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    LABC

    du droit communautaire

    par Klaus-Dieter Borchardt

    Documentation europenne

    Direction gnrale de lducation et de la culture

    Commission europenne

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    Cette brochure de la srie Documentation europenneest dite dans toutes les langues de lUnion euro-

    penne: allemand, anglais, danois, espagnol, finnois, franais, grec, italien, nerlandais, portugais et su-dois.

    DANS LA MME COLLECTIONLEurope de A Z(1997)Dix leons sur lEurope(1998)La Commission europenne(1999)

    De nombreuses autres informations sur lUnion europenne sont disponibles sur Internet via le serveur Europa(http://europa.eu.int).

    Commission europenneDirection gnrale de l'ducation et de la cultureUnit Publications, rue de la Loi 200, B-1049 Bruxelles

    Une fiche bibliographique figure la fin de louvrage.

    Luxembourg: Office des publications officielles des Communauts europennes, 2000

    ISBN 92-828-7804-X

    Communauts europennes, 2000Reproduction autorise

    Printed in Belgium

    IMPRIM SUR PAPIER BLANCHI SANS CHLORE

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    LABC

    du droit communautaire

    Manuscrit rdig par Klaus-Dieter Borchardt,

    termin en septembre 1999

    Page de couverture: dessin de Mario Ramos

    Cinquime dition

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    INTRODUCTION:

    DE PARIS MAASTRICHT ET AMSTERDAM EN PASSANT PAR ROME

    PRINCIPES FONDAMENTAUX DE LUNION EUROPENNE

    LUE, GARANTE DE LA PAIX LUNIT ET LGALIT COMME LEITMOTIVE LES LIBERTS FONDAMENTALES LE PRINCIPE DE SOLIDARIT

    LE RESPECT DE LIDENTIT NATIONALE LE DSIR DE SCURIT LES DROITS FONDAMENTAUX DANS LUE

    LA CONSTITUTION DE LUNION EUROPENNE

    LA STRUCTURE DE LUNION EUROPENNE LA NATURE JURIDIQUE DE LA CE ET DE LUE LES TCHES DE LUE

    LES POUVOIRS DE LUE LES INSTITUTIONS DE LUE

    Le Conseil europen Le Parlement europen Le Conseil de lUnion europenne La Commission europenne La Cour de justice et le Tribunal de premire instancedes Communauts europennes La Cour des comptes europenne Les organesauxiliaires: le Comit conomique et social; le Comit des rgions; la Banqueeuropenne dinvestissement; la Banque centrale europenne

    LORDRE JURIDIQUE COMMUNAUTAIRE LUE EN TANT QUE CRATION DU DROIT ET COMMUNAUT PAR LE DROIT LES SOURCES JURIDIQUES DU DROIT COMMUNAUTAIRE

    Les traits fondateurs, droit communautaire originaire Les actes juridiques commu-nautaires, droit communautaire driv Les traits internationaux conclus par la CE Les sources non crites: les principes gnraux du droit; le droit coutumier Lesaccords entre les tats membres

    LES INSTRUMENTS DONT DISPOSE LA CERglements et dcisions gnrales CECA Directives et recommandations CECA

    Dcisions individuelles Actes non contraignants Rsolutions, dclarations et pro-grammes daction2

    SOMMAIRE

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    LA PROCDURE LGISLATIVE DE LA CE

    La procdure de consultation La procdure de coopration La procdure decodcision La procdure de lavis conforme La procdure simplifie Les procdures dadoption des mesures dexcution

    LE SYSTME DE PROTECTION JURIDIQUE DE LA CEProcdure dinfraction aux traits Recours en annulation Recours en carence Action en rparation Recours des fonctionnaires Procdure de pourvoi Protection juridique provisoire Renvoi prjudiciel

    LA RESPONSABILIT DE LTAT MEMBREDU FAIT DE VIOLATIONS DU DROIT COMMUNAUTAIRE

    LA PLACE DU DROIT COMMUNAUTAIREDANS LENSEMBLE DU SYSTME JURIDIQUE

    LAUTONOMIE DE LORDRE JURIDIQUE COMMUNAUTAIRE LINTERACTION ENTRE LE DROIT COMMUNAUTAIRE

    ET LE DROIT NATIONAL LE CONFLIT ENTRE LE DROIT COMMUNAUTAIRE

    ET LE DROIT NATIONALLapplicabilit immdiate du droit communautaire La prminence du droit communautaire

    CONCLUSION

    JURISPRUDENCE

    ANNEXE TABLEAUX DES QUIVALENCES

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    Peu aprs la fin de la Seconde Guerremondiale, le fonctionnement de ltatet la vie politique dans nos pays reposaientencore presque exclusivement sur les cons-titutions et les lois nationales. Celles-cifixaient dans nos pays dmocratiques les

    rgles de conduite que les citoyens et lespartis, mais galement ltat et ses institu-tions, taient tenus de respecter. Il aurafallu attendre leffondrement total delEurope et le dclin conomique et poli-tique du vieux continent pour pouvoir jeterles bases dun renouveau et donner uneimpulsion lide dun nouvel ordreeuropen.

    Dans leur ensemble, les efforts dunifica-tion europenne daprs-guerre renvoientlimage dconcertante dune myriade dor-ganisations complexes et difficiles cerner. Ainsi coexistent sans vritable lienentre elles des organisations telles quelOCDE (Organisation de coopration etde dveloppement conomiques), lUEO(Union de lEurope occidentale), lOTAN

    (Organisation du trait de lAtlantiqueNord), le Conseil de lEurope et lUnioneuropenne, cette dernire reposant sur laCommunaut europenne du charbon etde lacier, la Communaut europenne delnergie atomique et la Communauteuropenne. Selon les organisations, lenombre dtats membres varie de dix(UEO) quarante (Conseil de lEurope).

    Cette diversit dinstitutions europennesnacquiert une structure que si lon se

    penche sur les objectifs concrets des dif-frentes organisations. On peut alors dis-tinguer trois grands groupes dcrits ci-aprs.

    Premier groupe:

    les organisations euro-atlantiques

    Les organisations euro-atlantiques sontissues de lalliance conclue aprs laSeconde Guerre mondiale entre les tats-Unis dAmrique et lEurope. Ce nestdonc pas un hasard si la premire organi-sation europenne daprs-guerre, savoirlOECE (Organisation europenne decoopration conomique), fonde en1948, a t cre linitiative des tats-Unis. George Marshall, ministre amricaindes affaires trangres de lpoque, a inviten 1947 les tats europens unir leursefforts pour la reconstruction conomiqueet leur a promis cet gard le soutien destats-Unis, soutien qui sest concrtisdans le plan Marshall et a jet les basesdune reconstruction rapide de lEurope

    occidentale. La mission initiale de lOECEtait essentiellement de libraliser leschanges entre les tats. En 1960, lesmembres de lOECE, que les tats-Unis etle Canada venaient de rejoindre, sont con-venus dlargir le champ daction delOECE laide aux pays en voie dedveloppement. LOECE est alors devenuelOCDE.

    la cration de lOECE avait succd, en1949, celle de lOTAN, sous la forme 5

    INTRODUCTION: DE PARIS MAASTRICHTET AMSTERDAM EN PASSANT PAR ROME

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    dun pacte militaire avec les tats-Unis et

    le Canada. LUnion de lEurope occiden-tale a t institue en 1954 pour ren-forcer la collaboration en matire depolitique de scurit entre les tatseuropens. Elle est issue du trait deBruxelles dj conclu entre la Belgique,la France, le Luxembourg, les Pays-Bas etle Royaume-Uni, auxquels se sontalors joints la Rpublique fdrale

    dAllemagne et lItalie. Entre-temps, laGrce, lEspagne et le Portugal en sontgalement devenus membres. CetteOrganisation offre ses membres uneplate-forme de coopration troite enmatire de politique de dfense et de

    scurit. Elle renforce ainsi le poids poli-

    tique de lEurope dans le cadre delAlliance atlantique tout en affirmantlidentit europenne dans les domainesde la dfense et de la scurit.

    Deuxime groupe:le Conseil de lEurope et lOSCE

    Les organisations europennes com-posant le deuxime groupe se carac-trisent par une structure qui permet unmaximum dtats de cooprer en leursein. Il a t dlibrment convenu queces organisations niraient pas au-del dela coopration traditionnelle entre tats.

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    Dans ce groupe figure le Conseil de

    lEurope, organisation politique fonde le5 mai 1949. Les statuts du Conseil delEurope nindiquent en rien quil vise une fdration ou une union et neprvoient ni un transfert ni lexercice encommun dlments de souverainetnationale. Le Conseil de lEurope prend sesdcisions sur toutes les questions impor-tantes selon le principe de lunanimit.

    Nimporte quel tat peut donc empcherladoption dune dcision en opposant sonveto, rgle quon trouve galement au seindu Conseil de scurit de l'Organisationdes Nations unies (ONU). Le Conseil delEurope reste donc, dans sa conception,un organisme de coopration interna-tionale. Le Conseil de lEurope a prsid la conclusion de nombreuses conventionsdans les domaines de lconomie, de la

    culture, de la politique sociale et du droit.Lexemple le plus important et le plusconnu est celui de la conventioneuropenne de sauvegarde des droits delhomme et des liberts fondamentales,signe le 4 novembre 1950. Elle a permisdtablir dans les tats membres non seule-ment un niveau minimal important de pro-tection des droits de lhomme, mais gale-ment un systme de garanties juridiqueshabilitant les organes institus par la con-vention, cest--dire la Commission et laCour europenne des droits de lhommede Strasbourg, condamner, dans le cadrede ses dispositions, les atteintes aux droitsde lhomme dans les tats membres.

    ce groupe appartient galementlOrganisation pour la scurit et la

    coopration en Europe (OSCE), institueen 1994 et issue de la Confrence sur la

    scurit et la coopration en Europe.

    LOSCE est lie aux principes et aux objec-tifs dfinis par lacte de Helsinki de 1975et la charte de Paris de 1990. Au nombredentre eux figurent, outre la promotion demesures de confiance entre les tatseuropens, ltablissement dun filet descurit destin aplanir les conflits pardes moyens pacifiques. Lhistoire rcente amontr que cest prcisment dans ce

    domaine que lEurope a encore beaucoup faire.

    Troisime groupe:lUnion europenne

    Le troisime groupe dorganisationseuropennes comprend lUnion euro-penne, qui repose elle-mme sur laCommunaut europenne du charbon et

    de lacier, la Communaut europenne delnergie atomique et la Communauteuropenne.

    LUE se distingue des associations clas-siques dtats par une nouveaut fonda-mentale: elle runit en son sein des tatsmembres qui ont renonc une partie deleur souverainet au profit de la CE et ontdot cette dernire de pouvoirs propres etindpendants des tats membres. Danslexercice de ces pouvoirs, la CE est enmesure darrter des actes europens dontles effets sont les mmes que ceux qui sontadopts par les tats.

