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La Zone de Boxe vol 15

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DESCRIPTION

En vedette, Mikkel Kessler et Lucian Bute, entrevue avec Pierre Bouchard, La page du boxeur avec Ariane Fortin, la boxe et ses blessures et les priorités du Groupe Yvon Michel. Le magazine La Zone de Boxe est un trimestriel dédié au noble art depuis septembre 2004.

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LA ZONE DE BOXE 2e Année, Numéro 15 2

Magazine La Zone de Boxe 2755 Clermont

Mascouche (Québec) J7K 1C1 [email protected]

Éditeur François Picanza Rédacteur en chef Pascal Roussel Collaborateurs Samuel D-Drolet Pascal Lapointe Akexandre Pelletier Karim Renno

Ariane Fortin Eric Breton

Correcteur/Réviseur Pascal Lapointe Mise en pages / Infographie Luc Lévesque Impression Promotions GABY 819-737-8119 Le magazine la Zone de boxe est publié six fois par an, fondé en 2004 à Mascouche par François Picanza. Ce magazine n’est disponible que par abonnement, au coût de 31,20 $ annuellement, ou gratuitement pour les membres du Conseil Québécois de Boxe.

Dépôt légal 3e trimestre 2006 Bibliothèque nationale du Canada

ISSN 1712-1744 La Zone de Boxe magazine

2e année, numéro 15 Printemps 2007

Photo :

3 – L’éditorial 4 – Le mot du médium format géant 5 – Combat Kessler-Bute 10 – Entrevue avec Pierre Bouchard 12 – Histoboxe 15 – Le jugement dernier 18 – La page du boxeur 20 – De qualifications en qualifications… en qualifications 22 - La boxe et ses blessures 25 - L’échelle de priorité de GYM 27 – Classements Québécois

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L’éditorial En page couverture se trouve Pierre Bouchard, l’un des hommes les plus effacés de la boxe au Québec et pourtant, l’un des plus important. Souvent lorsque les gens pensent entraîneurs de boxe au Québec les noms les plus connus tels Yvon Michel ou Stéphan Larouche viennent à l’esprit. Pourtant ces derniers sont dorénavant plus impliqués dans l’aspect promotionnel de la boxe que dans l’aspect préparation des boxeurs. Du côté du Groupe Yvon Michel ce sont les Marc Ramsay et Howard Grant qui s’occupent de la majorité des boxeurs. Chez Interbox Stéphan Larouche supervise toujours l’entraînement de Lucian Bute et de Benoît Gaudet mais la plupart des boxeurs de cette écurie s’entraînent sous la vigilance de Pierre Bouchard. C’est sous les conseils de ce dernier qu’Adrian Diaconu, un roumain à la tête dure s’il en est un, vient d’atteindre les sphères majeures de la boxe. Il me fait donc plaisir qu’un de nos reporters vous présente un petit portrait de « l’homme derrière les boxeurs ». Le magazine contient un nouvel élément cette fois-ci : Un combat virtuel entre deux vedettes des super-moyens. Ce genre d’exercice a été réalisé avec succès à de nombreuses reprises par mon bon ami Marc Ranger lorsque ce dernier collaborait avec le site Web de RDS. D’ailleurs les nostalgiques peuvent relire tout les combats décrit par Marc sur le forum de discussion de La Zone de Boxe dans la section : Combats virtuels. Marc Ranger n’étant plus disponible pour faire partager ce genre de combat avec les partisans du noble art, nous avons maintenant la chance d’avoir de nouveaux auteurs qui sont prêt à tenter l’expérience. Dans ce numéro vous pourrez lire l’affrontement fictif entre Lucian Bute et Mikkel Kessler. Bonne lecture! François Picanza Éditeur [email protected]

www.lefildepresse.com

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Le mot du médium format géant Ce numéro est tellement bien rempli que je ne perds pas plus de temps pour vous en parler! Pour la 15e édition du magazine, nous sommes à la fois inventeur et juge. Vous avez besoin d’explication, n’est-ce pas? Je suis prêt, sonnez la cloche pour un huit rounds! Premier round : Je dis inventeur car nous avons inventé un combat de toutes pièces! Comme nous étions trop impatients de voir un combat entre Lucian Bute et Mikkel Kessler, nous avons décidé de l’écrire. Vous pourrez lire notre version de ce combat s’il se déroulait bientôt. Deuxième round : Et pourquoi juge? Nous avons une chronique régulière qui s’intitule « Le jugement dernier », peut-être l’avez-vous déjà lue. Eh bien cette fois-ci, nous avons choisi un combat local, l’affrontement entre Stéphane Desormiers et Ian Mackillop qui a eu lieu le 19 mars dernier au Casino de Montréal, et nous avons décidé de trancher. Puisque les juges n’ont pu faire de maître, Karim Renno a revu le combat et jugé pour vous. Qui a vraiment gagné? Vous le saurez plus loin dans le magazine! Troisième round : Ariane Fortin, vous connaissez? Notre championne du monde chez les amateurs a accepté notre invitation de suivre l’exemple donné au dernier numéro par Antonin Décarie. Ariane a enlevé ses gants pour pouvoir utiliser le clavier de son ordinateur et nous fournir la deuxième édition de la chronique « La page du boxeur ». Exceptionnellement, ça sera la page de la boxeuse! Quatrième round : La boxe est évidemment un sport avec un grand risque de blessures. On ne joue pas aux quilles ou au curling ici! On se tape sur la gueule! On veut faire mal à son adversaire. Alors Samuel D.-Drolet a fait pour nous une recherche sur les blessures les plus courantes à la boxe. Allez, instruisez-vous. Cinquième round : Le Groupe Yvon Michel, c’est comme une équipe de football! Il y a des joueurs plus importants que d’autres. Mais ils ont une esprit d’équipe! Allez lire l’analyse de Pascal Lapointe, vous comprendrez. Sixième round : Nous avons eu la chance de rencontrer l’entraîneur Pierre Bouchard pour une courte entrevue quelques minutes avant le début du gala au Centre Bell du 24 janvier. Vous pourrez connaître le Pierre Bouchard d’avant et le Pierre Bouchard d’aujourd’hui! Septième round : La rubrique préférée de ceux qui aiment l’histoire de la boxe, notre chronique Histo-Boxe, écrite de main de maître par Alexandre Pelletier, nous revient dans ce numéro! Vous raffolerez de cette histoire de Jack Johnson, « le premier champion poids lourd noir de tous les temps, et de son règne tumultueux auquel l’ensemble de la société blanche américaine s’était juré de mettre fin. » Huitième round : Vous êtes un boxeur amateur? Vous voulez participer aux Jeux panaméricains? Aux Jeux Olympiques? Sachez que la route est longue et ardue, autant sur le ring que dans les coulisses! Pascal Lapointe va vous éclairer là-dessus. Bonne lecture!

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Le duel Kessler-Andrade ne pouvait qu'être bon. On savait que ce serait une guerre. Andrade n'allait pas reculer devant Kessler.

Après le combat, je ne savais pas qui m'avait le plus impressionné. Kessler a contrôlé le combat et atteint la cible avec une précision chirurgicale (49% de ses coups en puissance ont touché la cible!). Une telle efficacité est remarquable, mais elle ne me surprend pas de Kessler que je considère comme le meilleur super-moyen du monde. Mais comment expliquer qu'un boxeur qui reçoit un total de 348 coups dont 160 en puissance puisse avoir le visage intact après une telle raclée? Andrade n'avait aucune coupure, aucune enflure et ne semblait même pas ébranlé lors de l'entrevue sur le ring d'après-combat! Et je vous rappelle qu'il recevait les claques de Mikkel Kessler, pas d’Otis Grant! J'ai lu quelque part que quelqu'un avait surnommé Andrade « rubber face ». Ce nom lui va très bien. Alors si Kessler n'a pu ébranler Andrade malgré cette avalanche de bombes, je prédis que personne ne réussira jamais! En tout cas pas avec des gants de boxe. Faudra utiliser un poêlon ou une pelle ronde. Ou comme dise les commentateurs anglophones le kitchen sink!

Pascal Roussel Rédacteur en chef format géant

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Stade Parken, Copenhague

Combat virtuel Kessler-Bute Par Éric Breton et Pascal Roussel

Bute vs Kessler À Copenhague au Danemark Samedi, 16 février 2008 Vendredi, 15 février 2008 : la pesée

Nous sommes le vendredi 15 février 2008 à l'hôtel Copenhagen Admiral pour la pesée des boxeurs. Demain aura lieu au Stade Parken de Copenhague, devant une foule de 39 000 personnes, le combat attendu par tous les amateurs de boxe du monde, le duel d’unification entre le champion IBF des super-moyens, le Montréalais d’adoption Lucian Bute, et le champion WBC et WBA, Mikkel Kessler. Si Bute est ici aujourd’hui, c’est parce qu’il a d’abord vaincu aux points le Camerounais Sakio Bika au Centre Bell le 15 juin lors d’un combat éliminatoire. Ensuite le gagnant de ce premier combat a eu le privilège d’affronter Markus Beyer, titulaire IBF, le 6 octobre dernier en Allemagne. C’est par K.-O. que Bute a vaincu Beyer, au grand dam de Wilfrid Sauerland qui perdait ainsi le contrôle de la ceinture IBF des super-moyens, mais au grand plaisir de tous les Québécois qui ont vu Bute venger son patron Éric Lucas. Interbox a acheté les droits du combat pour le Canada afin de l’offrir à la télé à la carte et le

diffuser dans le réseau des Cages aux Sports.

