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9. Y MARCHAL En guise d ' Int&uction . . II Les très nombreux géographes, qui parviennent à l'âge de la création, n'ont pas la culture à prépondérance littéraire de leurs préde- cesseurs... ils ont acquis une habitude de raisonnement mathématique et expérimental que n'ont pas eu les devanciers *.. il en résulte un afflux de jeunes issus de l'enseignement moderne, moins sensible à la beauté du lan- gage, plus à sa précision et à la rigueur. Ils se défient des formules va- gues et encore plus de l'intuition, ou du moins ne la considsrent plus que comme un point de départ: les mathématiques sont pour servir de garde- fou, ruiner1 : s intuitions hasardeuses, appuyer et préciser les démonstra- tions. Ils se posent, plus qu'auparavant, des questions sur l'objet et les méthodes de la géographie, et ont davantage le désir de l'utilité que celui de la culture désintéressée. La recherche passionnée de l'efficacité pra- tique donne un sens nouveau à leurs études (2) (') Ce travail a été réalisé grâce aux collaborations de J,P. GILG, Je BOULET, J.P. LAHUEC, M. BIED-CHARRETON, M. DELENNE et J.P. RAISON. En les remerciant, souhaitons ne pas avoir trahi leur pensée. (') André MEYNIER : Histoire de la pens6e gsoggaphique en France, pp. 118-119 (Chap. III "le temps des craquements" - les nouvelles conditions du travail géographique")

La place des études de terroirs dans les recherches

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9. Y MARCHAL

En guise d ' Int&uction . . I I Les très nombreux géographes, qui parviennent à l'âge de la

création, n'ont pas la culture à prépondérance littéraire de leurs préde- cesseurs... ils ont acquis une habitude de raisonnement mathématique et expérimental que n'ont pas eu les devanciers * . . il en résulte un afflux de jeunes issus de l'enseignement moderne, moins sensible à la beauté du lan- gage, plus à sa précision et à la rigueur. Ils se défient des formules va- gues et encore plus de l'intuition, ou du moins ne la considsrent plus que comme un point de départ: les mathématiques sont là pour servir de garde- fou, ruiner 1:s intuitions hasardeuses, appuyer et préciser les démonstra- tions. Ils se posent, plus qu'auparavant, des questions sur l'objet et les méthodes de la géographie, et ont davantage le désir de l'utilité que celui de la culture désintéressée. La recherche passionnée de l'efficacité pra- tique donne un sens nouveau à leurs études (2)

(') Ce travail a été réalisé grâce aux collaborations de J,P. GILG, J e BOULET, J . P . LAHUEC, M. BIED-CHARRETON, M. DELENNE et J.P. RAISON. En les remerciant, souhaitons ne pas avoir trahi leur pensée.

(') André MEYNIER : Histoire de la pens6e gsoggaphique en France, pp. 118-119 (Chap. III "le temps des craquements" - les nouvelles conditions du travail géographique")

Pour l'essentiel de son contenu, le rapport de Conjoncture du Comité Technique de Géographie d'octobre 1968 répondait à une "interrogation" sur les objectifs de recherche propres à P'ORSTOM. Deux questions directri- ces orientaient les propos :

(1) Recherche de base ou recherche appliquée ? et

( 2 ) Doit-il y avoir une forme de géographie propre à lsORSTOM ?

Ces propos mis à l'ordre du jour, répondaient, d'une part aux voeux et motions issus des comités d'action et de réflexion de Mai 1368, et, d'autre part aux suggestions formulées lors de la réunion d'information du 25 Septembre 1968.

La réunion du 12 Février 1969, consacrge au thème "terroirs", n ' a pas été l'occasion d'une relance du débat sous la forme, par exemple, de la finalité des études de terroirs. En dépit de ce que l'on pourrait appeler une lacune (mais le temps imparti à la réunion était trop court et les pro- pos échangés déjà fort variés), les Présidents de cette réunion ont tenu â faire figurer à l'ordre du jour de la réumion suivante (Septembre 1969) une réflexion sur les orientations nouvelles à donner aux études de terroir, et plus précisément, sur la place de ces études dans les recherches centrées sur le développement rural.

Le présent exposé s'inscrit donc à la suite de plusieurs réfle- xions sur l'engagement des recherches en vue d'utilisation pratique.

D'emblée, il paraPt utile de poser la question : "pourquoi vouloir rendre nos travaux utilisables ? - Pourquoi cette Svolution qui pousse cer- tains géographes à concilier leur tâche de recherche fondamentale avec Celle d'une recherche volontairement orientée vers l'application ??'.

Plusieurs explications peuvent Stre données :

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II

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1'

Il y a tout d'abord des explications d'ordre Fsychologique. Un chercheur à plein temps, dont l'activité outre-mer comporte de nombreuses enqugtes sur le terrain, est directement et constamment affronté aux problèmes hu- mains qui se posent dans sa région de travail. Ce n'est pas impunément que l'on vit des semaines dans un village au milieu des paysans. Il faut

" alors comprendre que, spontanément , des géographes cherchent des solu- tions aux problèmes que rencontrent quotidiennement les gens qui l'ac- cueillent". ('1

I l

A la limite, pour certains, la recherche de solutions aux diffi- cultés rencontrées par les populations devient un souci permanent. Volon- tairement, leurs études deviennent dynamiques, car disent-ils "tout bouge; 11 faut faire de louables efforts pour étudier un village vivant en autar- cie; il faut saisir l'évolution en cours; ce serait un réel gâchis de pré- senter une étude statique; soyons moins intellectuel et plus humain". Et, à bien considérer cette position, qui de nous ne s'est pas présenté en dé- but d'enquête notamment, en faisant valoir que l'étude attirerait éven- tuellement l'attention des Pouvoirs Publics sur le village et sa région ? Mais qui a été animé par ce souci jusqu'2 la fin de ses enquêtes ?

