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La Revue canadienne Volume 12, numéro 2 • Juin 2009 La Revue est maintenant offerte en ligne! Visitez-nous au : www.stacommunications.com/adreview.html THÈME ABORDÉ : LES TAUOPATHIES Une évolution des critères diagnostiques des tauopathies 4 Par Marie-Pierre Thibodeau, M.D., Howard Chertkow, M.D., FRCPC et Gabriel C. Léger, MDCM, FRCPC Une revue des symptômes comportementaux et psychologiques de la démence frontotemporale 9 Par Ryan D. Rajaram, M.Sc., Nathan Herrmann, M.D., FRCPC et Krista L. Lanctôt, Ph.D. Soutenir les proches aidants des personnes atteintes de démence frontotemporale 14 Par Adriana Shnall, MTS, TSA Impact du programme d’un centre de jour communautaire sur la vie des patients atteints de démence frontotemporale et de leurs aidants 17 Par Anna Grinberg, inf., B.Sc.N., SIG et Diane Phillips, MTS, TSA Une nouvelle technologie pour relier par Internet les conjoints aidants des personnes atteintes de démence frontotemporale 23 Par Elsa Marziali, Ph.D. et Renee Climans, MTS Tony Bosley, 2008 11” X 14” Landscape Huile sur canevas

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La Revue canadienneVolume 12, numéro 2 • Juin 2009

La Revue est maintenant offerte en ligne! Visitez-nous au : www.stacommunications.com/adreview.html

THÈME ABORDÉ :LES TAUOPATHIES

Une évolution des critèresdiagnostiques des tauopathies 4Par Marie-Pierre Thibodeau, M.D., Howard Chertkow, M.D., FRCPC et Gabriel C. Léger, MDCM, FRCPC

Une revue des symptômescomportementaux et psychologiquesde la démence frontotemporale 9 Par Ryan D. Rajaram, M.Sc., Nathan Herrmann, M.D., FRCPC et Krista L. Lanctôt, Ph.D.

Soutenir les proches aidants despersonnes atteintes de démencefrontotemporale 14Par Adriana Shnall, MTS, TSA

Impact du programme d’un centre de jour communautaire sur la vie des patients atteints de démencefrontotemporale et de leurs aidants 17Par Anna Grinberg, inf., B.Sc.N., SIG et Diane Phillips, MTS, TSA

Une nouvelle technologie pour relierpar Internet les conjoints aidants despersonnes atteintes de démencefrontotemporale 23Par Elsa Marziali, Ph.D. et Renee Climans, MTS

Tony Bosley, 200811” X 14” LandscapeHuile sur canevas

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PRÉSIDENT Peter N. McCracken, M.D., FRCPCProfesseur émérite de médecine,Département de gériatrie,Université de l’AlbertaEdmonton (Alberta)

Paul J. Coolican, M.D., CCFP, FCFPMédecin de famille, St. Lawrence Medical ClinicMorrisburg (Ontario)Membre du personnel médical,Winchester District Memorial HospitalWinchester (Ontario)

Shannon Daly, inf., M.N.Infirmière clinique spécialisée en gériatrie,Grey Nuns Community Hospital & Health Centre Edmonton (Alberta)

Serge Gauthier, M.D., CM, FRCPCProfesseur de neurologie et deneurochirurgie, de psychiatrie et demédecine, Université McGillCentre McGill d’études sur le vieillissementMontréal (Québec)

Bernard Groulx, M.D., CM, FRCPCPsychiatre en chef,Hôpital Sainte-Anne-de-BellevueProfesseur agrégé,Université McGillCentre McGill d’études sur le vieillissementMontréal (Québec)

Nathan Herrmann, M.D., FRCPCProfesseur, Université de TorontoChef, Service de gérontopsychiatrieCentre des sciences de la santé SunnybrookToronto (Ontario)

Peter J. Lin, M.D., CCFPAncien directeur médical, Centre pour la santé et le bien-être,Université de Toronto à ScarboroughDirecteur, initiatives de projets de soins desanté primaires, Centre canadien derecherche en cardiologieDirecteur médical, Lincorp Medical Inc.Toronto (Ontario)

Kenneth J. Rockwood, M.D., MPA, FRCPCProfesseur de gériatrie et de neurologie,Chaire Kathryn Allen WeldonProfesseur de recherche sur la maladied’Alzheimer,Université DalhousieDirecteur, Réseau canadien d’application dela recherche sur les démencesHalifax (Nouvelle-Écosse)

Copyright 2009 STA HealthCare Communications inc. Tous droits réservés. Ce document est publié par STA HealthCare Communications inc. Les opinions expriméesdans ce document sont celles des auteurs et elles ne reflètent pas nécessairement celles de l’éditeur. Les médecins doivent tenir compte de l’état de chaque patient etdoivent consulter les monographies de produit approuvées officiellement avant de poser un diagnostic, de prescrire un traitement ou d’appliquer un procédé d’après lessuggestions faites dans ce document, enregistrement n° 40063348.

Équipe de rédaction

Comité de rédaction

Sur la page couverture…Tony est né à Weymouth en Angleterre en 1924, et mourut en 2008. Il était un vétéran de guerreet venait d’une famille d’artistes, mais il a commencé à peindre seulement après avoir pris saretraite. Il aimait l’art. Il peignait des paysages à l’huile et a été inspiré par le Groupe des Sept.Après la mort de sa femme, sa démence s’est aggravée et il a été admis au Centre George Derby.Il aimait assister régulièrement au Studio d’art. Comme son état de santé déclinait peu à peu, il acommencé à peindre de l’art abstrait, traduisant ainsi sa compréhension approfondie del'esthétisme et de la couleur.

Le Studio d’art du Centre George Derby à Burnaby, en Colombie-Britannique, est un grand etdynamique studio construit après la Seconde Guerre mondiale pour les jeunes vétéranshandicapés. Les résidents sont invités à créer différents projets personnels de tissage, d’argile, desculpture, de menuiserie et de peinture. L’objectif est d'offrir aux patients un moyen de libertéd’expression basé sur les besoins de chacun, en fonction de leurs aptitudes et de leurs intérêts.

Le Comité de rédaction examine en toute liberté les articles publiés dans cette revue et est responsable de leur exactitude. Les annonceurs n’exercent aucune influencesur la sélection ou le contenu des articles publiés.

Paul F. BrandDirecteur de la publication

Russell KrackovitchDirecteur de la rédaction, projets spéciaux

Katherine EllisRédactrice junior

Catherine de GrandmontRédactrice-réviseure (français)

Donna GrahamCoordonnatrice de la production

Dan OldfieldDirecteur de la conception graphique

Jennifer BrennanServices administratifs

Barbara RoyAdjointe aux services administratifs

Robert E. PassarettiÉditeur

2 • La Revue canadienne de la maladie d’Alzheimer et autres démences

La Revue canadienne

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É D I T O R I A L

Les tauopathies, des maladies rareset exceptionnellement éprouvantesPar Nathan Herrmann, M.D., FRCPC

La Revue canadienne de la maladie d’Alzheimer et autres démences • 3

La plupart des omnipraticiens ne connaissent pas bien leterme « tauopathie »; s’ils avaient des patients atteints de

maladies appartenant à ce spectre pathologique, il se pourraitqu’ils ne le sachent pas. Alors, pourquoi consacrer tout cenuméro à ces affections? Eh bien, même si ces maladies sontrares et restent souvent non diagnostiquées, comme c’est le caspour les démences frontotemporales (DFT), elles sont excep-tionnellement éprouvantes et une cause de grande détresse pourles patients et leurs familles.

Les tauopathies suscitent bien des difficultés pour les clini-ciens. Chez les patients de plus de 65 ans, ces affections sontdes causes de démence beaucoup moins fréquentes que la maladie d’Alzheimer (MA), la démence vasculaire et ladémence à corps de Lewy. En revanche, chez les moins de 65ans, les tauopathies viennent au deuxième rang des étiologiesde la démence, car l’âge de début médian est de 58 ans1,2. Cespathologies de début précoce surviennent à l’âge où les clini-ciens n’envisagent pas, en général, la possibilité d’une maladieneurodégénérative. En outre, le symptôme d’appel n’est pastoujours cognitif; ce peut être un symptôme psychiatrique oucomportemental (p. ex., dans la variante comportementale de laDFT), l’instabilité posturale (paralysie supranucléaire progres-sive [PSP]), le parkinsonisme (DFT avec parkinsonisme lié auchromosome 17), l’apraxie (dégénérescence corticobasale[DCB]), l’aphasie (démence sémantique et aphasie progressiveprimaire) ou la faiblesse musculaire (DFT avec atteinte desneurones moteurs). Cette hétérogénéité des tableaux cliniquesretarde le diagnostic et de trois à six ans peuvent s’écoulerentre l’apparition des symptômes et le diagnostic clinique3.

Une fois le diagnostic établi, le clinicien n’est pas au boutde ses peines. Il n’existe pas de médicaments approuvés pourle traitement de la DFT ou des autres tauopathies et, malheu-reusement, les perspectives immédiates sur ce plan ne sont pasencourageantes. La consultation du site d’inscription des essaiscliniques (clinicaltrials.gov) nous apprend que seulement quatre essais en Amérique du Nord recrutent activement despatients atteints de DFT : trois essais sur la mémantine et un surle citalopram. Orienter les patients vers des programmes de soutien psychosocial s’avère également difficile, car cespatients sont en général jeunes et aux prises avec des pro-blèmes comportementaux et sociaux qui ne concordent pas

avec les modèles ou les programmes conçus pour les patientsâgés atteints de MA et leurs familles.

Les articles de ce numéro témoignent de ces difficultés.Thibodeau et ses collaborateurs traitent de l’évolution et desaspects parfois confus de la nosologie et des critères diagnos-tiques des tauopathies. Leurs propos sur la PSP et la DCB nousrappellent que le spectre des tauopathies inclut beaucoupd’autres pathologies ayant en commun plusieurs caractéris-tiques, mais se distinguant par des manifestations cliniques trèsvariées. Rajaram et ses collaborateurs nous proposent unerevue des principaux symptômes comportementaux et psy-chologiques de la DFT qui sont des sources de stress beaucoupplus grandes que le dysfonctionnement cognitif pour lesaidants. Ces auteurs résument aussi le petit nombre d’essaiscliniques publiés qui ont mis à l’épreuve des interventionspharmacologiques pour atténuer les manifestations comporte-mentales et cognitives. Madame Schnall nous apprendpourquoi il est difficile de venir en aide aux patients atteints deDFT et à leurs familles et elle décrit les problèmes propres àcette population de patients. Grinberg et Philips décrivent leurexpérience dans le cadre d’un programme de jour conçu spé-cialement pour répondre aux besoins des personnes atteintes deDFT et de leurs familles. Enfin, Marziali et Climans expliquentle fonctionnement d’un site Web conçu spécialement pour ani-mer des réunions de groupe d’entraide en ligne. Nous rap-pelons à nos lecteurs que les auteurs de ces articles sont géria-tres, neurologues, psychiatres, pharmacologues cliniciens,infirmières et travailleuses sociales et que les soins optimauxaux patients font intervenir tous ces professionnels de manièreconcertée et coordonnée par un omnipraticien entièrementvoué à ses patients.

Références :1. Kertesz A. Frontotemporal dementia: a topical review.

Cog Behav Neurol 2008; 21:127-133.2. Rosness TA, Haugen PK, Passant U, et coll. Frontotemporal

dementia: a clinically complex diagnosis. Int J GeriatrPsychiatry 2008; 23:837-842.

3. Weder ND, Aziz R, Wilkins K, et coll. Frontotemporaldemen tias: a review. Ann Gen Psychiatry 2007; 6:15.Disponible à : www.annals-general -psychiatry.com (site consulté en juin 2009).

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4 • La Revue canadienne de la maladie d’Alzheimer et autres démences

Au fil des ans, les cliniciens ont abordéles démences en se basant sur la clas-

sification par sous-groupes cliniques bruts(p. ex., les démences corticales vs sous-cor-ticales) ou selon une approche fondée surdes syndromes cliniques et des critèresdiagnostiques établis pour diverses entités.Les récents progrès en immunohistochimieont toutefois permis de mieux comprendrebon nombre des maladies neurodégénéra-tives qui causent la démence. Ces maladies

peuvent désormais être classées en tenantcompte non seulement du phénotype, maisaussi du type de protéine qui s’accumuledans les tissus et qui pourrait devenir lacible de traitements spécifiques. La démen-ce peut être causée par l’accumulation de laprotéine amyloïde1, à l’origine de la mal-adie d’Alzheimer (MA), une amyloïdo-pathie; de la synucléine2 comme dans lamaladie de Parkinson (MP) et les démencesà corps de Lewy, des synucléinopathies; dela protéine tau3, à l’origine des tauopathies,et enfin par l’accumulation d’une protéinedécouverte récemment, la TDP-434 (TAR-DNA binding protein-43) à l’origine destardopathies. Les manifestations cliniquesdes tauopathies et des tardopathies sechevauchent en grande partie, en particuli-er dans les démences frontotemporales(DFT). Toutefois, le spectre clinique destauopathies est unique et nous l’avonschoisi comme sujet de cette revue.

Sous le terme « tauopathies », onregroupe des pathologies associées à uneimportante agrégation intracellulaire de laprotéine tau. Cette protéine est présente enabondance dans le système nerveux central(SNC), où elle s’exprime principalementdans les axones. En se liant avec la tubu-line, elle favorise l’assemblage et la stabili-sation des microtubules, ce qui facilite letransport axonal vital3,5. Les anomalies dela protéine tau, dont témoigne la présenced’inclusions insolubles hyperphospho-rylées, ont été mises en évidence dans de

nombreuses entités différentes (Tableau1)3. Même si on a décrit une relation entreplusieurs mutations dans le gène qui codepour tau (MAPT [microtubule associatedprotein tau] ou protéine tau associée auxmicrotubules) et les pathologies associées àla protéine tau, la principale cause de laplupart des tauopathies reste inconnue5.

Quelques commentaires sur la bio-chimie de tau. L’analyse détaillée de labiochimie de tau dépasse la portée de cettebrève revue clinique, mais quelques mots àce sujet sont indiqués. La protéine tau estcodée par le gène MAPT présent sur le chro-mosome 17. La structure de cette protéineest complexe et varie selon la maturation destranscripts primaires. Dans le cerveauhumain, l’épissage différentiel de l’ARNmde tau peut faire intervenir jusqu’à troisexons différents (exon 2, 3 et 10), ce qui peutse traduire par la formation de six isoformesdifférentes de tau. L’exon 10 renferme desséquences qui codent pour l’un des quatresites de fixation aux microtubules. Au sujetdu nombre des sites de fixation aux micro-tubules, mentionnons que l’absence ou laprésence de l’épissage de l’exon 10 donnel’isoforme de tau avec trois sites de fixation(3R) ou l’isoforme avec quatre sites de fixa-tion (4R), respectivement. Les proportionsdes isoformes 3R et 4R de tau semblentdéterminer le phénotype clinique. Par exem-ple, la paralysie supranucléaire progressive(PSP) et la dégénérescence corticobasale(DCB) sont des pathologies à prédominance

Une évolution des critèresdiagnostiques des tauopathiesEn raison de la complexité des démences et du chevauchement des diagnostics sous-jacents, denouvelles méthodes sont élaborées afin de faciliter la distinction entre les différentes entitéscliniques. Une meilleure connaissance des tauopathies et des tardopathies, ainsi que desmutations génétiques qui leur sont associées aide maintenant les médecins à mieux comprendreles démences ainsi que les anomalies du système nerveux central qui sont à leur origine.

Par Marie-Pierre Thibodeau, M.D., Howard Chertkow, M.D., FRCPC et Gabriel C. Léger, MDCM, FRCPC

Les tauopathies

Marie-Pierre Thibodeau, M.D.Résidente en gériatrie,Université de Montréal

Howard Chertkow, M.D., FRCPCProfesseur de neurologie, UniversitéMcGill; directeur, Centre Bloomfieldde recherche sur le vieillissement,Institut Lady Davis, Département deneurosciences cliniques, Hôpitalgénéral juif-Sir Mortimer B. David;Institut universitaire de gériatrie deMontréal; Montréal, Québec

Gabriel C. Léger, MDCM, FRCPCProfesseur adjoint de médecine,Département de neurologie, Universitéde Montréal; neurologue associé,Centre McGill d’études sur levieillissement, Hôpital Douglas;neurologue associé, Clinique demémoire de l’Hôpital général juif-SirMortimer B. David.

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tau 4R, tandis que la maladie de Pick(dégénérescence lobaire frontotemporaleavec corps de Pick argyrophiles) est associéeà tau 3R. Les autres pathologies tau sontassociées à la présence combinée des iso-formes 3R et 4R de cette protéine. Les muta-tions du gène MAPT produisent des mala-dies associées à tau 3R ou à tau 4R, ou à cesdeux isoformes. La présence d’inclusions detau est en général décelée à l’aide des anti-corps anti-tau en immunohistochimie, maisles isoformes sont caractérisées par l’élec-trophorèse avec buvardage.