Lucian Bute s’approche du pèse-personne. Larouche semble nerveux. L’instrument affiche un poids de 168 livres juste. On peut alors voir le soulagement dans les yeux de toute l’équipe Interbox, Bute ayant eu toute la misère du monde à atteindre ce poids. Il y a encore 10 minutes, Bute courrait sur un tapis roulant pour perdre la demi-livre qu’il avait de trop. Bute semble exténué et complètement déshydraté. Il prend tout de même le temps de faire quelques photos avec les photographes, une bouteille de boisson énergisante à la main. Les journalistes et photographes sont présents en masse. Le nombre de gens des médias provenant de l’Amérique du Nord est étonnant, si on considère que ce combat implique deux boxeurs ne venant pas du pays de l’Oncle Sam. C’est au tour de Kessler. Lui aussi semble complètement déshydraté. Il inscrit un poids précis de 168 livres. Les experts s’attendent à ce qu'il pèse 188 livres à son arrivée sur le ring demain soir. Il prend quelques photos avec Bute, dont le classique face à face, et quitte ensuite pour une petite salle adjacente où l’attend l’équipe médicale de Team Palle. Les Européens ont l'habitude de réhydrater leurs boxeurs par intraveineuse. Larouche regarde l’intérieur de la petite salle jusqu'à ce qu’un employé vienne fermer la porte aux regards indiscrets. Larouche ne sait trop quoi penser de cette pratique européenne. Réhydrater un boxeur par intraveineuse, est-ce une folie ou une brillante idée que les Nord-Américains devraient aussi adopter? L’entraineur de Bute ne peut s’empêcher de penser que Kessler vient de gagner la première bataille, celle de l’énergie. Samedi, 16 février : le combat À quelques secondes du combat, on peut sentir la frénésie. Les gens d’Interbox sont là. Sébastien Gauthier et Jo Jo Dan se sont battu en préliminaires. Éric Lucas est sur le bord du ring, avec ses partenaires d’affaires. Pour rien au monde il n’aurait raté ce rendez-vous. Quelque 25 mois plus tôt, c’est lui qui était sur le ring devant ce Viking. Dans son for intérieur, Lucas souhaite que les coups que Kessler va bientôt lancer seront moins dévastateurs et puissants que lors de son affrontement contre le Danois. Mais il sait bien que cela est impossible. Il sait que souhaiter que la jeunesse de Bute soit plus résistante face aux puissantes charges de Kessler est assurément plus sage. Et Lucas souhaite que Bute puisse atteindre Kessler assez régulièrement dès le début du combat afin que le duel Bute-Kessler ne ressemble pas au duel Lucas-Kessler. Le Viking s’était rapidement rendu compte que Lucas ne lui touchait que rarement, et que ces rares coups ne le dérangeaient pas du tout! Au centre du ring, les deux boxeurs se regardent droit dans les yeux. D’égale grandeur, les gladiateurs de ce championnat unifié des super-moyens tentent de remporter la première bagarre, soit celle de l’intimidation. L’arbitre lance « Let’s fight and good luck to both of you ».

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Bute champion de l’IBF

Rendu dans son coin, Bute reçoit les dernières consignes de son entraîneur Stéphan Larouche : « C’est ton soir! C’est toi le meilleur! N’oublie surtout pas qu’il peut te faire mal n’importe quand. Tu frappes, 1-2-3, tu recules, tu bouges, reste pas face à lui. Tu es plus rapide que lui. Ça nous prend un combat intelligent. On garde le plan de match. On travaille round par round ». Round 1 Début de combat lent de part et d’autre. Le « Viking Warrior » tente la première attaque avec un jab esquivé par Bute qui contre-attaque rapidement avec deux jabs au visage et un au corps. Ça y est, Bute s’est installé au centre du ring. Le challenger lance rapidement une deuxième attaque. Kessler bloque mais doit conserver sa garde très haute. Combinaison de trois coups de Bute alors que le Danois a les gants devant son visage. Le champion tente une réplique mais lorsqu’il se lance en attaque, Bute n’est déjà plus devant lui. À plusieurs reprises, Bute réussi à placer des combinaisons vives. Kessler semble souvent ne pas savoir comment entreprendre ses attaques. Il est pris de vitesse. 10-9 Bute Round 2 Dès le début, Bute se réinstalle au centre en travaillant des une-deux. Ensuite, il recule et se déplace de côté. Kessler se lance à l’attaque, mais le challenger pivote. Le champion fend l’air et se retrouve seul face aux câbles. Bute lance plusieurs jabs suivis de directs au visage. Le Danois met de la pression en lançant pour la première fois des combinaisons de deux ou trois coups. Par contre, Bute est bien installé derrière sa garde et surtout ne présente pas le menton. Bute semble crispé mais marque régulièrement des points. Kessler veut s’imposer mais ne réussit pas à s’approcher de son adversaire. 10-9 Bute Round 3 Au début du round, Kessler attend Bute au centre du ring. Bute le rejoint; les échanges sont rapides et le challenger sort souvent gagnant avec un bon jeu de pieds. Il réussit à se positionner hors de l’axe de puissance du champion. Belle variété de la part de Bute : jab-jab-droite-crochet de gauche, jab-jab-droite au visage-droite au corps. Le protégé de Team Palle recule d’un pas chaque fois pour revenir vers Bute qui essuie des rafales de coups larges précédés de doubles jabs. Pour la première fois, Kessler réussit à travailler en force alors qu’il marche sur son adversaire. Le champion marque des points pendant que Bute est adossé aux câbles. Bute doit accrocher, mais Kessler refuse de diminuer le rythme et sort gagnant du round. Une enflure apparaît au-dessus de l’œil droit de Bute. 10-9 Kessler Round 4 Durant les deux minutes de pause, Bute reçoit la consigne de revenir à des déplacements latéraux pour éviter de donner une cible. Dès le début du round, le Danois marche sur Bute, qui réagit comme son coin lui a demandé. Jouant un rôle de contre-attaquant, Bute laisse la place au champion pour travailler en puissance. Tout en reculant et en gardant sa garde très haute, Bute s’expose aux attaques au corps. Kessler en profite pour revenir régulièrement avec des coups au visage. Bute bouge bien, mais est dominé car il boxe de reculons ou de dos aux câbles. Malgré son manque de précision, Kessler est plus agressif et remporte le round. 10-9 Kessler Stéphan Larouche : « Ce gars est trop puissant pour que tu puisses travailler dos aux câbles. Je veux que tu bouges. Donne-lui pas d’axe de frappe, revient à une position de 45 degrés par rapport à lui ». Round 5 Au son de la cloche annonçant le début du round, Bute s’exécute et prend le centre du ring. Il travaille en combinaison de trois coups gauche/droite/droite/déplacements et retour à l’attaque. Bute reçoit la contre-attaque du Danois mais bouge bien de droite à gauche et en oblique, et c’est pourquoi Kessler frappe soit le vide, soit les gants de Bute ou encore se retrouve face aux câbles, situation qui le rend nerveux et hargneux. Le champion le sait bien, il ne doit pas travailler en contre-attaque car Bute est plus rapide. C’est à ce moment que Kessler s’attache à régler son problème de positionnement, qui fait en sorte qu’il se retrouve souvent de diagonale avec Bute. Il rage parce que de cette manière, il ne peut atteindre solidement son adversaire. Suivant les consignes de son coin, il commence par de doubles attaques de la main droite qui forcent Bute à reculer rapidement après son déplacement. Par conséquent,

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Kessler champion de la WBC et WBA

elles empêchent une deuxième attaque rapide du challenger. Malgré un manque évident de puissance, Bute remporte le pari au volume de coups lancés, mais dans les dernières secondes du round, un vicieux jab du Danois coupe le protégé d’Interbox au-dessous de l’œil droit. 10-9 Bute Round 6 La stratégie du coin de Kessler pour la deuxième partie du combat ressort dès les premiers instants du 6e round. Prendre le centre du ring pour amener Bute à reculer et ainsi le forcer à travailler en contre-attaque. Kessler tente durant le round de miser sur sa force physique pour marcher sur le challenger dès qu’il recule. Bute travaille bien en courtes combinaisons, mais Kessler l’empêche régulièrement de se sauver en diminuant peu à peu l’espace qui les sépare des câbles. Au corps à corps et adossé aux câbles, Bute sort perdant. 10-9 Kessler Round 7 Larouche assure à Bute que s’il veut sortir gagnant de ce combat, il doit éviter d’être immobile dans les câbles. Le cutman Bob Miller a de la difficulté à contenir le flot de sang coulant de la vilaine coupure sous l’œil droit. Le challenger est vigoureux en début de round, se blottissant comme en début de combat derrière une défensive solide et ramenant le menton entre les épaules pour éviter de s’exposer aux crochets du champion. Bute échange coup pour coup avec Kessler en travaillant avec des une-deux très rapides. Bute prend l’avantage du nombre mais pas de la puissance, car bien qu’il touche les gants, Kessler termine ses attaques en force avec des crochets gauche/droite. C’est ce qui amène Bute dans un coin. Le challenger reçoit une rafale de huit à dix coups du champion. Il se protège, tente de bouger le haut du corps et de garder les mains hautes de chaque côté de son visage. Kessler a son adversaire là où il le veut et amorce ses attaques puissantes par des crochets au corps et ensuite à la tête, puis recule. Bute se redresse et Kessler revient à la charge. Bute accroche et l’arbitre s’interpose. Le Roumain reprend son souffle et lance un jab, évite la main droite de Kessler et applique une droite solide au champion. Kessler revient à la charge mais Bute décoche une série d’uppercuts gauche/droite et sort du coin. Bute a passé la tempête sans recevoir de véritables coups au visage, il remporte difficilement le round par le volume et surtout la précision de ses attaques. Mais Kessler a créé une brèche; il a fait mal au challenger. Pendant la pause, l’arbitre demande au médecin en fonction de vérifier la gravité de la coupure sous l’œil droit de Bute. Le médecin permet au challenger de continuer. 10-9 Bute Round 8 Le round commence plus calmement. Les deux boxeurs se respectant, c’est Bute qui fait reculer Kessler avec un double jab et un direct au visage suivis d’un direct du droit au corps en abaissant son centre de gravité. Kessler accroche. Bute travaille au corps. Le champion ne demande pas mieux que les échanges corps à corps, sauf que cette fois, c’est Bute qui travaille en force étant celui qui se retrouve dos au centre du ring. Une fulgurante combinaison place le champion dans l’embarras. Bute connaît ses meilleurs moments depuis les deux premiers rounds. L’arbitre s’interpose lorsque Kessler est forcé d’accrocher. À la reprise, Bute lance une attaque de la main droite; Kessler évite et Lucian se retrouve pris entre le deuxième et le troisième câbles. L’arbitre intervient de nouveau. Au centre du ring, l’action reprend. Bute, tirant toujours profit de jabs précis, réussit à placer quelques mains arrières. À part quelques courts crochets au corps, Kessler ne fait rien qui vaille. 10-9 Bute Round 9 Stéphan Larouche : « Il faut que tu continues à protéger ton visage. Il va y aller fort maintenant, il va travailler sur ta coupure ». Kessler attend Bute au centre du ring. En reprenant sa défensive hermétique, Bute contrôle encore une fois le début du round avec son jab précis. Trois jabs de suite, c’est la première combinaison qui touche la cible pour Kessler. Le champion tente de travailler en uppercuts et Lucian s’accroche. Arrêt de l’arbitre. À la reprise, Bute demeure dans les câbles et réussit à bloquer un crochet de la gauche du champion. Ayant la main gauche basse, Bute essuie tout un direct de Kessler et le challenger vacille. Kessler en profite pour pourchasser sa proie avec des droites et un crochet de gauche à la tempe et Bute est forcé de mettre un genou au sol. L’arbitre amorce son compte et Bute se relève à neuf. Kessler revient à la charge avec des directs au corps car Bute porte les mains très hautes. Le champion force le