D'autres motifs sont plus scientifiques. En cours d'enquête, le chercheur est amené, qu'il le désire ou non, "2 intervenir de manigre I I concrète sur des probl2mes touchant à l'aménagement et 5 l'utilisation du s o l , par la nécessité de répondre aux questions des paysans. Parmi celles-ci, les plus fréquentes sont des' interrogations sur les motiva- tioas et la valeur de l'action des services techniques. Mais il arrive qu'on ne doive pas seulement commenter,-et qu'il faille se compromettre

'' plus directement : comment commercialiser les produits ? comment nourrir le b6tail ? quelles nouvelles cultures peut-on faire ? Ceci oblige à un constant effort de bon sens, à chercher conseil auprss des collègues de P'ORSTOM et, assez souvent, cela donne un coup de fouet B la recherche."

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Ceci révèle aussi, et c'est l e plus important pour l'étude, les I l

1 1

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przoccupations paysannes, les Pignes de fonce d'une évslution possible, les points SUT lesquels on peut agir pour un développement, Bref, ceci peut conduire à une géographie active '' ( 3 ) a Ainsi, lvapplieation n'est

pas toujours une finalits, mais peut contribuer, au moment mgme de l'enquête à vivifier l'étude, et 3. livrer une riche documentation que le chercheur aurait: bien du mal 2 obtenir si la perspective d'application pratique ne le guide pas ( 4 >

Enfin, il faut tenir compte, dans les. centres ORSTOM "du voisi- nage de spécialistes d'autres disciplines, tant de sciences physiques que de sciences humaines, qui arnsne $.prendre une vue plus large et plus

en partie par incompétence technique hors de sa discipline, par manque ' I de compréhension des forces socia1es;par ignorance des techniques agro- '' nomiques etc. a -'' ('1 Dans le cadre de .l 'ORSTOM, le géographe est tenté d'acquérïr quelques connaissances supplémentaires qui lui permettent de prendre conscience de nouveaux problèmes.

IV

I t

11 dynamique des problbmas. Si celle-ci.manque parfois au géographe, c'est I I

( 3 > J.P, RAISON : Id. IBID, p. 27 ( 4 j EX : BIED-CHARRETON, 2 Farafangana, commerrce son enqugte par UR ques- tionnaire "dégzts causés aux cultures", après le passage d'un cyclone.

pour 6tabPi r un contact plus étroit avec l es villageois" signale le chercheur. (" j J .F . RAISON : "Pa géographie appliquée et ses problèmes", p 4 .

I I Excellente ouverture pour discuter des problhes agricoles et bon prétexte

"Ces divers motifs incitent à Pa réalisation d'un travail qui 1 1 puisse 8tre utilisable à court terme, Cependant, la recherche d'une ap-

différents stades du travail et dans diverses conditions" ( 6 ) C'est ce 1 1 plication peut, suivant les cas, suivant les motivations, apparaEtre à

que nous examinerons. Mais auparavant, il est indispensable de conna?tre la forme que doivent prendre les gtudes, et particulièrement les gtudes de terroirs, pour Gtre utilisables.

Pour la rédaction de cet exposé, nous avons délibérément rejeté un plan qui aurait consisté 2 opposer ou, au mieux, à mettre en parallèle d'une part, les monographies de terroirs en vue d'une connaissance fonda- mentale et, d'autre part, les monographies à fin d'application. Outre le fait que ce plan nous aurait amener 2 une argumentation stérile, nous Pen- sons avec beaucoup d'autres, qu'il n'appartient pas au géographe mais au technicien d'appliquer ou d'utiliser les résultats de la recherche géogra- phique. Notre tzche est plutst, si teZZe e s t notre option personnezze de faire (et avant toute chose de mettre au point) une géographie qui soit "applicable". Pour ce faire, il est non seulement indispensable d'analyser les paysages, leur dynamisme, ainsi que les rapports multiples qui unissent l'homme 2 la terre, mais encore de prssenter l'étude et de l'orienter de manière telle que le praticien puisse l'utiliser (ex : déterminer avec précision les causes de la situation économique actuelle de la communauté, mettre en rapport les potentialités dont disposent les paysans avec les besoins ressentis etc..,). L'étude de terroir peut alors "permettre de comprendre de Z'int6rieur les situations de sous-dgveloppement ou de déve- loppement" (7> .

Pour mieux nous faire comprendre, disons qu'il ne sera pas ques- tion dans nos propos de "renier" les études de terroir qu'il faut considé- rer comme un mode d'approche priviligié de la réalité géographique, ni en- core de nous placer délibérément dans le giron des techniciens de l'aména- gement et de la planification. Il s'agira de voir dans quelles mesures les études de terroirs, telles qu'elles ont 6té définies jusqu'à présent, doi- vent sensiblement être améliorées dès lors que nous prétendons leur donner une place d'âns les recherches centrées sur le développement rural.

Ce préambule étant posé, et espérons letbien compris de tous, il n'en reste pas moins qu'une réflexion portant sur la place des monographies de terroirs dans les études de développement peut Ztre envisagée de plu- sieurs fagons. Nous savons déjà que nous n'échapperons pas aux reproches d'avoir oublié, néglig6 ou trop schématisé tel ou tel aspect de la question.

(6) J .P . RAISON : Id. Ibid p. 5 (') M. DELENNE : Note manuscrite rédigée à propos du colloque.

108

Le plan que nous allons suivre est le suivant :

(1) - A la lumière des études de terroirs déjà réalisées et des arti- cles du type "Pour un atlas dès terroirs africains" (qui portent sur une méthode), nous tentons d'.valuer l'apport des études de terroirs à la connaissance des milieux ruraux et de dresser un bilan des points forts et des faiblesses recensées.

