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La signification du «Discours de métaphysique »de Leibniz Author(s): André Robinet Source: Revue de Métaphysique et de Morale, 65e Année, No. 2 (Avril-Juin 1960), pp. 195-198 Published by: Presses Universitaires de France Stable URL: http://www.jstor.org/stable/40900487 . Accessed: 18/09/2013 22:34 Your use of the JSTOR archive indicates your acceptance of the Terms & Conditions of Use, available at . http://www.jstor.org/page/info/about/policies/terms.jsp . JSTOR is a not-for-profit service that helps scholars, researchers, and students discover, use, and build upon a wide range of content in a trusted digital archive. We use information technology and tools to increase productivity and facilitate new forms of scholarship. For more information about JSTOR, please contact [email protected]. . Presses Universitaires de France is collaborating with JSTOR to digitize, preserve and extend access to Revue de Métaphysique et de Morale. http://www.jstor.org This content downloaded from 160.94.45.157 on Wed, 18 Sep 2013 22:34:32 PM All use subject to JSTOR Terms and Conditions

La signification du « Discours de métaphysique » de Leibniz

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La signification du «Discours de métaphysique »de LeibnizAuthor(s): André RobinetSource: Revue de Métaphysique et de Morale, 65e Année, No. 2 (Avril-Juin 1960), pp. 195-198Published by: Presses Universitaires de FranceStable URL: http://www.jstor.org/stable/40900487 .

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La signification du « Discours de métaphysique »

de Leibniz

Alors que G. Le Roy avait pris pour but l'établissement historique des circonstances, avait relevé dans son détail le plan du Discours et de la Correspondance et annoté les paragraphes en renvoyant aux passages éclairants dans le reste de l'œuvre ' P. Burgelin part de ces renvois, pour établir un Commentaire précis du Discours de métaphysique.

P. Burgelin décrit dans son Introduction la dialectique des « images » leibniziennes qui se chevauchent dans le Discours, par lesquelles le phi- losophe traduit la médiation. Si toutes ces « images » sont indispensables pour trouver la clé de la position de Leibniz, aucune n'est suffisante. Si l'on s'arrête à l'image du Dieu-Prince, « Caligula céleste », ou à celle du Dieu mécanicien, Architecte de l'univers, on ne peut rendre compte de l'origine radicale des choses. Toutes les images sont en défaut dès qu'on aborde la question du commencement. Dieu ne trouve en face de lui aucun sujet à gouverner en Roi, aucune pierre à ordonner en architecte. L'analogie cesse dès que l'attribut créateur est en cause. Aucun homme, aucune anthropologie ne peut rendre compte de l'option première, car, pour tout homme, existence et existants se trouvent déjà donnés et ordonnés.

Face à l'inimaginable, le philosophe recourt à la notion pure pour sau- vegarder à la fois le caractère rationnel de l'acte créateur et la liberté divine. Mais une seule notion ne peut définir à la fois l'entendement sur lequel Leibniz met l'accent, et la volonté qui en exécute les plans. Si la cause de l'existence réside dans un acte souverain de Dieu, son fondement est à rechercher dans les dessins de la sagesse. Leibniz s'entoure ainsi d'un univers, où maximum d'être, meilleure ordonnance et félicité suprême

1. G. Le Roy, Paris, Vrin, 1957. 2. P. Burgelin, Paris, P. U. F., 1959.

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sont distingués par la philosophie, mais unis dans la foi. « Parce que Leib- niz essaie toujours de comprendre les réalités par tous les aspects, son langage ne saurait manquer de nous surprendre. Il affirme l'un là où nous ne saurions nous empêcher de voir le multiple » (p. 15).

L'œuvre se développe ainsi en entremêlant ces plans d'images dont on trouve l'analyse dans le Commentaire. La notion dont on part, « la plus reçue », bénéficie du prestige de la tradition, reçoit l'appui de la révéla- tion : la perfection est le plus essentiel des attributs. Cette notion se déve- loppe en sagesse et puissance dans l'ordre physique, en justice et misé- ricorde dans l'ordre moral, les deux ordres étant en harmonie. Le Dieu Prince, Architecte et Père, la puissance, l'omniscience et la bonté sont des anthropologies que Leibniz choisit à bon escient.

P. Burgelin remarque que la notion de substance est toute présente dans cet ouvrage. La définition logique et l'inhérence de l'accident, la définition physique et la considération de la force, la définition méta- physique et l'étude de ses enveloppements sont présentes à la fois. En restant au niveau de cette monado-tectomie, Leibniz savait laisser aux grands problèmes leur allure connue.

Tout en commentant la signification la plus plausible du texte, P. Bur- gelin fait appel à l'ensemble de l'œuvre pour préciser l'intelligibilité exacte de l'image. Il suit les filons notionnels qui sont discernables dans l'immensité des écrits leibniziens. Ces propositions ressemblantes lui permettent d'établir les variations et la permanence des significations, d'affiner l'analyse des concepts et de préciser les attaches du système. Chaque ligne du Discours se trouve ainsi éclairée par des lignes semblables que l'œuvre mçt à la disposition du commentateur. Les variations aident à mieux saisir l'individualité de la pièce étudiée, les ressemblances per- mettent de dégager les points forts du système.