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LA ZONE DE BOXE 2e Année, Numéro 15 8 challenger à accrocher en terminant ses puissantes combinaisons avec des directs et des crochets. Bien qu’il frappe les gants, Kessler fait encore mal à Bute. 10-8 Kessler Round 10 Le dernier round a ravagé le visage de Bute. Son arcade sourcilière droite s’est mise à saigner et il présente une importante enflure en dessous de l’œil gauche. Soudainement, c’est Kessler qui semble vouloir prendre avantage d’un combat qui s’allonge. Les deux boxeurs s’échangent quelques jabs ponctués de une-deux. Le « Viking Warrior » applique de plus en plus de pression en bousculant Bute. Lucian lui fait payer le prix avec des jabs et des directs rapides, mais Kessler réussit à s’approcher suffisamment de Bute pour enchaîner plusieurs bonnes combinaisons en variant au corps et à la tête. Les rôles sont inversés. C’est maintenant Kessler qui frappe et recule au centre du ring pour revenir chaque fois avec des directs gauche/droite très puissants. Bute se protège le visage avec ses gants mais le champion le frappe sous les coudes. Lucian éprouve énormément de difficulté à repousser le champion car il ne parvient plus à le maintenir à portée de ses directs. C’est évident, le respect que portait Kessler pour les combinaisons rapides du challenger diminue de round en round et Bute en fait les frais. Le médecin revient à la fin du round pour regarder les coupures de Bute. Bob Miller parle au médecin et lui dit qu’il réussira à contrôler tout cela. Mais l’expression dans le visage du docteur laisse voir une inquiétude qui n’échappe pas à Larouche. 10-9 Kessler Round 11 Stéphan Larouche : « On n’a pas de chance à prendre, nous sommes chez lui. Tu dois être en train de perdre aux points, Lucian, alors tu dois aller chercher les deux derniers rounds. Et protège toi bien, le médecin peut arrêter cela d’un instant à l’autre » C’est reparti. Bute commence lentement au centre du ring. Kessler lance une attaque qui n’atteint pas la cible et accroche pendant que Bute le frappe faiblement derrière la tête. À la reprise, Bute lance des jabs mais un seul à la fois. Kessler attend et réplique avec des doubles jabs au visage et au corps. Bute garde Kessler à distance en bougeant de gauche à droite. Le jab de Bute est efficace, mais le challenger porte sa garde assez basse. Bute travaille avec des directs au corps en abaissant son centre de gravité et Kessler profite du fait que la main gauche de son adversaire est portée basse pour lui asséner une solide droite. Bute se retrouve de côté à Kessler qui en profite pour lancer un crochet de gauche au visage. Lucian est solidement touché, perd l’équilibre et traverse la moitié du ring qui le séparait du coin. Bute a à peine le temps de remonter sa garde que Kessler lui en remet plein les gants. Bute tente de se protéger, mais les combinaisons puissantes et précises du champion force l’arbitre à mettre un terme au combat. Finalement, la puissance aura eu le dessus sur la finesse. Tout au long du combat, Kessler a forgé sa confiance en marchant sur Bute. En aucune circonstance le champion n’aura senti que son adversaire pouvait réellement lui faire mal. Bâtissant sa stratégie de bousculer Lucian en se servant de son avantage physique, le triomphe du Danois sur l’espoir d’Interbox tient à une seule raison : il est le meilleur super-moyen du monde, voilà tout. Mais le combat été à ce point intéressant et chaudement disputé qu’une revanche est à considérer. Carte du combat au moment de l’arrêt 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 total Bute 10 10 9 9 10 9 10 10 8 9 94 Kessler 9 9 10 10 9 10 9 9 10 10 95

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Entrevue avec Pierre Bouchard Par Pascal Roussel

Lors du gala du 24 janvier au Centre Bell, nous nous sommes entretenus un court moment avec Pierre Bouchard dans la chambre des boxeurs d’Interbox. Il nous a accordé quelques minutes avant de préparer ses premiers boxeurs pour la soirée qui les attendait. On pourrait l’appeler le bras droit de Stéphan Larouche, mais aussi la moitié de son cerveau! En effet, puisque Larouche a été pendant 12 ans l’entraîneur de Pierre Bouchard lorsqu’il était boxeur amateur à Jonquière, les deux ont exactement la même vision de la boxe, ce qui explique probablement pourquoi ils font une si bonne équipe!

Zone de Boxe : Les gens te connaissent aujourd’hui comme l’un des deux entraîneurs chefs du groupe Interbox. Mais les gens ne se rappellent peut être pas tous de ta carrière amateur. Au tournant des années 80 et 90, tu formais un trio incroyable au club de boxe de Jonquière avec Stéphane Ouellet et Christian Gagnon. Parle-moi de ta carrière amateur.

Pierre Bouchard : J’ai connu une bonne carrière amateur (NDLR : fiche de 79-41). Ce que je retiens surtout c’est que tout ça m’a permis de voyager partout dans le monde avec les autres boxeurs de l’équipe nationale (Ouellet, Gagnon, Kirk Johnson, Arturo Gatti, Dale Brown). Je suis allé à deux championnats du monde amateur. En 1989, j’ai participé aux championnats du monde juniors à Bayamon, à Porto Rico. J’ai perdu dès mon combat préliminaire contre Juergen Matenstein de l’Allemagne. Je m’étais auparavant fracturé la clavicule. Et dès le premier coup lancé de ce combat, ma blessure est revenue me hanter. Ensuite en 1990, j’ai participé aux championnats du monde à Lima, au Pérou. J’ai perdu mon premier combat aux points contre le Cubain Juan Carlos Gomez. Lors d’autres tournois, j’ai déjà affronté aussi Ramon Garbey et j’ai battu Vernon Forrest.

ZDB : Tu es le seul des gars de Jonquière (Gagnon, Ouellet, Émile Fortin) qui n’a pas tenté l’aventure pro, ne serait-ce que pour un seul combat (comme Gagnon et Fortin). Pourquoi? PB : Lorsque le club de boxe de Jonquière et Jean-Marc Tremblay ont organisé une carte pro-am à l’hôtel Le Roussillon de Jonquière en juin 1993, j’étais encore amateur. J’ai boxé sur la partie amateur de la carte. Mais de toute façon, lorsque j’ai décidé à l’époque d’arrêter ma carrière amateur, c’était clair et net pour moi. L’aventure pro ne me tentait pas. De toute façon, l’organisation de la boxe professionnelle québécoise à ce moment-là n’avait rien de semblable avec ce qui se passe aujourd’hui. Si le contexte d’aujourd’hui avait été celui de 1993, les choses auraient pu être différentes. Un groupe aurait sûrement démontré de l’intérêt envers moi et l’aventure m’aurait probablement tenté! ZBD : Lorsque Stéphane Larouche a quitté Jonquière pour Montréal, c’est toi qui as ensuite pris les rênes du club de boxe de Jonquière.

PB : En effet, j’ai été l’entraîneur en chef du club de 1996 à septembre 2002. Ensuite, Stéphane m’a appelé pour venir le rejoindre à Montréal parce qu’il avait besoin d’aide et que nous avons la même vision de la boxe. Stéphane à été pendant 12 ans mon entraîneur chez les amateurs.

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Pierre Bouchard dans le coin de sa sœur Danielle lors de son combat contre Wendy Roy, le 24 janvier au Centre Bell.

ZDB : Qui entraînes-tu? PB : Je travaille avec pas mal tous les boxeurs d’Interbox, mais surtout avec Jean-Francois Bergeron, Adrian Diaconu et Jo Jo Dan. Baha Laham est aussi avec moi depuis un petit bout de temps. ZDB : Pourquoi Paul Mbongo n’est plus avec toi? PB : Disons tout simplement que nous n’avions pas la même éthique de travail…

ZDB : Vis-tu seulement de tes fonctions d’entraîneur ou as-tu un autre emploi? PB : Je suis un travailleur autonome qui est sous contrat avec Interbox. Et cela prend pas mal tout mon temps! Par contre, je travaille aussi avec Alain Delorme et l’équipe canadienne de water-polo féminin. Je leur donne un entraînement de boxe pour augmenter leur cardio, mais aussi pour leur permettre de changer leur routine. Je fais parfois d’autres contrats de ce genre. ZDB : Quels ont été tes plus beaux moments d’entraîneur jusqu'à présent?

PB : Mon meilleur moment fut l’an dernier au Danemark avec Lucas contre Kessler. Malgré la défaite d’Éric, je n’oublierai jamais ce jour-là. Il y a aussi au mois de septembre 2001, lorsque je suis allé avec Jean-François Bergeron à Las Vegas. Il affrontait alors l’invaincu Willie Palms. C’était la première fois que j’étais l’entraîneur principal pour un combat de cette importance.

ZDB : Ressens-tu quelque chose de différent lorsque tu es dans le coin de ta sœur (Danielle Bouchard) par rapport à lorsque tu es dans le coin d’un autre boxeur? PB : Je dirais que c’est cinq fois pire! Ce n’est vraiment pas facile de garder une distance. Quand je suis dans le coin de Danielle, c’est plus dur que pour n’importe quel autre. ZDB : Outre les boxeurs d’Interbox, quels sont tes boxeurs préférés ? PB : Quand j’étais plus jeune, mon idole était Evander Holyfield. Aujourd’hui, je n’ai pas vraiment d’idole. Mais comment ne peut-on pas admirer ce que font les Floyd Mayweather et Oscar De La Hoya? J’aime bien aussi Marco Antonio Barrera. ZDB : Et pour terminer, qui est ton entraîneur préféré ? PB : J’apprécie tous les entraîneurs, que ce soit au niveau québécois ou international. On a d’excellents entraîneurs ici au Québec. C’est au contact des autres entraîneurs qu’on apprend le plus. J’essaie de retirer un peu de tous ceux que je peux côtoyer. ZDB : Merci Pierre de nous avoir accordé ce temps. PB : Bon gala!

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Jack Johnson, couché sur le dos et se cachant les yeux du soleil suite à sa défaite controversée par KO au 26ieme round, face à Jess Willard, à la Havane, Cuba, le 5 avril 1915.

Histoboxe Jack Johnson et la photo qui fit le tour du monde

Par Alexandre Pelletier Le 5 avril 1915, après 26 rounds livrés sous le soleil cuisant de Cuba, le premier champion poids lourds noir de tous les temps, Jack Johnson, s’inclinait face à Jess Willard, ce qui mettait fin à six ans d’un règne tumultueux auquel l’ensemble de la société blanche américaine s’était juré de mettre fin. Le long parcours de Jack Johnson

Tout au long de sa vie, Jack Johnson eut à vivre dans une société raciste à son endroit, et ses succès firent de lui un exemple jugé dangereux pour l’ordre social. À une époque où les gens de race noire ne pouvaient entrer dans les bons hôtels ou voyager dans les mêmes wagons de train que les Blancs, Johnson se hissa jusqu’au sommet de la hiérarchie sportive, le championnat du monde des poids lourds.