(2) - Nous avançons plusieurs suggestions qui tendent à améliorer le contenu de ces études si nous nous plaçons dans l'optique d'une efficacité plus grande des recherches. Entendons-nous bien : il n'est pas question d'une recette ou d'une formule idéale, ce qui serait prétentieux, mais simplement de proposer d'étoffer le contenu des études, afin de ne pas de- meurer dans le descriptif et le qualitatif. Il nous est arrivé d'être taxG de "peintres champêtres, de contemplatifs -.ne croyant pas au développe- ment" ( *> *

(3) - En nous aidant surtout de l'expérience de l'équipe de géographes de Tananarive, nous abordons les questions suivantes : A quels moments de la recherche géographique intervient le travail à fin d'application ? Quels problèmes concrets et quels problêmes scientifiques pose le travail sur conventions ?

L'intérêt des études de terroirs est de "révéler la rFchesse de formes et d'organisations que recêlent les structures agraires" ('> ."L'idée de base consiste à étudier l'étendue occupée et exploitée par un groupement d'agriculteurs, à travers un jeu de plans levés 2 grande échelle : faciès du milieu focal , implantation et nature des cultures, données concernant la succession culturale ou l'alternance cultures-jachêres, aménagements permanents, structures foncières, habitat".

'(') Oû ? A Madagascar, au Ministère de l'Agriculture, de l 'expansion rurale et du ravitaillement. (Propos recueillis par BTED-CHARRETON)

f(') G. SAUTTER : "Les études de terroirs" in les Thêmes de géographie : BISH-ORSTOM, p. 76

11 TP s'agit de fournir une colleccion de monographies indgpendantes dont l'ensemble voudrait constituer à la longue une sorte de panorama cartographique des structures agraires en Afrique tropicale" (et à Madagascar) ( ' O )

L'orientation donnée à l'origine est donc indiscutablement lige à Pa connaissance "fondamentale" des structures agraires. Le b u t de chaque enquste est de fournir une série de cartes et une soixantaine.de pages:, le tout publié dans 1'AtPas des terroirs. Mais ce type de production n'en demande pas moins, pour Stre de qualité;"un relevé de toutes les parcelles cultivées, 1'6tablissement d'une fiche par parcelle et par exploitation ec le recensement exhaustif de la cormunauté étudiée" ("1

Ceci demande UR gros travail et une durge d'enquête vFrïant entre six mois et un an, parfois plus.

En comparaison de l'effort fourni et de la richesse de la matière à traiter, le résultat laisse perplexe;-En effet, ce que l'on trouve dans la plupart des études (et surtout parml celles qui sont dif*fvsges) e s t une analyse du paysage agraire, de sa genëse; de son évolution. Certes; le sys- tkme agricole et foncier, l'organisation sociale et l'organisation du tra- vail sont décrits. Mais, hormis les calculs de surfaces portant sur les parcelles et les exploitations, les. différents sujets que nous venons dcG- numérer sont abord& sous IFangle.qualitatif, quand on ne doit pas encore accuser l'ensemble de P'étude.d'Gtre.un simple inventaire, une nomenclature. Bien souvent', la-monographie se rapproche-de la description ethnographique du genre de vie. La combinaison des él6ments du aystkme agricole et social,' leurs interactions :.oeuvre spgcifique- du- géographe et rsvêlatrice, préci- sément, des structures agraires, n ' e s t pas.Gvidente dans toutes les 6tudes. Et ceci est.grave.-L'explie%tisn intime.du-systême n'est pas apparente. A la limite, c " e s t au lecteur de s'efforcer B comprendre. IP y a, 2 notre point de vueg un manque de réflexion prpfonde,.,, une absence d'interpré- tation

On arrive 2 se demander si la p r i o r i t é donnée à l"expressio4 car- tagraphique ne.joue pas malencontreusement -le rsle de l'arbre qui cache' la for2t. L e chercheur, -aprSs s9e"tre attaqué au levé de terrain;et appliqug pendant des mois à la réalisation d'un j e u de cartes, ne-considère-t-il pas 2 cet instant.que son travail est achevé '2 C ' e s t une question., Le texte dé- ginitif interprète, dans leurs relations réciproques, les différents faits eartographiés;mais.ensuite ? Combien de. chercheurs se préoccupent de péng- trer intimement la communaute villageoise, de connaTtre ses proslèmes ? Qui est riche, qui.ne.l'est pas ? Et que recouvre cette richesse, quelles en

i-------- ("j G. SAUTTER : Id. I b i d , p. 77

i l ' ) G. SAUTTER : Id, Ibid. p . 76-77 . - . .__ -

Iz: 10

. . . " . . .

sont les bases T QuePl& est'la productivité du travail ? Cumbien d'heures passées pour récolter quoi '? En quelle mesure la martrise du milieu est-elle réalisée et quel est le.bilan du système agricole ? Toutes ces questions. restent bien souvent. sans réponses, ce -qui ne .veut pas dire qu'elles. ne. . ' soient pas posées au cours-du texte,. 'Mals? nous dirons que ce n'est pas. en. écrivant;"quelques* facteurs. favorables assurent une' relative efficacitg au système agricole ... l ' . o u encore : ."une telle amélioration n'est pensable,' que sur les exploitations-des familles aisées". que l'on pose un bilan-.- ' ' '

Constatation presque. générale9. les conclusions prennent pourtant- un- ton.. prospectif Il est 'courant' de- trouver..dans les- dernfsres Pfgnes d'un ouvra-' ge, des remarques de- ce.-gerr-re : " l e b%'Ean est m6diocre;. on va. vers- la. . . famine, '. les . rotations"s"accé1èrent;- les, temps de, jachsres. se- raccourcis- sent et, compte. tenu d.'une,'population qui augmente,. la situation' s'aggrave". Mais à cause du manque.d*'argumentations so1ides;les conclusions se ressem- b4,ent beaucoup et ont un' caraetsre. trop-.théorique. pour revendiquer une por- tée rï5elleo Tl arrive'que l'on trouve"en finale; des formules de développe- ment extraites en droite ligne des travaux de LEBRET ou de PERROUX.

