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La Révolution surréaliste Source gallica.bnf.fr / Bibliothèque nationale de France

La Révolution surréaliste - N°12, Quinto año

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La Révolution surréaliste - N°12, Quinto año

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  • La Rvolutionsurraliste

    Source gallica.bnf.fr / Bibliothque nationale de France

  • La Rvolution surraliste. 1924-1929.

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  • N 12 Cinquime anne 15 Dcembre 1929

    SOMMAIRKSecond manifeste du surralisme : Andr Breton.

    L'Homme approximatif : Tristan Tzara.Profession de foi du sujet : Ren Char.

    La prire du soldat : XXX.De l'amour son objet : Camille Qoemans.

    A toute preuve : Paul Bluard.Note sur l'argent : Andr Thirion.

    Lettre d'Arthur Rimbaud M. Lucien Hubert.Comment accommoder le prtre : Jean Koppen.

    Les mots et les images : Ren Magrittc.Monde, samedi 23 novembre : Aragon.

    Un Chien andalou : Luis Bunuel, Salvador Dali.Police, haut les mains : Marcel Fourrier.

    Le point de vue du capitaine : Ren Crevcl.Mobiles inconscients du suicide : I. lois-Wttmatin.

    Bonne anne ! Bonne sant : Georges Saiionl.Des perles aux pourceaux : Francis Picahia.

    A propos de morale : Maxime Alexandre.Je ne mange pas de ce pain l : Benjamin Prct.

    Vitesse des morts : I'. Il,Notes sur la posie': Andr Breton, l'aul Bluard.

    Jacques Rigaut.Introduction 1930 : Aragon.

    2 enqutes surralistes.-

    Noteset 53 rponses 1'

    ENQUTE SUR L'AMOURILLUSTRATIONS :

    Arp, Oiorgio de Chirico, Salvador Dali,Max ICrnst, Ren Magrittc, Joan Mir,

    Yves Tanguy, etc.

  • G O E M A N S

    ARPCHIRICODALIERNSTMAGRITTEMIROPICABIAPICASSOTANGUY

    TL..: DANTON 65-21

    PARI5-VI'

  • Pourquoi ia Rvolution Surraliste avait cess de paratre

    SECOND MANIFESTE DU SURRALISMEEn dpit des dmarches particulires ;'i

    chacun de ceux qui s'en sont rclams ou s'enrclament, on finira bien par accorder que lesurralisme ne lendit rien tant qu' provo-quer, au point de vue intellectuel et moral,uni! crise de conscience de l'espce la plus gn-rale et la plus grave et que l'obtention ou lanon-obtention de ce rsultai peut seule dciderde sa russite ou de son chec, historique.

    Au point de vue intellectuel il s'agissait,il s'agit encore (rprouver par tous les moyenset de faire reconnatre lou| prix le caractrefactice des vieilles antinomies destines hypo-critement prvenir toute agitation insolitede la part de l'homme, ne serait-ce qu'en luidonnant une ide indigente de ses moyens,([n'en le dliant d'chapper dans une mesurevalable la contrainte universelle. I/pou-vantail de la mort, les cafs-chantants del'au-del, le naufrage de la plus belle raisondans le sommeil, l'crasant rideau de l'avenir,les tours de Babel, ies miroirs d'inconsistance,l'infranchissable mur d'argent clabouss decervelle, ces images trop saisissantes de la valas-trophe humaine ne sont peut-tre que desimages. Tout porte croire qu'il existe uncertain point de l'esprit d'o la vie et la mort,le rel et l'imaginaire, le, pass et le futur,

    le communicahle el l'incommunicable, le hautet le bas cessent d'tre perus contradictoire-menl. Or, c'est en vain qu'on (dierelierait l'activit surraliste un autre mobile que.l'espoir de dtermination de ce point. On voit,assez par l combien il serait absurde de luiprter un sens uniquement destructeur, ouconstructeur : le point dont il est question est fortiori celui o la construction el. la des!rue-lion cessent de pouvoir tre brandies l'une.conIre l'autre. Il est clair, aussi, (pie le sur-ralisme n'est pas intress tenir grandcompte de ce qui se produit ct de lui sousprtexte d'art, voire d'anti-art, de philosophieou d'anti-philosophie, en un mol de tout cequi n'a pas pour fin l'anantissementde l'tre,en un brillant, intrieur et aveugle, qui nesoit pas plus l'me de la glace (pie celle dul'eu. Que pourraient bien al fendre de l'exp-rience surraliste ceux qui gardent quelquesouci (le la place qu'ils occuperont dans lemonde'} lin ce lieu mental d'o l'on ne peutplus entreprendre que pour sof-nime uneprilleuse mais, pensons-nous, unv suprmereconnaissance, il ne saurait tre questionnon plus d'attacher la moindre importanceaux pas de ceux qui arrivent ou aux pas deceux qui sortent, ces pas se produisant dans

  • SKCUiMI) MA.\U"|
  • "~ SIU:oM MANII'ICSTK lli SIJHIUAI.ISMHtenir persistent mettre eu avant cette nga-tion, faire bon march de tout, autre crit-rium de valeur. Ils entendent jouir pleine-ment de la dsolationsi bien joue qui accueille,dans le public bourgeois, toujours ignoblementprt leur pardonner quelques erreurs dejeunesse , le besoin qui ne les quitte pas derigoler comme des sauvages devant le drapeaufranais, de vomir leur dgot la face dechaque prtre et de braquer sur l'engeancedes

    premiers devoirs

    l'arme longue porte

    du cynisme sexuel. Nous combattons soustoutes leurs formes l'indiffrence potique,la distraction d'art, la recherche rudite, laspculation pure, nous ne voulons rien avoirde commun avec les petits ni avec les grandspargnants de l'esprit. Tous les lchages,toutes les abdications, toutes les trahisonspossibles ne nous empcheront pas d'en finiravec ces foutaises. Il est remarquable,d'ailleurs,que, livrs eux-mmes et eux seuls, les gensqui nous ont mis un jour dans la ncessitde nous passer d'eux ont aussitt perdu pied,ont d aussitt recourir aux expdients lesplus misrables pour rentrer en grce auprsdes dfenseurs de l'ordre, tous grands partisansdu nivellement, par la tte. C'est que la fid-lit sans dfaillance aux engagements du sur-ralisme suppose, un dsintressement, unmpris du risque, un refus de compositiondont trs peu d'hommes se rvlent, lalongue, capables. N'en resterait-il aucun, detous ceux qui les premiers ont mesur luileur chance de signification et leur dsir devrit, que cependant le surralisme vivrait.De toute manire il est trop tard pour que lagraine n'en germe pas l'infini dans le champhumain, avec la peur et avec les autres varitsd'herbes folles qui doivent avoir raison de fout.C'est mme pourquoi je m'tais promis, commeen tmoigne la prface la rdition du Mani-feste du Surralisme. (1929) d'abandonner silen-cieusement leur triste sort un certain nombred'individus qui me paraissaient s'tre rendusuffisamment justice

    :c'tait le cas de MM. Ar-

    taud, ('.arrive, Deltcil, Grard, Limbour, Mas-son, Soupault et Vitrac, nomms dans leManifeste (1924) et de quelques autres depuis.Le premier de ces messieurs ayant eu l'impru-dence de s'en plaindre, je crois bon, ce sujet,de revenir sur mes intentions :

    77 y a, crit M. Arlaud VIntransigeant,le 10 septembre 1929, /'/ ;/ a dans le compterendu du Manifeste du Surralisme paru dansl'Intran du 21 aot dernier, une. phrase quirveille trop de choses : M. Breton n'a pas crudevoir faire dans celle rdition de son livredes corrections

    surtout de noms-

    cl c'estloul son honneur, mais les rectifications sefont d'elles-mmes.

    Que. .17. Breton fasse appel l'honneur pour fuger un certain nombre depersonnes auxquelles s'appliquent les rectifica-tions ci-dessus, c'est affaire

  • SECOND MANIFESTE DU SURREALISME

    mnager notre clientle de passage. Ni encorebien moins, cela va sans dire, dans les res-sources changeantes de ceux qui ont commencpar mettre, leur foi en lui. Ce n'est pas unhomme dont la rvolte se canalise et s'puise(jui peut empcher cette rvolte de gronder,ce ne sont pas autant d'hommes qu'on voudra,el. l'histoire n'est gure faite que, de leur monte genoux, qui pourront faire que cette rvoltene dompte, aux grands moments obscurs,la bte toujours renaissante du : c'est mieux.Il y a encore cette heure par le inonde dansles lyces, dans les ateliers mme, dans la rue,dans les sminaires et dans les casernes, destres jeunes, purs, qui refusent le pli. C'est eux seuls que je m'adresse, c'est pour euxseuls (pie j'entreprends de justifier le sur-ralisme de. l'accusation de. n'tre, aprs tout,qu'un passe-temps intellectuelcomme un autre.Qu'ils cherchent, sans parti-pris tranger, savoir ce que nous avons voulu l'aire, qu'ilsnous aident,, qu'ils nous relvent un un sibesoin en est. 11 est presque, inutile (pie nousnous dfendions d'avoir jamais voulu consti-tuer un cercle ferm et seuls ont avantage, propager ce bruit ceux dont l'accord plus oumoins bref avec, nous a t dnonc par nouspour vice, rdliibifoire. C'est M. Artaud,comme on l'a vu et comme on et pu le voiraussi, gifl dans un couloir d'htel par Pierretnik, appeler l'aide sa incrc.[ ("est M. Car-rive, incapable d'envisager le problme poli-tique ou sexuel autrement (pie sous l'angledu terrorisme, gascon, pauvre apologiste enfin de compte du Canne de M. Malraux, ("estM. Delleil, voir sou ignoble, chronique surl'amour dans le. N" 2 de la Rvolution sur-raliste, (direction Naville) et, depuis sonexclusion du surralisme,

    Les Poilus ,

    Jeanne d'Arc

    : inutile d'insister. C'estM. Grard, celui-ci seul dn"s son genre, vrai-ment rejet pour imbcillit congnitale :volution diffrente de. la prcdente, menuesbesognes maintenant la 1Aille de. classes, /(/ Vrit, rien de grave. C'est M. Limbour, peu prs disparu galement: scepticisme,coquetterie littraire dans le plus mauvais sensdu mot. C'est M. Masson, de qui les convictionssurralistes pourtant trs affiches n'ont, pasrsist la lecture d'un livre intitul Le. Sur-ralisme cl la Peinture o l'auteur, peu sou-cieux, du reste, de ces hirarchies, n'avaitpas cru devoir, ou pouvoir, lui donner le passur Picasso, que. M. Masson fient pour une.crapule, et sur Max Ernsf, qu'il accuse, seule-ment de poindre, moins bien (pie lui : je tienscette explication de lui-mme. C'est; M. Sou-pault, et avec lui l'infamie totale; ne parlonsmme pas de ce qu'il signe, parlons de ce qu'ilne signe pas, des petits chos de ce genrequ'il

    passe. , fout, en s'en dfendant avecson agitation de rat. qui fait, le four du rat.o-drome, dans les journaux de chantage commeAux- Ecoules : M. Andr Breton, chef du groupe,surraliste, a disparu du repaire, de la bande,rue Jacqucs-C.allot (il s'agit de. l'ancienneGalerie, surraliste). Iln ami surraliste nous

    informe qu'avec lui ont disparu quelques-unsdes livres de compte de l'trange socit duquartier latin pour la suppression de tout.Cependant, nous apprenonsque l'exil de M. Bre-ton es! tempr par la dlicieuse compagnied'une blonde surraliste.

