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La Protection Sociale des Enfants en Afrique de l’Ouest et du Centre Étude de cas du Sénégal Unissons - nous pour les enfants

La Protection Sociale des Enfants en Afrique de l’Ouest et ... · VIH / Sida Virus de l'Immunodéficience Humaine / Syndrome d'immunodéficience acquise LISTE DES ACRONYMES . 8

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La Protection Sociale des Enfants

en Afrique de l’Ouest et du Centre

Étude de cas du Sénégal

Unissons - nous

pour les enfants

LA PROTECTION SOCIALE DES ENFANTS EN AFRIQUE DE L’OUEST ET DU CENTRE : CAS DU SÉNÉGAL

Ce document a été préparé a partir de laversion anglaise du rapport qui peut êtreobtenu auprès de l’UNICEF Sénégal, rue Carnot Salva, Dakar

Avertissement: Les opinions présentées dansce document sont celles des auteurs et nereprésentent pas nécessairement les vues del'UNICEF

ODI 111 Westminster Bridge RoadLondres SE1 7JD Royaume-UniTel: +44 (0) 20 7922 0300 Fax: +44 (0) 20 7922 0399 www.odi.org.uk

Photo de couverture : © UNICEF

Introduction

et cadre d’analyse . . . . . . . . . . . . . . . . . . 7

1.1 Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 71.2 Cadre d’analyse . . . . . . . . . . . . . . . . . . 8

Approche

méthodologique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 11

Vue d’ensemble du contexte

politique et de développement

socio-économique . . . . . . . . . . . . . . . . . 12

3.1 Contexte politique: situation etpriorités des politiques . . . . . . . . . . 12

3.2 Contexte économique . . . . . . . . . . . . 143.3 Politiques de développement . . . . . . 153.4 Conclusion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 15

Analyse de la pauvreté et

de la vulnérabilité . . . . . . . . . . . . . . . . . 17

4.1 Grandes tendances de la pauvreté et de la vulnérabilité . . . . . . . . . . . . . 17

4.2 Manifestations spécifiques de lapauvreté et de la vulnérabilité en relation avec l’âge et le genre . . . . . 24

4.3 Conclusion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 30

Etude des programmes nationaux

de protection sociale . . . . . . . . . . . . . . 31

5.1 Mécanismes traditionnels et informels de protection sociale . . . . 32

5.2 Bref historique du système de protection sociale . . . . . . . . . . . . . 32

5.3 Le système formel de protectionsociale et les programmes . . . . . . . 33

5.4 Vue d’ensemble: la stratégie deprotection sociale du Sénégal . . . . 35

5.5 Seconde Stratégie de Réductionde la Pauvreté . . . . . . . . . . . . . . . . . . 36

5.6 Impact des régimes actuels de Protection Sociale . . . . . . . . . . . . . 40

5.7 Contraintes politiques et institutionnelles . . . . . . . . . . . . . . . . . 40

5.8 Conclusion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 44

Analyse de la marge de manœuvre

budgétaire pour les programmes

de protection sociale . . . . . . . . . . . . . . . 45

6.1 Aperçu macro-économique et situation financière . . . . . . . . . . . . . 45

6.2 Défis budgétaires à l’investissementdans les services sociaux . . . . . . . . . . . . . 49

6.3 Marge de budgétaire pour la protectionsociale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 52

6.4 Progrès réalisés dans la gestion desressources publiques . . . . . . . . . . . . 55

6.5 Visibilité des enfants en matière debudgets et dépenses de protection sociale . 55

6.6 Conclusion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 56

Analyse des allocations en espèces

comme mécanisme de lutte contre

la pauvreté des enfants . . . . . . . . . . . . 57

7.1 Programmes actuels d’allocations en espèces au Sénégal . . . . . . . . . . . 58

7.2 Impact potentiel des allocations sociales sur la pauvreté . . . . . . . . . . . 61

7.3 Le ciblage est-il pertinente pourle Sénégal? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 68

7.4 Les approches orientées sur la demande sont-elles appropriées pour le Sénégal? . . . . . . . . . . . . . . . . 74

7.5 Avantages et inconvénients de la conditionnalité des transferts d’espèces dans le contexte sénégalais . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 76

7.6 Le Sénégal dispose-t-il des conditions administratives etde bonne gouvernance pour une mise en œuvre efficace des transferts d’espèces? . . . . . . . . . 77

7.7 Conclusion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 78

Analyse de la contribution

potentielle et de la faisabilité

de l’assurance Maladie . . . . . . . . . . . . . 80

8.1 Programmation actuelle desfinancements de la santé . . . . . . . . . 80

8.2 Mécanismes visant à faciliter l’accès

iii

TABLE DES MATIÈRES

1

2

3

4

5

6

7

8

iv

aux soins de santé . . . . . . . . . . . . . . . 818.3 Programmes actuels de la protection

sociale santé ciblant les enfants . . . 878.4 Options pour l’extension du

système de financement des services de santé . . . . . . . . . . . . 88

8.5 Conclusion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 89

Renforcement des services de protection

de l’enfance au sein des systèmes

généraux de protection sociale . . . . . . 91

9.1 Priorités de la protectionde l’enfance . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 91

9.2 Systèmes actuels de protectionde l’enfance . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 93

9.3 Favoriser les synergies entre la protection de l’enfance et laprotection sociale . . . . . . . . . . . . . . . 96

9.4 Conclusion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 97

Implications en termes de politiques

et d’opportunités pour un engagement

au niveau des politiques . . . . . . . . . 99

10.1 Opportunités pour un engagementdans les processus de politiques concernant la protection sociale . . 99

10.2 Implications en termes de politiques . . . . . . . . . . . . . . . . . .103

Références . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .9

10

AOC Afrique de l’Ouest et du Centre AS Allocations sociales BAD Banque Africaine de Développement BCI Budget Consolidé d'Investissement CAFSP Cellule d’Appui au Financement de la

Santé et au Partenariat CAPE Centre d’Appui à la Protection de . . .

l’EnfantCDMT Cadre de Dépenses à Moyen TermeCPRS Centre de Protection et de Réinsertion

Sociale CNUDE Convention des Nations Unies relative

aux Droits de l’Enfant CONAFE Coalition Nationale des Associations et

des ONG en faveur de l’Enfance CSS Caisse de Sécurité Sociale DESPS Direction de l'Education Surveillée et

de la Protection sociale DNSR Direction Nationale de la Santé de la

Reproduction DPDE Direction de la Protection des Droits

de l'Enfant DSRP Document de Stratégie de Réduction

de la Pauvreté EDS Enquête Démographique de Santé ESAM Enquête Sénégalaise auprès

des Ménages ESPS Enquête de Suivi de la Pauvreté

au Sénégal FAD Fonds Africain de Développement FNR Fonds National de Retraite GFP Gestion des Finances PubliquesIADM Initiative d'Allégement de la

Dette Multilatérale IDG Indice de Développement de Genre IDH Indice de Développement Humain ICS Industries Chimiques du Sénégal IDA Association Internationale

de Développement IFPRI Institut International de Recherche

sur les Politiques Alimentaires FMI Fonds Monétaire international IPEC Programme International pour

l'Elimination du travail des enfants IPM Institut de Prévoyance Maladie IPRES Institut de Prévoyance Retraite

du Sénégal MEF Ministère de l'Economie et

des Finances

MGF Mutilations Génitales Féminines MFSNEFMF Ministère de la Famille, ` de la Solidarité nationale, de

l'Entreprenariat féminin et de laMicro finance

MSPM Ministère de la Santé et de la Prévention médicale

MP Membre du Parlement MFPTEOP Ministère de la Fonction publique,

du Travail, de l'Emploi et desOrganisations Professionnelles

NU Nations UniesOCB Organisation communautaire de base OCDE Organisation de Coopération et de

Développement Economique OEV Orphelins et Enfants Vulnérables OIT Organisation Internationale du Travail OMD Objectif du Millénaire pour

le Développement OMS Organisation Mondiale de la Santé ONG Organisation Non Gouvernementale OSC Organisation de la Société Civile PAIN Paquet Intégré d’Activités de Nutrition PAM Programme Alimentaire MondialPARRER Partenariat pour le Retrait et la

Réinsertion des Enfants de la Rue PCIME Prise en Charge Intégrée

des Maladies de l’Enfant PIB Produit Intérieur Brut PPG Publique et Publiquement Garantie PPA Parité de Pouvoir d'Achat PPTE Pays Pauvres Très Endettés PRN Programme de Renforcement

de la NutritionPSPE Programme Sélectif de Prestations

pour les Enfants PSPEtar Programme Sélectif de Prestations

pour les Enfants avec utilisation detests par approximation des revenus

PSPEcp Programme Sélectif de Prestationspour les Enfants avec utilisation duciblage parfait

PUPE Programme Universel de Prestationspour les Enfants

SRP Stratégie de Réduction de la Pauvreté PSIA Analyse d’Impact Social et sur

la Pauvreté RG Régime Général (IPRES)

LISTE DES ACRONYMES

6 LA PROTECTION SOCIALE DES ENFANTS EN AFRIQUE DE L’OUEST ET DU CENTRE : CAS DU SÉNÉGAL

v 7

RNB Revenu National Brut S & E Suivi - Evaluation SNEEG Stratégie Nationale pour l'Equité et

l’Egalité de Genre SSP Soins de Santé Primaires STEP Stratégies et Techniques contre

l'Exclusion sociale et la Pauvreté (OIT) TA Transfert d’ArgentTAC Transfert d’Argent Conditionnel TIP Transmission Intergénérationnelle

de la Pauvreté FENU Fonds d’Equipement des Nations

Unies UNDAF Plan cadre des Nations Unies pour

l’Assistance au Développement PNUD Programme des Nations Unies pour le

Développement UNFPA Fonds des Nations Unies pour

la PopulationUNICEF Fonds des Nations Unies pour

l'Enfance UEMOA Union Economique et Monétaire

Ouest AfricaineVAN Valeur Actuelle Nette VIH / Sida Virus de l'Immunodéficience Humaine

/ Syndrome d'immunodéficienceacquise

LISTE DES ACRONYMES

8 LA PROTECTION SOCIALE DES ENFANTS EN AFRIQUE DE L’OUEST ET DU CENTRE : CAS DU SÉNÉGAL

Tableau 1 : Prise en compte des enfants dans la protection sociale

Tableau 2 : Principales statistiques nationalesTableau 3 : Dépense annuelle de

consommation en FCFA par tête d’habitant, par quintile de pauvreté selon le lieu de résidence

Tableau 4 : Taux de pauvreté et écart depauvreté au Sénégal

Tableau 5 : Le Sénégal peut-il atteindre lesOMD d’ici à 2015?

Tableau 6 : Principaux indicateurs de pauvreté au Sénégal

Tableau 7 : Travail des enfants âgés de 5 à 14 ans au Sénégal, 2005

Tableau 8 : Types de couverture de sécuritésociale selon la catégorieprofessionnelle

Tableau 9 : Nombre d’enfants bénéficiant desrégimes de sécurité sociale

Tableau 10 : Sélection d’indicateurséconomiques et financiers, 2004–2011

Tableau 11: Opérations financières du gouvernement, 2006–2011

Tableau 12 : Indicateurs de marge de budgétaire du Sénégal, évolutions 2000–2007 (% du PNB)

Tableau 13 : Allocations sectorielles, CDMT 2008–2010 (%)

Tableau 14 : Programme et allocation pour lePilier 3 en 2007 (FCFA milliards)

Tableau 15 : Statistiques descriptivesTableau 16 : Résultats pour le Sénégal de la

simulation d’impact de pauvretéTableau 17 : Ratio Coûts/Efficacité, résultats de

la simulation pour le SénégalTableau 18 : Coûts estimés des trois scénariosTableau 19 : Ensemble des ratios des

dépenses programmées du secteur social, 2008-2010

Tableau 20 : Coût des subventions et des allocations en tant que part duPNB

Tableau 21 : Taux net de scolarisation à l’écoleprimaire par quintile de richesse %)

Tableau 22 : Sélection d’indicateurs de santépar rapport au quintile de richesse

Tableau 23 : Estimation du nombre de personnes couvertes contre lerisque de Maladie

Figure 1 : Carte du SénégalFigure 2 : La perception de la pauvreté dans

les ménages et les communautés(%)

Figure 3 : La concentration saisonnière desrisques en milieu rural

Encadré 1 : Méthodes de ciblageEncadré 2 : Etude de cas : Mutuelles de

santé de ThièsEncadré 3 : La Coalition Nationale des

Associations et des ONG enfaveur de l’Enfance (CONAFE)

LISTE DES TABLEAUX,

DES FIGURES ET DES ENCADRÉS

9

Depuis le début des années 2000,le Sénégal a déployé des effortsméritoires pour utiliser les profitsde la croissance économique aubénéfice des secteurs sociaux debase. Cependant, les niveaux detaux de croissance atteints ont étéinsuffisants pour la réalisation desobjectifs énoncés dans leDocument de Stratégie deRéduction de la Pauvreté (DSRP)et atteindre les Objectifs duMillénaire pour le Développement(OMD). De plus, on a constaté queles bienfaits de la croissance n’ontpas été équitablement répartisentre les différentes régions dupays et entre les différentsgroupes de population, ce quiaggrave les inégalités.

Pour remédier à ces situations, ladeuxième Stratégie de Réductionde la Pauvreté (DSRPII), élaboréepour couvrir la période 2006-2010,a mis l'accent sur le besoin d’avoirune croissance qui soit plusfavorable aux pauvres. A cet effet,les décideurs politiques ontclairement mis en évidence lanécessité de réduire lesvulnérabilités et d’atténuer lesrisques encourus par certainsgroupes de population par ledéploiement d’une politique deprotection sociale. Ces engagements ont étématérialisés par l’élaboration d’une StratégieNationale de Protection Sociale 2005-2015(SNPS) et l’inclusion de celle-ci dans le DSRPII,l’accent étant mis sur les besoins des groupespauvres et vulnérables, notamment les femmeset les enfants. En effet, toute politique deprotection sociale a pour objectif d'étendre lesmécanismes de protection sociale afin que lesgroupes vulnérables bénéficient de la créationde richesses, qu’ils soient protégés contre lesrisques et qu’ils aient un meilleur accès auxservices sociaux, la protection sociale del’enfance étant considérée comme un ensemble

regroupant les institutions publiques, lesnormes de droit et les programmes qui ont pourobjectifs communs de combattre les causes etles conséquences de la pauvreté et de lavulnérabilité et de rompre ainsi les cycles de latransmission intergénérationnelle de lapauvreté.

L’élaboration de la SNPS et le développement duDSRP sont considérés comme une avancéesignificative car elles ont permis à l’Etat dedévelopper une "vision" en matière de protectionsociale. Cependant, leur déploiement n’a pasproduit les résultats escomptés. Plus de 50% des

RESUMÉ

10 LA PROTECTION SOCIALE DES ENFANTS EN AFRIQUE DE L’OUEST ET DU CENTRE : CAS DU SÉNÉGAL

sénégalais sont pauvres et un très petit nombred’entre eux bénéficient réellement desmécanismes de protection sociale existants carla couverture actuelle ne bénéficie qu’aux

travailleurs du secteur formel (20% de lapopulation). L’amélioration de la situation peut

être assurée par une extension des systèmes deprotection sociale bénéficiant de nouveauxfinancements, dont ceux provenant de la création d’une marge de manœuvre budgétaire.Le moyen le plus approprié permettant degénérer cette marge de manœuvre budgétairepour la protection sociale consisterait à réaffecter les allocations prévues pour des interventions de moindre priorité et cellesengagées pour les programmes peu efficacesaux programmes prioritaires et aux programmes sociaux les plus efficaces. Cela consisterait, aussi, à mieux utiliserl’importante enveloppe budgétaire qui existepour les dépenses du secteur social. Cela nesignifierait pas réduire le financement actuel desservices sociaux mais plutôt améliorerl'efficacité des dépenses de ces secteurs. Uneautre voie serait de réaffecter les dépensesprévues pour les subventions des produitsalimentaires, du carburant et les exonérationsfiscales vers la protection sociale.

Compte tenu des lenteurs enregistrées dansle déploiement de la SNPS, le recours à unprogramme de transferts d’espèces peut êtreconsidéré comme un moyen efficace pouraccélérer l’extension de la couverture de laprotection sociale. Ces mécanismespourraient apporter plus de cohérence ausystème de protection sociale existant etcontribueraient à la réduction de la pauvreté.Les simulations faites pour déterminerl’impact potentiel qu’aurait un programmenational de transferts d’espèces ciblés sur lesenfants montrent qu’un tel programme estnon seulement faisable au Sénégal mais qu’ilpermettrait, aussi, d’obtenir une réductionsignificative des taux de pauvretéactuellement constatés. Sur le moyen et longterme, les autorités devraient envisager lamise en œuvre d'un tel système comme unoutil qui serait d’un meilleur rapport coût-efficacité que les mesures actuelles visant à

protéger les pauvres au Sénégal.

Pour un impact à long terme durable, il estessentiel de choisir le développement desenfants et la réduction de la pauvreté del’enfant comme une priorité pour lesprogrammes de transferts de fonds. En effet,les nombreux programmes de transfertsd’espèces opérant dans les diverses régionsdu monde, de l'Amérique latine à l'Afrique,ont montré que ces derniers pouvaientcontribuer à faire reculer la pauvretélorsqu’ils sont ciblés sur les enfants

L’introduction d'une telle interventionnécessite une grande volonté politique, unemarge de manœuvre budgétaire et descapacités techniques et administrativesminimales pour sa mise en œuvre. Unebonne partie de ces préliminaires a, déjà, étésatisfaite au Sénégal, puisque les autoritésont exprimé à maintes reprises leur grandintérêt pour ce type de mécanismes pourréduire la pauvreté et pour améliorerl’efficacité de l’assistance fournie pardifférents départements aux enfants pauvreset vulnérables. De plus, bien qu’ayant desressources budgétaires limitées, le pays a debonnes performances économiques, disposed’une capacité de réaffecter une partie desressources disponibles de programmesmoins performants (par exemple, laréaffectation des subventions et destransferts qui ne sont pas pro pauvres). Lacombinaison de ces facteurs peut générerune marge de manœuvre budgétairesuffisante pour l'introduction d'unprogramme de transferts d’espèces, même sison ampleur et sa portée devraientétroitement tenir compte des prévisions deressources sur le court et le moyen terme.

11Introduction et cadre d’analyse

1.1 Introduction

Le Sénégal a obtenu de bons résultatséconomiques au cours de la dernière décennie.Comparé aux autres pays de la sous région, ilfigure parmi les plus performants. Après unebaisse de la performance économique en 2006,le pays a retrouvé en 2007 son rythme decroissance et les perspectives semblentpositives pour la période 2008-2010. Le produitintérieur brut (PIB) a augmenté en moyenne de5% entre 1996 et 2007, et des résultats positifsont été obtenus dans la réduction de lapauvreté, avec un nombre de ménages vivantsous le seuil de pauvreté passant de 48,5% en2002 à 42,6% en 2005 (République du Sénégal,2006a). La baisse a été de près de 15% entre1994 et 2002.

Le Sénégal reste, néanmoins, un pays pauvre (lerevenu national brut a été de 1640 US$, à paritéde pouvoir d'achat ou PPA), avec d’importantsretards en termes d’infrastructures et dedéveloppement humain. En dépit d’uneperformance économique relativement solide,les zones rurales du Sénégal, où réside la

majorité des populations pauvres et vulnérables(et à partir desquelles elles migrent vers lescentres urbains), continuent d’être à la traîne enmatière de développement en raison devulnérabilités structurelles consécutives auxchocs extérieurs, d’un accès inégal aux servicespublics et privés et de l’inefficacité desstratégies destinées à prévenir, atténuer et faireface aux risques (République du Sénégal,2006a; Banque mondiale, 2006a).

Le gouvernement reconnaît la nécessité d’unengagement plus fort pour atteindre lesObjectifs du Millénaire pour le Développementet, notamment, réduire de moitié la pauvretéd'ici à 2015. L’analyse des progrès réalisésindique qu’au rythme actuel, la réalisation dupremier objectif (réduire de moitié la pauvretéd'ici à 2015) s’avère incertaine car la vitesse desprogrès pour la réduction de la pauvreté a étéinsuffisante (République du Sénégal, 2006b). Acet effet, le Document de Stratégie de Réductionde la Pauvreté du Sénégal (DSRP II)1 pour lapériode 2006-2010 vise à générer une croissanceéconomique plus élevée en stimulant la créationde ressources, un taux d'emploi plus élevé etune augmentation des recettes fiscales, en

1. Introduction et cadre d’analyse

1 République du Sénégal (2006a), référenciée comme DSRP ou deuxième DSRP.2

République du Sénégal (2005b) ‘Stratégie National de Protection Sociale et Réduction des Risques. Rapport Provisoire’, Octobre, référenciée comme la SNPS

12 LA PROTECTION SOCIALE DES ENFANTS EN AFRIQUE DE L’OUEST ET DU CENTRE : CAS DU SÉNÉGAL

3Transfert d’Espèces.

4 Transfert d’Espèces Conditionnel.

Tableau 1

Prise en compte des enfants dans la protection sociale

Type de protection

socialeMesures générales pour

les ménages

Mesures spécifiques pour

les enfants

Promotion

Aide sociale TE3 , TEC4, Aide Alimentaire, etc. Bourses d'études, cantine scolaire, TAC avec des conditionnalitésrelatives aux enfants, exonérations de fraisde scolarité, exonérations de frais degarderie d'enfants

Protection

Assurance sociale Assurance-maladie, mécanismessubventionnés de mutuelles d’assurance risques, assurancecontre les catastrophes, assurance-chômage, etc.

Exonérations de frais d'assurance-maladie pour les enfants

Prévention

Services sociaux Distincts des services de base du fait qu’ilspeuvent être vulnérables, indépendammentde l'état de pauvreté - des services deprotection sociale ciblant les personnesnécessitant une protection contre lesviolences et la négligence - par exemple,refuges pour les femmes, services deréadaptation, etc.

Systèmes en faveur des enfants, servicesdédiés à la protection et de prévention de laviolence domestique et des violences communautaires contre les enfants, servicesde réadaptation de victimes de la traited’enfants, éducation de base alternativepour enfants en situation de travail, etc.

Transformation

Mesures de justice sociale Législation contre les discriminations, politiques de discrimination positive, protection des biens

Textes législatifs visant à promouvoir lesdroits de l'enfant en tant que victimes (parexemple, de violence, de traite, demariages précoces, etc.) et en tant quecontrevenants à la loi (traitement spécial etservices d’éducation surveillée pour lesjeunes), efforts visant à promouvoir ledroit à la parole des enfants et le respectde leur droits.

Mesures complémentaires

Services complémentaires de base

Vulgarisation et extension de la santé, del'éducation, des services économiques,financiers et de l’agriculture

Services de soins de santé dédiés àl’enfant à l’école maternelle, primaire etsecondaire ; services de garderie d'enfants

Cadres complémentaires de politique macro-économique en faveur des pauvres ou de politiques de croissance équitable

Politiques de soutien à la croissance et à la redistribution

Politiques de soutien à l’atteinte progressive des droits de l'enfant en relation avec les indicateurs de croissancemacro-économique

13Introduction et cadre d’analyse

1 République du Sénégal (2006a), référenciée comme DSRP ou deuxième DSRP.2 République du Sénégal (2005b) ‘Stratégie National de

Protection Sociale et Réduction des Risques. Rapport Provisoire’, Octobre, référenciée comme la SNPS

s’appuyant sur de vigoureux mécanismes deprotection sociale, des programmes visant uneplus grande équité et une amélioration de laprestation des services sociaux de base. Enoutre, le gouvernement a exprimé son intentiond'améliorer la gouvernance et de renforcer lesprocessus participatifs de décentralisation, dontles performances ont été faibles jusqu’ici. LeDSRPII reconnaît aussi la nécessité d'accorderune plus grande attention à l'amélioration desconditions de vie des pauvres et des groupesvulnérables, notamment les enfants, parl'extension de mécanismes de protectionsociale pour aider ces groupes à bénéficier de lacréation de richesses, qu’ils soient protégéscontre les risques et qu’ils aient un meilleuraccès aux services sociaux (République duSénégal, 2006a)2.

La présente étude, qui s’inscrit dans cecontexte, examine les mécanismes deprotection sociale actuellement disponiblesainsi que ceux dont la mise en œuvre estplanifiée. Elle explore également quelquessolutions alternatives qui pourraient aider àsystématiser les approches visant à réduire lesvulnérabilités, en particulier celles qui touchentles enfants, Son objectif est de fournir àl'UNICEF et à ses partenaires une meilleurecompréhension des rôles et potentiel dessystèmes de protection sociale commemécanismes de réduction de la pauvreté et de lavulnérabilité. L'étude doit également permettred’appliquer à la protection sociale des enfantsune approche basée sur les évidences, en lieu etplace des interventions fragmentaires queconstituent les programmes actuels.

Le rapport est l’une des cinq études de cas(Guinée équatoriale, Ghana, Mali, Sénégal etCongo) d'une étude plus large sur la protectionsociale et l’enfance au niveau de l’Afrique del’Ouest et centrale

Le rapport de l’étude est structuré comme suit :le chapitre 1 comprend un examen du cadreanalytique qui sous-tend la recherche alors quel'approche méthodologique est présentée dans

le chapitre 2. Le chapitre 3 présente une vued'ensemble des contextes politique et dedéveloppement socio-économique. Le chapitre4 contient une revue de la pauvreté et de lavulnérabilité au Sénégal et le chapitre 5 metl'accent sur l’analyse du système national deprotection sociale, ainsi que ses politiques etprogrammes. Une analyse de la marge demanœuvre budgétaire pour les programmes deprotection sociale est présentée dans le chapitre6. Le chapitre 7 passe en revue les avantages etles inconvénients des allocations en espècescomme mécanisme de lutte contre la pauvretédes enfants. Le chapitre 8 présente une analysedes potentialités de mise en œuvre d’une assurance-maladie efficiente. Le chapitre 9 metl'accent sur la protection de l'enfance et la possibilité de l'intégrer au sein du cadre pluslarge des systèmes de protection. Le chapitre 10explore les opportunités pour un engament despolitiques et programmes en faveur de la promotion de meilleurs mécanismes deprotection sociale, en particulier pour lesenfants.

1.2 Cadre d’analyse

Compte tenu de la gravité, de la multiplicité etdu caractère convergent des privations, de lavulnérabilité et des risques encourus par lesenfants et ceux qui prennent soin d’eux, pourles besoins de cette étude, le cadre développépar Devereux et Sabates-Wheeler (2004) a étéadapté). Au contexte local. Ce cadre intègre lesaspects protection, prévention, promotion ettransformation dans une stratégie plus largevisant la transformation économique et sociale.Au plan opérationnel, on se réfère à laprotection sociale définie comme un ensembled’initiatives à la fois formelles et informelles,qui ont pour but de fournir :

• Une aide sociale aux personnes et auxménages en état d’extrême pauvreté. Ceci se fait généralement sous forme d’allocations régulières prévisibles (en espèces ou en nature, y compris sousforme d’ exonérations de frais) fournies par le

14 LA PROTECTION SOCIALE DES ENFANTS EN AFRIQUE DE L’OUEST ET DU CENTRE : CAS DU SÉNÉGAL

gouvernement et/ou des organisations nongouvernementales à des individus ou desménages dans le but de réduire leur pauvretéet leur vulnérabilité, d’accroître leur accès auxservices sociaux de base et de promouvoirl'accumulation de leurs biens.

• Des services sociaux aux groupes marginalisésqui ont besoin d’un traitement spécial ou, àdéfaut, se sont vus refuser l'accès aux servicesde base en raison de leurs caractéristiquessociales (et non pas économiques). Ces servicessont normalement destinés à ceux qui souffrentde maladie, sont victimes du décès d'un soutiende famille, d’un accident ou d’une catastrophenaturelle, à ceux qui souffrent d'un handicap, deviolences familiales ou extrafamiliales, ou del'éclatement de la cellule familiale, à ceuxaffectés par le chômage, ou à ceux qui sont desvétérans de guerre ou des réfugiés.

• Une assurance sociale pour protéger lespersonnes contre les risques et lesconséquences de chocs affectant leursconditions de vie ou leur santé. L'assurancesociale prend en charge l'accès à des servicesen cas de besoin, et prend généralement laforme de mécanismes subventionnés demutualisation du risque, avec la possibilitéd’être exonéré des contributions et paiements.

• Des mesures d'équité sociale visant à protéger les personnes contre les risquessociaux comme la discrimination ou les abus.Il peut s'agir de législations anti-discrimination(accès à la propriété, au crédit, aux biens etservices), ou de mesures de discriminationpositive pour remédier aux ségrégationshéritées du passé. Les témoignages desenfants et le respect de leurs droits sontimportants lors de la conception desinstruments de protection sociale et dansl'évaluation de leur mise en œuvre.

Ces instruments de protection sociale sontutilisés pour faire face à la vulnérabilité de lapopulation en général, mais peuvent égalementêtre adaptés pour lutter contre les vulnérabilitésspécifiques et les risques encourus par les

enfants, comme cela est présenté dans letableau 1. Compte tenu des liens existants entrel'autonomisation des femmes et le bien-être desenfants (ce que l'UNICEF intitule «doubledividende»), chacune des mesures deprotection sociale peut être évaluée à travers leprisme de l’égalité entre les sexes.

Par extension, la protection sociale de l'enfantpeut être définie comme un ensemble constituéd'institutions publiques, de normes et de programmes dédiés à la lutte contre les causes etles conséquences de la pauvreté et de la vulnérabilité destinés à rompre les cycles de transmission intergénérationnelle de la pauvreté. En raison de la naturemultidimensionnelle de la pauvreté et de lavulnérabilité chez les enfants, il estparticulièrement important de prêter attentionaux actions complémentaires qui peuventprendre en charge des dimensions nonéconomiques comme l'exploitation, les abus et ledéni de parole. Il est également important decomprendre comment l'adoption des instrumentsde protection sociale en général, et ceux dédiésaux enfants en particulier est traduite dans lesinstitutions publiques, les discours politiques surla pauvreté, les services sociaux et les systèmesnationaux de protection sociale. Dans le mêmeordre d’idées, l’étude prendra en compte desfacteurs tels que la volonté politique de l'État àlutter contre la pauvreté et la vulnérabilité, ledegré de prise en compte par les hautsfonctionnaires pour l'élaboration et la mise enœuvre des programmes de protection sociale, dela nature intersectorielle liant la pauvreté etl'exclusion sociale, la composition du marché dutravail et de ses différentes dimensions telles quel’intégration, l’accès au marché du travail, l’équitéhommes-femmes et les enfants.

Une telle analyse aidera L’UNICEF et à ses partenaires à trouver des points d’entrée pourson travail dans le domaine de la protectionsociale. Elle leur permettra aussi d’identifier lesprocessus et les moyens requis pour s’assurerque la protection sociale soit politiquementviable dans le cadre des contrats Etat-citoyenbasé sur les droits des citoyens.

15Approche méthodologique

Le rapport de cette étudecomprendra les éléments issusde:

• L’analyse situationnelle: i)situation de pauvreté, types devulnérabilité et risquesaffectant les enfants auSénégal, et ii) systèmes etprogrammes actuels deprotection sociale existantsdans le pays et leur impact surles enfants.

• L’évaluation des rôles (actuelset potentiels) de la protectionsociale dans la réduction de lapauvreté et de la vulnérabilitédes enfants. L’accent est missur: i) les allocations enespèces ii) l'assurance maladie,et iii) les mécanismes deprotection des enfants.

• L’évaluation des conditionsrequises pour renforcer lessystèmes de protection sociale.Cette évaluation comprendra: i)une analyse du contextepolitique, une évaluation desprincipaux acteurs politiques etinstitutionnels, ainsi que de lamanière dont les discussionssur la protection sociale ont étémenées et ii) une analyse des budgetsdestinés aux enfants, avec l’objectifd’identifier l’impact qu’aurait unaccroissement des ressources pour laprotection sociale.

• Recommandations pour les politiques etprogrammes nécessaires à l'élaborationd'une stratégie de promotion de systèmes deprotection sociale ciblant les enfants.

Une perspective multidisciplinaire informe cesquatre composantes. Elle utilisera l’analysedes documents et des données quantitativeset qualitatives pour refléter la complexité de

l'interaction des niveaux macro, méso etmicro des facteurs qui sous-tendent lessystèmes de protection sociale. Pour les besoins de cette étude, plus de 20entretiens avec des informateurs clés ont étémenés. Parmi ces derniers, on compte desfonctionnaires du Ministère de la Santé et de laPrévention Médicale (MSPM), du Ministère de laFamille, de la Solidarité Nationale, del'Entreprenariat Féminin et de la Micro finance(MFSNEFMF, notamment la Direction duDéveloppement Social, la Direction de laProtection de l'Enfance, des Droits de l’Enfanceet des Enfants, la Direction de l'Assistancesociale et de la Cellule de Lutte contre la

2. Approche méthodologique

16 LA PROTECTION SOCIALE DES ENFANTS EN AFRIQUE DE L’OUEST ET DU CENTRE : CAS DU SÉNÉGAL

Pauvreté). Ont été également interviewés desfonctionnaires des Organisations NonGouvernementales (Save the Children Suède, etPlan international) et un membre du Parlement(MP) dirigeant la Commission sur la Populationet la Famille, en charge de l'enfance. Desrencontres ont eu lieu avec les spécialistes de laBanque Mondiale, du Programme AlimentaireMondial (PAM) et de l'OrganisationInternationale du Travail (OIT) notamment leprogramme de Stratégies et Techniques contrel'Exclusion Sociale et la Pauvreté, STEP). Leconsultant a aussi participé à la présentationdes résultats de la revue annuelle de l’axe 3 duDSRPII sur la protection sociale et il a interrogédes informateurs-clés travaillant de façonindépendante, mais impliqués dans laconception et/ou l'évaluation de la stratégie deprotection sociale. Les personnels clés del'UNICEF concernés par les questions relatives àla protection sociale axée sur les enfants(spécialistes en politique sociale, en Santé, enprotection de l'enfance et en Suivi - Evaluation,Représentant adjoint et Représentant) ont étéégalement interviewés. Le travail de collecte aété complété par une visite de terrain à Thiès,qui a permis d'interroger des informateurs dedifférents types de mutuelles de santé, etd'acquérir une compréhension plus concrète dufonctionnement de ce système.

En plus des activités sus mentionnées, il a étéprocédé à une analyse des documents clés età une évaluation qualitative du programmeexistant.

17Vue d'ensemble des contextes politiques et socio-économiques de développement

Le Sénégal fait partie de l’UnionEconomique et Monétaire del’Afrique de Ouest (UEMOA). Il aune population estimée à environ12 millions d'habitants en 2008.L‘économie est dominée parquelques secteurs stratégiques,incluant l'arachide, la pêche et lesservices. Le secteur informelreprésente environ 60% du PIB. Lerôle du secteur agricole a diminuéau fil du temps passant de près de15% du PIB en 1960 à 7% en 2004.Plus de la moitié de la populationest concentrée dans 3 régions(Dakar, Thiès et Diourbel). Les huitrégions restantes sont faiblementpeuplées. Cela souligne un granddéséquilibre dans la production etla distribution des ressources.Selon l’Enquête de Suivi de laPauvreté au Sénégal 2005-2006(ESPS) , 58% de la population estrurale (République du Sénégal2007).L'économie du Sénégal a connuune croissance continue durantplus de 10 ans, avec uneaugmentation moyenne de 4,4%entre 1996 et 2006 (BAD et OCDE,2008). En 2006, le taux decroissance est tombé à 2,3%, maisa vite retrouvé sa progression en2007, atteignant 4,8%. En 2008, ildevrait atteindre 5,3%, soit le niveau de 2005(FMI, 2008). Cette augmentation importante estprincipalement attribuée aux performancespositives des services, du secteur du bâtiment,des télécommunications et de la construction degrands projets d'infrastructures, dont les routes.Cependant, les fruits de cette croissance ne sontpas équitablement répartis, car une moitié de lapopulation tire ses revenus de l'agriculture,dont la performance est faible (FMI, 2008), lacontribution au PIB réduite et les avantageséconomiques et sociaux modestes.

L’argent envoyé par les émigrés contribue demanière significative à la croissance, avec des

transferts d’argent par les circuits formels s’élevant à 7,6% du PIB en 2006 (Banque mondiale, 2008). Une part importante de cestransferts sert d’allocation sociale informelle pourles familles (souvent pauvres) restées au pays.

En termes de réduction de la pauvreté, leSénégal fait partie des pays de l’Afrique del’Ouest les plus performants. L’incidence de lapauvreté est passée de 67,9% de la populationen 1994 (République du Sénégal, 2006a) à 50,6%en 2005 (République du Sénégal, 2006b).Toutefois, et même si la croissance est toujoursrestée positive et est même à nouveau enprogression, elle reste encore en deçà des 7%

3.Vue d'ensemble des contextes politiques

et socio-économiques de développement

5 Ci après référenciés comme l’ESPS 2005–2006

18 LA PROTECTION SOCIALE DES ENFANTS EN AFRIQUE DE L’OUEST ET DU CENTRE : CAS DU SÉNÉGAL

5 Ci après référenciés comme l’ESPS 2005–2006

nécessaires pour réduire la pauvreté (DSRPII) etatteindre les OMD. Pour assurer undéveloppement plus équitable, il faudra que lesgroupes vulnérables ne soient pas exclus de lacroissance et du développement du pays.

3.1 Contexte politique et prioritéspolitiques

Au cours des dernières décennies, bénéficiantd'un climat politique favorable, le pays a étépréservé de l'instabilité régionale, même si ungroupe séparatiste maintient dans la région sudde la Casamance une insécurité avec desaffrontements sporadiques avec les forcesgouvernementales malgré la signature d’unaccord de paix en 2004. Selon la Banquemondiale (2007), cette stabilité est le résultatd’une presse relativement libre et diversifiée(nombreux journaux, stations de radio etchaînes de télévision libres), d’une société civileactive (centaines d'ONG), ainsi que de lacapacité nationale à préserver un équilibrehistorique entre les institutions modernes et lescommunautés religieuses. Plusieurs indicateursutilisés par la communauté internationale, telsque les indicateurs de gouvernance de l'Institutde la Banque mondiale et le classement deslibertés civiles et des droits politiques de laFreedom House montrent que le Sénégal secompare favorablement à la plupart des paysafricains.

Cette stabilité a été renforcée par les succès desprocessus électoraux conduits en 2000 et 2007.Cependant, le pays se caractérise par desremaniements ministériels fréquents et lasurvenue régulière de différends entre lesdivers groupes politiques qui ont conduit à unaffaiblissement des contrôles budgétaires despouvoirs judiciaire et législatif et à unegouvernance fragilisée des entreprisespubliques et para- publiques (Banque mondiale2007). Cette situation de fragilité est accentuéepar la lenteur de la politique de décentralisationet un nombre important de départementsministériels (29) dont certaines missions sechevauchent. La combinaison de ces facteursaffecte la pertinence des dépenses publiques.

Selon les personnes interviewées, l'instabilitédes ministères et la confusion quant à certainesde leurs prérogatives et activités constituent undes problèmes qui affectent la mise en oeuvredes politiques. Par exemple la disparition duMinistère du développement social n’a pas étésuivie du transfert de toutes ses prérogatives enprotection sociale au Ministère de la Famille, dela Solidarité Nationale, de l'EntreprenariatFéminin et de la Micro finance (MFSNEFMF).

Le pouvoir législatif joue un rôle assez faible et necontrebalance pas suffisamment le poids del'Exécutif. Cette faiblesse réduit les possibilités dedébats et de réformes des propositions del’exécutif. Par exemple, le Parlement n'a pas lepouvoir de modifier la Loi de Finances annuelle(qui comprend le budget). Son rôle se limite àapprouver ou rejeter la proposition de l'exécutif (cedernier cas de figure ne se produit presque jamais).Ceci réduit les discussions sur les allocationsbudgétaires et, donc, limite les possibilitésd’influencer les réallocations vers les domainesprioritaires. De plus, il n'y a pas eu d’auditparlementaire du budget depuis les années 1990.Afin de garantir l'efficacité des allocations etd’assurer des équilibres entre les domainesstratégiques au développement, il serait opportunque le gouvernement renforce les dispositions des

Population (totale) a

Urbaine b

Rurale b

10,6 millions 42% 58%

Taux de pauvreté (total) a

Population en situation d’extrême pauvreté

50,6%15,9%

RNB par habitant cUS$820 (US$1,640 PPA)

Indice de Développement

Humain (IDH) d156/177 (0,499)

Indice de Développement de

Genre (IDG) d134

Tableau 2

Principales statistiques nationales

Sources: a République du Sénégal, 2006b; ESPS 2005-2006 b, c de la Banque Mondiale, World Development Indicators, 2007; d 2005 IDH du PNUDhttp://hdrstats.undp.org/countries/country_fact_sheets/cty_fs_GNQ.html).

19Vue d'ensemble des contextes politiques et socio-économiques de développement

Les moyens de rendre la croissance plusfavorable aux pauvres devraient utiliser les fruitsde la croissance pour stimuler la productionagricole et pour promouvoir des mécanismes deprotection sociale efficaces pour ceux qui sont deplus en plus vulnérables. Ces actions doiventaussi être prises en charge dans le cadre de l’axe1 du DSRPII qui met l'accent sur la stimulation dela croissance, et dans l’axe 3 qui porte sur la protection sociale. Un renforcement de lapolitique agricole accompagnée par unepromotion des activités non agricoles dans leszones rurales permettrait de diversifier lessources de revenus, d’améliorer les conditions devie et contribuerait à endiguer la migration despopulations des villages vers les zones urbaines.Les mécanismes d’assistance sous forme detransfert d'espèces ou en nature pourraient contribuer à atténuer les effets de lacrise actuelle induite par l’augmentation des prixde l’énergie et des produits alimentaires, commecela a été suggéré dans l’axe 3 du DSRPII sur la protection sociale.

Le gouvernement du Sénégal a indiqué dansson rapport économique et financier de 2008, savolonté de préserver la stabilitémacroéconomique, avec au moins 5% decroissance annuelle, de contrôler les niveauxd'inflation et maintenir à un niveau raisonnablele déficit budgétaire et de la dette publique afinde créer une base solide pour la croissanceéconomique et la réduction de la pauvreté(République du Sénégal, 2008). À court terme,les perspectives macro-économiques sontfondées sur le DSRPII. En 2007, le déficitbudgétaire global du Sénégal a été contenu à3,5% du PIB, comparativement à 6% du PIB unan plus tôt. Toutefois, au début de l’année 2008,les autorités ont engagé plus de dépenses queprévu, notamment en subventionnantl'alimentation de base et l'énergie. Ceci aengendré un report des paiements dus ausecteur privé équivalent à environ 2% du PIB.

En ce qui concerne le poids de la detteextérieure, les indicateurs se sont nettementaméliorés après la mise en œuvre de l’Initiative

des Pays Pauvres Très Endettés (PPTE) et del’Initiative d’Allégement de la Dette Multilatérale(IADM). Le Sénégal a atteint son pointd'achèvement PPTE en avril 2004, date àlaquelle il a reçu un allégement de la detted'environ 850 millions de dollars US en termesnominaux. En 2005, le Sénégal s’est qualifiépour un allégement supplémentaire de la detteau titre de l'IADM lorsque le Fonds monétaireinternational (FMI), l'Association Internationalede Développement (IDA) et le Fonds Africain deDéveloppement (FAD) ont annulé leurscréances, pour un montant d’une valeurd'environ US $ 1,4 milliard en termes nominaux.À la suite de ces deux initiatives, la valeuractuelle nette (VAN) de la dette extérieurepublique et publiquement garantie (PPG) a étésubstantiellement réduite, passant de 33,1% duPIB à la fin 2005 à environ 18,3% du PIB à la finde l’année 2007 (FMI, 2008). Le Sénégalcontinue de recevoir d'importants flux d'aide,avec une aide représentant 8,5% du RNB en2005 (la moyenne pour l'Afrique sub-saharienneest de 5,5%) .

A cet apport extérieur s’ajoutent les transfertsd’argent des sénégalais vivants à l’étranger.Certains témoignages indiquent que cestransferts d’argent au plan national etinternational représentent de 30% à 70% durevenu dans les ménages ruraux (VanVlaenderen et Al 2004). Le nombre croissant deSénégalais vivant à l'étranger et la facilité destransferts d’argent ont généré uneaugmentation significative de ces transferts.Ces derniers ont été estimés à environ US $ 633millions en 2006 (soit 7,6% du PIB selon laBanque Mondiale 2008) . On pense que cestransferts d’argent augmentent les ressourcesdes ménages receveurs, réduisent l’impact deschocs (maladie, décès), fournissent des fonds deroulement et ont des effets économiquesmultiplicateurs grâce à une augmentation desdépenses des ménages (Gupta et coll. 2007).L’argent serait notamment utilisé pour financerla consommation ou serait investi dansl'éducation, la santé et l’alimentation. Il joue unrôle de protection sociale pour les pauvres quipeuvent en bénéficier. Parfois, il joue un rôle de

658% de la population vit dans les zones rurales, mais tous ceux qui vivent dans ces zones ne sont pas concernées par les activités liées a l’agriculture. De même, une faible part de la population vivant en milieu urbain et péri urbain est impliquée dans le secteur primaire.

7L’état subventionne les prix du pétrole

20 LA PROTECTION SOCIALE DES ENFANTS EN AFRIQUE DE L’OUEST ET DU CENTRE : CAS DU SÉNÉGAL

mécanismes budgétaires et renforce la capacitétechnique des parlementaires, en particulier celledes parlementaires nouvellement élus.

Le pays a fait des progrès remarquables dansle domaine de la décentralisation, devenantainsi l'un des pays de la région ayant le plushaut niveau de dévolution des pouvoirs.

Le programme de décentralisation dans leszones rurales, par exemple, comprend troistypes de collectivités territoriales, chacuneayant une identité juridique distincte et uneautonomie financière propre : lescommunautés rurales, les communautésurbaines et les régions. Leur mission est deconcevoir et de mettre en œuvre des actionsde développement dans un certain nombrede secteurs, tels que les infrastructuresappartenant à l’Etat, l'environnement, lagestion des ressources naturelles, la santé, lajeunesse, le sport, les loisirs, la culture,l'éducation, l'aménagement du territoire,l'aménagement de la ville et le logement. Endépit des progrès institutionnels de ladécentralisation, la pratique reste faible avecune répartition encore floue desresponsabilités entre les autorités centraleset décentralisées et entre les programmessectoriels et ceux multisectoriels. En théorie,la loi de décentralisation de 1995 a transféréles responsabilités des infrastructures debase aux collectivités locales (communesdans les villes et communautés rurales dansles zones rurales). Dans la pratique, la plupartdes investissements pour ces infrastructurescontinuent d'être directement gérés par lesministères sectoriels au niveau central. C’estle résultat d’une dévolution incomplète desresponsabilités fiscales, des habitudes dupouvoir central de conserver le contrôle surles ressources, et de la perception largementrépandue dans les ministères que lesinstitutions locales ne disposent pas descapacités de gestion, ce qui est parfois le cas.Un effort a été fait ces dernières années, maisles synergies entre ces plansd'investissement locaux et les programmesd'investissement décidés par les ministères

sectoriels du niveau central restent faibles(Banque Mondiale, 2006).

3.2 Contexte économique

L'économie sénégalaise est alimentéeprincipalement par la croissance dans lessecteurs secondaire et tertiaire, avec seulement13% du PIB provenant de l'agriculture. Plus de60% de la population est impliquée dans lesecteur tertiaire . Le scénario de croissancefaible du DSRPII 2006-2011 prévoyait un taux decroissance à moyen terme de 5%, et un tauxd'inflation de 3 à 6 % au cours de la période2007-2011. Au cours des deux dernières années,la croissance économique a, cependant, été endeçà des attentes (2,3% en 2006 et 4,8% en2007). Ce manque de tonicité qui serait lié tant àdes facteurs endogènes (faible pluviométrie,crise des Industries Chimiques du Sénégal)qu’exogènes (hausse des prix du pétrole et desdenrées alimentaires), n’a pas permis decontenir la hausse des prix et a obligé legouvernement à subventionner les prix dupétrole et du riz contribuant à augmenter ledéficit budgétaire (BAD et OCDE, 2008) etaffectant le PIB.

Certains analystes (Ndione, 2008) estiment quela croissance économique au Sénégal nonseulement n’est pas en faveur des pauvres,mais serait, aussi, un facteur d’aggravation desinégalités, ce qui risque d'entraver une croissance économique durable, d’affecter lastabilité sociale à moyen terme, et d’aggraver lavulnérabilité des groupes marginalisés. Selon cet auteur, il y aurait deux causes à cettesituation : la première est liée au changementclimatique avec une production agricole endéficit depuis 2006 (réduisant la part du secteurprimaire à 13% du PIB total alors qu’il fait vivre60 % de la population). La deuxième cause decette inégalité est liée à la concentration de lacroissance économique dans un petit nombrede secteurs (bâtiment, travaux publics et services avec principalement lestélécommunications), qui n'ont pas deretombées positives pour ceux qui vivent enzones rurales où habite la majorité des pauvres.

21

8 World Bank 2007 World Development Indicators: Aid Dependency http://siteresources.worldbank.org/DATASTA / TISTICS/Resources/table6_11.pdf. 9 Ce montant représente les sommes officiellement enregistrées. Le volume réel de ces transferts, y compris les montants non enregistres qui utilisent les canaux

formels et informels est probablement plus important.

protection pour toute la communauté, quandplusieurs villages mettent en commun leursressources pour couvrir les frais d’émigrationdes jeunes hommes les plus qualifiés (ibid.). Leretour de cet investissement conjoint estl’argent envoyé par ces derniers.

3.3 Politiques de développement

De récentes études (Ndione, 2008) indiquentqu’en matière de développement, lesperformances du gouvernement seraient moinsefficaces qu’elles ne l’étaient il y a quelquesannées. Il n’en demeure pas moins que leSénégal est encore considéré comme ayant debonnes performances, comparé à de nombreuxpays de l’Afrique Sub-saharienne, car le pays acontinué à générer de la croissance économiqueen dépit de chocs exogènes tels que lessécheresses et les catastrophes naturelles. Undes éléments concrets de cette capacité est lecadre des politiques prioritaires développé parle gouvernement du Sénégal dans le cadre dusecond DSRP pour la période 2006-2010. Eneffet, ce cadre contient les « recettes » pourréduire la pauvreté et résoudre les problèmesde développement qui n'ont pu être résolus aucours du DSRPI. Ce second DSRP comprendquatre axes principaux basés sur les Objectifsdu Millénaire pour le Développement et lespriorités de la Stratégie de CroissanceAccélérée: i) la création de richesses; ii) l'accèsaux services sociaux de base, iii) la protectionsociale des groupes vulnérables et la gestiondes risques (y compris un chapitre portant surles enfants vulnérables), et iv) la bonnegouvernance. Elle met l'accent sur la promotionde la croissance afin de réduire le taux depauvreté au-dessous de 30% d'ici à 2015, avecun taux de croissance annuel de 7% à 8% entermes réels entre 2006 et 2010. Ce qui, comptetenu des contextes national et internationalactuels, semble difficile à réaliser. Il y a, aussi,plusieurs programmes (et les dépensesconnexes) qui ne sont pas inclus dans le budget- en particulier les grands projetsd'infrastructures, ce qui, en pratique, amoindritles ressources disponibles pour financer lessecteurs prioritaires du DSRPII.

3.4 Conclusion

Le Sénégal a connu une croissance économiquepositive durant plus de 10 ans. Toutefois, lesniveaux actuels et attendus du taux decroissance sont encore insuffisants pouratteindre les objectifs des OMD. Le DSRPIIdémontre la forte volonté des décideurs deréduire les vulnérabilités sociales etéconomiques et d'atténuer les risques par despolitiques de protection sociale. Ceci est unpoint d'entrée favorable pour la promotion d’une protection sociale axée sur lesenfants. Par conséquent, en plus de stimuler lacroissance, il est important que legouvernement veille à ce que la croissancemette l’accent sur le secteur primaire, au seinduquel la majorité de la population - enparticulier les pauvres et les plus vulnérables -sont impliqués.

