à l’observation de quatre villes (tableau 3) des régions Centre et Poitou-Charentes :

Chartres, Tours, Poitiers et Angoulême. Le choix de chacune des villes s’est effectué en premier lieu

de leur appartenance à un département différent au sein de leur région et sont également préfectures de

leur département ; ce qui leur confère un statut commun mais aussi particulier (tendance présumée

d’une concentration du pouvoir institutionnel).

Cet échantillon s’explique également parce qu’il permet d’une part, de balayer assez bien l’ensemble

de l’intervalle de taille des villes intermédiaires (aires urbaines) défini plus haut (cf. section 2.1), et

d’autre part de constater les situations et le poids différents des villes-centres de l’aire urbaine

considérée (tableau 3) : ainsi, la population de la ville-centre de Chartres représentent un peu plus de

30% de son aire urbaine, celle d’Angoulême un peu moins de 30% ; alors que le poids de celle de

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Poitiers est de 40% de l’aire urbaine et celle de Tours de 35%. Des effets de concentration de certaines

activités6 peuvent émerger selon la configuration dans laquelle nous nous trouvons, et peuvent

expliquer un rayonnement plus ou moins fort et étendu de la ville intermédiaire.

Enfin, ce choix s’est fait en considérant, avec prudence, leur appartenance relative à la typologie

définie précédemment (cf. section 2.2).

Ces éléments participent certainement à l’éclairage de l’étendue, de l’influence et de la place de

chaque ville sur son espace proche et de l’explication morphologique de cet espace. La carte 1 nous

permet de regarder plus précisément les aires d’influence des principales villes françaises, notamment

celles de notre échantillon. Ainsi, les villes inscrites sur la carte 1 comme « pouvant être assimilées à

des capitales régionales » et celles « ayant un rôle régional plus réduit », apparaissent comme proches

de notre réflexion sur les villes intermédiaires. Elle permet également de suggérer, à partir de

l’élément d’influence, une typologie des villes en dehors des métropoles, qui correspond relativement

bien à celle que nous avons dégagé plus haut, de grandes tendances sont visibles : par exemple, une

ligne Dijon, Clermont-Ferrand, Limoges, Angoulême qui coupe véritablement en deux le territoire et

des extrémités avec Brest, Bayonne, Perpignan, qui apparaissent comme des villes intermédiaires de

marge.

Carte 1 : les aires d’influence des grandes villes en France

Source : Noin, D., « l’organisation régionale de la France », L’espace Français. (Chartres rajoutée).

Sur l’échantillon retenu :

- Chartres : sa position la place en périphérie de la métropole parisienne, à proximité de cette

dernière

- Angoulême : à mi-chemin entre l’aire d’influence de Bordeaux et celle du bassin parisien, elle

constitue un pôle de développement pour son environnement proche, à dominance rurale

marquée.

- Poitiers : capitale d’un territoire régional encore marqué par le rural, elle reste dans la limite de

l’aire d’influence du bassin parisien et est au cœur de l’axe Paris-Bordeaux.

- Tours : sa localisation sur l’axe ligérien à structuré son développement, elle fait partie d’une

constellation de villes de même rang (Orléans, Angers, Le Mans) qui reste sous influence de

Paris.

6 Voir sur ce sujet, par exemple les travaux du Schéma de Cohérence Territoriale (SCOT) de l’agglomération de

Tours ; cela se vérifie notamment pour les services aux entreprises.

Chartres

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Tableau 3 : les aires urbaines étudiées et leur population

Aires urbaines retenues Population en nombre

d’habitants de l’aire

urbaine en 2007

Population en

habitants de la ville-

centre en 2007

Inscription dans la

typologie retenue

Chartres 133.140 41.374 satellisée

Angoulême 161.282 45.686 éloignée

Poitiers 228.733 91.901 influencée

Tours 397.010 139.958 influencée Source : Insee, Recensement de la population 2007- Limites territoriales au 1er janvier 2009. (Incluant la

population comptée à part).

4. Des résultats préliminaires : vers une typologie fonctionnelle des villes intermédiaires

(section 4).

La méthodologie exposée plus haut servira de cadre conceptuel à une étude plus avancée et plus

concrète sur les villes retenue dans un échantillon plus large. Nous n’exposerons pas l’ensemble des

résultats obtenus, et ces derniers seront encore perfectibles. Mais en choisissant de s’intéresser d’ores

et déjà à quelques indicateurs extraits de nos critères, notamment la connectivité, via des indicateurs

d’accessibilité et d’équipements, nous établirons une première synthèse, qui nous aidera dans la

recherche de formalisation d’une typologie fonctionnelle des villes intermédiaires étudiées.