La protéine tau s’accumule principale-ment dans les corps cellulaires. La localisa-tion cérébrale spécifique de cette agrégationet l’accumulation de tau dans d’autres struc-tures comme les dendrites (neuropile) et lesastrocytes aident à définir les critères diag-nostiques pathologiques des diverses entités.En outre, la morphologie de ces dépôtsobservés au microscope électronique diffèreparfois.

Dans cette revue, nous accordons uneattention particulière à deux tauopathiescourantes : la paralysie supranucléaire pro-gressive (PSP) et la dégénérescence corti-cobasale (DCB). La démence frontotempo-rale (DFT), secondaire à une tauopathie dansenviron 50 % des cas, est le sujet d’autresarticles publiés dans ce numéro. Nousdécrivons les principales caractéristiquescliniques de ces affections, les examens quiservent à étayer chaque diagnostic ainsi queles critères diagnostiques cliniques. En rai-son de la complexité et du chevauchementde ces syndromes, il est à noter que leserreurs diagnostiques sont courantes, en par-ticulier aux premiers stades de la maladie6.

Paralysie supranucléaireprogressive (PSP), ou maladie deSteele-Richardson-Olszweski La PSP a été décrite pour la première foisen 1963 par Richardson, qui la considéraitcomme une combinaison de paralysiesupranucléaire, de caractéristiques akinéto-rigides, d’instabilité posturale précoce et dedémence fronto-limbique7. Ces caractéris-tiques cliniques ont été raffinées ultérieure-ment, comme nous l’expliquons ci-dessous.

Chaque année, cinq nouveaux cas dePSP sont diagnostiqués par 100 000 indi-vidus. Cette maladie touche principalement

les hommes, en moyenne vers l’âge de 63 ans. Les patients deviennent nonautonomes dans les trois à quatre annéessuivant le diagnostic et leur survie est desix ans8. Le plus souvent, le décès est causépar une pneumonie d’aspiration, de l’in-suffisance respiratoire ou une embolie pul-monaire9.

Observations cliniques. L’instabilitéposturale entraînant des chutes répétées (enparticulier vers l’arrière) est le symptômed’appel le plus fréquent. Les patients seretrouvent tôt ou tard confinés à un fauteuilroulant à cause de la gravité de leur troublede mobilité. Parmi les autres caractéris-tiques de la PSP, on note le dysfonction-nement oculomoteur et bulbaire10,11.

Les patients atteints de PSP ont clas-siquement un faciès ahuri très caractéris-tique avec une rétraction palpébrale et unregard fixe causés par l’hyperactivité dumuscle frontalis et les troubles oculomo-teurs. Très souvent, les patients sont exami-nés pour la première fois au stade précocede la maladie, avant que ces signes soientaussi frappants, ce qui rend le diagnosticdifficile. Il est donc conseillé d’attendred’avoir revu le patient plusieurs fois avantd’établir le diagnostic définitif. Enmoyenne, environ trois ans s’écoulentavant que les personnes atteintes de PSPvoient leur maladie diagnostiquée.

La paralysie supranucléaire qui est l’in-capacité de suivre du regard une cible enmouvement ou d’effectuer des saccadesvolontaires (cette incapacité étant nette-ment atténuée à la manœuvre des yeux depoupée), est considérée comme un signecardinal de la PSP; toutefois, elle apparaîten général tardivement. Le simple ralen-tissement des saccades verticales précèdesouvent cette paralysie du regard, et ondevrait le rechercher de manière spécifique.Par ailleurs, la paralysie du regard verticalvers le bas est plus spécifique de la PSP, carla restriction du regard vers le haut peut êtreretrouvée dans d’autres maladies neu-rodégénératives et, dans une certainemesure, lors du vieillissement normal. Lesmouvements oculaires horizontaux quant àeux peuvent être affectés plus tard au coursde l’évolution de la maladie. D’autres caractéristiques oculaires fréquentes sontl’apraxie de l’ouverture des yeux, unediminution du clignement spontané des

yeux et des macro-ondes carrées (intru-sions saccadiques pendant que le sujet fixeune cible du regard10,11).

Près de la moitié des patients ont unebradykinésie symétrique au moment dudiagnostic et jusqu’à 95 % développent cesymptôme au cours de l’évolution de lamaladie. On observe aussi parfois unerigidité axiale, avec positionnement anor-mal des muscles extenseurs du cou (rétro-colis). Un tremblement de repos, tel quecelui retrouvé dans la maladie deParkinson, est rare12. Ces symptômes résis-tent habituellement au traitement par lalévodopa.

La dysarthrie et la dysphagieattribuables à la paralysie pseudobulbairesont également des symptômes précoces.Parfois, la parole devient inintelligible etles troubles de déglutition peuvent, tôt outard, motiver une gastrostomie.

Les changements de la personnalité oule déclin cognitif sont fréquents pendant lesdeux premières années. Les symptômescausés par l’atteinte du lobe frontal sontprincipalement la persévération, la diffi-culté à résoudre des problèmes, la diminu-tion de la fluidité verbale et la perte de lacapacité d’abstraction et d’autocritique.Les perturbations du comportement com-prennent l’apathie (chez 90 % despatients)12, la désinhibition, la dépressionet l’anxiété, tandis que la mémoire à court

La Revue canadienne de la maladie d’Alzheimer et autres démences • 5

Critères diagnostiques des tauopathies

Tableau 1

Pathologies associées à laprotéine tau (caractéristiqueprédominante)3

• Démence des grainsargyrophiles

• Dégénérescence corticobasale• Démence des boxeurs• Démence frontotemporale

avec parkinsonisme relié auchromosome 17

• Maladie de Pick• Gliose sous-corticale

progressive• Paralysie supranucléaire

progressive• Parkinsonisme post-

encéphalite• Complexe de Parkinson –

démence de l’île de Guam

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terme est relativement épargnée8. Les trou-bles du sommeil peuvent apparaître aprèsle début des symptômes oculaires etmoteurs (après l’atteinte de certains noyauxdu tronc cérébral)9, mais ces phénomènesn’ont pas été étudiés de manière appro-fondie et ils sont beaucoup moins fréquentsque dans les synucléinopathies13.

Différents phénotypes cliniques ont étédécrits, comme la PSP avec parkinsonisme,la PSP avec akinésie pure et gel de ladémarche (en anglais : PSP-PAGF, pureakinesia with gait freezing), la PSP-SCB(PSP avec syndrome corticobasal) et laPSP-ANFP (PSP avec aphasie non fluenteprogressive; en anglais : PNFA, progressivenon-fluent aphasia). Ces variantes clinico-pathologiques peuvent être différenciéesselon la distribution et la gravité deschangements pathologiques et leurs carac-téristiques cliniques9,14. Dans le contexteclinique usuel, ces distinctions ne sont paspertinentes.

Dans une étude, 90 % des patientsayant un diagnostic clinique de PSP avaientégalement de signes pathologiques de PSPà l’autopsie. Dans les cas où la PSP n’avait

pas été diagnostiquée cliniquement maispathologiquement, les patients avaient euun diagnostic clinique de maladie deParkinson (MP) ou d’atrophie multisys-témique (AMS)15. Le diagnostic différen-tiel devrait donc inclure la MP, l’AMS, laDCB et la DFT.

Examens. La PSP est un diagnostic clinique, mais certains examens peuvent êtreutiles pour étayer le diagnostic ou exclured’autres affections. L’atrophie du mésen-céphale à l’IRM est une caractéristique radi-ologique bien connue de la maladie. Lessignes dits du colibri ou du pingouin ont étéutilisés pour décrire l’amincissement du tec-tum et de la région péri-aqueductale16-18. Lesautres caractéristiques qui orientent le diag-nostic comprennent l’amincissement et lemaculage de la substance noire, l’atrophie duputamen, l’atrophie du pallidum et leschangements de signaux dans cette structureet, enfin, l’atrophie du noyau rouge. Desétudes du flot sanguin ont révélé de nettesréductions de la perfusion des lobes frontauxet des noyaux gris centraux, mais cephénomène s’observe également dans la MP,dans la DCB et dans l’AMS. La tomographie

par émission de positons au FDG (TEP-FDG), quant à elle, montre une réductionglobale du métabolisme du glucose dans lecortex12,16,19. Un enregistrement électro-oculographique peut aussi être utile pour dis-tinguer la PSP de la DCB et de la MP20. Lerapport entre les taux de deux isoformes detau dans le liquide céphalorachidien (LCR) aété récemment reconnu comme un indicateurspécifique et fiable de la PSP, mais ce mar-queur demeure expérimental21.

Neuropathologie. La neuropathologiede la PSP est caractérisée par des agrégatsde tau très denses dans le pallidum, lenoyau sous-thalamique, la substance noireet le pont de Varole, et des accumulationsmoins denses dans d’autres structures sous-corticales. Une autre observation remar-quable et assez spécifique est la mise enévidence d’astrocytes « en couronne » ren-fermant des protéines tau. Une autre carac-téristique fréquente de la PSP et de la DCBest la présence de « corps spiralés » tau-positifs dans les oligodendrocytes22.

Critères diagnostiques. Plus de septensembles de critères diagnostiques ont étéproposés pour la PSP. Des critères diagnos-

6 • La Revue canadienne de la maladie d’Alzheimer et autres démences

Les tauopathies

Tableau 2

Critères diagnostiques cliniques des NINDS-SPSP pour le diagnostic de la PSP10

Critères d’inclusion

En faveur d’une PSP possible etprobable :• Maladie évolutive, de début

progressif à 40 ans ou plusPSP possible :• Soit paralysie supranucléaire de

l’oculomotricité verticale, soitralentissement des saccadesverticales et instabilité posturaleavec chutes < 1 an après le débutde la maladie

PSP probable :• Paralysie supranucléaire de

l’oculomotricité verticale etinstabilité posturale avec chutes < 1 an après le début de la maladie

PSP certaine :• Présence de tous les critères d’une

PSP possible ou probable etconfirmation histopathologique àl’autopsie

Critères d’exclusion

Pour une PSP possible et probable :• Antécédent récent d’encéphalite• Phénomène du membre étranger• Déficits sensoriels corticaux• Atrophie focale frontale et

temporopariétale • Hallucinations ou délires non

reliés à un traitementdopaminergique

• Démence corticale de typeAlzheimer

• Symptômes cérébelleux précocesfrancs ou dysautonomieinexpliquée

• Signes neuroradiologiques d’uneanomalie structurale pertinente

• Maladie de Whipple confirmée parla réaction en chaîne de lapolymérase (PCR)

• Signes d’autres maladies pouvantexpliquer les caractéristiquescliniques présentes

Critères complémentaires

• Akinésie ou rigidité symétriques• Principalement proximales (vs

distales)• Posture anormale du cou, en

particulier un rétrocolis• Peu ou pas de réponse à la

lévodopa • Dysphagie et dysarthrie précoces• Début précoce du déclin cognitif

avec > 2 des éléments suivants :apathie, trouble de la penséeabstraite, trouble de la fluenceverbale, comportementd’utilisation ou d’imitation ousignes de syndrome frontal

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tiques validés, très spécifiques mais peu sen-sibles, ont été proposés conjointement par leNational Institute of Neurological Disorderset la Society for Progressive SupranuclearPalsy (NINDS-SPSP) en 1996; ils sonténumérés au Tableau 29,23. Dans ce tableau,les caractéristiques essentielles au diagnosticcomprennent le début de la PSP après l’âgede 40 ans, la survenue de chutes dans les 12mois suivant le diagnostic de la maladie et laparalysie supranucléaire. Les critères d’ex-clusion sont importants parce qu’ils assurentla spécificité du diagnostic. Les critèrescomplémentaires réitèrent à l’intention desmédecins les caractéristiques importantes dela PSP, mais ils ne sont ni essentiels ni suffi-sants pour établir le diagnostic.

Dégénérescence corticobasaleLa DCB a été décrite pour la première foispar Rebeiz, Kolodny et Richardson en 1967comme un syndrome akinéto-rigide, asymé-trique, progressif, s’accompagnant d’uneapraxie qu’ils ont appelée « dégénérescencecortico-dentato-nigrale, avec achromasieneuronale »24. La terminologie employéedepuis pour décrire cette pathologie estsource de confusion. En ce moment, onutilise le terme « syndrome corticobasal »(SCB) pour décrire la constellation de symp-tômes cliniques dont nous discuterons ci-dessous, et le terme « dégénérescence corti-cobasale » (DCB) pour discuter de la mala-die confirmée par histopathologie. L’hété-rogénéité clinique et pathologique ainsi quele chevauchement assez fréquent avecd’autres entités entretiennent cette confu-sion. Le SCB a été relié à d’autres patholo-gies en plus de la DCB, y compris à la mala-die d’Alzheimer, à la maladie de Pick, à laPSP et à la maladie de Creutzfeldt-Jakob.Bien que la DCB se manifeste le plus souventcomme un SCB, elle peut aussi être retrouvéechez des patients ayant eu des diagnosticscliniques de démence (par ailleurs non pré-cisés), d’aphasie progressive et de DFT25.

Observations cliniques. Les manifesta-tions cliniques essentielles dans la DCBsont la rigidité et l’apraxie asymétriquesprogressives qui s’accompagnent d’autressymptômes évoquant un dysfonction-nement cortical (phénomène du membreétranger, perte de sensibilité corticale,myoclonie) et des noyaux gris centraux(bradykinésie, dystonie, tremblement).

Au cours d’une étude clinico-pathologique de la DCB, des caractéris-tiques parkinsoniennes ont été déceléeschez tous les patients, d’autres troubles dumouvement chez 89 % des patients, et uneatteinte des fonctions corticales supérieureschez 93 %. Le signe parkinsonien le plussouvent observé était la rigidité (92 %),suivi de la bradykinésie (80 %), des anoma-lies de la démarche (80 %) et du tremble-ment (55 %). Les autres troubles moteursétaient la dystonie chez 71 % des patients etles myoclonies chez 55 %. Les signesd’une atteinte des fonctions corticalessupérieures comprenaient l’apraxie (82 %),le phénomène du membre étranger (42 %),la perte de sensibilité corticale (33 %) et ladémence (25 %)25-27.

En général, l’apraxie intéresse d’abordun seul membre, puis elle s’étend à d’autresmembres sur deux ans. Le phénomène du

membre étranger, historiquement associé àla DCB, s’observe chez seulement 50 %des patients; le patient décrit son membrecomme « ayant une volonté propre ». Laperte de sensibilité corticale se manifestepar l’agraphestésie et l’astéréognosie s’ac-compagnant d’un trouble de la perceptionde la position et de la discrimination entredeux points.

Bien que la DCB soit considérée parbeaucoup comme un trouble du mouve-ment, elle se manifeste souvent par uneatteinte cognitive d’abord. En général, lestests neuropsychologiques démontrent destroubles de l’attention, une atteinte desfonctions exécutives, de la fluidité verbale,du langage et des fonctions visuospatiales,avec une apraxie asymétrique. Les capac-ités d’apprentissage et la mémoire sont engénéral épargnées28.

La Revue canadienne de la maladie d’Alzheimer et autres démences • 7

Critères diagnostiques des tauopathies

Tableau 3

Critères proposés pour le diagnostic de la dégénérescencecorticobasale (DCB)25

Caractéristiques essentielles• Début insidieux et évolution progressive• Aucune cause identifiable• Dysfonctionnement cortical démontré par la présence d’au moins un des

éléments suivants :− Apraxie idéomotrice focale ou asymétrique− Phénomène du membre étranger− Déficit sensoriel cortical− Négligence unilatérale visuelle ou sensorielle− Apraxie de construction − Myoclonie focale ou asymétrique− Apraxie de la parole, aphasie non fluente

• Dysfonctionnement extrapyramidal démontré par la présence d’au moinsun des éléments suivants :− Rigidité appendiculaire focale ou asymétrique ne répondant pas de

manière franche et soutenue à la lévodopa− Dystonie appendiculaire focale ou asymétrique

Examens complémentaires• Dysfonctionnement cognitif focal ou latéralisé, de gravité variable, avec

une certaine préservation des facultés d’apprentissage et de la mémoire,mis en évidence par les tests neuropsychométriques

• Atrophie focale ou asymétrique à la TDM ou à l’IRM, en général la plusmarquée dans le cortex pariétofrontal

• Hypoperfusion focale ou asymétrique aux études SPECT, en généralprédominante dans le cortex pariétofrontal, présente ou non dans lesnoyaux gris centraux et dans le thalamus

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Examens. La neuroimagerie structurale(principalement par l’IRM) révèle engénéral une atrophie corticale très fortementasymétrique, intéressant surtout les airesfronto-pariétales, controlatérales au côté ducorps le plus touché par les manifestationscliniques. Parfois, on observe aussi une atro-phie de la partie médiane ou postérieure ducorps calleux. Des auteurs ont aussi décritdes anomalies des signaux dans le putamenet des hyperintensités sous-corticales dansles aires motrices et somato-sensorielles.