Vue d'ensemble des contextes politiques et socio-économiques de développement

22 LA PROTECTION SOCIALE DES ENFANTS EN AFRIQUE DE L’OUEST ET DU CENTRE : CAS DU SÉNÉGAL

Le Sénégal a fait d’importants progrès dans laréduction de la pauvreté au cours des dernièresannées, réduisant la proportion de sapopulation pauvre de 67,9% en 1994 à 50,6% en2005, et ramenant à 15,9% la part de lapopulation vivant dans la pauvreté absolue(République du Sénégal, 2006b). Ces progrès sesont traduits par une amélioration notable desprincipaux indicateurs sociaux et dedéveloppement humain avec cependant, lapersistance d’inégalités entre les sexes, lesrégions et les quintiles de pauvreté.

La pauvreté est fortement corrélée à l'accès auxservices et aux infrastructures de base, audéveloppement humain, à l'emploi et à la capacitéde résister aux chocs extérieurs et auxcatastrophes. Les régions ayant de hauts niveauxde pauvreté (Ziguinchor, Kolda, Kaolack etDiourbel) sont aussi celles qui ont le plus faibleaccès à l'eau, à l'assainissement et à l’électricité, demême que les hauts taux de mortalité et les plus

bas niveaux d'instruction. Ces facteurs causent unepauvreté chronique et limitent les possibilités despopulations de sortir de l'engrenage de la pauvreté(IDA et FMI, 2006). La pauvreté est également liée àla difficulté de trouver un emploi: quatretravailleurs sur 10 sont au chômage ou sont sous-employés. Cette proportion est encore plus élevéepour les jeunes dépourvus de compétences etd'expérience. Un autre déterminant de la pauvretéest la vulnérabilité de la population rurale auxchocs (mauvaises conditions climatiques et aléasdes prix du marché) qui affectent négativementleur revenu et favorisent leur migration vers la ville.Cette migration contribue, à son tour, à ladétérioration des conditions de vie dans les zonesurbaines et favorise l'émergence de nouveauxgroupes vulnérables, comme les enfants des rues(ibid.).

Cependant, la majorité des vulnérables resteconstituée par les habitants des zones rurales(en particulier ceux qui dépendent de

4. Analyse de la pauvreté et de la

vulnérabilité au Sénégal

23Analyse de la pauvreté et de la vulnérabilité au Sénégal

Légende : Cycle agricole – Dry Season-preparation for planting : saison sèche – préparation aux semailles – Planting : semailles – culture : culture des champs – Harvest : récolte – Labor demand : demande deforce de travail – Food/Income Availability : Nourriture/Revenu disponible – Malaria Risk : risque de paludisme – Malnutrition Risk : risque de malnutrition – Educational Risk : Risque de déscolarisation –Peak périods : périodes de pic.

l'agriculture et qui sont exposés aux diverschocs externes), par les enfants pauvres (ceuxqui vivent dans des ménages pauvres, ceux quivivent à l'extérieur du domicile familial ou sontconfrontés à la maladie et à l'invalidité), et parles handicapés, les personnes âgées et lesréfugiés.

4.1 Grandes tendances en matière depauvreté et de vulnérabilité

Selon le DSRPII du Sénégal, il y a une relationde cause à effet entre pauvreté et inégalité.Cette relation fonctionne dans les deux sens. Lapauvreté accroît la vulnérabilité en raison del'absence de revenu disponible pour accéderaux services essentiels pendant les périodes dechoc et quand on est dans l'impossibilité decompter sur l'épargne, les prêts ou les réseauxd'entraide. La vulnérabilité renforce la pauvreté.Ainsi, les progrès réalisés dans la réduction dela pauvreté peuvent être rapidement perdus sides mécanismes ne sont pas mis en place pouratténuer les chocs qui rendent les populations

socialement ou économiquement vulnérables.Par exemple, les ménages à revenu moyenn'ont pas les ressources pour payer des soinsde santé coûteux et sont incapables de payer lesfrais d'adhésion à des organismes d’assurancemaladie. Ils sont susceptibles de devenirsrapidement pauvres quand un membre duménage tombe malade. Ainsi l'atténuation de lavulnérabilité, grâce à l'amélioration du revenudes ménages, à un meilleur accès aux servicesde base, aux opportunités et mécanismes visantà réduire les risques sociaux, peut contribuerfavorablement à la réduction de la pauvreté.

Le Sénégal souffre de disparités géographiqueset d'importants écarts de genre dans l'incidencede la pauvreté. Les taux de pauvreté sont plusélevés en zone rurale où ils se situent à 55,6%,soit 5% au-dessus de la moyenne nationale(République du Sénégal, 2006b). En ce qui concerne l'inégalité, il existeégalement des disparités très importantes derevenu et de consommation entre les pluspauvres et les plus riches. Le tableau 3

montre que les 20% les plusriches de la populationassurent 40% de laconsommation totale, laissant80% de la population separtageant les 60% restants.Les données de l’ESPS 2005-2006 indiquent égalementqu’en moyenne, 45,6% desdépenses de consommationsont consacrées àl’alimentation et aux boissons(non alcoolisées). Ceci signifieque, dans les ménagespauvres, très peu d'argent estépargné pour être dépensé surd'autres biens et services, ycompris la santé etl'éducation.

L’incidence de la pauvreté dansla population (50,6%) etl’incidence de la pauvreté desménages (42,6%) sontrévélatrices de la nécessité de

Moyenne DakarAutres

Villes

Milieu

rural

Dépenses de consommation

par tête d’habitant

Part dans la consommation totale (%)

Part dans la consommation totale (%)

1er quintile (20% lesplus pauvres)

97,677 8.2 8.3 8.4 8.0

2ème quintile 153,027 12.8 12.4 13.2 12.9

3ème quintile 200,574 16.8 16.1 17.3 17.3

4ème quintile 265,926 22.3 21.6 22.7 22.8

5ème quintile 20% lesplus riches) 476,332

40.0 41.5 38.5 39.1

Moyenne 239,279 100 100 100 100

Source: ESPS 2005-2006.

Tableau 3

Consommation annuelle des dépenses par quintile

de pauvreté en FCFA par habitant, selon le lieu de résidence

24 LA PROTECTION SOCIALE DES ENFANTS EN AFRIQUE DE L’OUEST ET DU CENTRE : CAS DU SÉNÉGAL

faire davantage d’efforts pour réduire lapauvreté au Sénégal. Toutefois, en plus de cesindicateurs «objectifs», il est égalementintéressant de se pencher sur les perceptions dela pauvreté par les ménages et lescommunautés. La figure 2 présente lesréponses des chefs de ménage en termes deperception de la pauvreté. Le chiffre pour lamoyenne de perception de la pauvreté desménages (52,1%) est nettement au-dessus du

taux de pauvreté recensé qui,selon les données ESPS, a été de42,6% en 2005-2006. Ceci peutindiquer que les ménages audessus du seuil de pauvreté maisdont le revenu du ménage estincertain savent qu’ils peuventfacilement tomber dans lapauvreté. Il suggère égalementque les personnes qui vivent unpeu au-dessus du seuil depauvreté ne sont pas tellementdifférentes de celles qui sontlégèrement au-dessous. Dans lesdeux cas, ils constituent les

ménages qui courent le risque de tomberprofondément dans la pauvreté lorsqu'ils sontconfrontés à des chocs extérieurs, tels que laréduction soudaine des revenus dans leménage, la maladie ou des besoins de soins desanté d'un membre du ménage. Par ailleurs, ilest très intéressant de noter que la perceptionde la pauvreté dans les ménages ruraux (61,6%)et les collectivités (64,7%) est nettementsupérieure à celle de Dakar (39,9% et 42,5%

Taux de pauvreté

(recensement)Ecart de pauvreté (comme % du seuil de pauvreté)

En dessous duseuil depauvreté

alimentaire

En dessous du seuil des

besoins élémentaires

En dessous du Seuil depauvreté deUS$1/jour

En dessous du Seuil de

pauvreté alimentaire

En dessous duSeuil desbesoins

élémentaires

En dessous du Seuil depauvreté de

US$1/jour

Ensemble de la population 19.7 65.0 34.4 4.5 22.5 9.6

Enfants (de 0 à 14 ans)

20.9 66.7 38.5 4.7 23.1 10.9

Adultes en âge de travailler (de 15 à 59 ans)

18.4 63.3 30.7 4.2 21.9 8.5

Personnes 60 ans et plus 20.8 66.5 35.2 4.6 23.1 9.4

Hommes 20.1 65.4 35.0 4.6 22.8 9.8

Femmes 19.4 64.7 33.9 4.4 22.3 9.5

Tableau 4

Taux de pauvreté et écart de pauvreté au Sénégal

Source: Gassmann and Behrendt (2006).

70

42.5 39.9

51.443.4

64.761.6

56.152.1

MoyenneRuralAutres villes

Communautes pauvres Menages pauvres

Dakar

60

50

40

30

20

10

0

Figure 1

Perception de la pauvreté dans les ménages et les

communautés

Source: ESPS 2005-2006.

25Analyse de la pauvreté et de la vulnérabilité au Sénégal

respectivement). Ceci est une autre indicationdes inégalités entre zones rurales et urbaines.

Bien que les perceptions de la pauvreté soientencore relativement élevées, certainesaméliorations ont été ressenties par la populationau cours des quatre dernières années. Selonl’analyse de l'ESPS sur l'évolution de laperception de la pauvreté sur une période dequatre ans au niveau national, 43,9% des chefs deménage considèrent que la pauvreté s'estaggravée (64,6% en 2001). D'autre part, 31,2%estiment que la pauvreté a diminué,comparativement à seulement 18,2% qui étaientde cet avis en 2001.

Malgré les progrès d'ensemble, il y a desgroupes de population qui restent vulnérableset nécessitent des interventions spécifiques, cequi est le cas des enfants pauvres etvulnérables. Le tableau 4 donne quelquesindications sur le taux de pauvreté et l’écart depauvreté selon l’âge, le genre et le type deménage. Bien que les données ne soient pasrécentes (Enquête Sénégalaise Auprès desMénages, ESAM II 2001-2002), elles illustrentquelques tendances de fond en ce qui concernela manière dont la pauvreté affecte les différentsgroupes de population. Cela estparticulièrement important pour les études de lapauvreté des enfants, même lorsque les chiffres

consolidés sur la pauvreté sont différents deceux utilisés dans le reste du rapport . Onsoupçonne que ces distributions ont peu variédepuis ces dates.

La pauvreté chez les enfants âgés de 0 à 14 ans(tableau 4) a été plus élevée que la moyenne etque celle de tous les autres groupes depopulation dans les trois mesures de la pauvreté.L’écart de pauvreté (déficit moyen de revenu despauvres par rapport au seuil de pauvreté) estégalement plus élevé chez les enfants. Celamontre l'importance de cibler spécifiquement lesenfants dans les interventions de réduction de lapauvreté car les mesures visant à réduire lapauvreté de l'ensemble des ménages ou de lacommunauté peuvent ne pas avoir le mêmeimpact sur la réduction de la pauvreté desenfants, car ceux-ci sont plus vulnérables auxrisques sociaux, économiques, sanitaires et àceux liés au cycle de vie.

4.1.1 Vulnérabilités

Les enfants et les jeunes au Sénégal sont trèsvulnérables car souvent confrontés au manquede services de protection. La famille (élargie ounon), qui a été longtemps la principale source deprotection, manque de plus en plus de moyenspour assurer cette fonction, en raison d'uneaggravation des risques, d’ordre, principalement

économique. Comme dans laplupart des pays la sociétésénégalaise est en train dechanger de normes socialespoussant vers la création denouvelles structures familiales.En effet, on constate de plus enplus qu’en dépit d'une fortehabitude de vie communautaire,les comportementsindividualistes sont de plus enplus répandus, en raison despressions faites sur chacun pourla survie quotidienne. Lessystèmes de solidarité etd'entraide traditionnels, quireprésentaient une forme decapital social et de protection

11 Données de la Direction Nationale de la Santé Reproductive du Ministère de la Santé et de la Prévention Médicale12 Ministère de l’Economie et des Finances et al (2007), désigné ci-après comme l’EDS.13 Données du Ministère de la sante et de la prévention, Direction Nationale de la Santé Reproductive

Figure 2

La concentration saisonnière des risques en milieu rural

Source: Banque mondiale (2006a).

26 LA PROTECTION SOCIALE DES ENFANTS EN AFRIQUE DE L’OUEST ET DU CENTRE : CAS DU SÉNÉGAL

sociale traditionnelle, sont en train de s'effondreret d’être remplacés par des relations fondées surla rationalité instrumentale et l’individualisme. Enrésultat le nombre de familles nucléairesaugmente progressivement. De plus, la pauvretéchronique et l’augmentation des transferts del’étranger détruisent progressivement lasolidarité inter foyers et les relations entre lesindividus.

Selon une étude de la Banque mondiale conduiteen 2006 sur les vulnérabilités, le cercle pauvreté-vulnérabilité empêche les ménages ruraux desortir de la pauvreté et peut facilement conduire lesménages et / ou les individus qui avaient été enmesure d’améliorer leur situation à retomber dansla pauvreté. Cela peut facilement les conduire àreplonger dans la pauvreté chronique et à faireperdurer une transmission intergénérationnelle dela pauvreté. La Figure 2 illustre la manière dontcertains chocs augmentent la probabilité pour lesfacteurs déclenchant de la vulnérabilité. Parexemple, au Sénégal, une sécheresse peutdéclencher des migrations temporaires de main-d’œuvre, ce qui accroît, pour le migrant et pour safamille qui reste au village, l'exposition au VIH etaux autres risques pour la santé. Une mauvaiserécolte et la réduction des revenus financiers qui enrésultent peuvent empêcher une famille de faireface aux coûts engendrés par une complication dela grossesse de la mère. De tels facteurs peuvent,aussi, accroître le risque de déscolarisation d’unenfant car la famille ne pourra pas payer les fraisd’inscription, d’uniforme ou simplement detransport. Les 1,8 millions de résidents ruraux dansles quintiles les plus bas de consommation ou les1,4 millions de ménages les plus pauvres qui sontengagés dans le travail agricole saisonnier sontparticulièrement exposés à la vulnérabilité car ilssont susceptibles d'avoir moins de capacités deréponse aux chocs, de quelques types qu’ils soient(Banque mondiale, 2006a).

4.1.2 Types de risques

L’analyse des principaux risques etvulnérabilités affectant la population au Sénégala été faite en utilisant le modèle d’analysedéveloppé par la Banque mondiale (2006).

Le premier des risques qu’encourent lespopulations est le risque naturel qui dans lecas du Sénégal est lié à la nature agricole del'économie rurale et au fait que le Sénégalsoit un pays sahélien. Des périodescycliques de sécheresse réduisent laproduction agricole et détruisent lestroupeaux. L'impact de ces chocs varie enfonction de la saison agricole, de la zoneagro - écologique, du type de culture et dufait que la terre est irriguée ou non. Aucours des 25 dernières années, le Sénégal aconnu six années de chocs marquées, selonles années, soit par d’importantesprécipitations, soit par l’irrégularité dansleur distribution géographique, soit par unarrêt prématuré de la saison des pluies.L'une des conséquences majeures desannées de sécheresse a été la perted’importantes récoltes d'arachides (US $ 35et US $ 135 millions) et de mil / sorgho (US$ 24 et 60 millions). D'autres risquesnaturels comme les parasites des plantes,les insectes ravageurs des récoltes, lesmaladies animales et les maladies affectantles récoltes peuvent réduire les cultures. En2004, environ 20% des ménages ruraux ontperdu, à cause des parasites, des céréalespour un montant estimé à environ 14millions de dollars. Les risques de chocsdans les zones rurales sont aussi liés auxchangements dans la production agricole, àla demande du marché, aux systèmes decommercialisation existants et leursconséquences sur les revenus et le pouvoird'achat. Alors que la situation de l'emploiest un facteur de risque important dans leszones urbaines, elle ne l'est pas dans lesrégions rurales où la majorité de la main-d'œuvre est auto employée ou engagéedans des activités informelles ou à tempspartiel visant à diversifier les revenus.

Il y a aussi des risques sanitaires. Lepaludisme est un problème de santé répanduauquel la population du Sénégal doit faireface. Bien que la situation soit en netteamélioration grâce aux grands programmesde moustiquaires imprégnées, Il constitue

27Analyse de la pauvreté et de la vulnérabilité au Sénégal

31% de la morbidité et 32% de la mortalité ettouche plus sévèrement les enfants. Les tauxde mortalité infantile, de mortalité maternelleet de malnutrition des enfants sont aussibeaucoup plus élevés dans les zones rurales.Bien que le pays ait l'un des plus faibles tauxde prévalence du VIH de l’Afrique sub-saharienne (estimé à 0,7 % de la populationadulte), les populations rurales sontexposées aux risques induits par latransmission du VIH-SIDA par les travailleursmigrants et le faible niveau de connaissancessur la prévention et les disponibilités detraitement. Ces risques sont aggravés par lafaible utilisation des services de santé. Ceciest particulièrement problématique dans leszones rurales, où les services de santé sontplus rares et de qualité inférieure, et où il y ades obstacles financiers plus importants pourla population qui dispose de faibles revenus(Banque mondiale, 2006a).

D’autres risques ont, aussi un impact sur lesperspectives d'avenir pour les individus et enparticulier les enfants. La non scolarisation etl’abandon scolaire en cours d'année ou entre lescycles d'apprentissage limitent non seulementle capital individuel mais handicapent ledéveloppement humain du pays et sa base deconnaissances. Les facteurs qui font obstacle àl'enseignement primaire enmilieu rural sont la survenue demaladies chez les enfants et lemanque d’intérêt pourl’éducation (résultant parfoisd'une combinaison entre lafaible qualité de l’enseignement,le faible niveau de scolarité desparents et les préférencesparentales pour l'éducation nonformelle traditionnelle) (Banquemondiale, 2006a et Républiquedu Sénégal 2007).

Lorsque plusieurs de ces risquessurviennent en même temps, lebien-être des ménages et desindividus se détériorerapidement.

4.1.3. Impact de l'augmentation duprix des aliments et du carburant

La crise créée par l’augmentation du prix desdenrées alimentaires et du carburant est unrisque important pour les ménages pauvres carces derniers, notamment ceux qui vivent dans leszones rurales, dépensent une bonne partie deleurs revenus (environ 45%) pour acquérir desdenrées alimentaires de première nécessité. Uneaugmentation des prix peut avoir divers effets.Pour les agriculteurs qui produisent les céréalesqui sont en forte demande (comme le riz qui estun aliment de base) et qui ont bénéficié d’unebonne récolte, l’impact de la crise est mineur,mais ces catégories ne constituent pas la majoritédes agriculteurs au Sénégal. Pour la plupart desautres ménages pauvres, la hausse des prix desdenrées alimentaires peut avoir un impact négatifsur cinq dimensions du développement humain,chacune d’entre elles étant difficile à inverser etpouvant avoir des répercussions durant desannées, parfois des générations. Elle peut :

• Augmenter la pauvreté et les inégalités, du faitque ce sont les pauvres qui sont les plusvulnérables à la hausse des prix et les moinsen mesure de se diversifier ;

• Aggraver la situation nutritionnelle, puisqueles ménages ayant des revenus limités ne

Objectifs

Progrès

réalisés

(Oui ou Non)

Probabilité d’atteinte

(forte/moyenne/faible)

Réduire l'extrême pauvreté et la faim Oui Moyenne

Assurer l'éducation primaire universelle Oui Forte

Promouvoir l'égalité des sexes et l'autonomisation des femmes

Oui Moyenne

Réduire la mortalité infantile Oui Forte

Améliorer la santé maternelle Oui Faible

Lutter contre le VIH / SIDA, le paludisme etd’autres maladies

Oui Forte

Préserver l’environnement Oui Moyenne

Mettre en place un partenariat mondial pourle développement

Oui Moyenne

Tableau 5

Probabilités pour le Sénégal d’atteindre les OMD d'ici à 2015

Source: République du Sénégal (2006b).

Source: Banque mondiale (2006a).

28 LA PROTECTION SOCIALE DES ENFANTS EN AFRIQUE DE L’OUEST ET DU CENTRE : CAS DU SÉNÉGAL

11Données de la Direction Nationale de la Santé Reproductive du Ministère de la Santé et de la Prévention Médicale

12Ministère de l’Economie et des Finances et al (2007), désigné ci-après comme l’EDS.

13Données du Ministère de la sante et de la prévention, Direction Nationale de la Santé Reproductive

peuvent pas acheter les mêmes quantitésd’aliments. Les enfants risquent d'être les plustouchés par la malnutrition avec des effets àcourt, moyen et à long terme ;

• Réduire l’utilisation du système éducatif et desservices de santé, puisque l'augmentation desprix des produits alimentaires signifie qu'il y amoins de ressources disponibles à dépenserpour ce type de biens et services ;

• Epuiser les actifs des pauvres, puisque denombreux ménages auront besoin de recourirà leur épargne ou à vendre leurs actifs productifs pour surmonter la crise ; et

• Augmenter le travail des enfants (soitlocalement, soit par le biais de la migration desenfants vers d’autres zones) comme moyend'accroître le revenu des familles.

Compte tenu de ces risques et de leursimplications pour les populations pauvres, lesorganismes internationaux tels que le FondsMonétaire International, la Banque Mondiale,l’Institut International de Recherche sur lesPolitiques Alimentaires (IFPRI), le PAM etl’UNICEF ont préconisé des réponsesmultisectorielles telles que la protection socialeétendue avec des interventions dans lesdomaines de l'alimentation et de la nutrition carl’incapacité à réagir rapidement à la crisealimentaire peut entraîner une augmentation del'instabilité sociale. Bien que le gouvernementdu Sénégal ait rapidement mis en place unpremier train de "mesures de protection", ils’avère que celles-ci ont été coûteuses, n'ontpas nécessairement été bien ciblées et n’ont pasprioritairement bénéficié aux plus pauvres

Indicateurs de Base Source Indicateurs/année Source/année Indicateurs

Incidence de la pauvreté(individu)

Incidence de la Pauvreté(ménages)

Rapportd’avancement desOMD, 2005

200157.1% 48.5%

Rapport d’avancement des OMD, 2005

200550.6%42.6%

Mortalité infantile

DNSR 11, 2000 telque cité in Rapport d’avancement des OMD, 2005

200063.5 pour 1.000naissances vivantes

EDS12IV

200561 pour 1.000 naissances vivantes

Mortalité infantile (enfants demoins de 5 ans)

DNSR 13, 2000 telque cité in Rapportd’avancement desOMD, 2005

2000142.5 pour 1.000naissances vivantes

EDS IV2005121 pour 1.000 naissancesvivantes

Mortalité maternelle EDS II

1992510 décès pour100.000 naissancesvivantes

DHS IV

2005401 décès pour 100.000 naissances vivantes

Taux net de scolarisation primaireTaux brut de scolarisation primaire

Rapportd’avancement desOMD, 2005

2000–200158%68.3%

Rapport d’avancementdes OMD, 2005

2004–200572.1%82.5%

Taux d’alphabétisation desadultes (15–24)

Rapportd’avancement desOMD, 2005

2001–200249.3%

Rapport d’avancementdes OMD, 2005

2005–200650.9%

Taux d’alphabétisation deshommes (15–24)Taux d’alphabétisation desfemmes (15–24)

Rapportd’avancement desOMD, 2005

200158.9%41%

Rapport d’avancementdes OMD, 2005

200558.1%44.8%

Usage de source d’eau améliorée RuralUrbain

Rapportd’avancement desOMD, 2005

200157%81%

Rapport d’avancementdes OMD, 2005

200567%95%

Tableau 6

Principaux indicateurs de la pauvreté au Sénégal

29Analyse de la pauvreté et de la vulnérabilité au Sénégal

(Entretien des auteurs avec le FMI, 2008). Selonl’analyse de la Banque mondiale au Sénégal(Ndione, 2008), ces mesures ont inclus desallégements fiscaux sur certains produits telsque le riz importé mais n’ont pas eu d’impactsur les prix payés par les consommateurs, carcertains signes donnent à penser que lesdifférentiels de prix ont été plutôt conservés parles producteurs et les revendeurs,qu’effectivement répercutés sur lesconsommateurs. Il serait beaucoup plus efficacede s'appuyer sur des mécanismes de protectionsociale pour faire face aux effets de la crise desprix alimentaires dans le court terme. Avecl’augmentation du prix des aliments de base, sion utilise le seuil de pauvreté défini par le panierde produits alimentaires un nombre croissantde pauvres passe en dessous de ce seuil.

4.1.4 Progrès réalisés dans les indicateurs socio-économiques de base

Des progrès certains ont été accomplis pouratteindre les OMD, notamment ceux quiconcernent les enfants. Les OMD pourl'éducation primaire universelle, la réduction dela mortalité infantile, et la lutte contre leVIH/SIDA, le paludisme et autres maladies ontdes chances d’être atteints, mais pas ceuxconcernant l'élimination de l'extrême pauvretéet de la faim, et l'égalité entre les genres. Cesprogrès sont le fruit d’une forte volontépolitique, des effets positifs de la croissanceéconomique et d’une plus grande disponibilitéet un meilleur accès aux services de base.Toutefois, ces progrès ne sont pas uniformes, etde fortes disparités persistent entre les régionset entre les différents groupes de population.

Pour atteindre l’OMD 1, il faudrait enregistrerdes progrès significatifs dans la lutte contre lapauvreté des enfants, qui est un phénomènemultidimensionnel qui se caractérise nonseulement par la pauvreté monétaire (ratio depauvreté) mais aussi par d’autres privations telsque le faible accès aux services de baseessentiels pour le développement des enfants. Le tableau 6 fournit des détails sur l'évolution de

certains indicateurs socio-économiques etpermet d’évaluer le bien-être des enfants et despersonnes qui en prennent soin.

On peut aisément constater qu’il y a eu uneamélioration appréciable pour la plupart desindicateurs, ce qui voudrait signifier que le bienêtre des personnes s’est amélioré (mesuré à lafois au niveau individuel et au niveau desménages). Cependant, ces taux sont desmoyennes qui ne permettent pas de voircomment la pauvreté a évolué chez les enfants.Comme le suggèrent les données du tableau 4,la pauvreté chez les enfants aurait tendance àêtre plus élevée que pour les autres groupesd’âge de la population. La présence de plusd’enfants dans les ménages pauvresexpliquerait en partie cette différence. L’analysedes indicateurs de la santé et de l'éducationmontre que la situation s’est améliorée enmoyenne, mais que les disparités persistent audétriment des zones rurales. Ceci indique lanécessité de concentrer les mesures deprotection plus spécifiquement sur les zonesrurales, afin de promouvoir un développementplus équitable et à même de bénéficier auxfamilles et aux enfants pauvres.

4.2 Manifestations de la pauvreté et de la vulnérabilité liées au genreet à l’âge

La dépendance est un facteur déterminant dansl'accroissement de la vulnérabilité. Il fonctionneaussi bien directement, à l’intérieur de lafamille, qu’indirectement, au sein de la structuresociale. Elle est aggravée par la faiblesse desmécanismes de protection sociale. Au sein de lacellule familiale, la dépendance fonctionnecomme un moyen informel de protectionsociale, mais elle peut aussi rendre vulnérablesles membres du ménage les plus faibles, enparticulier en cas d’accidents, de maladie, dedécès, ou de chocs liés à l'environnement. Cesderniers peuvent laisser sans assistance despersonnes dépendantes.

Dans la société sénégalaise, les enfants, lesjeunes et les femmes constituent la plus grande

30 LA PROTECTION SOCIALE DES ENFANTS EN AFRIQUE DE L’OUEST ET DU CENTRE : CAS DU SÉNÉGAL

part de la population, avec respectivement 54%d’enfants et de jeunes de moins de 20 ans(42,2% de moins de 15 ans) et 51,9% defemmes. Bien que formant la majorité de lapopulation, malgré une tendance à uneautonomisation plus précoce des enfants (ilsquittent le domicile familial à la recherche derevenus supplémentaires) et alors qu'unnombre croissant de ménages a une femmecomme chef de famille, ces groupes sont trèssouvent dépendants d’autres personnes,principalement des chefs de famille hommes.Leurs « besoins et aspirations sont relativementpeu connus et pas pris en compte lorsque desdifficultés économiques affectent les conditionsde vie » (Dia, 2008) ce qui augmente leursvulnérabilités et les prédispose à des situationsd'exploitation, d'abus, d'exposition aux risqueset aux comportements antisociaux à leur égard.

Les facteurs qui peuvent affecter le bien êtredes enfants sont variés. Un accès insuffisantaux services sociaux de base et de faiblesrevenus des parents peuvent réduire lasubsistance. Un statut socio-économiquechroniquement faible peut être la cause de latransmission intergénérationnelle de lapauvreté. Pour les jeunes et les enfants, lechômage, les situations de conflit avec lasociété ou la vie dans la rue peuvent en fairedes délinquants. Les enfants peuvent êtreexposés aussi aux abus du fait de leur trèsjeune âge, du fait de pratiques traditionnellesnéfastes, de pratiques abusives à l’intérieurdes familles ou d’un environnement nonprotecteur (y compris les enfants forcés àmendier dans les rues comme certains élèvesd’écoles coraniques ou talibés). On compteaussi parmi les enfants dont le bien être peutêtre compromis les enfants qui travaillent, lesjeunes filles exploitées par la prostitution pourde l'argent ou en échange de faveurs, lesenfants vivant avec un handicap physique oumental et / ou qui souffrent d'une maladiegrave ou chronique, et les orphelins et enfantsvulnérables (OEV). Certaines causes de cesproblèmes sont liées à la crise économique dupays, aux chocs environnementaux (faiblesprécipitations, sécheresse, inondations,

invasions de criquets pèlerins et maladiesanimales) aux conflits et à l'insécurité, à lamauvaise santé et / ou au faible accès auxservices de soins de santé. D’autres causestrouvent leurs origines dans les inégalitéssociales qui déterminent à l'avancel'environnement des enfants et des jeunes. Lavie en collectivité et la vie dans les famillesprofondément influencées par la religion, latradition et les pratiques d’ordre culturel,peuvent aussi être une cause de vulnérabilité.Lorsque les mécanismes (formels ouinformels) de protection sociale sontinadéquats, inaccessibles ou inexistants, cesvulnérabilités peuvent se développer avec letemps et, ainsi, faire perdurer l’état depauvreté. Les inégalités entre le milieu rural etles zones urbaines sont particulièrementproblématiques, notamment en termesd’inégalité dans la répartition des ressources,d'exclusion des enfants et de genre.

Dans la lutte pour la réduction des inégalités etl'atténuation des vulnérabilités, l'Etat joue unrôle important car il est le premier responsablede la conception et de la mise en œuvre despolitiques et des programmes. Il n’estcependant pas seul car il agit en même tempsque la famille, la communauté, la société civile,les ONG internationales, les acteurs locaux(ONG, fédérations d'ONG, organisationscommunautaires de base (OCB) etorganisations religieuses, entre autres).

4.2.1 Pauvreté et vulnérabilité chezles enfants

Compte tenu de ses multiples dimensions, leconcept de pauvreté des enfants peut êtreappréhendé de différentes manières. Parmi lesméthodes les plus courantes, on mesure la«pauvreté monétaire», qui utilise le seuil depauvreté monétaire des ménages comme pointde départ et on calcule alors le nombred'enfants vivant dans des ménages pauvres. Il ya aussi "l’approche par les privations’’, quiconsidère qu'un enfant est pauvre s’il estdurement privé de l'alimentation ou de l'accès àl’eau potable, à l'assainissement, à la santé, au

31Analyse de la pauvreté et de la vulnérabilité au Sénégal

logement, à l'éducation, à l'information et auxservices sociaux de base. Dans ce cas, un enfantest «absolument pauvre» lorsque deux ou plusde ces privations graves sont présentes(Gordon et al 2003).

En plus des vulnérabilités liées aux conditionssociales, il y a aussi des vulnérabilités liées auxchocs économiques et aux catastrophes naturellesqui touchent les enfants directement ouindirectement par le biais de l’impact qu’ont cescatastrophes sur les stratégies de survie desménages. Par exemple, au cours des dernièresannées, les inondations qui ont affecté de façonimportante les villes de Pikine et de Guédiawaye(en 2005 environ 50,000 personnes ont étédirectement touchées) ont eu un impact sur lesenfants, car elles ont entraîné la perte de logement,l’arrêt de leur scolarité et les ont exposés auxmaladies (choléra, maladies diarrhéiques,paludisme) et aux déplacements des familles. Demême, les hausses de prix des denréesalimentaires ont conduit des familles à rechercherdes ressources supplémentaires ou de nouvellesstratégies d'adaptation comme l’émigration desenfants ou le recours au travail pour les enfants.L'effet de ces divers facteurs et chocs externes surles enfants doit être compris pour la mise au pointde mesures de protection efficaces.

4.2.2 Vulnérabilités et risques liés à lasanté chez les enfants et les femmes

La maladie est un facteur qui peut intensifier lavulnérabilité, car non seulement elle limite lescapacités de la personne mais aussi parce qu’encas de maladie, une part importante desressources est consacrée aux soins. Ceci estparticulièrement vrai lorsqu’il s’agit de ménagespauvres. Au Sénégal, il y a encore un nombreimportant de personnes exclues des soins desanté, en particulier celles qui vivent en milieurural et dans certaines banlieues, et cela endépit des efforts déployés par la réformesanitaire de 1998 et la construction d’hôpitauxpublics et de centres de santé publics et dudéveloppement de cases de santécommunautaires.

L’Enquête Démographie et Santé de 2005montre une nette amélioration des taux desurvie des mères et des enfants (Ministère del'Economie et des Finances et al 2007). Le tauxde mortalité néo-natale a baissé de 70,1 décèspour 1000 naissances vivantes en 1997 à 61 en2005, et celui de la mortalité infantile (enfants demoins de cinq ans) est passé de 135 décès pour1000 naissances vivantes en 1995 à 121 en 2005.Cependant la situation du pays reste marquéepar la persistance d'importantes disparités audépend des nourrissons et des enfants vivantdans les zones rurales. Les mortalités néo-nataleet infantile sont respectivement de 52 en zoneurbaine contre 82 décès pour mille et de 91contre 160 décès pour mille chez les enfants demoins de cinq ans. Le taux de mortalité desenfants de moins de 5 ans dans les ménages duquintile le plus pauvre (183 pour 1000) est troisfois supérieur à celui du quintile le plus riche (64pour 1000).

Le Sénégal a enregistré aussi des améliorationsen termes d’accès aux services de santé(vaccination). Selon l’EDS 2005, 48,2% desenfants ont reçu tous les vaccins requis avantl'âge de 12 ans, alors que ce taux n’était que30% en 1999. Les progrès sont encore plussignificatifs dans l’administration desvaccinations avec, par exemple, 93,1% desenfants âgés de 12 mois et moins correctementvaccinés contre la poliomyélite. Cependant, uneanalyse plus fine montre que les progrès ont étéinégaux selon les régions. En 2005, seules 3 des11 régions (Saint-Louis, Louga et Ziguinchor) serapprochaient de l’objectif de 80% de couverturevaccinale de routine. La mortalité maternelle estun autre domaine où des progrès ont étéobtenus (401 décès pour 100,000 naissancesvivantes au cours de la période 1998-2005contre 510 durant la période 1986-1992) mais demanière inégale. Le fait de vivre en zone ruraleest une cause de haute vulnérabilité pour unefemme: alors que la mortalité maternelle enmilieu urbain est de 309, elle est de 472 décèspour 100,000 en milieu rural. Cette différencedans l'accès et/ou la demande de services desanté entre zones rurale et urbaine peut êtreaussi illustrée par la proportion des naissances

32 LA PROTECTION SOCIALE DES ENFANTS EN AFRIQUE DE L’OUEST ET DU CENTRE : CAS DU SÉNÉGAL

en milieu sanitaire, avec un plus grand nombrede femmes et de nouveau-nés exposés aurisque de décès pendant l'accouchement dansles zones rurales. Selon les données de l’EDS2005, 88,1% des naissances en zone urbaine ontlieu dans les structures de santé, alors que cechiffre n'est que de 46,6% en zone rurale.

Le paludisme, responsable de 42% desmaladies (EDS 2005), est une causeimportante de décès chez les enfants demoins de cinq ans (25%) et chez les femmes(10,05%). L’incidence des symptômes dupaludisme est presque similaire dans leszones urbaines (30,4%) et rurales (29,4%)mais les données de la mortalité infantile dueau paludisme et désagrégées selon le milieude résidence, le quintile de richesse ou lesexe indiquent que 34,1% des enfants vivantdans les zones urbaines ont pu prendre desmédicaments antipaludéens contreseulement 22,3% des enfants des zonesrurales en raison du plus faible taux decouverture des services de santé dans leszones rurales. Selon l’EDS 2005, 90% de lapopulation n’a pas recours aux services desanté et 93,7% considèrent que ces derniersne sont pas nécessaires alors que 1,4%trouvent qu'ils sont trop chers. En revanche,les taux d'infection au VIH / SIDA restentfaibles, atteignant 0,2% chez les garçons et0,6% chez les filles âgées de 15 à 24 ans.

Bien qu'il y ait eu des améliorations importantesdu système de santé et que celles-ci ont eu derépercussions positives sur le statut sanitairedes enfants et des mères, beaucoup reste à fairepour atteindre les OMD 4 et 5 et réduiresignificativement la vulnérabilité en termes desanté.

4.2.3 Vulnérabilités et risques liés à lanutrition

Le pays ne dispose pas suffisamment d’indicateursfiables sur la nutrition de l'enfant (rapportd’avancement des OMD du Sénégal, République duSénégal, 2006b) mais les données disponiblesmontrent qu’entre 1992 et 2005 il y a eu des

améliorations constantes dans ce domaine. Lesprévalences en termes de retard de croissance,d’émaciation et d'insuffisance pondérale desenfants sont passées respectivement de 20% à 17%,22% à 16% et de 9% à 8%. Ces améliorationsrésultent de la mise en œuvre de stratégiesperformantes comme la Prise en Charge Intégréedes Maladies de l'Enfant (PCIME), le Paquet Intégréd’Activités de Nutrition (PAIN) et le Programme deRenforcement Nutritionnel (PRN). Ainsi, aprèsseulement deux années de mise en œuvre du PRN(2004-2006), le ratio poids/taille des enfants a étéréduit de 34% dans les zones bénéficiaires du projet.Le taux d'allaitement maternel exclusif a augmentéde 24% en 2000 à 34% en 2005. Ces améliorationsglobales cachent, toutefois, des disparités. Lesenquêtes montrent une prévalence de lamalnutrition plus élevée en zone rurale, dans lesfamilles où les mères ont un faible niveau descolarité et dans les ménages pauvres. Dakar, Thièset Ziguinchor ont de meilleurs indicateursnutritionnels pour les enfants que les autres régions.

Ces progrès suggèrent qu'il serait possible deréduire de moitié l'incidence de la malnutritiond'ici à 2015 si on fait des efforts pour étendre lesprojets actuels et si on cible mieux les groupesles plus vulnérables. Cependant, cet exercicedevra être accompagné ou précédé d’uneévaluation de l’impact de la crise alimentaireactuelle sur la situation globale des enfants surle court et le moyen terme. En effet, pour faireface à la hausse des prix des denréesalimentaires, les ménages adoptent desstratégies qui peuvent inclure la réduction de laquantité d'aliments (achetés et consommés) quiaffectent principalement les enfants comptetenu de leurs besoins nutritionnels spécifiques.En situation de crise, si des interventionscomme les programmes de cantines scolairesou la distribution d’aliments ou d’espèces nesont pas mis en place, la situation nutritionnelledes enfants devient critique augmentant lavulnérabilité des enfants à la maladie ethandicapant leur développement. Il seraimportant de mesurer l'impact de la crise et del’augmentation du prix des denréesalimentaires sur le développement des enfantsdans un délai d'un ou deux ans.

33Analyse de la pauvreté et de la vulnérabilité au Sénégal

4.2.4 Inégalités de Genre

Les inégalités sociales induites par les pratiquestraditionnelles et culturelles augmentent lavulnérabilité des femmes et des enfants,notamment dans les zones défavorisées, quipeuvent donc être plus queproportionnellement touchées par lesconditions de vie précaires. Par exemple, lemanque d’électricité en milieu rural intensifie ladifficulté de mener à bien les tâchesdomestiques quotidiennes pour les femmes etles enfants, qui sont réduits à utiliser des outilsrudimentaires pour les travaux agricoles, lacollecte d’eau ou le pilage de céréales. Pouratteindre l'OMD 3 sur l'égalité des sexes etl'autonomisation des femmes, le gouvernementdu Sénégal a mis en place un cadreinstitutionnel plus favorable aux femmes et auxfilles (entre autres la Stratégie Nationale pourl'Egalité des Sexes et l'Equité, SNEEG), et il aentrepris une série d'actions pour améliorer lestatut des femmes dans les familles etcommunautés et améliorer leur accès au travailet aux services. Cependant, les progrès restentlents et inégaux.

L'égalité entre les sexes dans l'enseignementprimaire a connu d'importants progrès, avec unindice de parité de genre qui a atteint 0,95 (EDS2005). Dans le secteur de l'enseignementprimaire, bien qu'il existe certaines différencesrégionales en termes de taux de scolarisation,les disparités entre les zones urbaines (0,97) etrurales (0,93) ne sont plus très importantes.Cependant, une analyse selon les quintiles derichesse montre qu’il existe un écart significatifentre les sexes dans l'indice de parité avecmoins de filles que de garçons chez lesménages pauvres fréquentant l'école. L’indicede parité de genre est de 0,88 pour le quintile leplus pauvre. Cet écart est beaucoup plus grandpour l'enseignement secondaire, où la paritéentre les sexes est de seulement de 0,72,indicatif d'un nombre important de filles quiabandonnent après avoir achevél'enseignement primaire. Dans ce dernier cas, lacause la plus fréquente serait le mariageprécoce avec 45,5% des filles se mariant avant

l’âge de 18 ans, et 13,5% se mariant avantd'avoir atteint l’âge de 15 ans. Cette proportionest sensiblement plus élevée dans les zonesrurales, où 59,2% des filles se marient avantl’âge de 18 ans et 18,2% avant l'âge de 15 ans.Non seulement le mariage précoce réduit leschances des filles de poursuivre leur scolarité,mais il augmente le risque d’avoir plus denourrissons de faible poids. Il a été démontréque le faible niveau d’instruction des mères estun facteur déterminant dans la transmissionintergénérationnelle de la pauvreté et de lavulnérabilité aux enfants. Au Sénégall'analphabétisme est plus élevé chez les jeunesfemmes (15-24 ans) que chez les jeuneshommes (44,8% en 2005), même si des progrèsont été enregistrés par rapport à 2001 (41%)(République du Sénégal, 2006b).

Les inégalités entre les hommes et les femmeslimitent la croissance économique etaccroissent la pauvreté des femmes, comme entémoignent la faiblesse des salaires des femmeset leur faible accès aux activités de production.Au Sénégal, l'autonomisation des femmes,mesurée par la participation des femmes aumarché du travail et par le nombre de siègesqu'elles occupent au Parlement, est faible, avecseulement 26,5% de femmes employées dans lesecteur formel non agricole, et seulement 19,2%des sièges au Parlement occupés par desfemmes. Le DSRPII indique qu'il y a unerépartition inéquitable des ressources et desrevenus agricoles entre les sexes et une sousvalorisation des tâches accomplies par lesfemmes. Des analyses ont montré que lesecteur agricole ne tire pas le maximum de sonpotentiel de production en raison des difficultésdes femmes à accéder aux facteurs deproduction (terres, outils, intrants). Unerépartition des revenus plus équitables et uncontrôle des ressources permettraientd'améliorer les conditions économiques etsociales des femmes et devraient constituer desobjectifs prioritaires dans le cadre de laréduction de la pauvreté. Il y a eu un effort dugouvernement et des ONG pour promouvoirl'autonomisation des femmes par le biaisl’amélioration du cadre institutionnel (Stratégie

34 LA PROTECTION SOCIALE DES ENFANTS EN AFRIQUE DE L’OUEST ET DU CENTRE : CAS DU SÉNÉGAL

Nationale pour l’Egalite et l’Equité du Genre) etl’amélioration de leur accès à des mécanismesd’épargne et de crédit et leur implication dansdes activités de micro production. Le DSRPIIprévoit de poursuivre ces actions. Toutefois,bien que le rôle des femmes soit en pleineévolution, cela ne semble pas suffisant car lesfemmes dépendent encore largement deshommes et de leur famille, en particulier dansles zones rurales.

4.2.5 Education

Des progrès importants ont été accomplis dansle domaine de l’éducation des enfants. Le tauxnet de scolarisation dans le cycle primaire estpassé de 58% en 2001 à 72,1% en 2005 alors queles taux d’achèvement (enfants qui ont effectuéle cycle complet de cinq années d’écoleprimaire, jusqu’au CM2), ont augmenté de 45%en 2001 à 53,9% en 2005 (République duSénégal, 2006b). Le secteur reste, cependant,marqué par d’importantes disparités rural-urbain en termes de fréquentation scolaire. Lestaux de fréquentation de l'école primaire dansles zones urbaines qui sont de 74,7% (74,2% degarçons et 75,2% de filles) tombent à 47,2% enmoyenne dans les zones rurales. De même, il ya de fortes disparités entre les régions. Selon lesdonnées de l’EDS 2005, la fréquentation scolaireest de 28,4% dans la région de Diourbel et de42% dans la région de Louga, mais peutatteindre 90,5% dans la région de Ziguinchor.On ne note pas de différences significatives

entre les filles et les garçons. Le récent Rapportd'avancement sur les OMD (République duSénégal, 2006b) suggère que la réalisation del'OMD 2 est possible d'ici à 2015.

Il y a également eu d'importants progrèseffectués concernant l’inscription des enfantsdans le préscolaire, dont il a été démontré auplan international qu’il constitue une étapecruciale pour le développement de l'enfant. Laproportion des enfants ayant entre 36 à 59 moiset fréquentant le préscolaire est passée de 8,1%en 2000 à 20,4% en 2005 (MICS1, EDS).

Ces progrès sont le fruit des effortsgouvernementaux en matière d’augmentationde la part allouée à l'éducation dans le budgetnational (40% en 2005 contre 18,1% en 2001) etd’extension des infrastructures et programmesd'appui au secteur de l'éducation. Près de 81,2%des ménages ont une école primaire à moins de30 minutes de marche à pied, et 68,7% desménages à moins de 15 minutes de marche(République du Sénégal 2007).

4.2.6 La protection de l'enfant

La typologie des enfants vulnérables ayantbesoin de protection comprend plusieursgroupes. Parmi ceux-ci, le phénomène de lamendicité des enfants est sans doute l’un desplus visibles au Sénégal. De récents travaux derecherche supportés par l’UNICEF Sénégal(2007) ont mis en évidence que près de 7,600

Caractéristiques

sociodémographiques

Travaillent

actuellement (%)

Effectuant des travaux

domestiques de plus de

4 heures par jour (%)

Travaillent pour aider

l’activité économique

familiale (%)

Nombre d’enfants

Urbains 17.8 27.3 6.2 7,592

Ruraux 19.2 44.3 14.0 12,051

Moyenne 18.7 37.7 11.0 19,643

Tableau 7

Travail des enfants chez les enfants âgés de 5-14 ans au Sénégal, 2005

Source: EDS 2005.

35Analyse de la pauvreté et de la vulnérabilité au Sénégal

enfants se livrent à la mendicité dans les rues dela région de Dakar. Ce nombre ne cesserait decroître dans de nombreuses villes. Parmi cesenfants, il y a ceux qui quittent le domicilefamilial extrêmement pauvre, souvent du milieurural, à la recherche de ressourcessupplémentaires pour eux ou pour leursfamilles. Ces enfants qui passent généralementenviron six heures par jour à mendier dans lesrues, sont en majorité des garçons et 38%d’entre eux sont des élèves d’écoles religieusestraditionnelles (talibés) et ont été confiés parleurs parents à un marabout (ou maîtrecoranique) qui, parfois, les pousse à mendier. Lereste de ces enfants de la rue (62%) sont ceuxqui se sont retrouvés séparés de leur famille dufait de négligence ou de mauvais traitements.On retrouve aussi des enfants handicapés et desenfants qui accompagnent des adulteshandicapés (par exemple, ceux qui conduisentles aveugles). La moitié de ces enfants vientd'autres pays limitrophes. Quelque soit leursorigines, ces enfants sont extrêmementvulnérables à la violence, à l'exploitation et auxabus, et sont totalement privés de leurs droits àl’éducation, à la santé et à la protection.

On compte aussi parmi les enfants vulnérablesles OEV qui, au Sénégal, sont définis commedes personnes âgées de moins de 18 ans quirépondent à une de ces caractéristiques: i) êtreorphelins de mère et / ou de père, ii) avoir unemère et/ou le père qui a été gravement maladependant au moins 3 des 12 derniers moisécoulés; iii) vivre dans un ménage avec aumoins un adulte âgé de 18-59 ans qui a étégravement malade durant trois des 12 derniersmois écoulés, ou iv) vivre dans un ménage avecau moins un adulte qui est décédé au cours des12 derniers mois écoulés après avoir étégravement malade au moins 3 des 12 derniersmois écoulés. On estime qu’au Sénégal, 12,8%des enfants de 10-14 ans sont orphelins. Le tauxde scolarisation parmi ces orphelins tend à êtreinférieur à celui des non-orphelins (selon lesdonnées EDS le ratio est de 0,83). En outre, desrecherches récentes ont montré que 28% desOEV n'ont pas de revenu. Ces enfants ontbesoin d’une protection spécifique.

4.2.7 Le travail des enfants

En règle générale, les enfants sont mis à un âgeprécoce en situation de travail, principalementdans des ateliers d'apprentissage tels que laferme familiale, la menuiserie, la maçonnerie,etc. Les filles commencent généralement àtravailler à la maison ou au sein de la fermefamiliale. Au Sénégal, à l’instar d'autres paysafricains, on attribue au travail de l’enfant unrôle de socialisation. Cependant, il est importantde faire la distinction entre le travail quin’interfère pas avec le développement del'enfant et lui prend peu de temps, et le travailqui relève de l’exploitation, implique en généralune activité génératrice de revenus à tempspartiel ou temps plein et comporte des risquesd'abus qui peuvent affecter la santé mentale ouphysique de l’enfant.

Selon les données de l’EDS 2005, 19% des enfantsétaient en situation de travail. Plus de 38% de cesenfants étaient engagés dans une forme de travaildomestique nécessitant plus de quatre heures parjour avec 11% d’entre eux aidant leurs familles etétant engagés dans une activité économique (engénéral l'agriculture).

Les études réalisées par le BIT / IPEC(Programme International sur l'Elimination duTravail des enfants) ont identifié plusieursdomaines de travail dangereux pour les enfants: pêche, agriculture, travaux domestiques,transport d’objets par chariots, apprentissage etmendicité. Les «pires formes» de travail desenfants comprennent l'esclavage, la prostitutionet l'exploitation des enfants à des fins d’activitésillégales. Si les premières formes de travailpersistent au Sénégal, les pires formes seraienten régression (Organisation internationale duTravail, 2005).

Bon nombre de familles et d'enfants affectés parla crise économique réagissent en élaborant desstratégies individuelles de survie et de sortie decrise. Parmi les enfants qui sont impliqués dansces stratégies de survie, il y a les enfants cireursde chaussures indépendants, les enfants qui

36 LA PROTECTION SOCIALE DES ENFANTS EN AFRIQUE DE L’OUEST ET DU CENTRE : CAS DU SÉNÉGAL

viennent des villages pour travailler commedomestiques à un jeune âge, les enfants quipratiquent les petits métiers. Avec le temps, cesenfants rompent les liens familiaux et entrentparfois en conflit avec la loi, tels que les"bujumaan" (récupérateurs de déchets ou deproduits recyclables) et les talibés qui opèrenten mendiants indépendants.

Le nombre de ces enfants aurait tendance àaugmenter en raison de l’accroissement desdisparités entre riches et pauvres en milieuurbain, et de la migration accrue vers les villes àla suite des mauvaises productions du secteuragricole (PNUD, 2006).