    Ren Crevel et Tris-

    tan Tzara savent aussi qui ils doivent tellesrvlations stupfiantes sur leur vie, tellesautres imputations calomnieuses. Pour mapart j'avoue prouver un certain plaisir ceque M. Artaud cherche me faire passer aussigratuitement, pour un malhonnte homme eta ce que M. Soupault ait le front de me donnerpour un voleur. C'est enfin M. Vitrac, vritablesouillon des ides

    abandonnons-leur la posie pure lui et cet autre cancrelatl'abb Brmond

    pauvre hre dont l'ing-nuit toute preuve a t jusqu' confesser(pie son idal en tant qu'homme de thtre,idal qui est aussi, naturellement, celui deM. Artaud, tait d'organiser des spectaclesqui pussent rivaliser en beaut avec les rafles(le police (dclaration du thtre Alfred Jarry,publie dans la Nouvelle, revue franaise. (*).C'est comme on voit, assez joyeux. D'autres,d'autres encore, d'ailleurs, qui n'ont pu trouverplace dans cette numrafion, soif que leuractivit publique soit trop ngligeable, soitque leur fourberie se soit exerce dans undomaine moins gnral, soif qu'ils aient tentde se tirer d'affaire par l'humour, se sont,chargs de nous prouver que trspeu d'hommes,parmi ceux qui se prsentent, sont la hauteurde. l'intention surraliste et aussi pour nousconvaincre (pie ce qui, au premier flchisse-ment, les juge et les prcipite sans retourpossible, leur perte, en resterait-il moinsqu'il n'en tombe, est tout en faveur de cetteintention.

    Ce. serait trop me. demander que de m'absfe-nir plus longtemps de ce commentaire. Dansla mesure de. mes moyens j'estime que, je nesuis pas autoris laisser courir les pleutres,les simulateurs, les arrivistes, les faux tmoinset. les mouchards. Le. temps perdu attendrede. pouvoir les confondre peut encore se rattra-per, et ne peut, encore se rattraper que. contreeux. Je pense, que cette, discrimination trsprcise est seule parfaitement, digne du butque. nous poursuivons, qu'il y aurait quelqueaveuglement mystique sous-est imer la portedissolvante, du sjour de ces tratres parminous, comme il y aurait; la plus lamentableillusion de caractre positiviste supposer(pie ces tratres, qui n'en sont; qu' leur coup(l'essai, peuvent rester insensibles une tellesanction.

    Et. le diable prserve, encore une fois, l'idesurraliste comme, foute autre, ide, qui tend prendre une forme concrte, se soumettrefout; ce qu'on peut imaginer de mieux dansl'ordre du fait, au mme litre que l'ide d'amour

    (*) Ht puis, la barbe avec la Rvolution ! son mot. historique dans le surralisme.Sansdoute.

  • SECOND MANIFESTE DU SURRALISMEtend crer un tre, que l'ide de. Rvolutiontend faire arriver le jour de, cette Rvolution,faute de quoi ces ides perdraient tout sens ;rappelons que l'ide de surralisme, tend sim-plement la rcupration totale de notre forcepsychique par un moyen qui n'est autre que.la descente vertigineuse en nous, l'illuminationsystmatique des lieux cachs et l'obscurcisse-ment progressif des autres lieux, la promenadeperptuelle en pleine, zone interdite et que, sonactivit ne court aucune chance srieuse deprendre, fin tant que l'homme parviendra distinguer un animal d'une, flamme ou d'unepierrele diable prserve, dis-je, l'ide sur-raliste de commencer aller sans avatars.Il faut absolument que. nous fassions commesi nous tions rellement; au monde pouroser ensuite formuler quekpics rserves. N'endplaise donc ceux epri se. dsesprent denous voir quitter souvent les hauteurs o ilsnous cantonnent, j'entreprendrai de parler icide l'attitude politique,

    artistique , pol-

    mique qui peut, la fin de 1929, tre la ntreet de faire, voir, en dehors d'elle, ce que luiopposent au juste quelques comportementsindividuels choisis aujourd'hui parmi les plustypiques et; les plus particuliers.

    Je ne sais s'il y a lieu de rpondre ici auxobjections puriles de ceux qui, supputant lesconqutes possibles du surralisme dans ledomaine potique o il a commenc par s'exer-cer, s'inquitent de lui voir prendre partidans la querelle sociale et prtendent qu'il atout y perdre. C'est incontestablementparesse de leur part ou expression dtournedu dsir qu'ils ont de nous rduire. Dans lasphre de la moralit, estimons-nous qu'a ditune fois pour toutes Hegel, dans la sphre de.la moralit en tant qu'elle se distingue de lasphre sociale, on n'a qu'une, conviction formelle,el si nous faisons mention de la vraie, convictionc'est pour en montrer la diffrence el pour viterla confusion en laquelle on pourrait tomber enconsidrant la conviction telle qu'elle csl ici,c'esl--ilire la conviction formelle, comme sic'tait la conviction vritable, lundis que celle-cine se produit d'abord que dans la vie. sociale. (*).Lo procs de la suffisance de celle convictionfermelle n'est plus faire et vouloir foutprix (pie nous nous en tenions celle-ci n'est l'honneur, ni de l'intelligence, ni de la bonnefoi de nos contemporains, il n'est pas de sys-tme idologique qui puisse sans effondrementimmdiat manquer, depuis Hegel, pouvoirau vide que laisserait, dans la pense mme,le principe d'une volont n'agissant (pie pourson propre compte et. foule porte se rfl-chir sur elle-mme. Quand j'aurai rappel (piela loyaut, au sens hglien du mot, ne peuttre fonction que de la pntrabilif de la viesubjective par la vie substantielle et. (pie.quelles que soient par ailleurs leurs divergences,cette ide n'a pas rencontr d'objection fonda-mentale de la part d'esprits aussi divers (pie

    Feucrbach, finissant par nier la conscience,comme facult particulire, que. Marx, entire-ment pris par le. besoin de modifier de fond encomble, les conditions extrieures de la viesociale, que. Hartmann tirant d'une thoriede. l'inconscient base ultra-pessimiste uneaffirmation nouvelle et optimiste de notrevolont de vivre, que Freud, insistant de plusen plus sur l'instance, propre, du sur-moi,je pense qu'on ne s'tonnera pas de voir lesurralisme, chemin faisant, s'appliquer autre chose qu' la rsolution d'un problmepsychologique, si intressant soif-il. C'est aunom de. la reconnaissance, imprieuse de cettencessit que j'estime que nous ne pouvonspas viter de nous poser de. la faon la plusbrlante la question du rgime, social souslequel nous vivons, je veux dire de l'accepta-tion ou de. la non-acceptation de ce rgime.C'est au nom de celte, reconnaissance aussiqu'il est mieux que folrable que. j'incrimine,en passant, les transfuges du surralisme pourqui ce que je soutiens ici est. trop difficile outrop haut. Quoi qu'ils fassent, de quelque cride fausse joie qu'ils saluent, eux-mmes leurretraite, quelque dception grossire qu'ilsnous vouent

    -et avec eux fous ceux quidisent qu'un rgime en vaut un autre puisquede foute manire l'homme sera vaincuils ne me feront pas oublier que. ce n'est, pas

    eux mais, j'espre, moi, qu'il appartiendrade. jouir de cette

    ironie

    suprme, qui

    s'applique tout cl aussi aux rgimes et. quileur sera refuse parce qu'elle, est par delmais qu'elle, suppose, au pralable, tout l'actevolontaire qui consiste dcrire le. cycle

    de

    l'hypocrisie, du probabilisme, de la volontqui veut le bien el de. la conviction (*).

    Le surralisme, s'il entre spcialement dansses voies d'entreprendre le. procs des notionsde. ralit et d'irralit, de raison et de draison,de rflexion el d'impulsion, de savoir et d'igno-rance fatale , d'utilit et d'inutilit, etc.,prsente avec le matrialisme historique aumoins celle analogie de. tendance qu'il pari,de 1'

    avorfemeiif colossal du systmehglien. 11 me parat impossible qu'on assigne,des limites, ('elles du cadre conomique, parexemple, l'exercice d'une pense dlinifive-nionf assouplie la ngation, et la ngationde la ngation. Comment, admet Ire (pie lamthode dialectique ne. puisse s'appliquervalablement qu' la rsolution des problmessociaux? Toute l'ambition du surralisme estde lui fournir des possibilits d'applicationnullement, concurrentes dans le domaine cons-cient, le plus immdiat. Je ne vois vraimentpas, n'en dplaise quelques rvolutionnairesd'esprit born, pourquoi nous nous abstien-drions de soulever, pourvu (pie nous les envi-sagions sous le mme angle que cciiii souslequel ils envisagent et nous aussi

    -

    laRvolution: les problmes de l'amour, du rve,de. la folie, de l'art el. de la religion. Or, je ne.

    (*) IlEt.iii- : Philosophie du Droit. (*) IIKOICI. : Phnomnologie de l'Esprit,

  • SECOND MANIFESTE DU SURRALISMEcrains pas de dire qu'avant le surralisme, riende systmatique n'avait t fait dans ce sens,et qu'au point o nous l'avons trouve, pournous aussi, sous sa forme hglienne la mthodedialectique tait inapplicable . 11 y allait,pour nous aussi, de. la ncessit d'en finiravec l'idalisme proprement dit, la crationdu mot surralisme seule nous en seraitgarante, et

    ,pour reprendre l'exemple d'Engels,de la ncessit de ne. pas nous en tenir au dve-loppement enfantin : La rose est une rose.La rose n'est pas une rose. Et pourtant la

    rose, est une rose mais, qu'on me passe cette,parenthse, d'entraner la rose dans unmouvement profitable de contradictions moinsbnignes o elle soit successivement celle quivient du jardin, celle qui tient une place singu-lire dans un rve, celle impossible distrairedu bouquet optique , celle qui peut changertotalement de proprits en passant dansrcriture automatique, celle qui n'a plus quece que le peintre a bien voulu qu'elle, garde dela rose dans un tableau surraliste et enfincelle, toute diffrente d'elle-mme, qui retourneau jardin. 11 y a loin, de. l, une vue idalistequelconque et nous ne nous en dfendrionsmme pas si nous pouvions cesser d'tre enbutte aux attaques du matrialisme primaire,attaques cpii manent la fois de ceux qui,par bas conservatisme, n'ont aucun dsir detirer au clair les relations de la pense et de.la matire et de ceux qui, par un sectarismervolutionnaire mal compris, confondent, aumpris de. tout ce. qui leur est demand, ce.matrialisme avec celui qu'Engels en dislingue,essentiellement et qu'il dfinit, avant; toutcomme, une. intuition du inonde appele s'prouver et se. raliser : Au cours dudveloppement de lu philosophie, l'idalisme,devint intenable el fut ni, par le matrialismemoderne. Ce dernier, qui est la ngation de, langation, n'est pas la simple restauration del'ancien matrialisme, : aux fondements durablesde celui-ci il ajoute toute la pense de la philoso-phie et des sciences de, la nature au cours d'une,volution de .deux mille, ans, et le produit de cellelongue histoire elle-mme. Nous entendonsbien aussi nous'mettre en position de dparttelle que pour nous fa philosophie soit sur-classe. C'est le sort, je pense, de tous ceuxpour qui la ralit n'a pas seulementune impor-tance thorique mais encore est une. questionde vie. ou de mort d'en appeler passionnment,comme l'a voulu Feuerbach, cette ralit :le ntre de donner comme nous la donnons,totalement, sans rserves, notre adhsion auprincipe du matrialisme, historique, le siende jeter la face du monde intellectuel bahil'ide que l'homme est ce qu'il mange etqu'une rvolution future aurait plus de chancesde succs si le peuple recevait une meilleurenourriture, en l'espce des pois au lieu depommes de terre.