Il passa des années à se battre pour des bourses dérisoires contre d’autres bons boxeurs noirs dans la même

situation que lui. Le championnat des lourds était la chasse gardée des Blancs : pas question qu’un homme d’une race jugée inférieure soit reconnu comme l’homme le plus fort du monde. Ainsi, Johnson et ses compagnons d’infortune, Sam Langford, Ed McVey et d’autres devaient se frotter à la color line, et ne pouvaient espérer atteindre le sommet de leur profession.

Tout changea cependant en 1907, alors que le champion en titre des poids lourds, le Canadien Tommy Burns,

se déclara prêt à affronter Jack Johnson moyennant une bourse record de 30 000$. Johnson dut attendre plus d’un an pour que quelqu’un puisse offrir un tel pactole, ce que fit un Australien du nom de Hugh MacIntosh afin d’organiser le combat à Sydney en décembre 1908. Johnson battit facilement Burns par arrêt de la police au 14e round, devenant ainsi une cible à abattre pour la société ségrégationniste américaine.

On opposa à Jack

Johnson les meilleurs aspirants blancs dans les premières années de son règne. Le champion des mi-lourds Philadelphia Jack O’Brien échoua dans sa tentative de battre le Géant

de Galveston, tout comme son homologue des poids moyens Stanley Ketchel, qui fut assommé au 12e round d’un combat passé à l’histoire. Dépités, les amateurs de boxe en furent réduits à supplier l’ex-champion poids lourds invaincu James Jeffries d’effectuer un retour après six ans d’inactivité. Jeffries dut perdre cent livres dans sa préparation pour le combat, et une fois dans l’arène, il n’était plus

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Jack Johnson

l’ombre de celui qui avait terrorisé la division au tournant du XXe siècle, et Johnson disposa facilement de lui par K.-O. au 15e round. La victoire de Johnson provoqua des émeutes partout aux États-Unis, dans lesquelles quelques Blancs et plusieurs Noirs perdirent la vie.

Devant l’impossibilité de vaincre Johnson dans l’arène, le gouvernement

américain dut s’en mêler. La Mann Act, loi votée par le Congrès en 1910 pour enrayer la « traite des blanches », interdisait le transport de femmes blanches d’un État à l’autre dans des buts immoraux. Johnson, qui fréquentait souvent des maisons de prostitution et qui amenait parfois ses dames préférées avec lui dans ses déplacements, fut la première victime de cette loi. Bien que la loi ait été créée afin d’enrayer le proxénétisme (et non la prostitution), Johnson fut accusé d’avoir amené une prostituée nommée Belle Schrieber de Pittsburgh à Chicago en 1910, soit près de trois ans avant l’entrée en vigueur de la loi en janvier 1913. Un jury blanc le condamna à un an de prison, à la grande joie des détracteurs de Johnson, autant dans la communauté blanche que noire. Cette dernière commençait à être scandalisée par le comportement du champion, qui avait récemment épousé une femme blanche pour la seconde fois.

Alors que sa condamnation était en appel, Johnson réussit à s’échapper

malgré une surveillance étroite et à fuir vers l’Europe en 1913. Il comptait pouvoir y faire fructifier son titre mondial, mais la froide réception qu’il reçut à Londres et Paris, puis l’éclatement de la Première Guerre mondiale anéantirent tous ses espoirs de prospérité en Europe. C’est à ce moment qu’un groupe de promoteurs américains, piloté par Jack Curley et Harry Frazee, proposa un combat de 45 rounds à Johnson contre Jess Willard à Juarez (Mexique). Cependant, le président mexicain, le Général Venustiano Carranza, menaça Johnson d’arrestation s’il tentait de passer par son territoire pour se rendre dans le Nord du pays, alors contrôlé par le bandit Pancho Villa. On déménagea donc le combat à La Havane. Une chaleur accablante

Willard, un géant de près de deux mètres, avait commencé à pratiquer la boxe au lendemain du combat entre Johnson et Jeffries. Il était l’un de plusieurs white hopes, ces boxeurs blancs qui avaient commencé à pratiquer ce sport dans le seul but de restaurer l’honneur de leur race en battant Johnson. Tous ces hommes étaient de piètres boxeurs, n’ayant que leur grande taille comme avantage. Étant donné que la fiche de Willard montrait 22 victoires et 4 défaites obtenues contre des adversaires au mieux douteux, au pire lamentables, bien peu d’experts lui accordaient des chances de battre un athlète aussi doué et polyvalent que Johnson. Cependant, il s’entraîna vaillamment pour faire face au meilleur poids lourd de l’époque, et profitait d’avantages significatifs d’âge, de taille et de poids.

De plus, un évènement insolite survenu à deux jours du combat lui apporta un regain de confiance. Alors qu’il

longeait les plages près de La Havane, Willard vit à l’horizon un point noir dans le ciel. C’était un canard qui avait survolé quelques centaines de kilomètres depuis la Floride. Exténué, le pauvre animal s’effondra tout près des pieds de Willard, qui le prit dans ses bras alors qu’il rendait son dernier souffle. Ému par ce vaillant oiseau, Willard résolut de battre Johnson d’endurance, coûte que coûte.

Pour sa part, Johnson prit son entraînement à la légère. Un boxeur de sa trempe n’avait que peu à craindre d’un novice comme Willard, et son camp d’entraînement ressemblait davantage à une foire. De plus, à 37 ans et alourdi psychologiquement par les épreuves de son exil, il avait de moins en moins le cœur à boxer et il était beaucoup plus préoccupé par sa situation judiciaire que par le championnat mondial des poids lourds. La cote de quatre contre un en sa faveur chuta précipitamment lorsque les journalistes et observateurs décrivirent l’allure de son camp d’entraînement.

Le jour du combat, les deux hommes firent leur entrée dans le ring en début d’après-midi sous l’écrasant soleil cubain. La température dans l’arène était de 41 degrés Celsius. Johnson domina clairement les dix premiers rounds du combat, infligeant à Willard une coupure au dessus de l’œil en plus de fractures aux côtes et à la mâchoire. Mais le challenger profita de la fatigue qui envahissait graduellement son adversaire pour prendre le contrôle et se servit de son physique imposant pour épuiser le vieillissant Johnson. Vers le vingtième assaut, le champion était

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Jess Willard, le Pottawatomie Giant

visiblement très fatigué, alors que Willard semblait encore frais. Au vingt-cinquième round, une droite au corps portée par Willard coupa le souffle de Johnson, qui s’agrippa au géant pour stopper l’action. À la fin du round, Johnson demanda à l’un de ses entraîneurs de s’assurer que son épouse quitte l’enceinte car il sentait ses forces décliner rapidement. Au fatidique vingt-sixième round, une droite de Willard envoya Johnson au tapis pour le compte, et il s’empara ainsi du titre mondial que Johnson avait détenu au cours des six dernières années, mettant également fin à la longue séquence victorieuse de Johnson, qui avait duré dix ans. La controverse

Johnson refusa de s’avouer vaincu. Alors qu’il reprit le chemin de

l’Europe, il affirma que les promoteurs du combat lui avaient promis un pardon du gouvernement américain s’il acceptait de perdre le combat. Comme preuve, il avançait la photo du K.-O., dans laquelle il avait placé ses bras au-dessus de ses yeux pour se cacher du soleil. À cette époque, les films de combat étaient interdits aux États-Unis, conséquence des émeutes ayant suivi la victoire de Johnson sur Jeffries en 1910. Ainsi, dépourvus du film du combat, plusieurs amateurs en vinrent à croire les allégations de Johnson.

Cependant, ceux qui avaient vu le film ou étaient présents ce

jour-là ne furent pas dupes. Ordinairement, une personne qui truque un combat n’attend pas 26 rounds pour le faire, et il ne cherche pas activement à battre son adversaire, comme le fit Johnson dans les dix premiers rounds du combat. Pour justifier cette aberration, Johnson expliqua qu’il attendait que le promoteur Jack Curley remette sa bourse à son épouse, faute de quoi il laissait durer le combat.

Johnson avait des raisons d’en vouloir aux promoteurs. Il y a

évidemment la question du pardon gouvernemental qui n’arriva jamais et que les promoteurs nièrent toujours avoir promis. De plus, ils s’étaient engagés à fournir à Johnson une copie du film du combat pour visionnement en Europe, ce qui aurait pu être lucratif pour l’ex-champion en grande difficulté financière. Mais le film n’atteignit jamais Londres.

Finalement, en 1921, Jack Johnson rentra aux États-Unis via le Mexique et fut accueilli par la police, qui le

mena directement en prison purger sa peine d’un an. À sa sortie, il vendit une confession à Nat Fleischer de The Ring réitérant ses allégations de trucage du combat face à Willard. Fleischer, qui était présent à La Havane pour le combat, ne crut jamais à toute cette histoire. Il était cependant l’un des rares journalistes de l’époque à éprouver de la sympathie envers Johnson, et s’il ne l’a jamais publiquement avoué, il est fort probable qu’il acheta la confession dans le but de venir en aide à un vieil ami accablé par les dettes.

Nous accordons le dernier mot de cette histoire au vainqueur du combat, Jess Willard, qui, lorsqu’on lui

demanda son avis sur les déclarations de Johnson, se contenta de répliquer sèchement : «S’il a vraiment truqué ce combat, j’aurais aimé qu’il le fasse plus vite. Il faisait plus chaud qu’en enfer là-bas.»

Pendant toute sa vie, Jack Johnson aima entretenir un mythe autour de sa personne. Il croyait, non sans

fondement, que l’ensemble de la société américaine souhaitait faire de lui un exemple pour les générations futures de ce qui constituait un comportement inacceptable pour une personne de race noire. Sa persécution judiciaire, centrée autour de ses mœurs, représente aujourd’hui un exemple frappant de l’injustice raciale alors solidement ancrée aux États-Unis. Johnson s’assura que le mythe l’entourant se prolonge à sa défaite contre Jess Willard en laissant planer le doute qu’il avait été dupé par la société blanche, qui lui avait fait miroiter un retour aux États-Unis en échange d’une défaite. Il s’agit certainement en partie d’un péché d’orgueil, mais une vérité s’y dissimule : la société entière avait juré sa perte, et a fini par y parvenir un matin d’avril sous le soleil de La Havane.

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Le jugement dernier Desormiers-MacKillop

Par Karim Renno

De 1971 à 2004, la ceinture canadienne des super-mi-moyens a été à l’enjeu à seulement neuf reprises. Force est d’admettre qu’il ne s’agissait pas d’un titre très convoité. Toutefois, le nombre de boxeurs de talent qui évoluent actuellement à 154 livres au Canada (et particulièrement au Québec) semble avoir redoré le blason du titre canadien, de sorte qu’au cours des 21 derniers mois, il a fait l’objet de quatre affrontements, dont le combat Desormiers-MacKillop était le dernier. Le combat est particulièrement intriguant pour plusieurs raisons. D’abord, tant Desormiers que MacKillop en sont à leur deuxième tentative de s’approprier le titre, ayant tous deux baissé pavillon devant Sébastien Demers. Ensuite parce que nos deux protagonistes ont enregistré les plus importantes victoires de leur carrière en 2006 (mise hors de combat spectaculaire au dernier round pour Desormiers face à Adam Green et victoire éclatante de MacKillop face à Shannon Taylor en Australie). Finalement, parce que les boxeurs de Terrebonne et de Fredericton ont tous deux perdu leur dernier combat et cherchent à remettre leur carrière sur la bonne voie.