    La premire pierre de la constructiondune Communaut europenne est ladclaration du 9 mai 1950 du ministre

    franais des affaires trangres, RobertSchuman, qui prsentait le plan quil avait 7

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    labor avec Jean Monnet en vue dunifier

    lindustrie europenne du charbon et delacier en une Communaut europennedu charbon et de lacier. Ctait une initia-tive historique en faveur dune Europeorganise et vivante, qui est indispen-sable la civilisation et sans laquelle lapaix mondiale ne saurait tre sauve-garde. Le plan Schuman est devenuralit, le 18 avril 1951, Paris (trait de

    Paris), avec la conclusion par les six paysfondateurs (Belgique, Rpublique fdraledAllemagne, France, Italie, Luxembourget Pays-Bas) du trait instituant laCommunaut europenne du charbon etde lacier(CECA). Il est entr en vigueur le23 juillet 1952. Quelques annes plustard, les mmes tats ont institu par lestraits de Rome du 25 mars 1957 laCommunaut conomique europenne

    (CEE) et la Communaut europenne delnergie atomique(CEEA ou Euratom), quiont commenc leurs activits lors de len-tre en vigueur des traits, le 1er janvier1958.

    La cration de lUnion europenne (UE) parle trait de Maastrichta marqu une nou-velle tape dans le processus visant uneunion politique europenne. Ce trait, djsign le 7 fvrier 1992 Maastricht, maisqui a d surmonter plusieurs obstacles lorsde sa ratification (la population danoise aconsenti la ratification lissue de deuxrfrendums, et en Allemagne un recoursconstitutionnel a t introduit contre lap-probation du trait par le Parlement) avantde pouvoir entrer en vigueur le 1er novem-bre 1993, sest dfini lui-mme comme une

    nouvelle tape dans le processus crantune union sans cesse plus troite entre les

    peuples de lEurope. Il comporte, outre

    une srie de modifications des traits C(E)Eet CEEA, lacte fondateur de lUnioneuropenne, sans pour autant y apporter ladernire pierre. Il sagit, tout comme ledveloppement de la CE, dun premier pasvers un ordre constitutionnel europendfinitif permettant galement la mise enplace dune constitution de la CE. Depuislors, lUE a dj franchi une premire tape

    supplmentaire avec le trait dAmsterdam,sign le 2 octobre 1997 Amsterdam etentr en vigueur le 1er mai 1999, lissuedes procdures de ratification des tatsmembres. Une nouveaut qui mrite dtrereleve ici est lintroduction dans le traitUE dune clause de flexibilit qui permetune collaboration plus troite entre tatsmembres, sous certaines conditions, par lerecours aux institutions, aux procdures et

    aux mcanismes prvus par les traits com-munautaires. La voie a donc t ouverte,malgr les limites imposes par certainesexigences, vers une Europe plusieursvitesses. LUnion europenneainsi tabliene remplace pas les Communautseuropennes, contrairement ce quaffir-ment quelquefois les mdias, mais lesassocie aux nouvelles politiques et formesde coopration (article 47 du trait UE). Entermes imags, lUnion europennesappuie donc sur trois piliers: lesCommunauts europennes, la politiquetrangre et de scurit commune et lacoopration judiciaire et policire. Ces troispiliers seront prsents de manire dtailledans un chapitre particulier consacr laConstitution de lUE.

    Les tats membres de lUEsont en premierlieu les six pays fondateurs de la CE, 8

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    savoir la Belgique, lAllemagne (qui sest

    largie, aprs la runification des deuxtats allemands le 3 octobre 1990, au terri-toire de lex-RDA), la France, lItalie, leLuxembourget les Pays-Bas. Le 1er janvier1973, le Danemark (exception faite duGroenland qui, en fvrier 1982, sestprononc une courte majorit contreladhsion de lle la CE), lIrlandeet leRoyaume-Uniont rejoint la Communaut.

    Ladhsion galement prvue de laNorvge a t rejete par un rfrendumen octobre 1972 (53,5 % de votes contre).En 1976 et en 1977, la Grce, lEspagneetle Portugal ont pos leur candidature ladhsion. Cet largissement vers le Suda t ralis le 1er janvier 1986 avec lad-hsion de lEspagne et du Portugal, alorsque la Grce tait dj membre de la CEdepuis le 1er janvier 1981. cet largisse-ment vers le Sud a succd, le 1er janvier1995, ladhsion de lAutriche, de laFinlande et de la Sude lUnioneuropenne (UE) qui avait t tablieentre-temps, le 1er novembre 1993, parlentre en vigueur du trait de Maastricht.La Norvge a refus dadh-rer comme vingt-deux ans aupara-vant par une courte majorit, 52,4 %

    des citoyens stant prononcs par rfren-dum contre ladhsion de leur pays.Depuis le 1er janvier 1995, quinze tatseuropens se sont donc unis au sein delUE. Dautres demandes dadhsion ontt prsentes par la Turquie (1987),Chypre (1990), la Suisse (1992 la candi-dature nest pour lheure pas examine), laHongrie (1994), la Pologne (1994),

    la Roumanie (1995), la Lettonie (1995), laSlovaquie (1995), lEstonie (1995), laLituanie (1995), la Bulgarie (1995), la

    Rpublique tchque (1996), la Slovnie

    (1996) et Malte (demande renouvele en1998). Dans sa communication intituleAgenda 2000, date de juillet 1997, laCommission a donn son avis au Conseilde lUE sur les demandes dadhsion.Runi Luxembourg en dcembre 1997,le Conseil europen a tabli le cadre duprocessus dlargissement gnral tousles candidats ladhsion ( lexception de

    la Suisse). Ce processus compte troistapes successives prsentes ci-aprs.

    La confrence europenne, qui sestrunie pour la premire fois le 12 mars1998 Londres, constitue une enceintemultilatrale runissant les dix paysdEurope centrale et orientale (PECO),Chypre et, depuis peu, Malte. Elle seveut un forum de consultation politique

    sur des questions ayant trait la poli-tique trangre et de scurit commune(PESC), la justice et les affairesintrieures et la coopration rgionale.

    Le processus dadhsion concerne lesdix PECO, Chypre et Malte. Ces paysdoivent satisfaire aux mmes critresdadhsion lUE et participer auxprocessus dadhsion dans les mmes

    conditions. Grce une stratgie depradhsion particulire, tous lescandidats doivent tre en mesure dint-grer autant que possible lacquiscommunautaire avant mme leur adh-sion. La Commission prsente rgulire-ment au Conseil des rapports (le premierdate de la fin de 1998) sur les progrsdes PECO sur la voie de ladhsion,

    accompagns, le cas chant, derecommandations pour louverture desngociations dadhsion.

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    Les ngociations dadhsion ont t

    entames le 31 mars 1998 avec les sixpays retenus par la Commission(Chypre, Estonie, Hongrie, Pologne,Rpublique tchque et Slovnie). Cesngociations se droulent sous la formede confrences bilatrales dadhsionavec chaque pays candidat et nesachvent pas ncessairement enmme temps.

    Lordre juridique qui sous-tend lUE faitdores et dj partie intgrante de notreralit politique et sociale europenne.Chaque anne, les traits communautairessont lorigine de milliers de dcisions quiinfluent directement sur la ralit des tatsmembres de lUE et sur celle de leursressortissants. Depuis longtemps, les

    Europens ne sont plus seulement citoyens

    de leur ville, de leur commune ou de leurtat, mais galement citoyens de lUnion.Cest une des raisons pour lesquelles il esttrs important quils soient informs sur unordre juridique qui concerne leur vie quo-tidienne. Il leur est toutefois difficile dap-prhender lensemble de lUE et sonsystme juridique. La difficult est double:dune part, les textes des traits sont

    souvent peu clairs et leur porte nest pasfacile saisir; dautre part, nombre de con-cepts utiliss dans les traits pour matriserde nouvelles situations sont inhabituels.On sefforcera ici de montrer en quoi con-siste la construction de lUE et dexpliquerau citoyen europen quels sont les piliersde lordre juridique europen (1).

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    (1) La prsente brochure utilise la nouvellenumrotation des articles du trait introduitepar le trait dAmsterdam. Le tableau desquivalences fourni en annexe vous aidera retrouver les articles familiers dont les

    numros ont chang.

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    La construction dune Europe unie sefonde sur des principes fondamentauxdont les tats membres se rclament aussiet dont lapplication est confie auxorganes excutifs de lUE. Au nombre deces principes reconnus figurent la ralisa-

    tion dune paix durable, lunit, lgalit,la libert, la scurit et la solidarit. LUEest explicitement fonde sur le respect dela libert, de la dmocratie et de ltat dedroit, principes qui sont communs auxtats membres (article 6, paragraphe 1, dutrait UE). Ces principes ainsi que la pro-tection des liberts et des droits fonda-mentaux ont t renforcs par le trait UE

    qui prvoit, pour la premire fois, desmesures en cas de violation des principesde lUnion (articles 7 et 8 du trait UE).Concrtement, cela signifie que, si leConseil de lUE, runi au niveau des chefsdtat ou de gouvernement sur proposi-tion dun tiers des tats membres ou de laCommission et aprs avis conforme duParlement europen, constate lexistencedune violation grave et persistante de

    principes de lUnion, il peut dcider, lamajorit qualifie, de suspendre certainsdes droits dcoulant de lapplication destraits UE et CE ltat membre en ques-tion, y compris les droits de vote dureprsentant du gouvernement de cet tatmembre au sein du Conseil. Ce faisant, leConseil tient compte des consquencesventuelles dune telle suspension sur les

    droits et les obligations des personnesphysiques et morales. Les obligations qui

    incombent ltat membre en question autitre des traits UE et CE restent en touttat de cause contraignantes pour cet tat.

    LUE, GARANTE DE LA PAIX

    Le moteur le plus puissant de lunificationeuropenne a t la soif de paix. Au coursde ce sicle, deux guerres mondiales ontoppos des tats europens aujourdhuimembres de lUE. Il nest donc pas ton-nant que politique europenne et poli-tique de paix aillent de pair. La crationde lUE a mis en place un ordre quiempche toute nouvelle guerre entre ses

    pays membres. Plus de quarante annesde paix en Europe sont l pour le prouver.