2 - P R O P O S I T I O N S P O U R D E S E T U D E S D E

T E R R O I R S D E S T I N E E S A L ' A P P L I C A T I O N

D I R E C T E ,

Nous,l'avons déjà dit, l'étude de terroir en tant que mode d'ap- proche de Pa réalité agraire est bierspécifique dans des pays où "le.vi1- lage et son terroir.représentent une unité bien cohérente et se révèlent ainsi comme une unité d'observation particulièrement paiviligiée" (l').

Avec son souci de localisation spatiale-, lasmonographie villa- geoise ne peut g t re remise.en cause; "La réalité a'des visages tellement multiples que.seule une'connaissance soigneusement localisge permet.de bien les comprendre" ( ) IntégrGe,.à une' recherche. cerntr6e sur le développement rural, la monographie permet de montrer "qu'à 1' identité du problème géné- ral qui est celui du sous-déve1oppement.d'un milieu.rura1 africain ne répond pas nécessairement l'ident?té-.des solutions- par, suite des. changements. dans les données géographiques tant physiques qu.'humaines'' (' 4); -"Il faut mener toujours l'enquête dans un cadre-limité, car ce sont les caractères stric- tement locaux du climat,du sol, l'exposition de tels ehamds, la fertilité de telles parcelles qui importent en lpoceurrenee" (' 5, Qui plus est, "un

1 3

(") M. DELENNE : Op. cit .- ( ' 3 , A . MAYNXER : "Histoire de la pensée géographique en France" p. 195 ( l 4, R. ROCHETTE:Doumega, Diondiou, Kawara Debe-,. villages des dallols

( ") G. DUDY : Compte-rendu de 1 'ouvrage de FAUCHER D a "La vie rurale vue ,maouri et fogha - Monographies comparées, p. 4.

par un géographe". PPT.

séjour prolongé dans UR village permet d'assister au.déroulement de l'an- nge agrieole,.de s'imprégner de la réalité sociale, d.'adapter, d'affiner l'enquête, dpnc d'obtenir des renseignements précis et sûrs" ( l 6).

Le jeu de plans levés à grande é&elle est.un apport précieux à la eonn.aissance des faits agraires et comporte une' série.de-renseignements de grande valeur ayant trait à l'emprise de la eomunauté-sur- l e s o l et à l'organisation foncisre du terroir. "L'gtude de terroir neqpeut'être fondge sur des in.terrogatoires. Elle ngcessite un inventaire récis des biens fonciers, et, avant tout un plan parcellaire eompIet" ( F.l FI Nous. ne reconnais- sons droit de cité qu'aux &Ludes consues eomme telles;.ce quisnous oblige 2 rejeter bon nombre d'gtudes qui se qualifient prgcisément d'"appliquées" et qui sont élaborées ''2 travers l'écran de fiches st&réotypées,confiées à une armge d'enquzteurs incontr8labEes" (' *) .

D'autre part, n'oublions pas que ce jeu de cartes,est'avant t o u t un moyen d'analyse et de eontr6'le. C"est un instrument de recherche qui, bien utilisé, doit précéder toute rgdaction. "OR ne se contente pas de regarder les cartes (mzme un quart d'heure9 rnais.de les juxtaposer et d'en tirer une vision nouvelle qui permet d'expliquer bien des problSnes du terroir" (">.

Par l'6chelle de l'étude et la place importante prise par l'expres- sion eartographique, la monographie e s t le moyen d'dtudier.en profondGw des phénomsnes par ailleurs connus plus globalement. Mais pour parvenir à ce but, le géographe doit pousser trSs l o i n son investigation, puis aprss avoir ana- lysé le "contenu" villageois, doit faire UR réel effort d'interprétation. Nous l'avons déjà dit : il ne suffit pas-d'analyser l es phénomènes, mais de voir ensuite en quelle mesure ils interfèrent l e s uns sur l es autres afin d'expliquer cette combinaison de liens qui unit les hommes à la terre. L'ac- cusation portée aux Gtudes de terroirs d'être trop deseriptives est mzlheu- reusement souvent fondée.

D'autre part, lorsque cet effort d'explication est fait, il se li- mite en géneral, à la compréhension du paysage agraire, lequel apparaît comme un objet d'gtude en soi.

Une telle conception de l'étude de terroir est siirement valable si l'on destine les monographies à une.publication dans Les Litlas des structures agraires, mais ne saurait être acceptée,si l'on se préoccupe.d'une utilisa- tion da ces travaux. La réalité du monde rural doit être perpe non seulement à partir du Daysage, mais encore 2 travers l e s conditions de vie des

("> A. LERICOLLAIS - Monographie de terroir de SOB, p. 5 (") J. HURAULT et VALLET : "Mission d'êtudes des structures agraires dans

( ' * j P. PELISSIER : Les -$aysans sgnégalais - Introduction ( 1 9 > P. PELISSIER : in : compte-rendu de la réunion du 12 Février '1 969,

le Sud-Dahomey " Y

p . 13.

paysans ( ) 20

"11 faudrait pouvoir connaTtre aussi (les caractères du s o l ) , les rendements agricoles, les temps de travaux et quelques autres donnges numg- riques, (les budgets familiaux par exemple.,,). Il s'agit là d'un gros tra-