4.2.8 L'enregistrement des naissances

La Convention des Nations Unies relative auxDroits de l'Enfant (CDE) stipule que tous lesenfants ont droit à un nom et à une nationalitéainsi qu’à la protection de leur identité.L'enregistrement à la naissance donne unereconnaissance juridique à l’enfant, lui accordeune nationalité et, partant, le droit d'êtreprotégé par l'Etat lorsque ses parents ou sessoutiens ne sont pas en mesure de le faire. AuSénégal, 55% des enfants âgés de moins de cinqans étaient enregistrés à l’état civil en 2005. Iln'y avait pas de différence significative entrel'enregistrement des naissances des filles (54%)et des garçons (56%). Toutefois, il existait desdifférences entre les régions (avec plus desdeux tiers des enfants enregistrés à Dakar, Thièset Ziguinchor, Saint-Louis EDS 2005).L'enregistrement des naissances est beaucoupmoins fréquent dans les zones rurales que dansles zones urbaines (44% contre 75%).

4.3 Conclusion

Les enfants du Sénégal sont exposés à une variétéde risques et de vulnérabilités dont un bon nombrea été identifié dans l’axe 3 du DSRPII. Plusieurs deces risques ont pu être réduits car le pays aenregistré des résultats probants en termes deréduction de la pauvreté des enfants comme lemontrent les progrès obtenus dans l’atteinte desOMD. La situation reste toutefois caractérisée par

la persistance de disparités entre les sexes, etd’inégalités entre les zones et entre les groupessociaux. Le pays doit encore faire des efforts pours’assurer que les enfants pauvres et vulnérablesbénéficient effectivement des programmes deprotection sociale, et qu’ils aient tous les mêmeschances de développement. L'impact réel ne serapossible qu’en agissant à la fois sur les causes etsur les manifestations de la vulnérabilité. Parexemple, la réduction du nombre croissantd'enfants qui mendient dans les rues de Dakarexige une réponse qui doit combiner desinterventions visant la réinsertion des enfants dansleurs familles et leurs communautés, desinterventions faisant que ces enfants soient tenuséloignés des risques d'exploitation et des actionsqui ciblent les causes ayant poussé les enfants àquitter leur foyer à la recherche de plus d'argent.Cette réponse doit, aussi, contenir des mesurescapables d'atténuer la vulnérabilité économiquedes ménages pour pouvoir fournir les ressourcesnécessaires à la satisfaction des besoinsélémentaires des enfants. Ainsi, en analysantmieux les causes de la vulnérabilité et les stratégiesd'adaptation des ménages, les interventions deprotection sociale peuvent être plus proactives etplus efficaces, et peuvent mieux protéger lesenfants contre les effets de la pauvreté.

37Analyse des programmes nationaux de protection sociale

La Stratégie Nationale de protection Sociale duSénégal définit la protection sociale ainsi : « LaProtection Sociale est définie comme étantl’organisation de solidarités professionnelles,communautaires ou nationales dont le but est (i)de garantir l’accès aux biens et services essentiels; (ici) de conduire une politique de protection et deprévention contre les risques sociaux et naturels ;(ici) de promouvoir les capacités et les potentielsde chaque individu ; (iv) d’assurer la sécurité desbiens et des investissements, condition nécessairepour une croissance durable ».

La protection sociale est aussi vue comme unoutil pour agir entre les générations, au sein dela même génération ou entre ceux ayant desbesoins immédiats et ceux dont les besoinssont moins immédiats. Il s'agit donc d'unmécanisme pour lutter contre la pauvreté etredistribuer les fruits de la croissance. AuSénégal, la Stratégie Nationale de ProtectionSociale (SNPS) est composée des régimes desécurité sociale et des régimes privés oucommunautaires, formels et informels, avec desobjectifs similaires de mutuelles de santé et defonds d’entraide professionnels.

Il est important de souligner les difficultés et lesopportunités lors du développement d'un

système national de protection sociale – dontl’objectif est de coordonner, de financer et demettre en oeuvre des programmes deprotection sociale et créer des liensinstitutionnels entre les ministères concernés. Ilest, aussi, essentiel de noter que, souvent, lastratégie d’un système de protection identifieles engagements politiques mais sous évalueles conditions pratiques et politiquesnécessaires à sa mise en oeuvre.

5.1 Mécanismes traditionnels etinformels de protection sociale

Les mécanismes traditionnels ou informels deprotection sociale sont des mécanismespertinents de soutien pour les individus, bienqu’ils se soient affaiblis en raison de ladétérioration progressive des conditions socio-économiques des communautés. Au Sénégal, lemodèle le plus prépondérant est celui représentépar le modèle de la "famille africaine", dans lequelles membres d’une famille élargie et les amisproches vivent ensemble au sein d’un mêmedomicile. Les chefs de ménage, en particulier ceuxqui jouissent d'une bonne situation économiqueou ceux des membres de la famille qui ont émigréet ont une position économique plus forte,tendent à être le premier point de contact dans les

5. Analyse des programmes nationaux de

protection sociale

38 LA PROTECTION SOCIALE DES ENFANTS EN AFRIQUE DE L’OUEST ET DU CENTRE : CAS DU SÉNÉGAL

situations de crise ou de besoin. Ils fournissentdes assistances aux ménages (pratiquementjamais remboursés) qui servent en fait de filet desécurité pour toute la communauté. Bien que cemécanisme soit très répandu, il n'est pasconsidéré comme fiable car les familles touchéespar la crise économique (niveau pays ou niveaude la collectivité) ne sont pas en mesure d'assurerce type d’assistance pendant les moments degrande vulnérabilité. Ce mécanisme est de plusen plus érodé par le relâchement des liensfamiliaux.

Dans ce contexte, de nouveaux systèmes desolidarité communautaires se sont développés,comme les « tontines », basées sur la mise encommun des fonds, essentiellement grâce auxcontributions des femmes. Ces tontines sont uneforme de mutualisation de fonds créée pourrépondre à des besoins spécifiques tels l'achat denourriture ou de matériel de cuisine, la prise encharge de dépenses spécifiques, les frais desévénements familiaux (naissances, décès,mariages) etc. Dans la plupart des cas, le systèmede solidarité qui est à la base de la tontine va au-delà de sa dimension économique et s’apparenteplus à un système de capital social. Les membresd'une tontine partagent souvent des liensfamiliaux ou ont des relations fondées sur le lieude résidence, le lieu de travail, etc. de sorte queles événements importants qui surviennent dansles familles (décès, mariages, baptêmes, maladie)génèrent plus facilement la solidarité entre lesmembres de la tontine. Malgré l’arrivée denouveaux systèmes de protection sociale (caissesd'assurance maladie, mutuelles), cesmécanismes communautaires continuent d’êtreles plus accessibles pour la majorité de lapopulation. Au cours des recherches sur le terrain,les divers acteurs ont réaffirmé que toutmécanisme de protection sociale, y compris unprogramme potentiel de transfert d’espèces, nepourra être efficace que s’il prend en compte lessystèmes communautaires de soutien existants.

Ces mécanismes traditionnels de solidarité sontgénéralement satisfaisants quand ils fonctionnentcomme de simples plans d'épargne et de prêts.La couverture qu'ils offrent est généralement

limitée aux événements prévisibles (mariages,naissances, etc.) et ne permet pas de faire face àdes chocs soudains et/ou imprévus, comme lamaladie grave, les accidents, la sécheresse, lesmauvaises récoltes. Ils peuvent être améliorés parla mise au point de systèmes de gestion desrisques plus efficaces capables de répondre à tousles besoins des membres. Les mutuelles de santécommunautaires sont une avancée "naturelle" deces mécanismes traditionnels, dans la mesure oùelles couvrent des risques tout en restant fondéessur les principes de tradition et de solidarité. L’Etatdu Sénégal assure de plus en plus la promotiondes mutuelles de santé communautaires commemécanismes accessibles d'assurance-maladie(Annycke, 2008).

Les autres mécanismes de protection socialeinformels fréquemment rencontrés au Sénégalsont les transferts de fonds envoyés par unnombre croissant de sénégalais installés àl'étranger et le transfert des zones urbaines versles zones rurales. Ces transferts qui peuventatteindre plus de 30% du revenu d’un ménage(Van Vlaenderen et al 2004) représententactuellement environ 7,6% du PIB (Banquemondiale 2008). Les données existantessuggèrent que ces transferts de fonds réguliersont contribué au développement d’institutionslocales, comme le système postal, qui eux-mêmes peuvent faciliter le transfert d’argentprovenant d’autres sources et qui ont permis depénétrer jusqu’aux communautés de base(entretiens avec les auteurs, mai 2008).

5.2 Bref historique du système deprotection sociale

Pour mieux comprendre le système de protectionsociale, il est utile de comprendre comment il aévolué au fil du temps. L'histoire de la protectionsociale au Sénégal a commencé avec la créationdu Service social colonial en 1943 sous la tutelledu ministère des Colonies. Ce service avait ledouble objectif de lutter contre les répercussionsde la guerre sur les populations vivant dans lescolonies, ainsi que d'intervenir en faveur despopulations autochtones. Ces missions ont étéétendues à partir de 1952 avec la création d'un

39Analyse des programmes nationaux de protection sociale

corps de travailleurs sociaux. Au départ, lesactivités de ces derniers couvraientl'apprentissage des tâches domestiques (couture,tricot, etc.) et mettaient l'accent sur l'économiefamiliale. Le champ des interventions futprogressivement étendu à la protectionmaternelle et infantile, à l’hygiène scolaire, auxservices sociaux des tribunaux et aux services deprestations sociales pour enfants des caissesd'épargne. Après l'indépendance, le système aété développé avec la définition d'une politiqued'action sociale qui comprenait le transfert desresponsabilités de l'Office des affaires sociales aunouveau du ministère de la Santé Publique et lacréation de services des affaires sociales.

À partir des années 1960, plusieurs textes ontformalisé la création de centres sociaux dans lesvilles et organisé « l’aide d’urgence ciblée » (enargent, en nature ou par l’allocation d’aliments debase) pour les personnes démunies. En 1968, unestratégie de protection sociale a été mise au pointavec la création d'une Direction des affairessociales dont le mandat était de contrôler lesinstitutions sociales, publiques et privées et

d’organiser des mécanismes de protection de lafamille et des enfants et d'assistance auxhandicapés et de mettre en place des institutionsspécialisées pour les enfants en conflit avec la loiou en danger moral. En 1969, l'État a introduit uneallocation d'entretien pour les jeunes enfantsindigents, les orphelins, les enfants abandonnés etles pupilles de l'État. La réforme de 1975 s’estmatérialisée par la transformation de la Directiondes Affaires sociales en Direction de l'Actionsociale, suivie en 1978 par la création d'unministère en charge de l'action sociale. En 1983,suite à l'adoption du Plan d'Action de Lagos(sommet de l'Union Africaine), le Sénégal atransformé ce département en Ministère dudéveloppement social. En 1988, les centres sociauxont cédé la place aux Centres pour la Protection etla Réinsertion sociale (CPRS). Depuis 1990, l'actionsociale a souvent changé de ministère de tutelle.Toutefois, en dépit de tous ces changements,l'objectif principal de la politique de protectionsociale reste l'octroi de subventions auxinstitutions d'enseignement non conventionnelainsi que le soutien à l'achat d’équipements auxpersonnes handicapées ou indigentes.

Fonctionnaires FNR FNR Etat EtatEtat/mutuelles

FNR

Etat (Etat)

Employés du secteur privé (secteur formel)

IPRES RG

IPRES RG

CSS*IPRES RGPMMutuelles

CSS

CSS

Cadres du secteurprivé (secteurformel)

IPRES RGIPRESRCC

IPRES RGIPRESRCC

CSS

IPRES RGIPRESRCCIPMMutuelles

CSS

CSS

Travailleurs dusecteur informel

Mutuelles Possible

Personnes âgéesde 65 et plus

Dépend deleur statutantérieur

PlanSésame

Possible

IPRES RCC IPRES RG Possible

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n d

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Au

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les

Tableau 8

Types de couverture de sécurité sociale selon la catégorie professionnelle

* Affiliation à la CSS est obligatoire pour les salariés du secteur privé et des employés non fonctionnaires de l'État. L'affiliation estpossible sur une base volontaire pour les personnes employées dans le secteur informel, principalement dans l'agriculture, parl'intermédiaire du paiement des contributions correspondantes. Source: Annycke (2008).

40 LA PROTECTION SOCIALE DES ENFANTS EN AFRIQUE DE L’OUEST ET DU CENTRE : CAS DU SÉNÉGAL

5.3 Le système formel de protection sociale

Le système formel de protection sociale auSénégal comprend le système de sécuritésociale qui fournit des prestations aux employésdu secteur privé et aux fonctionnaires dusecteur public, les mécanismes qui offrent surune base volontaire une protection socialesanitaire à ceux qui sont en dehors du secteurformel (principalement des mutuelles de santéou des mutuelles d’épargne et de crédit), et lesprogrammes d'assistance sociale pour lespopulations les plus pauvres et les plusvulnérables.

Le système de sécurité sociale

Le système de sécurité sociale fournit desprestations aux salariés du secteur formel et auxfonctionnaires du secteur public. Les principalesinstitutions publiques autonomes sont :

• Le Fonds National de Retraite (FNR) qui fournitdes prestations d'assurance sociale auxfonctionnaires et est financé par descontributions et par l'État ;

• L'Institut de Prévoyance Retraite du Sénégal(IPRES) qui fournit des prestations d'assurancesociale aux salariés du secteur privé, parl'intermédiaire de son Régime général (RG) et deson Régime complémentaire. Il est financé par lescotisations des employeurs et des salariés ;

• La Caisse de sécurité sociale (CSS) qui fournitdes prestations familiales et des allocationssanté aux salariés du secteur privé ;

• Les Instituts de Prévoyance Maladie (IPM) quipeuvent être des institutions spécifiques à uneentreprise ou une IPM commune à plusieursentreprises.

Le régime couvre aussi les accidents du travailet les maladies professionnelles, ainsi que lapension d'invalidité pour les agents de l’Etat (lesfonctionnaires) et les militaires. Il est financé parle budget de l'Etat et ne dépend pas du Fondsnational de retraite. La tutelle du système de

sécurité sociale est assurée conjointement parle Ministère de la Fonction publique, de l'Emploiet des Organisations professionnelles(MFPTEOP) et par le Ministère de la Santé et dela Prévention médicale (MSPM).

Le tableau 8 présente de manière détaillée lestypes de couvertures offertes par chaque entité. Ilmontre que la couverture des personnesn’appartenant pas au secteur formel, en particulierles plus démunis, est très faible et est assurée parla protection sanitaire volontaire par le biais desmutuelles. Ils ne peuvent être couverts que parl’intermédiaire de mutuelles de santé quinécessitent une contribution volontaire. Selon unrapport récent du BIT (Annycke 2008), 16,6% despersonnes de plus de 65 ans bénéficient d'uneretraite ou d’une pension de survie et 5,5% destravailleurs sont couverts par une assurancecontre les accidents de travail et les maladiesprofessionnelles. Les prestations familiales necouvrent que 13,3% des enfants de moins de 15ans et moins d’une personne sur cinq (20%) enbénéficie. Cette situation montre combien sontnécessaires les autres alternatives telles lesmutuelles de santé et les mécanismesd’assistance sociale pour couvrir la grande partiede la population qui est actuellement noncouverte.

Quelque soit leur nature, les systèmes existantssont fragiles, car les employeurs ne versent passystématiquement leurs contributions à cesmécanismes de sécurité sociale, créant desdéficits et limitant la couverture dans le secteurformel. Réduire ce phénomène, connu sous lenom d’ «évasion sociale», afin de maximiser lacouverture sociale, est l'un des objectifs de laSNPS du Sénégal.

Un des objectifs de la protection sociale est deréduire la vulnérabilité de la population qui s’estaffranchie de la pauvreté (quintile moyen) maisqui reste cependant vulnérable car pouvantretomber à tout moment dans la pauvreté encas de maladies. Garantir une couvertureadéquate pour cette population est l'un desobjectifs actuels de la SNPS, notamment pourles enfants.

14Pour plus de détails sur les prestations familiales et les prestations de maternité dans le système de sécurité sociale, prière de se référer à Annycke (2008) Chapitre 5.

41Analyse des programmes nationaux de protection sociale

Dans le système de sécurité sociale du Sénégal,le versement d’allocations a pour objectif demaintenir un niveau de vie adéquat au ménagepour, notamment, leur permettre de satisfaireles besoins d’éducation et de santé des enfants. Le système de prestations comprend aussi lesallocations de maternité telles que les allocationsprénatales (généralement conditionnées par lefait que les femmes effectuent des visitesprénatales) et le congé de maternité .

Bien que le système de sécurité sociale soitconsidéré comme généralement bon, il souffrede deux limites. Tous les bénéficiaires potentielsdu secteur formel peuvent ne pas bénéficier deses avantages en raison de la négligence et lerefus des employeurs de verser leurscontributions. La deuxième faiblesse est que lesystème ne couvre qu’une faible part de lapopulation sénégalaise : moins de 20% de lapopulation bénéficie de mécanismes deprotection sociale (Sow, 2008).

L’objet de cette étude étant la protection socialepour les pauvres et les enfants vulnérables, lessections suivantes seront axées sur les autresmécanismes de protection sociale. Lescatégories de population actuellement excluesdu système de protection sociale comprennent laplupart de ceux qui travaillent dans l'agriculture(petits propriétaires terriens ou ceux qui

travaillent pour quelqu'un d'autre); lessaisonniers ou travailleurs temporaires, lestravailleurs migrants, les employés de maison,ceux qui travaillent dans les transports routiers(qui sont particulièrement actifs en mobilisant lesaides pour l'extension de la protection sociale),ainsi que les démunis ou les indigents qui,compte tenu de leur état de marginalité, ont peude chances de trouver un emploi. Actuellement,les principales orientations de l'extension de laprotection sociale à l'extérieur du système desécurité sociale vont en direction de la santé,mais il est important de souligner la nécessitéd’avoir des mécanismes de prestations pour lesenfants et les familles qui contribuent audéveloppement des ménages, et en particulier àcelui des enfants, par l'intermédiaire de systèmesde protection sociale plus complets. Ceci seradétaillé dans le chapitre 7.

5.4 Vue d'ensemble de la stratégie deprotection sociale du Sénégal

La naissance d'une stratégie de protection socialeau Sénégal en 2002 vient de la revue du premierDSRP (Mai 2005) qui recommandait d’améliorerla réponse aux besoins des groupes vulnérablespour lesquels il n’y avait ni mécanismes nipolitiques développés dans le DSRPI. En effet, larevue avait montré que le pays avait réalisé defaibles progrès dans la réduction de la pauvreté et

qu'une autre stratégie étaitnécessaire pour atteindre lesgroupes vulnérables et lesempêcher de tomber dans lapauvreté.

Durant les trois années séparant lelancement du premier DSRP et laplanification du second, la Cellule decoordination du DSRP, soutenue parla Banque mondiale a élaboré uneStratégie Nationale de ProtectionSociale (SNPS). Durant cettepériode, la cellule a, aussi, conduitune étude qui a mis en évidence lavulnérabilité comme facteurdéclenchant de la pauvreté (BanqueMondiale, 2006). Les résultats de

Estimation du nombre

d'enfants couverts par les prestations

familiales en 2004

Enfants

couverts

% d’enfants

0-14 ans

%

d’enfants de

0-19 ans

Allocations CSS (2005) 156,318 3.4 2.7

Allocations au titre du régimefonctionnaires (2005)

209,411 4.6 3.6

Allocations au titre RG IPRES (2004) 182,691 4 3.2

Allocations du Fonds national deretraite fonctionnaires (2004)

58,116 1.3 1

Nombre total estimé couvert par les prestations familiales

606,536 13.3 10.5

Tableau 9

Nombre d'enfants couverts par les régimes de sécurité sociale

Source: Annycke (2008).

42 LA PROTECTION SOCIALE DES ENFANTS EN AFRIQUE DE L’OUEST ET DU CENTRE : CAS DU SÉNÉGAL

15Centre de protection et de réinsertion sociale.

cette étude ont servi à l’élaboration de la stratégiede protection sociale qui est à son tour devenueune des conditionnalités pour l’octroi par laBanque du crédit d’appui à la réduction de lapauvreté (prêt d'appui budgétaire) prévu pour lefinancement des activités d’appui au DSRP-II,sous la forme d’un soutien budgétaire (entretiensavec les auteurs, 2008).

Cette SNPS (2005-2015) a été développée avec lebut d’améliorer l’équité de la protection sociale,d’étendre la couverture d'assurance santé de 20%à 50% de la population et de mettre en place unrégime de protection sociale qui couvre les risquesrésultant de chocs, qui touchent les populationstravaillant dans le secteur informel (agriculture,artisanat, etc.). Les objectifs spécifiques de lastratégie sont les suivants: i) garantir auxpopulations vulnérables l'accès aux services debase; ii) accroître l'accès aux instruments degestion des risques et aux systèmes de protectionsociale liée à la santé, en particulier les mutuellesde santé; iii) améliorer le ciblage, le suivi etl’évaluation des actions pour la protection despopulations vulnérables; iv) mettre en place dessystèmes de protection contre les risquesagricoles; v) garantir le revenu des personnesvulnérables et celles en situation difficile afin deleur permettre d'avoir accès à des systèmesformels de protection sociale; vi) renforcer lesmécanismes d’allocation directe de ressources auxpopulations vulnérables, et vii) améliorer lacapacité, en particulier pour les groupesvulnérables, de résister aux chocs et aux risques,en particulier pour les groupes vulnérables.

Dans une deuxième phase, et à travers unprocessus consultatif qui comprenait l'UNICEF,d'autres agences des Nations Unies, la BanqueMondiale, la Banque Africaine de Développement(BAD) et différents Ministères, la stratégie deprotection sociale a été utilisée pour élaborerl’axe 3 du DSRPII (2005) portant sur la protectionsociale. L'objectif était de faire de la protectionsociale un domaine prioritaire pour legouvernement pour que lui soient alloués desfinancements dans le cadre du budget du Cadrede Dépenses à Moyen Terme (CDMT). Faire de lastratégie de protection sociale une composante à

part entière de la stratégie de réduction de lapauvreté devait permettre le déploiement depolitiques ciblées. Compte tenu des contraintesfinancières et administratives existantes, il estapparu nécessaire d’élaborer des projetscohérents qui puissent mobiliser des fonds et êtretraduits progressivement en actions viables audelà du DSRP.

5.5 Seconde Stratégie de Réductionde la Pauvreté (DSRPII)

Le développement de la stratégie de réduction dela pauvreté DSRP a contribué à consolider la"vision" de l’Etat en matière de protection sociale.Le DSRPII est basée sur 4 axes : création derichesses pour une croissance favorable auxpauvres, accélération de l‘accès aux servicessociaux de base, protection sociale et gestion desrisques et bonne gouvernance et développementdécentralisé et participatif.

L’axe 3 du DSRPII portant sur la protectionsociale pour la période 2006-2010 comprend lesdomaines suivants: • La réforme et le renforcement de la sécurité

sociale ;• L’extension de la protection sociale ;• La prévention et la gestion des risques et des

catastrophes ; ainsi que• La protection sociale des groupes vulnérables.

5.5.1 Extension de la protection

Compte tenu du fait que plus de 50% de lapopulation sénégalaise est pauvre et que lesmécanismes de protection sociale existants neprofitent qu'à moins de 20% de la population, etpas toujours aux plus pauvres et aux plusvulnérables, le pays a développé une stratégienationale de protection sociale dans le but depromouvoir "l’extension de la protectionsociale" à une plus grande partie de lapopulation du secteur informel. Cette extension qui devrait utiliser comme ported’entrée les régimes actuels du secteur formel apour objectif de : i- renforcer les mutuelles desanté qui sont des mécanismes de protectionsociale sanitaires basés sur les associations

43Analyse des programmes nationaux de protection sociale

professionnelles ou sur un groupe de personnesappartenant à une communauté qui mutualisentses fonds par le biais de frais d'adhésion et decotisations mensuelles. Ce mécanisme doitnotamment couvrir toutes les personnes ayant unemploi et leurs dépendants ; ii- mettre en place unsystème de protection contre les risques de santépour les personnes vulnérables ou les "démunis",et iii- établir des systèmes d'assurance socialepour les personnes travaillant dans l'agriculture etles acteurs économiques du secteur informel,les artisans.

Les principaux projets d'extension" existantsvisent la protection en soins de santé et ontpour objectifs :

• Le renforcement du système de mutuellesd'assurance-maladie par le biais de l’action de lasociété civile avec le soutien indirect de l'État, ouà travers des systèmes financés par l'État, pourune couverture en soins de santé des agents dusecteur informel. Ces approches sont promuesprincipalement par le MFPTEOP et le MSP.

• La couverture gratuite en soins de santé pourles personnes âgées de plus de 65 ans àtravers le plan national Sésame (actuellementmis en oeuvre).

• Les mécanismes à petite échellefacilitant l'accès aux soins desanté aux groupes de populationpauvres (indigents) qui ne sontpas en mesure de verser unequelconque contribution.

Etant donné que les filets desécurité existants au Sénégal pourles plus pauvres sont insuffisantset leur mise en oeuvre faible, il esturgent de renforcer les systèmesaxés sur les risques pour la santé.Actuellement, les actions pour laprotection de la santé de cesgroupes de population sont duressort de la Direction del'assistance sociale, qui peut aussifournir des programmes-filets desécurité de faible envergure.Même si on ne dispose pas pour le

moment de données désagrégées pour guiderles interventions, ces dernières devraient mieuxcibler les indigents et leurs dépendants, cecipermettrait de faire bénéficier les enfants.Il n’a pas été possible de faire une évaluationplus pointue car les informations détaillées surles types de programmes, leur portée et leurimpact ont été difficiles à obtenir. Toutefois, ilsemblerait qu’en général, les prestations de cesprogrammes soient limitées en raison desfaiblesses de la gestion, du manque deressources, des faibles capacités desensibilisation et de la faible qualité desservices. Le tableau ci-dessous donne une idéede la faible couverture de ces projetsPour identifier et assister les bénéficiaires, leministère s’appuie sur un réseau 50 CPRSdisséminés sur l’ensemble du pays dont 12 àDakar. Ces centres reçoivent les demandes desoutien des personnes qui connaissent leursservices (qui ne sont pas forcément les plusnécessiteux et ne représentent en tout cas qu'unsous-ensemble de ceux qui ont accès à cetteinformation) et celles transmises par lestravailleurs sociaux. Ils sont ensuite chargésd'effectuer des évaluations des besoins et dedécider de l’importance de l’assistance qui peutêtre fournie, même si les règles pour déterminer

Populations cibléesTypes de

l’assistance

Demandes

reçues

Demandes

satisfaites

Taux de

satisfaction (%)

Personnes handicapées

Appui enéquipement

647 200 31

Veuves et orphelins

Cash support

647 113 17

IndigentsCash

support2.093 500 24

Financement de micro projets pourpersonnes âgées

160 97 61

Total 3.547 910 26

Tableau 10

Assistance et soutien fournis par la Direction

de l’Assistance Sociale, 2004

Source: Department of Social Assistance, MFNSWEM, in Annycke 2008).

44 LA PROTECTION SOCIALE DES ENFANTS EN AFRIQUE DE L’OUEST ET DU CENTRE : CAS DU SÉNÉGAL

l’importance de cette assistance ne sont pasclaires. Les principales faiblesses de ces CPRSsont le faible niveau des ressources humaines,leurs faibles capacités à réaliser les activitésd'identification et de ciblage, et le manque decorrélation entre les services rendus et leursmandats officiels. Les autres freins sont lesproblèmes de budget, les limites de ladécentralisation fiscale aux autorités locales etleurs frais de fonctionnement relativementélevés. L’ensemble de ces contraintes ne permetpas à ces centres d’être considérés comme unealternative crédible pour le transfert de l'aidesociale (entretiens avec les auteurs 2008).

Dans le cas des services couverts par la Direction del'assistance sociale, les soins de santé auxpersonnes nécessiteuses ne sont fournis que dansles hôpitaux publics Dakar. Étant donné que lescoûts de transport ne sont pas remboursés et queles individus appartenant à ces catégories sontsusceptibles d'avoir des contraintes de mobilité, ilest peu probable que les bénéficiaires potentiels quivivent loin de Dakar soient en mesure de venir sefaire soigner dans ces structures. Depuis 2005, laDirection a essayé de mettre en place des accordsde ce type avec d'autres structures régionales maispour le moment cette démarche n’a pas étéconcluante (entretiens des auteurs, 2008). Selondes études préliminaires pour la SNPS réalisées en2005, à partir d'une population bénéficiaire estiméeà environ 215.760 ménages, cette assistancen’aurait couvert que 585 personnes, équivalant à0,27% de la population cible.En outre, cette recherche a constaté que laDirection de l'assistance sociale ne dispose pasd'une ligne budgétaire fixe pour soutenir lesCRPS, de sorte que tous les six mois, la directionest obligée de procéder à des réaffectations deressources à l’intérieur de son budget. Cela nuit àla prévisibilité de cette assistance et bloque lapossibilité d'avoir une approche systématique etciblée. De plus, les CRPS ne disposent pas deressources pour couvrir la logistique, le transportou la mobilisation sociale pour atteindre lescommunautés, même si chaque centre devrait enprincipe couvrir une population de plus de 30.000personnes. Cela limite leur capacité d’assister lesplus vulnérables et les populations marginalisées,

qui sont susceptibles d'avoir un difficile accès àl'information. La direction actuelle ne semble pastrès intéressée par l’extension de ce programmecar son budget actuel ne le lui permettrait pas(entretiens des auteurs, 2008).

En plus du mécanisme décrit plus haut, laDirection de l'assistance sociale dispose d’unprogramme qui lui permet de fournir uneassistance en espèces de petite échelle aux pluspauvres (les indigents). L’allocation, d’environFCFA 200.000 par an (environ US $ 500) estfournie sans aucune condition particulière tenantcompte du nombre d'enfants du bénéficiaire.Pour pouvoir bénéficier de cette subvention, lapersonne doit obtenir un certificat du CPRS. LeCPRS est également chargé de payer l’allocation.Les détails sur la structure, le budget et le systèmede mise en œuvre du programme n’étaient pasdisponibles au moment de la recherche, ce qui n’apas permis pas de tirer des conclusions quant àson impact et sa fonctionnalité.

Le Sénégal dispose de plusieurs programmesd'assistance sociale ciblant les plus vulnérablesmais ceux-ci bénéficient faiblement aux pauvres.Grâce à son inclusion dans le DSRP, la protectionsociale devrait connaitre un regain d'intérêt. Il y aplusieurs projets en cours de préparation dont lesobjectifs sont d’augmenter la couverture etd’assurer une meilleure protection pour lespersonnes démunies. Toutefois, il est clair quel'efficacité de leur mise en oeuvre nécessitera unrenforcement des capacités, une remise à niveaudu cadre institutionnel et une plus grandemobilisation des ressources et des acteurslocaux, notamment pour mieux identifier etassister les potentiels bénéficiaires.

5.5.2 La protection sociale desgroupes vulnérables

La SNPS et le DSRP identifient les groupes devantbénéficier des services de la protection sociale : i-les personnes handicapées; ii- les femmes dans lessituations de vulnérabilités, iii- les enfants exposésaux risques, iv- les personnes âgées, v- les jeuneset les adolescents et les vi- les personnesdéplacées ou rapatriées. Certaines personnes

45Analyse des programmes nationaux de protection sociale

peuvent appartenir à plusieurs groupes à la fois. Par exemple, les actions en faveur des femmes ensituation de vulnérabilité, y compris les programmes d’activités génératrices de revenusou les micro crédits, peuvent bénéficier auxenfants grâce à l’accroissement des revenus de lafamille. Les programmes pour les personneshandicapées devraient en principe ne contenir quedes activités spécifiques à leurs besoins.

Le DSRP contient une liste de principesdéfinissant les stratégies de protection socialeciblées sur l'enfance. Si ces principes sont utilespour développer les différentes interventionspossibles, ils doivent, toutefois, être complétéspar la prise en compte de deux facteurs: i- ledéploiement d’une stratégie de protectionsociale, de ses politiques et programmes estgénéralement lent, de sorte que la mise enœuvre d’une protection sociale ciblée surl'enfant peut être aussi retardée (ceci seradéveloppé en détail dans le chapitre 9), et ii- laprotection des enfants à risques reposeprincipalement sur le renforcement dessystèmes de soins et de protection une fois que

les enfants sont déjà dans une situation devulnérabilité. Ils ne comprennent,généralement, pas d’objectifs en termes deprévention des risques. Pour des réponsesefficaces il faut lier la vulnérabilité des enfantsaux questions plus larges qui concernent lesmoyens de subsistance des ménages. Unestratégie doit essayer en même temps deréduire la situation de dépendance de l'enfantdes revenus du ménage et, en même temps,faciliter l'accès de ces enfants aux services debase. Les actions de prévention peuvent êtreplus rentables quand elles luttent contre lesfacteurs de risque (la migration des enfants versles villes) que les actions qui traitent lesconséquences chez les enfants déjà en situationde risque. Le chapitre 9 de ce rapport étudieraplus en détail les actions et les programmesciblant spécifiquement les enfants vulnérableset le chapitre 8 se penchera sur les programmesde protection de la santé des enfants.

Parce que la plupart des ménages sénégalais ontdes enfants les mécanismes de protection(formels ou informels) basés sur le transfert, aux

46 LA PROTECTION SOCIALE DES ENFANTS EN AFRIQUE DE L’OUEST ET DU CENTRE : CAS DU SÉNÉGAL

ménages à faible revenu, d’espèces ou deproduits en nature et qui ont pour objectif des’assurer que les chefs de ménage et lesdépendants aient accès aux soins de santé,peuvent avoir des impacts sur les enfants, saufcas exceptionnels, comme : i) quand il sontnégatifs dans la dynamique des ménages dont lesenfants sont exclus; ii) quand les enfants ne sontpas membres de la famille directe du chef deménage, ce qui n'est pas rare au Sénégal, et iii)lorsque des femmes sont chefs de ménage oulorsque les enfants sont leur propre chefs. Enoutre, certains mécanismes de protection de lasanté, tels que les mutuelles de santé, basés surdes contributions à verser pour chaque membrede la famille inscrit, peuvent induire une exclusiondes enfants, en particulier dans les grandesfamilles, en raison des coûts élevés del'assurance.

Le MFSNEFMF assure la tutelle desprogrammes ciblant les groupes vulnérables autitre de l’axe 3 du DSRPII.

5.5.3 Programmes de protectionsociale des ONG et partenariat ONG-gouvernement pour la protection sociale des vulnérables

La SNPS reconnaît le rôle que les ONG, lesinitiatives privées et organismes internationaux(agissant individuellement ou en partenariatavec le gouvernement) peuvent jouer dans lesprogrammes de protection sociale poursoutenir le déploiement du DSRPII. Ci-dessoussont présentés quelques exemplesd'interventions qui ont eu des résultats positifs.

Programme d'alimentation scolaire: le PAM et leProgramme de Renforcement de la Nutrition(PRN). Le PRN a pour objectif d’améliorer l'étatnutritionnel de la population et la croissance desenfants âgés de moins de cinq ans, en particulierceux qui vivent dans les zones urbaines et ruralesles plus pauvres du Sénégal. Le programme, quia mobilisé 22 millions de dollars entre 2002 et2006, couvre environ 20% des enfants de moinsde cinq ans dans 34 districts et 912 villages. Lesprévisions de financement pour la période 2007-

2011 sont de 50 millions de dollars américains.Les principaux donateurs sont la Banquemondiale, le gouvernement du Sénégal, le PAM etl’UNICEF. Le PRN est placé sous la tutelle d’uneunité de lutte contre la malnutrition qui assure lesuivi de la mise en oeuvre. Elle est elle-mêmesupervisée par le cabinet du Premier ministre quilui fournit un organe exécutif et un comitétechnique.

Pour soutenir les efforts du gouvernement enmatière de lutte contre la malnutrition, le PAMa mis en place une distribution de produitsd'alimentation scolaire dans les régions deFatick, Kaolack et Tambacounda. Uneévaluation de ce programme a montré que letaux de scolarisation est plus élevé dans lesécoles où le PAM intervient. Par exemple, surune période de deux ans, le nombre d'enfantsdans les écoles soutenus par le programmed'alimentation scolaire a augmenté de 12%comparés aux 8% observés en moyenne dansles écoles qui ne bénéficient pas d’un telprogramme. L'impact est particulièrementimportant sur la scolarisation des filles oùl’augmentation est de 15% contre 10%. Cetteévaluation a, également montré que leschances de succès (mesuré en taux deréussite à la fin de l'examen primaire) sont deplus de 43% dans les écoles avec programmes(Akakpo, 2004). Le PAM fournit une assistancetechnique au Groupe consultatif présidentielinstallé pour étendre, d'une manière plussystématique et mieux ciblée, lesprogrammes d'alimentation scolaire dugouvernement. Plusieurs intervenantsinterrogés au cours de cette étude pensentque les programmes d'alimentation scolaire,en particulier ceux qui s'appuient sur desstructures communautaires pour leurpérennité, sont des mécanismes efficaces etrelativement simples de protection sociale,car ils ont moins de difficultés pour mobiliserles fonds nécessaires pour l‘expansion(entretiens des auteurs, 2008).Certaines ONG, nationales et internationalessoutiennent des initiatives qui encouragentl'épargne et les prêts en faveur des femmesdans les zones rurales. Ceci a amélioré un accès

47Analyse des programmes nationaux de protection sociale

16 Le plan étant essentiellement un mécanisme de financement des soins de santé pour les personnes âgées, les détails sont fournis dans le chapitre 8 de ce rapport.

direct des femmes aux ressources et leur a permis d’améliorer la consommation duménage et mêmes, dans certains cas, de fairedes petits investissements. Plan International,par exemple, supporte ce type de projet par desinterventions dans les domaines de la santé etde la nutrition pour les enfants (entretiens desauteurs, 2008). Le MFSNEFMF soutient cesinitiatives soit directement soit par le biais departenariats avec des ONG locales.

En outre, les institutions de micro finance et lespetites banques qui sont de plus en plusprésentes dans les zones rurales ont égalementcommencé à offrir des mutuelles de santé àleurs clients par le biais des contributionsmensuelles. Certains considèrent cette façon defaire comme une manière plus durable pourfinancer des mutuelles de santé, car lesressources mobilisées de cette manière sontplus importantes que dans les mutuelles desanté qui reposent exclusivement sur lescotisations.

5.6 Impact des régimes actuels deprotection sociale

L'inclusion en 2006 de l’axe "protection sociale"dans le deuxième DSRP visait à remédier auxlacunes constatées dans l’assistance auxpopulations vulnérables lors de la revue duDSRPI. En effet, cet exercice avait permis demettre en exergue la faible envergure dusystème de protection sociale et ceci empêchaitde mettre en place une réponse adaptée auxmultiples besoins en protection sociale etpermettant d’atténuer les chocs quiconstituaient les facteurs de la pauvretéchronique et/ou qui favorisaient la création denouvelles catégories de pauvres, notammentparmi les personnes travaillant dans le secteurinformel (République du Sénégal, 2007b).

Malgré cette situation globalement défavorable,le pays a enregistré quelques progrès. Parexemple, le Fonds de Développement Socialmis en place pour financer les petits projetsavait alloué 10,83% de ses ressources à desprojets ciblant les populations vulnérables

pauvres constituées principalement de jeunes,de femmes et de personnes âgées. La plupart deces projets avaient pour objet les activitésgénératrices de revenus dont la revue n’acependant pu mesurer les taux de succès. Leprogramme de Renforcement de la Nutrition aété évalué positivement : dans les zones où lesactivités avaient été déroulées, avec uneréduction de 34 % du taux de malnutritionmesurée par le rapport poids/taille (ibid).

À partir de 2006, une série de programmes deprotection sociale a été lancée. Certains sont encours d’exécution, d’autres sont encore austade de la planification. Certains des résultatsdisponibles après deux ans de mise en œuvrede la stratégie sont :

• La revue annuelle du DRSPII a procédé à uneévaluation générale des différents objectifs deprotection sociale qui a permis de constaterque, bien que certains progrès aient étéaccomplis, il restait encore beaucoup à faire.(République du Sénégal, 2008b):

• Au cours de la phase initiale du DSRPII,l’extension de la protection sociale, considéréecomme étant une priorité, s’est traduiteprincipalement par des études de faisabilitéqui seront conduites à partir de 2009. Certainsprogrès ont été cependant constatés en termesd’amélioration des cadres juridique etinstitutionnel ;

• Le programme National de Réduction desRisques est toujours en phase de lancement ;

• Plusieurs initiatives portant sur les activitésgénératrices de revenus au profit des femmeset des jeunes ont été lancées, mais dans leurgrande majorité elles ne sont toujours pas enmesure de satisfaire la demande pour ce typede projets. Deux programmes potentiellementpositifs, le Partenariat pour le Retrait et laréinsertion des Enfants des Rues (PARRER) etle Projet de Lutte contre les Pires Formes deTravail des Enfants au Sénégal, ont été lancésvers la fin de 2007 mais aucun résultat n’estencore disponible ;

48 LA PROTECTION SOCIALE DES ENFANTS EN AFRIQUE DE L’OUEST ET DU CENTRE : CAS DU SÉNÉGAL

• Plusieurs actions concrètes de soutien auxpersonnes déplacées ont été rapportées.

Dans le cadre de la SNPS et du deuxième DSRP,une plus grande attention a été accordée à lamise au point d'indicateurs permettant demesurer les progrès dans différents domainesde la protection sociale. Il faudra veiller à ce queles programmes qui sont mis en œuvrecontiennent des mécanismes de suivi etévaluation qui permettent d’évaluerpériodiquement leurs impacts sur lespopulations vulnérables

• Le Plan Sésame . C’est un plan de financementde la santé destiné uniquement aux personnesâgées. Ce programme qui a démarré en 2006,a récemment fait l’objet d’une revue à mi-parcours qui a montré son impact positif avecune couverture de plus de 450.000 personnesâgées en trois ans. Les bénéficiaires ont reçudes soins de santé «gratuits» sur présentationde leur «carte Sésame». Il semble que lescentres de santé sont dûment remboursés parl'organisme national en charge du plan, ce quitémoigne d'un mécanisme de financement dela santé potentiellement positif. Il est encorefinancé par son fonds de démarrage et donc saviabilité sur le long terme reste un défi.

• Les mécanismes de protection sociale dusecteur formel qui ont été mis en place durantles dernières décennies ont fait l’objetd’évaluations formelles dans le cadre de larevue du DRSPII. Les résultats montrent que lerégime de sécurité sociale n’est plus adaptécar il a peu changé durant les 20 dernièresannées en maintenant une faible couverture etun faible niveau des allocations. Le systèmen’a pu s’adapter ni aux changementsintervenus dans le monde du travail ni à ceuxqui ont influencé les structures familiales,socioprofessionnelles et démographiques duSénégal. Bien que quelque réformes aientmodifié son cadre réglementaire, le système apeu évolué dans sa mise en œuvre, et parconséquent, il n’est plus adapté. Il doit être misà jour avec une révision des populations cibleset un ajustement à la hausse de la valeur des

prestations pour tenir compte des coûts réelsdes dépenses en soins de santé et des autresdépenses payées par les ménages.

Parmi les autres limites identifiées figurent le faibleniveau de service, l'absence d'une couverturecomplète et l'exclusion du chômage du paquet derisques sociaux couverts. De plus, le systèmesouffre de la discrimination qui persiste contre lesfemmes fonctionnaires et contre les travailleusesdu secteur privé quand à l'extension de lacouverture médicale à leurs maris et leursdépendants (l'assurance pour les dépendants nepeut être obtenue que par le biais de bénéficiairesde sexe masculin). Il en va de même en ce quiconcerne les prestations et la fiscalité dessurvivants. Selon l'évaluation, la stratégiecomprend de nouvelles mesures pour rattraper leretard accumulé dans le système de sécuritésociale et des mesures pour élargir le champ decouverture obligatoire aux personnels et femmesafin de répondre aux besoins des salariés et desdifférentes catégories d’ouvriers. La Banquemondiale et l'OIT ont financé quelques études surla protection sociale dans le but de guider larévision du code de la sécurité sociale et autresréformes du système.

• Bien qu’il n’a pas été possible de procéder àune évaluation formelle des programmesd'aide sociale qui dépendent de la Direction del'assistance sociale, une vue d'ensemble de sastructure organisationnelle, son manquechronique de fonds, la faiblesse de sessystèmes d'information et de ses organesdécentralisés en termes de fourniture deservices ainsi que son très faible niveau depénétration (0,27% de la population cible)suggèrent un faible impact et une faibleefficacité.

Les résultats de ces analyses montrent lanécessité d’aborder de manière particulièrel'impact des interventions de protectionsociale ciblées sur les enfants, précisémentsur les enfants vulnérables (voir le chapitre 4du présent rapport). Le manque dedocumentation sur des initiatives de grandeenvergure (la plupart des programmes actuels

49Analyse des programmes nationaux de protection sociale

sont à petite échelle) limite la possibilitéd’avoir une idée objective de l’impact de laprotection sociale. Les données existantessuggèrent, toutefois, que le travail fait pourréduire à la base certains des risques auxquelssont exposés les enfants arrive à obtenir desrésultats. Les interventions des ONG et despartenaires internationaux, tels que l'UNICEFet Save the Children Suède et TOSTAN ontaccéléré l’abandon de l'excision et desmariages d'enfants. Ce travail a été facilité parl'adoption de cadres juridiques cohérents.Dans les secteurs sociaux de base, l’actionconséquente du gouvernement a permisd’améliorer l'accès aux services, ce qui a eu unimpact particulièrement positif sur les enfants.L’axe 2 du DSRP vise à renforcer ces secteurspour accélérer la réduction de la vulnérabilitédes enfants aux maladies et au manqued’éducation. Cette section a, aussi, mis enévidence quelques progrès obtenus dans laréduction de la malnutrition grâce auxinterventions du PRN (en partenariat avec laBanque mondiale, le PAM et l’UNICEF). Comptetenu de la nécessité d'améliorer significativementla nutrition des enfants, dans les années à venir ledéfi sera de mener ces actions à grande échellepour obtenir des impacts plus importants, Dans ledomaine du travail des enfants et la mendicité desenfants, il est attendu que les programmesrécemment lancés aient des impacts plus élevésque par le passé.

La récente revue du DSRP a fortementrecommandé de mettre en place desmécanismes renforcés de suivi et d'évaluationau sein des régimes actuels et programmes deprotection sociale (Sadio, 2008). Cecipermettrait une meilleure appréciation desprogrès et une meilleure estimation de l’impactdes interventions engagées au titre de la SNPSet de la DSRPII. Compte tenu de la hautevulnérabilité des enfants, l’UNICEF pourraitassister les organismes gouvernementaux encharge de la mise en œuvre de la protectionsociale afin de renforcer les mécanismes deciblage, d’améliorer les systèmes de suivi etéventuellement de réviser et reformuler lesstratégies et programmes existants.

5.7 Contraintes politiques et institutionnelles

L'élaboration d'une stratégie de protectionsociale et son inclusion dans le DSRPII sont desavancées qui peuvent assurer à la protectionsociale une approche plus institutionnalisée etqui peuvent se traduire par des politiques et desprogrammes ciblant la réduction desvulnérabilités. Ceci traduit un niveaud'engagement politique important. Cependant,des évidences collectées pour la rédaction de cerapport montrent qu’il existe encored'importantes faiblesses institutionnelles.

1) Faible leadership. Le système de protectionsociale implique de très nombreux acteurs dont lesMinistère de l’Economie et des Finances, de lasanté, de la Famille, de l'Agriculture ainsi que desbailleurs et des organisations de la société civile(OSC). Nombre de ces entités ont des avisdifférents et/ou développent des approchesdifférentes dans la mise en œuvre des activités deprotection sociale. La situation est compliquée parla faible coordination intersectorielle qui prévautdans le secteur. Actuellement, la Cellule du DSRPest chargée de coordonner Ministère l'exécution del’axe 3, mais n’a aucune prérogative lui permettantde veiller à ce que les différentes parties prenantesprogressent dans la même direction pour la miseen œuvre de la SNPS. Bien que la protectionsociale relève prioritairement du MFSNEFMF, ilexiste de nombreux autres acteurs pourvusd’importantes responsabilités dans ce domaine(comme le MFPTEOP et le MSPM), qui netravaillent pas nécessairement en coordinationentre eux ou avec le MFSNEFMF. En résultat, il y ades duplications et/ou des contradictions entre lesrôles et responsabilités de ces différents services. Atitre d’exemple, le Ministère de la Santé et leMinistère de l'Agriculture développent tous lesdeux des programmes publics de mutuelles desanté dont les approches sont différentes et dansune certaine mesure, contradictoires, alors mêmequ’ils visent certaines mêmes cibles, sont enconcurrence pour les mêmes ressources publiqueset ont, tous les deux, la responsabilité d’améliorerl'articulation des différentes composantes (voirchapitre 8).

50 LA PROTECTION SOCIALE DES ENFANTS EN AFRIQUE DE L’OUEST ET DU CENTRE : CAS DU SÉNÉGAL

Un leadership plus fort et une meilleurecoordination entre les acteurs de la protectionsociale pourrait aider à : i) établir unecartographie des différentes interventions pours'assurer que l'information concernant lesactivités et les programmes planifiés soitdisponible; ii) assurer un dialogue entre lesparties impliquées dans le domaine de laprotection sociale et ainsi faciliter les synergieset l’utilisation efficace des fonds publics; iii)sélectionner une gamme d’indicateurs que tousles acteurs utilisent de manière synchroniséepour faire le suivi et l’analyse des réalisations etdes résultats; iv) assurer le suivi des ressourcesbudgétaires mobilisées pour le financement desinterventions de protection sociale, ce qui sousentend aussi la préparation de programmes etleur soumission dans les délais ; v) veiller à ceque la protection sociale soit une haute prioritédans la mise en oeuvre du DSRP et dans ledébat social et politique. Ces actions devraientêtre soutenues par la promotion d’une meilleurecompréhension de la protection sociale par lesparlementaires et par les OSC afin d’améliorerleur engagement et leur appui pour sondéploiement.

2) le Sénégal manque de projets et deprogrammes permettant d’opérationnaliser lesdifférentes dimensions de la protection sociale.Le pays dispose d’un cadre stratégique ainsique d’informations sur les populations cibles.La manière dont ce cadre doit être mis en placea fait l’objet de nombreuses discussions entreles parties prenantes, mais ne s’est pas encoretraduit par le développement de régimes deprotection sociale permettant la concrétisationdes 4 axes. Quelques propositions deprogrammes ont été développées mais ne sonttoujours pas finalisées ou approuvées. Ellessont en majorité axées sur l’extension de lasanté, comme le programme, en phased’approbation, développé par le Ministère del’Agriculture pour l’extension des mutuellesd'assurance maladie aux travailleurs agricoles.Comme indiqué dans la revue 2007 du DRSPII(Sadio 2008 ; Sow 2008), la lenteur de laprogrammation sectorielle et la faiblemobilisation des ressources budgétaires dans le

cadre du Programme d'Actions Prioritaires(PAP) en direction de l’axe 3 du DSRPIIcontribuent également à cet état de fait. Lesprincipales parties prenantes du processus dedécision budgétaire (MEF et FMI) reconnaissentque des propositions de programmes deprotection sociale plus pertinentes auraient deschances de mobiliser des allocations du budgetnational.

3) La protection sociale est un des axes du DSRPIImais est aussi un des déterminants des progrèsdes axes promotion de la croissance, extensiondes services sociaux et bonne gouvernance. Il estessentiel de promouvoir le dialogue et lacoordination entre les institutions chargées desdifférents axes du DSRPII (les trois autres axespiliers ont un secrétariat de coordination). Parexemple, il y a une sous composante de l’axe 3 quia trait à l'extension de la protection sociale qui doitcrucialement être coordonnée avec lesinterventions de l’axe 2 du DSRP portant surl'extension des services de base pour que desapproches complémentaires (peut-être sous laforme d’interventions sur la demande et sur l'offre)puissent assurer de meilleurs résultats dans lesecteur de la santé. Il est aussi nécessaire d'assurerune meilleure coordination entre la gouvernancede la protection sociale et le renforcement desinstitutions décentralisées prévu dans l’axe 4 pourassurer un bon déploiement de la protectionsociale et une bonne gestion au niveau local desprestations d’allocations.

Ceci permettrait de traduire lesrecommandations faites par la revue annuelle2007 du DSRP en ce qui concerne ledéveloppement d'un environnementinstitutionnel fort et efficace pour la protectionsociale. L’un des éléments du succès serait decréer un «Secrétariat», qui pourrait être logé ausein du MEF, compte tenu du fait que ceministère a le pouvoir sur l’allocation et le suivides budgets. Les partenaires au développementqui sont actifs dans la mise en œuvre de laSNPS, tels que l'UNICEF, pourraient faire partiedu Secrétariat pour assurer la coordinationentre les ministères et également entre lesbailleurs de fonds.