    Notre adhsion au principe du matrialismehistorique... il n'y a pas moyen de jouer surces mots. Que cela ne. dpende que de nous

    je veux dire pourvu que le communismene nous traite pas seulement en btes curieusesdestines exercer dans ses rangs la badau-derie et la dfiance,

    et nous nous montreronscapables de faire, au point de vue rvolu-tionnaire, tout notre devoir. C'est l, mal-heureusement, un engagement qui n'intresseque nous : je. n'ai pu, en ce qui me concernepar exemple, il y a deux ans, passer comme je.le voulais, libre et inaperu, le seuil de cettemaison du parti franais o tant d'individusnon recommandables, policiers et autres, ontpourtant licence de s'battre comme dans unmoulin. Au cours de trois interrogatoires deplusieurs heures, j'ai d dfendre le surralismede l'accusation purile, d'tre dans son essenceun mouvement politique d'orientation nette-ment anti-communiste et contre-rvolution-naire. De procs foncier de mes ides, inutilede dire que de la part de ceux qui me jugeaient,je n'avais pas en attendre. Si vous tesmarxiste, braillait vers cette poque MichelMarty l'adresse de l'un de nous, vous n'avezpas besoin d'tre surraliste. Surralistes,ce n'est bien entendu pas nous qui nous tionsprvalus de l'tre en cette circonstance : cettequalification nous avait prcds malgr nouscomme et aussi bien pu le faire celle de relativistes pour des einsteiniens, de psy-chanalystes

    pour des freudiens. Quellemisre ! Comment ne. pas s'inquiter terrible-ment d'un tel affaiblissement du niveauidologique d'un parti nagure sorti si brillam-ment arm de deux des plus fortes ttes dudix-neuvime sicle ! On ne le sait cpie trop :le peu que. je puis tirer cet gard de monexprience personnelle est la mesure dureste. On me demandait de faire, la cellule du gaz un rapport, sur la situation italienneen spcifiant, que. je n'eusse m'appuyer quesur des faits statistiques (production del'acier, etc.) et surtout pas d'idologie. Je n'aipas pu.

    J'accepte, cependant, cpie par suite, d'une,mprise, rien de plus, on m'ait pris dans leparti communiste, pour un des intellectuels lesplus indsirables. Ma sympathie est, parailleurs, trop exclusivementacquise la massede ceux qui feront la rvolution sociale, pourpouvoir se ressentir des effets passagers decelte msaventure. Ce que je n'accepte pas,c'est que, sduits par des possibilits de mouve-ment particulires, certains intellectuels queje connais, et dont les dterminations moralesme. paraissent sujettes caution, ayant essaysans succs de. la posie, de la philosophie,se. rabattent sur l'agitation rvolutionnaire,grce, la confusion qui y rgne parviennent faire, plus ou moins illusion et, pour se. fairebien voir, n'aient rien de plus press (pie derenier bruyamment ce. qui, comme, le. sur-ralisme, leur a donn penser le. plus clairde ce qu'ils pensent mais aussi les astreignait rendre des comptes et justifier humaine-ment de leur position. A leur grande satisfac-tion ce contrle ne. peut avoir lieu dans lesmilieux politiques et libre eux, ds lors, de

  • SECOND MANIFESTE DU SURRALISMEdonner corps leur ambition, cette ambitionqui prexistait en eux, c'est l le point grave, la dcouverte de leur prtendue, vocationrvolutionnaire. Il faut les voir prcher d'auto-rit aux vieux militants, il faut les voir brleren moins de temps qu'il n'en faudrait pourbrler leur porte-plume, les tapes de. la pensecritiqu"plus svre ici que partout ailleurs,il faut les voir, l'un prendre tmoin un petitbuste trois francs quatre-vingt quinzj. deLnine, l'autre taper sur le ventre de. Trotsky.Ce que je n'accepte pas davantage c'est quedes gens avec qui nous nous sommes trouvsen contact et de qui, pour l'avoir prouve nos dpens, nous avons dnonc toute occa-sion depuis trois ans la mauvaise foi, l'arri-visme et les fins contre-rvolutionnaires, lesMorhange, les Politzer et les Lefvre, trouventle moyen de. capter la confiance des dirigeantsdu parti communiste au point de pouvoirpublier, avec l'apparence au moins de leurapprobation, eleux numros d'une Revue dePsychologie concrte et sept numros de laRevue Marxiste, au bout; desquels ils se chargentde nous difier dfinitivementsur leur bassesse,le second en se dcidant, au boul d'un an de

    travail en commun et de, complicit,

    aller, parce qu'on parle de supprimer la psycho-logie concrte qui ne. se. vend pas, donnerau parti le premier, coupable d'avoir dissipen un jour Monte-Carlo une. somme, dedeux cent mille francs cjui lui avait t confiepour servir la propagande, rvolutionnaire,et celui-ci, outr seulement de ce procd,venant brusquement s'ouvrir moi de sonindignation mais reconnaissant sans diffi-cults que le fait est exact. Il est donc permisaujourd'hui, M. Rappoport aidant, d'abuserdu nom de Marx, en France, sans que personney voie, le moindre mal. Je demande, dans cesconditions, qu'on me dise o en est la moralitrvolutionnaire.

    On conoit que la facilit d'en imposer aussicompltement que. ces messieurs ceux quiles accueillent, hier l'intrieur du particommuniste, demain dans l'opposition de ceparti, ait t et doive, tre, encore pour tentercpielques intellectuels peu scrupuleux, prisaussi bien dans le. surralisme, qui n'a pas,ensuite, de plus dclars adversaires. Les uns, la manire de M. Baron, auteur de. pomesassez habilement, dmarqus d'Apollinaire,mais de plus jouisseur la diable et, fauteabsolue d'idesgnrales, dans la fort immensedu surralisme pauvre petit coucher de soleilsur une mare stagnante, apportent au monde

    rvolutionnaire

    le tribut d'une exallafionde collge, d'une, ignorance

    crasse. agr-mentes de visions de quatorze juillet. (Dansun style impayable, M. Baron m'a l'ait part,il y a quelques mois, de sa conversion au lni-nisme intgral. Je tiens sa lettre, o les propo-sitions les plus cocasses le. disputent de ter-ribles lieux communs emprunts au langagede YHumanit et des protestations d'amititouchantes, la disposition des amateurs. Jen'en reparlerai que s'il m'y oblige.) Les autres,

    la manire de M. Naville, de qui nous atten-drons patiemment que son inassouvissablesoif de notorit le dvore

    en un rien detemps il a t directeur de l'OEuf dur, directeurde la Rvolution Surraliste, il a eu la haute,main sur l'Etudiant d'avanl-garde, il a tdirecteur de Clart, de la Lutte de Classes, ila failli tre directeur du Camarade, le voicimaintenant grand premier rle la Vrit

    les autres s'en voudraient de devoir quelquecause que. ce soit autre chose qu'un petitsalut de protection comme en ont, l'adressedes malheureux, les dames des bonnes oeuvresqui, ensuite, en deux mots vont leur dire quoifaire. Rien qu' voir passer M. Naville, le.parti communiste franais, le parti russe, laplupart des oppositionnels de tous les paysau premier rang desquels les hommes enverscpii il eut pu avoir contract une dette : BorisSouvarine, Marcel Fourrier, tout comme lesurralisme et moi, ont fait figure de ncessi-teux. M. Baron cpii crivit l'Allure potique.est cette allure ce que M. Naville. est; l'allurervolutionnaire. Un stage de trois mois dansle parti communiste, s'est dit M. Naville,voil qui est bien suffisant puisque l'intrt,pour moi, est de faire valoir que. j'en suissorti. M. Naville, tout au moins le. pre deM. Naville, est fort riche. (Pour ceux de meslecteurs qui ne. sont pas ennemis du pittoresque,j'ajouterai que le bureau directorial de la Luttede Classes est situ 15, rue de Grenelle, dansune. proprit de famille, de M. Naville, quin'est autre que. l'ancien htel des ducs deL.a Rochefoucauld.) De telles considrationsme. semblent moins indiffrentes que jamais.Je remarque, en effet, que M. Morhange, aumoment o il entreprend de fonder / RevueMarxiste, est commandit cet effet de 5 mil-lions par M. Friedmann. .Sa malchance laroulette a beau l'obliger rembourserpeu aprsla plus grande partie de cette somme, il n'enreste pas moins que c'est grce cette aidefinancire exorbitante qu'il parvient usurperla place, qu'on sait et y faire, excuser sonincomptence notoire. C'est galement ensouscrivant un certain nombre de parts defondateur de l'entreprise Les Revues , dontdpendait la Revue Marxiste que M. Baron,qui venait, d'hriter, put croire que de plusvastes horizons s'ouvraient devant lui. Or,lorsque M. Naville nous fit part, il y a quelquesmois, de son intention de. faire paratre le Ca-marade, journal qui rpondait, d'aprs lui, la ncessit de donner une nouvelle vigueur la critique opposiUonnelle mais qui, enralit, devait, surtout lui permettre de prendrede Fourrier, trop clairvoyant, un de ces congssourds dont il a l'habitude, j'ai t curieuxd'apprendre de sa bouche qui faisait les fraisde cette publication, publication dont, commeje l'ai dit, il devait, tre directeur, et seul direc-teur bien entendu.

    Efaient-ce ces mystrieux amis aveclesquels on engage, de longues conversationstrs amusantes chaque dernire page. de.journal et qu'on prtend intresser si vivement

  • SECOND MANIFESTE DU SURRALISME

    au prix du papier? Non pas. C'taient pure-ment et simplement M. Pierre Naville. et sonfrre, pour une somme, de 15.000 francs sur20.000. Le reste tait fourni par de soi-disant

    copains de Souvarine, dont M. Navilledut avouer qu'il ne connaissait mme pas lesnoms. On voit cjue, pour faire prdominerson point de vue dans les milieux qui, cetgard, devraient se montrer pourtant les plusstricts, il importe moins que ce point de vuesoit par lui-mme imposable, que d'tre le filsd'un banquier. M. Naville, qui pratique avecart, en vue du rsultat, classique, la mthodede division des personnes, ne reculera, c'estbien clair, devant aucun moyen pour arriver rgenter l'opinion rvolutionnaire. Mais,comme dans cette mme fort allgorique oje voyais tout l'heure M. Baron dployer desgrces de ttard il y a eu dj quelques mau-vais jours pour ce serpent boa de mauvaisemine, il n'est, fort heureusement, pas dit cjuedes dompteurs ele la force ele Trofsky et mmede Souvarine ne finiront pas par mettre la raison rminent reptile. Pour l'instantnous savons seulement qu'il revient de Constan-tinople en compagnie du petit volatile FrancisGrard. Les voyages, qui forment la jeunesse,ne dforment pas la bourse de M. Naville. pre.11 est aussi de tout premier intrt d'allerdgoter Lon Trotsky ele ses seuls amis.Une dernire question, foute platonique, M. Naville : QUI entretient la Vrit, organede l'opposition communiste, o votre nomgrossit chaque semaine et s'tale ds mainte-nant en premire page? Merci.