* vail qui vient en supplément du reste. Les techniques d'investigation sont à peu prss codifiées, mais tous les chercheurs n'ont pas eu le temps jus- qu'ici (nï les moyens, car il faut pa =un certain nombre d'enquêteurs re- crutés sur place) de les appllquer" ( ) . Si les études de terroirs sont destinées à être utilisées, il ne faut pas considgrer ces données comme ve- nant en supplément du reste. Et si le temps ngcessaïre à la collecte de ces informations manque aux chercheurs en mission (CNRS, EPHE), '' le temps dont disposent les géographes de I'ORSTOM fait qu'ils sont particuliërement bien placés pour pousser Peurs recherches jusqu'a l a précision quantitative"(22). D'autre part, il semble évident que "l'étude des terroirs représente un mo- yen privilégié de jauger l'efficacité d'un systsme agraire et d'en localiser les faiblesses, ou, appliquée 2 des secteurs déjà transformés, de juger la valeur et le SUCC~S des innovations apportées" (' 3 > Alors ? pourquoi ne pas le faire ?

XI.

Face aux difficultés éventuelles que soulèvent des études pédolo- gïques, des calculs de rendements ou de budgets familiaux, nous pouvons faire appel sur le terrain aux spécialistes des autres disciplines ou acqué- rir auprss d'eux quelques techniques d'enquête rapide. CYest par ce biais que plusieurs géographes sont parvenus â valorïser leurs études. Ils pr6- sentent dans les rapports des notes précises, élaborées par des spécialistes des sols ou de la botanique. Ils utilisent les informations incluses dans ces notes, les associent à leur propre documentation et peuvent ainsi porter un jugement précis sur le rôle des différents éléments naturels dans leurs incidences agricoles. De même, puisque tous les géographes présentent dans Peurs monographies une étude démographique, parfois très poussée, pourquoi ne pas tenter également de cerner de plus près les situations économiques des paysans par une estimation de leurs revenus,

(") En prenant connaissance des études publiées, le lecteur a le sentiment que, par rapport aux données collectges, les chercheurs se sont limités volontairement dans leur rédaction et n'ont pas exploité la totalité de leurs informations afin de répondre aux exigences de la publication; la preuve en est que, dans leur premisre mouture, nombre d'études (peut-être insuffisamment bien présentées) ont un contenu beaucoup plus riche que celui de la publication, Or, cvest cette dernière qui est portée à Pa connaissance du public.

p. 80, ("> G c SAUTTER - "Les études de terroirs " in les ThSmes de Géographie, 6"') Rapport de conjoncture, CT de géographie d'octobre '1968, p. 14 ('3> Id. Pbid., p. 9.

-

Nous savons bien que la recherche de données quantitatives heurte certains caractères qui opposent : "En tant que- géographes, nous clevons donner UR point de vue qualitatif des phénomènes" ( 2 4 > .-.Avec eux, nous sommes,persuadés que les "modèles mathématiques apportent,moins à l'explication des paysages et de l'évolution des aménagementS.que la connaissance des faits humains, des organisations sociales et des structures mentales" ("). Cependant ici, il n'est question que du "souci du nombre" de façon à Ztre mieux armé pour saisir- le déroulement.desaphénomSnes et poser un bf%an.de la condition paysanne'. Ce n'est pas impungment que nous vivons des mois, dans une communauté; nous ne.portons pas de.raisonnement à priori, mais.,portant une' grande attention à l'observation;' 2 l,'intuition, au raisonnement qui corrigent et nuancent 1e.s conclusions numérTques. Ces dernières; par%,ai-lleurs, ne doivent pas être présentées telles quelles (des séries de chiffres), mais demandent ,ii gtre traitées afin de devenir à leur tour objets de réflexion et. de recherche ( * '> .

Incontestablement, tout ceci.demande du temps. MaiS.une étuae de terroir, qui se,'veut utilisable, doit être bien-comprise- des éventuels utilisateurs, parler.le mgme-langage qu'eux et ne peut Ztre- le résultat que d'un travail de longue haleine.

( ) D'autres arguments avancés au cours d'une réunion de géographes du 2 4

1 1 / 6 / 6 9 sont les suivants : - "C'est à l'économiste et à l'agronome d'effectuer des caPculs". "Les calculs sont trop délicats et compor- tent des erreurs". A ce second point, nous répliquons que les écono- mistes et agronomes ne font pas mieux que nous. MZme s i nos résultats ont le caractère et la valeur d'estimations, ce sont déjà des estima- tions". D'autre part, les séjours prolongés dans les villages permet- tent d'obtenir des renseignements qui gchappent aux enquêteurs itiné- rants venus dans les villages pour évaluer des budgets par sondages.

(25> P o PELISSIER - Les paysans sénégalais - Introduction. ( ) J. BOULET - "L'étude de terroir permet de dépasser les chiffres, car 26

elle présente un systême à l'intérieur duquel tous les éléments sont à prendre en considération. Les chiffres, seuls peuvent mener à des modèles dsr&gereusement irréalisables-. Ex : Le paysan BIAFA fait e3- viron I ha de mil qui lui rapporte 800 kg. Ses besoins sont estimés à 1200 kg. Comment :-srvenir à ce résultat ? Sans connaissance du pays, comme c'est.souvent le cas des experts, la réponse-est simple ; il suffit au MAPA de cultiver l; 5.ha de mil. Or c'est impossible, compte tenu de la durée de la saison des pluies, du milieu particulier et de la force de travail des individus. L'étude de terroir permet de corriger l'apparente rigueur des chiffres". Note dactylo - prépa- ration du colloque.