51Analyse des programmes nationaux de protection sociale

5.7.1 Les défis de labonne gouvernance

Certains éléments indiquentune faible gouvernance etune transparence insuffisantedes systèmes existants pourla fourniture de servicessociaux de base, y comprisceux concernant lesmécanismes de protectionsociale, avec le risque d’unedéperdition importante desfonds entre le moment où lebudget est alloué auxprogrammes et celui où lesressources arrivent auxutilisateurs finaux (entretiensavec les auteurs, 2008). Bienqu’il n’y ait pas d’évaluationde la gouvernance desmécanismes de protectionsociale, la recherche sur leterrain laisse penser quecertains programmes deprotection sociale, parexemple, ceux sous tutelle dela Direction de l'assistancesociale, ont de très faiblesmécanismes de surveillanceet de contrôle, et ont parconséquent un déficit detransparence, avec une faibleproportion des ressourcesallouées qui arriveraient auxbénéficiaires auxquels ilssont destinés. Il estfondamental d’améliorer lesindicateurs de gouvernancepour assurer un meilleur usage desressources publiques, un meilleur accès auxservices de protection sociale et uneexécution plus efficace des programmes. Lesagences de développement pourraient jouerun rôle en supportant le renforcement de lacapacité de suivi et d'évaluation pour lagouvernance de ces programmes.

5.7.2 Evidences pour la conceptiondes politiques

Au cours des interviews conduits pourl’élaboration de ce rapport, différentspartenaires impliqués dans la protectionsociale ont exprimé le besoin de disposer derésultats d’évaluations et de recherche pourguider l’élaboration des programmes

52 LA PROTECTION SOCIALE DES ENFANTS EN AFRIQUE DE L’OUEST ET DU CENTRE : CAS DU SÉNÉGAL

notamment ceux qui portent sur lesallocations en espèces (cash transfert). Il estprévu que les programmes actuellement encours d’élaboration soient des programmes -pilotes, afin d’en permettre l’adaptation avantleur généralisation. Dans le cas des allocationsen espèces, par exemple, les intervenantsinterrogés ont convenu qu’un programme sicomplexe et si coûteux devrait être mis àl'essai pour vérifier son potentiel avant qu'ilne soit lancé au niveau national.

5.8 Conclusion

Comparé aux pays de la sous région, leSénégal dispose d’une certaine avancée entermes de protection sociale. Cependant, cesystème se concentre principalement sur lacouverture des soins de santé et sur lesmécanismes d’assurance maladie pour lesgroupes vulnérables. Même si le systèmecomprend plusieurs formes de protection pourles groupes vulnérables, notamment lesenfants, la définition de la protection socialeutilisée au Sénégal n’intègre pas la dimension« transformatrice » de la protection sociale(stimulation des activités génératrices derevenus ou soutien des moyens desubsistance). Étant donné que la fourniture deservices de base - principalement la santé - estfinancée principalement par des dépensestirées des revenus et que beaucoup de

vulnérabilités sont liées aux chocs sur lerevenu, un programme de protection socialeoffrant une assistance en espèces pourrait êtreune réponse simple à plusieurs des objectifsde la stratégie.

Le système de protection actuel a été revisitépour améliorer son architecture, sesmécanismes de ciblage et son fonctionnement. En cette période marquée par l’effondrementdes mécanismes de solidarité traditionnelle, parla difficulté de mobiliser des ressources tant auniveau local qu’extérieur et par la multiplicationdes risques et des chocs endogènes, unmécanisme articulant de manière plus efficaceles systèmes existants et mettant en place uneréponse adaptée aux besoins des groupesnécessiteux contribuerait à réduire la pauvretéet à mieux protéger les plus vulnérables. Lafaisabilité opérationnelle est abordée dans lechapitre suivant.

53Analyse de la marge de manoeuvre budgétaire pour les programmes de protection sociale

Les systèmes de protection socialeont été toujours faibles et dotés deressources insuffisantes dans laplupart des pays de l'Afriquesubsaharienne cumulant unemoyenne des dépenses d'environ0,1% du PIB. Dans d'autres partiesdu monde, telles que le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord, lamoyenne est d'environ 5,7% du PIB(Coudouel et al 2002). Ce chapitreexamine la situation actuelle auSénégal en termes de marge demanœuvre budgétaire et depossibilités de financementssupplémentaires des systèmes deprotection sociale d'une manièredurable. Cet examen utilise commedéfinition de la marge demanœuvre budgétaire celleélaborée par Heller (2005): «lamarge de manoeuvre budgétaireest la latitude au sein du budgetd’un Etat qui lui permet de fournirdes ressources pour un objet désirésans mettre en péril la viabilité desa situation financière ou lastabilité de l'économie ».

6.1 Aperçu macro-économique etsituation financière

La croissance économique du Sénégal cesdernières années a été relativement stagnanteavec un niveau d’environ 5% mais toujourssupérieure à la moyenne observée dans la zonede l'UEMOA. En 2006, la croissance a chuté à2,3% mais a vite retrouvé un niveau de 4,8% en2007, principalement tirée par le dynamisme dessecteurs des services et bâtiments. Pour 2008 etau-delà, les perspectives macroéconomiquessont globalement favorables, sous réserve quedes politiques macroéconomiques prudentescontinuent d’être menées. La croissanceéconomique à moyen terme pourrait atteindreun niveau moyen de 5,5% à 6% (FMI 2008a) sil’économie du pays n’est pas affectée par dechocs exogènes importants. L'investissement

devrait continuer à stimuler la croissance avecune forte activité dans les services, lestélécommunications, et la construction desprojets d'infrastructures financés en grandepartie par des fonds étrangers. Il y a lieutoutefois de noter qu’en 2007 et pour ladeuxième année consécutive, la productionagricole a diminué pesant lourdement sur laréduction de la pauvreté car les moyens desubsistance de près de la moitié de lapopulation du Sénégal sont encore étroitementliés à ce secteur.

Les prévisions de croissance doiventcependant être revues pour tenir compte dela dégradation de l'environnementéconomique international et de la forte

6. Analyse de la marge de manoeuvre budgétaire

pour les programmes de protection sociale

a A partir de 2006, reflète l’échelonnement du service de la dette post- IADM. b Défini comme le total des recettes et des dons moins le total des dépenses et des emprunts, à l'exclusion des dépenses de paiement des intérêts.

54 LA PROTECTION SOCIALE DES ENFANTS EN AFRIQUE DE L’OUEST ET DU CENTRE : CAS DU SÉNÉGAL

hausse des prix des produits alimentaires etde l'énergie, qui ont eu des répercussions surle niveau d'inflation du Sénégal. En 2007,celle-ci a été estimée à 5,9%, atteignant sonniveau le plus élevé depuis la dévaluation de1994, plaçant le Sénégal au-dessus del’objectif de 3% fixé par l'UEMOA. Cetteaugmentation est principalement due à lahausse des prix des produits alimentaires(7,2%) et du pétrole. Au niveau mondial, leprix moyen du riz, aliment principal dessénégalais, a augmenté de 40%. Cespressions inflationnistes affectent l'économiedu pays qui a enregistré une perte decompétitivité de l'ordre de 4,3% résultantd'un différentiel d'inflation négatif parrapport à ses principaux partenaireséconomiques (République du Sénégal 2008).La hausse de l'inflation a déclenché desmouvements sociaux qui ont forcé legouvernement à adopter des mesuresd’amortissement des chocs. Ces mesures ontcompris la suspension des taxes indirectes etdes droits de douane sur quelques produitsalimentaires, la subvention du riz et del'énergie, ce qui à son tour a accentué lespressions sur le budget. Le coût de cesmesures a été estimé à 1,5% du PIB. Ces

mesures, ainsi que l’importance desdépenses d'investissement ont affecté demanière significative l'exécution du budgeten 2007 et limité la marge de manœuvre dugouvernement. La hausse des prix del'énergie et des denrées alimentairesimportées, au moment où les exportationsstagnaient, a porté le déficit du comptecourant extérieur à 10,5% du PIB.

6.1.1 Les dépenses du gouvernement

Le gouvernement du Sénégal fait régulièrementpart de sa volonté d’orienter les dépenses endirection des secteurs propices à la croissance,tels l'investissement, la santé et le potentielhumain. Il a également réaffirmé son intentiond'atteindre l'objectif du DSRP de dépensessociales équivalent à 40% du total des dépensesou 10,7% du PIB d'ici 2010. De manière globale,on peut dire que le gouvernement a réussi cedéfi puisqu’en 2007 plus de 33% du total desdépenses ont été affectés aux secteurs sociauxen augmentation de 2 points par rapport à 2006(Ministère de l'Economie et des Finances, 2008).Pour l’éducation, la part du secteur est passéede 6% du PIB à 11,5% du PIB au cours de ladernière décennie et il est prévu d’atteindre

environ 12 % du PIB pour lesprochaines années. Le maintien deces efforts devrait augmenter lepotentiel de croissance du Sénégal,l’aider à réduire la pauvreté etrenforcer la compétitivité extérieure(FMI, 2008a).

6.1.2 La politique budgétaire

Les efforts du pays pour assurer unmeilleur contrôle du déficitbudgétaire primaire ont étéconcluants puisque ce dernier a étéréduit de 5,2% du PIB en 2006 à 3,5%en 2007. Il y a lieu cependant de noterque des engagements de dépensesnon tenus équivalent à 2% du PIB ontdu être reportés à 2008, causantd'importants retards dans lespaiements au secteur privé et créant

2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011

Est. Proj.

Changement annuel en pourcentage

Revenu national et prix

PIB à prix constants 5.9 5.6 2.3 4.8 5.3 5.9 5.9 5.8

Dont: Revenu nationalbrut non-agricole

6.0 4.8 3.9 5.7 5.3 6.1 6.1 5.9

Déflateur du PIB 0.5 2.3 3.4 5.2 4.0 2.3 2.2 2.2

Prix à la consommation 5.9 5.6 2.3 4.8 5.3 5.9 5.9 5.8

Moyenne annuelle 0.5 1.7 2.1 5.9 4.4 2.2 2.0 2.0

Secteur extérieur

Détérioration destermes de l'échange

-3.1 -2.4 10.3 -7.0 1.5 0.8 2.7 0.0

PIB (en milliards FCFA) 4,243 4,582 4,846 5,344 5,856 6,348 6,872 7,430

Tableau 11

Sélection d’indicateurs économiques et financiers, 2004-2011

Sources: Autorités sénégalaises et estimations et projections du FMI (FMI 2008).

55Analyse de la marge de manoeuvre budgétaire pour les programmes de protection sociale

Sources: Autorités sénégalaises et estimations et projections du FMI (FMI 2008).

Tableau 12

Opérations financières du gouvernement, 2006-2011

c Défini comme les recettes totales moins le total des dépenses et des emprunts nets, à l’exclusion des dépenses en capital financées par emprunt extérieur, les emprunts et lesdépenses financées par le recours aux initiatives PPTE et IADM.d Encours de la dette à la fin de l'année. e Après l'allégement de la dette par les initiatives PPTE et IADM (à partir de 2006). f Défini comme les dépenses de santé, d'éducation, d'environnement, du système judiciaire, de développement social, de traitement des eaux usées et d'irrigation rurale.

2006 2007 2008 2009 2010 2011Est. Proj.

(% du PIB, sauf indication contraire)

Total des recettes et dons 21.4 22.9 23.4 21.9 23.5 23.2

Recettes 19.9 20.9 21.4 21.1 20.7 20.9Dons 1.5 2.5 2.1 2.1 2.1 2.0Total des dépenses et emprunts nets

27.5 27.2 28.5 27.3 26.9 26.9

Dépenses courantes 17.1 14.8 15.8 14.5 17.2 15.5Salaires ettraitements

5.9 6.3 6.1 6.1 6.1 6.0

Paiementsd’intérêts a

0.9 0.7 0.5 0.7 0.6 0.7

Autres dépenses courantes 10.3 7.9 9.1 7.7 10.4 8.9

Dont: biens et services 3.8 3.7 4.1 3.6 3.9 3.9Dont: allocations et subventions

6.3 3.9 4.7 3.8 6.2 4.8

Dont: subventions alimentaireset à l’énergie

3.1 0.8 1.4 1.0 2.9 1.2

Dépenses de capitaux 9.8 12.7 11.4 12.0 11.3 12.2

Par financements internes 7.0 8.8 7.4 8.2 7.3 7.6

Par financements extérieurs 2.8 3.8 4.0 3.8 3.9 4.1

Solde budgétaire global -7.3 -6.0 -7.1 -6.2 -6.1 -6.0

Solde budgétaire primaire b

-5.2 -3.3 -4.2 -3.4 -3.4 -3.3

Solde budgétaire de base c

-3.4 -0.7 -1.6 -1.0 -0.9 -0.9

Financements 5.8 4.7 3.5 4.5 4.9 4.1Financements extérieurs 2.5 3.0 2.4 3.6 4.5 4.9Financements internes 3.3 1.6 1.1 0.9 0.6 0.8

Dette intérieure de l’Etat d 4.3 5.6 6.1 6.9 8.2 9.3

Dette publique extérieure (nominale) d e

17.8 18.1 20.0 20.9 21.0 21.3

Service de la dette publique extérieure (en pourcentage des exportations) e

4.2 4.4 3.2 3.7 3.7 3.6

Service de la dette publique extérieure (en pourcentage des recettes) e

5.4 4.9 3.9 4.6 4.7 4.5

Sélection de postes pour mémoire:

Dépenses prioritaires f

8.6 9.0 9.5 10.0

Salaires et traitements (en pourcentage des recettes fiscales)

29.7 30.5 29.4 30.0 28.5 28.9

56 LA PROTECTION SOCIALE DES ENFANTS EN AFRIQUE DE L’OUEST ET DU CENTRE : CAS DU SÉNÉGAL

les conditions d’une augmentation du déficitbudgétaire à 4% du PIB en 2008, ce qui resteramalgré tout conforme aux engagement du paysvis-à-vis des institutions internationales.

En effet, dans le cadre de son programme actuelde soutien (FMI 2008), le gouvernement a fixé laréduction du déficit budgétaire global à 4% duPIB sur le moyen terme pour assurer la viabilitédes finances publiques et fournir au Sénégal lesmoyens nécessaires à son développement. Lecontrôle du niveau de déficit devrait égalementpermettre de poursuivre le processus engagépour améliorer la structure des dépenses etatteindre l'objectif du DSRPII de 40% desdépenses sociales du total des dépenses d'ici à2010. Le maintien d’une bonne viabilité desfinances publiques est considéré comme uninstrument important qui préservera la stabilitéintérieure et permettra de répondre auxengagements du Sénégal vis-à-vis de l'UEMOA,notamment en ce qui concerne le contrôle dudéficit budgétaire et le poids de la dette.

Cela permettra aussi desoutenir l'investissement et lacroissance. Un accroissementdu déficit budgétaireaggraverait la viabilité de ladette et donnerait lieu à uneaugmentation non souhaitablede la vulnérabilité budgétaire.L’on estime que de nouvellesaugmentations des dépensespubliques, en particulier pourl'investissement,excèderaientla capacité d'absorption aussilongtemps que les réformes surla gestion des financespubliques (GFP) n'ont pas portéleurs fruits. En outre,l'évaluation par le FMI de lamarge de manœuvrebudgétaire indique que celle-cis'est considérablement accruedepuis 2000 (environ 9% duPIB), comme le montre letableau 13. Selon cesestimations du FMI, près de lamoitié de marge de manœuvre

budgétaire créée à partir de 2000-2007 (environ4% du PIB) a été utilisée pour les dépenses pro-pauvres - qui, en vertu d'une définition du FMI estdifférente de dépenses du secteur social car celacomprend les dépenses sur les secteursjudiciaire, de l'eau/irrigation, de l'assainissement,en complément de celles effectuées pourl'éducation, la santé et le développement social.

En 2007, le respect strict de l’équilibrebudgétaire a causé des distorsions qui ontaffecté l'exécution du budget 2008. Aussi, dansune lettre adressée au conseil d'administrationdu FMI, le Directeur exécutif du FMI pour leSénégal (Rutayisire 2008) a exprimé la volontédes pouvoirs publics du pays à obtenir plus deflexibilité pour fixer les objectifs budgétaires.Cette lettre stipule que les autorités devraientassurer une meilleure prise en compte desplafonds budgétaires et continuer à engager lesdépenses de manière responsable. Elle fournitainsi une justification pour plus de souplessedans les objectifs budgétaires fixés aux

Source de latitude fiscale 9.0

Contributions domestiques 5.7

Recettes 4.1

Paiement des intérêts de la dette intérieure 0.0

Financement intérieur (net) 1.7

Contributions extérieures 3.3

Dons 0.6

Financements extérieurs 2.7

Utilisation de la marge de

manoeuvre budgétaire9.0

Salaires 0.9

Autres dépenses courantes 2.4

Dépenses de développement 5.8

Dépenses en faveur des pauvres* 4.0

Tableau 13

Indicateurs de marge de manoeuvre budgétaire

(espace fiscal) pour le Sénégal, évolution

2000-2007 (en% du PIB)

Source: FMI (2008). * Défini comme les dépenses pour la santé, l'éducation, l'environnement, la justice, le développement social, le traitement des eaux usées et l'irrigation rurale

57Analyse de la marge de manoeuvre budgétaire pour les programmes de protection sociale

17En 2006, les plus grands donateurs, sur la base des déboursements étaient la Banque MondialeMondiale, (IDA),

France, la RFA, l‘ UE, le groupe de la BAD et les Etats Unis.

programmes du Sénégal soutenus par le FMI.Les autorités considèrent que des écartsponctuels à une politique fiscale strictedevraient être autorisés tant que la viabilitébudgétaire à long terme est préservée. Celapermettrait aux programmes, non seulement demieux résister aux chocs imprévus, de mieuxrépondre aux besoins urgents eninfrastructures, de ne pas affecter les objectifsde croissance et de ne pas introduire dedistorsions dans le processus d'exécution dubudget (ibid.).

Les effets rapides de la hausse des prix desdenrées alimentaires et de l'énergie sont parmiles menaces les plus importantes de la viabilitébudgétaire. Les calculs prévisionnels indiquentque pour être efficaces et limiter l’impact sur lespopulations les subventions devraient atteindreau moins 3% du PIB en 2008, soit un dixième dutotal des dépenses. Une analyse de l’impactsocial et de la pauvreté (PSIA) réalisée en février2008 par le FMI a constaté que les subventionsn’étaient pas suffisamment ciblées et que cemécanisme de protection sociale pourrait êtreamélioré. Cette analyse propose différentesalternatives de politiques de protection socialeque les autorités semblent intéressées àexplorer. Les autorités ont également expliquéles plans qu’elles envisageaient pour, nonseulement, améliorer l'offre et réduire les coûtsdes denrées alimentaires et de l’énergie maisaussi augmenter la production agricoledomestique (en particulier celle des cultures àhaut rendement), améliorer les infrastructuresrurales et étendre les systèmes d'irrigation. Laréforme du secteur énergétique est déjàrelativement avancée, et les efforts pour réduireles coûts devraient rapidement produire desrésultats. Sans entrer dans le débat sur lanécessité de soutenir ou non les subventions, sile pays souhaite réduire l'impact sur lesménages, il devra procéder à un meilleurciblage de l’assistance et réduire les distorsionsbudgétaires.

Le déficit du compte courant extérieur, projeté à11% ou 12% du PIB sur le moyen terme, devraêtre solidement financé car une réduction

durable de la croissance mondiale et unralentissement des flux internationaux decapitaux qui pourraient résulter de la crise desmarchés financiers mondiaux pourraient avoirun impact négatif - bien que les flux de capitauxen direction du Sénégal sont en grande partieen investissements directs relativement stables.

En dépit d’une stabilité générale et de bonnesperspectives, l’économie du pays reste vulnérableaux chocs, notamment ceux qui sontparticulièrement imprévisibles tels la fluctuationdes prix des produits agricoles sur le marchéinternational et de mauvaises conditionsmétéorologiques. Selon l'évaluation du FMI, leSénégal fait aussi face au risque de tensionssociales politiques pouvant être exacerbées par leshausses de prix des denrées alimentaires et del'énergie. Tous ces facteurs affectent la capacité desautorités à mettre en œuvre les réformes et àmaintenir une stabilité macroéconomique.

6.1.3 L'aide étrangère et la dette

Les indicateurs existant sur la viabilité de la detteextérieure du Sénégal indiquent que cettedernière s’est nettement améliorée après l’entréeen vigueur des initiatives PPTE et IADM. LeSénégal a atteint son point d'achèvement PPTE enavril 2004 ce qui lui a permis de bénéficier d’unallégement de la dette d'environ 850 millions dedollars en termes nominaux. En 2005, le payss’est qualifié pour un allégement supplémentaireau titre de l'IADM lorsque le FMI, l'IDA et le FADont annulé leurs créances pour un montantd'environ 1,4 milliards de dollars en termesnominaux. La valeur actuelle nette de l’encoursde la dette extérieure PPG a été ainsi réduite de33,1% du PIB fin 2005 à 18,3% du PIB fin 2007.Selon l'analyse faite pour le Sénégal dans lesPerspectives économiques 2008 en Afrique par laBAD et l’OCDE (2008), le déficit du comptecourant a été largement financé par l'aide et lesannulations de dettes. En effet, le Sénégal resterelativement dépendant de l'aide publique audéveloppement avec des flux d'aide représentantenviron 8,7% du PIB en 2005, 10% en 2006 et 7%en 2008. Cette aide provient à 70% de cinq grandspays donateurs . Le flux de l'aide provenant des

58 LA PROTECTION SOCIALE DES ENFANTS EN AFRIQUE DE L’OUEST ET DU CENTRE : CAS DU SÉNÉGAL

«pays donateurs émergents», en particulier l'Inde,la Chine et les pays arabes, bien qu’en légèrehausse, reste faible. Compte tenu de la volontédes donateurs de soutenir le pays dans sa luttecontre la pauvreté, la réunion du Groupeconsultatif pour le Sénégal à Paris en 2007 s’estconclue par un engagement des partenaires àmaintenir leur soutien.

Le pays dispose d’un plan pour réduireprogressivement les flux nets d'aide (dons et prêtsconcessionnels) avec l’objectif de réduire cette aidede 7% du PIB en 2008 à 3,5% du PIB en 2028.

Selon de récentes évaluations (IDA et du FMI,2008), le fardeau de la dette extérieure duSénégal est faible. La dette intérieure publiquedu Sénégal reste également faible, de sorte quele risque global de surendettement du Sénégalest faible (ibid). Nonobstant les perspectivesfavorables des scénarios existants, la viabilitéde la dette publique repose sur le maintien dudéficit budgétaire à un niveau raisonnable,compte tenu des besoins de financement crééspar les déficits accumulés.

6.2 Défis budgétaires à

l'investissement dans les services

sociaux

6.2.1 Dotations sectorielles

Le gouvernement du Sénégal a exprimé àmaintes reprises son engagement à donner lapriorité à l'investissement dans le secteur social.Il s’est ainsi engagé à atteindre, d'ici à 2010, uneallocation à ce secteur de 40% du total desdépenses. Selon le récent cadre de dépenses àmoyen terme (CDMT), le programmebudgétaire triennal 2008-2010 prévoit uneaugmentation de l’allocation des ressourcespour les secteurs sociaux provisoires.

Le tableau 14 montre que la santé et l'éducationsont des secteurs prioritaires, l’éducationabsorbant la moitié des ressources affectées auxsecteurs ayant déjà mis en place un CDMT.Comparés aux moyennes constatées dans lespays de l’Afrique de l’Ouest (14,7% du total desdépenses) les 27,5% du budget alloués par legouvernement du Sénégal à l'éducation montrentl’importance de l’effort engagé pour atteindre cetOMD. Le budget alloué au secteur de la santé aucours de la période du CDMT a aussiprogressivement augmenté, même si le tauxreste en dessous de l'objectif des 15% du total desdépenses fixées par la Déclaration d'Abuja . Ladotation du MFSNEFMF est de faible importanceet de ce fait, les dépenses du secteur d’assistancesociale peuvent être considérées comme nonprioritaires. Les activités dans ce secteur portentsur l'assistance sociale fournie aux personnesdémunies, aux personnes âgées, aux handicapés,et aux enfants malades vivant dans des famillespauvres.

Les activités de la protection sociale relèventde différents ministères. Par exemple, lescomposantes portant extension en santé setrouvent dans le budget du MSPM, ce quipourrait expliquer une partie del'augmentation des ressources de cedépartement. Les crédits alloués à laprotection des populations vulnérables sont

2008 2009 2010

Education 24.8 27.5 27.5

MSPM 7.3 7.7 8.0

MFSNEFM* 0.5 0.5 0.5

Justice 2.4 2.6 2.7

Environnement et Protection desRessources Naturelles

1.3 1.2 1.3

Développement rural et Agriculture 4.3 4.1 4.0

Elevage 0.6 0.6 0.5

Tourisme et Artisanat 0.4 0.4 0.4

Infrastructures et Assainissement 6.4 5.8 5.5

Economie Maritime 1.8 1.7 1.6

Enseignement technique-FormationProfession.

1.9 1.8 1.8

Transport aérien et transports terrestres

0.7 0.7 0.6

Autres secteurs 47.4 50.6 51.5

Total – Ministères avec CDMT 52.6 49.4 48.5

Total (en FCFA milliards) 1080.80 1199.00 1280.00

Source: Cadre de Dépenses à Moyen Terme (CDMT), 2008-2010.

Tableau 14

Dotations par secteur, CDMT 2008-2010 (%)

59Analyse de la marge de manoeuvre budgétaire pour les programmes de protection sociale

18Données de la Banque, Development Indicators cité par Handley (2008).

19Engagement des Chefs d’Etat Déclaration d’Abuja (2001) vers un objectif d’allocation de 15% des budgets annuels au secteur de la santé. Cet Engagement a été réaffirmé dans la Déclaration de

Maputo (2003). Cependant aucun des pays de la région de l’Afrique de l’Ouest n’a alloué plus de 10% de son budget à la santé.

sous la tutelle du MFSNEFMF. Comme cedernier n’est pas encore doté d’un CDMTsectoriel, les dépenses faites par cedépartement ne sont pas visibles dans leCDMT global. Les allocations aux programmesde ce ministère pourront être prises en comptedans le CDMT 2009-2011 et ce n’est qu’à cemoment qu’on pourra faire une analyse desressources affectées au MFSNEFMF pour lesactivités de protection sociale.

La structure du financement du DSRP montreque les projections du DSRPII pour la période2006-2010 s’élèvent à une moyenne annuelle de1,1% du PIB. Ces dépenses s’ajoutent auxdépenses courantes (déjà élevées pourl'éducation et la santé, qui absorbent la plusgrande part des dépenses courantes ou defonctionnement, en raison de leur grandemasse salariale). La plupart des dépensesprévues par le DSRPII sont des dépensesd’investissement ou de capital. Ellesreprésentant 11,1 du PIB. Les financementsattendus des bailleurs de fonds doiventconstituer environ 57% du financement duDSRPII (Diaw et al 2006).

6.2.2 Efficacité des dépenses

publiques

Malgré un fort engagement du gouvernement àaccroître les crédits budgétaires affectés auxsecteurs prioritaires de la réduction de lapauvreté, la qualité des dépenses sociales doitêtre améliorée pour obtenir des impacts plussignificatifs. Lors de la rédaction de ce rapport,le manque d’efficacité des dépenses du secteursocial est apparu comme un défi majeur. Eneffet, les analyses conduites par le FMI et la BMmontrent d'importantes évasions de fondsdurant le processus de transfert des allocationsdu niveau central aux niveaux opérationnelsavec des écarts importants entre le budgetalloué et les dépenses réelles. Il n'y a pas encored’évaluation systématique de suivi desdépenses publiques pour mesurer l’ampleur deces évasions de fonds ou pour identifier leurscauses, mais des estimations non officielles duFMI et de la Banque Mondiale montrent qu'unepart non négligeable des ressources allouées ausecteur social (y compris l'éducation et la santé)ne parvient pas aux programmes et / ou auxactivités auxquels ils étaient destinés. Ceciexplique en partie les plaintes récurrentesémises par les acteurs du secteur social en cequi concerne l'insuffisance du budget de leursecteur malgré les importantes dotationsconsenties (près de 33% du total des dépensesen 2007). L’évaluation de la qualité desdépenses est primordiale si l’on veut estimer lamarge de manœuvre budgétaire réelle car unepartie de la solution se trouve dansl’amélioration de l'efficacité des dépenses dusecteur social.

La deuxième option qui permet d’examinerl'efficacité des dépenses publiques est de voirdans quelle mesure les allocationsbudgétaires et les affectations de dépensessont conformes aux politiques prioritairesprévues. Ceci passe par l’analyse desressources destinées à la réduction de lapauvreté en utilisant le Programme d’ActionPrioritaire du DSRPII comme cadre deréférence. En effet, celui-ci cartographie en

Domaines dans

le secteur

PAP DSRPII pour2007

BCI 2007 Ratio BCI/DSRP

Etat Bailleurs Etat Bailleurs Etat Bailleurs

Prévention etgestion desgrands risques etdes catastrophes

0.315 0.275 0.745 0.275 233.3% 100%

Programmespour personnesâgées

0.104 0 0.104 0 100% 0

Jeunesse 0.712 0.028 1.062 0 149.2% 0

Réfugiés et rapatriés

0.0099

3.5 0.1 0 101% 0

Population 0.29 1.1 0.29 0.905 100% 82.3%

TOTAL 1.52 4.628 2.291 1.18 150.7% 24.1%

Tableau 15

Programme des dotations de l’axe 3 en 2007

(en milliards FCFA)

Source: République du Sénégal (2008b).

60 LA PROTECTION SOCIALE DES ENFANTS EN AFRIQUE DE L’OUEST ET DU CENTRE : CAS DU SÉNÉGAL

détail les besoins budgétaires nécessaires à laréalisation des différents objectifs fixés dansle DSRPII. Il identifie aussi les coûts totaux, lesengagements de ressources prévues auniveau du budget de l’Etat ainsi que le déficitde financement (à combler par le biais desbailleurs de fonds ou de la dette). Enfin, la3ème option est d’utiliser les CDMT qui sontdes outils adoptés pour la planification desdépenses à moyen terme et pour faciliter lamobilisation des ressources autour d’objectifsspécifiques de dépenses. La portée de cetexamen doit être relativisée car dans lapratique, il y a eu des contraintes qui n'ont paspermis au pays de mobiliser de manièreéquilibrée les ressources pour les 3 axes duDSRPII. Les montants dans le budgetconsolidé d'investissement (BCI) 2007 pour lesactions prioritaires ont couvert près de lamoitié des engagements prévus par le PAPpour 2007. Sur un montant de 6,148 milliardsde FCFA prévus, seulement 3,096 milliards ontété programmés en 2007, (50,36%). Si lesressources de l'État ont dépassé lesestimations du PAP, les fonds provenant desdonateurs n’ont pas été à la hauteur de leurengagement (République du Sénégal 2008b).

Alors que les axes 1 (création de richesses) et 2(accès aux services sociaux de base) ont réussià mobiliser (c'est-à-dire d'engager dans desprogrammes) la plupart des ressourcesprévues, cela n’a pas été le cas pour l’axe 3(protection sociale et gestion des risques).

En conséquence, la revue annuelle du DSRPII(République du Sénégal 2008b) a conclu quel'exécution du budget (ressources du BCI) enfaveur des groupes vulnérables a été modesteen 2007 parce que les montants mobilisés ontété insuffisants. La revue a recommandé unemeilleure couverture et un meilleur ciblage desprogrammes pour répondre aux besoins despopulations vulnérables.

6.3 Marge de manoeuvre

budgétaire pour la Protection Sociale

Considérant que le Sénégal dispose d’unestratégie de protection sociale qui constitue unaxe prioritaire du DSRPII, on s’attend à desallocations budgétaires substantielles et desdépenses de protection sociale conséquentes.En réalité, comme illustré dans le tableau 14, lamobilisation des ressources pour le secteurreste faible, quelque soit la cohérence desbudgets estimés dans le PAP et quelques soientles niveaux mobilisés. Une des explicationsserait que le PAP souffre lui-même de lacunesdont l’absence de programmes de protectionsociale pertinents. Par exemple, le PAP inclutdes dispositions budgétaires pour «soutenir lamise en œuvre de la protection sociale desgroupes vulnérables et des démunis» mais n’aaucune estimation chiffrée des créditsbudgétaires nécessaires. De manière générale,le DSRP et son PAP manquent de propositionsde programmes cohérents et quantifiablescapables de mobiliser des ressources. Ledéveloppement de programmes plus concretsen cohérence avec les principes de protectionsociale contenus dans le DSRPII est une étapenécessaire qui doit accompagner touteévaluation de la marge de manœuvrebudgétaire disponible. Comme nous l'avons vudans le chapitre 5, et comme nous le verronsdans le chapitre 8, la stratégie actuelle deprotection sociale ne contient pas certaines desréponses aux attentes et besoins des groupesvulnérables, comme les enfants pauvres etvulnérables.

La capacité à générer une marge de manoeuvrefiscale peut être limitée par certains des critèresde performance financière et économiqueacceptés par le gouvernement sénégalais pourbénéficier de l'appui des bailleurs et del'allégement de la dette et pour assurer lastabilité macro-économique et la viabilité de ladette à long terme. Par exemple, le maintiend'un solde budgétaire primaire de 4% du PIBsignifie que le gouvernement ne peut pas sepermettre des dépenses supplémentaires. Par

61Analyse de la marge de manoeuvre budgétaire pour les programmes de protection sociale

contre, il faut signaler aussi que le Sénégal adeux opportunités qui, bien utilisées, luipermettraient d’atteindre une partie desobjectifs de la protection sociale : le paysconsacre déjà une enveloppe budgétairesignificative aux dépenses sociales et desbénéfices pourraient être obtenus par unemeilleure efficacité des dépenses publiques.

Dans ce contexte, il parait pertinent d'examinertrois aspects de la marge de manœuvrebudgétaire: i) la façon dont cette marge peutêtre créée; ii) sa viabilité à long terme et iii) lafaisabilité et l’utilisation possible de cettemarge. La création d’une marge de manœuvrebudgétaire pour le Sénégal dépend, aussi, desagrégats macro-économiques et fiscaux, desrisques associés et de la volonté politiqued'accroître les investissements dans ledomaine.

Six mécanismes principaux de "création" demarge de manœuvre budgétaire ont étéidentifiés dans la littérature sur ce sujet (Forumdes experts sur les OMD de la santé, 2005) donttrois semblent pertinents dans le contexte duSénégal. Il s’agit de l’augmentation des recettes(mobilisation des ressources) ; de laréaffectation des dépenses, et de l'aideétrangère. Selon Handley (2008a), les moyensdont dispose l’Etat, et qui sont véritablementviables, pour créer une marge de manœuvrebudgétaire supplémentaire sont la mobilisationdes recettes et la réaffectation des dépenses.Les autres mesures n’offrent pas l’assurance dela viabilité à long terme que requièrent lesprogrammes de protection sociale, qui sont defacto des dépenses non discrétionnaires, enraison des attentes et des groupes politiques desoutien qu'ils créent. Le recours à l'aide estpertinent car en finançant certains des premierscoûts non récurrents, l’aide peut permettre ledémarrage des programmes. Toutefois, il n’estpas viable à moyen et long terme de fairereposer le financement de la protection socialesur l'aide au développement.

L’accroissement des recettes se fait généralementà travers deux mécanismes : la croissance de

l'activité économique (croissance du PIB réel) etl’augmentation des recettes fiscales enpourcentage du PIB. Les investissements dans lessecteurs productifs et le dynamisme attendu dansle secteur tertiaire devraient permettre au Sénégald'atteindre une croissance moyenne de 5,5% duPIB comme prévu par le DSRPII. Ceci sembleréalisable car le pays a une performancebudgétaire positive et est le seul pays de la zoneUMEOA à parvenir à un ratio recettes fiscales / PIBsupérieur à 18% (Diaw et coll. 2006 et FMI, 2008).En poursuivant son processus de réforme etd’amélioration de l’environnement des affaires, leSénégal est à même d’attirer de nouveauxinvestissements et d’augmenter son potentiel decroissance économique (FMI 2008a) à moyen et àlong terme. La croissance économique devraitcroître de 0,5 points de pourcentage d'ici à 2011.Compte tenu de la bonne viabilité de la dette et dudéficit budgétaire, il serait alors possible demettre de côté des recettes supplémentaires pourfinancer la protection sociale. Toutefois, il est peuprobable que les montants de ces ressourcessoient importants si la croissance reste proche duniveau actuel, car il existe peu de marge demanœuvre pour des recettes fiscalessupplémentaires et des taxes additionnelles nesont pas réalistes, compte tenu de la réformefiscale de 2004 visant à donner des incitations à laproductivité (Diaw et al 2006). Si elles sontmobilisées, des recettes fiscales supplémentairespourraient être utilisées comme un tampon pourfaire face à de dépenses imprévues, telles quecelles effectuées au cours du premier semestre de2008 pour atténuer l'incidence de la hausse desprix des produits alimentaires et du carburant.Elles ne pourront donc peut-être pas êtredirectement et de manière permanente affectéesà un engagement de dépenses telle la protectionsociale.

L'accroissement de l'aide sous forme desubventions et de prêts concessionnels est aussiune manière de générer une marge de manœuvrebudgétaire, mais cela dépend beaucoup duniveau, de la durée et de la prévisibilité desappuis des bailleurs de fonds. Dans le cas duSénégal, bien que l’augmentation de l'aideextérieure puisse être pertinente pour la poursuite

62 LA PROTECTION SOCIALE DES ENFANTS EN AFRIQUE DE L’OUEST ET DU CENTRE : CAS DU SÉNÉGAL

de politiques et d’actions de programmesprioritaires directement liés aux OMD (enparticulier ceux liés à la fourniture et à la qualitédes services sociaux de base) (Diaw et col 2006) etpour financer les dépenses d’investissements etde capital dans le cadre du DSRPII, le financementexterne pourrait ne pas être efficace pour desdépenses de fonctionnement à long terme, tellesque celles qu’impliquent les programmes deprotection sociale en raison de l'imprévisibilité etde la volatilité de l'aide (ibid). Pour le très longterme des dépenses de protection sociale lerecours aux emprunts est particulièrementinsoutenable comme moyen de financement. Parexemple, en 2007, il y a eu une faible mobilisationdes fonds provenant des bailleurs en directiondes objectifs de protection sociale du PAP. L’aideextérieure peut contribuer à financer les coûtsinitiaux (fixes) ainsi que l'assistance technique,qui interviennent seulement dans la phase dedémarrage des programmes de protection socialecomme le transfert d’espèces (cash transfert).

L’amélioration de l’efficacité des dépenses par laréaffectation des dépenses des secteurs defaible priorité et les dépenses des programmesmoins efficaces aux secteurs de haute priorité.C'est le moyen le plus approprié pour générerune marge de manœuvre budgétaire pour laprotection sociale au Sénégal, et ce pourplusieurs raisons.

Compte tenu de la flexibilité des plafondsbudgétaires il semble y avoir peu de marge demanœuvre budgétaire dans le cadre del'exercice en cours. Bien que les dépenses nondiscrétionnaires soient susceptibles decontinuer à croître avec le temps, les dépensesponctuelles(ou dépenses discrétionnaires),telles que certaines dépenses enimmobilisations pourrait commencer àdiminuer tandis que les recettes pourraientaugmenter en fonction de la croissanceéconomique (éventuellement en casd'imposition plus élevée des rendements). Dansce cas, la marge de manœuvre budgétairecommence à apparaître entre le niveau del'ensemble des ressources disponibles et le totaldes engagements existants. Il est important de

noter qu’en raison de la «rigidité» des dépensespubliques, seul un très petit pourcentage dubudget est réaffecté, d'année en année, à denouvelles initiatives (telles que le nouveaurégime de protection sociale) (Handley 2008b).Schiavo-Campo et Tommasi (1999) rapporte quela «marge de manœuvre» annuelle nereprésente généralement pas plus de 5% dutotal des dépenses inscrites au budget. Leremboursement de la dette, le paiement desintérêts et les transferts et les subventions sontrigides ou non-discrétionnaire (c.a.d. que lescoûts ne peuvent pas être évités sur le court oumoyen terme). Une plus grande flexibilitépourrait exister dans la pratique afin de réduireou de réaffecter les dépenses en capitalprévues, mais les conséquences pour lacroissance économique et le développementpeuvent être graves sur le long terme. Danscertains cas, ce financement est bloqué pourprévenir de telles réaffectations. Les dépensesd'exploitation et d'entretien sont souvent lesmoyens de la «flexibilité» mais il y a des casbiens documentés qui montrent les dangers deleur utilisation quand elles ne remplissent pasles implications des coûts récurrents desdépenses en capital. Alors que les salaires dusecteur public sont techniquement desdépenses discrétionnaires (c'est-à-dire desdépenses dont le montant est sous le contrôledu gouvernement), dans la pratique, ils sontsouvent non-discrétionnaires par nature car ilsconstituent des obstacles politiques à laréduction des dépenses à court et à moyenterme (Handley, 2008b).

Dans le cas du Sénégal, le montant total desdépenses publiques était, en 2007, équivalentà 24,3% du PIB (estimations du FMI, cité dansHandley 2008b), avec des dépensesdiscrétionnaires estimées à 17,8% du PIB etun niveau de dépenses non discrétionnairesreprésentant environ 6,5 % du PIB. De ce fait,il est estimé que les salaires et traitementsreprésentaient 23% du total des dépensespubliques en 2005. Afin de créer une margede manœuvre budgétaire pour la protectionsociale, en particulier pour des programmesde protection sociale potentiellement

63Analyse de la marge de manoeuvre budgétaire pour les programmes de protection sociale

efficaces (comme par exemple des transfertsd'espèces) une partie de cette dépensediscrétionnaire, provenant de différentssecteurs, peut être mobilisée. Toutefois, ladécision de le faire dépend de l'engagementdu gouvernement dans la prioritisation desdépenses de protection sociale commemécanisme de réduction de la pauvreté. Uneanalyse coût-efficacité des dépenses nonprioritaires dans les différents secteurs seraitun moyen utile pour identifier les ressourcesqui pourraient être consacrées à desdépenses de protection sociale, sans affecterl’enveloppe du budget total destinée ausecteur social.

En plus de la mobilisation des ressources desecteurs non prioritaires (compte tenu du faitqu'il existe une enveloppe conséquente deressources consacrées aux dépenses sociales),il paraissait, aussi, utile d'examiner l'efficacitédes dépenses du secteur social comme uneautre façon de libérer des ressources pour laprotection sociale. Cela ne signifie pasnécessairement la réduction des financementsdestinés aux services sociaux essentiels, car ilest évident que ces derniers doivent continuer àêtre financés. Toutefois, améliorer l'efficacité desdépenses dans les différents secteurs sociauxpermettrait de libérer des ressources pour laprotection sociale. Il faudra cependant faire desrecherches supplémentaires pour déterminerl’efficience potentielle de ces gains.

Un bon exemple de cette réallocation desdépenses des secteurs les moins efficaces versceux ayant une plus grande efficacité sociale estcelui des ressources actuellement utilisées poursoutenir les prix de l'alimentation et descarburants. Début 2008, le FMI a procédé à uneanalyse de l'impact social de la pauvreté (PSIA)pour évaluer l'impact des mesures prises pourprotéger les pauvres contre les effets néfastesde l’augmentation rapide des prix de l'énergieet des denrées alimentaires. Cette analyse arévélé que, tout en atténuant globalementl'impact négatif de cette augmentation lesmesures ont été mal ciblées. Elles ont à peuprès compensé la hausse du coût de la vie

résultant de la flambée des prix observée à la finde 2007, mais près de 55 pour cent desavantages ont surtout bénéficié aux ménagesles plus aisés (les 40 pour cent situés dans latranche supérieure de l’échelle du bien-être (FMI2008b). La subvention au prix du riz bénéficieplus aux deux quintiles les plus pauvres de lapopulation mais pas les mesures prises pour lesprix du lait en poudre et du pain qui profitentsurtout aux segments les plus riches. En matièred'énergie, ce sont les ménages plus riches quisont les plus durement touchés par lesaugmentations des prix de l'énergie, à la foisdirectement et indirectement par l'effet sur lesautres biens de consommation. La subventiondu gaz butane bénéficie davantage aux foyersles plus aisés, tandis que l’exonération de taxesur le pétrole lampant est plus bénéfique pourles pauvres. Il a été, ainsi, conclu que cessubventions mal ciblées et fragmentéesn’étaient pas efficaces bien que coutant près de3% du PIB du pays. L'un des principauxconstats qui a découlé de cette analyse estqu’un système d’allocations en espèces(conditionnel) peut être beaucoup plus rentableque les subventions et autres mesurespolitiques prises pour protéger les pauvres (FMI2008b). Toutefois la réaffectation dessubventions vers d’autres formes de protection,que de nombreuses personnes considèrentpeut-être comme des droits acquis, peut êtreproblématique et nécessiter des négociationspolitiques. En conséquence, il a étérecommandé de réaménager les subventions etexonérations fiscales pour les rendre plusfavorables aux pauvres.

Le processus d'élimination de ces subventions acommencé vers la fin de 2008 mais cela a étéaccompagné de signes de mécontentement.Pour cette raison, mettre en place un systèmeclair et efficace ciblant les plus pauvres pourraitaider à réduire les problèmes découlant del'élimination des subventions. Dans ce cadredes preuves solides sur les véritables avantagespour les pauvres de ce type d’interventions deprotection sociale, comme les programmes detransfert d’espèces, peut s’avérer être un outilutile pour obtenir le soutien a ce changement.

64 LA PROTECTION SOCIALE DES ENFANTS EN AFRIQUE DE L’OUEST ET DU CENTRE : CAS DU SÉNÉGAL

6.4 Progrès réalisés dans la gestion

des ressources publiques

La recherche d'une marge de manœuvrebudgétaire pour la protection sociale comportenécessairement l’étude des méthodes que l’onpeut utiliser pour améliorer la gestion desressources publiques de sorte que l’on optimisel’utilisation des ressources disponibles.

Le Sénégal a réalisé des grands progrès dansla transparence et la bonne gouvernance desressources publiques, en particulier en ce quiconcerne la gestion des finances publiques.Par exemple, les données de base agrégéessont disponibles sur le site Internet du MEF.Toutefois, il est reconnu que le pays doitencore faire des progrès car il existe encoredes problèmes en termes de disponibilité dedonnées qui est une conditionnalité pourl’obtention de l'appui de certains bailleurs defonds (FMI, 2008). Par exemple il est difficiled’accéder aux données ventilées sur le budgetet les dépenses et il n’y a pas eu d’audit descomptes par le Parlement en fin d'exercicedepuis les années 1990. Ceci montre lafaiblesse des mécanismes pour assurer latransparence et la responsabilisation dans lesystème budgétaire, et par conséquent celaoffre moins de possibilités pour réduirel’inefficacité budgétaire des allocations et desdépenses. Il est aussi difficile d’évaluer lephénomène d’évasion de fonds publics et sonimportance en raison de la faiblesse desmécanismes de contrôle.

6.5 Visibilité des enfants en matière

de budgets et de dépenses de

protection sociale

Compte tenu de la situation de pauvreté et devulnérabilité des enfants au Sénégal, telle queprésentée dans le chapitre 4, il est important deveiller à ce que des financements adéquats poursatisfaire les besoins des enfants soient inclusdans le budget national. Le Réseau desParlementaires sur la Population et le

Développement à travers un partenariat avecSave the Children Norvège et avec l’appui dePlan International a conduit une analyse desbudgets consacrés aux enfants avec l’objectifdans une seconde étape d’influencer lesvolumes des montants alloués pour mettre enplace des mécanismes de traçabilité de cesallocations budgétaires et de leur utilisation.Bien qu’elle n’en soit qu’à ses débuts, cetteinitiative pourra être utile pour l'améliorationdes ressources destinées à la protection socialeaxée sur les enfants:

• En se basant sur les conclusions de la revueannuelle du DSRPII (République du Sénégal2008b) qui indiquent la faiblesse desressources allouées et la faible mobilisationdes fonds pour la protection sociale despopulations vulnérables, une initiativeconjointe de parlementaires et de membresde la société civile peut contribuer àaugmenter les allocations budgétaires etpeut améliorer l'utilisation de ces ressourcespour la protection sociale des enfantsvulnérables.

• Le groupe parlementaire peut aussirecommander l’analyse et la réaffectation deressources en argumentant sur les limites dela marge de manœuvre budgétairedisponible. Par exemple, le groupe pourraitconseiller aux départements sectoriels defaire une analyse du rapport coût-efficacitédes programmes actuels disponibles pour lesenfants et sur la base des résultats de cesanalyses proposer de rationaliser ceux qui nesont pas efficaces pour canaliser lesressources mobilisées sur des programmesmieux ciblés et plus efficaces pour réduire lapauvreté et la vulnérabilité des enfants.

65Analyse de la marge de manoeuvre budgétaire pour les programmes de protection sociale

6.6 Conclusion

Les bonnes performances macroéconomiquesdu Sénégal, l'accroissement des flux enprovenance de l'étranger (sous la forme d'aideet d'investissement) et l'engagement de l'État àaugmenter les dépenses dans les secteursprioritaires permettant la réduction de lapauvreté (y compris par les services sociaux debase), créent un environnement favorable pourmobiliser plus de revenus pour la protectionsociale. Cependant, cette recherche doit aussiprendre en compte qu’une augmentation dudéficit budgétaire du Sénégal non raisonnablepeut créer des problèmes de viabilité macro-économique et de pérennité de la dette à moyenet à long terme.

Bien que des dépenses au dessus des niveauxactuels ne soient pas recommandées, il paraitpossible de dégager une marge de manœuvrebudgétaire en améliorant l'efficience etl'efficacité des dépenses publiques. Cecipermettrait de libérer des ressources pouvantêtre utilisées pour la protection sociale et pourles autres interventions prioritaires permettantla réduction de la pauvreté. Il faudra, aussi,promouvoir la transparence et laresponsabilisation au sein du systèmebudgétaire. Cette transformation parait possiblesur le moyen terme.

Les différentes parties prenantes impliquéesdans le développement du Sénégal, y comprisle FMI, la Banque mondiale, l’UNICEF, le MEF etle MFSNEFMF, estiment qu’«une marge demanœuvre budgétaire» pour la mise en placed’un programme d’allocations en espèces peutêtre créée, notamment par le biais de

réaffectations provenant de programmes lesmoins prioritaires et les moins efficaces, pourautant qu'il soit démontré que l’allocation enespèces puisse être un moyen plus rentable etplus efficace pour réduire la vulnérabilité desplus pauvres. Cela nécessitera une analyseapprofondie et des arbitrages à opérer entre lespriorités en matière de dépenses telles quecelles engagées pour la fourniture de servicessociaux de base. Une partie de cette analysepeut être trouvée dans le chapitre suivant.

66 LA PROTECTION SOCIALE DES ENFANTS EN AFRIQUE DE L’OUEST ET DU CENTRE : CAS DU SÉNÉGAL

7. Analyse des allocations en espèces comme

mécanisme de lutte contre la pauvreté des enfants

Au cours des dernières années, un nombrecroissant de pays en développement a mis enplace sur de grandes échelles des programmesd’allocations en espèces ayant pour objectif laréduction de la pauvreté et de la vulnérabilité.Dans de nombreux pays, les enfants sont lacible privilégiée de ces programmes car: i) lesenfants constituent un groupe particulièrementvulnérable, sur lequel la pauvreté a un fortimpact, ii) les manifestations de la pauvreté surles enfants peuvent avoir des effets à long termequi handicapent leur développement et peuvent

faciliter, y compris par latransmission intergénérationnellede la pauvreté; iii) la réduction dela pauvreté des enfants estimportante car elle permet derompre le cycle de transmissionintergénérationnelle de lapauvreté qui est commun à denombreux pays endéveloppement; iv) l'améliorationde la nutrition, de la santé et del'éducation des enfants peutpermettre aux personnes ensituation de pauvreté d'échapperà celle-ci et de s’installer dans denouvelles logiques contribuantainsi à la croissance et audéveloppement économique, etv) les programmes à grandeéchelle d’allocations sociales axéssur les enfants, tels queOportunidades au Mexique, BolsaFamilia au Brésil, Child SupportGrant en Afrique du Sud et Food /Cash for Education auBangladesh, montrent que cesderniers sont des optionséconomiques et politiquesréalisables et souhaitables dansles pays où les revenus sontmoyens ou faibles (Barrientos etDeJong 2006).