    LUNIT ET LGALITCOMME LEITMOTIVE

    Quant au leitmotiv de lUE, cest lunit.Elle constitue le seul moyen pour les tatseuropens de matriser leurs problmesactuels, et beaucoup sont davis que la

    paix en Europe et dans le monde, ladmocratie et ltat de droit, la prospritconomique et le bien-tre social nesauraient tre assurs lavenir sans lin-tgration europenne et lUE. Chmage,croissance insuffisante et pollution sontautant de problmes persistants qui nepeuvent plus tre rsolus au seul niveaunational. Ce nest que dans le cadre delUE que peut tre tabli un ordreconomique stable, et il faut que les

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    PRINCIPES FONDAMENTAUXDE LUNION EUROPENNE

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    Europens sunissent pour mener une

    politique conomique internationalegarantissant la comptitivit de leurconomie et les fondements sociaux deltat de droit. Sans cohsion interne,lEurope ne saurait tre en mesure daf-firmer son indpendance politique etconomique vis--vis du reste du mondeni retrouver son influence sur la scneinternationale et jouer un rle dans la

    politique mondiale.

    Lunit ne peut exister que si lgalitestassure. Aucun citoyen europen ne peutfaire lobjet dune discrimination enraison de sa nationalit. Il faut luttercontre toute discrimination fonde sur lesexe, la race, lorigine ethnique, la reli-gion ou les convictions, un handicap,lge ou lorientation sexuelle. Tous les

    citoyens europens sont gaux devant laloi. Quant aux tats membres, aucundentre eux ne doit bnficier duneprminence, et, pour rpondre auprincipe de lgalit, il convient de ne pastenir compte des diffrences naturelles,par exemple, en matire de superficie, denombre dhabitants ou de structures.

    LES LIBERTSFONDAMENTALES

    La paix, lunit et lgalit ont pour corol-laire la libert. La cration dun grandespace runissant prsent quinze tatsgarantit une srie de liberts: celle de lacirculation par-del les frontiresnationales, notamment pour les tra-vailleurs, celle de ltablissement et de la

    prestation de services, celle de la circula-tion des marchandises et des capitaux.

    Autant de liberts fondamentales qui per-

    mettent lentreprise de dcider libre-ment, au travailleur de choisir librementson emploi et au consommateur de dis-poser dun ventail des produits les plusdivers. La libre concurrence ouvre auxentreprises des dbouchs bien pluslarges; lespace constitu par lUE permetau travailleur de chercher un emploi ouden changer en fonction de ses qualifica-

    tions et de ses intrts; la gamme des arti-cles offerts dans un systme de concur-rence accrue est telle que lutilisateurpeut choisir les moins chers et lesmeilleurs.

    LE PRINCIPE DE SOLIDARIT

    La libert exige, en contrepartie, la solida-rit: labus de libert se fait au dtriment

    dautrui. Cest pourquoi un ordre commu-nautaire, pour tre durable, devra tou-jours reconnatre comme principe fonda-mental la solidarit de ses membres etrpartir uniformment et quitablementles avantages cest--dire la prospri-t et les charges entre tous les membres.

    LE RESPECT DE LIDENTITNATIONALE

    LUnion respecte lidentit nationale deses tats membres (article 6, paragraphe 3,du trait UE). Les tats membres nedoivent pas se fondre au sein de lUE,mais se retrouver en elle tout en conser-vant leurs caractristiques nationales.Cest dans cette diversit de caractris-tiques et didentits nationales que lUE

    puise cette force morale quelle met auservice de tous.12

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    LE DSIR DE SCURIT

    Toutes ces valeurs de base sont, en dfini-tive, fonction de la scurit. lpoque onous vivons, caractrise par le mouve-ment, le changement et linconnu, la scu-rit devient un besoin lmentaire dont

    lUE doit galement tenir compte. Lescitoyens et les entreprises de la Com-munaut doivent savoir o les mnent lesmesures communautaires, et lUE doit leurapporter la stabilit dont ils ont besoin.Cest vrai pour la scurit de lemploi.Cest vrai aussi pour la scurit desmesures dcides par les entreprises, quidoivent pouvoir tre certaines du cadreconomique. Cest vrai enfin pour la scu-

    rit sociale de tous ceux qui vivent dans laCommunaut.

    LES DROITS FONDAMENTAUXDANS LUE

    On ne saurait parler de principes de baseet de valeurs primordiales sans soulever laquestion des droits fondamentaux descitoyens de la Communaut, dautant que

    lhistoire de lEurope a t marque depuisdeux sicles par les efforts constantsdploys pour renforcer la protection deces droits. Depuis les dclarations sur lesdroits de lhomme et des citoyens auXVIIIe sicle, liberts et droits fondamen-taux font partie intgrante des constitu-tions de la plupart des pays civiliss, etparticulirement des tats membres delUE. Les ordres juridiques de ces derniers

    reposent sur la sauvegarde du droit ainsique sur le respect de la dignit, de la 13

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    libert et des possibilits dpanouisse-

    ment de la personne humaine. Il existeaussi de nombreux accords internationauxen la matire, parmi lesquels la conventioneuropenne de sauvegarde des droits delhomme et des liberts fondamentalesrevt une importance exceptionnelle.

    Or, si lon recherche dans les traits insti-tuant la Communaut des dispositions

    garantissant expressment les liberts indi-viduelles du citoyen europen, on est dude ne rien trouver. Les traits, la dif-frence de la plupart des ordres juridiquesdes tats membres, ne contiennent pas decatalogue des droits fondamentaux. LeParlement europen, le Conseil de lUE etla Commission europenne, en tant quor-ganes politiques, se sont solennellementengags respecter les droits fondamen-

    taux dans leur dclaration commune du5 avril 1977. Les institutions communau-taires y ont soulign limportance desdroits fondamentaux pour la CE et se sontengages les respecter dans lexercice deleurs pouvoirs et dans la poursuite desobjectifs de la Communaut. Les chefsdtat ou de gouvernement ont adopt lamme position dans leur dclaration sur ladmocratie, au sommet des 7 et 8 avril1978 Copenhague. Certes, ces dclara-tions ne confrent pas des droits directsaux citoyens europens, mais elles ont uneimportance juridique considrable en tantque reconnaissance universelle des droitsfondamentaux au niveau communautaire.Par ailleurs, le trait UE accorde dsormais cette reconnaissance une formejuridique contraignante et oblige lUE

    respecter les droits fondamentaux, telsquils sont garantis par la convention

    europenne de sauvegarde des droits de

    lhomme et des liberts fondamentales,signe Rome le 4 novembre 1950, et telsquils rsultent des traditions constitution-nelles communes aux tats membres, entant que principes gnraux du droit com-munautaire (article 6, paragraphe 2, dutrait UE).

    Toutefois, la protection des droits fondamen-

    taux par un ordre juridique communautairea t assure au travers dune jurisprudenceconstante de la Cour de justice desCommunauts europennes (CJCE) tablierelativement tard, savoir en 1969. En effet,dans un premier temps, la CJCE avait rejettoutes les actions concernant les droits fon-damentaux au motif que les questions dedroit constitutionnel national ntaient pasde son ressort. La CJCE a d revenir sur sa

    position en raison notamment dun principequelle avait elle-mme tabli, savoir laprminence du droit communautaire sur ledroit national. En effet, cette prminencene vaut que si le droit communautaire est enmesure de garantir une protection des droitsfondamentaux quivalente celle des cons-titutions nationales.

    Le point de dpart de cette jurisprudence estlaffaire Stauder, dans laquelle le bnfi-ciaire dune pension de victime de guerreavait considr comme une atteinte sadignit personnelle et au principe dgalitle fait de devoir donner son nom pourlachat de beurre de Nol. Dans unpremier temps, la Cour avait estim quelindication du nom ntait pas indispen-sable, au vu des dispositions communau-

    taires, et quil tait donc superflu dexaminerle moyen de la violation dun droit fonda-14

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    mental; la fin de son arrt, elle constatait,

    nanmoins, que le respect des droits fonda-mentaux faisait partie des principesgnraux de lordre communautaire quil luiappartient de faire respecter. La Cour recon-naissait ainsi pour la premire fois lexis-tence dun rgime autonome des droits fon-damentaux dans la CE.

    La Cour a tout dabord tabli les sauve-

    gardes des droits fondamentaux sur la basedun certain nombre de dispositions destraits. Elle a notamment procd de lasorte pour les nombreuses interdictions dediscriminationqui sont chacune des ma-nations de diffrents aspects du principegnral dgalit. Au nombre dentre ellesfigurent linterdiction de toute discrimina-tion exerce en raison de la nationalit(article 12 du trait CE), la lutte contre

    toute discrimination fonde sur le sexe, larace ou lorigine ethnique, la religion oules convictions, un handicap, lge oulorientation sexuelle (article 13 du traitCE), lgalit de traitement pour lesmarchandises et les personnes dans ledomaine des quatre liberts fondamentales(libre circulation des marchandises: arti-cle 28 du trait CE; libre circulation despersonnes: article 39 du trait CE; libertdtablissement: article 43 du trait CE;libre prestation des services: article 50 dutrait CE), la libre concurrence (article 81et suivants du trait CE) ainsi que lgalitdes rmunrations entre hommes etfemmes (article 141 du trait CE). Lesquatre liberts fondamentales de la CE, quigarantissent les liberts de base de la vieprofessionnelle, peuvent galement tre

    considres comme un droit communau-taire fondamental la libre circulationet

    au libre exercice dune activit profession-

    nelle. Sont galement explicitement garan-tis la libert dassociation (article 137 dutrait CE, article 48, paragraphe 1, du traitCECA), le droit de ptition (article 21 dutrait CE, article 48, paragraphe 2, du traitCECA) et la protection du secret desaffaires et du secret professionnel (arti-cle 287 du trait CE, article 194 du traitEuratom, article 47, paragraphes 2 et 4, du

    trait CECA).

    La CJCE a constamment dvelopp cesbases communautaires de la protectiondes droits fondamentaux et les a com-pltes par dautres droits du mme ordre. cette fin, elle a reconnu des principes

    juridiques gnrauxet les a appliqus ensinspirant des traditions constitutionnellescommunes aux tats membres et des con-

    ventions internationales sur la protectiondes droits de lhomme auxquelles les tatsmembres sont parties. Au premier rangdentre elles figure la conventioneuropenne des droits de lhomme, qui apermis de dterminer le contenu des droitsfondamentaux de la Communaut et lesmcanismes de sauvegarde. Sur cettebase, la Cour a lev un certain nombre deliberts au rang de droits fondamentauxcommunautaires, savoir: le droit de pro-prit, la libert dexercer une activit pro-fessionnelle, linviolabilit du domicile, lalibert dopinion, les droits gnraux de lapersonnalit, la protection de la famille(par exemple le droit de regroupementfamilial pour les travailleurs migrants), lalibert conomique, la libert de religionou de croyance, ainsi quun certain

    nombre de droits procduraux fondamen-taux tels que le droit dtre entendu, le 15

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    principe de la confidentialit de la corres-

    pondance entre lavocat et son client(connu sous le nom de legal privilegedansles pays de Common Law), linterdictionde la double sanction ou encore la nces-sit de justifier les actes juridiques com-munautaires.