114

Les Gtudes de terroirs ne' comportent .pas- toujours,, beaucoup s'en faut, une ouverture sur la.région environnante, et lorsque c-'.est..le- cas, 1-'extension régionale ne concerne que quelques pages' en. fin d'ouvrage. Si nous avons dit que le souci de localisation étaft.une des qualitéS.Princi- pales de ce type de recherche,. ?l importe toutefois' que l'étude..débouehe sur une géngralisation, car le cas.individue1 de tel vil1age.a rarement un intérst en soi. Il ne constitue pas 2, lui seul une finalité de l!étude.

1' Il faut placer la monographie dans son.eontexte*régional pour lui donner U a k w de son&g@, Les faits précis, les donnGes.chiEfrées, re- cueillies dans le village , prennent. tout. leur .intérêt. une. fo-ks- établie leur validité pour toute une contrée. La première t3rhe-est de dresser un tableau de 1'env.ironnement'' (27). Tout le monde semble d'accord sur ce point et les monographies ne se font pas faute de présenter rapidement $a .

rbgion, dans les toutes premières pages puis; à.. la .fin. de, 1' Gtude; de poser le problème de la représentativitg du village par rapport aux-terroirs: des environs, "de vérifier jusqu'oû les, rgsultats ob.tenus- sont sîgniftcatifs"

sous-région, ou périmètre, ou groupe ethnique)à ~"~ntérieur-.de.-~aquelle il est de bon ton de trouver- un ensemb-le de.caractEres homogsnes. .T'L.faut rGelLement glargir la recherch.e ponctueHe-, en- muPtipTiant les-enquztes (études cursives). Pour p.eu. que le ggographe- ait calculé, des budgets fami- liaux, il est obligé de tenir compte des activités économiques du lieu où il se trouve. L'étude du marchs local devient alors une nécessitg pour juger de la participation des villages aux échanges commerciaux. Et s'il est parvenu 5 déterminer plusieurs types de paysans et à définir ce qu'est "l'initiative" des agriculteurs, il e s t obligé de conclure que, non seule- ment cette initiative est le fait de fortes personnalités, mais dépend .

aussi des conditions éconorniques propres à chacun (possibilttés d'investir) , des circuits de distribution du petit matériel, des engrais, de la facilité de contact entre les paysans, du réseau de communication.

a Toutefdis ,, il- ne faut, pas' se contenter..;e. dt3Z$rn$-tsr . ~~ . / l e ,~6gfbn (ou

Il est notable que de plus en plus, les études de terroirs débou- chent sur une analyse complète de la région, ou encore sont intégrées à une étude régionale.

L'étude de terroir comprise comme nous'venons de l'exposer est bien différente de la conception que l'on se faisait d'elle à l'origine, mais elle peut avoir une portée plus grande, à notre avis. C'est au prix d'un surcrolt de travail, mais à ce prix seulement, qu'elle peut s'intégrer aux recherches centrGes sur le développement rural ( 2 9 )

("1 A . LERICOLLAIS op. cit. (") G. SAUTTEP'- "Les études de terroirs" p. $2

("1 Non seulement P'étude explique' la. simation présente, mais encore elle analgrse le pr6aent en vue de son amSfisratîsm, .

,..

Maintenant, disons que libre est celui qui refuse les arguments que nous venons d'avancer, Pour Ztre plus précis, nous pensons que les études de terroirs peuvent donner Pieu à plusieurs types de publications, une même $tude pouvant se présenter sous plusieurs aspects :

(1) - L'atlas des terroirs : où l'importance est donnée au jeu de cartes avec un texte eonsu essentiellement dans un commentaire, "un peu 2 la fason des notices accompagnant les cartes géologlques ou pgdologiques" ("O> n

(2) - "Il convient de retenir Pa suggestion suivante, faite par un groupe de chercheurs : que tout travail rsalisé en dehors d'une perspective d'application directe donne iieu, en mgme temps qu'au texte destins â la publication, 2 la eonfeetion d'un extrait ou d'un complément O Û figureraient les points p l ~ s particulièrement susceptibles d'éclairer ou d'orienter l e s options du d&veloppement" ( 3 ' > .

(3 ) - L'étude envisag6e dans la perspective d'une utilisacion qul aborde une région, s o i t pour elle-mgme, s o i t à travers un thgme (villes- campagnes, colonisatron des terres neuves) et replace f a monographie au niveau d'un sondage. Ces derniëres études, plus étoffses e t plus denses, posent des problèmes de publication P i G s au nombre Important de cartes

Telles sont les trois orientations que prennent aujourd'hui les études de terroirs, Les deux dernigres semblent, 2 notre point de vue, répondre â des possibilités d'applîcatFons-

( ' O ) G, SAUTTER : Les $tudes de terroirs pc 76. ( s a j Rapport de conjoncture CT Octobre 1968, p. II. A notre connaissance,

le rapport de LERICCILM'LS sur Sob se rapproche de cette formule.

( '*> Ex : Les études réalisées 2 Madagascar : Vohibary et Phérive, Tsarahonenîna et Ambohibary, Anjazafotsy et le canton de Bétafo, I fan ja , Amboh1manambola. Au Tchad : le villa,Te-de Dobadens a étg choisï pour étudler les incidenees de l'imposition de Pa culture cotonnière sur lc système agricole traditionnel.

3 - L ' U T I L I S A T I O N D E S T R A V A U X L E S

D I V E R S M O D E S D ' I N T E G R A T I O N D E S

E T ' L T D E S D E T E R R O I R S A U X R E C H E R C H E S

C E N T R E E S S U R L E D E ' V E L O P P E M E N T R U R A L

3.1. L ' U t i l i s a t i o n d e s é t u d e s

'' a p r 5 s c O u p . " :

l L'étude de terroir étant terminée, il reste un certain nombre de probl&ws,8 rQsoudre afin qu'elle soit effectivement utilisée : questions l

.Ii.Qes.à la publication et recherches d'utilisateurs. Ces conditions, bien '

.entendu, se rattachent à l'utilisation des études "aprss coup", étant bien' admis que; jusqu'à présent, nous nous sommes placgs dans le cas des cher- 'cheurs travaillant dans le cadre des thèmes ORSTOH. Nous-consacrerons la deuxième partie de ce paragraphe aux conventions. I

A lvintérieur de P'ORSTOM, la publicaeïon soulsve des problsmes assez épineux, pour ne pas les passer sous silence. Or, en toute logique, il faut bien convenir qu'une étude destinée à l'application souffre diffi- cilement d'attendre 2 ou 3 ans, dans les meilleurs délais, avant d'être j

publiée. Autrement d%t, elle demande un ordre prioritaire, ce qui paraTt impensable actuellement au Service des Publications.