Un faisceau croissant d’élémentsprobants démontre que lesallocations sociales – ce quisignifie littéralement l’allocation

ou subvention en espèces, avec ou sansconditions - peuvent avoir des effets positifs surla réduction de la pauvreté chez les enfants. Il aété prouvé que les allocations en espècesfournies aux familles sont la plupart du tempsutilisées prioritairement pour les dépensesd’alimentation, pour l’achat de vêtements et desemences et pour couvrir les coûts des servicescomme l'éducation et la santé. Les évaluationsdes programmes de subventions aux enfants enAfrique du Sud et des allocations socialesconditionnelles en Amérique latine montrent

67Analyse des allocations en espèces comme mécanisme de lutte contre la pauvreté des enfants

que les allocations en espèces, combinées à desinvestissements additionnels dans les servicesde base, sont un outil efficace dans la réductionde la pauvreté des enfants, y compris pourl'amélioration de la nutrition de l'enfant,l'enregistrement des naissances, le taux descolarisation ainsi que le taux de survie(Barrientos et DeJong 2006; Adato Basset et2007; Jones et al 2008).

Au Sénégal, tant la SNPS que le DSRPII dans sonaxe 3 prévoient des dispositions pour la mise enplace de mécanismes d’allocations en espèces.

• La SNPS indique que l'un des mécanismespermettant d’atteindre l'objectif d'atténuationdes risques auxquels sont confrontés lesgroupes vulnérables serait de «renforcer lesmécanismes d’allocation directe de ressourcesaux populations vulnérables».

• Le DSRPII, lui, prévoit d’«assurer l'accès desgroupes vulnérables aux biens et services età la pleine jouissance de leurs droits. Durantla période de mise en œuvre du DSRP,chaque année, au moins 500.000 famillesvivant en situation de pauvreté extrêmeauront reçu une allocation de ressourcesleur permettant de gagner un accès durableaux services sociaux de base ».

Ces références montrent qu’au cours des quatredernières années le Sénégal a mûri la réflexion surla mise en place d’un programme d’allocationsd’espèces comme mécanisme de réduction de lapauvreté et de la vulnérabilité. Ce mécanisme a étéaussi discuté lors de la revue annuelle (2007) duDSRPII. De plus, un nombre croissant detechniciens du gouvernement (Cellule de réductionde la pauvreté, MEF et MFSNEFMF) et des bailleursde fonds ont mentionné lors des entretiens qu'il yavait urgence à explorer une telle alternative.Compte tenu de la lenteur des progrès réalisés parla SNPS au cours des deux années, l’allocation enespèces est de plus en plus considérée comme unmoyen approprié pour mobiliser les ressourcespour la protection sociale et atténuer lavulnérabilité des plus pauvres et des exclus.

Comme indiqué dans les chapitres précédents,le Sénégal a enregistré des progrès significatifsdans la fourniture de services de base(République du Sénégal, 2006b). Cependant, lescoûts directs et indirects de ceux-ci sont desobstacles qui réduisent leur impact (Républiquedu Sénégal 2007). Dans un pays où les modèlesde financement de la santé (par exemple lesmutuelles de santé) sont principalement axéssur la demande, où il y a constamment desrisques importants pour les prix des denrées depremière nécessité, et où la pauvretééconomique est un déterminant de lavulnérabilité et une cause de migration etdésintégration des filets de soutientraditionnels, les allocations en espècespourraient être une stratégie d'intervention utileapportant plus de cohérence au système deprotection sociale en tant que mécanismesimple et efficace de mobilisation desressources pour les vulnérables.Bien qu’aucun programme d’allocationsd’espèces n’ait fait l'objet de discussionsapprofondies, les modèles les plus connus sontles allocations sociales conditionnelles quiexistent dans les pays d'Amérique Latine etdans lesquels les femmes sont les bénéficiairesde l’allocation. Celles-ci servent de revenu desoutien aux ménages et conditionnent lafréquentation scolaire des enfants et/oul’obligation de satisfaire aux examens de santéréguliers. Au début de l’année 2007, la Cellule decoordination de l’axe 3 du DSRPII a développéune proposition pour un programme piloted’allocations sociales conditionnellesprésentant ces caractéristiques (Dia 2007).L’étude de la faisabilité de ce type de modèlepourrait être poursuivie.

7.1 Les programmes actuels

d’allocations d’espèces au Sénégal

La recherche de projets de protection sociale apermis d’identifier plusieurs programmes àpetite échelle utilisant le mécanismed’allocations en espèces. Ci-dessous sontprésentés deux programmes dont un est mis enœuvre par l’état.

68 LA PROTECTION SOCIALE DES ENFANTS EN AFRIQUE DE L’OUEST ET DU CENTRE : CAS DU SÉNÉGAL

7.1.1 Le Programme de renforcementdes revenus des familles dans lesVillages d'Enfants SOS

Les Villages d'Enfants SOS sont une organisationnon gouvernementale internationale dedéveloppement social dont les activités sontaxées sur les enfants dépourvus de protectionparentale et les enfants de familles en situationdifficile. Leurs activités, basées sur une approchefamiliale, visent à fournir une assistance delongue durée aux enfants qui ne peuvent plusvivre au sein de leur famille biologique. Dans les«villages» SOS, les enfants grandissent dans unenvironnement stable et sont pris en chargeindividuellement jusqu'à ce qu'ils deviennent dejeunes adultes indépendants. Au Sénégal les «villages SOS » sont implantés dans des zonespauvres et disposent d’un «programme derenforcement des familles» développé pourfournir aux familles et communautés les moyensde protéger et assister efficacement les enfants.Ce programme est mis en œuvre depuis janvier2008 en partenariat avec les autorités locales etdes agences de services sociaux. Le programme àDakar comprend la fourniture d'allocations enespèces aux personnes « soutiens de familles »avec l’objectif d’aider les familles à subvenir auxbesoins des enfants vulnérables dans les Villagesd'Enfants SOS. Les cibles prioritaires sont lesorphelins ou les enfants vulnérables âgés de 0-18ans dans le quartier de Grand Dakar. Leprogramme fournit une allocation avec lacondition principale de maintenir les enfants àl'école. Les allocations sont d’un montantmaximum de 3.500 FCFA par mois et par élève(pas plus de trois élèves par famille dont unmaximum de deux garçons). Un intérêt particulierest accordé aux filles et aux familles dont les chefsde ménage sont des femmes et se trouvant ensituation de vulnérabilité. L’allocation est verséedirectement aux mères, qui remplissent aupréalable un formulaire au niveau de l'école deleurs enfants. Le programme coopère avec lesagents du MFSNEFMF et le comité des parentsd’élèves pour identifier les bénéficiaires del'allocation. Les bénéficiaires sont sélectionnéssur les critères suivants: i) la situation de famille:enfants issus de familles monoparentales; ii) la

situation de l’emploi des parents : chefs de famillechômeurs de longue durée ou ayant un emploiprécaire; iii) le niveau de revenu, famillesmanquant gravement des ressources pourprendre soin de leurs enfants et iv) les conditionsde logement: familles vivant dans des logementsprécaires. Le programme offre, aussi, plusieursautres services, comme le paiement des frais descolarité; une ration alimentaire mensuelle; lepaiement des frais médicaux ; une formation pourles parents et l’allocation d’une subvention nonremboursable pour mener une activitégénératrice de revenus; la formation des OCBlocales pour prendre en charge le programme.Pour continuer à bénéficier de l’assistance, lesfamilles doivent remplir 3 conditions : i) faire queles enfants assurent au moins 80% de présenceen classe et obtiennent des notes proches de lamoyenne de la classe ; ii) respecter le programmede vaccination des enfants, et iii) qu’aucun enfantdu ménage ne soit en situation de travail.

Ce programme étant relativement récent (sixmois de fonctionnement), on ne connait pasencore l’impact qu'il a sur les bénéficiaires. Il seraintéressant de suivre cette initiative pour voir sonimpact sur la pauvreté des ménages et la façondont le soutien contribue au revenu du ménage etsurtout pour évaluer son impact sur la demandede services des enfants. Toutefois, compte tenu desa structure institutionnelle (dans le cadre desVillages d'Enfants SOS), et étant donné que lesallocations sociales ne proviennent pas de fondspublics, les enseignements tirés en termes demise en œuvre du programme ne seront pas toustransférables.

7.1.2 La Direction Nationale de l'assistance sociale (organisme étatique)

Comme indiqué dans le chapitre 5, la Directionnationale de l'assistance sociale relevant duMFSNEFMF peut verser une allocation socialeaux personnes «démunies» ou «indigentes».Les personnes qui se considèrent commerelevant de ces catégories et qui veulentbénéficier des prestations doivent se rapprocherd'un CPRS où un travailleur social évaluera leur

26 Les estimations ont été faites en utilisant la fonction Foster-Greer-Thorbecke, où la fonction pauvreté p(x,z), est spécifiée comme p(x,z)=1/n ∑q¬i=1 (z - xi /z)· ,où xi est un revenu ou une consommation individuelle, z est le taux de pauvreté , q est le nombre de personnes pauvres. Pour · = 0, p(.) alors que · = 1, p(.) yields the poverty gap measure. Dans notre cas la fonction FGT pauvreté à l’avantage d’avoir des mesures de pauvreté par sous groupes. Voir Foster et al (1984).

69Analyse des allocations en espèces comme mécanisme de lutte contre la pauvreté des enfants

situation et décidera de leur éligibilité. Si celaest le cas, un certificat d’indigence est alorsémis (si celui-ci est délivré par le maire, lepaiement de la subvention doit être supportépar la collectivité locale, s’il est approuvé par lepréfet, le versement de l’allocation sera de laresponsabilité de l'État). Ayant acquis un«certificat d'indigence», l’individu et lespersonnes à sa charge peuvent avoirgratuitement accès à des soins de santé de baseet sont en droit de recevoir une allocation(jusqu'à 200.000 FCFA par an). Cette allocationest attribuée au bénéficiaire principal et non enfonction du nombre d'enfants, ce qui pénaliseles familles les plus nombreuses qui bénéficientainsi de moins de ressources. Si la procéduresemble rodée, la répartition des responsabilitésentre les différents acteurs reste floue. Lesprestations fournies par le biais de ceprogramme restent limitées à ceux qui ontconnaissance de son existence, car il n'y a pasde campagnes de sensibilisation ou devulgarisation qui pourraient aider à améliorer leciblage du programme.

En plus de son approche aléatoire et de sesfaibles moyens, ce programme a été développéavec une perspective d’«assistance/charité»plutôt que sur une approche «fondée sur lesdroits des titulaires». Dans ce programme, lespopulations cibles ne sont pas considérées parl'État comme des titulaires de droits, éligibles àun niveau de vie minimum garanti, mais plutôtcomme des bénéficiaires d'un système decharité. Les modalités du financement de ceprogramme en limitent aussi la couverture. Leniveau de dépenses et la taille de la populationqui en bénéficie dépendent de la taille desressources que la Direction parvient à mobiliserà la fin d'un processus très complexe denégociations budgétaires dans lequel leministère ne détient pas un grand pouvoir denégociation. Comme il n’a jamais été évalué, ilest difficile d’estimer ses avantages et sesrésultats et son ancienneté a empêché touteidée d’extension. Les constats fait lors de lapréparation de ce rapport amènent à penser quece programme nécessiterait un renforcementstructurel si on voulait le transformer.

En résumé, on peut dire que malgré une volontéconstante de mettre en place des programmesd’allocations sociales, les initiatives mises enœuvre, à ce jour, n’ont pas fourni les informationssur leurs impacts et avantages. Le développementd'un programme pilote d’allocations socialespourrait être un moyen utile pour tester uneapproche plus systématique de protection sociale.Un tel programme répondrait de manière intégréeà une série de vulnérabilités en lieu et place de lagamme des programmes actuels qui sont de faibleenvergure. Pour que ce programme puisse générerdes résultats, il est important d'investir dans ledéveloppement d'un système solide (ciblage,critères de sélection, canaux de transfert desallocations, structuration institutionnelle, diffusionet mécanisme intégré de Suivi et Evaluation) qui seconcentrerait sur la réalisation de quelques uns desobjectifs de la SNPS et serait ancré dans l’axe 3 duDSRP. Cela justifierait son accès aux fonds publicset, ainsi, il pourrait constituer une impulsionpositive pour le déploiement de la SNPS sur deplus grandes échelles. Cela faciliterait aussi lamobilisation des ressources budgétaires etl'intégration d’approches multisectorielles pour laréduction de la pauvreté et de la vulnérabilité. Lamise en place d’un programme pilote d’allocationssociales bien conduit pourrait fournir les élémentsqui permettraient de dissiper les préoccupationsexistantes sur une telle intervention, notammentcelles qui concernent sa viabilité financière à longterme ainsi que le choix de l'État d’étendrel'assistance sociale au lieu de promouvoir ledéveloppement.

En particulier, et comme cela sera analysé dans leschapitres suivants, deux des principaux domainesd'action prioritaires de l’axe 3 sont le financementde la santé et la protection des groupesvulnérables, y compris les enfants très pauvres etdémunis. Les enfants représentent 58% de lapopulation sénégalaise et paient un lourd tribut à lamortalité et à la maladie. Le fort taux de mortaliténéonatale et infantile, ainsi que les taux élevés demorbidité chez les enfants sont le résultat deplusieurs facteurs dont un faible environnement,des pratiques familiales non adéquates, un faibleaccès aux services de soins de santé primaires

70 LA PROTECTION SOCIALE DES ENFANTS EN AFRIQUE DE L’OUEST ET DU CENTRE : CAS DU SÉNÉGAL

mais aussi une faible disponibilité des soins dueaux coûts de fonctionnement élevés. Sur le plan dela protection on constate qu’un nombre croissantd'enfants quittent leurs familles tombées dans lapauvreté pour rechercher de meilleuresopportunités pour eux ou leurs familles. Cetteséparation accroît leur vulnérabilité car nonseulement elles les exposent à toutes sortes derisques mais les empêche de surcroit d’aller àl’école. Un programme d’allocations sociales bienciblé sur les enfants vulnérables pourrait servir àrégler en même temps plusieurs des problèmesénumérés ci-dessus en termes de santé et deprotection et d’éducation. Un tel système pourraitvenir, aussi, en appui au projet d’extension desmutuelles car le revenu additionnel fourni auxménages permettrait de payer les frais d'adhésionaux mutuelles (en particulier ceux des enfants)réduisant cet obstacle à l'accès aux soins.L‘allocation sociale pourrait se substituer, oucompenser au moins en partie, le revenu querecherchent les enfants en quittant leur famille.Comparé aux mécanismes actuels, Il constitueraitun moyen plus simple et plus efficace pour luttercontre l’exclusion des personnes démunies.

Ces allocations peuvent également servir, commeelles le font dans d'autres pays, de mécanismespour augmenter les taux d’inscription scolaire desenfants et pour assurer leur maintien à l'école. AuSénégal le faible taux de maintien est dû en partieaux contraintes qui pèsent sur la demande commeles coûts d'opportunité élevés (selon les donnéesde l’ESPS 2005-2006, 15,6% des enfants quiabandonnent l'école primaire sont engagés dansune forme de travail) et les frais indirects descolarité tels les livres et les uniformes (5,6% desenfants citent le coût comme la cause de leurabandon scolaire). Cependant, plus de donnéessont nécessaires pour mieux comprendre lescauses des faibles taux de maintien et pour voircomment les allocations sociales peuventcontribuer à faire baisser les barrières financières àl'éducation.

L'introduction d'un programme d’allocationssociales semble, ex-ante, être aussi un bon moyenpour canaliser les fonds en faveur de la protectionsociale. Un programme pilote qui recueillerait

systématiquement des informations sur lesopportunités et les contraintes, sur les impacts surla pauvreté des ménages et sur l'évolution de lademande de services serait un bon point de départpour étudier la faisabilité d'un tel programme. Siun tel programme pilote devait être mis au point,l'UNICEF Sénégal pourrait jouer un rôle de conseiltechnique en fonction de son avantage comparatif:i) il pourrait contribuer à l’intégration d’uneapproche multisectorielle axée sur les enfants ; ii)compte tenu de l’expertise de l’UNICEF Sénégalen Suivi et Evaluation, il pourrait faire en sorte quele programme-pilote soit doté d’un cadre efficacedès le départ et c) Il pourrait contribuer àl'élaboration d'une cartographie et à la mise aupoint du système de ciblage des bénéficiaires, cequi permettrait de s’assurer que les ressourcesdisponibles pour le programme-pilote soientutilisées de façon à maximiser leur impact sur laprotection des enfants contre la vulnérabilité, lapauvreté et le manque d'accès aux servicessociaux de base.

7.2 Impact potentiel des allocations

sociales sur la pauvreté

Pour déterminer l’impact d’un programmenational d’allocations sociales ciblé sur lesenfants en termes de réduction de la pauvreté, onconduit des exercices de simulation quipermettent d’évaluer l'efficacité potentielle de cesprogrammes. Généralement, ces simulations fontune large analyse de la pauvreté et lavulnérabilité, comportent des études sur lesinfrastructures et les services sociaux de baseainsi que des études sur leur capacité à fournir lesservices. Les simulations ex-ante aident lesdécideurs en leur fournissant les informations surles impacts possibles sur la réduction de lapauvreté, sur l'efficacité respective des différentesoptions et sur le niveau de ressources nécessaires(Stewart et Handa 2008; Kakwani et al 2005).

Les allocations sociales sont des subventionsversées en espèces ou en nature à des ménagesou à des individus aux fins de compléter leursrevenus ou de soutenir leur niveau deconsommation. La simulation compare lesmesures de la pauvreté avant et après le

21 Les paramètres et mesures ont été établis pour permettre de les comparer avec une étude similaire faite pour la République Démocratique du Congo. See Notten (2008).22 Pour faire la comparaison avec l’étude de la République Démocratique du Congo, nous avons répliqué la simulation basée sur la méthode proxy means test.

71Analyse des allocations en espèces comme mécanisme de lutte contre la pauvreté des enfants

versement des allocations sociales. Elle netient généralement pas compte desréponses comportementales desménages aux allocations car ces dernièrespeuvent influencer positivement ounégativement la réduction de la pauvreté.En effet, des études ont montré que desallocations régulières et fiables peuventaméliorer la productivité des ménages, enparticulier dans les zones rurales car ellesont un effet multiplicateur sur les revenus(Sadoulet et al 2001). Par contre, si lesallocations sont mal gérées, l'impact sur laconsommation alimentaire peut êtreinférieur au montant de l’allocation. Lessimulations ci-dessous ne tiennent pascompte de ces réponsescomportementales qui doivent fairel’objet de recherches spécifiques.

Les simulations utilisent les données dela base de données de l’ESPS 2005-2006(dernières enquêtes représentatives au niveaunational). Le tableau 16 fournit des statistiquesdescriptives issues de cette base de données.

7.2.1 Les mesures de la pauvreté

L'analyse présentée ci-dessous se concentre surdeux mesures de la pauvreté : l’incidence de lapauvreté qui indique la part de la population vivantau dessous du seuil de pauvreté et l’écart depauvreté qui mesure le déficit moyen par rapportau seuil de pauvreté et donne des indications sur lasévérité de la pauvreté. Pour un ménage, l'écart depauvreté est considéré comme étant la différenceentre le revenu observé ou la consommationobservée et le seuil de pauvreté alimentaire. Lecalcul est fait en additionnant les écarts depauvreté de tous les ménages pauvres, divisés parl'ensemble de la population. On obtient unemoyenne qui est présentée comme une fraction duseuil de pauvreté et qui décrit l'écart de pauvretémoyen parmi la population et le montant à partirduquel un ménage moyen serait dans la pauvretési la somme des écarts de pauvreté devait êtrerépartie uniformément entre la population,proportionnellement au seuil de pauvreté,équivalent a 137,809 FCFA par an.

La simulation compare le taux de pauvreté etl'écart de pauvreté au sein de l'échantillon, puisajoute les allocations de tous les ménagesbénéficiaires, et ensuite recalcule la mesure de lapauvreté. Les mesures de la pauvreté sontcalculées sur la base des dépenses des ménagespar habitant du ménage . Dans l’exercice les calculsont été basés sur les seuils nationaux de pauvreté.

7.2.2 Options de programmes

Deux options de programmes ont fait l’objet desimulation:

1. Programme Universel de Prestations pour lesEnfants (PUPE). Dans cette option, on supposequ’une allocation équivalente à un tiers du seuilde pauvreté alimentaire est versée à chaqueenfant au sein de l'échantillon.

2. Programme Sélectif de Prestation pour lesEnfants utilisant des tests par approximationdes revenus (PSPEtar). Dans cette option, onsuppose qu’une allocation équivalente à untiers du seuil de pauvreté alimentaire estversée pour chaque enfant de moins de 14

Sénégal 2006

Individus observés (nombre) 123,558

Ménages observés (nombre) 13,568

Ménages avec des enfants âgés de 0–14 ans (nombre)

11,956

Pourcentage de ménages avec des enfants âgés de 0–14ans au sein de l’échantillon (%)

89.5

Enfants de 0–14 ans (nombre) 52,187

Pourcentage d’enfants au sein de l’échantillon (%) 42.6

Dépense annuelle moyenne par tête des ménages (FCFA) 320,215

Dépense annuelle moyenne par tête des ménages pauvres (FCFA)

132,148

Montant annuel du seuil de pauvreté alimentaire adulte (FCFA)

137,809

Tableau 16

Statistiques descriptives

Source: Données de l’ESPS 2005-2006, calculs effectués par Barrientos et Bossavie (2008).

72 LA PROTECTION SOCIALE DES ENFANTS EN AFRIQUE DE L’OUEST ET DU CENTRE : CAS DU SÉNÉGAL

24 Il y a plus de coûts récurrents pour un programme en cours, parce que l'introduction d'un programme aura des coûts plus élevés au départ, pour couvrir la formation, l'information, les systèmes deprestation, et les informations préliminaires pour le suivi et l'évaluation

ans vivant dans un ménage identifié commepauvre avant le versement de l’allocation.Les tests par approximation des moyenssont utilisés pour reproduire les conditionsproches du réel quand on veut apprécier untransfert. Ces tests utilisent un large éventailde caractéristiques des ménages, enexcluant toutefois les revenus et lesdépenses. Ils sont utilisés dans les pays où ilest impossible de procéder à une estimationdes revenus moyens en raison du grandnombre de personnes vivant du secteurinformel et pour lesquelles on ne peut avoirde données sur les revenus fiables. Leniveau de pauvreté est déterminé enfonction de caractéristiques liées à leursconditions de vie. Dans cette simulation, onutilise un ensemble de variables observéesdurant une enquête conduite auprès desménages pour évaluer le niveau de bien-êtredu ménage. Ces variables portent aussi surla localité, le logement, les avoirset les données démographiques.Comme la classification de cesvariables par les agentscollecteurs des donnéesd'enquête est susceptibled'appréciation subjective, onconsidère qu’ils ne sont pasexhaustifs et exactes et qu’ilspermettent des erreurs d'inclusionet d'exclusion. Pour cesconsidérations il a été utilisé pourcette simulation un facteur derégression de ces variables pourestimer les dépenses desménages. Ensuite les valeurs ontété calculées pour estimer l'étatde pauvreté du ménage. Il estimportant de noter que, comptetenu de la difficulté d'identifier demanière précise les ménagespauvres à la fois sur le planstatistique et sur le terrain (où lescaractéristiques du ménagedoivent être vérifiées), ce testcomporte des erreurs d'inclusionet d'exclusion.

Impact sur les mesures de la pauvreté

Les résultats issus des simulations d'impact desallocations sur les mesures de la pauvreté sontprésentés dans le tableau 17 sur la base d’uneallocation fixée à 30% du seuil de pauvretéalimentaire, ce qui devrait permettre de fournirune allocation permettant de couvrir les besoinsalimentaires des enfants. Comparé à un niveau deréférence, l'ajout de l’allocation aux dépenses duménage peut produire une réduction significativedes agrégats de pauvreté au Sénégal:

• L'introduction d'un PUPE peut conduire àune réduction des taux agrégés de pauvretéde 15,2%.

• Un système utilisant pour la sélection desbénéficiaires les tests par approximation desrevenus (PSPE) aurait un impact plus faiblesur les taux agrégés de pauvreté (8,3%).

AllocationsDonnées de

base PUPE PSPEtar

Allocation par enfant en % du seuil de pauvretéalimentaire

30 30

Allocations annuelles en FCFA (mensuel)

41,342 41,342

Impact sur la pauvreté

Incidence de pauvreté

Ensemble des individus (%) 39.9 33.8 36.6

Réduction de la pauvreté (%) 15.2 8.3

Ensemble des enfants (%) 44.4 36.9 39.8

Réduction de la pauvreté (%) 16.9 10.4

Ecart de pauvreté

Ensemble des individus (% du seuil de pauvreté)

17.3 12.1 13,5

Réduction de la pauvreté (%) 30.0 22.0

Ensemble des enfants (%) 19.3 13.0 14.7

Réduction de l’écart de pauvreté (% du seuil depauvreté)

32.6 23.8

Source: Données de l’ESPS 2005-2006, calculs effectués par Barrientos et Bossavie (2008).

Tableau 17

Résultats de la simulation d’impact sur la

pauvreté pour le Sénégal

73Analyse des allocations en espèces comme mécanisme de lutte contre la pauvreté des enfants

Comme expliqué ci-dessus, le bénéfice seralimité parce que ce type de mécanismecomprend des erreurs d’inclusion etd’exclusion qui feront que cela ne sera passeulement les pauvres qui jouiront desbénéfices alloués. Cependant l'impact d'uneallocation sur l’incidence de la pauvreté chezles enfants serait plus grand que surl'ensemble de la population, en raison del'incidence plus élevée de la pauvreté chezles enfants :

• L'introduction d'un PUPE pourrait conduire àune réduction du taux de pauvreté chez lesenfants de 16,9%.

• Un PSPE où la sélection est faite sur la base detests par approximation des revenus a unimpact plus faible sur la pauvreté globale:10,4%.

L'impact de l’allocation sur l’écart de pauvretéest plus grand que sur l'incidence de lapauvreté. Le fait que l’allocation soit fixée à 30%du seuil de pauvreté signifie que l’allocation nesuffit pas à elle seule à amener les enfantsvivant dans les ménages pauvres au-dessus duseuil de pauvreté.

• L'introduction d'un PUPE pourrait conduire àune réduction de l'écart de pauvreté global de30% au Sénégal.

• Un PSPE où la sélection est faite sur la base detests par approximation des revenus a unimpact plus faible sur l'écart de pauvretéglobal : 22%.

L'impact sur l’écart de pauvreté de l’allocationchez les enfants serait encore plus important:

• L'introduction d'un PUPE pourrait conduire àune réduction de l’écart de pauvreté chez lesenfants de 32,6%.

• Un PSPE où la sélection est faite sur la base detests par approximation des revenus a unimpact plus faible sur l’écart de pauvreté chezles enfants: 23,8%.

7.2.3 L’efficacité de la réduction de la

pauvreté

La simulation analyse aussi l’efficacité d'uneallocation axée sur les enfants en termes deréduction de la pauvreté et d’efficacitérespective des différentes options deconception. Les résultats de cet exercice sontrésumés dans le tableau 18. Les simulationsfournissent également des informations surdeux questions essentielles: quelles sont lesressources nécessaires pour soutenir la mise enplace d'une allocation axée sur les enfants œ Etdans quelle mesure ces ressources bénéficient-elles aux ménages vivant dans la pauvreté ?

La première série de chiffres a pour but defournir des informations sur le niveau de

Mesure de référence PUPE PSPEtar

Coûts

Dépenses annuelles de prestations (en milliards de FCFA)

211 118

Coûts d’administration (en % desdépenses annuelles de prestations)

10 15

Coûts d’administration annuels (enmilliards de FCFA)

21.1 17.7

Dépenses de programmesannuelles

(en milliards de FCFA) 232.1 135.7

(en % du PIB) 6.4 3.7

Efficacité de la réduction de la pauvreté

Efficacité du ciblage

Erreur d’inclusion (% des enfantsinclus mais non pauvres)

55.6 23.9

Erreur d’exclusion (% des enfantspauvres mais exclus)

0 12.3

Ratio coût/bénéfice (milliards de FCFA requis pour réduirel’écart moyen de pauvreté d’un point de pourcentage)

Ensemble des individus 44.6 35.7

Ensemble des enfants 36.8 29.5

Tableau 18

Ratio coût / efficacité, résultats de la

simulation pour le Sénégal

Source: données ESPS 2005-2006, calculs effectués par Barrientos etBossavie (2008).

74 LA PROTECTION SOCIALE DES ENFANTS EN AFRIQUE DE L’OUEST ET DU CENTRE : CAS DU SÉNÉGAL

ressources nécessaires pour financer lesallocations. Ceux-ci sont calculés en nombrede prestations multiplié par la valeur del’allocation. Les coûts d'administration et deprestation du programme d’allocations sontfixés à 10% des dépenses d’allocations pourle PUPE et à 15% pour les programmessélectifs. Les coûts opérationnels de lasélection sont donc supposés être de 5% desdépenses d’allocations . Il faut ajouter à celales coûts de sélection associés aux erreurs desélection.

• Un programme d’allocations absorberait entre3,7% et 6,4% du PIB selon l’option deconception du programme au Sénégal.

• Les coûts associés à un PUPE sont estimés à6,4%. Les coûts associés à un PSPE où lasélection se fait par l'intermédiaire de tests parapproximation des revenus sont estimés à3,7% du PIB.

La deuxième série de chiffres fournit desinformations sur l’efficacité des différentesoptions de programmes d’allocations en termesde réduction de la pauvreté.

• Les erreurs d'inclusion mettent en évidence lepourcentage d'enfants qui sont inclus dans leprogramme mais ne sont pas pauvres. UnPUPE serait versé à tous et par conséquent ilbénéficierait également aux 55,6% d’enfantsqui ne sont pas pauvres.

• La sélection par l'intermédiaire de tests parapproximation des revenus inclurait dans leprogramme 23,9% d’enfants du Sénégal quine sont pas pauvres soit parce que les testseffectués suggèrent qu'ils sont pauvres, soitparce qu’au moment de la sélection desménages, la personne chargée de lasélection des ménages ciblés peut incluredes ménages qui ne remplissent pas lesconditions (soit à la suite d’une corruptionsoit d'une décision prise par la personne quifait la sélection).

Les tableaux comprennent également unemesure monétaire des coûts de la réduction del'écart de pauvreté, dans l'ensemble de lapopulation et chez les enfants.

Au Sénégal, l’utilisation d’allocations ciblées surles enfants d’un montant de 30% du seuil depauvreté permettrait une réduction de 1% del’écart de pauvreté chez les enfants pour un coûtde 36.8 milliards de FCFA avec un PUPE ; de 29.5 milliards de FCFA si l’on utilise un PSPE oùla sélection est effectuée par l'intermédiaire detests par approximation des revenus et de 14.3 milliards de FCFA si la sélection estparfaite.

Gasmann et Behrendt (2006) ont simulé l'impactd'une allocation pour les enfants d’un montantde 35% du seuil de pauvreté versée à tous lesenfants âgés de 7-14 ans au Sénégal en utilisantles données de l’ESAM II de 2001. Ils concluentqu’une allocation pour les enfants réduirait letaux de pauvreté chez les enfants de 30% etl'écart de pauvreté de 40%. Ces résultatscoïncident avec nos estimations pour le grouped'âge de 0-14 ans.

7.2.4 Questions relatives à la

conception du programme

Les simulations réalisées plus haut mettent enévidence plusieurs éléments à prendre encompte lors de la conception desprogrammes. Tout d'abord, un PUPE al'avantage de réduire les erreurs d'exclusionau minimum, mais il nécessite un budgetnettement plus élevé que celui nécessaire à unprogramme sélectif. L'éventail des estimationsde coûts et l'efficacité des programmessélectifs de prestations en matière deréduction de la pauvreté (avec une sélectioneffectuée à l‘aide de tests par approximationdes revenus) montre l'importance d’unebonne sélection si c'est l'option choisie.

Deuxièmement, les simulations reflètent unprogramme d’allocations couvrant tous lesenfants au sein du ménage. Des programmessimilaires dans d’autres pays ont, soit introduit

75Analyse des allocations en espèces comme mécanisme de lutte contre la pauvreté des enfants

une restriction du nombre d'enfants pouvantêtre soutenus dans chaque ménage, soit fixé unplafond des allocations totales qu'un ménagepeut recevoir.

Troisièmement, les simulations ont porté sur unmontant fixe d’allocation (par enfant) et n’ontpas envisagé la possibilité de varier le montantde l’allocation. Les allocations à montantvariable peuvent améliorer l'efficacité desallocations en matière de réduction de lapauvreté avec des catégories facilementidentifiables d'enfants montrant des niveauxdifférents de pauvreté ou de vulnérabilité : filles- garçons par exemple, ou enfants scolarisés -

enfants non scolarisés.

Ainsi, malgré les hypothèses qui restent àvérifier et les limites de ce type d'exercice, lessimulations suggèrent que des allocationssociales axées sur les enfants peuvent avoir unimpact significatif sur la réduction de lapauvreté et de la vulnérabilité au Sénégal.

7.2.5 Les allocations sociales

sont-elles financièrement

accessibles pour le Sénégal ?

Plusieurs éléments militent en faveur de lafaisabilité d’un système d’allocation sociale auSénégal. Premièrement, le Sénégal a debonnes performances macroéconomiques : i)la croissance a été de près de 5% au cours desdernières années et est projetée à 5,9% durantles prochaines années selon le scénario decroissance du DSRP ; ii) la performancebudgétaire est considérée comme bonne avecun ratio de recettes par rapport au PIB parmi

les plus élevés de la région. Les déficitsbudgétaires sont globalement sous contrôle,iii) la politique de développement estfortement appuyée par les financements desbailleurs et l'État s’est engagé à augmenterses dépenses dans les secteurs prioritaires deréduction de la pauvreté, notamment lesservices sociaux de base. Deuxièmement, laprotection sociale est considérée comme l’undes 4 piliers stratégiques du DSRP avec un fortpotentiel de mobilisation des ressources. Legouvernement dispose d’une marge demanœuvre pour la financer, pour peu que lagestion des dépenses publiques soitaméliorée par un meilleur ciblage desallocations budgétaires aux secteursprioritaires et par une meilleure utilisation dessubventions publiques destinées à réduire lavulnérabilité des plus pauvres. De plus, lesallocations sociales ont été identifiées par legouvernement et les bailleurs de fondscomme un mécanisme potentiellement plusefficace que le système de subvention auxproduits de première nécessité. Enfin, lessimulations effectuées dans les chapitresprécédents montrent que les allocations, enparticulier celles destinées aux enfants, ontdes effets puissants sur la réduction de lapauvreté des enfants et des familles. Letableau 19 montre les prévisions de dépensespour deux scénarios différents d’allocationssociales axées sur les enfants.

Le tableau 20 montre la répartition desdépenses de certains ministères du secteursocial, selon le CDMT 2008-2010.

Le tableau 21 présente le coût actuel dessubventions et les transferts, en part du PIB.

Programme

Coût total

(milliards

FCFA)

En part du total des

dépenses du

gouvernement*

En part du

PIB

PUPE 232.1 21.5% 6.4%

PSPEtar 135.7 12.6% 3.7%

Tableau 19

Estimation des coûts des deux scénarios

Source: Barrientos et Bossavie (2008) et CMDT 2008-2010 du Sénégal. Note: * Le chiffre pour le total des dépenses pour 2008 (prévisions) est de 1080.80 milliards de FCFA, selon le CDMT 2008-2010 du Sénégal.

Ministère 2008 2009 2010

Education 24.8% 27.5% 27.5%

MSPM 7.3% 7.7% 8.0%

MFSNEFM* 0.5% 0.5% 0.5%

Tableau 20

Ratios d’ensemble des dépenses programmées

du secteur social, 2008- 2010

Source: CDMT 2008-2010 du Sénégal.

76 LA PROTECTION SOCIALE DES ENFANTS EN AFRIQUE DE L’OUEST ET DU CENTRE : CAS DU SÉNÉGAL

Ces différents calculs permettent de faire lesconclusions suivantes quand à la faisabilitéfinancière des allocations sociales axées sur lesenfants (sur la base des éléments issus dessimulations précédentes)

• Un Programme Universel de Prestations pour lesEnfants (PUPE) ayant pour objectif de couvrir lapopulation de tous les enfants 0 a 14 ans semblehors de portée du pays car en absorbant 21,5% dutotal des dépenses, il coûterait autant que le totaldes dépenses du Ministère de l'éducation etconstituerait environ 27% des dépensesplanifiées. A elles deux ces composantesreprésenteraient la moitié des dépenses. Celan'est pas réaliste, compte tenu des autres besoinsde financement au Sénégal, y compris pour lesecteur social.

• Un Programme Sélectif de Prestation pour lesEnfants utilisant des tests par approximationdes revenus est aussi une option coûteusecompte tenu des autres postes de dépenses dusecteur social. Avec un coût d'environ 12% dubudget total, ce programme nécessiterait plusde ressources que les dépenses prévues pourle secteur de la santé (environ 7,5% desdépenses prévues en moyenne), et se situeraità environ du 3,7% du PIB. Le rapport coûtefficacité d’un programme sélectif indique quele montant des ressources nécessaires pourréduire le taux de pauvreté d’un point estinferieur comparé à celui du programmeuniversel. Bien qu’il ait un meilleur coût-efficacité, il est important de noter que leciblage est difficile à assurer, en particulierdans un contexte de faiblesses institutionnel etadministratif.

Il est important de noter la portée théoriquelimitée des deux simulations. Elles ont étéchoisies sur la base de leur comparabilitéavec les quatre autres études de cas de paysqui font partie de l’étude régionale sur laprotection sociale et non pas sur leuradaptabilité précise au contexte spécifique duSénégal. Toutefois, en tenant prenant encompte de la réflexion sur la marge demanœuvre budgétaire faite dans la section 6,

il parait possible de financer un programmede transfert d'espèces plus modeste que ceuxprésentés dans ces simulations qui peuventavoir des impacts importants sur la réductionde la pauvreté, mais sont trop ambitieux dansleurs objectifs comparés aux programmessimilaires mis en œuvre dans d’autres paysafricains. La couverture proposée est tropimportante en termes de couverture(universelle) et de niveau de prestations(3,445 FCFA par enfant et par mois) alors quepour les autres programmes en Afrique cesmontants sont d’environ 2 USD par membredu ménage (Mozambique) ou de 7 à 13 USDpar ménage au Ghana (Barrientos et Holmes,2007).

Avec 3,7% du PIB, le coût d’un programmesélectif de prestations pour enfants reste plusfaible que le niveau des dépenses courantesde transferts et subventions qui ont étéestimées à 4,7% du PIB en 2008 et auxquels ilfaudrait ajouter les subventions des vivres etde l'énergie qui ont coûté 1% du PIB. LeSénégal dispose d’une marge de manœuvrebudgétaire permettant la création d’unprogramme d’allocations sociales pour peuque l’on assure une réduction et/ou unmeilleur ciblage d’une partie des subventionset transferts existants (en gardant à l'espritque la réduction des transferts actuels devraitêtre significative et pourrait avoir des coûtspolitiques comme d’éventuellesmanifestations de la part des populationstouchées par la réduction des subventions).Comme expliqué précédemment, une partiedes ressources pour les allocations socialespourrait aussi provenir de gains d'efficacitédans les dépenses des autres secteurs, desorte que le montant de la réduction destransferts et des subventions existants n'auraitpas besoin d'être important. La réaffectationdes ressources provenant d'autres secteursimpliquerait un simple examen du budgetglobal pour identifier les secteurs utilisant laplus grande part des ressources publiques etpour déterminer le rapport de leurcoût/efficacité. Ceci pourrait être fait s'il y avaitune volonté politique de soutenir un

77Analyse des allocations en espèces comme mécanisme de lutte contre la pauvreté des enfants

programme d’allocations sociales axé sur lesenfants, compte tenu de son impact importantsur la réduction de la pauvreté. En raison ducaractère récurrent des prestations sociales àdestination des enfants, il ne serait pasopportun de financer les allocations socialespar le biais de l'aide. Ces financements desbailleurs peuvent être imprévisibles et générerdes interruptions importantes dans l’exécutiondu programme. Par ailleurs, les emprunts surle marché intérieur pour financer un telprogramme seraient risqués et probablementnon durablement viables, compte tenu desfrais récurrents et du caractère à moyen et àlong terme d'un programme d’allocationssociales.

La mise en place au Sénégal à court terme pourun programme de transfert d'espèces pourraitêtre, aussi, assurée d’autres façons :• Il est possible de prévoir une allocation avec

un taux réduit (équivalent à 10% ou 15% duseuil de pauvreté, au lieu de 30%) mais qui doitcependant rester suffisant pour satisfaire lesbesoins des bénéficiaires

• Le programme pourrait limiter l’âge desenfants à cibler. Il pourrait, par exemple, ciblerles enfants de 0 à 5 au lieu des 0 à 14 ans.L’accent pourrait être porté sur l'améliorationde la nutrition des jeunes enfants, ou cibler lesenfants en âge scolaire (primaire) en insistantsur la fréquentation scolaire ou sur la luttecontre le travail des enfants. Cette décisionserait basée sur un choix politique en fonctionde l'objectif souhaité.

• Le ciblage pourrait être limité aux ménages lesplus pauvres (par exemple, ceux qui en sontdans le décile ou quintile le plus bas derichesse), plutôt que de bénéficier à tous lesménages sous le seuil de pauvreté, commecela était le cas dans l’exercice de simulation.Une telle option doit cependant tenir comptede la complexité et des coûts de ciblage (voirplus de détails ci-dessous).

• Une autre possibilité, apparue lors desdiscussions sur la conception du programme, est

d’instaurer une limite au nombre d'enfants parménage recevant les allocations. Cette option doitcependant être sérieusement analysée.

• La mise en place progressive du programmepeut, également, être une autre façon d’assurer lafaisabilité à court terme. La priorité peut êtreaccordée d’abord à un ciblage géographique avecune concentration sur les zones les plus pauvresayant les indicateurs de bien-être des enfants plusbas. Dans un pays ayant une forte incidence depauvreté cette forme de ciblage risque de ne pasbénéficier aux ménages pauvres vivant dans leszones riches et d’inclure les ménages richesvivant dans les zones pauvres.

L'introduction progressive des allocationsdestinées aux enfants, avec une approchecombinant plusieurs facteurs (ciblagegéographique, utilisation des tests parapproximation de revenus, concentration desinterventions sur les zones les plus pauvres etayant les plus faibles indicateurs de bien-êtredes enfants) serait une option faisable ycompris sur le plan financier. Le succès d’unprogramme pilote dans des régionssélectionnées en combinaison avec d'autresservices sociaux (par exemple en augmentantla demande pour les services de santé et / oud'éducation) pourrait générer des évidencespour un passage à l’échelle et créerait lesappuis politiques nécessaires à l’adoption detels programmes. Ceci serait une bonne façonde réduire la pauvreté et la vulnérabilité, enparticulier chez les enfants, tout en nécessitantdes allocations budgétaires moindres pourson démarrage. Ceci laisserait plus de tempsau pays pour réaffecter les ressources entresecteurs et programmes. En cas de succès, ilsera politiquement plus facile de réaffecter auprogramme d’allocations sociales desressources provenant d’autres interventionsayant un impact moindre sur la réduction de lapauvreté.

Dans tous les cas de figures, le coût duprogramme pourrait être considérablementréduit en utilisant un seul ou plusieurs descritères énumérés ci-dessus, en assurant une

78 LA PROTECTION SOCIALE DES ENFANTS EN AFRIQUE DE L’OUEST ET DU CENTRE : CAS DU SÉNÉGAL

mise en œuvre progressive adaptée auxpossibilités techniques et financières duSénégal sur le moyen et long terme. Unprogramme trop modeste aurait un impact plusfaible que les options présentées ci-dessus,mais serait quand même une approche politiquepour réduire la pauvreté, comme cela pourraêtre démontré par la poursuite des exercices desimulations.

L’une des options réalistes pour créer de lamarge de manœuvre budgétaire pourfinancer un modeste programme de transfertd'espèces (voir analyse dans la section 6)serait de réaffecter des ressources allouées àd'autres secteurs d'activités (en excluant lessecteurs sociaux souffrant d’un déficit definancement). Cette réaffectation pourraitprovenir de subventions actuellement malciblées et qui n’ont pas produit de résultats.Cependant, une réallocation efficace impliqueun examen général du budget en portantl’attention sur les secteurs qui consommentle plus les ressources publiques et enévaluant leur rapport coût-efficacité. Un telexercice pourrait facilement être conduit s’ilreçoit un soutien politique. La révision desressources actuellement allouées à l'aidesociale et aux programmes d'action socialeen utilisant le rapport coût-efficacité pourraitaussi libérer des ressources dans ce secteurpour un tel programme.

7.3 Le ciblage est-il pertinent pour

le Sénégal?

La question de savoir si les programmes deprotection sociale doivent être ciblés ou nonfait l’objet de débats entre analystes etpraticiens de la protection sociale, notammentà cause de la faiblesse des revenus dans lespays d'Afrique subsaharienne où la pauvretéest généralisée et où l'objectif est d'atteindreautant de personnes que possible. Toutefois,quand les ressources publiques sont limitées,les décideurs doivent nécessairement bienchoisir les stratégies pour rendre cesprogrammes financièrement viables. En outre,lorsque les ressources publiques sont très

rares, il est nécessaire de concentrer les effortsdestinés à accroître les revenus sur certains"groupes cibles" de ménages pauvres ou depersonnes pauvres, avec l’objectif demaximiser la réduction de la pauvreté àmoindre coût budgétaire (Coady et al 2002).

Il faut aussi tenir compte des importants défisadministratifs et financiers qui peuventaccroître la complexité du ciblage. Parexemple, certains spécialistes font valoir quele ciblage de la pauvreté requiert desinformations dont la collecte peut êtredifficile et coûteuse, de même que le ciblagenécessite des conditions administratives quine sont pas toujours remplies dans les pays àfaibles revenus. Les autres facteurs à prendreen compte sont les risques d'induire descoûts sociaux tels que la stigmatisation, lerenforcement de l’exclusion des bénéficiairesou la création de tensions sociales entre lesbénéficiaires et les non-bénéficiaires (Coadyet al 2002) ; (Jones et al 2008). Par ailleurs,Adato et Hoddinott (2007) et Coady et al.(2002) soutiennent que le ciblage desprogrammes de protection sociale constitueune fin en soi pour faire en sorte que lesménages pauvres soient ceux qui bénéficientdes programmes de protection sociale.

7.3.1 La situation actuelle au Sénégal

Si un programme d’allocations sociales devaitêtre introduit au Sénégal, le ciblage serait unchoix pertinent, compte tenu des élémentssuivants :

• Malgré la possibilité de créer une margebudgétaire pour la protection sociale (voirchapitre 6 ci-dessus), le pays est encoreconfronté à des contraintes budgétaires quilimitent l'ampleur de toute nouvelleintervention. L'analyse des coûts effectuéedans le sous-chapitre 7.2.5 montre qu’unciblage adéquat serait une façon de maximiserles avantages du programme, compte tenu deson échelle et des ressources qui pourraientêtre mobilisées pour le financer.

79Analyse des allocations en espèces comme mécanisme de lutte contre la pauvreté des enfants

• Des analyses montrent que certaines desallocations et subventions dugouvernement sont mal ciblés, avec desressources publiques subventionnant laconsommation des quintiles les plus richesplutôt que celles des plus pauvres. Commeexpliqué dans le sous-chapitre 6.3.2, la PSIAmenée par le FMI a démontré cette erreur deciblage (FMI 2008). L’Etat dépenseindistinctement pour les populations desfonds publics provenant de programmes quidevraient bénéficier prioritairement auxcatégories de population dont les besoinssont les plus importants, en particulier ceuxqui vivent dans les zones rurales (BanqueMondiale 2008). Le développement d'uneméthodologie de ciblage basée sur deséléments mettant l'accent sur les groupesvulnérables pourrait accroître la légitimitéde l'intervention.

• Étant donné que la part de l'aide dans lesressources du Sénégal est importante, enparticulier dans le domaine du développementsocial et de la protection sociale, lesfinancements provenant des bailleurspourraient être utilisés pour développer unecartographie exhaustive de la pauvreté / de lavulnérabilité et un mécanisme de ciblage qui,généralement, sont coûteux à réaliser.

• Comme on l'a vu dans les simulations, l’optiond’un programme d’allocations sociales destinéaux enfants, avec un ciblage catégoriel(enfants d'âge scolaire par exemple), pourraitêtre un moyen d’orienter de façon efficacel’assistance, en particulier si le programme estbasé, par ailleurs, sur un ciblagegéographique. Un programme piloted’allocations sociales a des probabilités deréduire la migration des enfants car auSénégal, certaines études montrent que lesenfants des zones rurales ont tendance àmigrer vers les villes à la recherched’opportunités économiques pour eux et leursfamilles.

7.3.2 Analyse des différents

mécanismes de ciblage

Le sous-chapitre qui suit présente un éventailde mécanismes de ciblage qui ont été utilisésau niveau international dans les programmesde protection sociale. Après une brèvedéfinition des mécanismes de ciblage les plusfréquents (encadré 1) nous analyserons lafaisabilité de certaines de ces différentesméthodes de ciblage au Sénégal en tenantcompte de leur coût, des conditionsadministratives qu’elles nécessitent et de leurpotentielle efficacité.

Selon les résultats tirés des simulationsréalisées dans le sous-chapitre 7.2, pour la miseen place d’un programme de prestations pourles enfants au Sénégal il serait plus rentable dedisposer d'un programme ciblé, compte tenu ducoût élevé d'un système universel (inabordablepour le Sénégal) malgré les erreurs d’exclusion.Comme cela est présenté dans le tableauprécédent, il existe un large éventail deméthodes de ciblage.

Il est rare d’utiliser une méthode unique deciblage. Dans le cas d'une allocation visant àréduire la pauvreté chez les enfants, le premierciblage utilisé est catégoriel, fondé sur l'âge (parexemple de 0 a 14 ans), avec seulement lesménages avec enfants qui sont bénéficiaires. Ils'agit d'un filtre relativement simple à utiliser,bien que dans le contexte sénégalais ce serait undéfi compte tenu du fait que 42,2% de lapopulation est âgée de moins de 15 ans (ESPS2005-2006). Avec près de 45% des enfants âgésde moins de cinq ans qui ne sont pas déclarés àla naissance (EDS 2005) et environ 20% d’enfantsnon scolarisés il sera difficile d'identifier tous lesménages potentiellement bénéficiaires.L’identification et l’enregistrement de tous lesenfants nécessitera un appui administratif ainsique des campagnes de sensibilisation afin queles enfants potentiellement bénéficiaires desallocations, y compris ceux vivant dans lescommunautés habitant les zones les plusreculées (et souvent les plus pauvres) soient enmesure de les recevoir.

80 LA PROTECTION SOCIALE DES ENFANTS EN AFRIQUE DE L’OUEST ET DU CENTRE : CAS DU SÉNÉGAL

Le ciblage est caractérisé par quatre étapes:

1. Une ensemble de décisions politiques portant surceux qui doivent être soutenus à travers lesprogrammes d’allocations; 2. Les processus d'identification de ces personnes, etde mise à jour régulière des listes; 3. La conception et la mise en œuvre de mécanismespour s’assurer que le soutien est fourni à ceux à qui ilest destiné, avec un minimum d'erreurs d'inclusion etd'exclusion; et 4. Veiller à ce que les bénéficiaires comprennent àquel titre ils bénéficient de ces droits.

Dans la pratique, un certain nombre de méthodes deciblage sont généralement combinées pour obtenir unmaximum d'efficacité.

Les méthodes habituelles de ciblage sont lessuivantes:

L’observation des individus / des ménages, qui impliquel'observation directe, ménage par ménage ou individupar individu, afin de déterminer si un demandeur estéligible pour le programme. Cela se fait habituellement àl'aide de tests des revenus ou des instrumentsd’indicateurs de pauvreté. Cette méthode est la plustechnique et celle nécessitant le plus de personnel. Parconséquent, elle exige une forte capacité institutionnelle.Parmi les types d'observations des ménages, il existedifférents types de mécanismes qui varient en degré decohérence et donc exigent différents degrés de capacitésadministratives et institutionnelles pour leur exécution.