    Si j'ai cru bon de m'tendreassez longuement,sur de tels sujets, c'est d'abord pour signifierque contrairement ce qu'ils voudraient fairecroire, tous ceux de. nos anciens collaborateursqui se disent aujourd'hui bien revenus du sur-ralisme, sans en excepter un seul, en ont tpar nous chasss : encore, n'lait-il pas inutilequ'on st pour quel genre de. raison. C'tait,ensuite, pour montrer que, si le surralismese considre comme, li indissolublement, parsuite des affinits que j'ai signales, ladmarche de la pense marxiste et cettedmarche seule, il se dfend et sans doute ilse dfendra encore longtemps ele, choisir entreles deux courants trs gnraux qui roulent, l'heure actuelle, les uns contre les autresdes hommes qui, pour ne pas avoir la mmeconception tactique, ne s'en sont pas moinsrvls de part et d'autre comme de francsrvolulionnaires. Ce n'est pas au moment; oTrctsky, par une lettre date du 25 sep-tembre 1929, accorde, que dans l'Internatio-nale,

    /c /(/// d'une, conversion de la direction

    officielle vers la gauche est paient et o, pra-tiquement, il appuie, de foute son autoritla demande de. rintgration de Racovsky, de

    Cassior et d'Okoudjava, susceptibled'entranerla sienne propre, que nous allons nous faireplus irrductibles que lui-mme. Ce n'est pasau moment; o la seule considration du pluspnible conflit qui soit entrane, de la part

    de tels hommes, abstractionfaite publiquementau moins ele leurs plus dfinitives rserves,un nouveau pas dans la voie du ralliement,que nous allons, mme de trs loin, chercher envenimer la plaie sentimentale de la r-pression comme le fait M. Panait Istratiet comme, l'en flicite M. Naville, tout en luitirant gentiment l'oreille : Islrali, tu auraismieux fait de ne pas publier un fragment deIon livre dans un organe comme la NouvelleRevue Franaise

    (*), etc. Notre intervention,

    en pareille, matire, ne. tend qu' mettre engarde les esprits srieux contre un petit nombred'individus que, par exprience, nous savonstre, des niais, des fumistes ou tes intrigantsmais, .de foute manire, des tres rvolution-nairement malintentionns. C'est peu prstout ce qu'il nous est actuellement donn, defaire de ce ct. Nous sommes les premiers regretter que ce soit si peu.

    Pour (pie. de. tels carts, de telles volte-faces,de. tels abus de confiance de tous ordres soientpossibles sur le terrain mme o je viens ele meplacer, il faut, assurment que tout soit; un assezbeau parterre de drision et qu'il y ait. peinelieu de. compter sur l'activit dsintresse de.plus ele quelques hommes la fois. Si la tchervolutionnaire elle-mme, avec toutes lesrigueurs que son accomplissement, suppose,n'est pas de nature sparer d'emble lesmauvais des bons et les faux des sincres,si, son plus grand dam, force lui est d'attendrequ'une srie d'vnements extrieurs sechargent de dmasquer les uns et de parerd'un reflet d'immortalit le visage nu desautres, comment veut-on qu'il n'en aille pasplus misrablement encore de ce qui n'est pascette fche proprement, dite cl, par exemple,ele la fche surraliste dans la mesure o cetteseconde tche ne se confond pas seulementavec la premire? 11 est normal que le sur-ralisme se. manifeste au milieu et peut-treau prix d'une suite ininterrompue, de dfail-lances, de zigzags et de dlections qui exigent tout instant la remise en question de sesdonnes originelles, c'est--dire le rappel auprincipeinitial de son activit, joint l'interro-gation du demain joueur qui veut que lescoeurs s'prennent et se dprennent. Toutn'a pas t tent, je dois le dire, pour mener bien cette entreprise, ne serait-ce qu'en tirantparti jusqu'au bout des moyens qui ont tdfinis pour les ntres et en prouvant pro-fondment les modes d'investigation qui, l'origine du mouvement qui nous occupe, ontt prconiss. Le problme de l'action sociale,n'est, je. tiens y revenir et j'y insiste, qu'unedes formes d'un problme, plus gnral que.le surralisme s'est mis en devoir de soulever

    (*) Sur Panait. Istrati et l'affaire Roussakov,voir La N.Ii. F.. 1er octobre: T.a Vrit, 11 oc-tobre 1921).

  • SECOND MANIFESTE DU SURRALISMEet qui est celui de l'expression humaine sousfoules ses formes. Qui dit expression dit, pourcommencer, langage. 11 ne faut donc pass'tonner de voir le surralisme, se situer toutd'abord presque uniquement sur le plan dulangage et, non plus, au retour ele quelqueincursion que ce soit, y revenir comme poul-ie plaisir de s'y comporter en pays conquis.Rien, en effet, ne peut plus empcher que,pour une. grande part, ce pays ne soit conquis.Les hordes de mots littralement dchansauxquels Dada et le surralisme, ont. tenu ouvrir les portes, quoi qu'on en ait, ne sontpas de celles qui se, retirent si vainement.Elles pntreront sans hte., coup sr, dansles petites villes idiotes ele la littrature quis'enseigne encore, et, confondant sans peineici les bas et les hauts quartiers, elles feront;posment une belle consommation de tourelles.Sous prtexte que, par nos soins, la posie est, ce jour, tout ce. qui se trouve srieusement;branl, la population ne se mfie pas trop,elle construit et l des digues sans impor-tance. On feint ele ne pas trop s'apercevoirque le mcanisme logique de la phrase semontre lui seul de plus en plus impuissant,chez l'homme, dclancher la secousse motivequi donne rellement, quelque prix sa vie.Par contre les produits de cette activit spon-tane ou plus spontane, directe ou plus directe,comme ceux pie lui offre de plus en plus nom-breux le surralisme, sous forme de. livres, de.tableaux et de films et qu'il a commenc parregarder avec stupeur, il s'en entoure mainte-nant et il s'en remet plus ou moins timidement eux du soin de bouleverser sa faon de sentir.Je sais : cet homme n'est pas encore, loulhomme et il faut lui laisser le. temps dele. devenir. Mais voyez de quelle admirableet perverse insinuation se sont dj montrescapables un petit nombre d'oeitvres toutesmodernes, celles mme o le. moins qu'onpuisse dire est qu'il y rgne un air particu-lirement insalubre : Baudelaire, Rimbaud (endpit des rserves que j'ai faites), Huysmans,Lautramont, pour m'en tenir la posie. Necraignons pas de nous faire une loi de cetteinsalubrit. 11 doit ne pas pouvoir tre litque. nous n'avons pas fout fait, pour anantircelte sfupide. illusion de bonheur et 'enlenle.(pie ce sera la gloire, du dix-neuvime sicled'avoir dnonce. Certes nous n'avons pascess d'aimer fanatiquement ces rayons desoleil plein de miasmes. Mais, l'heure oles pouvoirs publics, en France, s'apprlenl. clbrer groLesque.me.nl; par des ftes lecentenaire du romantisme, nous disons, nous,que ce romantisme dont nous voulons bien,historiquement, passer aujourd'hui pour laqueue, mais alors la queue tellement prhensile,(le par son essence, mme en 1930 rside foutentier dans la ngation de ces pouvoirs cl;de ces ftes, qu'avoir cent ans d'existencepour lui c'est la jeunesse, que ce qu'on a appel tort son poque hroque ne peut plushonntement passer que pour le vagissement

    d'un tre qui commence seulement faireconnatre son dsir travers nous et qui, sil'on admet que ce qui a t pens avant lui

    classiquement

    tait le bien, veutincontestablement loul le mal.

    11 est regrettable, je commenais le dire,plus haut, que des efforts plus systmatiqueset plus suivis, comme, n'a pas encore cessd'en rclamer le. surralisme, n'aient t fournisdans la voie de l'criture automatique, parexemple, et des rcits de rves. Malgr l'insis-tance que nous avons mise introduire destextes de ce caractre dans les publicationssurralistes et la place remarquable, qu'ilsoccupent dans certains ouvrages, il faut avouerque leur intrt a quelquefois peine s'ysoutenir ou qu'ils y font un peu trop l'effetde

    morceaux de bravoure . L'apparitiond'un poncif indiscutable l'infrieur de cestextes est aussi tout, l'ait prjudiciable l'espce de. conversion que, nous voulionsoprer par eux. La faute en est. la trs grandengligence de. la plupart de leurs auteurs quise satisfirent gnralement de laisser courirla plume, sur le papier sans observer le. moinsdu monde ce. qui se passait alors en eux,

    -

    ceddoublement tant pourtant plus facile, saisir et plus intressant, considrer (piecelui de l'criture rflchie

    ou de rassemblerd'une manire plus ou moins arbitraire deslments oniricpies destins davantage faire,valoir leur pittoresque qu' permettre d'aper-cevoir utilement leur jeu. Une telle confusionest, bien entendu, de, nature nous priver eletout le. bnfice que nous pourrions trouver ces sortes d'oprations. La grande valeurqu'elles prsentent pour le surralisme tienten effet, ce qu'elles sont susceptibles ele nouslivrer des tendues logiques particulires, trsprcisment celles o jusqu'ici la facult logique,exerce en tout et pour tout dans le conscient,n'agit pas. Ici non plus le surralisme, que nousavons vu socialement adopter de propos dli-br la formule marxiste, n'entend pas faire,bon march de la critique freudienne desides : fout au contraire il fient celte critiquepour la premire et pour la seule, vraiment,fonde. S'il lui est impossible d'assister indiff-rent au dbat qui met; aux prises sons sesyeux les reprsentants qualifis des diversestendances psychanalytiques

    tout comme

    il est amen, au jour le. jour, considrer avecpassion la lutte qui se. poursuit la fle del'Internationale

    il n'a pas intervenir dansune, controverse epii lui parat ne. pouvoirlongtemps encore se. poursuivre utilementqu'entre praticiens. Ce n'est pas l le domaine,dans lequel il entend faire valoir le rsultatde ses expriences personnelles. Mais, commeil est donn de par leur nature ceux qu'ilrassemble, de prendre en considration foutespciale cette donne freudienne sous le. coupde laquelle tombe la plus grande partie deleur agitation en tant qu'hommes

    souci decrer, de. dtruire artistiquement

    -

    je veuxparler de la dfinition du phnomne, de

  • 10 SECOND MANIFESTE DU SURRALISMEsublimation(*), le surralismedemande essen-tiellement ceux-ci d'apporter l'accomplisse-ment de leur mission une. conscience nouvelle,de faire en sorte de suppler par une auto-observation qui prsente une valeur exception-nelle dans leur cas, ce que laisse d'insuffisantla pntration des tats d'me dits artis-tiques par des hommesqui ne sont pas artistesniais pour la plupart mdecins. Par ailleursil exige que, par le chemin inverse de celui quenous venons de les voir suivre, ceux quipossdent, au sens freudien, la prcieusefacult

    dont nous parlons, s'appliquent tudier sous ce jour le mcanisme complexe

    entre tous de l'inspiration et, partir du mo-ment o l'on cesse de tenir celle-ci pour unechose sacre, que tout la confiance qu'ilsont en son extraordinairevertu, ils ne songentqu' faire tomber ses derniers liens, et ce qu'onn'eut jamais encore os concevoir, se lasoumettre. (Inutile de s'embarrasser cepropos de subtilits, on sait assez ce qu'estl'inspiration. Il n'y a pas s'y mprendre ;c'est elle qui a pourvu aux besoins suprmesd'expression en tout temps et en tous lieux.On dit communment qu'elle y est ou qu'ellen'y est pas et, si elle n'y est pas, rien de, ce quesuggrent auprs d'elle l'habilet humainequ'oblitre l'intrt, l'intelligence discursive etle talent qui s'acquiert par le travail ne peutnous gurir de son absence. Nous la reconnais-sons sans peine cette prise de possessiontotale de notre esprit qui, de loin en loin,empche que pour tout problme pos noussoyons le jouet d'une solution rationnelleplutt que d'une autre solution rationnelle, cette sorte de court-circuit qu'elle, provoqueentre une ide donne et sa rpondante (critepar exemple). Tout comme clans le monde

    physique, le court-circuit se produit quand lesdeux ples de la machine se trouvent runispar un Conducteur de rsistance nulle ou tropfaible. En posie, en peinture, le surralismea fait l'impossible pour multiplier ces courts-circuits. Il ne tient et il ne tiendra jamais rien tant qu' reproduire artificiellement cemoment idal o l'homme, en proie unemotion particulire, est soudain empoignpar ce. plus fort que lui qui le jette, soncorps dfendant, dans l'immortel. Lucide,veill, c'est avec terreur qu'il sortirait de ce.mauvais pas. Le tout est qu'il n'en soit paslibre, qu'il continue parler tout le temps quedure la mystrieuse sonnerie : c'est, en effet,par o il cesse de s'appartenir qu'il nous appar-tient). Ces produits de l'activit psychique,aussi distraits que possible de la volont designifier, aussi allgs que possible des idesde responsabilit toujours prtes agir commefreins, aussi indpendants cpie possible detout ce qui n'est pas la vie passive de l'intelli-gence, ces produits que sont l'criture auto-matique et les rcits de rves, prsentent lafois l'avantage d'tre seuls fournir des l-ments d'apprciation de grand style unecritique qui, dans le domaine artistique, se.montre, trangement dsempare, de permettreun reclassement gnral des valeurs lyriqueset de proposer une cl qui, capable d'ouvririndfiniment cette bote multiple fond quis'appelle l'homme, le dissuade de faire, demi-tour, pour des raisons de conservation simple,quand il se heurte dans l'ombre aux portesextrieurementfermes de 1' au-del , de laralit, de la raison, du gnie et de. l'amour.Un jour viendra o l'on ne. se permettra plusd'en user cavalirement, comme, on l'a fait,avec ces preuves palpables d'une existenceautre cjue celle que nous pensons mener.On s'tonnera alors que, serrant la vrit d'aussiprs que nous l'avons fait, nous ayons prissoin dans l'ensemble de nous mnager un alibilittraire ou autre plutt que, sans savoirnager, de nous jeter l'eau, sans croire auphnix d'entrer dans le feu pour l'atteindre.