- Des villes intermédiaires à lisibilité nationale.

qui sont constituées par les villes disposant de forces et d’atouts dans tous les domaines, ce qui leur

procure un rôle qui va bien au-delà de leur espace régional. Elles ont de ce fait une visibilité à l’échelle

nationale pour de nombreux domaines, dont les emplois stratégiques et les relations centres de

recherche/universités. Elles ont un poids démographique qui les placent en haut de la catégorie des

villes intermédiaires, proche des 500.000 habitants et des métropoles nationales : les cas de Nancy,

Rennes, Grenoble peuvent être cités. Les régions Centre et Poitou-Charentes ne disposent pas de telles

villes.

- Des villes intermédiaires à lisibilité supra-régionale7 :

Elles sont, par leur poids démographique moins importantes, en retrait des précédentes, et de ce fait

elles perdent en effet de taille qui alimente certains secteurs d’activités et marché de consommation.

Elles ont une reconnaissance et un repérage à l’échelle nationale mais leur rayonnement lié à leurs

fonctions économiques et institutionnelles se limite plutôt à une échelle régionale, voire débordante

sur les régions très proches.

Tours et Poitiers se situent dans cette catégorie, des villes dont le rayonnement sur leur territoire de

proximité (au moins régional) est avéré mais du fait de la proximité avec d’autres villes équivalentes,

leur affirmation au-delà de la région semble plus aléatoire (concurrence avec des villes comme Le

Mans, Angers, Orléans).

Leurs infrastructures de transports leur apportent une assez bonne connectivité sur l’extérieur et

semblent complètes mais cela peut cacher une certaine fragilité. Ainsi, par exemple si l’on regarde un

indicateur de la connectivité externe, en matière de lignes aéroportuaires : Tours et Poitiers disposent

de vols réguliers à destinations de métropoles nationales françaises comme Marseille et internationales

comme Londres, Porto et Dublin, et de vols saisonniers vers des grandes villes européennes comme

Barcelone. Mais celles-ci dépendent de compagnies de tourisme « low-cost » dont la pérennité et les

services peuvent être perturbés à moyen ou long terme8. Ces lignes participent plus pour le moment à

du transport « touristique » qu’à des connexions d’affaires nécessaires au développement de marchés

sur l’extérieur et de réseaux durables. Ces deux villes sont a priori aussi très bien connectées au réseau

7 Termes employés par Bock et Carrière (2007) dans les études consacrées aux villes intermédiaires de l’espace

atlantique. 8 En référence par exemple à la décision récente suite à un conflit du travail avec l’Etat français de la compagnie

irlandaise Ryanair de fermer pour le moment le fonctionnement de sa principale plate-forme en France, celle de

Marseille.

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TGV vers Paris et le seront davantage en 2016 avec les lignes à grande vitesse mettant Tours à 1h10 et

Poitiers à 45minutes de Bordeaux. Mais, là encore observons de plus près les flux de personnes mis

dans « la balance » : ils sont certainement plus favorables à la métropole parisienne, et dans l’avenir

également à Bordeaux, en termes d’apports journaliers9 et ou hebdomadaires d’actifs et surtout de

main-d’œuvre qualifiée10

.

Leurs situations fonctionnelles les placent très près des métropoles, ou tout du moins des capitales

régionales (au sens non administratif, même si Poitiers en est une) mais des lacunes sont relevées

notamment dans les domaines des emplois dits « stratégiques », comme la conception-recherche, la

gestion et les prestations intellectuelles, très présentes dans les métropoles (Damette, 1994 ; Halbert

2003). Elles sont néanmoins des pôles importants d’emplois dans leur espace régional, et par la

présence des universités et des centres de recherche, leurs acteurs socio-économiques sont capables de

développer des projets à forte valeur ajoutée. Tours est par exemple inscrite un pôle de compétitivité à

vocation nationale (science et systèmes de l’énergie électrique, lié à l’implantation d’une grande

entreprise, STMicroelectronics). Ce sont des villes dynamiques et de référence pour l’attractivité des

étudiants (Poitiers et Tours disposent de près de 30.000 étudiants chacune) avec des filières

diversifiées et reconnues (médecine, pharmacologie, droit privé). Les écoles de commerce des deux

villes fonctionnent d’ailleurs en réseau, et ont ainsi pu obtenir leur double accréditation américaine et

européenne11

.