Les études d’imagerie fonctionnelle, p.ex., la tomographie par émission monopho-tonique (SPECT) pour évaluer le débit san-guin ou la tomographie par émission depositons (TEP) pour étudier le métabolismedu glucose, ont tendance à montrer deschangements atrophiques plus précoces,mais semblables à ceux détectés par l’IRM,mais aussi des déficits additionnels dans lesnoyaux gris centraux. Il n’existe toutefoispas de biomarqueur qui permettrait de dif-férencier avec certitude la DCB des autresétiologies du SCB. Les études électrophy-siologiques peuvent aider au diagnostic, enparticulier pour définir les caractéristiquesdes myoclonies29.

Neuropathologie. Les résultats neu-ropathologiques mettent en évidence desneurones ballonés et de nombreuses lésions

tau-positives corticales et gliales diffuses.Critères diagnostiques. Les critères

diagnostiques proposés ont été élaborés en2003 par Boeve (Tableau 3)25. Par contre,aucun ensemble de critères diagnostiquesn’a été officiellement validé. Nous présen-tons au Tableau 4 une comparaison de laDCB et de la PSP.

Autres tauopathiesMaladie d’Alzheimer. Comme le montre leTableau 1, plusieurs maladies neurodégé-nératives sont associées aux tauopathies. LaMA n’apparaît pas dans cette liste, maiscette affection est associée à l’accumulationà la fois de tau et d’amyloïde-bêta. Par con-séquent, la MA n’est pas une « tauopathie »au sens strict du terme. En outre, on croitque l’accumulation de tau survient ulté-rieurement à la toxicité causée par l’amy-loïde-bêta et qu’elle est probablement uneconséquence de cette toxicité31.

Dégénérescence lobaire fronto-tempo-rale (DLFT). Une tauopathie est à l’origined’environ 50 % de tous les cas de DLFT. Laplupart des autres cas sont des tardopathies.D’autres articles de ce numéro traitent decette entité.

Tauopathies rares ou peu communes.La maladie des grains argyrophiles est uneforme de démence caractérisée par des trou-

bles mnésiques et des changements de lapersonnalité semblables à ceux qu’on obser-ve dans la MA légère. Le complexe deParkinson-démence de l’île de Guam débutependant la cinquième ou sixième décenniede vie et il se manifeste par un parkinsonis-me et une démence dysexécutive frontale3.

Traitement.Aucun traitement spécifiquen’est recommandé pour les patients atteintsde ces différentes pathologies. On préconiseun traitement de soutien, qui comprend desévaluations en physiothérapie et en ergo-thérapie ainsi que des interventions en ortho-phonie, s’il y a lieu26. On tente souvent untraitement par la lévodopa, mais l’effet phar-macologique est en général modeste et decourte durée dans la PSP et la DCB.

Les tauopathies sont-elles desentités distinctes?Dans notre revue, la DBC et la PSP sontdécrites comme des entités distinctes pourfaciliter le diagnostic et la compréhension deces pathologies complexes. Dans la littéra-ture, toutefois, des résultats de rechercherécents remettent en question cette nomen-clature classique. De ce débat, sont issus lestermes de splitters (éléments diviseurs) et delumpers (éléments regroupeurs). Kertsetzrecommande de considérer ces maladiescomme un spectre des manifestations d’unmême trouble appelé « complexe de Pick »en raison de leur pathologie commune32. Enrevanche, d’autres auteurs adhèrent auprincipe que ces maladies doivent être con-sidérées comme des syndromes différents,compte tenu de leurs particularités cliniquesfondamentales. Les recherches se poursui-vent pour essayer de résoudre cette contro-verse33,34.

Alors, pourquoi les cliniciens devraient-ils même essayer d’apprendre les caractéris-tiques neuropathologiques moléculaires etles méthodes de classification de ces entités?Nous pouvons plaider qu’une meilleure con-naissance des anomalies de tau sont suscep-tibles de favoriser la découverte d’ici 10 ansd’interventions axées directement sur cetteprotéine. À ce moment, il sera impératif queles cliniciens comprennent la neuropatholo-gie moléculaire de ces divers syndromes.

8 • La Revue canadienne de la maladie d’Alzheimer et autres démences

Les tauopathies

Tableau 4

Comparaison de la DCB et de la PSP30

Caractéristiques PSP DCB

Parkinsonisme Symétrique-axial Asymétrique-distalRéponse à la lévodopa Initiale ? AbsenteTroubles cognitifs Par atteinte frontale LatéraliséeTroubles psychiatriques Apathie DépressionInstabilité posturale Précoce (< 1 an) PrésenteSignes pyramidaux Tardifs (bilatéraux) Unilatéraux/bilatérauxContractures Tardives PrécocesMyoclonie et apraxie Absentes Unilatérale-bilatéraleLatence des saccades Normale Plus longueVitesse des saccades Lente NormaleSaccades Verticales > horizontales Verticales = horizontalesTomodensitométrie Atrophie du tronc Atrophie frontopariétale (TDM) cérébral/mésencéphale asymétrique-unilatéraleIRM Atrophie des lobes frontaux Atrophie frontopariétale

et du mésencéphale; asymétrique-unilatéralehyperintensités en T2 dans le mésencéphale et atrophie du pallidum

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La Revue canadienne de la maladie d’Alzheimer et autres démences • 8.1

Critères diagnostiques des tauopathies

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La Revue canadienne de la maladie d’Alzheimer et autres démences • 9

On croyait autrefois que la démencefrontotemporale (DFT) était une

forme rare de la démence, mais on estimeaujourd’hui qu’elle s’observe chez 4 % despersonnes souffrant de démence1 et chez20 à 30 % des personnes atteintes dedémence ayant moins de 65 ans2,3. Cettedémence de début précoce peut, dans unpremier temps, se manifester par divers

phénotypes, le plus souvent par un change-ment graduel des comportements, de la per-sonnalité ou du langage4. Les symptômespeuvent s’aggraver au point de causer laperte d’autonomie5 et des conduitessociales inappropriées6. On a tenté à demultiples reprises de définir clairement lesprincipales caractéristiques diagnostiquesdes variantes cliniques de la DFT7-9. Troisvariantes cliniques ont été retenues : la va-riante comportementale (DFT-vc), l’apha-sie progressive primaire (APP) avec troubledu langage et la démence sémantique (DS).

La DFT-vc est caractérisée par un trou-ble des conduites sociales et par unémoussement affectif, mais les manifesta-tions peuvent aussi comprendre la négli-gence de l’hygiène personnelle, la rigiditémentale et la distractibilité7,9. Les patientsatteints d’APP manifestent d’abord uneperte progressive du langage en l’absencede troubles cognitifs ou comportementaux,alors que chez les patients atteints de DS,le langage reste fluent (bien que la qualitédu langage soit compromise et que dessymptômes comportementaux soient par-fois présents au début de la maladie)7,10.

Même si le diagnostic de la DFT aconnu des progrès, les options thérapeu-tiques restent limitées et sont axées sur letraitement des symptômes neuropsychia-triques. Quelques essais thérapeutiques

seulement ont été menés auprès de patientsatteints de DFT pour évaluer des interven-tions comprenant le traitement par des anti-dépresseurs11-14, des antipsychotiques15 etdes nootropes16-18.

De nombreux énoncés consensuels ontdécrit les symptômes neuropsychiatriquescaractéristiques de la DFT7,9. Au début de lamaladie, plusieurs des symptômes comporte-mentaux s’observent dans la DFT-vc et à undegré moindre, dans la DS et l’APP19,20.Nous décrivons ci-dessous les symptômesneuropsychiatriques les plus fréquents de laDFT, leurs corrélats neurobiologiques et lesoptions thérapeutiques existantes.

Symptômes neuropsychiatriquesde la DFTApathie. Ce comportement est souventmépris pour la dépression, mais l’apathieest considérée comme un signe cardinal dela DFT, car elle s’observe chez 95 à 100 %des patients atteints de DFT21,22. En règlegénérale, les sujets apathiques ne fontaucun effort pour accomplir leurs tâcheshabituelles ou entreprendre de nouvellesactivités, ils se montrent indifférents face àleurs problèmes personnels et ils manifes-tent un affect aplati, symptôme qui traduitl’absence de réactions émotionnelles23.Bien qu’elle ne menace pas immédiate-ment le bien-être du patient, l’apathie peut

Une revue des symptômescomportementaux et psychologiquesde la démence frontotemporaleLa démence frontotemporale (DFT) est fréquemment diagnostiquée chez des personnesâgées de moins de 65 ans et elle se manifeste par divers comportements qui mettent le bien-être du patient et de ses aidants en danger. De nombreuses études ont été menées pourdécouvrir la cause de ces comportements et pour rechercher des traitements pour maîtriserles divers symptômes psychologiques allant de l’agitation et de l’agressivité aux troubles del’alimentation.

Par Ryan D. Rajaram, M.Sc., Nathan Herrmann, M.D., FRCPC et Krista L. Lanctôt, Ph.D.

Ryan D. Rajaram, M.Sc.Département de psychiatrieCentre des sciences de la santé SunnybrookToronto, Ontario

Krista L. Lanctôt, Ph.D.Professeur agrégé de psychiatrie et depharmacologie/toxicologieUniversité de TorontoDépartement de psychiatrieCentre des sciences de la santéSunnybrookToronto, Ontario

Nathan Herrmann, M.D., FRCPCProfesseur, Université de TorontoChef, Département de psychiatrie gériatriqueCentre des sciences de la santéSunnybrookToronto, Ontario

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10 • La Revue canadienne de la maladie d’Alzheimer et autres démences

Les tauopathies

Tableau 1

Traitement des symptômes comportementaux dans la DFT

Étude Intervention(s) Critères Commentaires

AntidépresseursSwartz et coll., 1997 •Fluoxétine (20 mg/j) • NPI : « amélioration » • EI : 2 abandons (un attribuableÉtude ouverte, 3 mois •Sertraline (50-125 mg/j) non statistiquement à la diarrhée causée par la (n = 11) •Paroxétine (20 mg/j) significative chez 9 sertraline, l’autre à l’agitation

patients sur 11 et à l’agitation psychomotrice causées par la paroxétine)

Morreti et coll., 2003 •Paroxétine (20 mg/j) • Améliorations des • EI : aucun abandonÉtude ouverte, vs piracétam comportements14 mois (n = 8) (1 200 mg/j) • Réduction du stress des aidants

Lebert et coll., 2004 •Trazodone (majorée à • NPI : 10 « répondeurs au • Score MMSE inchangé après le 6 semaines, témoin la dose maximale de médicament » sur 26 sujets traitementplacebo 300 mg/j) • Améliorations : irritabilité, • EI : 5 abandons (significativement(n = 26) agitation, dépression et plus nombreux dans le groupe

troubles de l’alimentation traité vs groupe placebo)• EI : 11 sujets (fatigue,

étourdissements, hypotension)

Lebert et coll., 1999 •Trazodone (majorée à • NPI : réduction significative • Score MMSE inchangéÉtude ouverte, la dose maximale de (vs scores initiaux) : délires, • Un EI signalé : évanouissement 6 semaines 300 mg/j) agressivité, anxiété et passager (300 mg/j)(n = 14), DFT-vc irritabilité chez les sujets

recevant 150 mg/j• Réduction significative : dépression,

désinhibition et comportements moteurs aberrants

Antipsychotiques

Huey et coll., 2008 •Quétiapine (150 mg/j) • NPI : réduction significative • EI : 1 patient a signalé de la Étude ouverte, vs dextroamphétamine du score initial seulement sédation sous quétiapine. 3 semaines (20 mg/j) dans le traitement par la Trouble du sommeil avec les (n = 8), DFT-vc dextroamphétamine autres agents

Gafoor et coll., 2003 •Olanzapine (27,5 mg/j) • Atténuation des symptômes • Manie secondaire, rare 2 études de cas de + clonazépam (0,5 mg/j) de manie dans tous les • Atteinte du lobe frontal droit?DFT + manie •Halopéridol (5 mg/j) traitements

Curtis et coll., 2000 •Rispéridone (6 mg/j) • Symptômes psychotiques • EI : akathisie et parkinsonisme Étude de cas, atténués après une semaine léger1 semaine de traitement(n = 1) la maladie de • Après trois mois, aucun Pick + psychose délire ou hallucination

Nootropes

Mendez et coll., 2007 •Donépézil (10 mg/j) • Aucune amélioration • EI : les aidants ont signalé une Étude cas témoin, significative des critères : aggravation de la désinhibition, 6 mois (n = 12), MMSE, CDR, critères des compulsionsDFT-vc reliés à la DFT

Moretti et coll., 2004 •Rivastigmine (3-9 mg/j) • NPI : amélioration • EI : nausées, crampes Étude ouverte, 12 mois vs témoin (patients DFT significative des scores musculaires, changements de la (n = 20), DFT-vc appariés sous totaux (vs scores initiaux tension artérielle

antipsychotiques, et vs témoin pour la • Réduction du fardeau des aidantsbenzodiazépine, sélégiline) plupart des items du NPI)

Lampl et coll., 2004 •Donézépil (10 mg/j) • 4 patients sur 9 ont • EI : aucun signaléÉtude ouverte, 3 mois •Rivastigmine (6-12 mg/j) manifesté une amélioration (n = 9) significative sur le plan clinique

ainsi que des améliorations des résultats SPECT

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La Revue canadienne de la maladie d’Alzheimer et autres démences • 11

avoir des répercussions défavorablesimportantes. En plus du déclin de la capa-cité d’exécuter les activités de la vie quoti-dienne (AVQ), de la piètre qualité de vie etdu risque accru d’apparition de symptômesde type parkinsonien24-26, les patientscessent parfois toute interaction sociale etils négligent leur hygiène personnelle27,28.

Les comportements apathiques ont étéle plus souvent reliés à la DFT-vc, maisune proportion importante des patientsatteints initialement d’APP risque de ma-nifester ce symptôme à un moment oul’autre de l’évolution de la maladie29,30.Des rapports permettent de croire que lespatients atteints de DS sont également susceptibles de manifester initialement del’apathie, qu’on croit attribuable à l’atro-phie bilatérale de l’amygdale31. Une étudeIRM récente menée auprès de 62 patientsatteints de DFT a établi une relation entrela gravité de l’apathie et une atteinte ducortex préfrontal dorsolatéral32.

Désinhibition. Bien qu’elle soit moinsfréquente que l’apathie au début de la DFT,la désinhibition demeure un symptômeprévalent chez 52 % des patients atteintsde DFT21. Plus marquée dans la DFT-vc,

la désinhibition est également présentedans la DS et elle traduit l’incapacitéd’avoir des conduites socialement accepta-bles33.

Les comportements qui témoignentd’une perte de l’inhibition sont nombreux etvariés; les auteurs d’une étude ont décritnotamment le vol à l’étalage, l’exhibition-nisme, le contact inapproprié avec desétrangers et les relations extraconjugales,

entre autres. Soulignons que les sujets quimanifestaient une désinhibition de modéréeà grave présentaient une hypoperfusion dulobe temporal droit34. Les résultats de neu-roimagerie montrent que le lobe temporaldroit est un siège important de la dégénéres-cence qui aboutit à une perte de l’inhibition.Une étude IRM a établi une relation entreune désinhibition importante et la destruc-tion de matière grise dans le noyau accum-bens et dans l’aire médiotemporale droite

du cerveau32. Une étude d’imagerie récentepar TEP menée auprès de 29 sujets atteintsde DFT et manifestant un dysfonction-nement social (les trois variantes de la mala-die) a montré une réduction du métabolismedu glucose dans le lobe temporal antérieurdroit, ce qui concorde avec les observationsantérieures à l’effet que cette aire cérébraleparticipe à la cognition « sociale », tandisqu’une autre étude par TEP a mis en

évidence le cortex orbitofrontal commesource du problème35-37.

Agitation et agressivité. On avait signaléde l’agitation et de l’agressivité chez des patients atteints de DFT, des comporte-ments qui constituent une menace grave non seulement pour les patients, mais aussipour leurs aidants38,39. Il n’est pas rare d’observer des comportements plus dange-reux, par exemple des gestes d’agression,dans des cas graves, ce qui risque d’aboutir

Symptômes comportementaux et psychologiques de la DFT

Bien qu’elle ne menace pas immédiatement le bien-être dupatient, l’apathie peut avoir des répercussions défavorables

importantes.