    La faute, je. le rpte, n'en aura pas t nous tous indistinctement. En traitant dumanque, de. rigueur et. de puret clans lequelont quelque ]jeu sombr ces dmarches lmen-taires, je compte bien faire apercevoir ce qu'ily a de contamin, l'heure actuelle, dans ce.qui passe, travers dj trop d'oeuvres, pourl'expression valable du surralisme. Je nie,pour une grande part, l'adquation de cetteexpression cette ide. C'est l'innocence, la colre de quelques hommes venir qu'ilappartiendra de dgager du surralisme cequi ne. peut manquer d'tre encore vivant,de le restituer, au prix d'un assez beau saccage,. son but propre. D'ici l il nous suffira, mes amis et moi, d'en redresser, comme, je lefais ici, d'un coup d'paule la silhouette inu-tilement charge, de fleurs mais toujoursimprieuse. La trs faible mesure dans laquelle,d'ores et dj, le surralisme nous chappe

    (*) Plus on approfondit la palhognie des

    maladies nerveuses, dit Freud, plus on aperoittes relations qui les unissent aux autres phno-mnes de la vie psychique de l'homme, mme, ceux auxquels nous attachons le plus de valeur.Et nous voyons combien la ralit, malgr nosprtentions, nous satisfait peu; aussi sous lapression de nos refoulements intrieurs, entre-prenons-nous au-dedans de nous toute une viede fantaisie qui, en ralisant nos dsirs, compenseles insuffisances de l'existence vritable. L'hommenergique el qui russit ( qui russit : je laissebien entendu a Freud la responsabilit de. cevocabulaire), c'est celui qui parvient transmueren ralits les fantaisies du dsir. Quand cettetransmutation choue, par la faute des circonstancesextrieuresel de. la faiblesse de l'individu, celui-cise dtourne du rel ; il se relire, dans l'universplus heureux de son rve; en cas de maladie ilen transforme, le. contenu en symptmes. Danscertaines conditions favorables il peut encoretrouver un autre moyen de. passer de ses fantaisies la ralit, au lieu de s'carter dfinitivementd'elle par rgression dans le domaine infantile;

    .

    j'entends que s'il possde le don artistique,psychologiquement si mystrieux, il peut, aulieu de. symptmes, transformer ses rves en cra-tions artistiques. Ainsi cchappe-t-il au destinde la nvrose et trouve-t-ilpar ce dtour un rapportavec la ralit.

  • SECOND MANIFESTE DU SURRALISME iln'est, d'ailleurs, pas pour nous faire craindrequ'il serve d'autres contre nous. 11 est, natu-rellement, dommage que Vigny ait t un tresi prtentieux et si bte, que Gautier ait eu unevieillesse gteuse, mais ce n'est pas dommage{jour le romantisme. On s'attriste de penserque Mallarm ft un parfait petit bourgeois,ou qu'il y et des gens pour croire la valeurde Moras, mais, si le symbolisme tait quelquechose, on ne s'attristerait pas jjour le symbo-lisme, etc. De la mme manire, je ne pensepas qu'il y ait grave inconvnient pour lesurralisme enregistrer la ])erte de telle outelle individualit mme brillante, et notam-ment au cas o celle-ci qui, par l-mme, n'estplus entire, indique par tout son comporte-ment qu'elle dsire rentrer dans la norme.C'est ainsi qu'aprs lui avoir laiss un tempsincroyable pour se reprendre ce que nousesprions n'tre qu'un abus passager de safacult critique, j'estime que nous nous trou-vons dans l'obligationde signifier Desnos que,n'attendant absolument plus rien de lui, nousne pouvons que le librer de tout engagementpris nagure, vis--vis de nous. Sans douteje m'acquitte de cette tche avec une certainetristesse. A rencontre de nos premiers compa-gnons de route que nous n'avons jamais song retenir, Desnos a jou dans le surralismeun rle, ncessaire, inoubliable, et le. momentserait sans doute plus mal choisi qu'aucunautre pour le contester. ( Mais Chirico aussi,n'est-ce. pas, et cependant...) Des livres commeDeuil pour Deuil, La libert, ou l'amour, C'estles bolles de. sept lieues celte phrase, : Je me vois,et tout ce que la lgende, moins belle que. laralit, accordera Desnos pour prix d'une acti-vit qui ne se dpensa pas uniquement criredes livres, militeront longtemps en faveurde ce qu'il est maintenant en posture decombattre. Qu'il suffise de savoir que cecise passait il y a quatre ou cinq ans. Depuislors, Desnos, grandement desservi dans cedomaine par les puissances mmes qui l'avaientquelque temps soulev et dont il jjarat ignorerencore qu'elles taient des puissances detnbres, s'avisa malheureusement d'agir surle plan rel o il n'tait qu'un homme plus seulet plus pauvre qu'un autre, comme ceux quiont vu, je dis : vu, ce. que les autres craignentde voir et qui, plutt qu' vivre ce qui est,sont condamns vivre ce qui fut et ce. qui sera . Faute de culture philosophique ,comme il l'avance aujourd'hui ironiquement,faute de culture, philosophique, non pas, maispeut-tre faute d'esprit philosophique el; fauteaussi, jiar suite, de savoir prfrer son per-sonnage intrieur tel ou tel personnage, ext-rieur de l'histoire

    fout de. mme quelle, ideenfantine : tre Robespierre ou Hugo ! Tousceux qui le connaissent savent que c'est ce, quiaura empch Desnos d'tre Desnos, il crutpouvoir se livrer impunment une. des activi-ts les plus prilleuses qui soient, l'activitjournalistique, et ngliger en fonction d'ellede rpondre pour son compte un petit nombrede sommations brutales en face desquelles,

    chemin faisant, le surralisme s'est trouv :marxisme ou anti-marxisme, par exemple.Maintenant que cette mthode individualistea fait ses preuves, que cette activit chezDesnos a compltement dvor l'autre, il nousest cruellement impossible de ne jjas dposer, ce sujet, de conclusions. Je dis que cetteactivit dpassant l'heure'actuelle les cadresdans lesquels il n'tait dj pas trs tolrablequ'elle s'exert (Paris Soir, le Soir, le Merle)il y a lieu de la dnoncer commeconfsionnelleau premier chef. L'article intitul Les Mer-cenaires de l'Opinion et jet en don de joyeuxavnement la remarquable poubelle qu'estla revue Bifur est suffisamment loquent parlui-mme : Desnos y prononce sa condamna-tion et en quel style ! Les moeurs du rdacteursont multiples. C'est en gnral un employ,relativement ponctuel, passablement jiares-seux , etc. On y relve des hommages M. Merle, M. Clemenceau et cet aveu, plusdsolant encore cjue le reste, savoir que lejournal est un ogre qui lue ceux grce auxquelsil vil.

    Comment s'tonner, ajns cela, de lire dansun journal quelconque ce stupide petit entre-filet : Robert Desnos, jwle surraliste, quiMon Ray demanda le. scnario de son filmEtoile de mer, fil avec moi, l'an dernier, unvoyage Cuba. Et savez-vous ce qu'il me rcitaitsous les toiles tropicales, Robert Desnost Desalexandrins, des a-le-xan-drins. El (mais n'allezpoint le rpter, et couler ainsi ce charmaiitpote), quand ces alexandrins n'taient pas deJean Racine, ils laienl de lui. Je pense, eneffet, que les alexandrins en question vontde pair avec la prose parue dans Bifur. Cetteplaisanterie, qui a fini par ne plus mme tredouteuse, a commenc le jour o Desnos,rivalisant dans ce pastiche avecM. ErnestRay-naud, s'est cru autoris fabriquer de toutespicesun pomede Rimbaud qui nousmanquait.Ce pome, qui ne doute de rien, a jjaru mal-heureusement sous le titre : Les Veilleurs,d'Arthur Rimbaud, en tte de La libert, oul'Amour. Je ne pense pas qu'il ajoute rien,non plus que ceux du mme genre qui ont suivi, la gloire de Desnos. Il importe, en effet, nonseulement d'accorder aux spcialistes que cesvers sont mauvais (faux, chevills et creux)mais encore de dclarer que, du point de vuesurraliste, ils tmoignent d'une ambitionridicule et d'une incomprhension inexcusabledes fins jiot.iques actuelles.

    Et voil donc o mne, l'usage immodrdu don verbal, quand il est destin masquerune absence, radicale de pense et renoueravec la tradition imbcile du jiote dans lesnuages : l'heure o cette tradition estrompue et, quoi qu'en pensentquelques rimail-leurs attards, bien rompue, o elle a cdaux efforts conjugus de ces hommes que nousmettons en avant parce qu'ils ont vraimentvoulu dire, quelque chose : Borel, le. Nervald'Aurlia, Baudelaire, Lautramont, le Rim-baud de 1874-75, le premier Huysmans,l'Apollinaire des pomes-conversations et

  • 12 SECOND MANIFESTE DU SURREALISME

    des

    Quelconqueries, il est pnible qu'unde ceux cjue nous croyions tre des ntres

    entreprenne de nous faire tout extrieurementle coup de Bateau ivre ou de nous rendor-mir au bruit des Stances . Il est vrai que laquestion potique a cess' ces dernires aimesde se poser sous l'angle essentiellementformelet, certes, il nous intresse davantage de jugerde la valeur subversive d'une oeuvre commecelle d'Aragon, de Crevel, d'Eluard, ele Pret,en lui tenant compte de sa lumire propre etde ce qu' cette lumire l'impossible rend aupossible, le permis vole au dfendu, que desavoir pourquoi tel ou tel crivain juge bon, et l, d'aller la ligne. Raison de moinspour qu'on vienne nous entretenir encore dela csure : pourquoi ne se trouverait-il pasaussi parmi nous de partisans d'une techniqueparticulire du

    vers libre et n'irait-onjDas dterrer le cadavre Robert ele Souza?Desnos veut rire : nous ne sommes pas prts rassurer le monde si facilement.