Quel serait le postulat d'une telle méthode si on l'utilisait sans le dis- cernement du commentateur ?

De l'utilisation des charpentes systématiques proviennent dans l'édi- fication et dans l'étude des systèmes des difficultés. Leibniz admet le do- maine indéterminé d'une « pensée » qui ne « pense » pas, de la perception sourde où régnent les affects, de l'existence et du sentiment ̂uneasiness (angoisse, traduit-il en lisant Locke) qui accompagne constamment la conscience de soi. S'il y a une totalité de l'esprit humain, la pensée est donc loin de la représenter : elle n'en est que le revêtement superficiel. La durée, dit Leibniz pour la distinguer du temps, est liée à ce sentiment d'incommodité. La pseudo-éternité de « La Pensée » de tel philosophe est l'un des plus redoutables mythes de l'histoire de la philosophie.

Loin d'être uniquement tourné vers l'immanence des pensées, le com- mentaire de P. Burgelin précise quel est le rôle des tendances porteuses de l'histoire dans la constitution de l'œuvre. Son commentaire confirme la perspective décrite par G. Le Roy, et qu'impose le contexte culturel :

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le Discours répond à l'intention d'un dialogue ouvert. La question devient d'autant plus essentielle que les derniers articles du Discours visent à prouver la possibilité métaphysique du dialogue que l'œuvre postule. La communication des consciences permet d'entrevoir l'avène- ment du Règne des Esprits. Tous les esprits ont en commun d'exprimer Dieu. « Se voir aimée des autres » est pour une âme la plus haute satis- faction après le contentement qui résulte de l'amour de Dieu. Or, les per- fections de l'esprit ont cela de particulier qu'elles « s'e/iir'empêchent le moins », qu'elles « s'enir'aident », qu'elles « s'enir'expriment » plus intime- ment. Ce domaine de 1' ¿nier-communication fonde en vérité l'intention oecuménique. « Tout le mouvement de la création est fait pour préparer cette union spirituelle et par conséquent cette société des esprits. Tout le reste n'est qu'instrument.... Un des thèmes qui ouvraient le Discours revient donc, appuyé sur tous les développements intermédiaires » (Burgelin, p. 305).

P. Burgelin se réfère concrètement aux intentions conciliatrices de Leibniz : « En passant ainsi du Dieu créateur au Dieu Monarque, nous découvrons un Dieu qui se rapproche singulièrement des hommes, petits dieux, puisque nous saisissons notre ressemblance avec lui. Il souffre les anthropologies.... Il est humanisé aussi en ce qu'il est concerné par nous, puisque sa gloire est liée en un sens à la manière dont nous le glorifions.... Il s'établit dans l'univers une sorte de République où la félicité des citoyens devient la loi suprême de Dieu » (p. 310). Et c'est alors que P. Burgelin ajoute : « On sait que l'unité visible de l'Église et sa recons- titution ont été une des plus constantes préoccupations de Leibniz, et ce dessein oecuménique se rattache à sa philosophie de la manière la plus explicite » (p. 310).

Et ce rattachement n'est pas purement externe. N'est-ce pas, comme • l'étude des circonstances invite à le croire, le point précis où opère l'in- tention leibnizienne. : composer une théologie naturelle qui exprime rationnellement le contrat de base d'une éventuelle conciliation ? Tous les articles du Discours n'ont-ils pas, dès lors, subi l'attraction de ce champ intentionnel ? Les inflexions qu'on y décèle n'ont-elles pas leur origine dans cette volonté arrêtée de rédiger un texte acceptable par tous, à commencer par Leibniz lui-même ? « Toute la fin du Discours est faite d'emprunts au Nouveau Testament et surtout aux Évangiles, interpré- tés comme confirmation du Discours. Ils montrent à Arnauld que la phi- losophie leibnizienne a de quoi satisfaire le croyant comme le théolo- gien » (p. 316).

Les commentaires de P. Burgelin satisfont donc aux exigences de ceux qui attendent des éclaircissements immanents à l'œuvre. Ces explications, ces rapprochements, ce relevé des lignes notionnelles, sont indispensables, et les commentaires de P. Burgelin apportent aux plus difficiles un ensemble de citations pertinentes. Ils satisfont également ceux qui con-

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sidèrent que le vrai rationalisme procède d'une dialectique qui l'élève peu à peu jusqu'à l'unité radicale de l'esprit, en élaborant des paliers d'images qui se cristallisent en systèmes. Ils satisfont enfin ceux qui recherchent dans l'étude des textes la conjonction de l'existence et du système : les réflexions auxquelles incite cet ouvrage, aussi bien que celui de G. Le Roy, montrent qu'il n'y a qu'une histoire de la philosophie : celle qui ne cherche pas à couper la philosophie de son histoire et qui, par là, philosophe en faisant des travaux d'histoire.

André Robinet.

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