Les tests sur les revenus vérifiables recueillent desinformations (presque) complètes sur le revenu duménage et / ou sa richesse et vérifient les informationsrecueillies auprès de sources indépendantes lesbulletins de paie ou les déclarations fiscales des bienset des revenus. Cela exige l'existence de cesdocuments vérifiables au sein de la population cible,ainsi que la capacité administrative de traiter cetteinformation et de continuellement la mettre à jour entemps opportun. Pour ces raisons, les tests sur lesrevenus vérifiables sont extrêmement rares dans lespays en développement, où les ménages les pluspauvres reçoivent un revenu provenant de plusieurssources et ou la tenue formelle d’un dossier sur lesactivités est inexistante.

Les tests simples de revenus: Ce test ne nécessite pasde vérification indépendante de revenus et estrelativement commun. Une visite à la famille par un

travailleur social peut aider à vérifier de manièrequalitative / de visu si le niveau de vie, qui reflète lerevenu ou la richesse, est plus ou moins compatibleavec les chiffres communiqués. Ces types de testssimples de revenus sont utilisés à la fois par lesprogrammes d’allocations directes et les programmesde tickets modérateurs, avec ou sans visite à lafamille.

Les tests par approximation des revenus sont de plusen plus utilisés, même s'ils sont encore relativementrares. Ces tests indiquent un système qui génère unscore pour les familles candidates basé sur lescaractéristiques facilement observables des ménages,tels que l'emplacement et la qualité du logement, lapossession de biens durables, la structuredémographique du ménage et le niveau d'éducationet, éventuellement, l'activité professionnelle desmembres adultes. Les indicateurs utilisés dans lecalcul du score et leurs coefficients de pondérationsont tirés de l’analyse statistique des donnéesdétaillées provenant des enquêtes auprès desménages, qui sont trop coûteuses pour être réaliséesauprès de tous les candidats à des grandsprogrammes d’allocations.

Le ciblage communautaire fait appel à un groupe demembres d’une communauté ou à un dirigeant de lacommunauté dont les fonctions principales au sein de lacommunauté ne sont pas liées au programmed’allocations afin de décider qui au sein de lacommunauté devrait bénéficier ou non des prestations.

Le ciblage catégoriel implique la définition decatégories, dont tous les membres sont éligibles àrecevoir des prestations. Il s'agit de définir l'éligibilitéen termes de caractéristiques des personnes ou desménages qui soient facilement observables, difficilesà falsifier et en corrélation avec la pauvreté. Lescatégories habituellement utilisées comprennentl'âge (les enfants, les personnes âgées, les jeunes), lagéographie (ou cartographie de la pauvreté); le sexeet l'appartenance ethnique.

Un ciblage catégoriel d'un type différent est recherchéà travers les programmes d’auto sélection. Ici, l'accèsaux programmes peut être libre, de sorte qu'ilspeuvent sembler non ciblés, mais le programme estconçu de manière à n’intéresser que les plus pauvres,qui sont susceptibles de bénéficier de coûts departicipation plus bas que ceux payés par les plusnantis.

Source: Farrington et al (2007); Coady et al (2002).

Encadré 1: méthodes de ciblage

81Analyse des allocations en espèces comme mécanisme de lutte contre la pauvreté des enfants

Bien que la pauvreté au Sénégal soit largementrépandue, il existe d'importantes disparitésrégionales qui rendent difficile une approchepar ciblage. Une des possibilités serait decommencer par un ciblage géographique afinde réduire le nombre de bénéficiaires. Parexemple, en se concentrant d'abord sur leszones d’où viennent les plus grands nombresd'enfants migrants (ce qui pourrait être uneindication des conditions de vie insoutenables àla maison). Selon les récentes études sur lesenfants mendiants ces régions sont Kolda,Ziguinchor, Thiès, Diourbel, Kaolack, Fatick etSaint-Louis. Une autre possibilité serait de seconcentrer sur les régions les plus pauvres. Leciblage peut être affiné ensuite par le biais del'un des mécanismes de ciblage des ménagesou des individus. Dans le cas d'un programmed’allocations sociales pour les enfants, desdonnées sur l'état nutritionnel des enfants etleur niveau de scolarisation (deux grandsdéterminants de la pauvreté chez les enfants)peuvent être utilisés pour développer une cartede la pauvreté pour une intervention (c'est-à-dire cibler les zones où ces indicateurs sont lesmoins performants). Un indexmultidimensionnel de la pauvreté, comme celuiqui est en train d’être développé (sur lesprivations des enfants dans l’Etude sur laPauvreté des Enfants) peut également êtredéveloppé pour dresser une cartographie de lapauvreté des enfants, ce qui permettrait desélectionner les zones d’interventionsprioritaires sans que l’on soit obligé d’avoird’importantes capacités administratives.Toutefois, le ciblage géographique, tout seul,risque de générer des erreurs d'inclusion (c’est-à-dire, d’inclure des bénéficiaires qui neremplissent pas les critères de sélection) avecun nombre trop important de bénéficiaires parrapport aux capacités du programmed’allocations sociales.

Il y a des avantages à utiliser les méthodes deciblage basées sur l’observation des ménageset/ou des individus pour minimiser les erreursd'inclusion et s’assurer ainsi que les ressourcesdisponibles atteignent les bénéficiaires prévus.Cependant, ce sont des ciblages complexes, ce

qui peut rendre problématique leur mise enœuvre pour un pays en développement. Lafaisabilité de trois des différentes méthodes deciblage des ménages dans le cas du Sénégal estexplorée ci-dessous, sur la base de lacartographie des conditions économiques,sociales et institutionnelles et des conditionsrequises pour le ciblage, réalisée par Coady etal. (2002).

L'efficacité du ciblage basé sur les tests derevenus dépend largement de la capacité àrecueillir des informations fiables sur lerevenu total à un coût raisonnable. En général,les tests de revenus comportent des coûtsassociés à la collecte et à la vérification desinformations comparées aux méthodescatégoriques, mais ces coûts varient selon leniveau d'information requis. Dans le cas duSénégal, la sélection actuelle des bénéficiairesdes programmes d'assistance sociale estpratiquement basée sur les tests simples derevenus. Elle fonctionne différemment, car ilne s’agit pas d’un ciblage préalable auprogramme, mais plutôt d’une évaluation descandidats au cas par cas, une fois qu’ilssoumettent leur demande de soutien parl'intermédiaire du CPRS. Ainsi, pour accroîtrel'efficacité potentielle des tests simples derevenus au Sénégal, il serait nécessaire dedévelopper la capacité technique etadministrative du CPRS pour mener à bien cetype de ciblage sans la nécessité d'uninvestissement important de ressources.Selon les informations recueillies, les CPRS,qui sont actuellement responsables dupaiement des allocations d’assistance sociale,sont mal dotés en personnel, sous budgétiséset ont des capacités limitées. Desinvestissements seront nécessaires pourrenforcer leurs capacités et leur fournir lesressources qui leur permettraient d'atteindreles centaines de ménages cibles qui seraientciblés dans un nouveau programme.

En outre, les tests ont tendance à s'appuyeruniquement sur les informations fournies parles individus, ce qui peut poser des problèmesd'inclusion (pour les personnes qui fraudent sur

82 LA PROTECTION SOCIALE DES ENFANTS EN AFRIQUE DE L’OUEST ET DU CENTRE : CAS DU SÉNÉGAL

leur statut) et d'exclusion (pour les personnespauvres que les travailleurs sociaux neparviennent pas à atteindre pour les inclurecomme bénéficiaires du programme). Ainsi,l'une des conditions préalables pour une miseen œuvre efficace à plus grande échelle destests simples de revenus au Sénégal, serait deveiller à ce que la logistique administrative etles coûts soient couverts et permettentd’assurer une évaluation approfondie desbénéficiaires, ce qui contribuerait à garantir lafiabilité des informations pour le ciblage. Entermes de coûts sociaux, les tests de revenuspeuvent générer une stigmatisation sociale etcréer des tensions entre les bénéficiaires au seind’une communauté et ceux qui en sont exclus,en particulier dans un contexte où lescommunautés ne sont pas habituées à avoir desprogrammes sélectifs de prestations et où lesdifférences entre les foyers les plus pauvres etles foyers plus aisés ne sont souvent pas facilesà distinguer. Au Sénégal, ce type d’allocations,qui peut être considéré comme une formed’"aumône", de charité plutôt que comme unsoutien pour un développement social, pourraitêtre rejetée si elle n'est pas accompagnée parune bonne campagne de communicationexpliquant sa valeur pour la réduction de lapauvreté et le développement (entretiens desauteurs, 2008).

Dans le cas du ciblage communautaire, où letravail de collecte d'informations sur lesbénéficiaires est conduit par lescommunautés qui reçoivent le soutien, il peuty avoir des difficultés avec les dirigeants descommunautés qui pourraient trouversocialement et politiquement difficiled’établir de telles distinctions entre lesménages de la collectivité ou seraient tentésd’en faire bénéficier les ménages qui leursont proches. Les discussions avec dessociologues suggèrent que le ciblagecommunautaire donne généralement lieu àdes problèmes de clientélisme et peut poserles problèmes de sélection des bénéficiaires.Compte tenu de la force des lienscommunautaires et familiaux, la plupart desinterventions ont tendance à être basées sur

la communauté et sont généralementfournies par l'intermédiaire des comitéslocaux ou des associations locales. Une telleapproche peut être génératrice d'exclusion,étant donné que les plus marginalisés (quisont les bénéficiaires potentiels duprogramme) sont généralement exclus de cesassociations communautaires (ou du moinsne sont pas les premiers à être favorisés parelles). Il s'agit d'une question à examiner plusen détail afin d'éviter les problèmes deviabilité à long terme et d'assurer l'efficacitédes allocations. Toutefois, s’il estcorrectement mise en œuvre, le ciblagecommunautaire peut aussi aider à assurerune adhésion et à une appropriation duprogramme par la communauté, malgré lesimportants coûts de transaction qu’il entraînepour les membres de la communauté, ce quiest particulièrement problématique pour lescommunautés les plus pauvres où lesdirigeants sont souvent analphabètes.

Néanmoins, les avantages des tests simplesde revenus et du ciblage communautaire dansle cas du Sénégal sont, comparativement à cequi est requis pour un test par approximationdes revenus bas parce qu’ils ne nécessitentpas que les individus soient hautementqualifiés pour les entreprendre. Par ailleurs, etsans sous-estimer la difficulté d'obtenir desinformations complètes de tous les ménagespotentiels (ce qui pourrait conduire à deserreurs d'exclusion et induire des coûtsadministratifs importants), le fait que ceux quisont responsables du ciblage soient plusproches des communautés peut signifier unemeilleure différenciation entre les ménagespauvres et les ménages plus aisés, en fonctiondes caractéristiques spécifiques à lacommunauté, ce qui permet de s’assurer plusfacilement que les bénéficiaires adéquatssoient inclus. En outre, ces deux mécanismesde ciblage peuvent donner de meilleursrésultats en termes d'approche d'un plusgrand nombre de ménages pour leurenregistrement et leur inscription dans unprogramme d’allocations sociales.

83Analyse des allocations en espèces comme mécanisme de lutte contre la pauvreté des enfants

Les tests par approximation des revenus sontune autre méthode de ciblage des ménagesmise au point pour faire face aux difficultésliées à la collecte et à la vérificationd’informations détaillées sur le revenu desménages ou sur le niveau de consommationdes ménages dans les pays endéveloppement. Ces tests utilisent un nombrerestreint de caractéristiques des ménages : lesindicateurs provenant des données détailléesdes enquêtes auprès des ménages permettentde calculer un score qui informe sur le niveaude bien-être du ménage et aide à déterminerson éligibilité à bénéficier des prestations duprogramme. Une fois que les variables ont étéchoisies, des méthodes statistiques sontutilisées pour associer un coefficient à chaquevariable. Un élément clé de ces tests,considéré comme avantage ou inconvénient,est le fait que son calcul du besoin est basé surdes formules. Ceci permet leur reproductibilitéavec l’utilisation de critères cohérents etobservables. Parce qu’il utilise desinformations assez simples et relativementfaciles à recueillir et simples à interpréter, untest par approximation des revenus bienélaboré garantit l’équité "horizontale" (c'est-à-dire que les mêmes ménages ou les ménagessimilaires, au moins en termes des variableschoisies, reçoivent tous un traitementidentique). Un groupe cible sélectionné decette manière peut aussi être contrôléquantitativement. Dans le cas du Sénégal, cecipeut être utile à l’Etat pour réduire lesproblèmes qui sont liés au détournement ou lapolitisation dans l'accès au programme car lesallocations ont tendance à être considéréescomme des «cadeaux» et non comme unmoyen de stimuler les ménages à sortir ducycle de la pauvreté. Une justificationobjective du ciblage, telle qu’elle est définiepar les tests par approximation des revenuspeut être utile pour justifier l'intervention auxyeux de la communauté. Les inconvénientshabituellement associés à cette méthode deciblage sont nombreux. Il faut nécessairementrecourir à des professionnels techniquementcompétents pour effectuer l’analysestatistique et disposer de données détaillées

d'enquêtes auprès des ménages, ce qui nesemble pas être un problème au Sénégalcompte tenu de la capacité technique del’Agence Nationale de la Statistique. Il faut, parcontre, disposer de la capacité technique,administrative et logistique requise pour lamise en œuvre du programme. Cette dernièrepeut être insurmontable compte tenu desfaiblesses administratives du secteur social.Un autre inconvénient est lié à la rigidité destests par approximation des revenus car ils netiennent pas compte des circonstancesparticulières affectant la famille ou lacommunauté et qui pourraient les qualifier entant que bénéficiaires de la prestation. Dansces cas, les tests par approximation desrevenus comportent une erreur intrinsèque : laformule est conçue pour être correcte enmoyenne mais ne sera pas en mesure declasser correctement tous les ménages.Fonder le choix des variables sur l'analyse desenquêtes existantes auprès des ménagesdisqualifiera également de nombreusesvariables qu’un observateur de terrain avertides réalités locales aurait suggéré d’inclure.Ces deux éléments pourraient causer desproblèmes d'exclusion. Ceci peut êtreproblématique au Sénégal, où l'incidence dela pauvreté est importante. La disponibilitéd’organisations administratives etinstitutionnelles assurant la collecte et à lavérification des informations est essentiellepour s’assurer que les taux d’erreursd'exclusion soient les plus faibles et pour quele ciblage soit le plus complet et le plus exact.Un ciblage peut ne pas être efficace bien quela définition des critères et le poids descaractéristiques des ménages soit faits par desméthodes statistiques. La sélection desménages se faisant directement par lesenquêteurs on peut assister à undétournement des objectifs avec une sélectionde ménages ne répondant pas aux critères.Une telle méthode doit être accompagnée parune large sensibilisation afin que le plus grandnombre de ménages puisse se faireenregistrer et permettre ainsi d’éviter leserreurs d'exclusion.

84 LA PROTECTION SOCIALE DES ENFANTS EN AFRIQUE DE L’OUEST ET DU CENTRE : CAS DU SÉNÉGAL

L’analyse des résultats des différentessimulations et de différentes méthodes indiqueque le ciblage au Sénégal est recommandé pourassurer la viabilité financière à moyen termed’un programme de protection sociale. Unecombinaison des différentes méthodes deciblage serait la voie la plus efficace. Dans lapratique, le choix des méthodes de ciblage desménages ou des individus dépend aussi desressources disponibles, de la structureinstitutionnelle, de la capacité à travailler avecles communautés et des objectifs ultimes duprogramme. Les contraintes de typesadministratif et institutionnel, ainsi que leséléments indiquant qu’il peut y avoir uneévasion de fonds durant le processus detransfert des ressources vers les programmessociaux, doivent également être pris en comptedurant la conception du programme. Il faudraégalement veiller à ce que les risques demauvaise gestion soient réduits afin demaximiser l’efficacité des allocations dans laréduction de la pauvreté.

7.4 Stimuler la demande en servicessociaux au Sénégal

La dimension protection de la protection socialene suffit pas à elle seule pour réduire lavulnérabilité. Les dimensions de prévention etde promotion sont également cruciales car ellesfavorisent l'accès à des services sociaux dequalité. Dans le cas des enfants, des allocationsdirectes en espèces ou en nature visant àaméliorer la subsistance des ménages peuventégalement servir à réduire les barrières de coûtset/ou couvrir les coûts d'opportunité quiexcluent les pauvres des services de base. Parexemple, un ménage qui reçoit une allocationpeut ainsi compenser la perte d’une partie ou latotalité des revenus provenant du travail desenfants. Cela permet de faire cesser le travail del’enfant ou toute autre activité qui empêche lesenfants de se consacrer à leur scolarité. Ce typed'interventions de protection sociale estgénéralement qualifié "d’interventions du côtéde la demande» car elles stimulent la demandedes enfants, les aident à avoir accès auxservices sociaux de base et à obtenir une

assistance directe. Les allocations/transfertsd’espèces sont donc un prototyped’intervention sociale du côté de la demande(Barrientos et DeJong 2004). Pour avoir unimpact maximal, les approches du côté de lademande doivent, cependant, êtreaccompagnées par la fourniture adéquate deservices de base, ce qui est souvent un desprincipaux obstacles à l'accès dans denombreux pays d'Afrique subsaharienne.Lorsque la fourniture de services de base faitdéfaut, les programmes de transferts d’espècespeuvent augmenter le revenu des ménagessans pour autant améliorer le comportementdes ménages en matière de consommation deservices de base (Janvry et Sadoulet 2006). Lesconditionnalités sont aussi des éléments àconsidérer quand on vise l’augmentation del'accès aux services. On lie souvent cesdernières aux transferts d’espèces quand on

veut s’assurer que le revenu supplémentairealloué aux ménages est d’abord utilisé pouraméliorer le bien-être des enfants. Elles sontétudiées dans le chapitre suivant.

Bien que des recherches plus poussées soientnécessaires pour identifier de manière plus préciseles causes du faible accès aux services sociaux debase, l’analyse des informations existantesventilées par sexe, situation géographique, etsurtout par quintile de richesse et groupe d'âge,permet d’identifier le facteur ‘coûts’ (directs etindirects) comme étant une barrière importante de

Quintile de

richesseHommes Femmes Moyenne

Le plus pauvre 42.2 41.8 42.1

Pauvre 51.8 50.3 51.1

Moyen 54.0 57.9 55.9

Riche 67.7 68.0 67.9

Le plus riche 80.7 77.6 79.0

Source: EDS 2005.

Tableau 22

Taux net de scolarisation primaire

par quintile de richesse (%)

85Analyse des allocations en espèces comme mécanisme de lutte contre la pauvreté des enfants

l'accès des enfants aux services sociaux de base,même quand le service existe.

Les enfants ont un accès différencié à l’école selonle niveau de pauvreté de leurs familles, mêmequand le service est disponible. Les données dutableau 22 indiquent que seulement 42,1% desenfants des ménages les plus pauvres sont inscritsà l'école alors que 79% des enfants des ménagesles plus riches le sont (les différences entre lessexes dans la scolarisation ne sont passignificatives, sauf dans le quintile le plus riche).Ceci suggère fortement que les coûts liés à lascolarité (directs, indirects et d'opportunité) sontdes obstacles à la fréquentation scolaire pour lesenfants des ménages pauvres. Un revenuadditionnel aux familles pauvres peut êtrepotentiellement bénéfique pour relever les taux descolarisation quand l’offre est, aussi, disponible.Les données de l’EDS 2005 pour l’accès au cycleprimaire montrent qu’en moyenne 81,2% desménages disposent d’une école à moins de 30minutes (95,66% à Dakar et 69,5% en milieu rural).Un revenu additionnel aux familles pauvrespourrait réduire les coûts d’opportunité dutransport mais ne remplacera pas lesinvestissements qui doivent être faits pouraméliorer l’offre dans le monde rural.

Le niveau de revenu conditionne, également,l’accès aux services de soins et donc l’état desanté. Au Sénégal, la population n’identifie pasles coûts comme étant un obstacle aux soins.

Durant l'enquête ESPS 2005-2006, seulement1,4% des personnes interrogées ont mentionnéles coûts élevés des soins comme une cause denon recours aux soins alors que 93,7% despersonnes interrogées répondaient ne pasrecourir aux soins parce qu’ils estimaient queceux-ci n’étaient pas nécessaires. Cetteproportion est identique en zones rurales eturbaines en dépit d’une incidence de lapauvreté plus élevée en zone rurale. Cependant,l’analyse par quintiles de richesse (tableau 23)montre qu'il existe en fait un lien entre revenudes ménages et recours aux services de santéavec les populations pauvres ayant denombreux indicateurs plus bas que lesménages plus riches.

Plusieurs autres facteurs peuvent être invoquéspour expliquer l’état de santé plus défavorabledes populations pauvres. Les barrières peuventêtre culturelles ou être un simple déficitd’information. Selon l’ESPS 2005-2006 environ34,7% des ménages ruraux sont à 15 minutes dedistance d'un centre de santé alors que ce taux estde 50% pour les ménages dans les zonesurbaines. Plus de 40% des ménages ruraux sont àune heure ou plus de distance d’un centre desanté. Cette difficulté d'accès pour les pauvrespourrait expliquer pourquoi la majorité de lapopulation estime que les soins formels de santéne sont pas jugés nécessaires. Ceci indique qued'importantes interventions du coté de l’offre sontnécessaires si l’on veut accroître l'accès aux

services de santé, car lesinterventions agissant surla ‘demande’ telles lesal locations/transfertsd’espèces peuvent n’avoirqu'un impact marginal. Lechapitre 8 étudie plus endétail les contributionspotentielles que pourraitapporter l’extension desservices de santé commemoyen d'améliorer l’accèset l’utilisation des servicesde santé par les ménagespauvres et vulnérables.

Quintile de richesseAccouchement avec un dispensateur qualifiéde soins de santé (%)

Taux de mortaliténéonatale (pour 1.000naissances vivantes)

Taux de mortalité infantile(enfants de moins de 5

ans) (pour 1.000 naissances

vivantes)Le plus pauvre

20.1 89 183

Pauvre 30.7 85 164

Moyen 54.9 73 136

Riche 83.5 53 92

Le plus riche 51.9 41 64

Source: EDS 2005.

Tableau 23

Indicateurs de santé selon le quintile de richesse

86 LA PROTECTION SOCIALE DES ENFANTS EN AFRIQUE DE L’OUEST ET DU CENTRE : CAS DU SÉNÉGAL

La mise en œuvre de stratégies de protectionsociale, même si elles sont de grandeenvergure, pour stimuler la demande nesignifie pas que ces interventions deprotection sociale peuvent résoudre lesproblèmes liés à l'offre en services sociaux debase, qui ne peuvent être résolus que par desinvestissements importants, en particulierdans les zones rurales où habite le plus grandnombre de ménages pauvres et vulnérables.L’engagement du Sénégal à investir 40% dutotal des dépenses dans les secteurs sociauxest un signal positif indiquant que les autoritésreconnaissent les défis qui persistent dansl'accès et la qualité. Comme discuté plus haut,l'un des moyens d'assurer un meilleurfinancement aux services sociaux seraitd’améliorer l'efficacité des dépenses, puisqueles allocations budgétaires respectives sontdéjà plus élevées que les moyennes observéespour les pays de la région (voir par exempleHandley, 2008a). Les gains d'efficacitépourraient, aussi, avoir un impact indirect surl’efficacité des prestations. Les ressourcespourront être mobilisées au niveau dessubventions et des transferts qui sontactuellement mal ciblés et des programmesqui sont connus pour être inefficaces ou nonprioritaires. Cela permettra d’éviter de toucheraux allocations budgétaires des secteurssociaux de base. A mesure que la qualité desdépenses du secteur social s'améliorera, ilsera possible de libérer des ressourcessupplémentaires à allouer aux interventionsde type ‘côté de la demande’, sanscompromettre les investissements nécessairespour améliorer l'offre de services.

Le pays gagnerait à profiter du cadre existantpour le suivi de la stratégie de réduction de lapauvreté (l’axe 2 du DSRPII ciblel'amélioration de l'accès aux services de baseet l’axe 3 la protection sociale) pour engagerune étude qui permettrait d’identifier lescauses et contraintes qui limitent l'accès etainsi de dégager les pistes pour lesinterventions prioritaires agissant sur les côtésoffre et demande. Il serait égalementimportant d'encourager le dialogue entre les

parties prenantes impliquées dans ledéveloppement des programmes du secteur,pour mieux intégrer leurs points de vue,attentes et apports dans la conception despolitiques et programmes de protectionsociale.

7.5 Avantages et inconvénients de laconditionnalité des allocations/transferts d’espèces dans le contextesénégalais

Le versement d’allocations sous formed’espèces peut être conditionné à l’obligationd’observer un comportement spécifique parle(s) bénéficiaire(s). Dans les systèmesd’allocations/transferts d’espèces ciblés surles enfants, les conditionnalités les plusfréquentes sont notamment une fréquentationscolaire régulière par tous les enfants duménage et/ou le respect de pratiques de santé,tel le respect des vaccinations et des examenspériodiques de santé (de Janvry et Sadoulet2006). Cependant, il n’y a pas de consensusentre les experts sur les résultats obtenus ;est-ce que ce sont les conditionnalités qui ontun effet positif sur le comportement ? ou est-ce le transfert monétaire lui-même quientraîne des comportements positifs ?.Certains arguments suggèrent également quel’existence de conditionnalités pourraitconduire à l’exclusion des plus vulnérables, enparticulier dans des contextes où l'offre deservices de base n’est pas disponible. Ainsi,dans ce type de situation, des ménagesbénéficiaires potentiels seraientautomatiquement exclus parce qu’ils nepeuvent pas satisfaire les conditionnalités(Save the Children et col. 2005).

Les éléments en faveur des transfertsd’espèces conditionnels, proviennentprincipalement des expériences d’Amériquelatine, où les transferts d’espacesconditionnels (TEC) ont eu un impact sur laréduction de la pauvreté monétaire desménages tout en favorisant le développementhumain des enfants mesuré par des résultatsdans les domaines de l'éducation et de la

87Analyse des allocations en espèces comme mécanisme de lutte contre la pauvreté des enfants

santé (Barrientos et DeJong 2004; Janvry etSadoulet 2006). Cependant, il y a peud’éléments qui montrent que ce succès est lerésultat de l’allocation plutôt que celui desconditions imposées (Handa 2008). Quelquesanalyses quantitatives établissent la liaisonentre les effets du transfert (effets sur lerevenu) et les effets des conditionnalités (leseffets de substitution) mais leurs résultats nesont pas encore concluants. Néanmoins, il y ade plus en plus d’informations qui montrentde manière probante que les transfertsd’espèces "non conditionnels" donnent pasautant de bons résultats en termes dedéveloppement humain que les transfertsconditionnels. Les leçons tirées récemmentdes exemples de programmes inconditionnelsau Malawi et en Équateur montrent desrésultats positifs sur la scolarisation desenfants et sur leur santé (ibid.).

La conception d’un programme dépend de sonobjectif principal. Selon Janvry et Sadoulet(2006), les TEC sont plus indiqués quand il y aune sous utilisation de l'école et desétablissements de santé et que l'augmentationde leur usage est l'objectif de l’allocation. Sil’objectif du programme est, par contre, detransférer de l'argent à des pauvres avecenfants, les transferts d’espèces sanscondition sont mieux indiqués. D'autresconsidérations doivent être aussi prises encompte, comme les contextes spécifiques oùdes conditionnalités sont nécessaires pourassurer que la prestation atteigne les enfantset les situations où il y a un risque de réduirele recours à la prestation en raison d’unestigmatisation liée au fait qu’elle est perçuecomme une ‘‘aumône’’, par comparaison à unTEC ou les bénéficiaires peuvent percevoir letransfert comme un avantage récompensantleur comportement positif.

L’expérience montre que les deux types detransferts (conditionnels ou non conditionnels),permettent une amélioration en termes dedéveloppement humain de l'enfant. Dans le casdu Sénégal, le choix devra être lié au contextelocal, y compris en tenant compte de la capacité

d'offre, de la capacité de suivi et de la qualité del'offre (Handa 2008). Dans les régions où cescapacités sont limitées, telles que les zonesrurales qui accueillent la majorité des ménagespotentiellement cibles, un transfertinconditionnel serait peut-être préférable àcourt terme.

7.6 Le Sénégal dispose-t-il des conditions administratives et debonne gouvernance pour une miseen œuvre efficace des transferts d’espèces?

L’analyse du programme de transfertsd’espèces dont est chargé la Direction del'Assistance Sociale, indique que cettestructure institutionnelle n'est pas la plusefficace pour la fourniture de la prestation, dufait de la faible sensibilité de la méthode, de lacouverture insuffisante et de la capacitélimitée du ciblage (celui-ci se résumant à desévaluations des individus basées sur lesdemandes remplies par les bénéficiaires eux-mêmes). Les CPRS sont faiblement pourvus enpersonnel, sont limités sur le plan descapacités et ne disposent pas d’un budgetsuffisant. Dans ce contexte, tout nouveauprogramme d’allocations sociales devrait,avant son lancement, évaluer l’opportunité de: i) soit, investir massivement dans lerenforcement de la capacité, des compétenceset des ressources des CPRS existants tout enétendant cette structure, ou ii) élaborer unnouveau mécanisme et une nouvelle structureinstitutionnelle pour la fourniture desprestations. Dans le cas du Sénégal, ledéveloppement à l'échelon local d’institutionsfinancières (banques rurales et institutions demicro finance), ainsi que l’existence d’un vasteréseau postal, devrait conduire à considérerceux-ci comme étant des mécanismespossibles par lesquels pourrait s’effectuer letransfert des espèces aux bénéficiaires àmoindre coût de gestion et avec des risquesréduits d’évasion de fonds.

Trouver d'autres mécanismes de transfert desressources au niveau local serait

88 LA PROTECTION SOCIALE DES ENFANTS EN AFRIQUE DE L’OUEST ET DU CENTRE : CAS DU SÉNÉGAL

particulièrement pertinent, compte tenu desproblèmes persistants que rencontre leprocessus de décentralisation budgétaire auSénégal et qui ne permettent pas d’opter pourune fourniture de ces allocations par lescollectivités locales. De plus et comme expliquédans un chapitre précédent, il y a desquestionnements sur la capacité administrativeet la gouvernance des institutions chargées defournir les services publics, en particulier auniveau local où la capacité est moindre et oùl’obligation de rendre compte n’est pasclairement exigée. Lors des entretiens avecquelques bailleurs de fonds présents auSénégal la faible gouvernance a été citéecomme une contrainte majeure pour unprogramme de protection. En effet, il existed'importantes évasions de fonds, bien que leniveau et l’importance de celles-ci n'aient pasencore été mesurés.

Néanmoins, des solutions aux problèmesd’administration et de gouvernance existent.La première option serait de mettre en place,dès le lancement du programme, desindicateurs et un mécanisme de suivipermettant de faire une évaluation inopinéedes processus et des résultats. Ce mécanismeserait basé sur la transparence desinformations (budgets et programmes). Unedeuxième option serait de renforcer la bonnegouvernance par la mise en place d’unmécanisme de paiement des espècestransparent doté de règles de fonctionnementaccessibles et des dispositifs intégrés decontrôle et de contrepoids. Cependant, uneamélioration significative de la gouvernanceet de meilleures pratiques restent un défi quine semble pouvoir être atteint qu’au-delà de lapériode actuelle du DSRP. Une option plussimple serait de mettre au point unmécanisme de transfert qui minimiserait lescoûts administratifs et les interventionshumaines, par exemple, en centralisant laresponsabilité des transferts au niveau d’uncentre régional unique, qui pourra ensuiteverser l’allocation par l'intermédiaire d’unbureau de poste ou du système bancaire (deplus en plus développé dans les zones

rurales). La croissance rapide desmouvements de fonds au Sénégal a permis lacréation de nouveaux canaux de transfert desressources dont le programme de transfertsd’espèces pourrait tirer profit.

7.7 Conclusion

Les nombreux programmes de transfertsd’espèces opérant dans les diverses régions dumonde, de l'Amérique latine à l'Afrique, ontmontré que ces derniers pouvaient contribuer àfaire reculer la pauvreté et lorsqu’ils sont cibléssur les enfants (au sein ou en dehors desménages) avoir des résultats sur la réduction dela pauvreté des enfants (Barrientos et Holmes2007). Au Sénégal, des analyses utilisant lesdonnées tirées des enquêtes nationales sur lesménages, montrent qu’un programme detransferts d’espèces pourrait avoir un impactpositif sur la réduction de la pauvreté desenfants.

L’introduction d'une telle interventionnécessite une grande volonté politique, unemarge de manœuvre budgétaire et descapacités techniques et administrativesminimales pour la mise en œuvre. Une bonnepartie de ces préliminaires existe déjà auSénégal, puisque les autorités ont exprimé àmaintes reprises leur grand intérêt pour cetype de mécanismes pour réduire la pauvretéet pour améliorer l’efficacité de l’assistancefournie par différents départements auxenfants pauvres et vulnérables. De plus, bienqu’ayant des ressources budgétaires limitées,le pays a de bonnes performanceséconomiques et dispose d’une capacité deréaffecter une partie des ressourcesdisponibles de programmes moinsperformants (par exemple, la réaffectation dessubventions et des transferts qui ne sont paspro pauvres). La combinaison de ces facteurspeut générer une marge de manœuvrebudgétaire suffisante pour l'introduction d'unprogramme de transferts d’espèces, même sison ampleur et sa portée devraientétroitement tenir compte des prévisions deressources sur le court et le moyen terme.

89Analyse des allocations en espèces comme mécanisme de lutte contre la pauvreté des enfants

Compte tenu des défis qui persistent en matièrede fourniture et d’accès aux services sociaux debase de qualité, notamment dans les zonesrurales où est concentrée la majorité despauvres, le développement d’un programme detransferts d’espèces devrait être mené d’unemanière qui ne se fasse pas au détriment de cesservices sociaux de base. Toutefois, il y a lieu denoter qu’un programme de transferts d’espècesaux ménages pauvres ayant des enfants,pourrait être un mécanisme utile pour renforcerle taux d'absorption et d’efficacité de cesservices, de sorte que les complémentaritéssoient renforcées. Ensuite, et au fur et à mesureque la qualité des dépenses dans les services dusecteur social s’améliorera, certaines de sesressources pourront être réaffectées auprogramme de transferts d’espèces sans avoirdes effets négatifs sur l'offre de ces services.

Le développement d’un programme de transfertd’espèces nécessitera que soient réunies dès ledépart un certain nombre de conditions etmoyens, notamment ceux requis pouraméliorer la gouvernance et remédier à lafaiblesse des capacités administrativesexistantes. La conception devra inclure dès ledépart des mécanismes clairs de contrôle et decontrepoids ainsi que des mécanismes de suiviet évaluation. Il faudra également prévoir unrenforcement efficace des capacités techniquespour les acteurs en charge du programme. Pourminimiser les risques, Il faudra, pour le transfertde ressources, prévoir de faire recours auxmécanismes efficaces existant en privilégiant,

par exemple, l’usage des systèmes bancairesplutôt que celui des administrations locales.Dans les pays où les transferts d’espèces ont eubeaucoup de succès (Mexique), certaines de cescontraintes ont été surmontées par la créationd'une unité spécialisée en charge de laplanification et de la mise en œuvre duprogramme de transferts d’espèces, avec pourobligation de travailler étroitement avec tous lesministères concernés. La structureadministrative devra être, dès le départ, dotéede bonnes capacités techniques etadministratives et de systèmes performantspour réduire les risques d’évasion de fonds etoptimiser les avantages d’un programme detransferts d’espèces. Les coûts de mise en placed'un tel programme pourraient être financés parles bailleurs de fonds.

90 LA PROTECTION SOCIALE DES ENFANTS EN AFRIQUE DE L’OUEST ET DU CENTRE : CAS DU SÉNÉGAL

Ce chapitre donne un aperçu sur les liens santé-protection sociale et sur la programmationactuelle du secteur de la santé et sonfinancement. Il examine également lespossibilités de la mise en place de régimesd'assurance maladie, comparativement àd'autres mécanismes de financement de lasanté comme la suppression du paiement desfrais, en tant que moyen d'assurer de meilleuresprestations de soins de santé pour les enfantspauvres et vulnérables ainsi que pour leurssoignants.

L'accès de tout un chacun à unpaquet adéquat de services desoins de santé est fondé sur leprincipe du droit à la santé dechacun plutôt que sur lacapacité de chaque individu àpayer. Cet accès estnormalement garanti à tous lesêtres humains (Walsh 2008).Ceci explique l’importanceaccordée par la protectionsociale au secteur de la santé,notamment celle des enfants.Cette importance se rapporte àplusieurs éléments : a)opportunité de prévenir leseffets résultant d’une mauvaisesanté et par là prévenir desdépenses de santé trop élevéeset qui pourraient être causes depauvreté; et b) protection despopulations vulnérables parleur meilleur accès auxtraitements thérapeutiques etla limitation des épisodes demaladies, et par là promouvoirleurs capacités à accéder auxrevenus et à réduire le coût desdépenses de santé permettantainsi l’augmentation de laproductivité grâce àl’amélioration du capitalhumain. La protection socialeen matière de santé doit êtreintégrée dans un cadre pluslarge de politiques et de

programmes, y compris l'amélioration del'accès à des services de qualité pour tous(ibid.).

Dans la plupart des pays d'Afrique de l'Ouest,les systèmes de sécurité sociale offrent uneprotection sociale en matière de santé.Toutefois, celle-ci bénéficie principalementaux travailleurs du secteur formel et exclut defacto le plus grand nombre des travailleurs,car ceux-ci sont souvent recrutés par lesecteur informel (principalement dans

8. Analyse de la contribution potentielle et

de la faisabilité de l'assurance maladie

91Analyse de la contribution potentielle et de la faisabilité de l'assurance maladie

l'agriculture) où ils sont sous-employés. Ilssont aussi les plus vulnérables aux risquessociaux, économiques et de santé.

Ces systèmes formels, calqués sur lesmodèles occidentaux, ne fournissent desprestations qu’aux bénéficiaires et auxpersonnes à la charge du bénéficiaire(conjoint et enfants). Ils n’assurent aucuneprestation pour les autres membres de lafamille élargie du bénéficiaire. En définitive,seuls 10,5% des enfants bénéficientd’allocations familiales au titre des régimesformels de sécurité sociale (Annycke 2008).Tous les autres membres de la famille dubénéficiaire constituant la ‘famille élargie’ etqui vivent sous le même toit sont exclus deces mécanismes de protection socialeformels. Or, la notion de famille est un deséléments essentiels de la protection, car elleest la base sur laquelle toutes les politiquesde protection sont élaborées et parce qu’elledétermine système en «couverture» et«couverture étendue». En général, onconsidère que les enfants et les jeunesbénéficient d’une couverture étendue par lebiais des adultes. Une exclusion du systèmea un impact sur la santé de la population. Eneffet, on constate que les zones rurales oùl'accès aux services de santé est le plus faibleet où les mécanismes de protection socialesont rares, sont celles où les indicateurs desanté sont les plus faibles.

8.1 La Programmation actuelledes financements de la santé

Le système de santé au Sénégal, commedans d'autres pays francophones d'Afriquede l'Ouest, est basé sur les principes del'Initiative de Bamako adoptée en 1987 par lesministres africains avec l'appui de l'UNICEF,de l'Organisation Mondiale de la Santé (OMS)et de la Banque Mondiale. Cette initiativeavait pour but d’établir la participation descommunautés à la gestion et au financementdes coûts de la santé (Knippenberg et al2003) et avait été conçue comme un moyenpour stimuler la capacité de réponse des

services aux demandes de la communauté etde veiller à ce que les frais payés par lesusagers soient consacrés au maintiendurable des services de santé et àl'approvisionnement en médicaments. Cettestratégie avait pour objectif de pallier auproblème du sous-financement chronique dusecteur de la santé résultant des ajustementsstructurels des années 1980. En assurant uneplus grande responsabilité au niveau local,de meilleures prestations de services, et enaugmentant le capital social, le financementcommunautaire de la santé, qui a fait l’objetdepuis de plusieurs évaluations, estmaintenant considéré comme une alternativecrédible pour garantir un financementdurable, l’accessibilité et la qualité desservices (Ekman 2004; Jovchelovitch etCampbell 2000; Mehrotra et Jarrett 2002).Cela aurait contribué à supporter d’autant lesinvestissements de l’État.

Certaines indications montrent, cependant, queles résultats ne seraient pas aussi importants.Les contributions des usagers plafonnent etrestent de faible importance, (Ekman 2004) nereprésentant que 15,3% du total des coûts desoins de santé publique. De plus, cette stratégien’a pas prévu des mécanismes de préventiondes risques de santé qui contribueraient àatténuer les coûts du traitement de la maladie.Au Sénégal, le seul mécanisme permettant deprendre en charge la dimension risqueséconomiques et santé est celui qui est fourni parles instituts de prévoyance maladie auxemployés des organisations des secteurs publicet privé ainsi qu’à leur famille immédiate.Toutefois, cette couverture reste limitée àenviron 10% de la population, celle qui travailledans le secteur formel. Les 90% restants nedisposent d’aucune protection similaire(Annycke, 2008).

La mise en œuvre de la politique dedécentralisation devait permettre de palliercertaines de ces insuffisances. En effet, letransfert progressif des responsabilitésnationales en matière de santé publique auxautorités locales devait permettre de trouver de

25 Le rapport de l’ESPS 2005–2006 ne fournit pas d’estimations des dépenses de santé ventilées par quintile de richesse ; les estimations doivent être calculées séparément.

92 LA PROTECTION SOCIALE DES ENFANTS EN AFRIQUE DE L’OUEST ET DU CENTRE : CAS DU SÉNÉGAL

nouvelles opportunités definancement pour étendre lescouvertures sanitaires et sociales.Cependant le transfert desresponsabilités n’a pas étéaccompagné par un transfert defonds conséquents auxcollectivités locales laissantcelles-ci incapables à répondreaux besoins des groupesvulnérables. En 1994, le systèmedes mutuelles de santé a émergécomme une alternative pourfinancer les couts de santé de lapopulation du secteur informel etpour aider l'extension de lacouverture sanitaire. Lesinitiatives ont été nombreusesmais de faible envergure commeprésenté plus bas.

Compte tenu de ces faiblesprogrès, une nouvelle tentative esten cours avec l’inclusion de laprotection sociale dans l’axe 3 duDSRPII. Les principaux objectifssont l'extension de la protectionsociale de santé avec: i) lerenforcement des mutuelles desanté et l'amélioration du systèmed'assurance maladie pour en faireun système de protection contre les risques desanté qui couvre l'ensemble des travailleurs etles personnes à leur charge; ii) l’établissementd’un système de protection contre les risques desanté pour les personnes vulnérables, et iii)l’établissement de systèmes d'assurance socialepour les personnes travaillant dans l'agricultureet les acteurs économiques du secteur informel,les artisans, etc. L'objectif ultime est d’augmenterle taux de couverture de l'assurance maladiepour la population de 20% en 2005 à au moins28% d'ici 2010 et à 50% d'ici à 2015. Bien que cemécanisme d’extension de la santé comprennedes dispositions qui bénéficient à la santé desenfants, il ne comprend pas de mesuresd’envergure de protection sociale, telles que lagratuité des services de soins de santé pour lesenfants.

8.2 Mécanismes visant à faciliterl'accès aux soins de santé

L'analyse dans ce sous-chapitre présente lesdifférentes méthodes de financement de la santédisponibles au Sénégal, y compris les dépensespubliques allouées au secteur de la santé pour lefinancement de ses opérations propres et pour lafourniture d’une couverture à certains groupes,les systèmes de sécurité sociale, l’assurancesanté privée (y compris les mutuelles de santé) etles programmes d’exemptions de frais pour desgroupes particuliers.

Les mécanismes de financement de la santéexistants couvrent un nombre relativementrestreint de bénéficiaires qui s'élève à environ

CType de

système

Personnes

couvertes

Organisme de

gestion

Nombre de

bénéficiaires

% de la

population

couverte

Systèmes non

contributifs

Travailleurs dusecteur public

MEF 817.193 7,35

Personnes âgéesde plus de 60ans (PlanSésame)

Etat et IPRES 555.690 4,87

Etudiants COUD* 33.000 0,30

Systèmes de

contributions

volontaires

Membres desmutuelles desanté

Mutuelles desanté

421.670 3,79

Assurés del’assurance santéprivée

Compagniesd’assuranceprivées

24.500 0,22

Systèmes de

contributions

obligatoires

Employés dusecteur privé

IPM 400.149 3,60

Total 2.252.202 20,13

* COUD: Les centres universitaires de Dakar et de Saint-Louis offrentune couverture de soins de santé pour leurs étudiants dans les centres de santé publics, payée

sur les ressources de l'État. ** Des chiffres plus récents pour 2005 montrent que ce chiffre est de 4,25%(Banque mondiale 2006b).

Source: MSPM (2008), tableau avec les données de 2003 du Comité d'appui au financement dela santé et de partenariat (CAFSP), avec les données du recensement 2003.

Tableau 24

Estimation du nombre de personnes couvertes

contre le risque de maladie

93Analyse de la contribution potentielle et de la faisabilité de l'assurance maladie

20% de la population sénégalaise (tableau 24).Bien qu’une partie des 80% restants puissedisposer d’une capacité de payer pour des soinsde santé, la majorité appartient au secteurinformel, demeure sous-employée ou sansemploi et sans capacité pour payer descotisations mensuelles à une mutuelle de santé.Cette population reste plus exposée aux risquessanitaires et aux chocs sur les revenus quereprésente le paiement imprévu de frais desanté. L’ESPS montre qu’en moyenne lesdépenses faites par les ménages pour la santésont faibles, ne représentant qu’environ 2,4% dutotal des dépenses (3,0% à Dakar et 1,9% dansles autres villes et en milieu rural) .

Il n’y a pas de données permettant d’estimerl’impact des chocs qui affectent le revenu duménage quand surviennent les maladiesgraves. Ces données permettraient decomprendre les risques économiques et desanté qu’encourent les populationsdépourvues de protection sociale de santé.Toutefois, une étude récente de la Banquemondiale (2006b) sur le secteur de la santé auSénégal a montré que la participation despopulations au financement des soins desanté n’était pas négligeable : 53% desdépenses de santé publique sont couvertespar l'État, 32% par les bailleurs de fonds, 3%par les collectivités locales et 15,3% par lapopulation.

8.2.1 La Sécurité Sociale

Dans le cadre du système de sécurité socialedestiné aux travailleurs du secteur formel et auxfonctionnaires, une couverture partielle dessoins préventifs et du traitement est assurée parles institutions de sécurité sociale. Pour élargircette couverture, le pays a lancé une stratégied’extension de la santé qui repose sur lapromotion de mutuelles d’assurancecomplémentaires santé pour les travailleurs dusecteur formel et pour ceux du secteur public.

Soins financés par l'État Les coûts des soins préventifs et les traitementsmédicaux sont pris en charge directement par

l'État. Ce financement couvre 80% des fraismédicaux, à l'exclusion des médicaments, quele bénéficiaire assume. Les bénéfices de cesystème d'assurance maladie s'étendent auxmembres de la famille immédiate dufonctionnaire, ce qui est problématique dans lecontexte sénégalais car très souvent le ménageest constitué des membres de la familleimmédiate et des membres de la famille élargie.Il y a aussi le cas des ménages polygames. Cecilaisse certains membres du ménage exposésaux risques.

IPM Ce système d'assurance maladie est destiné auxemployés et aux cadres du secteur privé. Ilfonctionne sur les principes de retenues sur lesalaire de contributions et de partage desrisques. Une partie des coûts est supportée parl’IPM. Les bénéficiaires sont l’assuré et safamille immédiate.

IPRES Ce système a été mis en place par décret en 1975et ne couvre que les retraités ayant occupé unemploi salarié. Les retraités bénéficient depensions et de l’assurance maladie. Cettedernière couvre le bénéficiaire et les personnes àsa charge. Depuis l'introduction du Plan Sésame,l’IPRES contribue à 30% de son financement, desorte que tous les retraités de plus de 65 ans ontaccès à la couverture en soins de santé par le biaisdes dispositions de ce régime.

CSS La couverture offerte par ce système est limitéeà l'assuré et ne couvre que les accidents dutravail et les maladies professionnelles.

Assurances privées Ce système d'assurance maladie ne couvrequ’une très petite partie de la population active,y compris en comptant les membres de lafamille du bénéficiaire. Il comprend un éventailde mécanismes (allant de l’assurance-maladieprivée traditionnelle aux mutuelles de santé)dans lesquels la couverture est assurée par lebiais d’un système de mise en commun deressources fournies par un groupe de membres

94 LA PROTECTION SOCIALE DES ENFANTS EN AFRIQUE DE L’OUEST ET DU CENTRE : CAS DU SÉNÉGAL

26 Cette étude de cas est basée sur une visite de terrain à Thiès en mai 2008, où des entretiens avec les gestionnaires de mutuelles de santé ont été menés. Une documentation,fournie par les mutuelles, a été également recueillie.

La mutuelle de santé de Thiès a été créée sousl’impulsion d'une femme qui en est devenue ladirectrice. Cette dernière, peu après son installation àThiès et alors qu’elle travaillait avec son mari dans uneboutique du marché, s’est rendue compte que lesfemmes qui venaient chaque jour au marché pourvendre de menues marchandises, étaient trèsvulnérables aux problèmes de santé. Quand une de cesfemmes ou l’un de ses enfants tombait malade, elleétait obligée d’arrêter de travailler. En plus des frais detraitement qu’elle devait payer, elle devait aussirenoncer à un revenu.

La première étape fut d'organiser les femmes entontine pour s’assurer que quelques fonds soient misde côté, pour aider les membres à surmonter les pertesimprévues de revenu. Lorsqu’il s’est avéré que la plusgrande partie des épargnes était utilisée pour couvrirdes dépenses de santé, la tontine a été transformée enmutuelle de santé pour les femmes, avec l’objectif deréduire leur vulnérabilité aux risques de santé et deleur offrir une couverture alternative de santé. Lamutuelle de santé s’est ensuite étendue aux femmesqui ne travaillaient pas sur le marché, mais qui étaienten mesure de payer les frais d’adhésion et lescotisations mensuelles. Seules les femmes sontautorisées à adhérer, mais elles peuvent inclurel'ensemble de leur famille (immédiate et élargie) entant que bénéficiaires, pour autant qu'elles s’acquittentde la cotisation mensuelle correspondante pour chaquemembre inclus. Bien que les frais ne soient pas faibles(un paiement initial de 1 000 FCFA pour l’adhésion plusune cotisation mensuelle de 200 FCFA par bénéficiaire),la mutuelle s’est développée de manière significative,réunissant aujourd’hui près de 1,400 adhérentes et4,000 bénéficiaires.

Les caractéristiques les plus intéressantes de cettemutuelle de santé sont les suivantes :

• Elle est gérée par des bénévoles parce que l'argentversé par les membres ne suffit pas à couvrir lesdépenses administratives. Bien que ce système aitfonctionné jusqu'à présent, il est fortementdépendant de la volonté des bénévoles, dont il n’estpas sûr qu’ils aient toujours la capacité de gérer unemutuelle. Cette contrainte limite la croissance etpourrait même remettre en cause sa viabilité à longterme (toutefois, toutes les mutuelles existantes nesont pas gérées par des volontaires) ;

• Elle assure une couverture complète en soins desanté primaires et couvre également certains servicessecondaires. La fourniture des soins est assurée par

l'hôpital régional, avec lequel la mutuelle a signé unaccord. Dans les deux cas, les bénéficiaires doiventcontribuer aux frais d’hôpital. Toutefois, la couverturequ’elle fournit est limitée, car les patients ne peuventêtre hospitalisés plus de huit jours, sans paiementsupplémentaire. Passé ce délai, ils doiventrembourser à la mutuelle les coûts supplémentairesde l’hospitalisation, selon un calendrier de paiement.Lorsqu'une bénéficiaire cesse ses paiements, elle nepeut plus accéder aux services, à partir du moisconcerné et ce, jusqu'à ce que le paiement (y comprisles arriérés) soit effectué. Les retards de paiement deplus de six mois conduisent à l’annulation del’adhésion de la bénéficiaire, qui doit payer, ànouveau, des frais d’adhésion pour sa réintégration.Chaque mois, 30% à 40% des adhérents cessent leurspaiements.