    Chaque jour nous apporte, clans l'ordre dela confiance et de l'espoir placs, de raresexceptions prs, beaucouj) troj"> gnreusementclans les tres, une. dception nouvelle qu'il fautavoir le courage d'avouer, ne serait-ce, parmesure d'hygine mentale, que pour la porterau compte horriblement dbiteur de la vie.Libre n'tait pas Duchamp d'abandonner lapartie, qu'il jouait aux environs de la guerrejjour une. j)arfie d'checs interminable quidonne peut-tre une ide curieuse, d'une intelli-gence rpugnant servir mais aussi

    tou-jours cet excrableHarrar

    paraissant lourde-ment afflige de scepticisme clans la mesureo elle refuse de dire pourquoi. Bien moinsencore, convient-il que nous passions M. Ribe-mont-Dessaignes de donner pour suite l'Empereur de Chine nue srie d'odieux petitsromans jioliciers, mmo signs : Dessaignes,clans les plus basses feuilles cinmatographiques.Je m'inquite enfin de. penser que Pieabiapourrait tre la veille de renoncer uneattitude de provocation et de rage presquepures, que parfois nous-mmes avons trouvdifficile de concilier avec la ntre, mais qui,du moins en jiosie et en jieinfure, nous atoujours sembl se dfendre admirablement. :

    S'appliquer il son travail, y apporter le m-tier

    sublime, aristocratique, qui n'a jamais

    empch, l'inspiration potique el seul, permet,i une o'uvre de traverser les sicles el de resterjeune... il faut faire attention... il faut serrerles rangs cl ne i>as chercl'.er i se tirer dans lesjambes cuire consciencieux ... il faut favoriserl'closion de l'idal

    etc. Mme par piti pourBifur o ces lignes ont, paru, est-ce bien lePieabia que nous connaissons cpii jiarle ainsi?

    Ceci dit, il nous prend par contre l'enviede rendre un homme de qui nous noussommes trouvs spars durant de longuesannes cette justice que l'expression de sajxuise nous intresse toujours, qu' en jugerpar ce que. nous pouvons lire encore de lui, ses|)roccupafions ne nous sont jias devenuestrangres et que, dans ces conditions, il y a

    peut-tre lieu de penser que notre msententeavec lui n'tait fonde sur rien de si grave quenous avons pu croire. Sans doute est-il possibleque Tzara qui, au dbut de 1922, poque dela liquidation de Dada en tant que mou-vemenl, n'tait plus d'accord avec nous surles moyens pratiques de poursuivre l'activitcommune, ait t victime de prventionsexcessives que nous avions, de ce fait, contrelui

    il en avait aussi d'excessives contrenous

    et cjue, lors de la trop fameuse repr-sentation du Coeur barbe, pour faireprendre letour qu'on sait notre rupture, il ait suffide sa part d'un geste malencontreux sur lesens duquel il dclare

    je le sais depuis peuque nous nous sommes mpris. C'est trs

    volontiers, pour ma part, que j'accepte dem'en tenir cette version et je ne vois dslors aucune raison de ne pas insister, auprsde tous ceux qui y ont t mls, pour que cesincidents tombent dans l'oubli. Depuis qu'ilsont eu lieu, j'estime que l'attitude intellec-tuelle de Tzara n'ayant j>as cess d'tre nette,ce serait faire preuve d'troitesse d'espritque de ne. pas publiquement lui en donneracte. En ce. cjui nous concerne, mes amis etmoi, nous aimerions montrer j>ar ce rappro-chement que ce. qui guide, en toutes circons-tances, notre conduite, n'est rien moins que,le dsir sectaire de faire prvaloir tout prixun jjoint de vue que nous ne demandons pasmme Tzara de partager intgralement, maisbien plutt le souci de reconnatre la valeur

    ce qui est jiour nous la valeur

    o elleest. Nous croyons l'efficacit de la posiede Tzara et autant dire que nous la consid-rons, en dehors du surralisme, comme laseule, vraiment situe. Quand je parle de sonefficacit, j'entends signifier qu'elle est op-aiite dans le domaine le ])lus vaste et qu'elleest un jxis marqu aujourd'hui dans le sens dola dlivrance humaine. Quand je dis qu'elleest situe on comprend que je l'oppose toutescelles qui jjourraient tre aussi bien d'hier etd'avanf-hier : au premier rang des choses queLautramont n'a jias rendu compltementimpossibles, il y a la posie de Tzara. Denos oiseaux venant peine de paratre, cen'est fort, heureusement, jias le silence, de. lapresse cjui arrtera sitt ses mfaits.Sans doue avoir besoin de demander Tzara de. se ressaisir, nous voudrions simple-ment l'engager rendre son activit plusmanifeste qu'elle ne put tre ces derniresannes. Le. sachant dsireux lui-mme d'unir,comme ]);;r le. pass, ses efforts aux ntres,raj)j>elons-!ui qu'il crivait, de son projn'caveu, pour chercher des hommes el rien dej)lus . A cet gard, qu'il s'en souvienne, noustions comme lui. Ne laissons pas croire, que,nous nous sommes ainsi trouvs, puis perdus.

    Je. cherche, autour c!e nous, avec cjui chan-ger encore, si possible, un signe d'intelligence,mais non : rien. Peut-tre sied-il, tout au plus,de faire observer Daumal, qui ouvre dansle. Grand jeu une, intressante enqute, sur le.Diable, que rien ne nous retiendrait d'approu-

  • SECOND MANIFESTE DU SURRALISME 13ver une grande partie des dclarations qu'ilsigne seul ou avec Lecomte, si nous ne restionssur l'impression passablement dsastreuse desa faiblesse en une circonstance donne (*)?Il est regrettable, d'autre part, que Daumalait vit jusqu'ici de prciser sa positionpersonnelle et, pour la part de responsabilitqu'il y prend, celle du Grand jeu l'garddu surralisme. On comprend mal que ce quitout coup vaut Rimbaud cet excs d'hon-neur ne vaille pas Lautramont la difica-tion pure et simple. L'incessantecontemplationd'une Evidence noire, gueule absolue , noussommes d'accord, c'est bien cela que noussommes condamns. Pour quelles fins mes-quines opposer, ds lors, un groupe ungroupe? Pourquoi, sinon vainement pour sedistinguer, faire, comme si l'on n'avait jamaisentendu parler de Lautramont?

    Mais les

    grands anti-soleils noirs, puits de vrit clansla trame essentielle, dans le voile gris du cielcourbe, vont et viennent et s'aspirent l'unl'autre, elles hommes les nomment Absencest>(**).Celui qui parle ainsi, en ayant le courage dedire qu'il ne se possde plus, n'a que faire,comme il ne peut tarder s'en apercevoir,de se prfrer l'cart de nous.

    Alchimie du verbe : ces mots qu'on varptant un peu au hasard aujourd'hui de-mandent tre pris au pied de la lettre. Si lechapitre, d' Une Saison en enfer qu'ilsdsignent ne justifie, peut-tre ])as toute leurambition, il n'en est pas moins vrai qu'il peut,tre tenu le plus authentiquement pourl'amorce de l'activit difficile qu'aujourd'huiseul le surralisme poursuit. Il y aurait, denotre part cjuelquc enfantillage littraire prtendre que. nous ne devons pas tant cetillustre texte. L'admirable quatorzime, sicleest-il moins grand dans le sens de. l'espoir(et, bien entendu, du dsespoir) humain,parce qu'un homme du gnie, de Flamel reutd'une, puissance mystrieuse, le manuscrit, quiexistait dj, du livre d'Abraham Juif, ouparce que les secrets d'Herms n'avaient past compltement perclus? Je n'en crois rienet j'estime cjue les recherches de, Flamel, avectout ce qu'elles prsentent ajmareinment derussite, concrte, ne, perdent rien avoir tainsi aides et devances. Tout se passe, de mme notre poque, comme si quelques hommesvenaient d'tre mis en possession, par desvoies surnaturelles, d'un recueil singulier d la collaboration de Rimbaud, de Lautra-mont et de quelques autres et qu'une voixleur et dit, comme Flamel l'ange : Re-gardez bien ce livre, vous n'y comprenez rien,ni vous, ni beaucoup d'autres, mais vous yverrezun jour ce que nul n'y saurait voir(***).

    Il ne dpend plus d'eux de se ravir cettecontemplation. Je demande qu'on veuille bienobserver que les recherches surralistes pr-sentent, avec les recherches alchimiques, uneremarquable analogie de but : la pierre philo-sophale n'est rien autre que ce qui devait per-mettre l'imagination de l'homme de prendresur toutes choses une revanche clatante etnous voici de nouveau, aprs des sicles dedomestication de l'esprit et de rsignationfofle, tenter d'affranchirdfinitivement cetteimagination par le long, immense, raisonndrglement de. tous les sens et le reste. Nousn'en sommes peut-tre qu' orner modeste-ment les murs de notre logis de figures qui,tout d'abord, nous semblent belles, l'imita-tion encore de Flamel avant qu'il et trouvson premier agent, sa matire , son four-neau . Il aimait montrer ainsi un Royavec un grand coutelas, qui faisoit tuer en. saprsence par des soldats, grande multitude depetits en)ans, les mres desquels pleuroientaux pieds des impitoyables gendarmes, le sangdesquels petits enfans, estoil puis aprs recueillypar d'autres soldais, et mis dans un grandvaisseau, dans lequel le Soleil el la Lune du cielvcnoienl se baigner et tout prs il y avait unjeune, homme avec, des aisles aux lalons, ayantune verge caduce en main, de laquelle il frapoilune salade qui lui couvroii la leste. Contre iceluyvenoil courant et volant ci aisles ouverts un grandvieillard, lequel, sur sa teste avoit une. horlogeattache

    . Ne dirait-on pas le tableau sur-raliste? Et cjui dit cjue plus loin nous n'allonspas, la faveur d'une vidence nouvelle ounon, nous trouver devant la ncessit de nousservir d'objets tout nouveaux, ou considrs tout jamais comme hors d'usage? Je ne pensepas forcment qu'on recommencera avalerdes coeurs de taupes ou couter, comme lebattement du sien projire, celui de l'eau cjui

    (*) CL

    A Suivre.

    (Varits, juin 1929).(**) DAUMAL : Feux Volont (Le GrandJeu. nrintemps 1929).(***) 13 novembre. 1929.

    Ce passage du Second Manifeste du Surralisme a t critil doit y avoir exactement trois semaines et

    c'est il y a deux jours seulement que m'a tsignale l'article de Desnos, intitul : Le Mys-tre d'Abraham Juif

    qui vient de paratre

    en tte du n 5 de Documents. Il est hors de clouteque Desnos et moi, vers la mme poque,avons cd une proccupation identique,alors que pourtant nous agissions en touteindpendance extrieure l'un de l'autre. Ce seraitla peine d'tablir cjue l'un de nous n'a pu treaverti plus ou moins opportunment des des-seins de l'autre et je crois pouvoir affirmercjue le nom d'Abraham Juif n'a jamais tprononc entre nous. Deux sur trois des figuresqui illustrent le texte de Desnos (et dont jecritique, pour ma j^art, la vulgarit d'inter-prtation

    : elles datent d'ailleurs, du xvnc),sont prcisment celles dont je donne plus loinla description, par Flamel. Avec Desnos cen'est pas la premire fois que pareille aventurenous arrive ( Cf. Entre des Mdiums , Les Mots sans rides , dans TLe.s Pas perdus,N. R. F., d.) Il n'est rien quoi j'ai toujoursattach plus de prix qu' la production de cesphnomnes mdianimiques qui vont jusqu'survivre aux liens affectifs. A cet gard je nesuis pas prs de changer, je. crois l'avoir^suffi-samment donn entendre dans Nadja."