Il en résultera un combat des plus enlevants dans le cadre duquel Desormiers et MacKillop feront preuve de détermination et de courage et donneront aux spectateurs sur place (et bientôt aux téléspectateurs de Vox et aux abonnés de La Zone Platine) des sueurs froides.

Deux des trois juges sont incapables de couronner un vainqueur et remettent des cartes identiques de 94-94. Le troisième voit MacKillop gagnant par le pointage de 95-93. Il en résulte un verdict nul majoritaire et un titre canadien qui demeure vacant.

L’équipe du magazine décide donc de se pencher sur la question pour tenter de départager ces deux guerriers.

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1er round

En ouverture de combat, Desormiers prend le contrôle en utilisant sa main avant. En maintenant la distance de cette façon, il empêche MacKillop de toucher la cible avec régularité. MacKillop réussit bien quelques attaques durant le round, mais la mobilité de Desormiers lui permet généralement de s’en sortir sans trop de dommages. Le mouvement de tête de MacKillop étant non existant, Desormiers l’atteint avec une régularité alarmante avec sa main gauche. Tellement que lors de la dernière minute du round, Desormiers atteint MacKillop d’une violente gauche à l’oreille qui expédie ce dernier face première au plancher. 10-8 Desormiers.

2e round

Pour des raisons que l’on s’explique mal, Desormiers abandonne sa main avant lors du début du 2e round. Beaucoup plus à son aise, MacKillop se lance alors en attaque. À courte distance, le gabarit plus imposant de MacKillop lui donne un avantage indéniable et il atteint régulièrement Desormiers. D’ailleurs, ce dernier apparaît durement ébranlé avec 75 secondes à faire au round et une chute au plancher semble imminente. Toutefois, les attaques subséquentes de MacKillop sont larges et brouillonnes, ce qui permet à Desormiers de reprendre quelque peu ses sens et de toucher solidement son adversaire avec des crochets de la main gauche. Un de ces crochets expédie MacKillop au tapis vers la fin du round. Malheureusement pour Desormiers, comme c’est trop souvent son habitude, Gerry Bolen rate le tout et déclare erronément que MacKillop a glissé. L’erreur de Bolen sera déterminante sur l’issue du combat, comme ce fut le cas pour le combat Lecavalier-Savage l’an dernier. 10-9 MacKillop.

3e round

Le début du 3e round voit Desormiers rétablir son avantage grâce à sa main avant. De manière intelligente, MacKillop commence à travailler plus fréquemment au corps, une stratégie qui portera fruit plus tard dans le combat. Néanmoins, la rapidité d’exécution de Desormiers fait la différence au cours de ce round, alors qu’il bat continuellement son adversaire de vitesse. Frustré par l’efficacité de la main avant du boxeur de Terrebonne (laquelle cause une coupure à l’œil gauche de son adversaire), MacKillop se voit obligé de lancer de longues mains arrières que Desormiers bloque facilement. 10-9 Desormiers.

4e round

Suivant la recommandation de ses hommes de coin, MacKillop démontre beaucoup plus de mouvement de la tête, ce qui lui permet d’esquiver la main avant de son adversaire et de monter des attaques plus soutenues. Il semble d’ailleurs ébranler Desormiers pour une deuxième fois lors de la première minute du round. Mais, comme ce fut le cas lors du 2e round, MacKillop reçoit un contre de la main gauche de plein fouet, lequel l’envoie à travers le ring. Dès lors, Desormiers reprend le contrôle des hostilités. Lors d’un échange à courte distance, Desormiers réussit à placer deux solides mains gauches au visage de MacKillop, l’envoyant de ce fait au tapis pour une troisième fois. 10-8 Desormiers.

5e round

C’est au 5e round que Desormiers réussit enfin à établir sa main arrière. Il accueille d’ailleurs MacKillop d’un solide coup à l’oreille gauche lors de la première minute du round. Par ailleurs, l’attaque de MacKillop au corps de Desormiers est de plus en plus efficace et commence à ralentir ce dernier, dont les combinaisons se font de plus en plus rares. Néanmoins, les contre-attaques efficaces et solides de Desormiers lui permettent de remporter ce round particulièrement serré sur ma carte. 10-9 Desormiers.

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Notre gagnant, Stéphane Desormiers.

6e round

MacKillop met finalement à profit son avantage physique substantiel et impose le tempo. Ses attaques au corps semblent avoir ralenti Desormiers considérablement, lui qui ne lance maintenant qu’un coup à la fois. Les coups de MacKillop sont également moins larges lors de ce round, ce qui lui permet d’atteindre solidement son adversaire de la main arrière à quelques reprises. L’uppercut de MacKillop commence également à faire des dégâts. On sent clairement le vent tourner au cours de ce round. 10-9 MacKillop.

7e round

Le début du round laisse croire que Desormiers est de retour à ses bonnes habitudes, alors qu’il touche durement MacKillop d’une bonne combinaison gauche-droite. Mais il n’en est rien. Intelligemment, MacKillop réduit la distance et adosse régulièrement son adversaire dans les câbles. MacKillop touche durement le boxeur de Terrebonne à quelques reprises et ce dernier donne l’impression qu’il doute de sa capacité à échanger avec son adversaire. On a l’impression de revenir aux rounds intermédiaires du combat Desormiers-Green. 10-9 MacKillop.

8e round

Le vent a clairement tourné en faveur de MacKillop. D’ailleurs, il boxe en toute confiance en ce début de 8e round, allant même jusqu'à tenir ses mains à la hauteur de sa taille, à la Jean Pascal. Seule la mobilité de Desormiers garde ce dernier dans le coup. Celle-ci n’empêche toutefois pas MacKillop d’atteindre son adversaire de plein fouet avec quelques bonnes mains arrières. Desormiers touche parfois la cible avec de courts crochets de la gauche et une occasionnelle main droite, mais il s’agit de coups isolés. Un round clairement à l’avantage de MacKillop, au cours duquel Desormiers semble attendre avec impatience le gong final. 10-9 MacKillop.

9e round

À l’aube du 9e round, les hommes de coin de Desormiers l’implorent de travailler en combinaison, mais c’est en vain. La domination de MacKillop est claire : il initie presque tous les échanges et réussit à ébranler son adversaire. Les mouvements de Desormiers sont maintenant tellement laborieux que MacKillop l’atteint presque à volonté. Les hommes de coin de MacKillop semblent croire que le combat est dans la poche, mais c’est sans compter le cœur de guerrier de Desormiers qui lance une belle combinaison gauche-droite-gauche qui semble sortir de nulle part! Clairement pas assez pour gagner le round, mais suffisant pour lancer le message qu’il a toujours des énergies en réserve. Le dernier round s’avèrera déterminant sur ma carte, Desormiers s’accrochant à une avance d’un point. 10-9 MacKillop.

10e round

Deux vrais et vaillants guerriers s’affrontent dans ce round ultime. Desormiers donne le ton avec une courte main droite bien placée, mais MacKillop ne s’en laisse pas imposer pour autant. Desormiers redécouvre sa main avant, à l’aide de laquelle il rétabli une certaine distance et prend l’avantage du round. MacKillop revient avec agressivité et les deux hommes se livrent une vraie bataille de rue au centre du ring, lançant de longues mains arrières. Dans un round difficile à juger, je donne la palme à Desormiers grâce à la plus grande précision de ses coups. 10-9 Desormiers.

95-93 Desormiers

Un combat enlevant et serré dans le cadre duquel un match nul est certes un résultat juste. Le magazine la Zone de Boxe accorde une victoire à l’arraché à Desormiers grâce aux deux chutes de MacKillop. Il n’en reste pas moins qu’il est décevant de constater que la chute au plancher de MacKillop au 2e round, pourtant nette mais ratée par l’arbitre, fait la différence sur les cartes officielles. Peu importe, nous exigeons un combat revanche!

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Ariane Fortin près de son podium lors de l’obtention de sa médaille d’or aux championnats du monde à New Delhi en Inde, novembre 2006.

La page du boxeur Le magazine est fier de vous présenter la deuxième édition la page du boxeur. Nous offrons à un boxeur une tribune libre où il pourra nous parler de ce qui lui plaît. Voici la page d’Ariane Fortin.

Mon dernier championnat du monde Le premier combat d’une compétition est toujours celui où le stress prend le plus le contrôle sur nos moyens. C’est un peu comme si on recommençait à zéro, on a tout à prouver. Évidemment, on ne veut décevoir personne, surtout pas les coachs. En ce qui me concerne, je crois que c’est là que la contre-performance est la plus probable… c’est ça qui fait peur ! Au championnat du monde, en novembre dernier à New Delhi, j’ai d’abord affronté une Israélienne que je ne connaissais pas. J’avais seulement entendu dire qu’elle était bonne technicienne, moyennement fort physiquement… mais j’avais surtout entendu dire que c’était une Russe avec une double nationalité, et qu’elle représentait l’Israël car elle n’avait pas fait l’équipe russe. Les Russes étant ce qu’elles sont, c’était assez pour que je ne la sous-estime pas! Après m’être éparpillée un peu pendant le premier 30 secondes du combat – ce qui m’a valu un sermon en bonne et due forme une fois le combat fini – ma concentration est revenue et ça s’est terminé au deuxième round. Le plus gros du stress était passé. Maintenant l’Indienne. Je l’avais déjà battue trois semaines auparavant, mais c’était l’Indienne en Inde… donc le stress était là quand même ! Finalement, les juges n’avaient pas le sentiment patriotique trop développé cette journée-là, alors le tout s’est terminé par un bon écart de points. Olga Slovinskaya. C’est contre elle que j’ai perdu en finale des mondiaux l’an dernier. Et par arrêt de l’arbitre svp ! Au cours de l’année qui a suivi, on a donc beaucoup travaillé son style pour le moins bizarre – mais sans aucun doute efficace. Je savais que c’était la fille à battre et j’avais vraiment hâte de me mesurer à elle après l’avoir eue dans ma soupe toute l’année. La stratégie était prête,