Une solution peut être apportse au niveau des Centres, par le biais d'une diffusion strictement locale à 160 ou 150 exemplaires, sous la ..forme.de rapports ronéotés, accompagnés de tirages héliographiques. C'est ;cette formule qui a été adoptée au Centre de Tananarive,' non pas que dès 'le départ nous pensions nos études "utilisables", mais nous voulions être :lus par des personnes qui s'intéressent de près ou de loin aux problsmes ruraux

Le rapport ronéoté n'a pas la particularité d'être très élggant dans sa présentation, mais qu'importe. Plus important est son contenu. Cependant, nous ne devons pas nous éloigner du souci de présenter claire- ment les résultats des enquêtes, de fason 3 ce que s'instaure un dialogue entre les chercheurs et les techniciens.

"Le géographe ne doit jamais oublier, lorsqu'il &rit, de tenir '' compte des interlocuteurs; il doit savoir à qui il:sPadresse, de fason Z " 6viter d'gtre mal compris et mal utilisé".

''Il doit d'abord observer un certain nombre de règles morales. 1 ) Pour rgaliser un travail de valeur, il a d$ gagner la confiance des gens

" Sans doute, a-t-il recueilli des opinions, des confidences qu'il ne doit: pas livrer dans n'importe quelles conditions ... Il ne faut pas oublier 1'' que le chercheur ne sait guère quelle utilisation pratique sera faite

"' des documents qu'il livre". . .

t l auprès desquels il enquGte, et il ne doit 'pas trahir cette confiance.

"Il y a, d'autre part, des problèmes d'expression. Comme toute I I

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discipline, la géographie à son jargon, qui n'est pas forcément connu des interlocuteurs. Les mêmes mots ne sont pas tous employgs dans le mgme sens ainsi faudra-t-il toujours bien définir des termes comme "exploi- tation", "structures agraires", "systèmes de cultures", "terroir". Il faudra aussi ne pas se contenter d'exposer des données qui, spontandment,

'' intéressent l e géographe, parce qu'elles définissent un paysage, comme la répartition de l'habitat, les formes de champs ... mais bien montrer en quoî elles doivent intêresser le technicien, et si elles ne semblent pas devoir l'întgresser, il faut éviter d'en encombrer l'exposé. Faute de

" quoi, le lecteur sautera des pa es et négligera parfois de noter d'autres points essentiels pour lui". ( ) .

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II 3 5

Ces cso~ditxons Qtanr: requises, une étude de terroir diffusée lo- calement et spécialement auprès des autorités compdtentes peut évidemment orienter leur action. Il ne faut pas se faire trop d'illusion sur ce mode direct d'influence, mais les rapports to^t ou tard, parviennent sur le bu- reau des praticiens, car la documentation dont ils disposent est minime. Sans essayer d'atteindre les dépar,tements ministdriels, E'étude de terroirs peut être utilasée à P'échelon de la rêgion sur laquelle porte le trraVail, par l'administration locale et les agents des services de vulgarxsation a- gricole ou d'animation rurale. Par ailleurs, les ggographes sollicitent sou- vent l'appui des techniclens et de l'administration; les contacts personnels sur le terrain avec les représentants d'autres organismes sont assez fré- quents pour que 1'011 sache que tel chercheur travaille depuis tant de temps, sur tel problème et dans telle région. Ainsi, les dtudes franchissent la porte des services intéressés au dZveloppement. Généralement, les conmais- sanees livrées permettent de formuler des avis et d'orienter des recherches complémentaires (parfois sur conventions).

Enfin, tenons compte du fait que bon nombre de technlciens, bien qu'il existe parmi eux des réticents auprès desquels la géographie n'a guè- re de crédit. s'intéressent aujourd'hui davantage aux études de terroirs : L'importance que ROUS conférons à la connaissance rigoureuse et approfon-

' I die du système agraire traditionnel de production : la mise en évidence des articulations spécifiques qui le constituent, peut ROUS mettre en effet sur la voie des formes de transition qui doivent être ngcessaire-

" ment assurés si l'on veut' réaliser, sans heurts et difficultês graves,

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1 1

Il les objectifs 6COROmiques et sociaux d'une opgration de développement 11 rural (34> .

( 3 3 ) J.P. RAISON Op. Cit. pp. 20-21

(34) Propositions pour une réorientation des actions de dgve,loppement rural - SEDES, pp. 26-27.

118

3 . 2 , L ' u t i l i s a t i o n i m m é d i a t e :

l e s c o n v e n t i o n s .