  • u SECOND MANIFESTE DU SURRALISMEbout dans une chaudire. Ou plutt, je n'ensuis rien, j'attends. Je sais seulement, quel'homme n'est pas au bout de ses peines ettout ce que je salue est le retour de ce furorduquel Agrippa distinguait vainement ou nonquatre espces, Avec le surralisme, c'est bienUniquement ce furor que nous avons affaire,Et qu'on comprenne bien qu'il ne s'agit pasd'un simple regroupement des mots ou d'uneredistribution capricieuse des images visuelles,mais de la rcration d'un tat qui n'ait plusrien envier l'alinationmentale, les auteursmodernes que je cite se sont suffisammentexpliqus ce sujet. Que Rimbaud ait crubon de s'excuser de ce- qu'il appelle ses so-phismes nous n'en avons cure ; que cela,selon son expression, se soit pass, voil quin'a pas le moindre intrt pour nous. Nous nevoyons l qu'une petite lchet trs ordinaire,qui ne prsume en rien du sort qu'un certainnombre d'ides peuvent avoir. Je sais aujour-d'hui saluer la beaut : Rimbaud est impar-donnable d'avoir voulu nous faire croire de sapart une seconde fuite alors qu'il retournaiten prison. Alchimie du verbe : on j)eutgalement regretter que le mot verbe soitpris ici dans un sens un peu restrictif et Rim-baud semble reconnatre, d'ailleurs, que la

    vieillerie jjotique tient trop de place danscette alchimie. Le verbe est davantage et iln'est rien moins pour les cabalistes,par exemple,que ce l'image de quoi l'me humaine estcre ; on sait qu'on l'a fait, remonter jusqu'tre le premier exemplaire de la cause, descauses; il est autant, par f, dans ce que nouscraignons que dans ce que nous crivons quedans ce que nous aimons.

    Je dis que le surralisme en est encore lajjriode des prparatifs et je me hte d'ajouterqu'il se peut que cette priode dure aussilongtemps que moi (que moi dans la trs faiblemesure o je ne suis jjas encore en tat d'ad-mettre qu'un nomm Paul Lucas ait rencontrFlamel Brousse au commencement dudix-septime sicle, que le mme Flamel,accompagn de sa femme et d'un fils, ait tvu l'Opra en 1761 et qu'il ait fait unecourte apparition, Paris au mois de mai 1819,poque laquelle on raconte qu'il loua uneboutique Paris, 22, rue de Clry). Le faitest qu' grossirement parler ces prparatifssont d'ordre artistique . Je prvois toute-fois qu'ils prendront fin et qu'alors les idesbouleversantes que le surralisme recle appa-ratront dans un bruit d'immense dchirementet se donneront libre carrire. Tout est attendre de l'aiguillage moderne de certainesvolonts venir : s'affirmant aprs les ntres,elles se feront plus implacables que les ntres.De toute manire nous nous estimerons assezd'avoir contribu tablir l'inanit scanda-leuse de ce qui, encore, notre arrive, sepensait et d'avoir soutenu

    ne serait-ce que.soutenu

    qu'il fallait que le pens succombtenfin sous le jiensable.

    Il est permis de se demander qui Rimbaud,en menaant de stupeur et de folie ceux qui

    entreprendraient de marcher sur ses traces,souhaitait au juste dcourager. Lautramontcommence par prvenir le lecteur qu' moinsqu'il n'apporte dans sa lecture une logiquerigoureuse et une tension d'esprit au moinsgale sa dfiance, les manations mortelles dece livre

    Les Chants de Maldoror

    imbibe-ront son me, comme l'eau le sucre , mais ilprend soin d'ajouter que quelques-uns seulssavoureront ce fruit amer sans danger . Cettequestion de la maldiction, qui n'a gure prtjusqu'ici qu' des commentaires ironiques outourdis, est plus que jamais d'actualit. Lesurralisme a tout perdre vouloir loignerde lui-mme cette maldiction. Il importe deritrer et de maintenir ici le Maranatha des alchimistes, plac au seuil de, l'oeuvre pourarrter les profanes. C'est mme l ce qu'il meparat le plus urgent de faire comprendre quelques-uns de nos amis qui me paraissentun peu trop proccujDs de la vente et duplacement de leurs tableaux, j:>ar exemple.

    J'aimerais assez, crivait rcemment Noug,que ceux d'entre nous dont le nom commence marquer un peu, l'effacent . Sans trop savoir qui il pense, j'estime en tout cas que cen'est j)as trop demander aux uns et aux autresciue de cesser de s'exhiber conrplaisammeni etde se produire sur les trteaux. L'approbationdu public est fuir jjar dessus tout. Il fautabsolument; empcher le public d'entrer sil'on veut viter la confusion. J'ajoute qu'ilfaut le tenir exaspr la porte par un systmede dfis et de provocations.

    JE DEMANDE L'OCCULTATION PROFONDE,VRITABLE DU SURRALISME (*).Je proclame, en cette matire, le. droit; l'absolue svrit. Pas de concessions aumonde et jias do grce. Le terrible march enmain.

    A bas ceux qui distribueraientle pain mauditaux oiseaux.

    (*) Mais j'entends qu'on me demande djcommenton pourra procder cette occultation.Indpendamment de l'effort qui consiste ruiner cette tendance parasite et franaise qui voudrait qu' son tour le surralisme finissepar des chansons, je pens qu'il y aurait toutintrt ce que nous poussions une reconnais-sance srieuse du ct de ces sciences diversgards aujourd'hui compltement dcries quesont l'astrologie, entre toutes les anciennes,la mtapsychique (spcialement en ce quiconcerne l'tude de la cryptesthsie) parmi lesmodernes. Il ne s'agit que d'aborder ces sciencesavec le minimum de dfiance ncessaire et ilsuffit pour cela, dans les deux cas, de se faireune ide prcise, positive, du calcul des proba-bilits. Ce calcul, il convient seulement qu'entoute occasion nous ne nous en remettions personne du soin de l'oprer notre place. Celapos, j'estime qu'il ne peut nous tre indiffrentde savoir si, par exemjde, certains sujets sontcapables de reproduire un dessin plac dans Uneenvolojipe opaque et ferme, hors mme de laprsefice de l'auteur du dessin et de quiconquepourrait avoir t inform d ce qu'il est. Aucours de diverses expriences conues sous forme

  • SECOND MANIFESTE DIT SURRALISME 15

    Tout homme qui, dsireux d'atteindre l'talsuprme de l'me, pari pour aller demanderdes Oracles, lit-on dans le Troisime Livre dela Magie, doit, pour y arriver, dtacher entire-'jnent son esprit des choses vulgaires, il doit le pu-rifier de toute maladie, faiblesse d'esprit, maliceou semblables dfauts, et de toute conditioncontraire la raison qui la suit, comme la rouillesuit le fer

    et le Quatrime Livre prcise ner-giquement que la rvlation attendue exigeencore que l'on se tienne en un endroit puret clair, tendu partout de tentures blanches)) etqu'on n'affronte aussi bien les mauvais Espritsque les bons que dans la mesure de la digni-fication

    laquelle on est parvenu. Il insistesur le fait que le livre des mauvais Espritsest fait d'un papier trs pur qui n'a jamaisservi quelque autre usage et qu'on nommecommunment parchemin vierge.

    Il n'est pas d'exemple que les mages aient

    peu tenu l'tat de propret clatante de leursvtements et de leur me et je ne compren-drais pas qu'attendant ce cjue nous attendonsde certaines pratiques d'alchimie mentalenous acceptions de nous montrer, sur ce point,moins exigeants qu'eux, Voil pourtant ce quinous est le plus prement reproch et ce que,moins que tout autre, parat dispos nouspasser M. Bataille qui mne l'heure actuelle,dans la revue. Documents une plaisante cam-pagne contre ce qu'il appelle la soif sordidede toutes les intgrits . M. Bataille m'int-resse uniquement dans la mesure o il se flatted'opposer la dure discipline de l'esprit quoi nous entendons bel et bien tout sou-mettre

    et nous ne voyons pas d'inconv-nient ce que Hegel en soit rendu principale-ment responsable

    une discipline qui neparvient pas mme paratre plus lche, carelle tend tre celle du non-esprit (et c'est

    de jeux de socit et. dont le caractre dsen-nuyant, voire, rcratif, ne me semble en riendiminuer la porte : textes surralistes obtenussimultanment pur jjlusieurs jsersonnes crivantde telle heure telle heure dans la mme pice,collaborations devant aboutir la crationd'une phrase ou d'un dessin unique dont unseul lment (sujet, verbe ou attribut, tte,ventre ou jambes) a t fourni j)ar chacun( Le cadavre exquis , cf. la Rvolution Sur-raliste, N 9-10, Varits, juin 1929), la dfi-nition d'une chose non donne ( Le Dialogueen 1928 , cf. la Rvolution Surraliste, N 11), la prvision d'vnements qu'entranerait laralisation de telle condition tout fait insoup-onnable ( Jeux surralistes , cf. Varits,juin 1929), etc., nous pensons avoir fait surgirune curieuse possibilit de la pense, cjui seraitcelle de sa mise en commun. Toujours est-ilque de trs frappants rapports s'tablissent decette manire, que de remarquables analogiesse dclarent, qu'un facteur inexjnicable d'irr-futabilit intervient le plus souvent, et qu'tout prendre c'est l un des lieux de. rencontresles plus extraordinaires. Mais nous n'en sommesencore cju' l'indiquer... II est bien vident,d'ailleurs, cju'il y aurait cjuelque vanit denotre part, dans ce domaine, compter sur nosseules ressources. Outre les exigences du calculdes probabilits, en mtaphysique joresquetoujours disproportionnes a^ec le bnficequ'on jjeut tirer de la moindre allgation etqui nous rduiraient,pour commencer, attendred'tre dix ou cent fois plus nombreux, il nousfaut encore compter avec le don, particulire-ment mal rparti, entre gens tous malheureuse-ment plus ou moins imbus de psychologiescolaire, en matire de ddoublement et devoyance. Rien ne serait moins inutile ciued'entreprendre cet gard de

    suivre

    certains

    sujets, pris aussi bien dans le monde normalcjue dans l'autre, et cela dans un esprit qui dfie la fois l'esprit de la baraque foraine et celuidu cabinet mdical et soit l'esprit surralisteen un mot. Le rsultat de. ces observationsdevrait tre fix sous une forme naturalisteexcluant, bien entendu, au dehors toute potisa-tion. Je demande, encore une fois, que nousnous effacions devant les mdiums cjui, bienque sans doute en trs petit nombre, existentet que nous subordonnions l'intrt

    qu'il

    ne fairt pas grossir

    de ce que nous faisons celui cjue prsente le premier venu de leursmessages. Gloire, avons-nous dit, Aragon etmoi, l'hystrie et son cortge de femmesjeunes et nues glissant le long des toits. Le pro-blme ele la femme est, au monde, tout ce qu'ily a de merveilleux et de trouble. A la racaillede toujours de s'tonner qu'une encjute surl'amour ferme le numro de la revue o vontparatre ces lignes. Il y a des apparitions rellesmais il est un miroir dans l'esprit sur lequell'immense majorit des hommes pourraient sepencher sans se voir. Le contrle odieux n'efonctionne pas si bien. L'tre que tu aimes vit.Le langage de la rvlation se parle certainsmots trs" haut, certains mots trs bas, de plu-sieurs cts la fois. Il faut se rsigner l'apprendre par bribes.Quand on songe, d'autre part, ce cjuis'exprime astrologiqucment dans le surralismed'influence

    uranienne trs prpondrante,comment ne pas souhaiter, du jjoint de vuesurraliste, cju'il jjaraisse un ouvrage critiqueet de bonne foi consacr Uranus, qui aiderait combler, sous ce rapport, la grave lacuneancienne? Autant dire cjue rien n'a encore tentrepris dans ce sens. Le ciel de naissance deBaudelaire, qui prsente la remarquable con-jonction d'Uranus et de Neptune, de ce faitreste pour ainsi dire ininterprtable. De laconjonction d'Uranus avec Saturne, qui eutlieu de 1896 1898 ci n'arrive que tous lesquarante-cinq ans

    de cette conjonction quicaractrise le ciel de naissance d'Aragon, celuid'Eluard et le mien

    nous savons seulement,])ar Choisnard, que, peu tudie encore enastrologie, elle signifierait suivant toute vrai-semblance : amour profond des sciences, re-cherche du mystrieux, besoin lev de s'ins-truire . (Bien entendu le vocabulaire de Chois-nard est susjsect.) Qui sait, ajoute-t-il, si laconjonction de Saturne avec Uranus n'engen-drera pas une cole nouvelle en fait de science?Cet aspect plantaire, plac en bon endroit dansun horoscope, pourrait correspondre l'toffed'un homme dou de rflexion, de sagacit etd'indpendance, capable d'tre un investigateurde premier ordre. Ces lignes, extraites d' In-fluence astrale , sont de 1893 et, en 1925,Choisnard a not que sa prdiction semblaittre en train de se raliser.