    Il est un principe qui revt une importanceparticulire et qui est rgulirement

    invoqu dans les litiges de droit commu-nautaire, cest le principe de lgalit detraitement. Dans sa dfinition la plusgnrale, ce principe pose que des situa-tions comparables ne peuvent tre traitesde manire diffrente, moins que cettediffrence ne soit objectivement justifie.Selon la jurisprudence de la Cour dejustice, le principe de lgalit de traite-ment ninterdit cependant pas que, con-

    trairement aux usages internationaux envigueur jusqu aujourdhui, les ressortis-sants ou les produits nationaux puissenttre soumis des exigences plus svresque les ressortissants dautres tatsmembres ou les produits dimportation. Ledroit communautaire est impuissant contrecette discrimination rebours, car elle estla consquence de la limitation des com-ptences de la Communaut. Par principe,la rgle communautaire de la libralisa-tion, qui dcoule des liberts fondamen-tales, ne vaut en effet, selon lopiniondfendue par la Cour de justice jusquprsent, que pour les activits transfronta-lires. En revanche, les rgles relatives lafabrication et la mise sur le march deproduits indignes ou au statut juridiquedes ressortissants du pays en question sur

    le territoire national nentrent dans lechamp de rglementation communautaire

    que dans la mesure o une harmonisation

    a dj eu lieu au niveau communautaire.

    Grce la jurisprudence de la Cour dejustice, le droit communautaire disposegalement dun vaste fonds de principesde ltat de droit proches des droits fonda-mentaux. Dans ce contexte, le principe deproportionnalit revt une importance pra-tique considrable. Il comporte lobliga-

    tion dvaluer les divers intrts en jeu, cequi implique que soit examine la possibi-lit qu'une mesure soit approprie etncessaire, et exclut tout excs. Aunombre des principes gnraux du droitproches des droits fondamentaux, ontrouve aussi les principes gnraux dudroit administratif et du due process, parexemple le principe de la confiancelgitime, la non-rtroactivit des sanctions

    et linterdiction de retirer ou de rvoquerrtroactivement des actes ayant confrdes droits ou des avantages, ou encore leprincipe des droits de la dfense, qui sap-plique aussi bien dans les procduresadministratives devant la Commissioneuropenne que dans la procdure devantla Cour europenne de justice. Laccent estgalement mis sur lexigence dune plusgrande transparence, qui implique que lesdcisions soient prises dune manire aussilimpide et aussi proche que possible ducitoyen. Une consquence importante decette transparence est que tout citoyeneuropen et toute personne morale tabliedans un tat membre a un droit daccsaux documents du Conseil de lUE et de laCommission europenne.

    Tout en reconnaissant luvre accompliepar la Cour de justice dans la dfinition de16

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    droits fondamentaux non reconnus par

    crit, on ne peut toutefois que constaterque cette manire dtablir des droitsfondamentaux europens prsente ungrave inconvnient: la Cour doit se limiter des cas despce. Dans ces conditions,elle peut ne pas tre en mesure dedgager, dans tous les domaines o ilserait ncessaire ou souhaitable de lefaire, des droits fondamentaux partir des

    principes gnraux du droit. Il ne lui serapas non plus possible de dterminer l-tendue et la limite de la protection desdroits fondamentaux en procdant auxgnralisations et aux diffrenciationsncessaires. Cela ne permet pas aux insti-tutions communautaires dapprcier avecsuffisamment de prcision si elles courentle risque de violer ou non un droit fonda-mental. De mme, un citoyen de la

    Communaut ne peut pas juger dans tousles cas sil y a eu atteinte un de ses droitsfondamentaux.

    Une solution depuis longtemps envisageest ladhsion de la CE la conventioneuropenne de sauvegarde des droits delhomme. Toutefois, dans son avis 2/94, laCour de justice a prcis que, en ltat dudroit communautaire, la Communautnavait pas comptence pour adhrer laconvention. cet gard, la Cour a relevque, mme si la sauvegarde des droits delhomme tait un pralable la lgalitdes actes communautaires, ladhsion laconvention aurait ncessit un change-

    ment substantiel du rgime communau-

    taire de lpoque, en ce quil aurait com-port linsertion de la Communaut dansun systme institutionnel distinct, tel quecelui de la convention. De lavis de laCour, une telle modification du rgime deprotection des droits de lhomme dans laCommunaut, de par ses implicationsinstitutionnelles pour la Communaut etles tats membres, aurait revtu une

    envergure constitutionnelle dpassant, parsa nature, les pouvoirs confrs par larti-cle 308 du trait CE.

    Par consquent, la seule solution dfini-tive au problme des droits fondamentauxdans la CE est ltablissement dun cata-logue de droits fondamentaux spcifique lUE par la modification des traits CE etUE existants. Ce catalogue pourrait

    notamment sinspirer de la dclaration desdroits et des liberts fondamentaux duParlement europen, qui offre un cata-logue complet de droits fondamentaux.Ainsi seulement, le renforcement efficacede la protection des droits fondamentauxdeviendra ralit au sein de lUE. Pareilleinitiative requiert cependant un consensusde tous les tats membres sur le contenuet les limites de ces droits. Il va sans direquon est encore loin dune telle entente.Les tats membres ne sont pas encore par-venus dpasser le stade dun engage-ment gnral, quoique contraignant, pourle respect et la protection des droits fonda-mentaux dans le cadre de lUE.

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    Toute socit a une constitution qui dfinitla structure de son systme politique: elletablit les rapports des membres de la socitentre eux et vis--vis de lensemble, fixe lesobjectifs communs et dtermine les rgles suivre pour prendre des dcisions contrai-

    gnantes. LUE tant une socit dtats laquelle des tches et des fonctions trs pr-cises ont t transfres, sa Constitution doittre en mesure de rpondre aux mmesquestions quune constitution nationale.

    Contrairement la plupart des constitutionsdes pays qui la composent, la Constitutionde lUnion nest pas reprise dans un docu-

    ment unique. Elle rsulte dun ensemble dergles et de valeurs fondamentales que lesresponsables observent imprativement.Celles-ci figurent soit dans les traits ayantinstitu la Communaut europenne soitdans les actes juridiques arrts par les insti-tutions communautaires ou dcoulent enpartie des coutumes.

    Les tats sont rgis par deux principes dor-

    ganisation essentiels: le droit (la rule of law)et la dmocratie. Toute action de lUniondoit si elle veut se conformer cesprincipes avoir des fondements juridiqueset dmocratiques: cration, organisation,comptences, fonctionnement, place despays membres et de leurs institutions, placedu citoyen.

    Quelle rponse lordre communautairedonne-t-il aux questions que peuvent poser

    les valeurs fondamentales, la structure et lesinstitutions de la Communaut?

    LA STRUCTURE DE LUNIONEUROPENNE:LES TROIS PILIERS

    Premier pilier: les trois Communautseuropennes

    Le premier pilier se compose des troisCommunauts europennes [C(E)E, CEEA,CECA], approfondies et largies en uneUnion conomique et montaire. Avec lacration de lUE, la Communautconomique europenne est devenue laCommunaut europenne. Le trait CEEest devenu le trait CE. Cette modificationdoit tmoigner de lvolution qualitative dela CEE, qui est passe dune communautpurement conomique une union poli-tique. Cette nouvelle dnomination nacependant aucune rpercussion sur lexis-tence des trois Communauts (CECA, CEEA,CE), car elle nimplique pas dunification

    formelle de ces trois entits. Avec la cra-tion de lUE, certaines institutions commu-nautaires ont galement t rebaptises.Depuis le 8 novembre 1993, le Conseil desCommunauts europennes sappelle leConseil de lUnion europenne. LaCommission des Communauts euro-pennes est devenue la Commissioneuropenne. Le 17 janvier 1994, la Courdes comptes a galement t rebaptiseCour des comptes europenne. Les actes

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    LA CONSTITUTIONDE LUNION EUROPENNE

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    LUnion europenne

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    Premier pilier:Communauts

    europennes

    Deuxime pilier:la politique trangre

    et de scurit

    commune

    Troisime pilier:coopration en matire

    de justice et daffaires

    intrieures

    CE Union douanire

    et march intrieur Politique agricole Politique

    structurelle Politique

    commerciale

    Dispositions nouvellesou modifiesconcernant... La citoyennet

    de lUnion Lducation

    et la culture Les rseaux

    transeuropens La protection

    du consommateur La sant La recherche

    et lenvironnement

    La politique sociale La politique dasile Les frontires

    extrieures La politique

    dimmigration

    CEEACECA

    Politique trangre Coopration,

    positionset actionscommunes

    Maintiende la paix

    Droitsde lhomme Dmocratie Aide

    aux pays tiers

    Politiquede scurit Avec lappui de

    lUEO: questionsconcernant lascurit de lUE

    Dsarmement Aspects

    conomiquesde larmement

    long terme:cadre europende scurit

    Cooprationjudiciaireen matire civileet pnale

    Cooprationpolicire

    Lutte contre

    le racismeet la xnophobie Lutte contre

    la drogueet le trafic darmes

    Lutte contrele crime organis

    Lutte contrele terrorisme

    Lutte contre lescrimes lgarddes enfantset la traite dtreshumains

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    adopts par les diverses institutions restent

    nanmoins lis la Communaut corres-pondante.

    Le premier pilier constitue la forme la plusvolue de communautarisation. Dans lecadre de la CE, les institutions communau-taires peuvent adopter, dans les domainesqui leur ont t confis, des lgislationsdirectement applicables dans les tats

    membres et ayant une prminence sur ledroit national. Au cur de la CE se trouve lemarch intrieur avec ses liberts fonda-mentales (libre circulation des marchan-dises, libre circulation des travailleurs,libert dtablissement, libre prestation desservices et libre circulation des capitaux etdes paiements) et ses rgles de concurrence.Au nombre des politiques relevant de laresponsabilit communautaire figurent les

    affaires conomiques et montaires (avecpour cl de vote leuro, la monnaie uniqueeuropenne), lagriculture, la politique devisa, dasile et dimmigration, les transports,la fiscalit, lemploi, le commerce, la poli-tique sociale, lducation et la jeunesse, laculture, la politique des consommateurs etde la sant, les rseaux transeuropens, lin-dustrie, la cohsion conomique et sociale,la recherche et la technologie, lenviron-nement et laide au dveloppement.