Un tel souci chez les "praticiens du développement", a permis à certains g'eographes d'étudier des terroirs dans le cadre de conventions. C'est par exemple, le cas de TROUCHAUD qui a incorporé des monographies à l'stude de la région de Bouaké (Etude- régionale de Bouaké 1962-63). A Madagascar, une convention, passée avec la SCET sur la plaine de Tananarive, a porté. sur une demi-douzaine de monographies. Actuellement, BIED-CHARRETON enquste sur trois villages' : Iarandrario, Kazoaraka et Todia, dans le ca- dre d'une convention PNUD-PAO. Cette recherche s ' intègre à un projet char- gé de préparer un plan de développement régional intégré et de lancer des opérations pilotes de vulgarisation, (Farafangana) Le thème de travail est l'étude des systèmes agraires et dès possibilités d'innovations agro- nomiques (compte-tenu des limitations géographiques inhérentes à 1a.den- sité de population, aux terres disponibles, au milieu naturel) et des ré- actions des'sociétés paysannes. Il est demandé au chercheur de conclure par une synthèse permettant de replacer chaque terroir dans ses données régionales (gGographiques, économiques et.socio-politiques)

"Mais il ne suffit pas de décrocher les contrats, il faut ensuite ' 1 considérer que le contrat place le chercheur dans un cadre juridique au- " quel if n'est pas habitué, qui peut heurter ses habitudes scientifiques, qui est souvent en contradiction avec les principes de l'Université à . laquelle il continue d'être rattaché peu ou prou'' (35).

I l

Qusi1-J.m esqt les principales contrain+,ssa.l6gsles ? 1

I I

I I La première concerne le détail de travail. La convention est conclue pour un certain temps, généralement bref, à l'issue duquel des rgsultats doi-

I I être obtenus., Ceci oblige de travailPer à un rythme Clevé. L'inconvénient est que le chercheur risque d'être obligé d'arrêter ses enquêtes au mo- ment oii il sent qu'elles deviendraient scientifiquement plus intéressante,s.

11

11

" Le deuxième point est l'obligation d'une publication immédiate. Il faut faire vite, sitôt les résultats dépouillés. 11 est difficile d'éviter les

" conclusions hâtives, d'analyser 1es.Informations avec la finesse souhaitée. " D'autre part, il ne faut pas oublier que, en droit, le chercheur ne peut pas disposer librement des résultats des travaux sur conventions. IE a vendu, sinon son âme, du moins sa matigre grise à une Société d'études ou

11

1 )

1'

'' à un Ministère".

' (35) Nous sommes entièrement redevables pour ce paragraphe à la conununi-cation de J .P , RkISON Op. Cit..!pp. 13-19.

113

11 Une convention da recherche précise la narure du travail demandg au ggographe, O r , souvent, ces conventions ne son t pas intitul4es "Gtudes de géographie" mais p l u t 6 t : "&tudes socio-k5conomiques", Le terme de g&o- graphe n'esr pas encore entré dans le j a rgon du dgveloppement, L e résul-

mande de taire ce qui nYest pas de son domaine, ou de ne traiter que de certains aspects de la réalnilé géographique en nggligeant l'aspec'r syn-

1 1

IV

1 1

l9 tat e s t que la tkhe d u géographe e s t mal définie : ou bien on lui de- 11

l t

II thétique de sa discipline",

11 On demande souvent au chercheur de dzpasser son r8Pe en fomulmt des propos. i t ions praciques, technlques de mise en valeur. Notre rsle doit rester de fournir des gi6ments de connaissance nzcessaïres 2 un choix. Lorsque celui-ci est falt aprss enquste, ou m&me avant enqugte, ce quï est souvent l e cas, le r8Le du géographe est d'éclairer l e s responsables sur les conséquences poss ib les de ce. chonx".

I I

11

11

Il

- Traveî. l en gquipe, avec des spgcialistes de disciplines différentes et des techniciens de faqon que le géographe n'ait jamais à faire seul des choix, mals puisse éclairer consta~ment ses interlocuteurs.

-~

- Trava5l r ê a l l s 6 non pas en vite d'un aménagement quasi-immédiat, mais 5 des fins de planification r6gisna le . 'Clne enquste de géographie, un an avant la rGalisarion d'un amGnagement est un s'lgne de mgpris pour les réa- lit& humaines de la rêgion concernée. II e s t alors t r o p tard pour s 'op- poser aux jugements des planificateurs qui considèrent que les cadres de structures villageoises sont l es seuls freins aux innovations et qu'en consgquence, il est ngcessaire de créer des cadres nouveaux (c'est-2-dlre cornplsternent artificiels) -pour rgaliser le développement (36>

"Jusqu'à prgsent ces deux conditions fondamentales n'ont gusre été réunies"

Au bout du compte, la formule qui consïste 2 rgaliser une Citude de terrolr en profondeur, en s'efforcant de prgsenter un bilan réel du systsme agricole et de la condition de vie des paysans, semble actuellement la seule slsacisfaïsante" pour un chercheur préoccupé d'une utïlisation de ses études.. Mais alors, il faut expllquer la réalit6 géographique dans une optique dynamique, de f a p n à dégager l'Gvolution possible des rapports de

(36> M. DELENNE : op. c i t ,

l'homme avec le sol, au cas ou un aménagement serait réalisé. Reste ensuite à attirer l'gttention des "planificateurs" sur les problèmes étudiés, par le biais d'me bonne diffusion des études. Dans le cas que nous venons d'exposer, il n'y a pas B e conflit entre une connaissance désintéressée et une,:utilité pratique3 e t - i l faut bien se persuader que "la seconde n'est pas toujours la suivqnte de la première r i ( 3 7 )

11 Le problème de l'application de nos connaissances doit nous préoccuper. Il -doit y avqïr dans nos enquêtes des temps de recherche in- tellectuelle laborieuse, 'sans débouchés apparents et des temps d'applica- tion qui s'enrichissent les uns les autres. Si nous nous pénétrons de cela, nous serons plus aptes à'jouer un rôle utile, et finirons forcément par être plus sollicités". ( fi8) En conséquence, les clauses des conventions seront plus profitables Aux géographes qu'elles ne le sont actuellemqpt.

( 3 4 ) A . MEYNIER : op. cit. (38> J.P. RAISON : Op. Cit. p. 29

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