Traitement des symptômes comportementaux dans la DFT

Étude Intervention(s) Critères Commentaires

Tous les types de DFTKertesz et coll., 2008 • Galantamine • NPI : aucune amélioration • EI : nausées, diarrhée, céphalée Étude ouverte, (dose moyenne de significative des scores pour (5 abandons)18 semaines 21,5 ± 4,9 mg/j) les comportements ou le (n = 36) DFT-vc + APP langage (tendance chez les

patients atteints d’APP)• Pendant le sevrage, les sujets

ont manifesté une amélioration vs placebo des résultats CGI-S, non significative après ajustement des données

Diehl-Schmid et coll., • Mémantine (20 mg/j) • NPI : aucune amélioration • EI : dépression, autre EI signalé 2008 significative des scores mais considéré comme non relié Étude ouverte, 6 mois (vs scores initiaux) au médicament(n = 16), DFT-vc + DS • Sous-groupe de DS :

amélioration significative du score FBI (vs score initial)

Swanberg M. et coll., • Mémantine (20 mg/j) • NPI : amélioration de • EI : aucun signalé2007 l’apathie, de l’agitation et Étude ouverte, 3 mois de l’anxiété(n = 3), DFT-vc • Aucune amélioration de la

fonction cognitive

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Les tauopathies

à l’incarcération ou au placement en éta-blissement20,40. Selon une étude compara-tive, une proportion plus grande de patientsatteints de DFT (45 %) que de patientsatteints de maladie d’Alzheimer (MA) (5 %)manifestent des comportements antisociaux,par exemple des voies de fait et des menacesde mort, qui pourraient s’expliquer par l’hy-poperfusion des aires frontales et temporalesantérieures du cerveau41. Une étude géné-tique a démontré une relation entre l’allèlecodant pour l’apolipoprotéine E4 et l’agres-sivité dans la DFT, c’est à dire que lespatients homozygotes pour l’allèle ontobtenu des scores significativement plusélevés pour les critères d’évaluation de l’agressivité42. Les auteurs ont récemmentposé l’hypothèse d’une augmentation de laneurotransmission dopaminergique et de laperturbation de la voie sérotoninergiquecomme facteurs contributifs à l’agressivité età l’agitation chez les patients atteints deDFT43.

Troubles de l’alimentation. Des chan-gements spectaculaires des comportementsalimentaires surviennent très souvent audébut de la DFT et ils peuvent s’aggraver demanière constante avec l’évolution de lamaladie. La présence de tels changementsdans le tableau clinique initial peut aider àdifférencier la DFT des autres maladiesneurodégénératives comme la MA44.

Les résultats d’une étude comparativeauprès de sujets atteints de DFT et depatients atteints de MA montrent que 79 %des patients atteints de DFT avaient signaléun besoin maladif de consommer des glu-cides, mais aucun patient atteint de MAn’avait manifesté ce comportement45. Uneautre étude a examiné les habitudes alimen-taires de patients atteints de DFT-vc et depatients atteints de DS; ces deux sous-groupes avaient des comportements alimentaires semblables, les deux ayantmanifesté des changements dans leurspréférences alimentaires et leur appétit audébut de l’étude, et des difficultés crois-santes de déglutition à mesure que la mala-die évoluait46. Au cours d’une étude

épidémiologique portant sur des patientsatteints de DFT-vc, les troubles de l’ali-mentation, y compris l’hyperphagie, laboulimie et des lubies en matière de nourri-ture, étaient les symptômes les pluscourants qui se sont aggravés sur les quatreans de l’étude47. Une étude récente sur lescrises d’excès alimentaires dans la DFT-vca montré que ce comportement était lié àl’atrophie du cortex insulaire ventral droit,du néostriatum et du cortex orbitofrontal48.

Autres symptômes comportementaux.Plusieurs autres symptômes neuropsychia-triques peuvent faire partie du tableau clini-que, mais ils ne feront pas nécessairementpartie des caractéristiques clés réelles de laDFT. Des comportements répétitifs ou dessymptômes obsessionnels compulsifs ontété souvent signalés dans la populationatteinte de DFT49. Une étude menée pourexaminer ces comportements a montré quedans une population de 90 sujets atteints deDFT, 21 % manifestaient un comportement

compulsif complexe et que ce dernier étaitassocié à une atrophie du lobe temporal,une caractéristique dégénérative courantedans la DS50. Une autre étude a montré queles variantes frontale et temporale de laDFT comprenaient un nombre importantde comportements stéréotypés ou répétitifs,comme la persévération verbale, l’accumu-lation d’objets et les rituels51. Des symp-tômes psychotiques, quoique rares, ontaussi été décrits dans la DFT. Au coursd’une étude visant à comparer la préva-lence des symptômes psychotiques dans laDFT et dans la MA, les chercheurs ont constaté qu’un moins grand nombre depatients atteints de DFT ont signalé dessymptômes (2 % vs 17,4 %), mais les deuxgroupes de patients ont signalé des délireset de la paranoïa52. Plusieurs études de casmentionnent la présence d’une psychosechez des patients atteints de DFT53-55.

Options thérapeutiques dans la DFTIl existe peu de modalités thérapeutiquesefficaces dans la DFT, et la plupart des

essais cliniques avaient pour but de traiterles symptômes associés à la maladie plutôtque d’influer sur son évolution. Plusieursinterventions pharmacologiques ont étémises à l’épreuve au cours d’essais clini-ques, avec des résultats variables. Ces données sont résumées ci-dessous et auTableau 1.

Antidépresseurs. Parmi les pharma-cothérapies, c’est la classe des inhibiteurssélectifs de la recapture de la sérotonine(ISRS) qui a été la plus étudiée. Le recoursaux ISRS dans la DFT s’appuie sur un bonraisonnement, car les études ont mis enévidence une perturbation du systèmesérotoninergique, notamment des pertesdes récepteurs 5HT-1A et 5HT-2A56,57.Des pertes importantes de ces récepteursdans les aires cérébrales clés pourraientdiminuer la réponse à la sérotonine, ce quicrée le besoin de remplacement et nuit àl’efficacité des ISRS58.

Une étude ouverte a été menée pendanttrois mois pour comparer la fluoxétine, lasertraline et la paroxétine dans le traitementde 11 patients atteints de DFT; plus de lamoitié des sujets ont manifesté une amélio-ration de leurs comportements, notammentde la désinhibition, de la dépression et descomportements compulsifs59. Une autreétude ouverte a évalué le traitement par laparoxétine à 20 mg par jour chez huit sujetsatteints de DFT et montré un effet favorablesignificatif sur les comportements après 14mois de traitement11.

À l’opposé, un essai comparatif ran-domisé (ECR) n’a pas démontré d’effetsbénéfiques sur les symptômes comporte-mentaux et a même révélé une détério-ration de la performance cognitive chezhuit sujets atteints de DFT-vc chez qui la dose de paroxétine avait été majorée à40 mg/jour (dose maximale)14. Deuxétudes ont évalué l’efficacité de la trazo-done dans la DFT, une étude croisée avectémoin placebo et une étude ouverte.Pendant les six semaines de l’étude croiséecomparant la trazodone au placebo, 26patients atteints de DFT manifestant dessymptômes neuropsychiatriques ontobtenu une amélioration significative descomportements d’irritabilité, d’agitation,de dépression et de troubles de l’alimenta-tion12. L’étude ouverte avec la trazodonechez 14 sujets atteints de DFT a montré

Des changements spectaculaires des comportements alimentairessurviennent très souvent au début de la DFT et ils peuvents’aggraver de manière constante avec l’évolution de la maladie.

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La Revue canadienne de la maladie d’Alzheimer et autres démences • 13

une amélioration, reliée à la dose, dessymptômes de délire, d’irritabilité, d’a-gressivité et de désinhibition60. Un articlesynthèse récent portait sur des essais sur lapharmacothérapie pour traiter les symp-tômes comportementaux dans la DFT. Cesauteurs ont conclu qu’il existe des preuvesmodestes à l’appui de l’efficacité de laparoxétine, de la fluvoxamine, de la sélégi-line et de la trazodone, car les patientsatteints de DFT étaient plus susceptibles devoir leur état s’améliorer pendant qu’ilsprenaient ces médicaments61. Ces résultatsdoivent être interprétés avec prudenceparce que seulement deux de ces étudesétaient à répartition aléatoire.

Antipsychotiques. Plusieurs études decas ont montré des résultats variables dutraitement par les antipsychotiques. Leseffets thérapeutiques potentiels de cettefamille de médicaments pourraient êtrereliés à leur action antagoniste dopami-nergique, car une étude a montré une rela-tion entre la neurotransmission dopami-nergique accrue et les comportementsagités et agressifs chez 25 patients atteintsde DFT43. Une petite étude a démontréune atténuation des symptômes de manieattribuable au traitement par l’olanzapineet l’halopéridol dans la DFT62. Selon uneautre étude (n = 8), on a observé uneamélioration importante des symptômescomportementaux chez les sujets traitéspar la dextroamphétamine, mais non chezceux qui recevaient la quétiapine15. Uneétude portant sur un seul cas décrit l’effi-cacité d’un traitement d’une semaine parla rispéridone à 3 mg, deux fois par jour,chez un patient atteint de DFT et mani-festant des symptômes psychotiques63.

Nootropes. Ces agents ont été étudiéscomme options thérapeutiques possibles.Le déficit de la transmission cholinergiqueest reconnu comme un signe cardinal de laMA, mais la relation avec la DFT est moinsconvaincante. Une seule étude a mis en évi-dence la perturbation de ce système, avecdes diminutions des nombres des récepteursacétylcholinergiques (muscariniques) dansle cortex temporal de cinq patients atteintsde DS64. Quant à la classe des inhibiteurs dela cholinestérase (IChE), les études ont misà l’épreuve des traitements par le donépézil,la rivastigmine et la galantamine. Une petiteétude ouverte (n = 9) auprès de patients

atteints de DFT récemment diagnostiquée amontré que quatre de ces sujets sousdonépézil ou sous rivastigmine avaientmanifesté des améliorations pertinentes surle plan clinique après trois mois de traite-ment, et des améliorations des résultats desexamens d’imagerie SPECT après six mois,bien que les critères de jugement de cetteétude aient été définis de manière impré-cise65. Une étude cas témoin de six moisportant sur le donépézil dans le traitementde la DFT (n = 24) a produit des résultatscontradictoires, ce qui donne à penser qu’iln’y avait pas de différences significatives dela cognition entre le groupe traité et legroupe témoin, le groupe recevant lemédicament à l’étude ayant présenté uneaggravation significativement plus marquéedes symptômes après le traitement66.

Une étude ouverte de 12 mois avec larivastigmine indique que cette pharma-cothérapie a amélioré les symptômes com-portementaux et diminué le fardeau desaidants de manière significativement plusmarquée chez les sujets traités, comparative-ment aux sujets témoins appariés selonl’âge16. De même, une étude ouverte de 18semaines suivie d’un ECR de huit semaines(n = 36) pour mettre à l’épreuve la galanta-mine dans le traitement de la DFT-vc et del’APP n’a pas montré d’amélioration signi-ficative des comportements ni du langage,mais la performance du langage estdemeurée stable chez les sujets atteintsd’APP qui recevaient le médicament, com-parativement aux sujets recevant le place-bo17. Les données touchant un autrenootrope, l’antagoniste des récepteursNMDA (N-méthyl-D-aspartate), la méman-tine, sont contradictoires quant à l’efficacitédu médicament. Le raisonnement à l’appuide cet agent comme option thérapeutiquen’est pas très rigoureux, car quelques étudesseulement donnent à penser que la perturba-tion du système glutamatergique, avecdiminution du nombre de récepteurs NMDAet des neurones glutamatergiques dans lesaires cérébrales frontales et temporales despatients atteints de DFT67,68. Dans une petite

série de cas, on a observé des bienfaits surles plans des comportements et de la cogni-tion69, mais une étude ouverte (n = 16) n’apas révélé d’amélioration statistiquementsignificative des critères comportementauxet a démontré une détérioration de la per-formance cognitive18.

Quelle est la prochaine étape?Il appert que les symptômes comportemen-taux dans la DFT sont très variés et qu’ilschevauchent peut-être ceux d’autres mala-dies neurodégénératives. Ce phénomènepeut contribuer à des erreurs diagnostiqueset il peut empêcher les patients de recevoirun traitement avant que les symptômes com-portementaux soient impossibles à maîtriser.Une étude récente menée en Norvège et enSuède a montré qu’il faut environ deux à

trois ans pour confirmer un diagnostic clini-que de DFT après la première visite chez lemédecin70. Il nous faut donc mener desrecherches plus approfondies pour découvrirun traitement efficace au stade précoce de lamaladie.

Plusieurs modalités se sont révélées effi-caces dans le traitement des symptômes neu-ropsychiatriques de la DFT, mais nousdevons faire plus. Selon une étude épidémio-logique, il serait possible de réaliser desessais cliniques multicentriques de grandeenvergure, puisque tous les facteurs d’unessai réussi (importante population de sujetsatteints de DFT, candidats à de tels essais etcritères de jugement uniformisés pertinents)sont facilement disponibles71. Des recher-ches sont menées pour mettre à l’épreuvedes traitements modificateurs de la maladiechez les patients atteints de MA et il fautespérer que ces recherches s’étendront à laDFT. En théorie, les médicaments qui ontpour cibles les tauopathies ou l’ubiquitinyla-tion des protéines TDP-43 pourraient êtrebénéfiques s’ils corrigeaient l’atteinte loca-lisée dans les lobes frontaux et temporaux.En attendant, nos patients ont un besoinurgent d’autres modalités thérapeutiquespour traiter ces symptômes neuropsychia-triques invalidants de la DFT.

Il existe peu de modalités thérapeutiques efficaces dans la DFT, et laplupart des essais cliniques avaient pour but de traiter les symptômes

associés à la maladie plutôt que d’influer sur son évolution.

Symptômes comportementaux et psychologiques de la DFT

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13.1 • La Revue canadienne de la maladie d’Alzheimer et autres démences

Tauopathies

Remerciements : Les docteurs Lanctôt et Herrmann aimeraient remercier le support de recherche fourni par la Société Alzheimer du Canada(Subvention #07-48).

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La Revue canadienne de la maladie d’Alzheimer et autres démences • 13.2

Symptômes comportementaux et psychologiques de la DFT

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14 • La Revue canadienne de la maladie d’Alzheimer et autres démences

Les tauopathies

La documentation sur les aidants despersonnes atteintes de démence s’est

enrichie de manière exponentielle depuis19951, mais peu d’articles ont été publiésau sujet du fardeau des aidants qui pren-nent soin des personnes au stade précocede diverses formes de démence2. Pour-tant, la recherche a déjà montré que lesaidants de personnes jeunes atteintes dedémence sont confrontés à des difficultésperçues plus grandes3 et qu’ils doiventsupporter un fardeau plus lourd4.

L’expression « démence au stade pré-coce » s’applique dans le cas des person-nes qui manifestent un début de démenceavant 65 ans. Dans ce groupe d’âge, lediagnostic le plus fréquent est celui demaladie d’Alzheimer (MA) de début pré-coce et ensuite, celui de démence fron-totemporale (DFT)5.

Selon la Société Alzheimer duCanada, parmi les 500 000 Canadiensatteints de MA ou d’une démence con-nexe, jusqu’à 15 % ont moins de 65 ans et2 % de ces derniers sont atteints de DFT.Ces taux sont les mêmes en Ontario6.

Démence frontotemporale« Démence frontotemporale » est unterme générique sous lequel on regroupediverses pathologies rares qui touchentprincipalement les lobes frontaux et tem-poraux du cerveau qui régissent la per-sonnalité et les comportements7. L’âgemoyen de début de la DFT est de 52,8 à56 ans8, mais en général, la maladie semanifeste entre 40 et 70 ans et sa duréemoyenne est de huit ans9.

Trois variantes cliniques de la DFTsont reconnues : la variante comporte-mentale (DFT-vc) et deux variantesreliées au langage, soit la démencesémantique (DS) et l’aphasie non fluenteprogressive (ANFP)10.

Variante comportementale de laDFT. La caractéristique dominante chezune personne atteinte de DFT-vc estl’altération des conduites sociales et de lapersonnalité, contrairement à la MA dedébut précoce qui est caractérisée initiale-ment par des troubles mnésiques11.

Dans la DFT-vc, une grappe de symp-tômes définit les critères diagnostiques :• apathie• désinhibition• conduite sociale aberrante• nette absence d’empathie• changements des comportements ali-

mentaires

• apparition de stéréotypes moteurs ouverbaux10

La perte d’inhibition se traduit par descomportements impulsifs ou inappro-priés, par exemple proférer des jurons àdes moments inopportuns ou en s’adres-sant à autrui, piquer des colères ou man-quer gravement de tact12. À mesure que lamaladie évolue, cette désinhibition peutentraîner un comportement criminel,comme le vol ou un comportement sexueldéplacé, qui risque d’exposer les patientsà l’appareil judiciaire.

En général, la DFT n’est pas diagnos-tiquée correctement ou on la méprendpour une crise de milieu de vie13; enoutre, la méconnaissance de ce diagnosticaggrave beaucoup le stress des aidants14.

Si on accorde une attention parti-culière au sous-groupe de personnesatteintes de DFT-vc, c’est que les change-ments de personnalité et de comporte-ment suscitent d’énormes difficultés pourles conjoints et les proches5. À l’opposédes patients atteints de DS et d’ANFP quisont presque toujours conscients de leursdéficits, les patients atteints de DFT-vcont une capacité d’introspection grave-ment compromise, ils négligent leurhygiène personnelle et ils peinent à exé-cuter les activités de la vie quotidienne(AVQ), par exemple se laver et se vêtir.

Soutenir les proches aidants despersonnes atteintes de démencefrontotemporale La démence frontotemporale (DFT) est un terme générique sous lequel on regroupe destroubles qui touchent principalement les lobes frontaux et temporaux du cerveau, quirégissent la personnalité et les comportements. Même si les aidants de personnes atteintesde démence et même si la DFT ont fait l’objet de nombreuses études, il faut déplorer lepeu d’information sur le soutien des aidants de personnes atteintes de DFT et sur lesdifficultés particulières qui les assaillent.