    Deuxime pilier: la politiquetrangre et de scurit commune

    Avant le trait instituant lUnion euro-penne, lharmonisation politique entreles tats membres de la CE sinscrivaitdans le cadre de la coopration poli-

    tique europenne (CPE) lance en 1970,puis amliore et tendue par lActe

    unique europen en 1986-1987. Il sagis-

    sait de consultations rgulires desministres des affaires trangres et decontacts permanents entre leurs adminis-trations. Ils taient convenus damliorerlinformation mutuelle et la concertationdes tats membres sur toute questionimportante de politique extrieure, dhar-moniser les points de vue et, dans lamesure du possible, dadopter une posi-

    tion commune. Toutes les dcisionsdevaient cependant tre prises luna-nimit. Les questions de scurit restaientlimites aux aspects politiques etconomiques. Les rcentes crises politi-ques (guerre du Golfe, guerre civile enYougoslavie, effondrement de lUnionsovitique) ont rvl trs clairement quecet instrument de politique trangre etde scurit ne parvenait pas confrer

    lUnion europenne une importanceadapte son statut de plus grande puis-sance commerciale du monde sur desquestions essentielles de politique mon-diale. Dans le trait instituant lUnioneuropenne, les chefs dtat ou degouvernement des tats membres sontdsormais convenus dlaborer progres-sivement une politique trangre et descurit commune principalement axesur les objectifs suivants:

    la sauvegarde des valeurs commu-nes, des intrts fondamentaux et delindpendance de lUnion;

    le renforcement de la scurit delUnion et des tats membres;

    le maintien de la paix dans le monde etle renforcement de la scurit inter-20

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    nationale conformment aux principes

    de la charte des Nations unies, ainsiquaux principes et aux objectifs delacte final de Helsinki (1975) et de lacharte de Paris (1990) qui ont t con-sacrs en 1994 par la cration del'Organisation pour la scurit et lacoopration en Europe (OSCE);

    la promotion de la coopration inter-

    nationale;

    la promotion de la dmocratie et deltat de droit, la sauvegarde des droitsde lhomme et des liberts fondamen-tales.

    Comme lUnion europenne nest pas untat, ces objectifs ne peuvent tre atteintsque progressivement. La politique

    trangre et surtout celle de scuritcomptent, depuis longtemps, parmi lesdomaines dans lesquels les tats membresveillent particulirement sauvegarderleur souverainet. En outre, il est trs dif-ficile de dfinir des intrts communs enla matire, car, au sein de lUnioneuropenne, seuls la France et leRoyaume-Uni possdent des armes ato-miques. Un autre problme est que tousles tats membres de lUnion europennene font pas partie de lOTAN (Irlande,Autriche, Finlande, Sude) et de lUEO(Danemark, Grce, Irlande). Aujourdhui,les dcisions de politique trangre et descurit commune continuent doncdtre essentiellement arrtes dans lecadre de la coopration entre tats.Toutefois, un dispositif dactionautonome

    a t entre-temps mis en place, refltdans le trait dAmsterdam et dot dun

    cadre juridique solide grce la coopra-

    tion entre tats. Ainsi, des dcisions deprincipe sont prises, des positions com-munessont formules, des actionset desmesures communes sont arrtes et desdcisions-cadressont prises dans le cadredu deuxime (et du troisime) pilier(s).Parmi ces instruments, celui qui se rap-proche le plus dune directive commu-nautaire est la dcision-cadre. Toutefois,

    linstar des autres instruments daction delUE, elle ne peut tre directement valableet applicable dans les tats membres. Cesmesures et ces dcisions ne peuvent pasnon plus tre attaques devant la CJCE.

    Troisime pilier: la cooprationpolicire et judiciaire

    La coopration policire et judiciaire

    vise, au travers dune action commune enmatire de prventionet de lutte contre lacriminalit (notamment le terrorisme, latraite des tres humains, le trafic illgalde drogues et darmes, la corruption et lafraude), le racisme et la xnophobie, offrir tous les citoyens un espace delibert, de scurit et de justice (articles29 et 30 du trait UE). Des mesures trsencourageantes ont dj t prises au

    travers de la directive sur la lutte contre leblanchiment illgal de capitaux et de lamise en place dun office europen depolice, Europol, dont les travaux ontdbut en 1998.

    La coopration dans le domaine judi-ciaire est destine avant tout faciliter et acclrer la coopration en matire de

    procdure judiciaire et dexcution desdcisions, faciliter lextradition entre 21

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    tats membres, instaurer des rgles mi-

    nimales relatives aux lments constitutifsdes infractions pnales et aux sanctionsapplicables dans les domaines de la cri-minalit organise, du terrorisme et dutrafic de drogues (articles 31 et 32 dutrait UE).

    Dans ce domaine, comme dans celui dela politique trangre et de scurit

    commune, la coopration repose essen-tiellement sur une collaboration entretats qui nentre pas dans le cadre desprocdures de dcision communautaires.

    LA NATURE JURIDIQUEDE LA CE ET DE LUE

    La dtermination de la nature juridiqueconsiste examiner la constitution

    juridique gnrale dune organisation lalumire de ses caractristiques.

    1. La nature juridique de la CE

    La nature juridique de la CE repose surdeux arrts fondamentaux rendus en 1963et en 1964 par la Cour de justice des Com-munauts europennes.

    LaffaireVan Gend & Loos

    Dans cette affaire, lentreprise de transportnerlandaise Van Gend & Loos avait intro-duit devant un tribunal des Pays-Bas uneaction contre ladministration des douanesnerlandaises, au motif que celle-ci avaitperu un droit de douane major lim-portation dun produit chimique en pro-

    venance de la Rpublique fdraledAllemagne.

    Lentreprise estimait quil y avait l une

    violation de larticle 12 du trait CEE(devenu larticle 25 du trait CE), quiinterdit aux tats membres dintroduirede nouveaux droits de douane ou daug-menter des droits de douane existantsdans le march commun. La juridictionnerlandaise a suspendu la procdure eta saisi la Cour de justice en lui deman-dant de clarifier la porte et linterprta-

    tion juridique de larticle invoqu dutrait tablissant la Communauteuropenne.

    Cette affaire a donn la CJCE loccasiondtablir certains aspects fondamentauxde la nature juridique de la CE. Dans sonarrt, la Cour a dclar ce qui suit:

    [...] attendu que lobjectif du trait CEE,

    qui est dinstituer un march commun dontle fonctionnement concerne directementles justiciables de la Communaut,implique que ce trait constitue plus quunaccord qui ne crerait que des obligationsmutuelles entre les tats contractants; quecette conception se trouve confirme parle prambule du trait qui, au-del desgouvernements, concerne les peuples, etde faon plus concrte par la cration dor-ganes qui institutionnalisent des droits sou-verains dont lexercice affecte aussi bienles tats membres que leurs citoyens;[...] quil faut conclure de cet tat dechoses que la Communaut constitue unnouvel ordre juridique de droit interna-tional, au profit duquel les tats ont limit,bien que dans des domaines restreints,leurs droits souverains, et dont les sujets

    sont non seulement les tats membres,mais galement leurs ressortissants [...]22

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    LaffaireCosta/ENEL

    peine un an plus tard, laffaire Costa/ENELdevait permettre la CJCE dapprofondirencore davantage son analyse. Cette affairereposait sur les faits suivants: en 1962, lItalieavait nationalis la production et la distributionde llectricit et avait transfr le patrimoinedes entreprises lectriques la socit ENEL.En tant quactionnaire de la socit touchepar la nationalisation, Edison Volta, M. Costastait vu priv de dividendes lui revenant etavait donc refus de payer une facture dlec-tricit de 1 926 lires. Devant le giudice con-sigliatorede Milan, M. Costa avait justifi saconduite en faisant valoir, entre autres, que la

    loi de nationalisation violait toute une srie dedispositions du trait CEE. Le tribunal italien

    avait alors soumis plusieurs questions la Courde justice sur linterprtation de diverses dispo-sitions du trait CEE. Dans son arrt, la Cour adclar au sujet de la nature juridique de la CEce qui suit:

    la diffrence des traits internationaux ordi-naires, le trait de la CEE a institu un ordrejuridique propre intgr au systme juridiquedes tats membres [...] et qui simpose leurjuridiction. En instituant une Communaut dedure illimite, dote dinstitutions propres, dela personnalit, de la capacit juridique, dunecapacit de reprsentation internationale etplus particulirement de pouvoirs rels issusdune limitation de comptence ou dun trans-

    fert dattributions des tats la Communaut,ceux-ci ont limit leurs droits souverains et ont 23

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    cr ainsi un corps de droit applicable leurs

    ressortissants et eux-mmes.

    Sur la base de ces observations dtailles, laCour a conclu comme suit:

    Attendu quil rsulte de lensemble de ces l-ments que, issu dune source autonome, le droitdu trait ne pourrait donc, en raison de sanature spcifique originale, se voir judiciaire-

    ment opposer un texte interne quel quil soitsans perdre son caractre communautaire etsans que soit mise en cause la base juridique dela Communaut elle-mme; que le transfertopr par les tats, de leur ordre juridiqueinterne au profit de lordre juridique commu-nautaire, des droits et obligations correspondantaux dispositions du trait, entrane donc unelimitation dfinitive de leurs droits souverainscontre laquelle ne saurait prvaloir un acte uni-

    latral ultrieur incompatible avec la notion deCommunaut [...]

    la lumire de ces deux arrts fondamentauxde la CJCE, les caractristiques de la naturejuridique de la CE sont les suivantes:

    la structure institutionnelle, qui garantitque la formation de la volont dans la CE

    est galement empreinte ou influence parlintrt gnral de lEurope, cest--direles intrts communautaires tablis par lesobjectifs;

    le transfert de comptencesaux institu-tions communautaires, qui est plus impor-tant que dans les autres organisations inter-nationales et qui atteint des proportionsconsidrables dans des domaines danslesquels les tats conservent gnralementleur souverainet;

    ltablissement de son propre ordre

    juridique indpendant des ordresjuridiques des tats membres;

    lapplicabilit directe du droit commu-nautaire, qui garantit la mise en uvrecomplte et uniforme des dispositionscommunautaires dans tous les tatsmembres et tablit des droits et desobligations pour les tats membres etleurs ressortissants;

    la prminence du droit communau-taire, qui exclut toute rvocation oumodification de la lgislation commu-nautaire par le droit national et assurela primaut du droit communautaire encas de conflit avec le droit national.

    La CE constitue donc une entit autonome

    dote de droits souverains et dun ordrejuridique indpendant des tats membres, quisimpose tant aux tats membres qu leursressortissants dans les domaines relevant de lacomptence communautaire.

    2. La nature juridique de lUE

    Plus quun objectif programmatique duprocessus dintgration, lUE est prsent une

    organisation internationale sui generistabliepar le trait de Maastricht.

    La spcificit de cette organisation interna-tionale rside dans sa fonction de cadrejuridique commun aux trois Communautseuropennes, dans ses politiques compl-mentaires et les formes de coopration entretats membres.