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LA ZONE DE BOXE 2e Année, Numéro 15 19 mûrie. Les premières combinaisons étaient même prédéterminées. Les efforts ont porté fruits : 22-11. Il ne restait plus que l’Américaine Akima Stocks. Je l’avais déjà battue l’été dernier mais, encore une fois, il ne fallait pas la sous-estimer car elle était forte physiquement, gauchère et j’avais fait un combat serré avec elle. Le stress était toujours au rendez-vous… je n’avais pas travaillé si fort pour battre la Russe et voir l’Américaine s’en aller avec l’or. Moments de stress interminables et c’est finalement mon tour… Quelques minutes plus tard, c’est fini : arrêt de l’arbitre au deuxième round. Une finale de championnat du monde gagnée par arrêt de l’arbitre : je ne pouvais pas être plus contente ! Il n’y a pas de mots pour décrire ces moments-là. Après, qu’est-ce qui se passe après ? On se repose un peu, mais on ne ralentit pas. Jusqu’à maintenant, aucune boxeuse canadienne n’a été championne du monde deux fois… Mon sparring avec Lucian Bute Avant de partir pour le championnat du monde, j’avais demandé à Stéphan Larouche de mettre les gants avec Adrian Diaconu en revenant, si je ramenais une médaille d’or. Il m’a répondu en riant « Adrian va te geler au corps ». J’ai dit : « C’est pour ça que je te demande APRÈS les mondiaux ! » Mais en revenant, c’est à un sparring avec Lucian que j’ai eu droit ! Je m’en suis « contentée ». (J’aime bien penser que Stéphane m’a mise avec lui parce que je suis gauchère, et donc que je lui ai peut-être été un tantinet utile dans sa préparation pour le combat contre Tatevosyan!) Je ne m’étais pas entraînée depuis mon retour et j’étais malade (un souvenir de l’Inde…), mais on ne dit pas non à Lucian Bute ! Il n’avait jamais mis les gants avec les filles d’ici, seulement avec des Roumaines. Il a été vraiment gentleman. Évidemment, il n’y allait pas à pleine puissance, mais il lançait beaucoup de coups et gardait une pression constante. D’ailleurs, c’est surtout ça qui m’a impressionnée de lui : à quel point il mettait toujours de la pression et contrôlait l’action, même lorsqu’il n’était pas en train d’attaquer. Le tout a duré trois rounds de trois minutes. Je savais qu’il y avait une grande différence entre l’amateur et le professionnel : en boxe professionnelle il faut être beaucoup plus « relaxe » pour ne pas gaspiller d’énergie, mais ce n’est pas si évident que ça… surtout avec un futur champion du monde devant soi ! Je l’ai quand même touché quelques fois (on parle ici de deux ou trois) et j’ai eu droit à un compliment sur ma gauche. C’était assez pour faire ma journée… et même ma semaine ! J’admire beaucoup Lucian pour sa technique. C’est véritablement un modèle pour moi, d’autant plus qu’il est gaucher. Il est vraiment dédié à ce qu’il fait et discipliné. Et surtout, il a une très belle attitude à l’entraînement, ce qui selon moi est primordial pour la réussite d’un athlète. Mis à part le fait de voir la Russe sur la troisième marche du podium, je ne pouvais pas recevoir un plus beau cadeau pour ma médaille d’or !

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De qualifications en qualifications… en qualifications Ou les défis qui attendent l’équipe nationale

Pascal Lapointe

[email protected] Année après année, les championnats canadiens de boxe olympique représentent la compétition qui reçoit le plus d’attention à l’échelle nationale. Et pourquoi pas? Les gagnants sont sacrés champion canadien, désignation qui comporte souvent une grande valeur sentimentale, et suivent les traces de boxeurs comme Benoît Gaudet et Ian Clyde, qui ont décroché ce titre onze fois chacun. Cependant, les lecteurs qui n’ont pas une connaissance détaillée de la boxe olympique seront peut-être étonnés d’apprendre qu’il ne s’agit pas de la compétition la plus importante. En effet, cette distinction revient aux qualifications nationales, puisqu’elles servent à identifier les membres de l’équipe du Canada pour toute l’année en cours. Leur fonctionnement est le suivant : Boxe Canada (ACBA) invite dans chaque catégorie au maximum quatre boxeurs, y compris le champion canadien. Ce dernier choisit son adversaire en demi-finale, s’il y a quatre concurrents. S’il y en a trois, les deux aspirants croisent les gants pour le droit de défier le champion en titre. S’il n’y en a que deux, ils s’affrontent directement en finale, cela va de soit. En demi-finale, le champion n’a aucun privilège particulier. S’il subit la défaite, il est éliminé et ne fera pas partie de l’équipe canadienne. Mais c’est en finale que l’intrigue se corse : si l’aspirant remporte la victoire, une deuxième finale a lieu et c’est le gagnant de ce combat qui représentera le Canada au niveau international. Autrement dit, le champion canadien doit gagner l’un des deux combats de finale pour confirmer sa place sur l’équipe canadienne tandis que pour la lui soutirer, l’aspirant doit gagner les deux affrontements. Soulignons que si le champion gagne le premier combat de finale, il n’y a bien entendu pas de second duel. Qui plus est, cette année l’ACBA a mis en œuvre un règlement additionnel selon lequel il suffit aux membres titulaires de l’équipe canadienne de gagner le championnat canadien suivant pour s’assurer de garder une autre année leur statut de représentant national. C’est-à-dire qu’ils sont dispensés de participer aux qualifications nationales. Vous êtes encore avec moi? Excellent. Voici donc l’équipe canadienne senior 2007 : Femmes 46 kg Stéphany Hamel (Québec) 48 kg Jacqui Park (Ontario) 50 kg Mandy Bujold (Ontario) 52 kg Vicky Pelletier (Québec) 54 kg Linda Walczak (Colombie-Britannique)* 57 kg Sandra Bizier (Québec)* 60 kg Geneviève Lachance (Québec)* 63 kg Katie Dunn (Ontario)* 66 kg Mary Spencer (Ontario)* 70 kg Ariane Fortin (Québec)* 75 kg Amber Konikow (Ontario) 80 kg Maude Bergeron (Québec) 86 kg Jacynthe Maloney (Québec)

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LA ZONE DE BOXE 2e Année, Numéro 15 21 Hommes 48 kg Jean-Michel Kind (Québec)* 51 kg Ryan Ranelli (Ontario) 54 kg Isho Shiba (Ontario)* 57 kg Arash Usmanee (Alberta)* 60 kg Ibrahim Kamal (Ontario)* 64 kg Kevin Bizier (Québec)* 69 kg Adam Trupish (Ontario) 75 kg Francy Ntetu (Québec) 81 kg Glenn Hunter (Ontario)* 91 kg Sébastien Lalumière (Québec) Lourds Didier Bence (Québec) * Membres de l’équipe canadienne 2006 et champions canadiens 2007, ils n’ont pas eu à se présenter aux qualifications nationales, comme il est expliqué ci-dessus. Qualifications. C’est d’ailleurs le thème principal pour 2007 en ce qui a trait à notre équipe masculine, qui sera fort occupée cette année. Le tout commence avec les deuxième et troisième tournois de qualification panaméricains, soit du 13 au 20 mars à Buenos Aires, en Argentine, et du 21 au 29 avril, à Trinité-et-Tobago. Les boxeurs qui auront décroché une place auront rendez-vous du 13 au 29 juillet à Rio de Janeiro, au Brésil, pour les XVe Jeux panaméricains, compétition où le calibre promet d’être assez relevé, étant donné que Cuba devrait y présenter une équipe complète. Ensuite, après six petites semaines de repos, les représentants canadiens prendront part à la compétition dont ils ont encerclé la date sur leur calendrier, c’est-à-dire les championnats du monde. C’est du 15 au 30 septembre que Moscou accueillera les meilleurs pugilistes amateurs de la planète. Et comme si l’enjeu n’était pas déjà assez grand, les participants auront une raison de plus de livrer une bonne performance, puisque les mondiaux feront aussi office de premier tournoi de qualification olympique. En effet, tous les quart-de-finalistes seront automatiquement qualifiés pour les Jeux olympiques de 2008 à Beijing, sauf chez les lourds et super-lourds, où seulement quatre boxeurs seront immédiatement acceptés dans le club de M. de Coubertin. [NDLR : Quelques jours avant la date de tombée du numéro du magazine que vous tenez entre les mains, nous avons appris que l’Association Internationale de Boxe (AIBA) avait retiré l’organisation des championnats du monde à la Russie. L’AIBA évoque des manquements aux engagements convenus. La Corée du Sud serait pressentie pour remplacer la Russie et accueillir la compétition si nécessaire. Très peu d’information additionnelle est disponible.] En Amérique, les boxeurs qui n’auront pas eu la chance de finir dans les huit premiers lors des championnats du monde auront deux autres occasions – pourvu qu’ils satisfassent aux conditions de leur fédération pour demeurer membre de l’équipe nationale – d’obtenir leur billet pour la Chine, soit deux tournois de qualification continentale qui auront lieu au dernier trimestre de 2007, puis en 2008, dans des villes à déterminer. Le nombre exact de boxeurs qui pourront se qualifier de cette manière sera déterminé selon les résultats des championnats du monde. Mentionnons simplement que l’AIBA alloue au continent américain 6 places dans toutes les catégories, sauf les lourds et les super-lourds, où elle en accorde 3, étant donné que dans ces deux catégories, les Jeux olympiques accueilleront 16 boxeurs au lieu de 28. La Zone de Boxe souhaite la meilleure des chances à tous nos représentants.

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La boxe et ses blessures Par Samuel D.-Drolet

La boxe, quel beau sport! Cette discipline est un doux mélange de stratégie et de force brute. Un mélange entre Ulysse, ce valeureux guerrier et surtout grand stratège et un bulldozer Tonka, prêt à tout balayer sur son passage. Pour la plupart des adeptes de cette discipline, c’est le parfait moyen de se mettre en bonne forme physique et mentale. Un esprit sain dans un corps sain! Effectivement, la boxe est un sport des plus complets. Il comprend à la fois résistance physique et cardiovasculaire, développement des réflexes et confiance en soi. Plusieurs pugilistes font l’entraînement pour le conditionnement physique, alors que d’autres veulent performer et devenir champion. Cependant, que ce soit à l’entraînement ou en situation de combat, il existe une citation dans le monde la boxe disant : « No pain, no gain! », ce qui signifie qu’aucun gain n’arrive sans douleur. Certaines douleurs dues à la boxe ont des répercutions sur la santé de l’athlète : pensons à l’ex-champion mondial Muhammad Ali qui souffre aujourd’hui de la maladie de la démence du pugiliste (maladie dont les symptômes s’apparentent au Parkinson). Même si le nombre de décès n’est pas énorme comparativement à d’autres sports, quantité de médecins se sont penchés sur la boxe afin de réduire les dangers reliés à ce sport. Voici donc un bref aperçu des blessures les plus fréquentes que subissent les boxeurs. Blessures à la tête Les études effectuées par l’American Association of Neurological Surgeons nous disent qu’environ 90% des boxeurs ont ou ont eu des dommages cérébraux. On dénombre peut-être moins de morts en boxe que dans plusieurs autres sports, mais c’est dans cette discipline que l’on compte le plus d’athlètes souffrant de dommages cérébraux. Il n’est pas étonnant de voir un si grand nombre de blessures à la tête en boxe. Les coups reçus font en sorte que la boîte crânienne se déplace plus rapidement que le cerveau et déchire ainsi les points d’attaches du cerveau à la boîte crânienne, ce qui cause une commotion cérébrale. Ces coups peuvent endommager le cerveau et ses terminaisons nerveuses et causer des lésions, des hémorragies, voire des caillots sanguins (comme Lucas Green Arias lors de son combat à Montréal contre Jean Pascal). Même avec les nouvelles technologies telles que les rayons x, les tomographies par ordinateur ou encore l’IRM, il est difficile de trouver des lésions évidentes. Les chercheurs ne savent pas encore clairement ce qui arrive au cerveau, mais il est certain qu’après une blessure de la sorte il ne peut fonctionner normalement et reste vulnérable à d’autres lésions. Un boxeur pratiquant ayant des symptômes de commotion peut se trouver en très grand danger en raison de ce que l’on appelle le symptôme du second impact. C'est une affection rare mais habituellement mortelle : même un coup en apparence faible porté à un cerveau affligé d'une commotion cérébrale peut causer un oedème cérébral massif. Il y a aussi des conséquences à long terme découlant de graves ou multiples commotions cérébrales : maux de tête, étourdissements, trouble cognitif (concentration pauvre et mémoire appauvrie), fatigue, nausées, sensation d’avoir la tête vide, changement de personnalité (irritabilité, frustration, anxiété, dépression), troubles visuels et auditifs ainsi qu’insomnie. On estime que recevoir un direct à la tête est l’équivalent de se faire frapper avec un sac de sable de 12 livres voyageant à une vitesse d’environ 40 kilomètres/heure.