Par Adriana Shnall, MTS, TSA

Adriana Shnall, MTS, TSATravailleuse sociale, Clinique de mémoire, Baycrest

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Ces patients ont également de la difficultéà initier, planifier et exécuter les activitésinstrumentales de la vie quotidienne(AIVQ) (p. ex., gérer ses finances,accomplir des tâches ménagères)15.Souvent décrits comme étant « égoïstes »ou « centrés sur eux mêmes », les person-nes atteintes de DFT-vc manifestent unmanque total d’empathie pour les préoc-cupations émotionnelles d’autrui, unecause majeure de détresse pour leurs con-joints ou conjointes7.

Enjeux et intervention cliniqueauprès des aidants de patientsatteints de DFTDe nombreuses études donnent à penserque la perturbation des comportements, etnon le déclin cognitif (trouble mnésiqueou désorganisation mentale), est le plusimportant facteur prédictif de détressesociale et émotionnelle chez l’aidant16. Àcause des manifestations psychiatriqueset comportementales initiales de la DFT-vc, les aidants de ces personnes sont plussusceptibles d’avoir de la difficulté às’occuper de leur conjoint ou conjointeque les aidants des personnes atteintes deMA de début précoce.

Mon expérience clinique m’a permisd’observer des cas où la relation conju-gale était définitivement compromiseavant le diagnostic ou la consultation à laClinique de mémoire, et ce, à cause dudébut insidieux de la maladie, de la diffi-culté d’obtenir un diagnostic dès le début,des changements de personnalité et deschangements émotionnels chez le con-joint malade.

On sait que les taux de stress et demorbidité psychologique sont particu-lièrement élevés chez les aidants de per-sonnes atteintes d’une démence de débutprécoce17. Ce stress et cette morbiditésont associés aux tâches développemen-tales reliées au cycle de vie familiale et àl’absence de services pour répondre auxbesoins de cette population. Ce groupedoit également faire face à une retraiteprécoce forcée, à des difficultés finan-cières dues à la perte de revenu, à la diffi-culté d’obtenir un diagnostic, au manquede compréhension des amis, de la familleet des employeurs, à l’impossibilité departiciper à des programmes de jour pour

adultes à cause des restrictions en matièred’âge et enfin à l’absence de servicespour les patients atteints de DFT.

Intervention clinique auprès desaidants. Pour intervenir auprès desaidants de personnes atteintes de DFT, lesefforts doivent être axés sur troisdomaines clés : aider les aidants à faireface au comportement difficile du mala-de, leur apporter un soutien émotionnel etleur fournir des services de soutien perti-nents ainsi que des ressources pratiquesau sein de la collectivité.

En vue de proposer des solutions dansces trois domaines, le clinicien doit éva-luer les points suivants dans l’ordre pourque les interventions soient pertinentes :

1. Le bien être psychologique et physi-que de l’aidant;

2. L’allocation du rôle d’aidant et la per-ception qu’a l’aidant de ce rôle;

3. La qualité des soutiens informels etformels;

4. La qualité de la relation entre lepatient et l’aidant avant l’apparitionde la maladie;

5. Les valeurs culturelles et les croyan-ces spirituelles de l’aidant;

6. Les connaissances de l’aidant à pro-pos de la maladie;

7. Les types de stratégies d’adaptationqu’utilise et qu’a utilisé l’aidant;

8. La présence d’autres facteurs de stresspotentiels18.Domaines d’intervention. Après avoir

déterminé dans quels domaines l’aidant abesoin d’aide, le clinicien choisit desinterventions qui ciblent ces domaines.La règle d’or pour intervenir auprès desfamilles est « de commencer par répondreaux besoins qu’exprime présentement lafamille » et non aux besoins priorisés parle clinicien. Cet aspect est crucial, car lesaidants accepteront de l’aide uniquementdans les domaines qu’ils perçoiventcomme « problématiques » et non dansceux que les professionnels de la santéjugent plus importants. Par exemple, la

conjointe affirme qu’à ses yeux, le pluspénible est de maîtriser la honte qu’elleressent à cause du comportement sexuelinconvenant de son conjoint en présenced’autrui; de son côté, le clinicien est con-vaincu que le problème réel est que ladame n’accepte pas la maladie de sonconjoint et, par conséquent, qu’elle ne lesupervise pas de manière adéquate. Dansune telle situation, l’intervention doit êtreaxée sur la honte que ressent la conjointe.

Les interventions peuvent ciblerd’autres difficultés une fois que l’aidant al’impression d’être entendu et compris duclinicien. Les aidants qui se sententincompris par les médecins ne revien-dront pas, ce qui les empêchera de

recevoir le soutien et de bénéficier desinterventions alors qu’ils en ont le plusbesoin. Les cliniciens ne doivent pas semontrer rigides dans leur façon de fournirde l’assistance aux aidants. Les famillesdemanderont du soutien lorsqu’elles sesentiront prêtes, et c’est le rôle du profes-sionnel de la santé d’être disponiblelorsque la famille est prête à accepter sonaide.

Après 18 années d’expérience à laClinique de la mémoire, j’ai compris quele moyen le plus efficace d’intervenirauprès de ces familles est de les rencon-trer une première fois au moment du dia-gnostic, puis de demeurer disponible pendant toute l’évolution de la maladie.Cette expérience m’a enseigné que cespersonnes sont en mesure de téléphonerau moment d’une crise ou lorsqu’elles ontbesoin de soutien si la relation thérapeu-tique initiale a été établie d’emblée aumoment du diagnostic et si elles ont l’impression qu’elles peuvent compter sur le clinicien lorsque des problèmessurviennent.

Les autres domaines qui doivent fairel’objet de discussion avec les aidants audébut de la maladie sont décrits auTableau 1.

La Revue canadienne de la maladie d’Alzheimer et autres démences • 15

Soutenir les proches aidants des personnes atteintes de DFT

Les aidants qui se sentent incompris par les médecins nereviendront pas, ce qui les empêchera de recevoir le soutien et de

bénéficier des interventions alors qu’ils en ont le plus besoin.

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16 • La Revue canadienne de la maladie d’Alzheimer et autres démences

Les tauopathies

ConclusionEn dépit de l’abondance des données derecherche au sujet des enjeux qui touchentles aidants, il existe peu de résultats derecherche pour guider les cliniciens dansl’évaluation et la résolution de ces problè-mes dans la population atteinte de DFT.

Les progrès médicaux en matière dediagnostic et d’évaluation des démencesde début précoce ont sensibilisé les clini-ciens qui œuvrent dans ce domaine au faitque ces patients et leurs aidants ont desbesoins pratiques et émotionnels particu-liers auxquels ne peuvent répondre lesservices conçus pour des adultes âgés.Même si les travailleurs en santé mentalepossèdent des compétences qui peuventêtre adaptées à ce champ thérapeutique,ces professionnels doivent être conscientsque de nouvelles connaissances s’accu-mulent au sujet de cette population.

Intervenir auprès des aidants de per-sonnes atteintes de DFT n’est pas sans

soulever des défis et des difficultés, mêmepour les cliniciens les plus expérimentés.Les ressources sont rares, le public estpeu sensibilisé à ce problème et l’accès autraitement et aux interventions est diffi-cile. Le clinicien doit consacrer beaucoupd’efforts à défendre les intérêts de cespatients, car ils « passent souvent entre lesmailles du filet ». Ce phénomène s’ex-plique par le fait que la plupart des servi-ces sont destinés à une population plusâgée (programmes de jour pour adultes etprogrammes d’assurance médicamentsdestinés aux plus de 65 ans), ce qui nuit àun accès continu aux services pertinents.

Parce que cette maladie touche plu-sieurs groupes d’âge, il nous faut parfoisintervenir auprès d’adolescents à domicile(en général, cela ne relève pas de la com-pétence des cliniciens d’une clinique de lamémoire), collaborer avec les écoles, lesagences d’aide à l’enfance et les pro-grammes de jour pour adultes destinés aux

patients, et parfois régler des problèmesreliés aux parents des patients ou des con-joints qui eux aussi vieillissent et ontbesoin du soutien de leurs enfants. Enoutre, les programmes de jour et de dépan-nage pour les aidants n’offrent pas un nom-bre d’heures suffisant d’activités de soutienpour répondre aux besoins des conjoints ouconjointes encore sur le marché du travail.

À l’avenir, il faudra consacrer plus d’ef-forts pour informer plus rapidement lesaidants et leur enseigner des stratégiesd’adaptation qui les aideront à composeravec les comportements difficiles despatients, car le risque de problèmes de santéphysique et mentale est plus élevé pour eux.Dans les milieux médicaux, on devrait éla-borer des protocoles pour que tous lesaidants auprès de personnes atteintes deDFT-vc obtiennent les conseils d’un tra-vailleur social ou de professionnels en santémentale au moment du diagnostic initial.On peut espérer qu’une telle interventionserait faite au moment où elle est le plusbénéfique, au lieu d’attendre une situationde crise. Ainsi, les familles seraient mieuxrenseignées, elles pourraient obtenir plusrapidement du soutien émotionnel et avoiraccès plus tôt à l’assistance nécessaire pourrésoudre des problèmes d’ordre pratique.

Les cliniciens qui œuvrent dans cedomaine devront continuer à rechercherdes moyens d’intervenir auprès de cettepopulation de manière imaginative et entenant compte des besoins de ce grouped’aidants très vulnérables, au lieu dedevoir satisfaire aux exigences de nosétablissements et de nos services de sou-tien existants.

Tableau 1

Points à résoudre avec l’aidant au début de la maladie

• Documents de procuration

• Explications à propos du système de soins de santé de longue durée

• Mesures de soutien financier offertes aux familles, p. ex. crédits d’impôt,prestations d’aide sociale, Régime de pensions du Canada et assurancemédicaments

• Gestion des finances et mesures de protection contre les dépensesexcessives et les jeux de hasard

• Questions de sécurité (p. ex., conduite automobile)

• Comment faire face aux comportements inappropriés ou illégaux

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La Revue canadienne de la maladie d’Alzheimer et autres démences • 16.1

Soutenir les proches aidants des personnes atteintes de DFT

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La Revue canadienne de la maladie d’Alzheimer et autres démences • 17

Il est indispensable d’assurer aux per-sonnes atteintes de démence vivant

dans la communauté l’accès à des pro-grammes et à des services spécialisésrépondant à leurs besoins. Cela peutinclure divers types de soutien axés surles dimensions affective, sociale, spiri-tuelle, créative, physique et mentale de lapersonne, de même qu’une aide à safamille et à ses aidants.

Situé à Toronto, l’hôpital Baycrest estun centre hospitalier universitaire qui seconsacre à l’étude du vieillissement.L’établissement offre une variété de servi-ces et de programmes aux gens âgés quivivent dans la collectivité et un suivithérapeutique à la clientèle âgée qui abesoin de soins et des services hospita-liers à long terme (p. ex., réadaptation,

soins continus complexes et soins pallia-tifs)1. L’un des importants programmesque cet établissement offre aux personnesâgées aux prises avec la démence est leSamuel Lunenfeld Mountainview ClubDay Centre, un centre de jour pour lespersonnes âgées souffrant d’une atteintecognitive de modérée à grave. En colla-boration avec la Baycrest Ross MemoryClinic, cet établissement communautaireoffre aussi un programme de jour spécia-lement conçu pour les adultes atteints deDFT. Ce partenariat réunit une équipeinterdisciplinaire d’experts pour offrir desprogrammes et une aide spécialisés afinde répondre aux besoins des clients de lacommunauté atteints de DFT et de leursaidants.

La DFT affecte la portion du cerveauqui contrôle les comportements et l’intro-spection. Les personnes atteintes de DFTsont en général plus jeunes que la plupartdes autres clients atteints de démence etpeuvent manifester un déclin intellectuel etde la désinhibition, et leur comportementinapproprié pose souvent problème. Onobserve aussi chez ces patients un juge-ment altéré, des changements des habi-tudes alimentaires et un repli sur soi2-4.

Description du programme ducentre de jour à l’intention desclients atteints de DFT et de leurfamilleLe centre de jour de l’hôpital Baycrest5,6

a ouvert ses portes à l’été 2006, aprèsqu’on ait reconnu la nécessité d’instaurerun programme spécifique pour lespatients atteints de DFT. Ce nouveau pro-gramme a été intégré aux activités du cen-tre de jour qui existait déjà depuis 1959 etqui aide les personnes âgées atteintesd’altérations cognitives de modérées àgraves. En partenariat avec la BaycrestRoss Memory Clinic, un modèle de soinsen collaboration a été mis en œuvre avecpour objectif de répondre aux diversbesoins des clients atteints de DFT et deleur famille.

L’élément clé des soins requis par lesclients atteints de DFT et leur famille estl’accès à l’expertise et aux ressourceshumaines. Le programme offre les servi-ces d’une équipe pluridisciplinaire quicomprend des intervenants en soins infir-miers, en travail social, en ergothérapie etdu personnel administratif. Les clients etles familles disposent d’un ensembleunique de services axés sur la santé et le

Impact du programme d’un centre de jour communautaire sur la vie des patients atteints de démencefrontotemporale et de leurs aidantsLes patients qui ont un diagnostic de démence frontotemporale (DFT) posent des défis auxprofessionnels de la santé et à leurs aidants en raison de leur comportement perturbateur etde leur âge moins avancé. Leur comportement et leur tenue semblent toutefois s’améliorerlorsqu’ils sont inscrits dans un centre de jour communautaire structuré. Les aidants reçoiventégalement de l’aide sous diverses formes : counseling, formation continue, orientation àl’intérieur du système et accessibilité appropriée aux ressources.

Par Anna Grinberg, inf., B.Sc.N., SIG et Diane Phillips, MTS, TSA

Anna Grinberg, inf., B.Sc.N., SIGInfirmière clinicienne en soins généraux, Community Day Centre forSeniors, Baycrest

Diane Phillips, MTS, TSATravailleuse sociale principale, Community Community Day Centrefor Seniors, Baycrest

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bien-être, la gestion de cas, le counselinget l’enseignement, en plus de recevoir uneaide pour accéder au système de santé etde services sociaux et pour s’orienterdans ses méandres.

On estime que l’une des réussites duprogramme est ce partenariat en collabo-ration, qui facilite notamment les deman-des de consultations auprès d’autres ser-vices professionnels, par exemple en psy-chiatrie, en psychologie, en audiologie,en orthophonie, en ergothérapie et enphysiothérapie. L’équipe travaille enoutre étroitement avec la Baycrest RossMemory Clinic pour faire régulièrementle point sur les besoins des clients et iden-tifier les carences et les secteurs àaméliorer au sein du programme de jour.

L’équipe a reconnu que les étapesmenant à l’admission d’un nouveaupatient atteint de DFT doivent être acces-

sibles et logiques, tout en demeurantaxées sur l’action. C’est pourquoi elle amis en place une période d’évaluation quiva au-delà du diagnostic de DFT pourl’élaboration d’un plan de soins adaptéaux besoins thérapeutiques des clients etdes familles. Étant donné la nature de laDFT et le degré de stress élevé desfamilles, il est important diviser les pro-blèmes complexes en leurs différents élé-ments et de les considérer un à la fois. Leplan de soins est donc constammentrévisé par l’équipe et la famille, au fur età mesure que les besoins du client évo-luent.

L’impact de la DFT sur les aidantset les famillesLe diagnostic de DFT exerce un impactnon seulement sur la personne touchée,mais également sur sa famille et sesaidants. Il est indispensable de recon-naître les besoins de la famille et del’aidant et de les intégrer dans la planifi-cation d’ensemble des soins et dans le suivi du dossier, compte tenu de

l’évolution rapide observée chez lesclients atteints de DFT7.

Il faut tenir compte de plusieurs éléments lorsqu’on soutient les familles.Étant donné que la DFT frappe lespatients à un âge moins avancé que lesautres démences, les services dont leurfamille et leurs aidants ont besoin sontparfois différents. Ainsi, le conjoint ouautre membre de la famille qui joue lerôle d’aidant principal est peut-êtreencore sur le marché du travail et en plusde s’occuper de l’être cher malade, il doitprendre soin des enfants, ce qui décupleles responsabilités quotidiennes. Les con-joints peuvent aussi avoir besoin d’aidepour prendre des décisions relativement àl’institutionnalisation ou lors d’une pério-de de transition dans la vie de la personnemalade. Selon des études, le fardeau estplus lourd pour les aidants jeunes que

pour les aidants de patients plus âgésatteints de démence8,9.