• La directrice reconnaît que même si la mutuelle estdestinée aux femmes et aux ménages vulnérables, cene sont pas les plus pauvres qui y adhèrent, puisqueles plus pauvres ne sont pas en mesure de payer descotisations.

• Les femmes ont la possibilité d’inscrire leurs enfantset, habituellement, le font. Bien que, dans les cas deménages ayant de nombreux enfants, en général,certains d’entre eux finissent pas se retirer de lamutuelle. Des anecdotes rapportées suggèrent queles femmes ont tendance à inscrire leurs maris en tantque bénéficiaires, avant leurs enfants, probablementparce que cela est considéré comme un « meilleurinvestissement ».

• La mutuelle a pu adjoindre à la couverture qu’elleassure, d'autres mesures de protection pour lesfemmes. Par exemple, la gratuité des accouchementset une (modeste) incitation financière sont offertesaux femmes, sous réserve qu'elles respectent unprogramme de visites prénatales et post-accouchement et qu’elles s’assurent del'enregistrement de leurs enfants après la naissance.

• Malgré le discours du gouvernement exprimant sonsoutien à l'extension des mutuelles de santé et endépit des lettres de demande de soutien adressées,cette mutuelle - qui est l'une des plus importantesdans la région - n'a reçu aucun appui de la part del’Etat ou des collectivités locales, ni pour la formation,ni en ce qui concerne un éventuel appui technique oufinancier. Cela met en lumière un décalage, auquel ildoit être mis fin, entre le discours et la pratique auniveau des services étatiques.

Encadré 2: étude de cas d’une mutuelle de santé à Thiès26

95Analyse de la contribution potentielle et de la faisabilité de l'assurance maladie

relativement restreint. Ils tendent à être moinscoûteux que l'assurance-maladie privée. Dans lapratique, les mutuelles de santé et les assureursoffrent à leurs clients une gamme variée deservices. Le groupe des bénéficiaires comprendles cadres et dirigeants du secteur privé et dusecteur public, ainsi que les professionslibérales (médecins, avocats, etc.). Elles attirentun nombre croissant de travailleurs agricoles etde travailleurs du secteur informel,(Ntamwishimirou 2006).

Mutuelles de santéL’assurance maladie privée communautaire,généralement sous forme de mutuelles desanté, connait une croissance relativementrapide mais ne couvre pour le moment qu’unpeu plus de 4,25% de la population (Banquemondiale 2006b). La création de nouvellesmutuelles de santé - souvent liées à descoopératives et à des associations deproducteurs, est devenue une pratique trèsrépandue au sein de la société civile,contribuant au développement du système(Annycke 2008). Malgré le développementrapide du mouvement de mutuelles de santé,son poids dans le financement du secteur de lasanté reste relativement modeste. Il a uncaractère essentiellement urbain très fragilemarqué par des ressources réelles limitées (en2003, il y avait 1200 bénéficiaires pour 329adhérents) et de faibles taux de paiement descotisations (seulement 53% des adhérents sontà jour de leurs cotisations). La croissance plusrapide du nombre de mutuelles de santé quecelle des adhésions est une menace pour leurviabilité à long terme (Banque mondiale 2006b).L'État n’a cessé de promouvoir les mutuelles desanté afin d’augmenter la couverture enassurance santé du secteur informel. En fixantau DSRPII l’objectif de développer un systèmed'assurance maladie mutualisé qui puissecouvrir les travailleurs agricoles, les artisans, lestransporteurs et promouvoir la création demutuelles complémentaires couvrant lesrisques de santé des salariés du secteur formel,le Sénégal en a fait un élément clé de sastratégie d’extension (République du Sénégal,2006b). La plupart des mutuelles ont des assises

communautaires. Dans certains cas, elles sontliées aux institutions de micro finance ou auxorganisations professionnelles qui lesdéveloppent pour offrir à leurs adhérents uneprotection contre les risques de santé. Comptetenu de leurs faibles marges bénéficiaires, uncertain nombre d’entre elles sont gérées par desvolontaires. Cette situation peut se révéler nonviable à moyen terme et avoir des répercussionsnégatives sur la qualité des prestations car il n'ya aucune incitation à la performance et aucuneprédictibilité de l’appui fourni par lesvolontaires qui n’ont toujours pas les capacitésadéquates. Les mutuelles n'ont pas mis en placedes dispositions spécifiques pour assurer laprotection de la santé des enfants. Lesadhérents peuvent inclure les personnes à leurcharge en payant un forfait dont le montant estconditionné par le nombre d'enfants. Lesentretiens avec les responsables de mutuellesde santé ont montré que, dans le cas desfamilles nombreuses, ce ne sont pas tous lesenfants qui sont enregistrés.

96 LA PROTECTION SOCIALE DES ENFANTS EN AFRIQUE DE L’OUEST ET DU CENTRE : CAS DU SÉNÉGAL

27 Synthèse des programmes de protection sociale liés à la santé (Sow 2008).

8.2.2 Programmes de soins gratuits

En plus des cinq mécanismes de protection socialesanté destinés aux salariés du secteur formel, auxfonctionnaires ou aux personnes qui sont enmesure de verser des cotisations à des mutuelles,le Sénégal a procédé au renforcement de ce qui aété appelé «l’extension de la santé ", ou l'extensionde la couverture en protection sociale de santé,conformément aux engagements du DSRP II. Afinde promouvoir un plus grand accès à la santé, pourles populations vulnérables , ces engagementscomprennent des programmes de soins gratuitspour quelques groupes de population.

• Plan Sésame: Ce régime est la seule actionprioritaire qui ait été incluse dans le PAP duDSRPII. Il avait pour objectif d’étendre lacouverture en protection santé à toutes lespersonnes âgées de plus de 65 ans, soit environ556.000 bénéficiaires représentant 5% de lapopulation. Le régime bénéficie d’un financementgaranti de 1 milliard de FCFA, provenant de l'État(70%) et de l'IPRES (30%). Créé en 2006 sur uneinitiative présidentielle, il est financé par un fondsde roulement (le financement initial n'a pasencore été renouvelé), est géré par un organismenational rattaché au MSPM et est supervisé parun coordonnateur national. Dans chaque région,il y a une unité dirigée par le directeur régional dela santé, et des unités plus petites au niveau desdépartements placées sous la supervision desdirecteurs départementaux de la santé. Lesprestations sont fournies aux personnes âgées deplus de 60 ans qui sont en mesure de présenterleur carte d'identité. Les établissements de santésont tenus de fournir gratuitement des soinscomplets aux bénéficiaires, les factures étantenvoyées à l'organisme national, pourremboursement. Des comités d’usagers ont étémis en place pour vérifier l’effectivité de l'offre desoins et pour favoriser le partage d'informations.

A ce jour, le programme aurait atteint près de450.000 personnes. La continuité et la viabilitéfinancière d'un si grand système de subventionssera intéressante à suivre sur le moyen terme(notamment une fois que le fonds de roulementinitial sera reconstitué soit par des fonds publics

soit par des financements internationaux). Si sondéploiement est couronné de succès, il pourraitservir de modèle pour la mise en place d’unecouverture de santé destinée aux autres groupesvulnérables, comme les enfants. L'un desbienfaits du Plan Sésame est que les ménagesayant en charge des personnes âgées et desjeunes n'ont plus à supporter les coûts de santépour les personnes âgées. Ce qui permet detransférer sur les jeunes générations lesressources auparavant destinées aux personnesâgées. De même, il permet de libérer desressources pour d'autres formes de dépenses desménages, ce qui peut contribuer à l'améliorationde la qualité de vie des adultes et des enfants.

• Initiative pour la gratuité des accouchements et

de la césarienne: le programme de gratuité desaccouchements par césarienne est opérationneldans toutes les régions, à l’exception de la régionDakar. La gratuité des accouchements est limitéeà cinq régions: Kolda, Tambacounda, Ziguinchor,Fatick et Matam. Le coût, estimé à 440 millions deFCFA en 2006, est financé par des subventions del’Etat. Selon une évaluation du programmemenée en 2007 par l'USAID, environ 46.000femmes enceintes auraient bénéficié de ceprogramme en 2006 (USAID 2007). Lespartenaires au développement tels que l'UNICEFet l'UNFPA fournissent à l’Etat un appuicomplémentaire au financement de ceprogramme.

• Initiative de subvention des traitements

coûteux : Ce programme cible les personnesdont l’état nécessite des soins coûteux, telsque ceux souffrant de cancer, d’insuffisancesrénales, de tuberculose, de diabète, duVIH/SIDA (y compris par la fournitured'antirétroviraux) ou de paludisme. Lepaiement est conjointement garanti par desressources provenant de l'État et par lesfinancements des bailleurs de fonds, sousforme de subventions aux coûts des soins desanté. Le coût du programme en 2006 a étéestimé à 2,3 milliards de FCFA.

• Fonds national de solidarité: Cet instrument,introduit en 2002, couvre une gamme de

97Analyse de la contribution potentielle et de la faisabilité de l'assurance maladie

services sociaux ; en plus de l'assistance quipermet l’accès des groupes vulnérables à lasanté, il accorde des subventions sous formeindividuelle et sociale dans les situations decrise, afin de permettre une réinsertionsociale. Il est entièrement financé par l'Étatpar le biais d'une subvention annuelle de 500millions de FCFA. Il s'adresse aux victimes dechocs et de catastrophes et aux personnesvivant dans des zones dépourvuesd'infrastructures sociales de base.

• Assistance médicale de la Direction de

l'assistance sociale: Cette aide est accordéeaux «nécessiteux» pour les aider à prendre encharge les frais médicaux. Depuis 2007,environ 75 millions de FCFA ont été alloués auprogramme. Entre les mois de janvier et dejuin 2007, environ 1714 dossiers de demandeont été examinés, ce qui représente 0,9% de lapopulation cible estimée.

• Couverture des frais d'hôpital des «cas

sociaux»: les services sociaux des hôpitauxdisposent d’un budget qui leur permet decouvrir les dépenses et les prestations enfaveur des patients identifiés comme étant des«cas sociaux», c’est-à-dire tous ceux qui sontconsidérés comme indigents et incapables depayer.

• Couverture de «cas sociaux» dans les centres

de santé: les services de santé se sont vusinvités à allouer 10% des recettes issues de lafourniture de services aux «cas sociaux» etd’allouer 5% des recettes issues de la vente demédicaments à la fourniture gratuite demédicaments et à la «solidarité».

• Couverture des personnes détentrices d’un

certificat d'indigence : la Loi stipule que lespersonnes détentrices d’un certificatd'indigence peuvent bénéficier gratuitementde soins au niveau des structures publiques desanté. Si ce certificat est délivré par l'autoritéadministrative (préfet ou préfet adjoint), lessoins sont facturés au ministère de l’Economieet des Finances. Si le certificat est délivré par lemaire, c’est au conseil municipal de couvrir les

coûts. Chaque conseil municipal est tenu deprévoir une ligne budgétaire à cet effet.

• Couverture des démunis par la Caisse de

Sécurité Sociale : Au titre des paiementsindividuels la Caisse de Sécurité Sociale aconsacré 12 millions de FCFA en 2005 au profitdes nécessiteux, qu'ils soient membres de laCaisse de Sécurité Sociale ou non.

• Couverture des nécessiteux par les mutuelles

de santé : Certaines mutuelles de santéprennent en charge les coûts de santé dequelques personnes démunies, soit à traversleurs propres réserves budgétaires, soit en lesparrainant. Une étude de l’USAID en 2007 amontré que sur un échantillon de 15 mutuellesde santé, huit d’entre elles couvraient 30% deleurs membres par le biais de ces régimes.

• Couverture pour les personnes démunies dans

les postes de santé communautaires : Enseptembre 2005, le MSPM a "invité" les postes desanté communautaires à réserver 10% de leursrecettes provenant des services de santé et desconsultations et 5% des recettes provenant de lavente de médicaments pour la prise en chargedes «cas sociaux», c’est-à-dire les personnes quise trouvent dans l’incapacité de payer. Lesestimations du MSPM, basées sur les donnéesprovenant de 34 départements, montrent que lafourniture de services de soins aux cas sociaux sechiffre à un montant de 242 millions FCFA.

Il est encourageant de voir que le Sénégal disposed’un tel éventail de programmes ciblant lesvulnérabilités et la santé des plus pauvres, mais ilest nécessaire d’évaluer l'efficacité de cesmécanismes pour pouvoir affirmer qu’ils protègenteffectivement les catégories de population ciblées,pour voir si certains d’entre eux ne font pas doubleemploi, pour affirmer qu’ils sont mis en place demanière appropriée et pour identifier les moyensde les rationaliser et de les soutenir. Plutôt qu'uneapproche fragmentaire caractérisée par lesexceptions multiples, différentes dispenses depaiement de frais et, probablement, des coûtsadministratifs importants, le pays gagnerait àdisposer d'un plus grand nombre de systèmes

98 LA PROTECTION SOCIALE DES ENFANTS EN AFRIQUE DE L’OUEST ET DU CENTRE : CAS DU SÉNÉGAL

réunissant les différents mécanismes existantspour les dispenses. Ceci permettrait plus desynergies entre les différents mécanismes etaméliorerait l'efficacité dans l'utilisation desressources au profit des groupes vulnérables. Cettequestion devrait être soigneusement analyséedans le cadre des programmes d’extension de lasanté en cours.

8.3 Programmes actuels de

protection sociale santé ciblant

les enfants

Malgré les diverses réformes visant à résoudre leproblème de l'insuffisance de la protection socialedans le domaine de la santé, le pays ne dispose pasencore de programme national de dispense defrais ou de programme national de gratuité dessoins destinés aux enfants, comme c’est le caspour les personnes âgées avec le Plan Sésame. Lesenfants et les jeunes bénéficient de prestationsgratuites au titre de bénéficiaires secondairesprofitant des régimes mis en place pour de largesgroupes de population tels les accouchementsgratuits ; les accouchements par césariennegratuits, le traitement antipaludique gratuit pourles enfants et les femmes enceintes, et lacouverture vaccinale gratuite. Tous les autres soinsde santé pour les enfants - y compris lesconsultations – sont payants. Afin d'avoir accès auxsoins de santé, les enfants (ou leurs parents-tuteurs) doivent, soit avoir suffisamment d'argentpour couvrir les dépenses, soit bénéficier d’unecouverture par les mutuelles.

Il n'existe pas de dispositions spécifiques pourfinancer les soins de santé des enfants. Lesprocessus d’extension du financement dessoins de santé, tels que les mutuelles de santé,conduisent d’abord à une meilleure couverturesociale des chefs de ménage et ensuite desenfants en tant que bénéficiaires des premiers.Ceci permet d’augmenter le nombre d’enfantset de jeunes bénéficiaires, auparavant négligéspar les systèmes formels de protection sociale.Cette augmentation reste néanmoins modestecar la couverture par le système des mutuellesde santé reste relativement faible, avec un totalde 129 mutuelles de santé et un total de

bénéficiaires équivalent à seulement 3,79% dela population. La grande majorité des enfants etde jeunes (et leurs parents-tuteurs) reste exclue,en particulier ceux qui appartiennent auxménages qui n’ont pas les moyens de payer descotisations à des mutuelles de santé.

8.4 Options pour l'extension du

financement des services de santé

Pour compléter les systèmes de financement dessoins décrits ci-dessus, le Sénégal a développé unestratégie visant à étendre le système definancement des soins de santé aux travailleurs dusecteur agricole qui sont, pour l’essentiel, destravailleurs informels. À cette fin, le Ministère del'Agriculture (avec l'appui du programme STEP duBIT et en partenariat avec le MSPM) a lancé uneinitiative visant à étendre durant les prochainesannées la couverture des mutuelles de santé à tousles agriculteurs, (entretiens des auteurs, 2008).Compte tenu de l’importance du monde agricole auSénégal et du fait que le secteur agricole eststructuré de façon similaire dans l'ensemble dupays, il est prévu que cette initiative soit à grandeéchelle avec un fort impact attendu. Le démarragede la première phase du programme est prévu pourfin 2008. L'un des principaux objectifs assignés auprogramme est qu’il soit en mesure de pénétrerjusqu’à l’intérieur de toutes les régions du pays.

Les objectifs du programme sont de résoudre leproblème du faible recours aux services de santéen supprimant les barrières liées aux coûts et deréduire, ainsi, l'exclusion des services de santédont souffre cette grande partie de la population.La plupart des producteurs agricoles étantmembres des coopératives et des associationsagricoles, il s’agira d’adjoindre à ces dernières desmutuelles de santé. Ceci facilitera la portée etaccélérera la pénétration. Un organisme nationalde gestion supporté par des représentations auniveau régional et au niveau des collectivitéslocales, sera mis en place pour permettre lesinscriptions, gérer les transferts des fonds etvalider/effectuer les paiements aux servicesfournissant les soins. Les mutuelles de santélocales qui seront créées au sein des coopérativesagricoles, seront chargées uniquement de la

99Analyse de la contribution potentielle et de la faisabilité de l'assurance maladie

gestion des relations avec les bénéficiaires. Cetteéconomie d'échelle en matière de gestionpermettra de réduire les coûts tout en garantissantdes normes minimales de service.

Selon les informations obtenues auprès desspécialistes appartenant au programme STEP duBIT au Sénégal, des études sur le système de santéau Sénégal ont estimé que les dépenses de soinsde santé primaires et secondaires financées surressources propres s’élevaient en moyenne à13.500 FCFA par personne. Le régime devraitgarantir aux bénéficiaires l’accès à un paquetcomplet de soins de santé primaire et secondaire,y compris l'accès aux médicaments génériques. Ilest prévu que le programme demande auxadhérents une contribution de 3.500 FCFA, par anet par bénéficiaire, le reste incombant à l'Etat quifournira les autres 10.000 FCFA par personne et paran. La subvention de l'État alimentera l'organismenational, qui effectuera les paiements aux servicesde santé fournissant les soins. La phase initiale duprojet, d’une durée de deux ans, couvrira deuxrégions, et permettra de tester le mécanisme et defaire les ajustements nécessaires avant l’extensionau reste du pays.

Ce programme peut être qualifié comme unsystème "du côté de la demande», dans lequelle bénéficiaire a, en principe, plus de pouvoir dedécision mais où les services fournisseurs desoins de santé ont la garantie d’être payés pourles prestations qu'ils fournissent.

Grâce à une approche consolidée de gestion, cesystème devrait permettre de réduire les coûts degestion et d’améliorer l'administration, ce quiréduirait les coûts du système tout en le rendantplus transparent et plus responsable. Cecirenforcera la tendance visant à mettre un terme àla gratuité des services de santé et permettra dechanger le mode opératoire de l’état en sedégageant de la fonction fournisseur de soinsgratuits pour se repositionner dans celle definancier des services de soins sur une plus grandeéchelle.

Cet ambitieux programme prend en compte bonnombre des préoccupations actuelles

concernant la stratégie d’extension de la santé.Cependant, plusieurs questions importantesrestent à régler pour permettre sa faisabilité:

• L’Etat s’engagera-t-il financièrement sur le longterme pour pouvoir subventionner les coûts detous les bénéficiaires ?

• Comment ce système dont l’ambition est den’exclure aucune personne arrivera-t-il àprendre en charge les travailleurs ruraux quin’ont pas la capacité de payer une contributionannuelle de 3.500 FCFA ?

• Est-ce que le système prendra des mesuresspéciales pour améliorer les services de santéet assurer la couverture en soins de santé desenfants et des femmes ?

• En cas de réussite, le système sera-t-il étenduà d’autres secteurs autres que celui del’agriculture?

• Le Ministère de l'Agriculture continuera-t-il d’êtrele chef de file du projet ou est-il prévu que leMSPM s'implique davantage, afin que soitassurée une plus grande complémentarité avecles autres programmes de mutuelles de santé,dont ce dernier assure déjà la promotion ?

• Les bailleurs de fonds sont-ils intéressés àcontribuer au financement de ce nouveau régime ?

Ces questions devront être examinées, une foisque le programme sera lancé. Mais, compte tenude son ampleur et du montant des ressources qu’ilabsorbera une fois son passage à l’échelle effectué,le système devra faire l’objet d’un suivi attentif parles parties prenantes impliquées dans le domainede la protection sociale. Le programme devra,toutefois, résoudre la question de la faiblecoordination entre le MSPM et le Ministère del'Agriculture, pour le développement duprogramme. Compte tenu des rôles majeurs jouéspar le MSPM et ses établissements dans lafourniture de services de soins, la persistanced’une faible coordination entre ces deuxdépartements peut générer des problèmes diversdu type gestion de l’offre, faible capacité de fournir

100 LA PROTECTION SOCIALE DES ENFANTS EN AFRIQUE DE L’OUEST ET DU CENTRE : CAS DU SÉNÉGAL

service, priorité accordée aux bénéficiaires desautres mutuelles de santé. De plus, le MSPMdévelopperait aussi un «cadre pour l’extension dela santé" ayant pour objectif d’englober etd’harmoniser les différents et nombreux systèmeset mécanismes existants et d’en favoriser lessynergies et réduire les doubles emplois.

Compte tenu de la tendance des systèmes definancement de la santé à évoluer vers lesapproches orientées du « côté de la demande »,le transfert d’espèces aux groupes vulnérablessusceptibles d’être victimes d’exclusion (parexemple les ménages pauvres avec des enfants)pourrait être un moyen d'assurer leur inclusiondans le système de financement de la santé.

8.5 Conclusion

En optant pour des systèmes de santé à basecommunautaire, le Sénégal a pu étendre l'accèsde la population aux services de santé. Toutefois,cette extension n’a pu atteindre tous ces objectifs,car les frais d'accès aux services de santécontinuent d’être un obstacle pour les ménagespauvres, notamment dans les situations où lamarginalisation économique est aggravée par lasurvenue de maladies parmi les membres duménage. L’obligation de payer des frais deconsultations et de traitement (sauf en ce quiconcerne la prise en charge du paludisme qui estexonérée de frais) peut être un obstacle quiempêchera les enfants de recevoir les soins ettraitement requis quand ils ont en besoin.

Pour la mise en œuvre de la stratégie deréduction de la pauvreté, le Sénégal a opté pourune politique d'extension de la protectionsociale en soins de santé ayant pour objectifd’étendre la couverture à ceux qui travaillentdans le secteur informel et de développer desmécanismes permettant la protection desgroupes les plus vulnérables, en particulier lespersonnes démunies. Dans le cadre de cettestratégie, la gratuité des soins de santé estdésormais prévue pour les personnes âgées parle biais du Plan Sésame. Afin d'améliorer leschances d’atteindre les OMD en matière desanté maternelle et infantile, et compte tenu des

problèmes de santé qui affectentprioritairement les quintiles les plus pauvres dela population (chapitre 7.4), le pays gagnerait àrechercher des mécanismes alternatifs pouvantaméliorer le financement des services de soinsde santé pour les enfants appartenant auxménages pauvres. Des études devraient êtremenées pour déterminer les coûts qui seraientinduits par la fourniture de servicessupplémentaires gratuits aux enfants, et pourestimer le coût de la subvention nécessaire àl’inscription des enfants pauvres dans lesmutuelles de santé qui sont une alternativeayant de bonnes chances de réussite dans lecontexte actuel de gestion communautaire dusystème de santé.

Le Sénégal considère, pour le moment,plusieurs options pour étendre le système deprotection sociale santé. Les plus importantesportent sur le développement de systèmes demutuelles pour les travailleurs du secteurinformel et du secteur des transports. A cestade, il est important de s’assurer que cesdifférentes options considèrent les enfantscomme une priorité et que leurs besoins soientintégrés dans toutes les analyses. Les enfants,bien que plus vulnérables que toutes les autrescomposantes de la société, risquent d’être lesoubliés dans ces nouvelles formules deremplacement de la couverture en soins desanté. Les mécanismes visant la protection desplus pauvres parmi les pauvres contre lesrisques de santé doivent également, et de façonexplicite, prendre en compte les enfants, nonseulement en tant que personnes à la chargedes adultes (indigents) potentiels bénéficiaires,mais aussi en tant qu’entités distinctes. Il y a eneffet des enfants appartenant à plusieurscatégories d’enfants particulièrementvulnérables aux risques sociaux et de santé telsles enfants des rues, les enfants victimes detrafic d’êtres humains ou victimes demaltraitance, qui ne peuvent être rattachés à unadulte ou un ménage. Cela implique que dessynergies soient recherchées, entre lescomposantes du DSRPII qui portent surl'extension des services de santé et celles quivisent la protection des enfants vulnérables.

101Renforcement des services de protection de l’enfance, au sein des systèmes généraux de protection sociale

9. Renforcement des services de protection

de l’enfance, au sein des systèmes

généraux de protection sociale

Les personnes sont exposées à une diversité derisques et de vulnérabilités liées à la santé, aucycle de vie ou de l’ordre du social et dont lesnatures et les manifestations sur les enfantssont clairement identifiables. Ces vulnérabilitésfavorisent la violation des droits de l'enfant, ycompris leur droit à être protéger. Parmi lesfacteurs qui engendrent ces vulnérabilités chezl’enfant, on compte, entre autres, leur nonenregistrement à l’état-civil, l'insuffisance de laprotection de l'État et les communautés pour lesenfants dépourvus de protection parentale ;l'exploitation des enfants par le biais de la traiteet l'exploitation par le travail ; la mise ensituation prématurée des enfants dans les rôlesd’adultes, le mariage ou les travaux dangereuxet les violences faites aux enfants dont certainesrésultent de pratiques traditionnelles néfastes.Les enfants touchés par ces facteurs incluentceux qui ne sont pas enregistrés à la naissance,les orphelins, les enfants des rues, les enfantsen situation de mariage précoce et ceux qui sontsoumis à un travail nocif ou sont victimes detraite. Bon nombre de ces facteurs peuvent êtreliés à la pauvreté et aux vulnérabilités sociales

et économiques qui existent au sein du ménage(UNICEF 2006).

Selon l'UNICEF (2006), un système en mesurede répondre à ces vulnérabilités et d’offrir unenvironnement protecteur pour les enfants doitcomporter les éléments suivants :

• Le renforcement de la capacité des familles etdes communautés à prendre soin et à protégerles enfants;

• Un engagement de l’Etat en faveur de laprotection de l'enfance traduit en termesd’allocations budgétaires suffisantes et depolitiques sociales ciblées sur les enfants lesplus exclus et les moins pris en compte ;

• La ratification et l’application des législations,tant nationales qu’internationales, concernantles droits des enfants et leur protection;

• Veiller à ce que les enfants connaissent leursdroits, qu’ils soient encouragés à les exprimeret qu’ils soient dotés des compétences de vie

102 LA PROTECTION SOCIALE DES ENFANTS EN AFRIQUE DE L’OUEST ET DU CENTRE : CAS DU SÉNÉGAL

et des informations leur permettant de seprotéger contre les abus et l'exploitation;

• La disponibilité des services sociaux de basepour tous les enfants sans discrimination ;

• L’existence d’un mécanisme de suivicomprenant la production et la disséminationde rapports transparents et un suivi dessituations de maltraitance et d’exploitation.

Ces éléments, pris dans le cadre d'un systèmeplus large de protection sociale ciblé sur lesenfants, peuvent contribuer à prévenir lesvulnérabilités des enfants, indépendamment deleur statut socio-économique, de leur sexe oude leur appartenance ethnique. Ils peuventégalement contribuer à promouvoir leur bien-être et le respect de leurs droits, ainsi qu’à lesprotéger contre l'exclusion et contre les risquessociaux et économiques. Ce chapitre examine lecadre général de protection sociale au Sénégalpour voir dans quelle mesure il contient certainsde ces éléments et s’il peut servir à renforcer lesservices de protection des enfants, afind'atténuer la vulnérabilité des enfants à lapauvreté, à la négligence, aux violences et auxabus.

9.1 Priorités de la protection de

l'enfance

La stratégie de réduction de la pauvreté auSénégal, contient au niveau de l’axe 3 portantsur la protection sociale des dispositionsspécifiques portant sur les «enfantsvulnérables» en tant que catégorie spécifique.Les actions suivantes y sont proposées :

Dans le cas des enfants en situation de risque,l'objectif est de renforcer les actions prioritairesvisant à éliminer les pires formes de travail desenfants et à protéger les enfants contre toutesles formes d'exploitation, d'abus et de violence.Plus précisément, il s'agira de (i) élaborer unestratégie pour la fourniture de soins et pour laréinsertion sociale des enfants en conflit avec laloi et des enfants en situation difficile; (ii) créer

et renforcer les capacités des institutionsspécialisées dans les soins aux enfantsvulnérables (les enfants mendiants, les enfantsservant de guides aux mendiants handicapés,les enfants des femmes touchées par l'extrêmepauvreté, les orphelins du sida, les enfantsvictimes de toxicomanie, les enfants Talibés, lesenfants abandonnés, ou des enfants en conflitavec la loi), (iii) renforcer la législation existantesur la protection des enfants et la prise demesures pour assurer son application effective,(iv) développer l'information, la communicationsociale, la recherche, la sensibilisation, lerenforcement des capacités, ainsi que lesinterventions directes de promotion afind’éliminer l'exploitation des enfants par lamendicité, les mariages précoces, etc., (v) veillerà ce que les meilleurs soins soient assurés pourles enfants victimes du VIH / sida et de maladieschroniques, (vi) engager des activités deplaidoyer en direction des autorités politiques,des autorités religieuses, des autoritéstraditionnelles, des partenaires audéveloppement, et de l'ensemble de lacommunauté, en vue d'améliorer les conditionsde vie des enfants Talibés, (vii) prendre desmesures et établir des dispositions pourl'enregistrement de toutes les personnes auniveau de l’état civil, et (viii) poursuivre etrenforcer l'amélioration des espaces et desinfrastructures favorables au développementdes enfants. Compte tenu de la volonté politique du Sénégalde faire du DSRPII un cadre fonctionnel despolitiques, l'inclusion explicite des priorités‘protection de l’enfance’ dans la composanteprotection sociale du DSRPII, a été cruciale pourla création d’un environnement politiquefavorable au déploiement de programmes. Bonnombre des actions spécifiques proposées danscette stratégie portent sur l'amélioration despratiques de soins et sur les institutions pour lesenfants en situation de vulnérabilité ou déjàexposés à une situation de risque. Cettestratégie comporte, également, des élémentsimportants comme la prévention. Celle-cidéclinée en termes de renforcement de lalégislation et de promotion d’activités de

103Renforcement des services de protection de l’enfance, au sein des systèmes généraux de protection sociale

communication sociale communautairedestinées à modifier les pratiques socialesexposant les enfants aux risques.

Toutefois, partant du postulat que lavulnérabilité et les risques auxquels sontconfrontés les enfants et leurs dispensateurs desoins au Sénégal, sont graves, multiples etqu’ils entraînent des privations de divers ordres,les priorités d’une protection sociale favorableaux enfants doivent porter sur plusieursfacteurs de vulnérabilité. En plus des actionsproposées dans le DSRPII au profit despopulations vulnérables, il est important deconsidérer comme priorités pour la protectiondes enfants, le développement des enfants et laréduction de leur pauvreté, notamment pourbriser la transmission intergénérationnelle deleur vulnérabilité. Cela consisterait, parexemple, à insister sur la pertinence des actionsvisant à réduire la pauvreté au niveau desfamilles et au niveau des communautés, car cesphénomènes sont susceptibles de mettre lesenfants dans des situations d'exploitation(migration des enfants vers les centres urbainsdu pays ou vers les pays étrangers), de lesexposer aux mariages précoces et aux formesnuisibles de travail. Cela consisterait égalementà garantir l'accès des enfants aux services debase. A cet effet, il est important d’augmenter lavisibilité des enfants dans les composantes duDSRPII. Ceci est indispensable pour promouvoirune approche plus holistique de la protection del'enfance, qui comprenne des mesures deprotection, de prévention, de promotion et detransformation, intégrées au sein d’unestratégie plus large visant la transformationéconomique et sociale.

L’élaboration et la mise en œuvre des politiquesde protection de l'enfance relèventprioritairement de la Direction de l'enfance ausein du MFSNEFMF et secondairement duMinistère de la Justice pour quelques aspectsspécifiques. Au plan opérationnel, augmenter lavisibilité des enfants impliquerait l'intégrationplus explicite des aspects liés à la protection desenfants, au sein des autres politiques

sectorielles et des programmes de ces deuxentités. Par ailleurs, cela favoriserait le dialogueentre ces entités et avec les autresdépartements ministériels chargés ou non de lamise en œuvre de «la protection sociale desgroupes vulnérables» tels que démembrementsde l’Etat, les groupes de travail et les centresciblés sur l'enfance (Cellule d’Appui à la Petiteenfance rattachée à la Présidence).

Malgré la grande visibilité dont bénéficient lesenfants vulnérables dans le DSRPII du Sénégal(très élevée si on la compare aux pays de larégion), il y a encore quelques contraintes qui,une fois levées, permettraient une meilleurecompréhension et une plus grandeopérationnalisation de la protection des enfantsau Sénégal.

Contraintes d’ordre socioculturel• Désagrégation des processus informels de

protection intergénérationnelle et des réseauxde soutien familiaux / communautaires, du faitdes responsabilités croissantes qui pèsent surles jeunes générations;

• Existence de pratiques sociales ou culturellesqui peuvent faciliter la violation des droits desenfants et qui peuvent limiter les mesuresprotégeant les enfants prévues dans le DSRPII,et

• Problèmes d’équité et d'exclusion des enfants,en particulier des filles.

Contraintes d’ordre politique

• Faible application des dispositions légales;

• Insuffisance des budgets alloués aux servicesde protection de l'enfance;

• Mauvaise coordination entre les décideurspolitiques responsables de la protection desenfants et insuffisance de coordination entreles services transversaux de protection del'enfance opérant au niveau communautaire;

• Faible ciblage sur les enfants de la plupart desmécanismes de protection sociale, ce qui

104 LA PROTECTION SOCIALE DES ENFANTS EN AFRIQUE DE L’OUEST ET DU CENTRE : CAS DU SÉNÉGAL

signifie qu'il n'y a pas de garantie que leursprestations aient un impact direct sur lesenfants, en particulier dans les contextes où lapriorité n’est pas accordée aux enfants(surtout les jeunes enfants) au sein desménages; et

• Difficultés à cibler les groupes d’enfantsvulnérables, au sein et en dehors desménages.

Après avoir passé en revue quelques unes despriorités pour la protection de l'enfance tellesqu’articulées dans les SNPS et DRSPII du Sénégal,le prochain chapitre analysera les systèmes et lesinstitutions en place pour juger de leurs capacitésà répondre aux priorités de protection del'enfance. Il envisage aussi les mesures quipermettraient de renforcer les services deprotection de l'enfance dans le cadre plus généraldu système de protection sociale.

9.2 Systèmes actuels de protection

de l'enfance

9.2.1 Les institutions

La protection des enfants relève de nombreuxdépartements ministériels mais plusparticulièrement de la responsabilité duMFSNEFMF et du Ministère de la justice. LeMFSNEFMF comprend, en son sein, la Directionde la Protection des Droits des Enfants (DPDE),qui a principalement un rôle de développementdes politiques et de coordination. Le Ministèrede la Justice, quant à lui, comprend la Directionde l'éducation spécialisée et de la ProtectionSociale (DESPS), dont la mission estessentiellement d’assurer la réinsertion socialedes enfants en situation de risque, y compris etnotamment ceux qui sont en conflit avec la loi,les enfants abandonnés et les enfants qui nefréquentent pas l'école. Bien qu'il y ait eu desaméliorations dans le fonctionnement de cesdeux Directions, il existe encore de nombreuseslacunes dans la mise en œuvre de certains deleurs programmes.

Le manque de ressources budgétaires pour lamise en œuvre des politiques et desprogrammes prioritaires destinés à la protectiondes enfants représente l’un des obstacles lesplus importants. Le MFSNEFM bénéficie del'appui des parlementaires et des partenaires audéveloppement (Save the Children, PlanInternational, UNICEF) pour améliorer leprocessus de budgétisation et le rendre plusfavorable aux enfants. Le contexte actuel paraîtfavorable à la mobilisation de plus deressources car l’actuel DSRPII a fait de laprotection de l'enfance une partie intégrale deses composantes. Le principal handicap est lemanque de programmes au profit desquels lesressources pourront être canalisées.

La deuxième contrainte de type institutionnelqui freine la protection sociale des enfants estrelative à la faiblesse des capacités de ces deuxdépartements. La Direction interministérielledes droits de l'enfant ne joue pas le rôle crucialqui en est attendu en termes de coordination etde mise à disposition des différents organesimpliqués dans la réduction de la pauvreté desenfants et de protection de l’enfance descompétences techniques nécessaires. En 2006,le Comité CNUDE, dans son rapport sur l’étatde la mise en œuvre de la convention desdroits les recommandations, a recommandé auSénégal de "renforcer" les capacités de laDirection interministérielle des droits del'enfant, en définissant son mandat exact etson rôle, ainsi qu’en lui affectant un personnelbien formé. En outre, la DPDE a un poidspolitique relativement faible et ne joue aucunrôle stratégique.

Ces faiblesses institutionnelles ont suscité lacréation de nouvelles entités supposées êtreplus opérationnelles car débarrassées descarcans administratifs. La création récente de laCAPE, rattachée directement à la Présidence asuscité quelques espoirs en raison de saposition stratégique. Il est attendu que la CAPEjoue le rôle de leadership pour réunir lesdifférentes parties prenantes et les amener àmettre en place une stratégie transversale de

105Renforcement des services de protection de l’enfance, au sein des systèmes généraux de protection sociale

protection de l'enfance. Cette cellule a prévud’initier prochainement des rencontresmultipartites entre les acteurs pour développerle Plan d'Action National pour les enfants. Ladeuxième initiative est la création du PARRER(Partenariat pour le Retrait et la Réinsertion desEnfants de la Rue) promu conjointement parl’Etat et les bailleurs de fonds pour canaliser lesressources et l'appui sur les programmes quivisent à améliorer la situation des enfants de larue. Ces programmes bien qu’axés surl'amélioration des services de soins destinésaux enfants de la rue, peuvent être desplateformes autour desquelles pourraient sedévelopper des programmes ciblant les causesde cette vulnérabilité, dont la pauvreté desenfants.

9.2.2 Les dispositions légales

Le Sénégal a développé un cadre juridique assezcomplet pour la protection des enfants. Le paysa signé toutes les conventions internationales etprotocoles concernant les enfants. En fait, laCNUDE a été incorporée dans la Constitution de2001, rendant ainsi toutes ses dispositionsjuridiquement contraignantes. Cependant, lamise en œuvre de ces dispositions se heurte àdeux contraintes principales: i) les délais depublication des décrets d’application et desrèglements sont très longs retardant l’intégrationau droit positif sénégalais de ces dispositions etde ce fait, bon nombre de ces dispositionslégales ne sont pas encore appliquées, ii) lestraditions religieuses, la culture et les coutumestrès fortes au Sénégal, sont souvent encontradiction avec les normes juridiques.Combinées, ces contraintes facilitent lapersistance de pratiques traditionnelles néfastescomme le mariage précoce des enfants.

Pour améliorer cette situation, la DPDE a mis enplace un plan comprenant la promotion dudialogue avec les autorités religieuses et lesleaders d'opinion, la sensibilisation du public etdes autorités à différents niveaux à la nécessitéde protéger les enfants. L'UNICEF et d'autresONG soutiennent fortement ce processus. Parmi

les dispositions légales importantes, il y a la Loisur la Réforme de la Protection de l'Enfancepromulguée en mars 2007 et dont le but est derenforcer les mécanismes de réponse liés auxbesoins de protection des enfants. Cependant,plusieurs décrets ne sont pas encore publiésbloquant la pleine application de la loi. Lesautres textes législatifs pertinents pour lesenfants comprennent:

• Le Code de la famille, qui est en place depuisles années 1970, mais qui est souvent modifiépour intégrer les nouvelles dispositions sur laprotection des enfants;

• Le Code du travail de 1997, qui fixe l'âgeminimum du travail à 15 ans;

• La loi n° 99-05 de 1999 interdisant l'excision, leharcèlement sexuel, la pédophilie et lesagressions sexuelles ainsi que toutes lesformes de mutilations sexuelles, les violencessexuelles et la corruption de mineurs;

• La loi n ° 2005-02 (2005) contre la traite desêtres humains et pour la protection desvictimes;

• Les amendements datant de 2004 apportés à laloi n° 91-92 pour rendre l'enseignement gratuitet obligatoire pour les enfants âgés de 6 à 16 ans.

Le Sénégal prépare actuellement un Code del'enfant compilant les dispositions juridiquesrelatives aux enfants, réparties entre différentstextes et lois. Cela permettra égalementd’accroître la transparence et l'accessibilité desdispositions juridiques relatives aux enfants etainsi facilitera l'application des textes etrèglements relatifs à la protection des enfants.

9.2.3 Le rôle des acteurs non

gouvernementaux

En complément des efforts déployés par lesstructures gouvernementales pour étendre lesprogrammes de protection de l'enfance, les

106 LA PROTECTION SOCIALE DES ENFANTS EN AFRIQUE DE L’OUEST ET DU CENTRE : CAS DU SÉNÉGAL

organisations internationales de développement,telles que l'UNICEF Sénégal, Save the Children,Plan International, l’OIT, ont développé desprogrammes et renforcé leur partenariat avec lesdifférentes structures gouvernementales.

Cet engagement, l’UNICEF Sénégal y ayant uneposition privilégiée, est un élément déterminanten termes de coordination car il facilite lessynergies et la complémentarité entre lesdifférents Ministères et permet ledéveloppement d’un système de protectionsociale multidimensionnel ciblant les enfants.

Dans ce dispositif, l'UNICEF est un acteurmajeur dans la promotion des droits del'enfant et la protection des enfants cartravaillant en partenariat étroit avec la DPDE.L'UNICEF a, également, activement soutenule Ministère de la Justice et le systèmejudiciaire en général, pour assurer lerenforcement des systèmes de protection del'enfance. L'une des premières étapes aconcerné la sensibilisation sur le cadrelégislatif et les instruments juridiquesexistants pour la protection des enfants, tant

au niveau national qu’international. Ceci afavorisé la prise de conscience sur l'écartexistant entre ces conventions et le « droitnormatif » du Sénégal (système juridiqueinterne), et sur la nécessité de la traductionde ces législations en politiques ciblées surles enfants. L'UNICEF a également fourni unappui pour adapter les textes nationaux etformer les personnels sur les droits del'enfant et les approches de protection del’enfance. Ceci a permis de conscientiser etde renforcer les capacités des fonctionnairessur les façons dont les enfants ont besoind'être protégés et sur les manières de réduireles cas de violation des droits des enfants.

Il existe aussi de nombreuses ONG locales etinternationales s’activant dans la mise en œuvredes droits de l'enfant et de la protection desenfants. Ces organisations utilisent différentesapproches, dont notamment le renforcementdes capacités des agents chargés de laprotection des enfants et le plaidoyer auprès dugouvernement et des parlementaires, pour faireadopter et promulguer les lois relatives auxenfants. Au Sénégal, un grand nombre de ces

La CONAFE a été créée en 2004. Elle comprend 212associations et ONG, travaillant dans le secteur de laréponse aux besoins des enfants et présentes dans les11 régions du Sénégal. La Coalition opère sous latutelle du MFSNEFMF et a trois partenairesstratégiques : Plan, UNICEF et Save the Children.

Les axes stratégiques de la CONAFE sont au nombrede trois : le plaidoyer, le renforcement des capacités àtravers la professionnalisation des membres de lacoalition, et la promotion de la participation effectivedes enfants. Le plaidoyer est axé sur la promotion desdroits des enfants au sein de la société civile ainsiqu’en direction de l’Etat, pour pousser au respect desengagements pris par ce dernier lors de la ratificationdes conventions telles que la CDE et les instrumentsjuridiques nationaux. Les principaux aspects de laprotection sociale sur lesquels la CONAFE a engagé ledialogue avec l’Etat, principalement en menant desactions de plaidoyer auprès des ministères et des élus,concernent notamment les questions surl'exploitation des enfants par la mendicité en milieu

urbain, l'éducation, les mariages précoces, lesmutilations génitales féminines, et la nécessité del’harmonisation des textes juridiques nationaux, enrelation avec les conventions et traités internationauxque le Sénégal a ratifié.

En termes de participation des enfants, et dans lesillage des efforts menés dans ce sens par la DPDE, laCONAFE encourage les associations d’enfants, lesclubs d’enfants et les parlements des enfants, entreautres, en tant que moyen de promouvoir les droitsdes enfants et comme mécanismes de prévention desrisques, par le biais de la sensibilisation et d’actionsde communication au niveau des communautés. Surtous ces aspects, la coalition s’efforce d'encourager laparticipation des enfants en tant qu’acteurs, y comprisen poussant à l'implication des enfants dans lesconsultations qui sont menées en vue du secondDSRP.

Encadré 3: La Coalition Nationale des Associations et

des ONG en faveur de l'Enfance (CONAFE)

107Renforcement des services de protection de l’enfance, au sein des systèmes généraux de protection sociale

ONG se sont organisées dans un cadre commundénommé la Coalition Nationale desAssociations et des ONG en faveur de l’Enfance(CONAFE).

9.3 Favoriser les synergies entre la

protection de l'enfance et la

protection sociale

Au Sénégal, il y a de nombreuses opportunitéspour renforcer les synergies entre la protectionde l'enfance et la protection sociale. Lapremière est liée à l’inclusion dans la stratégiede réduction de la pauvreté d’un axe protectionsociale contenant lui-même des interventionsspécifiques pour la protection des enfants. Cecia déclenché un mouvement en faveur d’uneapproche systématique pour la protection del'enfance au Sénégal. La deuxième opportunitéest la position privilégiée de la DPDEdépendant du MFSNEFMF qui est ledépartement responsable de la coordination dela protection sociale. De par sa natureinterministérielle, cette direction devraitcontribuer à renforcer le dialogue et contribuerà intégrer les priorités de la protection sociale.Elle devrait par exemple faciliter la création desynergie entre les interventions prévues entermes de réponse aux besoins des groupes depopulations vulnérables (Composante 3) quiincluent les ménages très pauvres avec lesenfants, enfants handicapés et les autresenfants vulnérables et celles qui portent surl'extension de la protection sociale(Composante 2), au sein de laquelle la visibilitédes enfants est actuellement inexistante.

Un autre moyen de lier la protection sociale et laprotection de l'enfance consisterait àpromouvoir le développement des programmesde transferts d’espèces ciblés sur les enfants, telque cela a été décrit au chapitre 7. Ce typed’assistance faciliterait l'extension de laprotection sociale en permettant aux personnesvulnérables d’avoir un meilleur accès auxservices sociaux de base, en particulier l’accès àla santé, à la nutrition et à l'éducation pour lesenfants. Cela serait un moyen plus efficace pour

transférer l'assistance du gouvernement auxpauvres et cela contribuerait en même temps àréduire certaines vulnérabilités qui affectent lesménages. Ceci pourrait être atteint parl’amélioration des moyens de subsistance desménages quand les ressources supplémentairesseront utilisées pour des activités génératricesde revenus. Cela peut, aussi, être obtenu enatténuant l’impact des chocs (maladies…) quiaggravent la pauvreté des familles etconstituent souvent les causes de l’engagementdes enfants dans des situations de travailnocives, de l’abandon scolaire ou de lamigration, ce qui ensuite les expose aux risquesd'exploitation.

Un programme de transferts d’espèces axé surles enfants pourrait également être relié auxefforts du PARRER, partenariat offrantactuellement une assistance aux enfantsvulnérables qui se trouvent dans les rues. Celapourrait être particulièrement efficace dans lescas où les enfants quittent les ménages rurauxà la recherche de ressources supplémentairespour eux ou pour leur famille et dans les casoù les parents sont dans l'incapacité de payerles frais indirects de scolarité de leurs enfants.Les résultats d’études investiguant cessituations pourraient aider à développer unprogramme de transferts d’espèces à petiteéchelle, comme par exemple un projet dansles localités pourvoyeuses de ces enfantsmigrants. Ce programme permettrait dedéterminer si une amélioration des revenusdes ménages augmente les chances de garderles enfants au sein des familles, ce quipermettrait de les protéger contre les risquesqu'ils encourent lorsqu’ils vivent seuls dansles centres urbains. Il sera probablementnécessaire de renforcer ce type de programmepar des interventions du côté de l'offre, enaccroissant notamment les opportunités pourles enfants et leurs familles, au sein de lafamille et au niveau de leur localité derésidence.

Un autre point d'entrée pour la promotion deces synergies réside dans les discussionsmultisectorielles autour de l'élaboration d'un

108 LA PROTECTION SOCIALE DES ENFANTS EN AFRIQUE DE L’OUEST ET DU CENTRE : CAS DU SÉNÉGAL

Plan d'Action National pour l'Enfance. Pourpermette au Sénégal d’atteindre sesengagements pris au titre de la mise en œuvrede la CDE, il est prévu que le Plan Nationald'Action articule les contributions des différentssecteurs pour les canaliser sur la promotion desdroits des enfants. Le développement de ce planest une occasion que les parties prenantesdevront saisir pour aussi articuler les actionsportant sur l'extension de la protection socialeaux enfants permettant de promouvoir lesdroits à l'éducation, à la santé ainsi qu’à laprotection contre le facteurs de risque (travaildangereux, violence, maltraitance etnégligence, etc.). Ces mécanismes et actionsincluent le dialogue avec les communautés,dans une approche visant à mettre un terme auxpratiques traditionnelles néfastes.

De telles initiatives créent des espaces dedialogue entre les parties prenantes etaugmentent, par conséquent, la probabilité quesoient préparées des propositions tenant biencompte des différents aspects de la protectiondes enfants et susceptibles d’être bienintégrées dans le cadre plus large du systèmenational de protection sociale. Cette propositioninclurait une feuille de route précise, détailleraitla façon de s'assurer que la protection socialeest axée sur les enfants et intègrerait desaspects de prévention, de protection, depromotion et de transformation.

L'UNICEF Sénégal qui fait partie des partiesprenantes œuvrant dans réduction de lapauvreté et la protection sociale peut seprévaloir de bonnes relations avec lesmultiples acteurs et de liens étroits avec laDPDE, chef de file pour le développement dece plan national d'action. A ce titre, l’UNICEFest en mesure de fournir une assistancetechnique et d’appuyer des travaux derecherche pour produire les évidences quifaciliteraient le développement de ce plan, quià son tour permettrait une meilleurearticulation des politiques de protection desenfants vulnérables et créerait un cadrefavorable pour la mise en place de

programmes sociaux dont celui portant sur letransfert d’espèces. Comme détaillé plus haut,un tel programme pourrait avoir des impactstant sur la réduction de la pauvreté que sur lesvulnérabilités liées à la pauvreté.

9.4 Conclusion

Le Sénégal entend mettre en place une politiqueprogressive de protection sociale faisant partied'une stratégie globale de développement. A ladifférence de la situation prévalant dans denombreux autres pays, en particulier dans ceuxde la région, cette stratégie identifie les enfantscomme cibles spécifiques de la protectionsociale et souligne la nécessité que lesmécanismes de protection des enfants puissentréduire un certain nombre de risques et devulnérabilités auxquels les enfants sontconfrontés. Bien que les dispositions légales etl’engagement politique existent et demeurenttraduits dans des documents nationaux, telsque le DSRPII, le pays éprouve des difficultéspour opérationnaliser les volets sur laprotection des enfants.

Ce chapitre a mis en évidence les progrèsréalisés en termes de synergie entre laprotection de l'enfance et la protection sociale.Il souligne également certains des défis quisont à relever pour renforcer ces synergies.Ces défis comprennent notamment lerenforcement des capacités, le développementdes compétences, la mobilisation de plus deressources pour la protection des enfants, unemeilleure coordination entre les multiplesacteurs, la nécessité de rendre plus visible lesenfants dans les politiques de protectionsociale. Cela passe également par un travail auniveau des communautés et avec les chefstraditionnels, pour parvenir à une meilleurecompréhension sur la nécessité de respecterles droits des enfants.