    Toutefois, lordre juridique de cette Unionest bien loin dgaler celui de la CE. Ainsi,24

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    les principes de lautonomie, de lapplicabi-

    lit directe et de la prminence du droitcommunautaire, qui sont indispensables lordre juridique de la CE, ne sappliquentpas aux deux autres piliers de lUE. Cesderniers consistent davantage en pro-grammes et en dclarations dintention quise ralisent au travers de la cooprationintergouvernementale et ne constituentdlibrment quune premire tape vers

    une Union institutionnalise. Le fait quelUE utilise les organes de la CE pour remplirses tches ninflue pas davantage sur cettesituation, tant donn que ces institutionsde lUnion doivent agir conformment autrait UE, cest--dire uniquement dans lecadre de la coopration entre tats membresau titre des deuxime et troisime piliers. Letrait UE nest pas encore une Constitutionrgissant lensemble du systme politique de

    cette Union.

    3. Les diffrences par rapport dautres structures politiques

    Les caractristiques de la CE et de lUE rv-lent galement leurs points communs etleurs diffrences par rapport aux organisa-tions internationales classiques et aux struc-tures fdrales.

    Loin dtre dj une structure finie, lUEsapparente davantage un systme endevenir dont laspect final est encore flou.

    Le seul point commun entre les organisa-tions internationales traditionnelles et lUEest quelle est galement issue dun traitinternational. Toutefois, lancrage de la CE

    dans la structure organisationnelle de lUE adj considrablement loign cette

    dernire de ses racines internationales. En

    effet, les actes fondateurs de la CE, quireposent galement sur des traits interna-tionaux, ont abouti la cration de commu-nauts autonomes dotes de droits sou-verains et de comptences propres. Les tatsmembres ont renonc une partie de leursouverainet au profit de ces communauts.En outre, les tches qui ont t confies laCE se distinguent nettement de celles des

    autres organisations internationales. Alorsque ces dernires assument essentiellementdes tches techniques prcises, lesdomaines daction de la CE touchent, dansleur ensemble, lessence mme des tats.

    Ces diffrences entre les organisations inter-nationales traditionnelles et la CE la rap-prochent de mme que lUE dunestructure tatique. Cest notamment le

    renoncement des tats membres unepartie de leur souverainet au profit de la CEqui a permis de conclure que la structure delUE sapparentait celle dun tat fdral.Toutefois, ce point de vue ne tient pascompte du fait que les comptences desinstitutions de lUE sont limites certainsdomaines et aux objectifs fixs par lestraits. Elles ne sont donc pas libres de fixerleurs objectifs au mme titre quun tat nide relever tous les dfis auxquels un tatmoderne est confront. LUE ne dispose nide la toute-puissance qui caractrise un tatni de la capacit de se doter de nouvellescomptences (principe de la comptencepour statuer sur sa propre comptence).

    Cest pourquoi lUE nest ni une organisa-tion internationale classique ni une associa-

    tion dtats, mais une entit qui se situe auxcroises de ces formes traditionnelles das- 25

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    sociation entre tats. En termes juridiques,

    on parle dune organisation suprana-tionale.

    LES TCHES DE LUE

    La liste des tches confies lUE est ana-logue celle dun ordre constitutionnel ta-tique. Il ne sagit pas, contrairement laplupart des autres organisations interna-

    tionales, de tches techniques prcises,mais de domaines dactivit touchant lessence mme des tats.

    Dans le cadre du trait CE, lUE a pourmission de fondre les tats membres dansune seule communaut par la cration dunmarch commun qui runit les marchsnationaux des tats membres cest--dire que toutes les marchandises et presta-

    tions de services peuvent tre proposes etvendues aux mmes conditions que sur unmarch intrieur ainsi que par le rap-prochement progressif des politiquesconomiques nationales.

    Cet objectif de cration dun marchcommun a t relanc avec le programmedachvement du march intrieur pour1992. Ce programme est n dun doubleconstat: dune part, un certain nombredobstacles nationaux continuaient desopposer la ralisation complte des li-berts du march commun et, dautre part,dimportants secteurs conomiques telsque les tlcommunications ou lesmarchs publics ntaient jusqualors pascouverts par le march commun. Dans lelivre blanc sur lachvement du march

    intrieur, la Commission a, ds juin 1985,prsent aux chefs dtat ou de gouverne-

    ment des tats membres, qui ntaient

    encore que dix, une liste de mesures com-portant environ 300 actes et assortie duncalendrier prcis, qui devait permettre lasuppression, avant la fin de 1992, de toutesles barrires intracommunautaires encoreexistantes. Cest au cours de la mmeanne, au sommet de Milan, que les chefsdtat ou de gouvernement ont confi laCommission le mandat politique de

    raliser le programme March intrieur1992. Mais, pour avoir la moindre chancedatteindre en sept ans seulement unobjectif qui navait pas pu tre ralis parun nombre plus restreint dtats membresen prs de trois dcennies, il fallait plusquune simple dclaration de volont poli-tique et ladoption dun programme: lob-jectif March intrieur 1992 devait fairepartie intgrante des traits de Rome. Cest

    ce qui a t finalement ralis avec lActeunique europen, qui compltait notam-ment le trait C(E)E par une dispositionselon laquelle la Communaut arrte lesmesures destines tablir progressive-ment le march intrieur au cours dunepriode expirant le 31 dcembre 1992[article 14, ex-article 7 A, du trait CE;auparavant article 8 A du trait C(E)E]. Ceprogramme a, pour lessentiel, t ralisdans le dlai imparti. Les institutions com-munautaires ont russi crer le cadrejuridique ncessaire au bon fonction-nement du march intrieur. Entre-temps,ce cadre a t amplement exploit, desorte que le march intrieur est djdevenu ralit. Il est galement visibleau quotidien, notamment lorsquonse dplace au sein de lUE, les contrles

    didentit aux frontires nationales tantdepuis longtemps abolis.26

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    Avec le trait sur lUnion europenne, la CE

    est entre dans une nouvelle re conomiqueet sociale. Lintroduction de leuro (arti-cle 121, paragraphe 4, du trait CE) en tant quemonnaie unique europenne dans onze desquinze tats membres (le Danemark, la Sudeet le Royaume-Uni ont refus de participer,tandis que la Grce sefforce encore de satis-faire aux critres dligibilit), le 1

    erjanvier

    1999, a donn un autre signe visible de lin-

    terpntration des conomies des tatsmembres de lUE et a renforc le marchintrieur. En tant que seul moyen de paiementau sein de lUE compter du 1

    erjanvier 2002,

    leuro remplacera galement les monnaiesnationales pour lensemble des transactions etdeviendra alors la monnaie de tous lescitoyens de lUnion. Linstauration dunecitoyennet de lUnion(article 17 et suivantsdu trait CE) a renforc les droits et les intrts

    des ressortissants des tats membres au seinde lUE. Tout citoyen de lUnion peut circulerlibrement dans lUE (article 18 du trait CE),voter et tre lu aux lections municipales(article 19 du trait CE) et bnficie, sur le ter-ritoire dun tat tiers, de la protection desautorits diplomatiques et consulaires de touttat membre (article 20 du trait CE), du droitde ptition devant le Parlement europen(article 21 du trait CE) et, conform-ment au principe gnral de non-discrimination, du droit dtre trait dans touttat membre comme tout autre ressortissantde ce mme tat (article 17, paragraphe 2,combin avec larticle 12 du trait CE). La si-tuation du chmage dans lUE, proccupantedepuis plusieurs annes, a fait de ladoptiondune stratgie pour lemploi une priorit. cette fin, un nouveau titre distinct sur lemploi

    a t introduit dans le trait CE (titre VIII, arti-cles 125 130). Les tats membres et la

    Communaut sont appels laborer une

    stratgie pour lemploi et en particulier pro-mouvoir une main-duvre qualifie, formeet susceptible de sadapter ainsi que desmarchs aptes ragir rapidement lvolu-tion de lconomie. La promotion de lemploiest considre comme une question dintrtcommun, ce qui oblige les tats membres coordonner leur action cet gard au sein duConseil de lUE. La CE doit contribuer la

    ralisation dun niveau demploi lev enencourageant la coopration entre tatsmembres et en soutenant et, au besoin, encompltant leur action. Ce faisant, elle doitrespecter pleinement les comptences destats membres en la matire.

    Le trait UEprvoit galement de nouvellespolitiques et formes de coopration dans lesdomaines de la politique extrieure et de

    scurit et de la coopration judiciaire et poli-cire.

    LES POUVOIRS DE LUE

    Ni les traits CE ni le trait UE nont attribuaux organes communautaires une comp-tence gnrale pour atteindre les objectifs quileur ont t assigns: les traits se bornent,dans les divers chapitres, dterminer lten-due des pouvoirs daction confrs. Cest leprincipe des pouvoirs limits. Les tatsmembres ont choisi cette solution pourpouvoir garder une vue densemble et exercerun contrle sur le transfert de leurs proprespouvoirs. Ltendue des pouvoirs ainsi trans-frs a des limites variables selon les tchesconfies lUE et la CE.

    Dans le cadre de la CE, les comptencespeuvent tre trs tendues, par exemple en 27

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    matire de politique commune des trans-

    ports, o toutes dispositions utilespeuventtre arrtes (article 71, paragraphe 1, dutrait CE), dans le domaine de la politiqueagricole (article 34, paragraphe 2, du traitCE) ainsi quen ce qui concerne la libre circu-lation des travailleurs, o (toutes) les mesuresncessaires peuvent tre arrtes (article 40du trait CE). La marge de manuvre de laCE et de ses institutions est, en revanche,

    limite par des dispositions restreintesen cequi concerne le droit de la concurrence(article 81 et suivants du trait CE), la cultureet la politique de formation (articles 150 et151 du trait CE), la sant et la protection desconsommateurs (articles 152 et 153 du traitCE) ou lenvironnement (article 175 du traitCE).

    Outre ces pouvoirs particuliers daction, les

    traits communautaires permettent aux insti-tutions dagir si lun des objectifs des traitslexige (articles 308 du trait CE, article 203du trait CEEA et article 95, paragraphe 1, dutrai t CECA pouvoirs subsidiaires).Toutefois, les institutions nont pas comp-tence gnrale pour sacquitter de tchesdpassant les objectifs prvus par les traits.Elles ne peuvent pas non plus largir leurspropres comptences aux dpens des tatsmembres au titre de leurs pouvoirs subsi-diaires. En pratique, les possibilits quoffrentces dispositions ont t de plus en plus uti-lises, car la CE est aujourdhui appele assumer des tches qui navaient pas tprvues lors de la conclusion des traits etpour lesquelles aucun pouvoir daction corres-pondant navait t attribu. Les principauxdomaines concerns par cette volution sont:

    lenvironnement et la protection des consom-mateurs, les nombreux programmes de

    recherche arrts depuis 1973 en dehors de

    la Communaut europenne de lnergieatomique, la cration du Fonds europen dedveloppement rgional charg de rduirelcart entre zones dveloppes et zonesdfavorises de lUE. Dans ces domaines,lActe unique europen et le trait UE ontcependant introduit des comptences parti-culires dans le trait CE. Sous leffet de cesdispositions explicites rgissant les comp-

    tences de la CE, les pouvoirs subsidiaires ontbeaucoup perdu de leur importance pratique.