Étant donné que de nombreux patientsatteints de DFT ont besoin d’une surveil-lance constante, d’interventions com-portementales et d’aide physique, oncomprend l’utilité d’un service de répit,souvent indispensable pour augmenter lacapacité d’adaptation des aidants et pro-téger leur équilibre émotionnel. Les défiscomportementaux chez les personnesatteintes de démence sont d’importantsprédicteurs de la façon dont les aidants etles familles s’adaptent au stress et aufardeau inhérents à leur rôle10. Les pro-blèmes des aidants de personnes atteintesde DFT sont aussi préoccupants que ceuxdes conjoints qui prennent soin de per-sonnes atteintes d’autres formes dedémence11. Il est reconnu que les con-joints aidants sont exposés à un risqued’isolement social, de difficultés écono-miques et de morbidité psychologique etphysique accrue12. Cet état de fait nouspermet de comprendre que les aidants etles familles de personnes atteintes de

DFT ont besoin d’information et de sou-tien pour répondre à leurs propres besoinssur le plan de la santé et des tâches quoti-diennes. Il est important de reconnaîtreque la situation de chaque famille etaidant est unique, tant au point de vue deses réseaux d’entraide, de ses ressourcesfinancières, du degré de scolarité, que dela dynamique familiale. Les divers servi-ces fournis par le programme de jourdoivent refléter les complexités de la DFT et du fardeau spécifique qu’ellereprésente pour les familles et les aidants.

Impact des programmes de joursur les clients atteints de DFT etleur familleÉtant donné que les processus d’évalua-tion pilotes pour les clients atteints deDFT et leur famille inscrits au pro-gramme de jour de l’hôpital Baycrest ensont à leurs premiers balbutiements, on nedispose encore d’aucun résultat. L’équipepluridisciplinaire a acquis des connais-sances pratiques et théoriques grâce autravail qu’elle accomplit auprès desclients atteints de DFT et leur famille.Certaines de ces connaissances sontexpliquées ci-dessous à l’aide de castypes.

Exemple nº 1 : Mme A.Mme A. est une femme de 58 ans qui areçu un diagnostic de DFT. Elle n’a paseu d’enfants. Elle est mariée à M. A., unépoux attentionné qui est encore sur lemarché du travail. Au moment où le dia-gnostic de DFT est tombé, le couple avendu sa maison et est déménagé dans unappartement pour personnes retraitées quipouvait répondre aux besoins changeantsde Mme A.

Lorsque Mme A. a commencé àfréquenter le programme de jour, elleprésentait un affect plat et avait beaucoupde difficultés à trouver ses mots. Elle pou-vait marcher et manger sans aide et avaitbesoin de supervision pour aller à la sallede bain.

En l’espace de deux ans et demi,l’équipe a constaté un déclin fonctionnelrapide au fur et à mesure que sa maladieprogressait. Mme A. n’était plus capablede se déplacer seule et était condamnée aufauteuil roulant. Elle a commencé à

18 • La Revue canadienne de la maladie d’Alzheimer et autres démences

Les tauopathies

Étant donné la nature de la DFT et le degré de stress élevé desfamilles, il est important diviser les problèmes complexes enleurs différents éléments et de les considérer un à la fois.

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La Revue canadienne de la maladie d’Alzheimer et autres démences • 19

Programme d’un centre de jour communautaire

éprouver des problèmes de déglutition etson état s’est détérioré au point où ellen’arrivait plus à manger que des alimentsen purée. Le déclin constant de Mme A. etses besoins croissants ont exercé unimpact substantiel sur M. A. Il devaitdésormais fournir des soins complets àson épouse, y compris pour l’alimenta-tion, la gestion de l’incontinence et lamobilisation sécuritaire. Il est resté aussiattentionné envers son épouse, tout encontinuant de lui offrir des activités deloisirs et des sorties. En réponse auxbesoins croissants du couple sur le plandes soins et services, l’équipe du centrede jour a travaillé étroitement avec le maripour identifier ses besoins et établir desobjectifs à intégrer au plan des soins.Lorsque l’équipe a rencontré M. A., elle aconstaté qu’il connaissait le processuspathologique et le pronostic de la DFT,mais qu’il n’avait pas reçu les servicesappropriés pour pouvoir répondre adé-quatement aux besoins de son épouse. Àl’époque, il a su faire part à l’équipe deses problèmes d’isolement, de son senti-ment d’impuissance et de son humeurdépressive. Après avoir identifié lesbesoins de M. A., l’équipe a mis en placeun plan d’aide physique et émotionnelle àson intention. M. A. et l’équipe ont fait lebilan des difficultés croissantes de MmeA. sur le plan de la mobilité et de la dé-glutition. Elle a été adressée vers les services et les spécialités appropriés, parexemple en physiothérapie et en ortho-phonie, dont les recommandationsthérapeutiques ont été intégrées aux ser-vices offerts par le centre de jour pour quel’équipe puisse miser sur les forces deMme A. lorsqu’elle participait au pro-gramme, par exemple aux cours de yoga,d’artisanat et de musique. Le personnelinfirmier a également joué son rôlelorsque Mme A. a présenté des plaies delit et des problèmes dermatologiques.Durant cette transition affectant lescapacités fonctionnelles de son épouse,M. A. a bénéficié de cours et de soutien dela part des travailleuses sociales et desinfirmières qui ont insisté sur l’adapta-tion, l’identification des ressources etl’aide aux soins. Pour soulager le stressde M. A. et alléger son fardeau d’aidant,on l’a adressé à un groupe d’entraide en

ligne et à d’autres aidants auprès demalades atteints de DFT pour diversifierson réseau.

Au moment de soumettre cet article,Mme A. était revenue au centre de jouraprès un bref congé médical. Malgré sescapacités physiques limitées, elle partici-pait toujours de façon aussi alerte et gen-tille. Les bienfaits et les avantages queMme et M. A. ont pu tirer de la participa-tion de Mme A. aux activités du centre dejour sont entre autres : répit, enseigne-ment, counseling et accès à l’informationpour M. A., et retard de l’institutionnali-sation pour Mme A. De plus, l’équipe aoffert à M. A. des services professionnelsqui ont contribué à lui procurer un plusgrand sentiment d’autonomie vis-à-visdes soins à prodiguer à sa femme.L’approche pluridisciplinaire et le planindividuel préparé pour Mme A. ont pro-longé sa participation active au pro-gramme axé sur la santé, le bien-être, lesinteractions sociales, les loisirs, etc.Finalement, la collaboration avec lesexperts et les spécialistes médicaux ontpermis aux besoins changeants de MmeA. d’être adéquatement évalués, traités etpris en charge, rapidement et de façonglobale.

Exemple nº 2 : Mme B.Mme B. est une femme de 54 ans, divor-cée, mère de deux enfants, qui a étéadressée au centre de jour par une clini-que de la mémoire de sa communauté. Lapatiente résidait avec sa mère de 80 ansqui prenait soin d’elle. Mme B. a étéadressée au programme en raison de soncomportement perturbateur et des soinsdont elle avait besoin alors que sa mèretravaillait toujours à l’entreprise familialeà partir de leur domicile. La famille avaitbesoin de répit et d’aide pour comprendreet trouver des solutions.

Initialement, Mme B. se présentait aucentre de jour bien mise et ne manifestaitaucun signe d’incontinence. Peu de tempsaprès, l’équipe a constaté que la patienteavait des comportements obsessifs rela-tivement à la nourriture et qu’elle man-geait exagérément. Mme B. apportait desoignons et des pommes de terre crus etd’autres aliments de chez elle pour gri-gnoter pendant qu’elle était au centre.

Pour réagir au comportement obsessif dela cliente vis-à-vis de la nourriture,l’équipe a adapté l’environnement phy-sique du centre en verrouillant la porte dela cuisine et en supervisant Mme B.lorsqu’elle se trouvait en présence denourriture. Ces mesures ont également étérecommandées à la famille lorsque MmeB. se trouvait à la maison.

L’équipe a constaté qu’en plus de tropmanger, Mme B. commençait à montrerdes signes d’incontinence urinaire et unedifficulté grandissante à s’exprimer.

Alors qu’elle participait aux activitésdu centre de jour, Mme B. est devenue deplus en plus dérangeante lors des activitésde groupe : elle pouvait se mettre àchanter à voix haute durant les activités età marcher de long en large constammentdans les locaux du programme. Un mem-bre du personnel lui a été assigné pourqu’elle puisse s’adonner à des activitésindividualisées, par exemple à de l’arti-sanat, à des jeux, à de la musique, adap-tées à ses besoins et à son horaire. Elleavait en outre la possibilité de déambuleravec un membre du personnel dans lesecteur réservé au centre de jour pouratténuer son anxiété et combler sonbesoin de marcher. Les besoins et lesobjectifs thérapeutiques pour Mme B. fai-saient l’objet de discussions bihebdo-madaires lors des réunions de révision decas avec l’équipe pluridisciplinaire et ilsétaient révisés tous les mois par son neu-rologue durant les rencontres de l’équipe.

À plusieurs reprises, l’équipe a ren-contré la famille de Mme B. afin de s’as-surer qu’elle bénéficiait du soutien et del’enseignement nécessaires. L’équipe detravail social et de soins infirmiers a cons-taté que la mère de Mme B., son aidantenaturelle, refusait de recevoir de l’aide àdomicile, qu’elle ne respectait pas les prescriptions rédigées pour Mme B. etqu’elle semblait se méfier des profession-nels de la santé. En observant le com-portement de la mère de Mme B.,l’équipe a en outre vu qu’elle niait lesproblèmes de comportement et d’inconti-nence et la piètre hygiène de sa fille. Lestravailleuses sociales et les infirmières ducentre de jour ont été quelque peudéroutées lorsque la mère de Mme B. a refusé l’aide offerte pour l’hygiène

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personnelle de sa fille, malgré les recom-mandations et l’aide proposée pour s’orienter auprès des services communau-taires appropriés. Les travailleuses so-ciales ont réagi en prenant contact avecles autres membres de la famille afin detrouver des solutions pour que la mère deMme B. comprenne et accepte l’aideofferte. L’équipe a travaillé en collabora-tion avec la Baycrest Ross Memory Clinicet le neurologue de Mme B. pour rencon-trer la famille. Et bien que la famille aitété informée des besoins changeants deMme B., du soutien requis et des objectifsthérapeutiques visés, elle a continué depasser outre aux recommandations.

En dépit du travail proactif constantde l’équipe et des recommandations for-mulées à la famille, des comportementsnon sécuritaires ont été observés. Parexemple, on a laissé Mme B. seule dansune voiture. Elle en est descendue, adéambulé et est restée introuvable pen-

dant huit heures. Ensuite, l’état de MmeB. a continué de se dégrader et elle adéveloppé un problème d’incontinencefécale. L’infirmière du centre de jour arecommandé une routine pour Mme B.afin de corriger ce problème, mais la mèren’a pas suivi les recommandations. Enraison de sa piètre hygiène à la maison,Mme B. a développé une cellulite et uneinfection urinaire. L’infirmière du centrede jour a reconnu ces infections avantqu’elles ne s’aggravent et Mme B. a ététraitée de façon appropriée. L’équipe aorienté la famille pour l’hospitalisation dela cliente dans une unité spécialisée enneurologie du comportement afin d’éta-blir pour elle un plan de traitement phar-macologique viable. Les travailleusessociales ont également reconnu les pro-blèmes d’interdépendance de Mme B. etde sa mère et les ont aidées toutes lesdeux à trouver un lieu de résidence et desconditions de vie mieux adaptées.

Dans ce cas, l’équipe est parvenue àplusieurs résultats positifs à la suite d’unecollaboration étroite avec les programmesde ressources et d’autres intervenants pro-fessionnels. Ce partenariat a rappelé l’im-portance d’une approche intégrée face àun aidant qui a du mal à accepter le dia-gnostic et le pronostic de la personne ma-lade. Moyennant certaines modificationsapportées au centre de jour et uneapproche constante de modificationscomportementales, Mme B. a pu fréquen-ter le centre de jour et bénéficier de lastimulation et des activités qui lui étaientoffertes.

Après un certain temps, il a fallu serésigner à placer Mme B. Au moment derédiger cet article, Mme B. vivait dans uncentre hospitalier de soins de longuedurée où il était plus facile de veiller à sasécurité et de répondre à ses besoins sur leplan de la santé.

Exemple nº 3 : M. C.M. C. avait été un homme d’affaires sep-tuagénaire prospère, actif et bien connuau sein de sa communauté. En bonneforme physique, il paraissait plus jeuneque son âge, aimait pousser une bonneblague et était généralement cordial avecson entourage. Lors de la rencontre d’évaluation de M. C., Mme C. a puexprimer les frustrations qu’elle éprou-vait en tant qu’aidante et renseignerl’équipe au sujet des comportements dif-ficiles de son époux. Ils sont résumés auTableau 1.

Lors de sa première visite au centre dejour, l’équipe a reconnu que le compor-tement de M. C. était gravement désinhi-bé. Il posait des gestes inconvenants àl’endroit du personnel et de la clientèleféminine, faisant des remarques à conno-tation sexuelle ou blessantes, faisantdélibérément trébucher les gens etdérangeant les activités de groupe.

La famille a clairement indiqué àl’équipe qu’elle était très motivée àgarder M. C. à la maison, dans la commu-nauté. Elle comprenait très bien la naturede la DFT dont M. C. souffrait, mais avaitbesoin d’autres types de renseignementspour savoir comment gérer son comporte-ment. Le centre de jour a communiquérégulièrement avec d’autres ressources,par exemple la Baycrest Ross MemoryClinic et un psychologue, pour travailleravec la famille afin de mettre au point lameilleure stratégie de gestion comporte-mentale13.

À l’aide de cette approche, qui in-cluait certaines modifications à l’environ-nement alliées à un schéma pharma-cologique, le comportement de M. C.s’est amélioré. L’équipe a découvert quel’un des déclencheurs du comportementinapproprié de M.C. était une surtimu-lation causée par la présence de beaucoupde gens. L’équipe a adapté l’environ-nement ambiant pour répondre à cebesoin en excluant ce patient des activitésréunissant des groupes nombreux et en luioffrant des activités individuelles plusstructurées, par exemple des partiesd’échec et des conversations portant surses voyages, son travail et ses expériencesde vie. L’équipe a conseillé à Mme C.d’éviter de l’exposer à des groupes nom-breux à la maison et dans la communautéet a établi des limites claires à l’arrivée deM. C. au centre, en passant en revue lesrègles de conduite acceptées dans le con-texte du programme. L’équipe a participéà l’évaluation périodique des stratégiesutilisées et des révisions y ont étéapportées au besoin. Les experts de laprise en charge de la DFT ont fourni unenseignement continu au personnel.

Les intervenants du centre de jour onttravaillé étroitement avec Mme C. quisouffrait de stress et de dépression clini-que, conséquences présumées du fardeauinhérent au rôle d’aidant naturel. Mme C.a été mise en contact avec un groupe de thérapie cognitivo-comportementale(TCC) spécifiquement à l’intention desaidants. Elle a pu y acquérir des stratégiesd’adaptation au stress14. Grâce à un plande soins élaboré par le personnel infir-mier et les travailleuses sociales, Mme C.a appris à corriger les comportements de

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Les tauopathies

Alors qu’elle participait aux activités du centre de jour, MmeB. est devenue de plus en plus dérangeante lors des activités degroupe : elle pouvait se mettre à chanter à voix haute durantles activités et à marcher de long en large constamment dansles locaux du programme.

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La Revue canadienne de la maladie d’Alzheimer et autres démences • 21

M. C. à la maison et à fixer ses limitesavec lui.

Après une année de fréquentation ducentre de jour, on a offert à M. C. un litdans un établissement de soins de longuedurée, mais Mme C. a refusé. L’équipe ducentre de jour a travaillé avec la famillepour trouver une solution à long termesusceptible de permettre à M. C. de conti-nuer de vivre à la maison avec son épou-se. Sur la recommandation de l’équipe,M. C. a été admis à l’unité d’hospitalisa-tion en neurologie comportementale.Après cette hospitalisation, le comporte-ment de M. C. s’est révélé plus gérable etMme C. a par la suite pu le faire participerplus souvent à des réunions et des acti-vités sociales.

En utilisant une approche comporte-mentale systématique et cohérente met-tant à contribution tout le personnel et lesmembres de la famille, il a été possible deretarder l’institutionnalisation du patient.M. C. a pu fréquenter le centre de jour oùil a participé à des activités intéressantes.

Dans ce cas-ci, l’équipe a trouvé quel’état de santé de M. C. s’était amélioréaprès les interventions du groupe d’en-traide, l’enseignement, les techniques degestion du comportement et le répit. Enorientant Mme C. vers le groupe de théra-pie cognitivo-comportementale, on lui adonné la possibilité de participer auxactivités d’un groupe d’aidants aux prisesavec des difficultés similaires auxsiennes. Ce groupe de psychothérapie l’aaidée sur le plan de la résolution des pro-blèmes, de la gestion du stress inhérent aurôle d’aidant et de l’amélioration de sescapacités d’adaptation.

Analyse des avantages pour lesclients atteints de DFT et leurfamilleSelon les données recueillies au quotidienauprès des clients et des aidants du centrede jour, il y a lieu de croire que les ser-vices et activités du centre exercent unimpact favorable sur les clients et leurfamille. Les secteurs sur lesquels l’impactsemble le plus grand sont notamment : lerépit pour les aidants, l’enseignement auxfamilles et aux aidants, l’utilisation destratégies de modification du comporte-ment, l’aide pour accéder aux services,

l’orientation au sein des systèmes et lacréation de partenariats.