Jean Pascal lance une droite foudroyante à Martin Desjardins lors deleur affrontement du 10 décembre 2005 au Casino de Montréal.

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LA ZONE DE BOXE 2e Année, Numéro 15 23 Blessures aux yeux Même si les yeux sont généralement bien protégés par les arcades sourcilières, ils sont très vulnérables aux coups. Les dommages peuvent résulter de contact direct sur l’œil et, selon la force du coup, engendrer une blessure à la rétine comme un détachement ou une hémorragie.

Un décollement de la rétine est une séparation de la rétine du mur arrière de l’œil. Quand il y a une déchirure de la rétine, le liquide du vitré (matière gélatineuse qui remplit l'espace à l'intérieur de l’œil en arrière du cristallin) peut passer par la déchirure et détacher la rétine. Pendant que le fluide s'accumule, le décollement rétinien devient plus important. Les secteurs isolés de la rétine perdent alors leur sensibilité à la lumière.

Avec les méthodes courantes, environ 9 décollements sur 10 de la rétine peuvent être réparés. Puisque le décollement peut endommager la rétine, la plupart des personnes ne récupèrent pas une vision parfaite.

Le détachement de la rétine signifie généralement la fin d’une carrière de boxe. Je dis généralement, car certains États ou pays n’ont pas de réglementation stricte en ce qui a trait à la boxe et à son encadrement. Au Québec, le prometteur Fathi Missaoui (12-0) a vu sa carrière prendre fin de cette manière. Peu de gens s’en souviennent, mais Shazzon Bradley (21-0), un boxeur poids lourd des débuts d’Interbox, a subi le même sort.

Blessures aux mains

Les mains d’un boxeur sont ses outils de travail. Il est donc important qu’elles soient en parfaite santé pour qu’un boxeur monte dans le ring. Cependant, comme elles sont constamment sollicitées, elles sont aussi très souvent en mauvais état. Rappelons-nous Arturo Gatti, Éric Lucas et Stéphane Ouellet qui ont eu des problèmes avec leurs mains tout au long de leur carrière. Contusions, hématomes, fractures et tendinites ne sont que certaines blessures parmi tant d’autres qui hantent les boxeurs et leur rendrent la vie difficile. Les pouces, les jointures (blessure actuelle d’Antonin Décarie), les carpes et les métacarpes sont souvent touchés par ces blessures. Les coups à répétition et la force de l’impact en sont la cause principale. Lorsque quelqu’un subit une blessure de ce type, l'os ne se replace pas nécessairement au même endroit lors de la guérison. Les tissus se refont et les ligaments reprennent une place qui n'était pas nécessairement la même qu'avant la blessure. La douleur finit par disparaître mais l'os, qui n'est plus à son endroit original, demeure plus fragile. Certains pugilistes ont besoin de chirurgie à la suite de blessures aux mains et malgré ces efforts, les mains ne reviendront jamais comme avant. Elles resteront vulnérables aux fractures.

Autres blessures

Il y a bon nombre d’autres blessures possibles dans ce monde barbare : coupures, contusions, fracture du nez, des côtes, de la mâchoire (comme Artur Abraham lors de son dernier combat contre Edison Miranda) ou des pommettes de la joue (comme Alain Bonnamie lors de ses deuxième et troisième combats contre Davey Hilton), élongations musculaires (récente blessure de Adonis Stevenson), claquages, déchirures ligamentaires ou musculaires (récente déchirure au biceps de Jean Pascal), saignements internes, etc. Mais toutes ces blessures ne sont que partie intégrante du métier de gladiateur des temps modernes. Cependant, elles ont des effets sur le vieillissement du corps. Nombre d’anciens pugilistes sont beaucoup plus sensibles à un vieillissement prématuré du corps et peuvent être affectés par des maladies aussi dégénératives que l’Alzheimer et le Parkinson. Leur cerveau est plus petit que la moyenne et leur matière grise plus mince à cause des milliers de coups qu’ils auront reçus à la tête tout au long de leur carrière.

Cependant, pour réduire au minimum les dangers rattachés à cette discipline, le site Internet de l’Association médicale mondiale (AMM) a dressé une liste de recommandations pour assurer la sécurité des combattants.

1. Les associations médicales nationales (AMN) devraient favoriser dans leur pays l'établissement d'un «registre national des boxeurs» regroupant tous les pugilistes amateurs et professionnels, y compris les partenaires d’entraînement. Le but de ce registre sera de regrouper les résultats de toutes les rencontres mettant aux prises des boxeurs licenciés, y compris les K.-O. techniques, les K.-O. et autres blessures dues à la boxe, et de consigner ces blessures ainsi que les victoires et les défaites de chaque boxeur.

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2. Les AMN devraient étudier la possibilité d'organiser des conférences avec les membres de la profession médicale intéressés, les représentants des différentes commissions gouvernementales de boxe et des représentants d'organisations de boxe professionnelle et amateur. Ils pourraient étudier les critères sur lesquels doivent se baser les examens physiques et neurologiques des boxeurs, déterminer d'autres mesures médicales nécessaires à la prévention de lésions cérébrales et mettre au point des critères spécifiques permettant d'interrompre un combat pour raison médicale.

3. Toutes les autorités compétentes en matière de boxe devraient veiller à ce que le médecin du ring soit autorisé à interrompre, à n'importe quel moment, un combat en cours, pour examiner un des adversaires et arrêter une rencontre qui, selon lui, pourrait provoquer de graves blessures à l'un des combattants.

4. Les autorités compétentes en matière de boxe devraient organiser fréquemment des formations médicales à l'intention de tous les membres du personnel de ring.

5. Ces mêmes autorités devraient veiller à autoriser des rencontres de boxe amateur ou professionnelle que si : a. le combat se déroule dans un lieu où des équipements de neurochirurgie appropriés sont

immédiatement disponibles pour prodiguer des soins d'urgence appropriés à un boxeur blessé; b. un équipement de réanimation avec oxygène et tubes endotrachéaux appropriés sont disponibles au

bord du ring; c. un plan complet a été établi pour l'évacuation d'un boxeur gravement blessé et son transport à

l'hôpital. 6. Les autorités compétentes en matière de boxe devraient être informées que les rencontres non surveillées

entre boxeurs non-licenciés sont des pratiques extrêmement dangereuses pouvant entraîner de graves blessures ou le décès des combattants, et que ces pratiques doivent être condamnées.

7. Toutes les autorités compétentes en matière de boxe devraient utiliser des équipements de sécurité tels que tapis en plastique et piquets rembourrés et encourager le renforcement permanent des équipements de sécurité.

8. Toutes les autorités compétentes en matière de boxe devraient prévoir des mesures de sécurité également pour les partenaires d’entraînement.

9. Toutes les autorités compétentes en matière de boxe devraient actualiser et standardiser les examens médicaux pour les boxeurs et assurer la pratique rigoureuse de ces examens.

Au Québec, nous sommes chanceux, car non seulement la boxe est en santé, mais les boxeurs aussi! Ils sont bien suivis et encadrés par une équipe de professionnels. Physiothérapeutes, médecins, nutritionnistes font désormais partie intégrante de la vie d’un boxeur. Les athlètes doivent chaque année passer une batterie de tests afin de renouveler leur permis de boxeur. Ils sont examinés par un médecin avant chaque combat et la Régie s’assure de l’équité des combats pour ne pas voir de combats à sens unique. De plus, les neuf points apportés par l’AMM sont respectés par la plupart des promoteurs au Québec. En conclusion, nous pouvons dire que depuis quelques années, quelques tragédies (Gaétan Hart face à deux adversaires différents, Ralph Racine qui passa plusieurs jours dans le coma et Cleveland Denny qui lui ne se réveillera jamais) ont permis d’apprendre des erreurs du passé et les professionnels ont déployé plusieurs efforts pour que ce sport reste à la fois spectaculaire et sécuritaire.

Références :

Site de l’Association mondiale médicale. http://www.wma.net/f/index.htm

Conseil Québécois de la Boxe : http://www.cqb.ca/sante.php

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Joachim Alcine, capitaine de l’équipe de boxeurs

chez GYM.

L’échelle de priorité de GYM Par Pascal Lapointe - [email protected]

Compte tenu des liens étroits qu’il tisse avec les boxeurs dont il se charge de la promotion, le Groupe Yvon Michel (GYM) donne l’impression de miser grandement sur l’esprit d’équipe, comme en témoigne sa décision d’attribuer à l’un de ses poulains le titre de capitaine. Mais dans l’équipe GYM comme dans toute formation de sport professionnel, certains joueurs représentent un plus grand facteur de succès que d’autres. Nous nous sommes donc demandé à quoi ressemblerait l’équipe GYM si nous en classions les membres selon notre perception de leur importance aux yeux de la haute direction. Par souci de clarté, nous avons associé chaque pugiliste à l’une de cinq catégories dont nous avons emprunté le nom au vocabulaire du football américain : partants, premiers choix au repêchage, réguliers, unités spéciales et équipe d’entraînement.

Les partants 1. Joachim Alcine. Non seulement va-t-il finalement livrer un combat de

championnat du monde, mais il évolue également dans une catégorie au potentiel financier élevé. Son statut de leader est incontesté au sein de l’écurie, comme l’illustre son titre de capitaine que lui a cédé Otis Grant à sa retraite.