  • 16: SECOND MANIFESTE DU SURRALISMEd'ailleurs l que Hegel l'attend). M, Bataillefait profession de ne vouloir considrer aumonde que ce qu'il y a de plus vil, de plusdcourageant et de plus corrompu et il invitel'homme, pour viter de se rendre utile quoique ce soit de dtermin,. courir absurdementavec lui

    les yeux tout coup devenus troubleset chargs d'inavouables larmes

    vers quelquesprovinciales maisons hantes, j)lus vilaines quedes mouches, pilus vicieuses, jolus rances quedes salons de coiffure . S'il m'arrive de rappor-ter de tels propos, c'est qu'ils ne me paraissentpas engager seulement M. Bataille mais encoreceux des anciens surralistes qui ont vouluavoir leurs coudes libres pour se commettreun peu partout. Peut-tre M. Bataille est-ilde force les grouper et qu'il y parvienne, mon sens, sera trs intressant. Prenant ledpart pour la course que, nous venons de levoir, M. Bataille organise, il y a dj : MM. Des-nos, Leiris, Limbour, Masson et Yitrac : onne s'explique pas que M. Ribemont-Dessaignes,par exemple, ne soit pas encore l. Je dis qu'ilest extrmementsignificatif de voir nouveaus'assembler tous ceux qu'une tare quelconquea loigns d'une premire activit dfiniejDarce qu'il est trs probable qu'ils n'ont queleurs mcontentements mettre en commun.Je m'amuse d'ailleurs penser cju'on ne peutsortir du surralisme sans tomber sur M. Ba-taille, tant il est vrai que le dgot de la rigueurne sait se. traduire que par une. soumissionnouvelle la rigueur.

    Avec M. Bataille, rien que de trs connu*nous assistons un retour offensif du vieuxmatrialisme anti-dialectique cjui tente, cettefois, de se. frayer gratuitement un chemin travers Freud. Matrialisme, dit-il, inter-prtation directe, excluant tout idalisme, desphnomnes bruts, matrialisme qui, pour neJXIS tre regard, comme un idalisme galeux,devra lre fond immdiatement sur les phno-mnes conomiques el sociaux . Comme on neprcise pas ici matrialisme historique. (etd'ailleurs comment le pourrait-on faire?) noussommes bien obligs d'observer qu'au pointde vue philosophique de l'expression, c'estvague et qu'au jioint de vue potique ele. lanouveaut, c'est nul.

    Ce, qui est moins vague, c'est le sort que.M. Bataille entend faire un petit nombred'ides particulires qu'il a et dont, tant donnleur caractre, il s'agira de savoir si elles ne rel-vent jias de la mdecine ou ele l'exorcisme, car,jiour ce qui est de l'apparition de la mouche surle nez de l'orateur (*), argument suprme contrele moi, nous connaissons l'antienne pascalienneet imbcile ; il y a longtemps que Lautramont;en a fait justice : L'esprit du j>lus grand homme(soulignons trois fois : plus grand homme) n'estpas si dpendant qu'il soil sujet tre troublpar le. moindre, bruit du Tintamarre qui se, faitautour de lui. Il ne faut pas le silence, d'un canon

    pour empcher ses penses. Il ne faut pas lebruit d'une girouette, d'une poulie. La mouchene raisonne pas bien prsent. Un homme bour-donne ses oreilles. L'homme qui pense,aussi bien que sur le sommet d'une, montagne,peut se poser sur le nez de la mouche. Nous neparlons si longuement des mouches que parceque M. Bataille aime les mouches. Nous, non :nous aimons la mitre des anciens vocateurs,la mitre de lin pur la partie antrieure delaquelle tait fixe une lame d'or et sur laquelleles mouches ne se posaient pas, parce qu'onavait fait des ablutions pour les chasser. Lemalheur pour M. Bataille est qu'il raisonne:certes il raisonne comme quelqu'un qui a une mouche sur le nez , ce qui le rapprochepluttdu mort que du vivant, mais z'Z raisonne.Il cherche, en s'aidant du petit mcanismequi n'est pas encore tout fait dtraqu enlui, faire jjartager ses obsessions : c'est mmepar l qu'il ne peut prtendre, cjuoi qu'il endise, s'opj:>osercomme une brute tout systme.Le cas de M. Bataille prsente ceci de paradoxalet pour lui de gnant que sa phobie de V ide , partir du moment o il entreprend de lacommuniquer, ne peut prendre qu'un touridologique. Un tat ele, dficit conscient forme gnralisatrice, diraient les mdecins.Voici, en effet, quelqu'un qui pose en principeque F horreur n'entrane, aucune complaisancepathologiqueel joue uniquement le rle du fumierdans la croissance vgtale, fumier d'odeursuffocante sans doute mais salubre la plante. Cette ide, sous son apparence infinimentbanale, est, elle seule, malhonnte ou patho-logique (il resterait, prouver que Lullc, etBerkeley, et Hegel, et Rabbe, et Baudelaire,et Rimbaud, et Marx, et Lnine se. sont, trsparticulirement, conduits dans la vie comme,des porcs). Il est remarquer que, M. Bataillel'ait un abus dlirant des adjectifs : souill,snile, rance, sordide, grillard, gteux, etque ces mots, loin de lui servir dcrier untat de choses insupportable, sont ceux parlesquels s'exprime le plus lyriquement sadlectation. Le balai innommable dontjiarle Jarry tant tomb dans son assiette,M. Bataille se. dclare enchant. Lui qui,durant, les heures du jour, promne sur devieux et parfois charmants manuscrits desdoigts prudents de bibliothcaire (on sait qu'ilexerce cette profession la BibliothqueNationale), se rejiat la nuit des immondicesdont, son image, il voudrait les voir chargs :tmoin cette Apocalypse de Sainl-Sevcr laquelle, il a consacr un article dans le N 2de Documents, article qui est le tvj)e parfaitdu faux tmoignage. Qu'on veuille, bien sereporter, par exemple, la planche du D-luge reproduite clans ce numro, et qu'on medise si objectivement un sentiment jovial clinattendu apparat avec, la chvre, qui. figureau bas de la page, el avec, le corbeau dont le bec,est plong dans la viande (ici M. Batailles'exalte) d'une tte humaine . Prter une appa-rence humaine des lments architecturaux,comme il le fait tout le long de. cette tude(*) Georges BATAILLE :

    Figure humaine (Documents, N -!).

  • SECOND MANIFESTE DU SURRALISME 17et ailleurs, est encore, et rien de plus, un signeclassique de psychasthnic. A la vrit, M. Ba-taille est seulement trs fatigu et cjuand il selivre cette constatation pour lui renversanteque l'intrieur d'une rose ne rpond pas dutout sa beaut extrieure, que si l'on arrachejusqu'au- dernier les ptales de la corolle, il nereste plus qu'une touffe d'aspect sordide , ilne parvient cju' me, faire sourire au souvenirde ce conte d'Alphonse Allais dans lequel unsultan a si bien puis tous les sujets de dis-traction cju'il pouvait avoir que, dsespr dele voir succomber l'ennui, son grand vizirne trouve plus lui amener qu'une jeune fille,trs belle qui se met danser, charge d'abordde voiles, pour lui seul. Elle est si belle que lesultan accabl ordonne cjue chaque fois qu'elles'arrte on fasse tomber un de ses voiles. Ellen'est pas plus tt nue, que le sultan l'ail, encoresigne, paresseusement, qu'on la dnude : onse hte de l'corcher vive. Il n'en est jias moinsvrai que la rose, prive ele ses ptales, restela rose et d'ailleurs, dans l'histoire prcdente,la bayadre continue danser.

    Que si l'on m'ojijiose encore le. geste confon-dant du marquis de Sade enferm avec les fous,se faisant porter les plus belles roses pour eneffeuiller les ptales sur le purin d'une fosse ,je rpondrai que pour que cet acte de protesta-tion perde son extraordinaireporte, il suffiraitqu'il soit le. fait, non d'un homme qui a passpour ses ides vingt-sept annes de. sa vie enprison, niais d'un assis de bibliothque.Tout porte croire, en effet, que .Sade, dontla volont d'affranchissement moral et social,contrairement celle de M. Bataille, est horsde cause, pour obliger l'esprit humain secouerses chanes, a seulement voulu par l s'enprendre, l'idole potique, cette vertu de convention qui, bon gr, mal gr, faitd'une fleur, dans la mesure mme o chacunpeut l'offrir, le vhicule brillant des sentimentsles plus nobles comme les plus bas. Il convient,du reste, de rserver l'apprciation d'un telfait cjui, mme s'il n'est pas purement lgen-daire, ne. saurait, en rien infirmer la parfaiteintgrit de la pense et, de la vie de. Sade, etle besoin hroque qu'il eut de crer un ordre,de chose, qui ne dpendt pour ainsi dire pasde loul ce. qui avait eu lieu avant lui.

    Le surralisme est moins dispos que jamais se passer de cette intgrit, se contenterde ce, que les uns et les autres, entre deux petitestrahisons qu'ils croient autoriser de l'obscur,de l'odieux prtexte qu'il faut bien vivre,lui abandonnent. Nous n'avons que faire decette aumne, de. talents . Ce, que, nousdemandons est, pensons-nous, de nature entraner un consentement, un refus total etnon se. payer de mots, s'entretenir d'espoirsvellitaires. Veut-on, oui ou non, fout risquerpour la seule joie d'apercevoir au loin, foutau fond du creuset o nous proposons de jeternos pauvres commodits, ce cjui nous reste debonne rputation et nos doutes, ple-mleavec la jolie verrerie sensible , l'ide radicale

    d'impuissance et la niaiserie de nos prtendusdevoirs, la lumire gui cessera d'tre dfaillante?

    Nous disons que l'opration surraliste n'achance d'tre mene bien que si elle s'effectuedans des conditions d'asepsie morale, dont ilest encore trs peu d'hommes vouloir entendreparler. Sans elles il est pourtant impossibled'arrter ce cancer de l'esprit qui rside dansle fait de penser par trop douloureusementcjue certaines choses sont , alors que. d'autres,qui pourraient si bien tre, ne sont pas .Nous avons avanc qu'elles doivent se con-fondre, ou singulirement s'intercepter, lalimite, 11 s'agit, non d'en rester l, mais dene pouvoir faire moins que. de tendre dsespr-ment e'i celle limite.

    L'homme,cjui s'intimiderait tort de quelquemonstrueux checs historiques, est encorelibre de croire sa libert. Il est son matre,en djiif des vieux nuages qui passent et de sesforces aveugles qui butent. N'a-f-il pas le sensde la courte, beaut drobe, et de l'accessibleet longue beaut drobable? La cl de l'amour,cjue le pote disait avoir trouve, lui aussi cju'ilcherche bien : il l'a. Il ne fient qu' lui des'lever au-dessus du sentiment jiassager devivre dangereusement et de mourir. Qu'il use,au mpris de foutes tes prohibitions, de l'armevengeresse, de. l'ide contre la bestialit de-fous les tres et de foutes les