Répit. Beaucoup de choses ont étéécrites sur les effets positifs du répit pourles aidants15. Ces répits donnent auxaidants l’occasion de voir à leurs propresbesoins : se reposer, s’acquitter des tâ-ches quotidiennes, s’adonner à des acti-vités de loisirs et recevoir une aide. Unaidant a affirmé être capable de fréquenterle gym et de se détendre avec un livre,alors qu’il n’avait pas eu le temps de liredepuis des années. Un autre a profité durépit pour recommencer à pratiquer desactivités de loisirs, par exemple la pein-ture, des réunions entre amis ou lafréquentation de clubs sociaux. Sonhumeur s’en est trouvée améliorée.

Enseignement. L’aide pour l’accèsaux ressources et l’enseignement auxfamilles et aux aidants de patients atteintsde DFT sont des éléments essentiels duprogramme de jour. L’interdisciplinarité

de l’équipe offre la possibilité de ren-seigner les gens sur le processuspathologique, les activités de la viecourante, la gestion du comportement, lesfugues, la sécurité, la stimulation à domi-cile et la planification à long terme. Parexemple, M. A. a appris comment trans-férer sécuritairement son épouse et com-ment la nourrir sans danger; il peut enoutre reconnaître rapidement les signes dedétresse, le cas échéant.

L’équipe du centre de jour confirmel’importance de renseigner les famillessur les questions de sécurité, le risque defugue, le risque d’aspiration et autresmenaces pour la santé associées à unepiètre hygiène et à des soins inappropriés,le tout contribuant à préparer les familleset les aidants à faire face à des situationsde crise et à planifier à long terme.

Orientation au sein des systèmes. Lesprofessionnels du centre de jour sont

facilement accessibles et orientent lesfamilles à chaque étape de la maladiepour les aider à résoudre les problèmes àmesure qu’ils surviennent. Les consulta-tions nécessaires sont demandées auprèsdes spécialistes, comme les neurologues,les gériatres et les psychiatres. Étantdonné que le centre de jour est situé àl’intérieur d’un établissement de santé,les clients ont accès à d’autres profession-nels, par exemple en audiologie, en ortho-phonie, en ophtalmologie, en médecinedentaire et en podiatrie. Le personnel ducentre de jour appuie de façon proactiveles aidants en les orientant efficacementdans les méandres du système de santé eten leur facilitant l’accès aux servicesappropriés, tandis que l’équipe de travailsocial met les familles en contact avec lesservices de soins à domicile locaux etprovinciaux et les aide à planifier lessoins à long terme. Les familles de clientsatteints de DFT ont accès à un counseling

pour vivre le deuil, à des interventions entemps de crise et à de l’aide pours’adapter aux changements rapides, selonle cas.

Partenariats. Le personnel du centrede jour travaille en partenariat avec lesprogrammes à l’intention des patientshospitalisés et ambulatoires afin departager l’information, fixer des objectifscommuns et planifier les soins. Les ren-contres médicales mensuelles fournissentl’occasion de partager des observationssur les comportements et l’évolution desclients et d’identifier les lacunes àcombler au chapitre des soins. À partirdes discussions de l’équipe, des ajuste-ments peuvent être faits au traitementpharmacologique et on peut adresser desdemandes de consultation auprès de spé-cialistes et autres experts pour améliorerconstamment le fonctionnement desclients. Les partenariats sont en outre

Programme d’un centre de jour communautaire

En dépit du travail proactif constant de l’équipe et desrecommandations formulées à la famille, des comportements

non sécuritaires ont été observés. Par exemple, on a laisséMme B. seule dans une voiture. Elle en est descendue, adéambulé et est restée introuvable pendant huit heures.

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22 • La Revue canadienne de la maladie d’Alzheimer et autres démences

Les tauopathies

propices à résoudre les problèmes et lescrises, à surmonter les obstacles auxchangements vécus par les familles,puisqu’ils leur offrent des conseils d’ex-perts, un accès à l’information et des con-naissances globales sur les optionsoffertes.

Évaluation constante duprogrammeLe centre de jour a à cœur de toujoursmieux comprendre les lacunes à combler,les besoins changeants sur le plan dessoins et leur impact sur les clients atteintsde DFT et leur famille. Un système d’éva-luation est en cours d’élaboration, maisinclut déjà le suivi des besoins des clients,les nouvelles demandes de consultation,les obstacles à l’admission au centre de

jour et l’évaluation de la participation desclients aux programmes individuels.Lorsqu’un nouveau client atteint de DFTdébute, un certain nombre d’outils sontappliqués pour bien cerner sa situation debase et des suivis sont effectués tous lestrois à six mois. Les outils employés parl’équipe incluent le Frontal BehavioralInventory16, la Zarit Burden Interview17

et un outil maison, qui est un formulaired’observation du comportement et de laparticipation au programme. Un comitéd’évaluation pluridisciplinaire se réunitrégulièrement et revoit les objectifs duprogramme, identifie les lacunes àcombler et propose certains ajustements.L’équipe a reconnu l’existence de pro-blèmes relatifs au transport et aux heuresd’accès. On étudie donc à l’heure actuelle

d’autres options de transport pour lesclients qui vivent à l’extérieur de la zonedesservie par le programme.

SommaireLe centre de jour fournit non seulement durépit aux aidants, mais offre en outre auxclients atteints de DFT des occasions destimulation et de socialisation. Les clientsont accès à une gamme complète d’expertset de ressources, y compris une équipemultidisciplinaire qui identifie et surveilleles problèmes de santé et de sécurité avantqu’ils ne se transforment en situation decrise. Il faudra toutefois approfondir larecherche pour évaluer de façon formellela portée et les avantages du centre de jourpour les clients atteints de DFT.

Tableau 1

Liste sommaire des préoccupations formulées par Mme C. au sujet du comportement de M. C.

Comportement Présentation du comportement Émotion éprouvée par l’épouseObscénités et langage cru Fait des descriptions inappropriées des

fonctions de l’organisme

Dénigre les gens

Embarras

Conversation répétitive et inappropriée

Répète les mêmes phrases

Divulgue des renseignementspersonnels

Ennui et frustration

Agressivité, par exemple en prenant le courrier ou au téléphone

Déchire ou jette des objets, parexemple le courrier ou des documentslorsqu’il est contrarié

Prend le combiné et parle de sexe avecles interlocuteurs

Anxiété et humiliation

Comportement non sécuritaire enautomobile ou durant le transport

Formule des commentaires sur laconduite automobile et incite à frapperles piétons

Tente de descendre de l’auto en marche

Anxiété et inquiétude

Impolitesse envers les visiteurs et lesétrangers

Formule des commentaires et desquestions blessantes

A la main baladeuse

Épuisement, réduction des interactions sociales

Projection d’objets Lance des objets de façon inappropriée Embarras et stress

Désorientation spatiale Semble désorienté dans la dimensionspatiale

Rêve qu’il donne des coups de piedsviolents

Solitude (dort seule), insécurité

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La Revue canadienne de la maladie d’Alzheimer et autres démences • 22.1

Programme d’un centre de jour communautaire

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La Revue canadienne de la maladie d’Alzheimer et autres démences • 23

Au sein d’une famille, le conjointaidant ou le proche aidant s’occupe

des soins de santé et des besoins sociauxdu conjoint ou du proche atteint d’unemaladie chronique ou invalidante. Cetteprestation de soins par un membre de lafamille peut durer des années selon lestade et l’évolution de la maladie et selonles ressources de la famille pour répondreaux besoins du malade. Une proportionimportante du temps consacré aux soinsconsiste à fournir de l’assistance pourl’accomplissement des activités quoti-diennes (AVQ) et pour prendre en chargeles activités instrumentales de la vie quo-tidienne (AIVQ). Parmi les autres acti-vités étant des sources de stress et nefaisant pas partie des AVQ ni des AIVQ,on note le soutien affectif, la camara-derie et la stimulation sociale (soutieninterpersonnel). L’effet cumulatif de ces

exigences incessantes qui mobilisent lesressources physiques et émotionnelles del’aidant entraîne la détérioration de sonbien-être global et une incapacité crois-sante à prendre soin de son conjoint, cequi aboutit au placement prématuré dansun établissement.

Les conjoints aidants d’une personneatteinte de DFT assument en grande par-tie les mêmes tâches que les conjointsaidants des personnes atteintes d’autresdémences. Toutefois, leur situation diffèreà cause du début précoce et insidieux dela DFT et des changements dramatiquesde la personnalité du conjoint, par exem-ple des comportements interpersonnelsinappropriés, aussi bien dans le contextefamilial que dans d’autres contextes.

Toile de fondLes conjoints aidants des personnesatteintes de DFT doivent relever des défisnombreux et complexes à cause de l’ap-parition hâtive de la maladie (entre 45 et65 ans), des manifestations comporte-mentales de la DFT (désinhibition, con-duites sociales inappropriées, réactionsbizarres, impulsives, incongrues ou atypi-ques). Au premier stade de la DFT, ledéclin de la fonction cognitive préoccupe

moins que les symptômes de type psy-chotique. Par conséquent, les conjointsaidants de personnes atteintes de DFTdoivent souvent s’engager dans un longprocessus de multiples consultations psy-chiatriques et neurologiques avant que lediagnostic soit enfin établi. Cette périodeen est une de stress intense, car la person-nalité du conjoint malade se transforme,la relation conjugale s’en trouve dévastée,les proches et les amis s’éloignent, lesproblèmes financiers s’accumulent et l’espoir de l’amélioration de l’état duconjoint s’amenuise.

Le conjoint aidant est soumis à desniveaux de stress accrus, ce qui contribueà l’apparition de problèmes physiques etpsychologiques comme l’insomnie, lafatigue, l’anxiété, la dépression, des réac-tions immunitaires anormales, et par con-séquent, à la prise plus fréquente de psy-chotropes1,2. Des études montrent quel’aggravation du stress chez l’aidant s’ac-compagne de l’apparition de problèmessociaux et de troubles psychiatriques3. Lamédiane du taux de dépression chez lesaidants est de 22 %, comparativement à11 % chez les personnes âgées dans lacollectivité qui n’assument pas un rôled’aidant2.

Une nouvelle technologie pour relierpar Internet les conjoints aidants despersonnes atteintes de démencefrontotemporaleLes personnes qui prennent soin d’une conjointe ou d’un conjoint atteint de la variantecomportementale de la démence frontotemporale (DFT-vc) ne semblent pas avoir accès auxmêmes ressources ou services ni avoir autant de temps que les aidants dont le conjoint estatteint de démence. Un nouveau site Web pourrait aider ces aidants à avoir accès aux services età obtenir l’assistance dont ils ont besoin par le truchement d’Internet.

Par Elsa Marziali, Ph.D. et Renee Climans, MTS

Elsa Marziali, Ph.D.Scientifique principale, Institut KLARU Rotman, Baycrest

Renee Climans, MTSTravailleuse sociale,Baycrest

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Les tauopathies

Les interventions sont utiles aux con-joints et proches aidants. L’examen desétudes d’intervention auprès des aidants,en particulier des aidants prenant soind’une personne atteinte de démence,montre que les divers modèles d’interven-tion (psychoéducatifs, psychosociaux,interventions faites directement dans unétablissement de santé ou au domicile desaidants) ont conféré d’importants bien-faits. Ces interventions ont soulagé ladétresse psychologique, la dépression,augmenté la satisfaction et les connais-sances de l’aidant et atténué les symp-tômes de la personne malade4-6. En outre,plusieurs études montrent que les inter-ventions psychosociales retardent leplacement dans un foyer de soins7-9 etque les interventions de plus longue duréeont un effet bénéfique plus grand chezl’aidant et chez le patient que les inter-ventions brèves.

Vu le risque élevé de répercussionsdéfavorables sur la santé des aidantsd’une personne atteinte de démence, lesystème de soins de santé devrait s’atta-quer à ce problème en offrant un soutienpsychosocial pour apprendre à l’aidant às’adapter au fardeau de la prestation dessoins à un proche dépendant; il faut

notamment renseigner l’aidant sur la maladie et lui apprendre à s’acquitter decertaines tâches reliées aux soins de santéen l’aidant à acquérir des compétencesparticulières. Le rôle d’aidant n’est pasassumé par choix, mais par défaut. Lesaidants conjoints considèrent la prestationde soins de santé comme un prolonge-ment de leur rôle de conjoint.

Même si les agences de services desanté et de services sociaux apportentaide et soutien aux proches aidants despersonnes atteintes de démence (princi-palement la maladie d’Alzheimer), il fautdéplorer la rareté des programmes deservices pour répondre aux besoins parti-culiers des aidants auprès des personnessouffrant de DFT. Qui plus est, pour béné-

ficier de ces programmes, il faut assisteraux activités durant les heures normalesd’affaires, ce qui empêche souvent lesaidants d’une personne atteinte de DFTd’y assister, car ces personnes ont unemploi, assument la pleine responsabilitédu ménage et s’occupent seules desenfants. Les rares programmes spécialisésofferts aux conjoints aidants dans la DFTsont offerts dans les grandes villes et, parconséquent, inaccessibles aux familleshabitant dans les petites villes, municipa-lités et villages.

Le programme d’intervention parInternet à l’intention des conjoints aidantsd’une personne atteinte de DFT a pourbut de rendre ce service facilement acces-sible, peu importe le lieu, d’offrir deshoraires qui conviennent aux participantset de reproduire les groupes d’entraide etd’information par rencontre personnellequ’on trouve dans les cliniques de santécommunautaires.

Programme d’interventionL’étude de faisabilité d’un groupe de sou-tien par vidéoconférence virtuelle à l’in-tention des aidants des personnes atteintesde DFT visait deux objectifs : a) évaluerles réactions à l’utilisation de la technolo-

gie pour avoir accès à un programme deservices de santé; b) examiner les effetssur les critères de jugement d’un modèled’intervention fondé sur un groupe desoutien et d’éducation par vidéocon-férence virtuelle à l’intention des con-joints aidants des personnes atteintes deDFT. Nous décrivons au Tableau 1 lesobjectifs de la session en ligne.

L’étude a été menée à l’hôpitalBaycrest, immense complexe urbain deservices de santé aux adultes âgés. Sixconjoints aidants auprès de personnesatteintes de DFT ont été recrutés pour former deux groupes; tous les conjointsmalades avaient reçu un diagnostic de DFT-vc. Nous avions choisi ce groupe d’aidants parce que la variante

comportementale de la DFT s’avère laplus difficile et la plus exigeante à pren-dre en charge.

L’étude avait pour but d’offrir un pro-gramme d’intervention spécialisé pourrépondre aux besoins particuliers des con-joints aidants de personnes atteintes deDFT-vc. Tous les participants ont étéinterviewés à la fin du programme d’in-tervention pour connaître leurs réactionset leurs commentaires à propos de l’utili-sation d’un service de santé par le truche-ment d’Internet et pour déterminer si cetteintervention avait été bénéfique.

La technologieTous les participants savaient utiliser unordinateur et naviguer sur Internet. On aremis à chaque participant le manuel inti-tulé Caring for Others Web Site ComputerTraining Manual© expliquant la marche àsuivre pour avoir accès au site Web et l’utiliser10,11; on leur a également remisdes caméras Web et des casques d’écoute,si nécessaire.

Le site Web a été construit en tenantcompte des lignes directrices d’utilisabi-lité8, qui précisent les critères de concep-tion pour un site destiné à des adultesâgés, par exemple en utilisant des icônesde grande taille, faciles à repérer, despages dépouillées aux contrastes decouleur subtils et en réduisant au mini-mum le besoin d’utiliser le clavier. Lecontenu du site Web et les liens vers lescomposantes sont décrits au Tableau 2.

La composante vidéoconférence com-prend une fenêtre active au centre del’écran et entourée des images vidéo desparticipants et de l’animateur. Durant lesdiscussions de groupes, tous les partici-pants peuvent voir et entendre la person-ne qui apparaît dans la fenêtre active.Chaque participant clique sur l’icône « parler » lorsqu’il souhaite prendre laparole, et l’animateur place alors ce par-ticipant dans la fenêtre active. La page dela vidéoconférence affiche un tableau demessagerie instantanée qui permet auxparticipants d’échanger leurs commen-taires durant la session.

Afin de protéger la sécurité des utili-sateurs et du contenu du site, le site WebCaring For Others est accessible seule-ment par l’intermédiaire d’un mot de

Le rôle d’aidant n’est pas assumé par choix, mais par défaut.Les aidants conjoints considèrent la prestation de soins desanté comme un prolongement de leur rôle de conjoint.

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passe unique à chaque participant. Parconséquent, le site n’est pas, et ne serajamais disponible dans le domaineInternet public. Les trois niveaux de sécu-rité sont les suivants : l’administrateur dusite a accès à tous les liens et à tous lesgroupes d’utilisateurs; les professionnelsde la santé-animateurs ont accès auxmembres des groupes qu’ils animent; lesparticipants ont accès aux membres deleur propre groupe seulement. Tous lescourriels, les textes des fils de discussionet les séances des vidéoconférences sontencodés et archivés sur le serveur.Ensuite, toutes ces données sont gravéessur des cédéroms et archivées dans desclasseurs verrouillés à des fins d’analyse.Une fois les analyses de données ter-minées, toutes les données électroniquessont détruites.