109Implications en termes de politiques et les opportunités pour un engagement au niveau des politiques

10. Implications en termes de politiques et

les opportunités pour un engagement au

niveau des politiques

A la date de rédaction de cerapport, il existait auSénégal plusieursopportunités importantespour la promotion et pourle renforcement dusystème de protectionsociale. L’élaboration de laSNPS a donné plus decohérence à la gamme desinterventions possibles enprotection sociale auSénégal. Celles-ci vont dela promotion à laprotection, en passant parla prévention et lat r a n s f o r m a t i o n .L’aboutissement de cettedynamique lancée en 2003s’est concrétisé par l’érection de «la protectionsociale et la gestion des risques» comme l’undes axes majeurs de stratégie de réduction dela pauvreté 2006-2010. Le fait que les enfantspauvres et vulnérables aient été identifiéscomme un groupe cible spécifique de laprotection sociale représente une avancéed’une importance particulière grâcenotamment à une meilleure identification desrisques différenciant les risques sociaux, lesrisques économiques, les risques de santé etles risques liés au cycle de vie.L’opérationnalisation de cette stratégie deréduction de la pauvreté 2006-2010 a faitl’objet d’une première revue durant le premiersemestre 2008. L'analyse des interventionsréalisées a montré que les progrès étaientfaibles en matière de protection sociale. Enparticipant activement au développement dela SNPS, puis à sa revue, l'UNICEF Sénégal ahautement contribué à ce que les enfants ysoient bien visibles. L’attention accordée auxproblèmes des enfants a permis de mettre enlumière les défis qui persistaient en termes derenforcement de la coordination et deleadership. Cette participation active del'UNICEF Sénégal a ouvert les portes en faveurde son engagement en termes de politiques etlui a conféré le leadership sur la question de laprotection sociale axée sur les enfants.

Dans ce contexte, la première partie de cechapitre analyse les opportunités et les défispour un engagement en termes de politiques,au niveau de la protection sociale au Sénégal,notamment pour ce qui est de l'UNICEF. Ladeuxième partie présente les recommandationsprincipales de l’étude, en ce qui concerne lespolitiques, en s'appuyant sur les élémentsprobants présentés dans les précédentschapitres, ainsi que sur des exemples de bonnespratiques dans le domaine de la protectionsociale.

10.1 Opportunités pour un engagement dans la protectionsociale

Selon la littérature disponible sur le sujet dudéveloppement des politiques basé sur lesévidences (e.g, Court et Maxwell 2005), leséléments qui doivent être pris en considérationavant d’effectuer les choix, sont notamment :

1. Une bonne compréhension du contextepolitique, tant en ce qui concerne lesprocessus institutionnels formels et règlesofficielles, que pour ce qui est des valeurspolitiques informelles et les pratiquesculturelles ;

110 LA PROTECTION SOCIALE DES ENFANTS EN AFRIQUE DE L’OUEST ET DU CENTRE : CAS DU SÉNÉGAL

2. Relations avec les autres acteurs impliquésdans les définitions des politiques : lespolitiques sont, en général, le résultat desprocessus de négociation dans lesquels lesrésultats des études ne constituent qu’un desfacteurs, les autres éléments étantl’existence d’une volonté politique et ladisponibilité des financements (Davies 2005);

3. La qualité des évidences et l’élaborationefficace des messages: les évidences doiventprovenir de travaux ayant une méthodologiefiable. Ils doivent fournir des réponses à desproblématiques pertinentes du point de vuedes politiques et fournir desrecommandations susceptibles d’êtreopérationnalisées. Si les politiques et lapratique ne sont pas intégrées dès le départdans la conception des études, il est peuprobable que les évidences produites soientutiles aux décideurs (Jones et al 2008), et

4. L'existence d’une volonté de définition despolitiques : l'expérience montre que lesétudes dont la justification de départ estd'influencer les débats de politique, sont lesplus susceptibles de réussir à le faire (O'Neil,2005) parce qu’il y a plus de chances detraduire les résultats en indicateursspécifiques et mesurables, ainsi qu’enrecommandations de politiques ; ce qui estsouvent demandé par les responsablesgouvernementaux et par donateurs (voirJones, 2005). En pratique, cela impliqueaussi d’élaborer des stratégies decommunication et de concevoir desmécanismes pour le partage deconnaissances et la gestion opérationnelle.

La discussion présentée ci-dessous analyse lesopportunités en termes d’engagement del’UNICEF dans la protection sociale pour lesenfants au Sénégal, notamment en ce quiconcerne le rôle éventuel que pourrait jouerl'UNICEF dans les domaines de l’élaborationdes cadres politiques, des mécanismes de suiviet de la mobilisation des ressources.

10.1.1 Contexte politique

La dynamique qui prévaut actuellement auSénégal autour de la question de la protectionsociale s’est révélée favorable pour ledéveloppement de nouvelles idées sur lesmécanismes d’extension et de renforcement dela protection sociale, ainsi que pour assurer queles groupes de population les plus vulnérablessoient atteints, conformément aux objectifsfixés par le DSRPII.

De ce fait, l'UNICEF a profité de ce contexte etest devenu un acteur dans la définition despolitiques de protection sociale, principalementen raison de sa contribution au développementde la SNPS, de sa participation au processusd'élaboration du DSRP et de son soutien à larevue annuelle du DSRPII, y compris par lefinancement de l'évaluation de la composantesur les populations vulnérables. L’UNICEF a jouéun rôle en particulier en ce qui concerne lesmoyens d'améliorer la composante sur lesenfants et les jeunes vulnérables.

Une bonne coordination entre les différentsacteurs impliqués dans le déploiement de lastratégie de la protection sociale est crucialecompte tenu de la complexité de ce thème quitouche divers domaines des politiques quirequièrent des actions concertées pour la miseen œuvre de différentes approchesd'atténuation des risques. La revue annuellede l’axe du DSRPII a clairement identifié lesproblèmes de coordination entre les différentsministères, entre services appartenant à unmême ministère et entre les donateurs commeétant des obstacles à la réalisation desobjectifs du DSRPII. Ainsi, un leadership estnécessaire pour remédier à cette situation,faire des progrès et maximiser les possibilitésde synergies entre les parties prenantes.Compte tenu de son engagement actif dans leprocessus de définition des politiques deprotection sociale, l’UNICEF pourrait continuerà faciliter la coordination et à supporter lefonctionnement d’un groupe de travail quiserait chargé de suivre les progrès obtenus

111Implications en termes de politiques et les opportunités pour un engagement au niveau des politiques

dans la mise en œuvre de la mobilisation desressources. Dans le cas où un secrétariat seraitcréé pour renforcer la coordination entre lesparties engagées dans l’axe 3 du DSRPII(comme cela a été le cas pour les autres piliersdu DSRP), l'UNICEF pourrait jouer un rôled’assistance technique (et éventuellement, unrôle de financement), pour faire en sorte queles questions intersectorielles touchant à laprotection sociale des enfants, soienteffectivement traitées au sein des différentescomposantes de l’axe 3, et pas seulement auniveau de la composante relative aux groupesvulnérables.

En jouant ce rôle, l'UNICEF seraitstratégiquement placé pour garantirl’intégration de la problématique enfant dans lastratégie de protection sociale. Ceci pourra êtreatteint en appuyant des études pertinentes, enfacilitant le partage des connaissances et enappuyant le renforcement des capacités. Cesactivités pourraient aider à canaliser les appuispour une meilleure prise en compte des enfantsdans l’élaboration des mécanismes deprotection de l'enfance. De même, par le biaisde sa collaboration avec les ministèressectoriels, l'UNICEF, en se fondant sur lesmeilleures pratiques internationales, pourraitêtre plus activement impliqué dans ledéveloppement de nouvelles idées sur laprotection sociale des enfants qui pourraientalors être utilisées dans les processus dedéfinition des politiques.

L'UNICEF pourrait aussi faciliter laparticipation régulière d’officiels sénégalaisaux forums internationaux sur la protectionsociale, comme cela a été fait pour laparticipation du pays dans la préparation duCadre de Politique Sociale Africaine.L’interaction avec leurs pairs, au niveau sous-régional et au niveau des autres pays d’Afriquesub-saharienne, offrira aux partenairessénégalais l’opportunité de tirer les leçons desréussites et erreurs des autres nations. Celaest particulièrement important dans lecontexte actuel prévalant en Afrique, y

compris en Afrique de l'Ouest, qui estcaractérisé par un intérêt croissant en faveurde l'intégration régionale et del’harmonisation des politiques.

Étant donné que ce type d'engagement doit sefaire à un niveau élevé, les responsabilités auniveau de l'UNICEF en incomberont auReprésentant ou au Représentant adjoint. Dansle cas présent, il se trouve que ceux-ci ont lescapacités et la compréhension de la protectionsociale, pour s’engager activement dans ceprocessus de coordination.

10.1.2 Les relations avec les autres

acteurs

La protection sociale est nécessairementmultidimensionnelle et elle nécessite laparticipation de multiples acteurs, parmilesquels le gouvernement, les bailleurs defonds, la société civile et les individus. L'UNICEFtravaille à tous ces niveaux et peut donc aider àla mise en relation des acteurs afin d’augmenterles chances des programmes de protectionsociale en faveur des enfants vulnérables et deleur famille.

Par exemple, les bonnes relations de l'UNICEFavec les autres parties prenantes, peuventégalement servir pour appuyer des activités derenforcement des capacités en faveur desorganismes nationaux chargés de la protectionsociale. L'UNICEF peut contribuer à renforcerles capacités techniques des ministèresconcernés, en particulier, pour les différentséchelons administratifs du MFSNEFMF. Cecipermettrait de lever la contrainte liée aumanque de propositions de programmes qui està l’origine de la faible mobilisation desressources.

Compte tenu de l'intérêt des bailleurs de fondsdans la mise en œuvre du DSRP, l'UNICEFpourrait jouer un rôle crucial auprès despartenaires internationaux intéressés par laprotection sociale. En raison de sa présence etde sa connaissance du secteur de la protection

112 LA PROTECTION SOCIALE DES ENFANTS EN AFRIQUE DE L’OUEST ET DU CENTRE : CAS DU SÉNÉGAL

sociale, l'UNICEF pourrait jouer le rôle de chefde file au niveau d’un groupe travaillant sur lathématique de la protection sociale etregroupant des agences du Système desNations Unies telles que le PNUD et le FENU lefont actuellement, respectivement sur lagouvernance et sur la décentralisation.

10.1.3 La qualité des résultats issus

de la recherche

Cette dimension joue un rôle très importantcompte tenu de son énorme potentiel àinfluencer l’engagement et le développementles politiques.

L'UNICEF peut contribuer à produire desévidences (preuves tangibles) de qualité.Compte tenu de l'intérêt exprimé par demultiples parties prenantes pour l'introductiond'un programme de transferts d’espècescomme mécanisme de réduction de la pauvretéet de protection sociale, l’UNICEF pourraitfinancer une étude de faisabilité sur unprogramme de transferts d’espèces ciblés surles enfants. Les éléments et lesrecommandations fournies dans ce rapport,ainsi que les résultats issus d'une telle étude defaisabilité, pourraient fournir les connaissancesde base pour canaliser les appuis politiques etles soutiens financiers nécessaires aufinancement d'un programme - pilote detransferts d’espèces - lequel devrait être deconception proche à celle envisagée pour unprogramme de grande envergure.

En outre, en ce qui concerne la productiond'évidences de bonne qualité dans le domainede la protection sociale, l'UNICEF pourrait tirerde l’expérience accumulée dans le domaine duSuivi et Evaluation et offrir son expertise etsoutien pour développer les capacitésnationales dans ce domaine. L’UNICEF pourraitégalement assister les partenaires àdocumenter le domaine en les aidant à conduiredes évaluations qui permettraient de collecterles leçons et les évidences sur l'impact desdifférents programmes sociaux existants,

notamment ceux qui ciblent les enfants. Celapourrait contribuer à redonner la priorité desallocations en termes de ressources humaineset financières (si cela s’avère nécessaire) auxprogrammes ayant les meilleurs impacts surl'amélioration du bien-être et la réduction de lavulnérabilité des ménages pauvres. De même,cela pourrait contribuer à l’amélioration de laconception du programme. De la même manière, étant donné le largeéventail d’ONG, des bailleurs multilatéraux etde donateurs qui ont un intérêt pour uneprotection sociale couvrant l‘ensemble du cyclede vie, et compte tenu du potentiel deressources mobilisables pour financer larecherche sur les politiques en matière deprotection sociale, il serait opportun quel'UNICEF développe un programme d’étudesplus large, avec des travaux couvrant aussi bienl'enfance, les jeunes, les adultes (y compris ence qui concerne les femmes enceintes etl'allaitement) que les personnes âgées, afin degénérer des éléments de preuve concernantl'impact de la protection sociale sur le cycle devie et sur la pauvreté chronique, ainsi que surson impact concernant les phénomènes detransmission intergénérationnelle de lapauvreté. Les principales parties prenantes,dans ce domaine, sont la Coopération française,la Coopération italienne, le PAM, l’OIT, l’UNFPA,la Banque mondiale et Save the Children. Le développement d’outils de suivi budgétaireet de méthodologies appropriées aux enfantsserait important pour évaluer les efforts dugouvernement du Sénégal pour se conformeraux engagements au titre de la CDE. Ceci pourraêtre fait en analysant les tendances desdépenses effectuées dans les secteursbénéficiant aux enfants, ainsi qu’en identifiantles domaines prioritaires, notamment enmatière de protection, où il y a une quasi-absence de ressources.

10.1.4 La volonté de définition des

politiques

L'UNICEF a investi des ressources et du tempsde ses programmes pour renforcer les capacités

113Implications en termes de politiques et les opportunités pour un engagement au niveau des politiques

de certains de ses personnels et pour s’engageractivement dans la protection sociale, avecl’intention d'influencer la définition despolitiques de protection sociale afin de lesrendre plus favorables aux enfants vulnérables.

Aussi, l’UNICEF doit utiliser les résultats desétudes et travaux de recherche, ceux déjàpubliés ou ceux encore inédits, afin d'influencerles décideurs pour qu’ils améliorent laprogrammation et l’utilisation des ressourcespour la protection sociale. Etant donné que lamise en œuvre des politiques requiert aussi unesensibilisation du public et une appropriationpar les communautés, il est important d’assurerune large diffusion des résultats.

L'UNICEF pourrait planifier au profit d’un plusgrand nombre de ses personnels, lerenforcement des capacités sur l'ensemble desdomaines thématiques concernant la protectionsociale. Cela permettrait d'accroître la capacitéd'engagement du bureau (actuellement limitéeà un seule personne parmi les membres de sonpersonnel, compte tenu des récentsmouvements de personnel au sein duprogramme) et d’assurer que la protectionsociale axée sur l’enfance ne soit pas unequestion examinée uniquement au sein de l’axe3, en son chapitre 4, dans le cadre du DSRP,mais qu’elle soit érigée au rang deproblématique transversale, en la liant auxquestions relatives à l'accès aux services debase de qualité et de la bonne gouvernance.

10.2 Recommandations pour les

stratégies et les politiques

Lors de la revue annuelle du DSRPII, il a étéunanimement reconnu qu’il fallait concentrerplus stratégiquement et plus efficacement lesactions si on voulait atteindre les objectifs deréduction de la pauvreté, notamment celles quiportaient sur la protection sociale. Bien quel'essentiel des efforts du DSRP soit de générerde meilleures croissance et productivitééconomiques, il est important pour le paysd’utiliser, aussi, toutes les opportunités

existantes bien documentées pour la réductionde la pauvreté, accélérer l’atteinte des Objectifsdu Millénaire notamment en améliorant l’accèsaux services sociaux de base et leur résistanceaux chocs imprévus.Les recommandations de politique présentéesci-dessous s'appuieront sur les évidences,preuves et connaissances générées par lesrecherches et les échanges avec les partiesprenantes interrogées pour ce rapport:

• au Sénégal les enfants sont bien identifiéscomme groupe vulnérables spécifique dans laSNPS et le DSRPII. Cependant davantaged’efforts doivent être faits pour assurer leurvisibilité à travers toutes les dimensions de cesdeux documents stratégiques. Il faudraitaméliorer le processus de programmation enaccordant plus d’importance à une protectionsociale centrée sur les enfants. Ceci faciliteraitla mobilisation des ressources et assureraitune mise en œuvre encore plus efficaced’atteindre les objectifs du DSRP.

• Les différentes parties prenantes ont expriméun grand intérêt pour le potentiel d'un systèmede transfert d'espèces ciblé sur les enfantscomme mécanisme permettant de mobiliserdes ressources pour la protection sociale. À ceteffet, l’accumulation de connaissances etd’éléments de preuve sur le potentiel de cessystèmes pour la réduction de la pauvreté estune des clés de leur faisabilité. La mobilisationdes ministères tels que les MEF et MFNSWEM,ainsi que celle des principaux bailleurs defonds est une opportunité pour lancer detelles recherches. Il y a actuellement uncontexte favorable qui se prête à unprogramme pilote de transfert d'espèces quipeut contribuer aux objectifs de la protectionsociale et générer des évidences pour sonextension.

• Le pays ne dispose pas actuellement d’unsystème de financement des soins qui soitfavorable particulièrement aux enfants àl’exception de quelques exemptions mesurestrès particulières. Les données existantes nefournissent pas suffisamment d'indications sur

114 LA PROTECTION SOCIALE DES ENFANTS EN AFRIQUE DE L’OUEST ET DU CENTRE : CAS DU SÉNÉGAL

le lien qui peut exister entre les coûts de lasanté et la faible utilisation par les pauvres. Cedéficit d’informations doit être comblé si onveut développer des systèmes de financementfavorables aux pauvres, en particulier pour lesenfants pauvres. On estime que dans lasituation actuelle un grand nombre d'enfantspauvres n’ont pas accès aux services de soinsen raison de l'insuffisance des services deprotection sociale pour la santé. Il faudraitprofiter des analyses conduites dans le cadrede l'extension de la couverture sociale pourétudier les alternatives possibles pour lefinancement des soins de santé des enfants.

• La connaissance des risques particuliers quecourent les enfants a été bien appréhendée dansle DSRPII. Cependant, des recherches ciblant les

causes sous-jacentes de la vulnérabilité sontnécessaire faciliter l’élaboration de politiquesplus efficaces. L’application effective des cadresréglementaires de protection des enfantsélaborés ou adoptés par le pays doit êtreaméliorée. L’élaboration d'un plan d'actionnational pour les enfants qui aurait un caractèresystémique et une approche basée sur les droitsdes enfants vulnérables, pourrait être un outilutile pour éclairer les politiques dedéveloppement et pour faciliter la coordinationmultisectorielle des actions autour de laprotection sociale.

• Etant donné que la protection sociale pour lesenfants vulnérables constitue une composanteimportante de la DSRPII, il est possible d'yinclure ces activités. De même, il est importantd’élaborer des programmes et projets et de lesinclure dans le PAP pour faciliter lamobilisation des bailleurs de fonds nationaux.

L‘analyse, détaillée présentée dans la matricequi suit, relève cinq grandes implicationspolitiques:

1. Renforcer l’intégration des enfants commecatégorie prioritaire au sein des systèmesnationaux de protection sociale;

2. Élaborer et mettre en place de programmesde transferts d’espèces ciblés en faveur desenfants;

3. Élaborer et mettre en place des systèmes definancement de la santé adaptés aux besoinsdes enfants;

4. Veiller à ce que les systèmes de protectionsociale aient une claire compréhension desrisques sociaux spécifiques aux enfants etveiller à que ces systèmes apportent desréponses adéquates à ces risques;

5. Maximiser les opportunités existantes pouvantpermettre la création d’une marge demanœuvre budgétaire pour la protectionsociale axée sur l’enfance. Pour chaque domaine de politiques, sixaspects doivent être pris en compte pourassurer une plus grande efficacité dansl’élaboration de politiques fondées sur desdonnées probantes :

La CONAFE a été créée en 2004. Elle comprend 212 associationset ONG, travaillant dans le secteur de la réponse aux besoins desenfants et présentes dans les 11 régions du Sénégal. La Coalitionopère sous la tutelle du MFSNEFMF et a trois partenairesstratégiques : Plan, UNICEF et Save the Children.

Les axes stratégiques de la CONAFE sont au nombre de trois : leplaidoyer, le renforcement des capacités à travers laprofessionnalisation des membres de la coalition, et la promotionde la participation effective des enfants. Le plaidoyer est axé surla promotion des droits des enfants au sein de la société civileainsi qu’en direction de l’Etat, pour pousser au respect desengagements pris par ce dernier lors de la ratification desconventions telles que la CDE et les instruments juridiquesnationaux. Les principaux aspects de la protection sociale surlesquels la CONAFE a engagé le dialogue avec l’Etat,principalement en menant des actions de plaidoyer auprès desministères et des élus, concernent notamment les questions surl'exploitation des enfants par la mendicité en milieu urbain,l'éducation, les mariages précoces, les mutilations génitalesféminines, et la nécessité de l’harmonisation des textes juridiquesnationaux, en relation avec les conventions et traitésinternationaux que le Sénégal a ratifié.

En termes de participation des enfants, et dans le sillage desefforts menés dans ce sens par la DPDE, la CONAFE encourageles associations d’enfants, les clubs d’enfants et les parlementsdes enfants, entre autres, en tant que moyen de promouvoir lesdroits des enfants et comme mécanismes de prévention desrisques, par le biais de la sensibilisation et d’actions decommunication au niveau des communautés. Sur tous cesaspects, la coalition s’efforce d'encourager la participation desenfants en tant qu’acteurs, y compris en poussant à l'implicationdes enfants dans les consultations qui sont menées en vue dusecond DSRP.

Encadré 3: La Coalition Nationale

des Associations et des ONG en

faveur de l'Enfance (CONAFE)

115Implications en termes de politiques et les opportunités pour un engagement au niveau des politiques

1. Base de connaissances : quels sont leséléments probants existants sur le sujetdans le pays ? Que savons-nous ? Quellessont les lacunes dans les connaissances quidoivent être comblées? Comment aborderde la meilleure manière le processus degénération des connaissances et leprocessus de sa gestion ?

2. Sensibilisation : quel est le niveau desensibilité existant sur la nécessité des'attaquer au problèmeœ Quelles questionsspécifiques doivent être prises en compte ?Quel serait le moyen efficace pouraugmenter le degré de prise de conscienceconcernant ce domaine ?

3. Cadre des politiques : existe-il un cadre despolitiques ? Comment la conception peut-elleêtre améliorée? Existe-t-il des opportunitésfutures qui pourraient faire en sorte que ceprogramme soit possible ?

4. Mise en œuvre : Quels sont les points fortsen termes de mise en œuvre antérieure surlesquels l’on pourrait s’appuyer ? Quels sontles points faibles qui doivent être résolus etcomment ? Existe-t-il des systèmes de suiviet évaluation? Comment pourraient-ils êtrerenforcés? Qui devrait être en charge de lamise en œuvre ?

5. Responsabilité institutionnelle et capacitéinstitutionnelle : la responsabilité de la miseen place de ces politiques incombe-t-elle àl’organisme le mieux indiqué pour cela?Comment les déficits en matière decoordination, de capacités, etc. pourraient-ils être résorbés ?

6. Les opportunités pour un engagement et lespartenariats stratégiques: Que devrait fairechaque acteur concerné et pourquoi ?

116 LA PROTECTION SOCIALE DES ENFANTS EN AFRIQUE DE L’OUEST ET DU CENTRE : CAS DU SÉNÉGAL

IMPLICATIONS

EN MATIERE

DE

POLITIQUES

BASE DE CONNAISSANCES SENSIBILISATIONCADRE

DES POLITIQUES

Intégration des

enfants dans les

systèmes

nationaux de

protection sociale

Les enfants sont visibles, en tant quegroupe vulnérable, au sein de la SNPSdu Sénégal et de son second DSRP, cequi a permis de sensibiliser sur lavulnérabilité des enfants et la nécessitéd'approches multidimensionnelles pourréduire la vulnérabilité des enfants et deleurs dispensateurs de soins.Un projet de Secrétariat pour le Pilier duDSRP portant sur la protection sociale etla création d'un groupe de travailmultidisciplinaire sur les populationsvulnérables pourraient potentiellementaider à développer une compréhensionapprofondie des causes et desconséquences de la vulnérabilité desenfants et des mécanismes pour y faireface par le biais du développement deprogrammes de développement dans lecadre du DSRP. Pour ce faire, il est important de veiller àinvestir dans des évaluationsrigoureuses et coordonnées de l’impactdes schémas actuels et de ceuxproposés pour évaluer l’efficacité de cesprogrammes. Les exemples de bonnespratiques comprennent le CentreInternational des Nations Unies sur laPauvreté à Brasilia et l’investissement dugouvernement mexicain dansl'évaluation de la protection sociale.

La visibilité des enfants au niveau despolitiques et au sein des principauxdocuments de stratégie, a augmenté ledegré de conscience sur la nécessité delier les causes et les manifestations de lavulnérabilité des enfants, pour aider àprotéger et à promouvoir ledéveloppement humain des enfants. La sensibilisation générale effectuée parles décideurs et par les OSC sur le faitque la pauvreté constitue un obstaclemajeur au développement humain,contribue à rallier le soutien politique enfaveur d’interventions potentiellementcouronnées de succès. L'échange deconnaissances et la capitalisation sur lesexpériences des pays similaires, en cequi concerne les bonnes pratiques enmatière de protection sociale devrontêtre encouragées. La sensibilisationnécessite une compréhension deséléments de preuve existant au niveaunational et international, sur les forces,les faiblesses et l'applicabilité desdifférents instruments de protectionsociale pour les enfants (lesprogrammes de cantine scolaire, lestransferts d’espèces, les boursesscolaires en faveur des filles, etc.)

Les enfants sont visibles,en tant que groupevulnérable, au sein de laSNPS du Sénégal et deson second DSRP,quoique que des effortsdoivent encore êtreinvestis en vue d'assurerque leur visibilité auniveau des différentesdimensions de cettestratégie / ces politiques,soit augmentée. La prochaine étapecruciale est d'assurer uneprogrammation efficacede la protection socialeaxée sur l’enfance, quifacilite la mobilisation desressources et la mise enœuvre pour atteindre lesobjectifs du DSRP. L'élaboration d'un Plannational d'action pourl’enfance, actuellement encours, serait égalementun élément favorable, envue d’assurer que lesenfants sont intégrés defaçon visible dans tous lesdomaines de politiques etque descomplémentarités sontrecherchées dans lesactions de réduction de lapauvreté et de lavulnérabilité des enfantsles plus marginalisés.

117Implications en termes de politiques et les opportunités pour un engagement au niveau des politiques

MISE EN ŒUVRE

RESPONSABILITE ET

CAPACITE

INSTITUTIONNELLES

OPPORTUNITES POUR UN

ENGAGEMENT ET

PARTENARIATS

STRATEGIQUES

Des programmes de protectionsociale axés sur les enfants ontcommencé à être mis en œuvre, ycompris le programme de dispensede frais, exemptant les enfants dupaiement de certainesinterventions en matière de santé;le programme pour la réduction dutravail des enfants (IPEC et leMFSNEFMF); le PARRER, pour laprotection des enfants de la rue etla protection sociale des enfants enconflit avec la loi, sous l'égide duMinistère de la Justice. Toutefois, en fonction desdomaines d'intervention identifiésdans le DSRP et des objectifscorrespondants qui leur sontassignés, des actions significativesdoivent encore être menées, encommençant par le développementde programmes concrets pouvantpermettre le déploiement effectifdes politiques.

La protection sociale axée sur l’enfance,relève, pour l’essentiel, de laresponsabilité du MFSNEFMF, mais il estévident que des actions coordonnées etdes synergies avec d'autres ministèreset organismes sont d’une importancecruciale, pour traiter les différentsaspects de la vulnérabilité. L'UNICEFpeut favoriser cette coordination. Des faiblesses en matière de capacitésont été identifiées comme unecontrainte importante pour laplanification et la mise en œuvre desprogrammes du secteur social pour lesenfants, ce qui est une contrainte quidoit être prise en compte de manière àinformer la conception de programmesultérieurs. Le renforcement descapacités doit également être promu, cequi est un domaine dans lequel l'UNICEFpourrait s’engager.

Les ministères: Le MFSNEFMF doitdonner la priorité aux efforts desensibilisation en direction desprincipaux ministères et explorer lespoints d'entrée possibles pour unecollaboration en matière deprogrammes de protection sociale. Le Parlement:La Commission parlementaire sur laPopulation et le Développement peutêtre un partenaire actif dansl'approbation de la législation et pour unappui parlementaire en faveur d’uneplus grande visibilité des enfants dansles politiques et la mise en œuvre de laprotection sociale. Les Bailleurs de fonds: Ce sont desacteurs importants dans le domaine auSénégal qui pourraient soutenir et aiderà faire avancer les politiques deprotection sociale axées sur l’enfance,éventuellement par le biais deressources pour le développementd’éléments de preuve, pour le soutien àdes actions coordonnées de gestion desconnaissances et de Suivi- Evaluationsur les mécanismes de protectionsociale et leurs impacts sur les différentsgroupes vulnérables, en particulier lesfemmes et les enfants. Les ONG pourraient devenir plus activesdans le déploiement des actions duDSRP ayant trait à la protection socialepour les enfants vulnérables, parconséquent, ils devraient être intégrésau sein d'espaces adéquats de dialogue,pour permettre une coordination avecelles.

118 LA PROTECTION SOCIALE DES ENFANTS EN AFRIQUE DE L’OUEST ET DU CENTRE : CAS DU SÉNÉGAL

IMPLICATIONS

EN MATIERE

DE POLITIQUES

BASE DE CONNAISSANCES SENSIBILISATIONCADRE

DES POLITIQUES

Un grand intérêt est porté, de la part desdifférents acteurs, sur le potentiel existantpour un programme de transferts d’espècesciblés sur les enfants, bien qu’il soitprimordial d’obtenir plus de connaissanceset d'éléments de preuve au sujet de sonpotentiel, et de sa faisabilité pour permettrele développement d'une telle initiative.Cette étude vise à contribuer à cette base deconnaissances.

Pour un grand nombre de Sénégalais,les transferts d’espèces sontconsidérés comme des «cadeaux»plutôt que comme des mesures enfaveur du développement ; de ce fait,la mobilisation d’un soutien politiquenécessiterait une solide base ded’éléments de preuve, y compriséventuellement un programme pilotepour documenter les apports duprogramme en matière de réductionde la pauvreté, de développementhumain et de transmissionintergénérationnelle de la pauvreté,ainsi que pour documenter sonpotentiel et une solide justification enmatière de développement desenfants, incluant les donnéesprovenant d'autres pays similaires. Du fait qu’un tel systèmefonctionnerait mieux s’il bénéficie del’adhésion des différents ministères, lasensibilisation devrait être renforcéepar le biais de panels de discussion,au cours desquels la valeurmultidimensionnelle d'un tel systèmepourrait être examinée.

Les dispositions pourdes transfertsd’espèces visant àréduire la pauvreté et àatténuer lesvulnérabilités, sontenvisagées dans leDSRP et au sein de laStratégie Nationale deProtection sociale, cequi augmente laprobabilité pour un telprogramme d’obtenirun soutien politique etfinancier.

Élaboration et

mise en œuvre de

systèmes de

transferts

d’espèces ciblés

sur les enfants

119Implications en termes de politiques et les opportunités pour un engagement au niveau des politiques

MISE EN ŒUVRERESPONSABILITE ET CAPACITE

INSTITUTIONNELLES

OPPORTUNITES POUR UN

ENGAGEMENT ET

PARTENARIATS STRATEGIQUES

mise en œuvre d’un programme detransferts d’espèces ciblés sur lesenfants pourrait être administrée parune unité de niveau élevé maisautonome, au sein du gouvernementcompte tenu du degré de collaborationintersectorielle qu’il requiert et afin deréduire au minimum les problèmes liésà de mauvaises capacitésadministratives ainsi que les évasionsdans le flux des fonds.Une conception adéquate duprogramme et la prise en compte demultiples facteurs (comme étudié endétail au chapitre 7) sont nécessairespour augmenter les chances de succèsd’un tel programme. Un programme de transferts d’espècesne doit pas réduire le financementdisponible au niveau des servicessociaux de base, mais plutôt êtrefinancé avec la réaffectation budgétairede ressources provenant d'autresdomaines.

Les bonnes pratiques internationalesdonnent à penser que la coordinationintersectorielle et l’appropriation duprogramme par les ministères sontessentielles à la réussite des transfertsd’espèces, ce qui exige un haut niveaud’implication des politiques. Le groupe detravail proposé, sur la protection socialeen faveur de l’enfance, et dirigé parl'UNICEF, peut jouer un rôle important,par ses apports techniques à l'appui de laplanification et de la réalisation d'unprojet pilote ; il pourrait égalementobliger les différentes parties prenantes àrespecter leurs engagements definancement à ce régime, ceci inclut depousser en faveur d’une mobilisationadéquate des ressources et pour que leprogramme offre des prestations deservices de qualité. Le développement de l'étude de faisabilitéet la phase initiale requièrent l'appuitechnique d'experts, peut-être étrangers,provenant de pays similaires, tels que leGhana, qui ont commencé à entreprendredes programmes similaires. La nécessitéd’un renforcement de capacités adéquat,et ce à tous les niveaux, devrait êtresoulignée.

L'appui fourni par les ministères concernés(le MFSNEFMF) et par les principauxdonateurs est un bon point d’entrée pourdévelopper la recherche, y compriséventuellement par la mise en place d’unprogramme pilote. Le financement des donateurs pour la miseen place d'un tel programme pilote seraitcrucial.

Des partenariats stratégiques pourraient êtreétablis avec les banques locales ou avec lesystème postal, en tant que canaux depaiement des transferts d’espèces, pouréviter les procédures administratives etbureaucratiques inefficaces, qui pourraientralentir le paiement des transferts

L'appui fourni par les ministères concernés (leMFSNEFMF) et par les principaux donateurs estun bon point d’entrée pour développer larecherche, y compris éventuellement par la miseen place d’un programme pilote.

120 LA PROTECTION SOCIALE DES ENFANTS EN AFRIQUE DE L’OUEST ET DU CENTRE : CAS DU SÉNÉGAL

IMPLICATIONS

EN MATIERE

DE POLITIQUES

BASE DE CONNAISSANCES SENSIBILISATIONCADRE

DES POLITIQUES

Il n'existe actuellement aucun mécanismesystématique de financement de la santépour les enfants, au-delà des dispensesde paiement des frais spécifiques pour lesenfants. Les données existantes ne fournissentpas suffisamment d'informations sur lelien entre les coûts des services de santéet le faible recours à ces services par lespauvres, de sorte que cette lacune dans labase de connaissances doit être comblée,afin d'être mieux en mesure dedévelopper un financement possible pourles pauvres, en particulier les enfantspauvres. Toutefois, étant donné les limites dusystème de protection sociale de santé auSénégal, un grand nombre d'enfantspauvres sont exclus de l'accès auxservices de soins de santé.

Étant donné le faible accès aux centres desanté dans les zones rurales, la faibleabsorption des enfants par les services desanté peut être causée par le degréinsuffisant de conscientisation sur lanécessité d’une prévention formelle et desoins curatifs formels pour les enfants. Ilpourrait s’agir là d’une barrière à l’accèsobstacle qui doit être réduite,parallèlement à l'amélioration de l'accèset du financement.

Les composantes deprotection sociale liées à lasanté dans le cadre du DSRP,et portant principalement surl'extension de la protection enmatière de santé, necomprennent pas demécanismes spécifiques pourle développement et la mise enœuvre d’un financement de lasanté axé sur les enfants. Compte tenu du fait quel'extension de la santé est undomaine en coursd’élaboration, il serait essentield'envisager des alternativespour traiter la question dufinancement de la santé pourles enfants, dans le cadre del'analyse en cours portant surles différents mécanismespouvant permettre l'extensionde la couverture. Les enfants ne sont pasintégrés en tant que catégoriespécifique, mais sont plutôtconsidérées comme despersonnes à la charge desbénéficiaires de différentsrégimes contributifs ou noncontributifs, ce qui est unepratique qui doit être corrigéepour permettre la uneprotection spécifique enmatière de santé des enfantset augmenter sensiblement lenombre d'enfants bénéficiantd’une protection en matièrede santé.

Élaboration et

mise en œuvre de

systèmes de

transferts

d’espèces ciblés

sur les enfants

121Implications en termes de politiques et les opportunités pour un engagement au niveau des politiques

ES MISE EN ŒUVRE

RESPONSABILITE ET CAPACITE

INSTITUTIONNELLES

OPPORTUNITES POUR UN

ENGAGEMENT ET PARTENARIATS

STRATEGIQUES

deà la

DSRP,nt suron en ne

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queest uncoursentielativesn dupour

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t unerrigée

uneen

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sont nécessaires pour augmenter leschances de succès d’un telprogramme. Un programme de transfertsd’espèces ne doit pas réduire lefinancement disponible au niveau desservices sociaux de base, mais plutôtêtre financé avec la réaffectationbudgétaire de ressources provenantd'autres domaines.

La mise en œuvre des régimesd'extension de la protection enmatière de santé qui ciblent lespopulations vulnérables doit êtreélargie, car actuellement elle couvreun très petit nombre d'individus etd'une manière peu systématique. Unpaquet de services d’exemption defrais, plus complet et mieux ciblé,pourrait être une meilleure façon defournir l'accès aux groupesvulnérables, à la place d’un systemede dérogations au «coup par coup",bien que la viabilité financière de cetteoption devrait encore être explorée. Dans la pratique, cependant, étantdonné que seulement 20% de lapopulation a accès à une formequelconque de protection en matièrede santé, la majorité des enfants sontexclus et donc confrontés àd'importants risques de santé etrisques économiques.

Le système de santé actuel est en grandepartie à base communautaire. Les exemptions de paiement de frais desanté, fondées sur la vulnérabilité desbénéficiaires, sont accordés par le biaisde complexes (et souvent inefficaces)mécanismes de ciblage individuel, qui ontune large marge d'erreur et d’évasions defonds. Bien qu’il soit prévu d’étendre lesmutuelles de santé, leur portée est encorelimitée à seulement 4% de la population. La responsabilité institutionnelled’explorer les options pour de meilleursmécanismes de financement de la santédoit être recherchée par la MSPM.

Le financement des donateurs pour la miseen place d'un tel programme pilote seraitcrucial. Des partenariats stratégiquespourraient être établis avec les banqueslocales ou avec le système postal, en tant quecanaux de paiement des transferts d’espèces,pour éviter les procédures administratives etbureaucratiques inefficaces, qui pourraientralentir le paiement des transferts etpotentiellement causer des évasions defonds. Les besoins de soutiens techniques,financiers et en matière de renforcement descapacités devraient être soigneusementplanifiés avant et durant la mise en œuvred’une telle initiative.

Afin de poursuivre l’extension de lastratégie de protection sociale en matièrede santé, et en particulier pour faire ensorte qu’elle prenne mieux en compte lesenfants, il sera important d'ouvrir desespaces de discussion sur le moyen ayantle meilleur rapport coût-efficacité, pourréduire les barrières financières à l’accèspour les enfants pauvres et vulnérableset leurs dispensateurs de soins, demanière à augmenter leur demande desoins de santé. Cela inclut les subventions à la demande(par exemple, par le biais de transfertsd’espèces ciblés sur les enfants, dont unepartie pourrait aller au paiement desprimes des mutuelles de santé) oul'extension des services gratuits pour lesenfants. Compte tenu de ressources limitées, uneapproche échelonnée sur le temps estnécessaire, mais des partenariatsstratégiques avec les donateurs et lesONG peuvent être poursuivis pourcompléter le financement ou pour étendrele déploiement des systèmes

122 LA PROTECTION SOCIALE DES ENFANTS EN AFRIQUE DE L’OUEST ET DU CENTRE : CAS DU SÉNÉGAL

IMPLICATIONS

EN MATIERE

DE

POLITIQUES

BASE DE CONNAISSANCES SENSIBILISATIONCADRE

DES POLITIQUES

Des progrès ont été accomplis dans lacompréhension des risques spécifiquesencourus par les enfants, comme ledénote le DSRP. Cependant, il estnécessaire que soient menées desrecherches plus approfondies sur lescauses sous-jacentes de cesvulnérabilités, pour aider à développerdes politiques plus efficaces. Des efforts accrus doivent être faits pouraméliorer la collecte des données, et ainsiobtenir plus d'informations sur lesrisques encourus par les enfants.L'UNICEF peut continuer à jouer un rôleimportant à cet égard. Toutefois, ces données isolées sontinsuffisantes pour suivre et évaluer leschangements au fil du temps. Lesdonnées sur l'enregistrement desnaissances, les mutilations génitalesféminines et les mariages précoces n’ontcommencé à être recueillies querécemment, tandis que les données surles violences et l'exploitation sont trèslimitées et sporadiques. Cela ne facilitepas une bonne compréhension de lasituation des enfants vulnérables auSénégal.

L'inclusion des risques sociauxspécifiques aux enfants, au sein de laSNPS et du DSRP, a contribué à lasensibilisation au niveau des décideurs. Afin de promouvoir une compréhensionde la protection sociale en faveur del’enfance, comme une approche depolitiques qui vise à éliminer lesvulnérabilités sociales de cycle de vie etéconomiques, des efforts desensibilisation et de conscientisation sontessentiels. Ceux-ci devraient cibler lesministères impliqués dans la mise enœuvre de la protection sociale au niveaunational et au niveau des collectivitéslocales. Des actions de renforcement descapacités en direction des journalistes etdes leaders d'opinion, tels que les chefstraditionnels et les religieux, pourraientégalement être très utiles.

Le Sénégal a des cadresréglementaires très forts surla protection des enfants,toutefois, des progrèsdoivent être accomplis en cequi concerne leurapplication. L'élaborationd'un Plan national d'actionen faveur de l’enfance, ayantune approche desvulnérabilités qui soitsystématique et fondée surles droits de l'enfant, peutêtre un outil utile pourinformer l'élaboration despolitiques.

Veiller à ce que les

systèmes de

protection sociale

prennent en

compte les risques

sociaux spécifiques

aux enfants et

qu’ils soient en

mesure d’y

apporter des

réponses

123Implications en termes de politiques et les opportunités pour un engagement au niveau des politiques

UES MISE EN ŒUVRE

RESPONSABILITE ET CAPACITE

INSTITUTIONNELLES

OPPORTUNITES POUR UN

ENGAGEMENT ET

PARTENARIATS

STRATEGIQUES

adrests surfants,ogrèsen ce

leurationction

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e surpeutpour

des

sont nécessaires pour augmenter leschances de succès d’un telprogramme. Un programme de transfertsd’espèces ne doit pas réduire lefinancement disponible au niveau desservices sociaux de base, mais plutôtêtre financé avec la réaffectationbudgétaire de ressources provenantd'autres domaines.

Il y a eu quelques petits projets deprotection sociale liant les risqueséconomiques avec les risques liés aucycle de vie et les risques sociauxencourus par les enfants. Parmi cesexemples, il y a le programme deprévention du travail des enfants,soutenu par le programme IPEC del’OIT et les programmes de donsalimentaires /cantines scolaires,soutenus par le PAM pour promouvoirla fréquentation scolaire des enfants.Toutefois, les conclusions del'évaluation doivent être largementpartagées, en vue de promouvoir lepartage d’expériences et pouralimenter la conception desinterventions de protection socialeaxées sur les enfants.

La prise en charge de question desvulnérabilités économiques, sociales etde santé des enfants est uneresponsabilité qui incombeprincipalement à la Direction pour laProtection de l’Enfance et des Droits desEnfants, au sein du MFSNEFMF.Toutefois, elle manque des ressources etdu poids politique suffisant pouvant luipermettre de veiller à ce que la série derisques encourus par les enfants soit priseen compte de manière appropriée par lesdomaines programmatiquescorrespondants. Ainsi, il requiert plus defonds et un poids institutionnel plusimportant, pour être en mesure des'acquitter de ses missions. L'appui del'UNICEF à la promotion du dialogue et enfaveur de la collaboration entreinstitutions peut contribuer à générer cetespace.

L'appui fourni par les ministères concernés(le MFSNEFMF) et par les principauxdonateurs est un bon point d’entrée pourdévelopper la recherche, y compriséventuellement par la mise en place d’unprogramme pilote. Le financement des donateurs pour la miseen place d'un tel programme pilote seraitcrucial. Des partenariats stratégiquespourraient être établis avec les banqueslocales ou avec le système postal, en tantque canaux de paiement des transfertsd’espèces, pour éviter les procéduresadministratives et bureaucratiquesinefficaces, qui pourraient ralentir lepaiement des transferts et potentiellementcauser des évasions de fonds. Les besoins desoutiens techniques, financiers et en matièrede renforcement des capacités devraient êtresoigneusement planifiés avant et durant lamise en œuvre d’une telle initiative.

L'UNICEF est actuellement engagé, duniveau international jusqu’au niveaurégional, dans la recherche et le plaidoyeren matière de politiques liées à laprotection sociale en faveur de l’Enfance.Il est donc essentiel que l'UNICEF joue unrôle dans la promotion du partage desconnaissances et le partage d’expériencesau Sénégal. Il est également important que lesministères ayant des responsabilités liéesà l’enfance puissent jouer un rôle actif ausein du groupe de travail sur la protectionsociale en faveur de l’enfance, afin defaciliter l’émergence d’une perspectiveaxée sur les enfants, dans les politiques etla planification. La tenue d’un atelier national pourdiscuter des expériences et des bonnespratiques, pourrait promouvoir de façonimportante la compréhension dudomaine, au sein des organisations de lasociété civile travaillant sur les questionsde vulnérabilité sociale ou économique.Un tel événement pourrait égalementservir de forum pour examiner les optionspour la gestion des connaissances etl'échange d’expériences sur une baseplus régulière (soit virtuellement ou dansle cadre de rencontres formelles).

124 Références

IMPLICATIONS

EN MATIERE

DE

POLITIQUES

BASE DE CONNAISSANCES SENSIBILISATIONCADRE

DES POLITIQUES

Etant donné que la protection socialepour les enfants vulnérables s'inscrit dansle cadre du DSRP, il est possibled'identifier une marge de manœuvrebudgétaire pour ces activités. Cependant,il est important que des programmes etdes activités spécifiques et à même de serévéler efficaces dans le traitement de cesproblèmes, soient élaborés et validés, afinde faciliter la mobilisation des fonds del’Etat et des bailleurs, au titre de leursengagements dans le cadre du PAP. La production d’éléments probants sur lerapport coût-efficacité des interventionsde protection sociale axées sur lesenfants (générée par un programme–pilote, par la recherche quantitative oules bonnes pratiques internationales)pourrait aussi être utile, afin d'aider àmobiliser des ressources à partir d’autresprogrammes de réduction de la pauvreté,moins efficaces et plus coûteux, et setrouvant dans d'autres secteurs.

La sensibilisation doit être accrue, en cequi concerne les différents domaines quinécessitent des investissements, enparallèle du financement requis par unsystème de protection sociale en faveurde l’enfance.

La nécessité de générer une marge demanœuvre budgétaire pour financer desapproches du côté de la demande pourl’accès aux services de base, tels qu’unprogramme de transferts d’espèces, doitêtre discuté avec les autorités afin d’endéterminer la faisabilité. Les ressources nécessaires pour protégerles enfants contre la maltraitance, lanégligence, la violence, entre autres, nesont pas d’un montant important. Parconséquent, la sensibilisation devrait êtreportée au niveau des autorités en chargedu budget et de la planification, pour unrappel des engagements de l'État à mettreen place des mécanismes de financementpour promouvoir les droits des enfants àla protection, au développement et à lasurvie.Toute discussion sur des mécanismesalternatifs de protection en faveur del’enfance doit être abordée et promueavec le MEF, afin de garantir sonadhésion.

Bien qu'aucun montantspécifique n’ait été allouédans le PAP pour laprotection sociale desenfants, compte tenu de soninclusion dans le DSRP, lefinancement de cesprogrammes devrait êtreinclus dans le CDMT duMFSNEFMF. Étant donné que le DSRPprévoit des dispositionspour un programme detransferts d’espèces, il seraitnécessaire, pour aller del’avant en ce qui concernecette initiative, d'identifierdes ressources sur le moyenterme fixé par le CDMT. L’élément clé est de traduireles dispositions de politiquesen programmes et eninterventions quantifiables,pour faciliter la mobilisationdes ressources.

Maximiser les

opportunités

existantes afin

d’obtenir une

marge de

manœuvre

budgétaire pour la

protection sociale

en faveur de

l’enfance

125Implications en termes de politiques et les opportunités pour un engagement au niveau des politiques

UES MISE EN ŒUVRE

RESPONSABILITE ET CAPACITE

INSTITUTIONNELLES

OPPORTUNITES POUR UN

ENGAGEMENT ET

PARTENARIATS

STRATEGIQUES

ntantllouér la

dese sonRP, le

cesêtre

T du

DSRPtions

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duireiques

enables,ation

sont nécessaires pour augmenter leschances de succès d’un telprogramme. Un programme de transfertsd’espèces ne doit pas réduire lefinancement disponible au niveau desservices sociaux de base, mais plutôtêtre financé avec la réaffectationbudgétaire de ressources provenantd'autres domaines.

Les activités de plaidoyer pouraccroître les crédits budgétairesalloués à la protection sociale enfaveur de l’enfance devront êtreaccompagnées par des opportunitésde générer une marge de manœuvrebudgétaire. Une dimension essentielle del'analyse devra porter sur le potentielde ressources pouvant être libéréespar l'accroissement de l'efficacité desdépenses dans d'autres secteurs, parle biais d’une rationalisation desdépenses. Tout effort visant à plaiderpour un plus grand investissementdans la protection sociale en faveurde l’enfance conçu en accord avec lesdiscussions plus larges sur la viabilitédes finances publiques etl'accessibilité financière à long terme,en incluant différentes sources definancement pour les différentescomposantes d'une telle initiative,dont notamment le financement parles bailleurs de fonds de certainscoûts fixes initiaux et le financementdes dépenses de fonctionnement parressources budgétaires de l’Etat.

Il est important de promouvoirl'amélioration des capacités deplanification, de budgétisation etd’exécution des dépenses, au sein desministères du secteur social, pours'assurer que les ressources allouées ausecteur sont utilisées au maximum deleurs capacités, ce qui justifierait lesdemandes de réaffectations budgétairespour la protection sociale en faveur del’enfance, à partir de ressources tiréesd'autres secteurs. Il est donc crucial de développer lescapacités des ministères et, plusimportant encore, celles des services auniveau local, afin d’assurer l’améliorationde la programmation, de la budgétisation,et de l’exécution. Cela leur permettra nonseulement de maximiser leurs ressourcesdisponibles limitées, à travers plusd'efficacité dans les dépenses, mais celaleur donnera également de meilleureschances, lorsqu’il leur faudra plaider leurcas, au cours des processus denégociation du budget avec le MEF.

L'appui fourni par les ministèresconcernés (le MFSNEFMF) et par lesprincipaux donateurs est un bon pointd’entrée pour développer la recherche, ycompris éventuellement par la mise enplace d’un programme pilote. Le financement des donateurs pour lamise en place d'un tel programme piloteserait crucial. Des partenariats stratégiques pourraientêtre établis avec les banques locales ouavec le système postal, en tant quecanaux de paiement des transfertsd’espèces, pour éviter les procéduresadministratives et bureaucratiquesinefficaces, qui pourraient ralentir lepaiement des transferts etpotentiellement causer des évasions defonds. Les besoins de soutiens techniques,financiers et en matière de renforcementdes capacités devraient êtresoigneusement planifiés avant et durantla mise en œuvre d’une telle initiative.

En tant qu'État signataire de la CNUDE, leSénégal s'est engagé à promouvoir laréalisation progressive des droits desenfants, en ligne avec sa base deressources. En ce sens, il est important que les OSCtiennent le gouvernement pourcomptable de l'allocation pour laprotection sociale en faveur de l’enfance,d’augmentations de ressourcescomparables. Ces programmes sontd’une importance vitale, en tant quemoyen de traiter la question des droits del'enfant à la survie, au développement età la protection. Une plus grande attentiondevrait par conséquent être accordée ausoutien des actions de suivi budgétaire ence qui concerne les allocations du budgetde l’Etat en faveur des enfants ainsi qu’ausoutien des initiatives de recherche. Lesrésultats issus de ces recherchesdevraient servir à alimenter lesdiscussions sur les politiques et sur labudgétisation au Sénégal. Les bailleurs de fonds, dans le cadre deleurs obligations au titre de la CNUDE,pourraient apporter un soutien (financieret technique) à de telles initiatives desuivi.

126 LA PROTECTION SOCIALE DES ENFANTS EN AFRIQUE DE L’OUEST ET DU CENTRE : CAS DU SÉNÉGAL

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