2. Hermann Ngoudjo. Il y a quelques mois, nous n’aurions jamais osé le classer devant Jean Pascal, mais son excellente prestation dans la défaite contre Jose Luis Castillo (deuxième super-léger du monde selon The Ring) lui a permis de devenir un acteur incontournable dans sa catégorie de poids et un pugiliste apprécié du tout puissant réseau de télé américain HBO.

3. Jean Pascal. Ne laissez pas sa troisième place vous leurrer : le pugiliste de Laval demeure une éventuelle poule aux œufs d’or pour GYM, qui lui donne un appui indéfectible. Profitant d’une notoriété grandissante auprès d’importants décideurs américains, Pascal pourrait faire beaucoup de chemin au cours des deux prochaines années.

4. Sébastien Demers. Pris en charge comme un espoir d’exception dès le début de sa carrière professionnelle, il a livré 20 combats en tout juste plus de deux ans. Ce rythme effréné lui permet maintenant, malgré un relatif manque d’expérience, de jouer les têtes d’affiche au Casino sans l’appui de l’un des trois boxeurs qui le précèdent. Il pourrait faire un autre grand bond en avant si un combat contre le titulaire IBF des poids moyens, Arthur Abraham, se concrétise.

5. David Cadieux. En deux victoires convaincantes sur Patrice L’Heureux, il a conquis les titres de champion québécois et canadien ainsi qu’une place parmi les priorités du Groupe Yvon Michel. Des doutes subsistent encore à son égard, mais la valeur marchande d’un poids lourd peut exploser après deux ou trois victoires opportunes. On s’attend à ce que son nom figure régulièrement sur la marquise, notamment pour un choc fratricide face à Paul Mbongo.

6. Antonin Décarie. Nous avons pensé un instant à le placer dans le groupe des «réguliers», mais s’il a décidé de passer d’Interbox à GYM, c’est sans doute que son nouveau promoteur lui a promis de ne jamais le laisser sur le banc. Yvon Michel n’a d’ailleurs pas hésité à faire du pugiliste de Laval sa tête d’affiche d’un gala télédiffusé à TVA après que Ngoudjo a été forcé de déclarer forfait.

Les premiers choix au repêchage

7. Adonis Stevenson. Parce qu’il ne peut évoluer aux États-Unis, on se demande exactement quel plan GYM a échafaudé pour lui, mais en lui proposant une finale au Casino à son quatrième combat et en lui assignant le coriace Christian Cruz deux combats plus tard – même si en fin de compte le duel a été annulé –, le promoteur semble dévoiler de grandes ambitions.

8. Phil Lo Greco. Inconnu du public québécois, «The Italian Sensation» fait néanmoins l’objet d’un traitement digne d’une super-vedette. Il compte seulement huit combats, mais il est manifeste que GYM mise beaucoup sur son style spectaculaire et l’appui dont il jouit au sein de la communauté italienne de la région de Montréal.

9. David Lemieux. À 18 ans, Lemieux est comme un receveur de passe qui n’a jamais joué que pour son équipe d’école secondaire, mais qui a parcouru 40 verges en 4,3 secondes lors d’un camp d’évaluation. GYM compte sans doute lui donner de 20 à 25 combats au cours des trois prochaines années afin de véritablement cerner son potentiel.

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Les réguliers

10. Renan St-Juste. En un round – c’est tout le temps qu’il a pris pour se débarrasser de Walid Smichet –, il a donné un élan nouveau à sa carrière. À court terme, GYM devrait lui accorder suffisamment d’attention, le temps de tenter une percée nord-américaine. Toutefois, vu son âge avancé pour un boxeur (34 ans), il ne peut se permettre une deuxième défaite.

11. Stéphane Desormiers. Ses limites ont peut-être été mises au jour en 2006, mais il demeure un actif pour le Groupe Yvon Michel parce que sa participation à un gala peut favoriser la vente de billets. S’il remportait quelques combats, des demi-finales au Casino (donc à la télé), ne sont pas hors de question pour lui. Une victoire sur Ian MacKillop aurait bien entendu été préférable, mais comme le match retour pourrait très bien être télédiffusé, le verdict nul ne lui a pas été trop dommageable.

12. Patrice L’Heureux. Son règne de champion canadien a donné un fier coup de main à GYM au cours des deux premières années d’existence de l’entreprise. Le promoteur le tiendra sans doute occupé en préliminaires lors des galas à Montréal tout en s’efforçant d’organiser d’autres soirées à Shawinigan, où « Le Granite » pourrait, entre autres, tenter de prendre sa revanche sur Steve Pannell.

13. Andrew Kooner. L’Ontarien, qui a bénéficié du traitement première classe à ses débuts (copromotion avec Mick Hennessy; efforts soutenus de promotion), pourrait se retrouver rapidement en classe économique s’il continue à connaître autant de difficultés. Il reste qu’il possède beaucoup de talent.

Les unités spéciales

14. Olivier Lontchi. Il se bat toujours ou presque en lever de rideau, même en championnat canadien. Néanmoins, de bonnes performances en bonnes performances, comme celle de mars dernier face à Roman Campos, il a fini par convaincre tout le monde : il a beaucoup progressé, si bien que certains décideurs se demandent s’il ne possèderait pas l’un des plus beaux potentiels de l’écurie.

15. Moncef Askri. Il est difficile à classer car son potentiel suscite l’enthousiasme, même si des problèmes personnels lui imposent de longues périodes d’inactivité. Son cas sera plus facile à évaluer lorsqu’il aura fait son retour.

16. Walid Smichet. De l’extérieur, on a l’impression qu’il a perdu bien des galons lors de sa défaite contre St-Juste. Peut-être que sa victoire sur Matt O’Brien pourrait l’aider à se repositionner, mais la manière dont ce triomphe a été acquis a davantage fait ressortir ses faiblesses que son potentiel.

17. Paul Mbongo. Son âge, son petit gabarit et son attitude jouent contre lui, mais il conserve de la valeur pour GYM puisqu’il est prévu qu’il livre un combat, voire deux, à David Cadieux, probablement à Trois-Rivières.

18. Manolis Plaitis. Malgré un bagage amateur qui n’a rien à voir avec la vaste majorité de ses compagnons d’écurie, Plaitis a attiré l’attention de GYM par sa fougue et son attrait au sein de la communauté grecque. Pour l’instant, il est utile en préliminaires, livrant de courts combats explosifs, et l’avenir lui appartient.

L’équipe d’entraînement

19. Ian MacKillop. À l’origine, GYM l’avait pressenti comme « cerbère de luxe », et il a encore joué ce rôle à merveille dernièrement en remplaçant au pied levé Jason Naugler face à Sébastien Demers, puis en acceptant peu après un combat contre Stéphane Desormiers. Le promoteur lui en est reconnaissant, mais il le considère toujours comme un adversaire, pas comme un poulain.

Réclamé au ballottage par une autre équipe

20. Adam Green. Sa carrière en dégringolade après avoir perdu trois de ses quatre derniers combats, il a vu Régis Lévesque lui offrir sa meilleure bourse à vie pour affronter Davey Hilton. Dans un dénouement qui doit plaire à toutes les parties, GYM a décidé de céder son contrat au coloré promoteur.

21. Paul Clavette. Étant donné son style qui plaît peu au grand public et la profondeur de l’écurie de l’écurie chez les poids moyens, Clavette a été libéré en début d’année. Il est rapidement retombé sur ses pieds, dominant Martin Berthiaume lors du programme de Régis Lévesque. Pour lui, l’idéal serait un choc de styles contre Renan St-Juste, mais nous imaginons mal GYM lui offrir un combat aussi peu de temps après rompu les liens avec lui.

Tout récemment, le Groupe Yvon Michel vient de signer Dierry Jean. Il est un peu tôt pour pouvoir placer ce boxeur dans l’échelle de priorité de GYM.

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CLASSEMENTS QUÉBÉCOIS Mise à jour : 1er mai 2007

Catégorie des Lourds (200 lbs et plus)

Champion du Québec David Cadieux 16-1, Trois-Rivières 1-J-F Bergeron (26-0-0) 2-Patrice L'Heureux (20-3-1) 3- Paul Mbongo (11-1-1) 4- Stéphane Tessier (3-12-0)

Catégorie des Lourds-légers (200 lbs) Champion du Québec: vacant * Eric Barrak (2-0-0) (non-classé) * Jean-François Leduc (2-0-0) (non-classé) * Christian Côté (1-0-0) (non-classé)

Catégorie des Mi-lourds (175 lbs)

Champion du Québec David Whittom 7-3-1, Lac-Beauport 1- Carl Handy (21-7-2) 2- Mike Melligan (0-4-0)

Catégorie des Super moyens (168 lbs)

Champion du Québec Nicholson Poulard 5-2 , Laval 1- Adonis Stevenson (6-0-0) 2- Martin Desjardins (6-12-3)

Catégorie des Moyens (160 lbs)

Champion du Québec : Paul Clavette 9-1-1 , Brossard 1- Renan St-Juste (13-1-1) 2- Walid Smichet (16-2-3) 3- Martin Berthiaume (14-1-2) 4- Ali Nestor Charles (6-5-1) 5- Jacques Lemaire (5-4-0)

Catégorie des Super mi-moyens (154 lbs)

Champion du Québecl Vacantl

l

1- Ian Mackillop (25-8-2) 2- Adam Green (12-3-0) 3- Claudio Ortiz (6-11-0) 4- Yan Lecavalier (2-8-1) 5- Patrick Tessier (1-4-0)

Catégorie des Mi-moyens (147 lbs)

Champion du Québecl Victor Lupol

16-0-1, Torontol

1- Jojo Dan (16-0-0) 2- Stéphane Desormiers (15-2-1)

3- Hercules Kyvelos (24-3-0) 4- Phil Lo Greco (10-0-0)

5- Moncef Askri (9-0-0) 6- Stéphane Monast (3-1-0)

Catégorie des Super-légers (140 lbs)

Champion du Québecl Sébastien Hamell 6-9-1, Longueuill

1- Abou Sako (6-3-3)

2- Manolis Platis (8-0) 3- Dierry Jean (4-0)

4- Ahmad Cheikho (2-1-2) 5- Stéphane Chartrand (1-3-0)

6- Jean Charlemagne (1-2-1)

Catégorie des Légers (135 lbs)

Champion du Québecl Benoît Gaudetl

11-1, Drummondvillel

1- Leonardo Rojas (7-5-3)

Catégorie des Super plumes (Jusqu'à 130 lbs)

Champion du Québec : Andrew Singh Kooner (5-1-0)

1- Olivier Lontchi (12-0-1)

2- Sébastien Gauthier (10-0-0) 3- Baha Laham (3-0-0) 4- Jorge Banos (2-2-2)

5- Martin Huppé (1-4-0) 6- Mathias Tchikaya (0-3-2)

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