Elles constituent des pôles importants dont les influences vont parfois au-delà des limites de leur

propre région. Ainsi, Tours s’étend dans de nombreux domaines (navettes domicile-travail, emplois)

sur l’aire de Châtellerault (en Poitou-Charentes), ou bien en dehors de son département avec

l’influence (université, navettes domicile-travail) sur Blois.

Ces deux villes sont aussi d’importantes placent touristiques sur le plan national avec des

infrastructures hôtelières en capacité et des sites touristiques remarquables et attractifs (vallée de la

Loire par exemple avec les Châteaux et la gastronomie liée).

- Des villes à lisibilité locale,

Concernant les autres villes de notre échantillon, Chartres et Angoulême, il est difficilement

envisageable de les considérer comme des villes intermédiaires. Elles ont certes une lisibilité à

l’intérieur de leur espace régional, sans toutefois le dominer ni en étant de référence ; au regard des

indicateurs elles connaissent des lacunes dans la majeure partie des domaines concernés. Leur statut et

la lisibilité qu’elles possèdent dans leur région provient du fait d’être préfecture de leur département.

Avec une connectivité/accessibilité aléatoire pour Angoulême, notamment des faiblesses en termes

d’équipements et d’infrastructures de transports (lignes tgv inexistantes, écartée de l’autoroute A10).

Faiblesses aussi qui s’expriment dans les capacités de recherche et l’absence des universités, Chartres

et Angoulême ne disposant que d’I.U.T qui dépendent respectivement des Université d’Orléans et de

Poitiers. Les fonctions économiques qu’elles développent sont orientées plus vers l’utilitaire et le

centre de services de leur espace de proximité, avec comme plus gros employeurs les structures

publiques. Les grandes entreprises aux fonctions stratégiques et tournées vers l’extérieur font plutôt

défaut. Chartres étant très proche de Paris (moins de 100 km par l’autoroute A11), en périphérie

compte tenue de l’étendue de la métropole, elle ne possède pas les fonctions et capacités nécessaires

pour un autre rayonnement. De même que pour Angoulême, où les activités ont une portée de

développement à lisibilité locale, à l’échelle du département et autour de spécialisation, comme le pôle

de l’image créé en 1997 venant concrétiser des évènements ponctuels (festival internationale de la

bande dessinée et de l’image).

5. Conclusion :

9 Nous pouvons observer les trains « bondés » entre 7h00 et 9h00 chaque matin au départ de Tours et à

destination de Paris-Montparnasse. 10

Eu égard au prix moyen de l’abonnement mensuel de travail nécessaire au trajet Tours-Paris-Montparnasse

(environ 650 €), on peut supposer que le salaire des personnes pouvant supporter ces sommes mensuellement

correspond à plutôt à des postes qualifiés et/ou rémunérateurs, offerts par la métropole parisienne. 11

Seule 10 écoles de commerce françaises disposent de cette double accréditation (AACSB et EQUIS).

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Les échelles de l’intermédiation et l’identification des villes intermédiaires peut se faire sur un

éventail assez large de villes, nous l’avons vu au travers des intervalles de taille retenus à cet effet,

oscillant entre les villes moyennes, jusqu’aux limites des métropoles. L’approche en termes de villes

intermédiaires permet de dépasser les cadres habituellement retenus pour établir des hiérarchies

urbaines. Elles permettent une transversalité entre les villes étudiées et de raisonner en considérant

davantage les fonctions et les rôles de ces villes au sein de leurs systèmes. Selon Mario Carrier12

, elles

viennent « briser la hiérarchie par le nombre ». Les villes intermédiaires correspondent à des

situations variables localement ou régionalement et elles doivent être « comprises comme une

construction conceptuelle polymorphe » (Bolay et Rabinovich, 2003). Mais certaines caractéristiques

apparaissent comme déterminantes pour une tentative de définition de ce qui fait la ville intermédiaire.

Nous avons vu, dans un premier temps, que les critères de taille, même s’ils sont variables, permettent

tout de même d’établir une base de référence importante à considérer pour parler de villes

intermédiaires.

Puis, notre réflexion a permis de dégager quelles sont les formes réelles des villes intermédiaires, et de

modéliser leur existence à partir de critères fonctionnels dont les apports se situent à des degrés

variables dans la substance donnée à l’intermédiation. La connectivité, qu’elle soit externe ou bien

interne, apparaît comme le pivot fort de l’intermédiation : « servir d’intermédiaire », est bien la

caractéristique de ces villes, qui par leurs fonctions et leurs localisations relient deux logiques. En

effet, en profitant des fonctions exercées par les villes intermédiaires, les villes petites et moyennes de

l’espace régional environnant ont accès à d’autres niveaux de réseaux, plus globaux ; à condition bien

entendu qu’elles soient associées et « connectées » aux villes intermédiaires, dans des démarches

politiques volontaristes de complémentarité et de projets.