    Enfin, les institutions communautaires dis-posent encore dautres comptences pourarrter les mesures ncessaires lexerciceefficace et judicieux de pouvoirs express-ment attribus (pouvoirs implicites). Cestsurtout dans le domaine des relationsextrieures que ces comptences sont uti-

    lises. ce titre, la CE peut contracter desobligations lgard de pays non membresou dautres organisations internationales,dans des domaines correspondant auxtches qui lui sont attribues. Un exemplecaractristique est celui de laffaireKramer, dont a t saisie la Cour de justicedes Communauts europennes. Celle-citait appele se prononcer sur la comp-tence de la CE pour cooprer avec ces

    organisations internationales, afin de fixerdes quotas de capture en matire de pchemaritime et, ventuellement, de souscrire des engagements internationaux: fautede dispositions explicites dans le trait CE,la Cour a driv la comptence externe dela CE, indispensable cet effet, de ses pou-voirs internes sur les produits de la pcheau titre de la politique agricole commune.

    Lexercice de ces comptences par la CEreste toutefois soumis au principe de sub-28

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    sidiarit, emprunt la doctrine sociale du

    catholicisme, qui a t lev au rang cons-titutionnel lors de son introduction dansle trait CE (article 5). Ce principe com-porte deux aspects, lun positif et lautrengatif: laspect positifpour la CE, cest--dire celui qui stimule ses comptences,veut quelle agisse lorsque les objectifsrecherchs peuvent tre mieux raliss auniveau communautaire; laspect ngatif

    du principe de subsidiarit, cest--dire lect dfensif, est que la CE ne doit pas agirlorsque laction des tats membres suffit raliser les objectifs fixs. En pratique, celasignifie que toutes les institutions commu-nautaires, et notamment la Commission,doivent prouver que laction ou la rgle-mentation communautaire est effective-ment ncessaire. On pourrait dire, enparaphrasant Montesquieu, que, lorsquil

    nest pas ncessaire dadopter un actecommunautaire, il est ncessaire de ne pasen adopter. Si la ncessit dune rglemen-tation au niveau communautaire estatteste, il reste encore dcider de laporte et du type de mesure communau-taire adopter. La rponse est donne parle principe de proportionnalit, que lajurisprudence de la Cour de justice a intro-duit dans lordre juridique communau-taire: un examen approfondi doit permet-tre de dterminer si un instrumentjuridique est vraiment indispensable ou sidautres moyens daction ne seraient passuffisamment efficaces. Cela signifie, avanttout, que la prfrence doit aller aux lois-cadres, aux rglementations minimales etaux rgles visant la reconnaissancemutuelle des dispositions nationales et que

    les dispositions lgislatives excessivementdtailles sont viter. Un protocole

    annex au trait dAmsterdam prcise les

    modalits dapplication du principe desubsidiarit. Il tablit toutes les exigencesprocdurales et matrielles dcoulant duprincipe de subsidiarit qui doivent tresatisfaites par les actes communautaires.Des critres trs prcis ont donc t fixspour lapplication de ce principe par lesinstitutions communautaires, ce qui enfacilite galement le contrle juridique.

    Dans le cadre des deuxime et troisimepiliers de lUE(politique trangre et descurit commune, coopration judiciaireet policire en matire pnale), les comp-tences des institutions communautaires selimitent la promotion et au soutien de lacoopration dfinie par les tats membresau sein du Conseil europen. Les tatsmembres nont donc transfr aucun pou-

    voir que ce soit en tout ou en partie aux institutions communautaires. Au con-traire, les tats membres restent directe-ment responsables de la politiquetrangre et de scurit commune et de lacoopration judiciaire et policire enmatire pnale, tout en stant engags renforcer leur coopration et coordonnerleur action dans le cadre de lUE au traversde la structure institutionnelle communau-taire.

    Le troisime volet constitutionnel de la CEconcerne son organisation. Quelles sontles institutions de la Communauteuropenne? tant donn que la CEassume des fonctions qui, sinon,incomberaient aux tats, dispose-t-elledun gouvernement, dun parlement et

    dautorits administratives et juridiquescomme il en existe dans nos pays? Cest 29

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    Cour de justice desCommunauts europennes

    15 juges

    Conseil europen15 chefs

    de gouvernementet le prsident

    de la Commission

    Cour des comptes

    15 membres

    Comit des rgions

    222 membres

    Conseil de lUE

    15 ministres

    Commissioneuropenne

    20 membres

    Parlement europen

    626 dputs

    Comit conomique et

    social

    222 membres

    AllemagneFranceItalieRoyaume-UniEspagneBelgiqueGrcePays-BasPortugalAutricheSudeDanemarkIrlande

    FinlandeLuxembourg

    10101010

    855554433

    32

    11,3611,3611,3611,369,095,685,685,685,684,544,543,413,41

    3,412,27

    21,9615,6315,3915,7510,532,722,814,162,662,162,371,410,97

    1,370,11

    2222211111111

    11

    Pourcentagedu totaldes voix

    Voix auConseil

    Pourcentagede la population

    totale

    Membresde la Commission

    Banque europenne

    dinvestissement

    Banque centrale

    europenne

    LES INSTITUTIONS DE LUE

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    dlibrment que la ralisation des tches

    assignes la CE et la gestion du processusdintgration nont pas t laisses exclu-sivement linitiative des tats membresou de la coopration internationale. Aucontraire, la CE dispose dun systme insti-tutionnel qui la met mme de donner denouvelles impulsions et de nouveauxobjectifs lintgration europenne ainsique dadopter, dans les domaines relevant

    de sa comptence, un droit communau-taire galement contraignant pour tous lestats membres.

    Les principaux acteurs de ce systme sont,dune part, le Conseil europenet, dautrepart, les inst i tut ions de la CE, parmilesquelles on trouve le Parlementeuropen, le Conseil de lUE, laCommission europenne, la Cour de

    justice des Communauts europennesainsi que la Cour des comptes euro-penne. Aux institutions prvues par lestraits sajoutent la Banque centraleeuropenne, la Banque europenne din-vestissement, le Comit conomique etsocial et le Comit des rgions en tantquorganes auxiliaires. Parmi ces organes,la Cour de justice et le Parlement dsign comme Assemble ont tds le dbut communs aux troisCommunauts. Cest ce qua prvu unaccord entre les six tats membres dori-gine, sign en 1957 en mme temps que lestraits de Rome. La cration dinstitutionscommunes a eu lieu en juillet 1967 avec letrait instituant un Conseil unique et uneCommission unique des Communautseuropennes (trait de fusion). Depuis

    lors, les trois Communauts ont la mmestructure institutionnelle.

    Le Conseil europen

    (article 4 du trait UE)

    Le Conseil europen est n des confrencesau sommet des chefs dtat ou de gou-vernement des tats membres de la CE. Lorsde leur confrence de dcembre 1974 Paris, ceux-ci ont dcid de se rencontrertrois fois par an en tant que Conseileuropen. Puis, en 1987, par lActe uniqueeuropen, le Conseil europen a tformellement intgr la structure institu-tionnelle de la CE (article 23 de lActeunique). Il sagit aujourdhui dun organede lUnion europenne (article 4 du traitUE).

    Le Conseil europen runit, au moins deuxfois par an, les chefs dtat ou de gouverne-ment des tats membres ainsi que le prsi-

    dent de la Commission europenne. Ils sontassists des ministres des affaires trangreset dun membre de la Commission (arti-cle 4, paragraphe 2, du trait UE).

    La fonction du Conseil europen est dedterminer les grandes lignes politiques delintgration europenne, tant dans la pers-pective de la CE que dans celle de lUE. Ilaccomplit ses missions dans le cadre de laCE en adoptant des dcisions politiques defond ou en formulant des directives et desmandats lintention du Conseil de lUE oude la Commission europenne. Ainsi leConseil europen est-il, par exemple, lorigine de lUnion conomique et mon-taire, du systme montaire europen, dellection du Parlement europen au suf-frage universel direct, de diverses activits

    de politique sociale et de ladhsiondautres tats. 31

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    Le Parlement europen

    (articles 189 201 du trait CE)

    Selon les traits instituant la Communaut,le Parlement europen (PE) reprsenteles peuples des tats runis dans laCommunaut (article 189, premier alina,du trait CE). Il est n dune fusion entrelassemble commune de la CECA, lassem-ble de la CEE et lassemble de la CEEA enune Assemble unique par la conventionrelative certaines institutions communesaux Communauts de 1957 (premier traitde fusion). Le Parlement europen naacquis sa dnomination actuelle quaprs lamodification du trait CE par le trait surlUnion europenne, qui na fait que con-firmer un usage courant qui remontait 1958, date laquelle lAssemble avait, deson propre chef, opt pour le nom de

    Parlement europen.

    Composition et lection

    Le PE compte actuellement 626 reprsen-tants des peuples des tats runis dans laCommunaut. Le nombre de dputs nepeut dpasser 700.

    Jusquen 1979, ces dputs taient desmembres des parlements nationaux,nomms par leurs pairs pour tre envoys auPE. Llection des parlementaires europenspar la population des tats membres au suf-frage universel direct, dj prvue dans lestraits, nest devenue ralit quen 1979,aprs plusieurs tentatives infructueuses. Lespremires lections directes se sont tenuesen juin 1979 et ont t renouveles tous les

    cinq ans, lissue de chaque priode delgislature.

    Toutefois, il nexiste pas encore de

    systme lectoral communautaire, telquil est galement prvu dans les traitsfondateurs. Lors de la dernire lectiondirecte du PE en juin 1999, comme en1979, le droit lectoral national a tappliqu. Cest ainsi quau Royaume-Uni,par exemple, le scrutin majoritaire estconserv pour les lections europennes,tandis que, dans les autres tats membres,

    cest le systme de la proportionnelle quisapplique.

    Le graphique de la page 34, qui reflte lesrsultats de llection directe de 1999,indique la composition du PE.

    Le prsident, les vice-prsidents et lesquesteurs forment le bureau du PE, lupar ce dernier pour une dure de deux

    ans et demi. Les prsidents des groupespolitiques constituent une confrence quistatue sur lorganisation des travaux duParlement, sur les questions affrentesaux relations interinstitutionnelles et auxrelations avec les institutions extracom-munautaires.

    La rpartition des siges entre les pays setraduit, en termes purement mathma-tiques, par 1 dput europen pour808 000 ressortissants allemands, contre1 dput pour peine 60 000 ressortissantsluxembourgeois.