Groupe de soutien en ligne desaidants des personnes atteintes deDFTLa vidéoconférence virtuelle, un modèled’intervention de groupe, comprend 10séances hebdomadaires d’une heure ani-mées par un professionnel de la santé spé-cialement formé. Le guide de l’animateur(FTD Support Group Intervention Trai-ning Manual©) a été élaboré en tenantcompte des données sur l’efficacité desgroupes d’intervention destinés auxaidants de personnes atteintes de démenceet il a été adapté pour répondre aux besoinsparticuliers des aidants des personnesatteintes de DFT. Après les 10 séances ani-mées, les membres du groupe continuentde se rencontrer chaque semaine pendant10 semaines additionnelles au cours desessions d’autoassistance, et un membredu groupe s’occupe des aspects techniquesde la vidéoconférence. Pendant toute cettephase d’autoassistance du programme, legroupe peut demander au besoin l’opiniondu professionnel de la santé qui anime cegroupe.

Pendant la première session, chaquemembre du groupe est invité à se présenteret à expliquer comment il perçoit les cir-constances dans lesquelles il dispense dessoins, notamment en décrivant l’état desanté de la personne malade dont il s’oc-cupe. Les membres du groupe écoutentattentivement et ils essaient de faire des

parallèles entre leur propre situation etcelle d’autrui. Certains membres éprou-vent parfois le besoin de vérifier si legroupe permet de discuter en toute con-fiance de la maladie de leur proche, car lesexpériences vécues dans leur milieu neleur ont pas toujours donné l’impressiond’être compris ni soutenus. D’autres mem-bres du groupe affirment se sentir isolés etstigmatisés à cause de la maladie de leurconjoint et ils ressentent de l’embarraslorsque leur conjoint malade les accompa-gne dans des rencontres sociales; d’autresexpriment leur désintérêt pour les activitéssociales à cause des troubles du comporte-ment de leur conjoint malade.

Les membres du groupe font égale-ment part de leurs difficultés à parler deleur conjoint malade avec leurs prochesou leurs amis en disant, par exemple :

« Même mes amis les plus proches nepeuvent comprendre ce que je vis ». Lareconnaissance de cette réalité « que noussommes dans la même situation parce quenous vivons des expériences semblables »cimente le groupe et le convainc de faireconfiance à l’animateur.

Un des buts de l’intervention est desoutenir les aidants dans leurs efforts pourprendre soin d’eux-mêmes. On les aide,par exemple, à comprendre comment lafaçon dont chacun gère ses émotions ettraite l’information influe favorablementou défavorablement sur les comporte-ments reliés à la préservation de la santé.L’animateur témoigne de l’empathie à

l’égard de l’anxiété, de la tristesse et dusentiment d’impuissance du participant,des émotions que ressentent en généralles personnes qui se rendent compte queleur vie ne sera jamais plus la même. Lesmembres du groupe réagissent entémoignant spontanément de l’empathiel’un envers l’autre, en décrivant certainesréalités douloureuses que chacun vitparce qu’il prend soin d’une personneatteinte d’une maladie chronique. Lesobjectifs éducatifs de l’intervention degroupe sont atteints lorsqu’on répond auxquestions des membres au sujet du dia-gnostic et de la prise en charge de la personne atteinte d’une maladie dégé-nérative. Au cours de ces sessions, onexplique également les démarches pourobtenir les services de soutien à domiciledisponibles dans la collectivité.

Réactions des participantsÀ la fin des sessions d’intervention, lesaidants ont été interviewés et on leur ademandé de réfléchir à leur expériencecomme sujet d’une intervention virtuelleen santé.

Tous les participants ont exprimé desréactions très positives au fait d’avoiraccès à un groupe d’entraide par l’inter-médiaire d’un ordinateur et de l’Internet,compte tenu des pressions qu’ils subis-sent à cause d’un emploi à temps plein, dela gestion du ménage, de la nécessité derépondre aux besoins de leurs enfants (etparfois de leurs propres parents) et deprendre soin d’un conjoint ou d’une

Tableau 1

Objectifs de la session en ligne

1. Inciter chaque membre du groupe à raconter son histoire et sesexpériences personnelles

2. Faciliter la communication entre les membres du groupe

3. Apaiser les craintes des membres au sujet de la participation à cegroupe

4. Inciter les membres du groupe à partager leurs stratégies de résolutionde problèmes

Un des buts de l’intervention est de soutenir les aidants dansleurs efforts pour prendre soin d’eux-mêmes.

Relier par Internet les conjoints aidants

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Les tauopathies

conjointe souffrant de DFT. Les aidantsont déclaré qu’ils n’auraient pu joindre ungroupe d’entraide en milieu clinique,même s’ils avaient le plus grand besoin decette assistance.

Le plus grand bienfait qu’ont tiré lesaidants de leur participation à ce groupe aété de se rendre compte qu’ils n’étaientpas seuls à devoir gérer cette crise de viemajeure, que les autres qui vivent des situations semblables comprennent toutela gamme des émotions angoissantes quiles assaillent lorsqu’ils se rendent compteque leur conjoint ou leur conjointe neguérira jamais. Ils ont commencé à faireleur deuil de la perte de cette relation per-sonnelle et commencé à organiser leur viefamiliale autour de la gestion des défisquotidiens que posent les soins à dispen-ser à un proche atteint d’une maladie neu-rodégénérative.

Les participants ont affirmé que lesoutien émotionnel reçu des autres a étébénéfique et les a aidés à mieux surmon-ter les difficultés quotidiennes de prendresoin d’un conjoint en perte graduelled’autonomie et incapable d’accomplirdésormais les tâches courantes de la viequotidienne. Leur stress n’avait pas dis-paru, mais il leur semblait moins écrasant.Tous les participants ont appris des straté-gies pratiques pour répondre aux besoins

de leur conjoint malade, de leurs enfantset aux exigences de leur travail.

Les aidants ont également résolu lesproblèmes qui les empêchaient de prendrebien soin d’eux-mêmes, ce qui les aide àprévenir la détérioration de leur santéphysique et mentale. Comme l’a dit und’entre eux : « Je ne sais pas comment j’aurais survécu sans ce groupe – j’étaisvraiment sur le point d’abandonner et deplacer mon mari dans un établissement desoins. »

Les membres du groupe ont partagé del’information au sujet de la DFT qu’ilsavaient accumulée au fil du temps par leurscontacts avec des professionnels et parleurs propres observations. Ils se sentaientalors rassurés parce que leurs propresobservations correspondaient aux descrip-tions des autres membres du groupe quantà la nature et à l’évolution de la maladie.Plusieurs membres du groupe ont utilisécette information pour renseigner leursparents et leurs amis au sujet des manifes-tations de la DFT, en espérant qu’ils com-prendraient mieux et accepteraient leschangements chez la personne malade.

ConclusionsÀ l’avenir, les systèmes de soins de santédevront travailler de concert avec lesaidants en milieu familial en vue d’offrir

des services de soutien dans la collecti-vité aux personnes qui prennent soin d’unproche dépendant. Il faut veiller à ce quela famille qui assume le fardeau des soinsait une qualité de vie raisonnable et àretarder le plus longtemps possible leplacement dans un centre de soins delongue durée.

Compte tenu de l’utilisation grandis-sante de l’Internet pour obtenir de l’infor-mation sur la santé et du recours à la vidéo-conférence pour faciliter les consultationscliniques dans le cas de patients vivantdans des régions éloignées, la prochaineétape logique serait d’offrir des services desoutien et des consultations médicales auxproches aidants des personnes atteintesd’une maladie chronique. Une réunion parvidéoconférence destinée à un grouped’aidants qui prennent soin de personnesatteintes d’une maladie chronique facili-tera l’échange d’information ainsi que lesinterventions de soutien pour la prestationdes soins, et ce, à un coût beaucoup moinsélevé que celui des interventions en milieuclinique ou hospitalier. Aux yeux des con-joints aidants d’une personne atteinte deDFT, pouvoir avoir accès à de l’informa-tion sur les services de santé et obtenir dusoutien par le truchement de l’Internet étaitla seule option possible pour obtenir desservices d’une agence de soins de santé. Lagénération des baby-boomers sembleutiliser de plus en plus volontiers l’ordina-teur et naviguer facilement sur Internet; lesprogrès récents de la technologie et lessolutions informatiques pourraient égale-ment faciliter ces rencontres par vidéocon-férence entre les professionnels de la santéet les patients, qui reproduiront en grandepartie la consultation clinique en personne.

Par conséquent, il se peut que lerecours à la technologie pour offrir desservices au sein du système de santé devienne courant. Le cas échéant, l’acces-sibilité aux services en serait accrue, peuimporte les lieux géographiques et ellefaciliterait le déploiement de programmesde soutien fondés sur des résultats scien-tifiques à l’intention des patients et desproches qui prennent soin d’eux.

Tableau 2

Composantes du site Web

1. Hyperlien pour le courriel avec un menu déroulant comprenant les adressesde courriel des membres du groupe et les professionnels de la santé

2. Un fil de discussion

3. Un hyperlien pour une vidéoconférence pour la communication d’unepersonne à l’autre

4. Un hyperlien pour une vidéoconférence pour les réunions de groupe

5. Un manuel d’information sur une maladie en particulier8

6. Un hyperlien vers les ressources, comme des adresses de sites Webprésentant de l’information utile aux aidants qui prennent soin d’unproche atteint d’une maladie donnée12,13

Remerciements :Ce projet a été réalisé grâce à des subventions à la recherche offerte par CANARIE,Canada; les Laboratoires universitaires Bell à l’Université de Toronto; le Ministèrede la Santé et des Soins de longue durée de l’Ontario. Renee Climans a animé lesgroupes de soutien des aidants DFT en ligne.

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4. Kennet J, Burgio LD, Schulz R.Intervention for in-home caregivers: Areview of research 1990 to present. In:Schulz R. (éd.). Handbook of dementiacaregiving: Evidence-basedinterventions for family caregivers.Springer, New York, 2000, pp. 61-125.

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9. Chu P, Edwards J, Levin R, et coll. Theuse of clinical case management forearly stage Alzheimer’s patients andtheir families. Am J Alzheimers Dis

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Content Accessibility Guidelines 1.0.Disponible à :www.w3.org/TR/1999/WAI-WEBCONTENT-19990505. Consultéau mois de mai 2009.

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13. Marziali E, Damianakis T, Donahue P.Virtual support for family caregivers:theoretical framework, interventionmodel and outcome. Journal ofTechnology and Human Services 2006;24:39-54.

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Relier par Internet les conjoints aidants

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membre du comité au Manitoba, la députée JudyWasylycia-Leis, a fait écho aux commentaires et à l’en-gagement de M. Brown de faire des maladies neurologiquesune importante priorité.

Faites-vous entendreLa mobilisation peut prendre plusieurs formes. Elle peutvenir de gens atteints de la maladie, de leurs aidants ou deleurs proches ou de chercheurs et de professionnels de lasanté. Elle découle surtout des expériences du réseau per-sonnel de chaque individu pour faire en sorte que les choseschangent.

Chacun d’entre nous peut contribuer à influer sur lespolitiques susceptibles de modifier nos vies ou cellesd’autres Canadiens, simplement en exprimant son opinion,ou en partageant son expérience et son savoir-faire.

Vous pouvez faire votre part en écrivant à votre députéou en faisant parvenir une lettre au rédacteur. Consultezl’adresse www.alzheimer.ca pour utiliser notre outil en ligneou communiquez avec Patricia Wilkinson, responsable desrelations avec les médias et le gouvernement, à l’[email protected], pour d’autres façons de vousfaire entendre.

La Société Alzheimer est le principal organismede santé canadien pour les personnes atteintes dedémence au Canada. En plus de défendre leurcause auprès des instances gouvernementales etde leur offrir, ainsi qu’à leurs aidants et à leursfamilles, des soins et services de soutien de hautequalité, la Société est un des bailleurs de fonds lesplus importants en matière de formation et derecherche sur la maladie d’Alzheimer. Activedans plus de 140 communautés à travers leCanada, la Société est un membre clé de l’orga-nisme Alzheimer Disease International, au seinduquel elle participe à la lutte mondiale contre lamaladie d’Alzheimer et les affections connexes.

Pour obtenir de l’information additionnelle surl’étude Raz-de-marée : Impact de la maladied’Alzheimer et des affections connexes auCanada, sur la Société Alzheimer ou sur la façonde faire entendre votre voix et de défendre lesintérêts des personnes atteintes de la maladie,veuillez vous rendre à www.alzheimer.ca.

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Agir sur la démence maintenant,pendant qu’il en est encore temps

L’énorme impact de la maladie d’Alzheimer et autresdémences connexes sur la société canadienne est un pro-

blème de taille auquel le gouvernement doit s’attaquer main-tenant si nous voulons que les choses changent. C’est le mes-sage qui a été livré aux parlementaires à Ottawa ce printempspour tenter de promouvoir le développement d’une stratégiecanadienne pour la prise en charge de la démence.

Le 1er avril, la Société Alzheimer a été l’hôte de la réu-nion inaugurale d’un caucus de tous les partis sur le thèmede la démence. Y ont participé des députés et des sénateursde chacun des principaux partis. Premier d’une série, ce cau-cus contribuera à sensibiliser davantage les parlementairesaux problèmes de la démence et tentera d’influer sur la légis-lation et les politiques dans le but de faire de la démence unepriorité nationale dans le secteur de la santé.

Scott Dudgeon, le président de la Société, a présenté lesdonnées préliminaires de l’étude demandée par la Société etintitulée Raz-de-marée : Impact de la maladie d’Alzheimer etdes affections connexes au Canada. L’étude analyse l’impactde la démence en mettant l’accent sur le profil démographiqueet épidémiologique actuel de la maladie. Les données récentesde prévalence produites par cette étude ont été dévoilées enjanvier et d’autres données seront publiées au début de 2010et incluront de nouveaux renseignements sur l’impactéconomique et social de la maladie d’Alzheimer et autresdémences connexes.

Lors de la réunion, les participants ont été invités àréfléchir aux implications de ces nouvelles données sur lespolitiques et à conseiller la Société sur la direction à prendreune fois l’étude complétée et publiée. La Société leur a égale-ment demandé d’appuyer sa demande à la ministre de laSanté, Leona Agglukaq, pour la tenue d’un sommet nationalsur la démence. Le sommet proposé réunirait des membres duministère fédéral de la Santé et leurs homologues provinciaux

et territoriaux pour concevoir une stratégie coordonnée afin defaire face à l’épidémie de démence sur l’ensemble du territoirecanadien.

« Que signifierait faire de la démence une priorité nationaleau Canada en matière de santé? Un sommet national des gou-vernements fédéral, provinciaux et territoriaux qui s’enga-geraient envers une stratégie coordonnée pour lutter contre ladémence et améliorer la vie des personnes atteintes et de leurfamille », répond le Dr Dudgeon. « Ce sommet ferait en sorteque notre position collective soit respectueuse des diverses juri-dictions au Canada, miserait sur les stratégies émergentesactuelles relativement à la démence à l’échelle provinciale etinternationale et bénéficierait de l’appui de plans de mise enœuvre. »

Le Dr Bob Lester, un aidant de Toronto, s’est égalementexprimé à cette occasion en relatant son expérience person-nelle d’aidant auprès de son épouse atteinte de démence. « J’aitoujours cru que la pire chose qui pourrait arriver serait laperte d’un être cher. Je réalise maintenant que si une telleperte est douloureuse, le drame prend fin éventuellement et ilest possible de reprendre, jusqu’à un certain point, le cours desa vie », affirme-t-il. « Pour moi, voir l’état de Judy se dété-riorer lentement au fil des ans m’apparaît bien pire. Elle nepeut même plus accomplir les plus simples tâches. Elle seretire progressivement en elle-même. Elle ne nous reconnaîtplus, ni moi, ni nos enfants, ni nos petits-enfants. »

Le député ontarien Patrick Brown a clos la séance enremerciant la Société de son travail; il a brièvement témoignéde son expérience avec la maladie et affirmé qu’avec d’autresmembres du Comité permanent de la santé, il travaille à faireen sorte que les maladies neurologiques comme la démencedeviennent une priorité au sein de ce gouvernement. Une autre

« Alors que je me remémore mes appréhensions vis-à-vis des dangers qui menaceraient peut-êtreéventuellement les vieux jours de mon couple, je me rends compte que la perspective de la démence ne

m’avait jamais effleuré. À mesure que la population vieillit, ce périple sera partagé par des millions d’autrespersonnes qui, comme moi, constateront que le système de soins de santé n’est pas préparé pour prendre encharge des individus atteints de démence. Il faut agir maintenant avant que cette catastrophe humanitaire ne

vienne à bout de nos ressources en soins de santé. » Dr Bob Lester, aidant.

Des nouvelles de la Société Alzheimer du Canada

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