L’analyse et la recherche d’une typologie des villes intermédiaires invitent à regarder les forces et les

faiblesses dont elles disposent. Cette première grille de lecture permet également d’envisager de

consacrer un travail plus approfondi sur les trajectoires socio-économiques de ces villes intermédiaires

et d’en dégager une analyse sur la performance de ces territoires.

En 1989, les séminaires et conférences de Poitiers ; ville intermédiaire au sein de l’espace atlantique

(Carrière, 2005) ; sur les « villes intermédiaires pour l’Europe ? »; ont permis aux chercheurs

d’affirmer que « toutes les villes moyennes ne sont pas intermédiaires en ce sens. Une ville moyenne «

intermédiaire » [ on voit ici l’héritage prégnant de la ville « moyenne »] a non seulement une place

dans la hiérarchie urbaine mais trouve dans cette place la justification d’une promotion des qualités

intrinsèques des conditions de vie qu’elle offre tout en utilisant les mutations économiques en cours

afin d’y mieux adapter sa population ».

En complément des fonctions économiques qu’elles assurent et décrites plus haut, les villes

intermédiaires sont aussi des pôles importants en matière d’offre de biens et de services aux

populations, en matière d’équipements et d’infrastructures (Bolay et Rabinovich, 2003), jouant ainsi

un rôle social, économique structurant pour leur environnement proche (hinterland).

- Des enjeux d’ordre économique :

La compétition mondiale et le développement des activités sont à la fois facteurs de métropolisation, et

à la fois renforcent continuellement le phénomène. En effet, les métropoles bénéficient en premier lieu

des retombées économiques de la mondialisation, et concentrent les créations de richesses génératrices

de pouvoirs économiques et institutionnels. Les villes intermédiaires bénéficient de ce processus

global de métropolisation, et leur statut intermédiaire leur confère des potentialités.

- Des enjeux de cohésion sociale :

Sa dimension est favorable à la diversité sociale, alors que son organisation permet une certaine mixité

par le jeu de la proximité (Aubert, 2010). Les villes intermédiaires représentent des pôles d’interaction

sociale, par les services et les équipements qu’elles proposent sur leur territoire proche mais aussi sur

ceux dont elles exercent une influence. Elles vont permettre de mettre en relation une diversité

d’acteurs que l’on ne retrouve peut-être pas dans les autres catégories de villes du territoire, la

métropole ou la petite ville ; il serait d’ailleurs intéressant de pouvoir mesurer cet aspect.

- Un enjeu d’aménagement des territoires :

12

Mario Carrier est professeur à l’Université Laval à Québec. Il a notamment travaillé sur les villes moyennes

supérieures au Québec et leur rôle dans le développement régional.

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Elles sont des pôles d’attraction et de structuration des activités pour les plus petites villes, et sont des

pôles économiques et de réseau secondaires, en marge et/ou en relais des métropoles et des grands

centres de décisions.

La mondialisation et ses processus économiques qui en découlent ont conduit à l’échelle mondiale à

une importante simplification de la hiérarchie urbaine (Dematteis, 1991). La ville intermédiaire répond

mieux au rôle que joue actuellement certaines villes, qui ne sont ni des métropoles ni des villes petites

et moyennes. Au sein de cette nouvelle hiérarchie urbaine et nouvelle donne économique, qui

s’appuient davantage sur les fonctionnalités, les capacités et les potentialités des villes (de réseaux, de

flux, de localisation des activités), les villes intermédiaires peuvent constituer des pivots entre

l’échelle nationale et l’échelle locale (Bock et Carrière, 2007). Ce rôle se fait à différents degrés, en

fonction de la place des villes intermédiaires dans la structure urbaine du territoire et des fonctions

socio-économiques qu’elles développent. Mais ce rôle reste fragile et n’est pas acquis. Ainsi, les

trajectoires et les stratégies définies et menées par les acteurs qui les gouvernent, si l’on peut les

résumer très vite ; être tourner vers les métropoles (marketing territorial, stratégies de rattrapage de la

métropole) ou bien vers l’espace de proximité ; peuvent les conduire à perdre la substance de leur rôle

d’intermédiation qui en font leur spécificité, et par définition leur existence.

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