    Depuis quil est lu directement, leParlement europen peut se prvaloirdtre une reprsentation des citoyens destats membres de la CE et a donc acquis

    une lgitimit dmocratique. La simpleexistence dun parlement directement32

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    lu ne satisfait toutefois pas lexigence

    fondamentale dune constitution dmo-cratique, selon laquelle tous les pouvoirsde ltat manent du peuple. Outre latransparence du processus dcisionnelet la reprsentativit des organes dci-sionnels, il faut galement quil y ait uncontrle parlementaire et une lgitimitdes institutions communautaires partici-pant au processus dcisionnel. Cest

    prcisment dans ce domaine quelordre communautaire actuel laisseencore quelque peu dsirer, malgr lesprogrs raliss ces dernires annes. juste titre, on peut dailleurs parler cepropos de dmocratie encore sous-dveloppe. Le PE nexerce toujoursque lembryon des fonctions dun vrita-ble parlement telles quon les connat,par exemple, dans les dmocraties par-

    lementaires. En premier l ieu, leParlement europen ninvestit pas degouvernement par un vote, pour lasimple raison que lUE na pas de gou-vernement au sens tradit ionnel duterme. Ce sont, au contraire, le Conseilet la Commission qui se rpartissent lesfonctions qui sapparentent cette tcheet que les traits prvoient. Le trait surlUnion europenne a, toutefois, donnau Parlement europen la possibilitdinfluer sur la composit ion de laCommission et sur la nomination duprsident (droit dinvesti ture). Enrevanche, le Parlement na pas dinflu-ence comparable sur la composition duConseil de lUE. Ce dernier nest soumis un contrle parlementaire que dans lamesure o chacun de ses membres, en

    tant que ministre national, est contrlpar le parlement de son pays.

    Tches

    Le Parlement exerce des fonctions de troistypes.

    1. Fonction dcisionnelle

    Le rle dcisionnel du PE a t nettementrenforc par lintroduction de deux nou-velles procdures lgislatives, savoir la

    procdure de coopration (introduite en1987 par lActe unique europen, arti-cle 252 du trait CE) et la procdure decodcision (instaure en 1993 par le traitUE, article 251 du trait CE), qui serontdveloppes dans la partie consacre auprocessus lgislatif. Ces deux procdurespermettent au Parlement non seulement deproposer des modifications de la lgislationcommunautaire dans le cadre de plusieurs

    lectures et de les dfendre, dans certaineslimites, auprs du Conseil, mais aussi das-sumer les fonctions de colgislateur auxcts du Conseil dans le cadre de la proc-dure de codcision.

    Le Parlement joue galement depuislongtemps un rle dterminant dans ledomaine du droit budgtaire. Il a notam-ment le dernier mot sur les dpenses nonobligatoires de la CE, cest--dire lesdpenses qui ne sont pas spcifiquementprvues par les rgles communautaires: lesdpenses administratives des institutionscommunautaires et notamment lesdpenses oprationnelles lies aux Fondsstructurels et aux politiques en matire derecherche, dnergie, de transport ou deprotection de lenvironnement. Elles

    reprsentent presque la moiti du budgetcommunautaire (46,3 % en 1999). En outre,

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    27

    16

    30

    42

    48

    50

    180

    233

    34

    PARLEMENT EUROPEN (1)

    Prsident14 vice-prsidents et 5 questeurs

    Groupe du parti populaire europen (dmocrates-chrtiens) et dmocrates europens, PPE-DE

    Groupe du parti des socialistes

    europens, PSE

    Groupe des non-inscrits, NI

    (1) Situation au mois de septembre 1999.

    Groupe du parti europendes libraux, dmocrateset rformateurs, ELDR

    Groupe desVerts/alliance libreeuropenne, V/ALE

    Groupe confdralde la gauche

    unitaire euro-penne/gaucheverte nordique,GUE/NGL

    Groupe de l'unionpour lEuropedes nations, UEN

    Groupe pour lEuropedes dmocratieset des diffrences, EDD

    Dix-sept commissionsprparent les travauxdes sessions plnires

    D

    99

    F

    87

    I

    87

    UK

    87

    E

    64

    NL

    31

    B

    25

    EL

    25

    P

    25

    S

    22

    A

    21

    DK

    16

    FIN

    16

    IRL

    15

    L

    6

    626

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    35

    1. AFET: commission des affaires trangres, des droits de lhomme,de la scurit commune et de la politique de dfense

    2. BUDG: commission des budgets

    3. CONT: commission du contrle budgtaire

    4. LIBE: commission des liberts et des droits des citoyens, de la justice

    et des affaires intrieures

    5. ECON: commission conomique et montaire

    6. JURI: commission juridique et du march intrieur

    7. ITRE: commission de lindustrie, du commerce extrieur, de la rechercheet de lnergie

    8. EMPL: commission de lemploi et des affaires sociales

    9. ENVI: commission de lenvironnement, de la sant publique et de la politiquedes consommateurs

    10. AGRI: commission de lagriculture et du dveloppement rural

    11. PECH: commission de la pche

    12. RETT: commission de la politique rgionale, des transports et du tourisme

    13. CULT: commission de la culture, de la jeunesse, de lducation, des mdiaset des sports

    14. DEVE: commission du dveloppement et de la coopration

    15. AFCO: commission des affaires constitutionnelles

    16. FEMM: commission des droits de la femme et de lgalit des chances

    17. PETI: commission des ptitions

    Dix-sept commissions prparent les travaux des sessions plnires

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    ces dpenses ont une incidence cruciale sur

    le dveloppement de la CE tant donnquelles (co)dterminent les progrs et lerenforcement de politiques communautaires

    fondamentales (par exemple les politiques

    sociale, rgionale, de recherche, de protec-tion de lenvironnement ou des transports)et constituent un pralable essentiel aulancement de nouvelles actions politiques,

    par exemple dans le domaine de lduca-

    tion ou de la protection des consomma-teurs. Le Parlement peut modifier la rparti-tion de ces dpenses et, dans certaineslimites, en augmenter le montant. Il exerce

    ainsi une influence considrable sur lanature concrte des politiques communau-taires finances grce aux dpenses nonobligatoires. Lautre moiti du budget com-munautaire se compose des dpensesobligatoires, cest--dire les dpenses

    explicitement prvues par les rgles com-munautaires (il sagit essentiellement desdpenses lies la politique agricolecommune). Le Parlement peut proposer des

    modifications de ces dpenses qui, si ellesne dpassent pas le plafond global, sontrputes acceptes ds lors que le Conseilne sy oppose pas la majorit qualifie.Enfin, le Parlement peut rejeter globalement

    le budget, et cest galement lui qui octroie la Commission la dcharge pour le budgetde lanne prcdente.

    Lavis conforme du Parlement est requispour tous les accords internationaux impor-

    tants (article 300, paragraphe 3, et arti-

    cle 310 du trait CE) et sur les accordsdadhsion conclus avec les futurs tatsmembres qui fixent les conditions dadh-

    sion (article 49 du trait UE). Sont gale-ment soumises laccord du Parlement la

    nomination du prsident de la Commission,

    la composition de la Commission, toutemodification des statuts de la BCE ainsi que,

    bien entendu, la dcision sur la procdureuniforme pour llection du Parlement.

    2. Fonction consultative

    Pour lessentiel, le Parlement europenexerce cette fonction dans le cadre des

    procdures de consultation par le Conseil etla Commission. Ces procdures peuventtre obligatoires, cest--dire prvues par lestraits, ou facultatives. Jusqu lintroduc-tion des procdures de coopration et decodcision, cette consultation permettait auParlement de participer la seule procdurelgislative existant au sein de la CE, savoirla procdure de proposition. Avant quele Conseil ne prenne une dcision, le

    Parlement devait ou pouvait se prononcersur les propositions de la Commission.

    Comme nous le verrons plus loin, avec la

    rgression constante des possibilits dap-pliquer la procdure de proposition, la fonc-tion consultative du Parlement a, elle aussi,

    cd progressivement la place la fonctiondcisionnelle, du moins en ce qui concernela procdure lgislative formelle.

    3. Fonction de contrle

    Le Parlement europen nexerce des fonc-tions de contrle quenvers la Commission.Ce contrle consiste essentiellement enlobligation, pour la Commission, de rpon-dre au Parlement, dexpliquer ses positionsau cours des sessions plnires publiques etde lui prsenter tous les ans un rapport

    gnral sur lactivit des Communautseuropennes. Le Parlement peut alors36

  • 8/3/2019 L__abc_droit_communautaire

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    adopter une motion de censure la majorit

    des deux tiers et dmettre ainsi laCommission de ses fonctions (article 201 du

    trait CE). ce jour, cinq motions decensure ont t dposes devant leParlement europen (la dernire date dejanvier 1999), trois ont fait lobjet dun voteet toutes ont t rejetes. Depuis lentre envigueur du trait UE, ce vote de dfiance agagn en importance dans la mesure o,

    conformment au droit dinvestiture qui luia t confr par le trait, le Parlementprend part la nomination de laCommission quil a critique. tant donnque, dans la pratique, le Conseil accepte

    galement de rpondre aux questions duParlement europen, ce dernier a loccasiondengager un dbat politique direct avecdeux organes lgislatifs majeurs de la CE.Cette possibilit de contrle politique du

    Parlement europen a t considrablementrenforce par dautres mcanismes de con-trle introduits par le trait sur lUnioneuropenne. Le Parlement peut constituerdes commissions denquteafin dexaminerles allgations dinfraction ou de mauvaiseadministration dans la CE. titre dexem-ple, une commission denqute a t creen vue de dterminer la responsabilit de laCommission dans la raction trs tardive la maladie de la vache folle qui sestdclare au Royaume-Uni et qui constituegalement une menace pour la sant et lavie de lhomme. De plus, le trait garantit tout citoyen de lUnion ou toute personnemorale le droit de prsenter des ptitionsauParlement, qui sont examines par la com-mission permanente des ptitions. Enfin, leParlement a us de son droit de nommer un

    mdiateur europen (ombudsman)chargdexaminer les litiges qui pourraient natre

    des activits des institutions ou des organes

    communautaires, exception faite de laCJCE. Le mdiateur peut procder desenqutes et saisir lorgane concern. Ilprsente un rapport sur ses activits auParlement.

    Mthodes de travail

    Les principes fondamentaux rgissant lestravaux du Parlement europen figurentdans son rglement intrieur.

    Les dputs au Parlement sorganisent engroupes politiques. tant donn que leParlement est, par nature, une institution

    communautaire, ces groupes constituent

    des partis politiques au niveau communau-

    taire qui dpassent les limites nationales.

    Le Parlement dispose, en outre, de dix-septcommissions permanentes. Au sein dechaque commission parlementaire, le

    membre concern de la Commissioneuropenne, ou son reprsentant, prsenteles dcisions de la Commission euro-penne, les documents soumis au Conseil etlavis dfendu auprs du Conseil. Les com-missions permanentes ont ainsi une vue

    densemble des activits d