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Le pied diabétique L’approche orthopédique Pr F. Ziani Unité septique service de chirurgie orthopédique EHS de Douera 18ème congrès national de la SACOT 2, 3 et 4 décembre 2011 hôtel Sheraton Oran

L’approche orthopédique - sacot-dz.com A/1 - F. Ziani.pdf · • Soins locaux et décharge • Facteurs de ... Recommandations pour la pratique clinique Prise en charge du pied

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Le pied diabétique L’approche orthopédique

Pr F. ZianiUnité septique

service de chirurgie orthopédiqueEHS de Douera

18ème congrès national de la SACOT

2, 3 et 4 décembre 2011 hôtel Sheraton Oran

Prévention49 % à 85 % de tous les problèmes liés au pied

diabétique , notamment l’amputation, peuvent être évités si des mesures préventives appropriées et une meilleure

prise en charge sont prises.

L’année du pied diabétique Karel Bakker et Phil Riley diabetesvoice Avril 2005 Volume 50 Numéro 1

EVITONS LES AMPUTATIONS

L’approche orthopédique: 2 volets

• EN AVAL : Prise en charge du pied diabétique infectée

• EN AMONT :Mesures de prévention

Les différents aspects du pied diabétique infectée

• Épidémiologiques• Physiopathologiques• Cliniques• Thérapeutiques

Catastrophe épidémiologique• Une amputation de membre inférieur / 30 secondes dans le monde

• Première cause d ’hospitalisation pour infection chez les diabétique

• Première cause (70%)d ’amputation de jambe non traumatique

• 15 % des diabétiques présenteront un ulcère du pied durant leur vie

• 85% des amputations du membre inférieur sont précédées d’un ulcère au pied.

• Dans 50% des cas une nouvelle amputation est réalisée dans les 5 ans

• Le coût direct d’une amputation liée au pied diabétique se situe entre 30,000 et 60,000 USD = Véritable fléau pour les ressources en soins de santé

JL Richard et al / La revue de médecine interne 29 (2008) S222–S230

• Le diabète est une maladie chronique qui affecte près de 2 millions d'algériens

• Diabète de type II Incidence=7 %

• 5 à 10% des diabétiques en Algérie souffrent de

lésions du pied, dont 7% subissent une amputation.

Quelques chiffres en Algérie

Artériopathie

Agression mécanique NeuropathieInfection

Déficit immunitaire

(Altération de la phagocytose)

La neuropathie• Altération des transports axonaux avec dégénérescence axonale

• Rarement avant 5 ans d'évolution

• Une origine vasculaire ← la microangiopthie.

• Trois aspects :

1. La neuropathie sensitive

2. La neuropathie motrice →l'apparition de zone hyperpression kératosique

des déformations d’orteil,d'un appui pulpaire pathologique et d'un effondrement de la voûte plantaire

3. La neuropathie végétative ↓ de la sudation

une sécheresse responsable également de fissures

L'atteinte vasculaire• La micro-angiopathie = spécifique du diabète

− Un épaississement de la membrane basale des capillaires

− Échanges anormaux, pouvant aggraver l’ischémie tissulaire.

• L'athérosclérose − → classique médiacalcose − particularités =atteinte proximale et distale

• L’hypoxie →− La multiplication des germes anaérobies − Un retard de cicatrisation − Mauvaise diffusion des antibiotiques et des

facteurs endogènes de défense

L’agression externe

•Origine principalement mécanique − Par friction répétées − Ou par hyperpression localisées

lors du chaussage notamment en cas de déformation du pied

•Le traumatisme peut être thermique

entraine une ulcéreration cutanée

L’infection• L’infection « proprement dite » est exceptionnelle • C’est l’effraction cutanée +++ →l’infection• Début +++ au niveau des ongles et des espaces inter orteils • La porte d'entrée au niveau des orteils (60 % des cas)• Infection localisée puis diffusante ( articulation ,os ,tendon,

loges)

Le pied artéritique.

• Peau fine, dépilée blanche et des ongles épais, des pulpes d’orteils déshabitées, • Pouls absents ou ➘ .• Plaie:

– Plutôt dorsale, latérale, ou distale sur les orteils.

– non entourée d’hyperkératose, – Peut survenir rapidement – Rarement douloureuse (neuropathie

associée.)

– Peut être nécrotique (parfois rapidement) − Partielle intéressant un ou plusieurs orteils− Globale prenant tout le pied

Exemples de plaie liée à une artérite

Le bilan vasculaire à réaliser en cas de pied ischémique infecté

• Est d’abord clinique . • La confirmation de l’ischémie associée se fait grâce à:

− L’écho-doppler − La mesure de l'index de pression systolique ( IPS)− L’oxymétrie qui évalue la microangiopathie.

• Les bilans invasifs (artériographie…) ne sont réalisés que si une revascularisation est envisagée.

l'index de pression systolique ( IPS)• Rapport entre la pression systolique mesurée à la

cheville et au bras. • Elle permet la détection d’artériopathie chez des

patients asymptomatiques . • Les valeurs normales retenues : 0,90 à 1,30• Un IPS < 0,9 est la valeur seuil pathologique

→ diagnostic d’artériopathie des membres inférieurs

La plaie sur pied neuropathique

• Est indolore

• Survient sur zone d’hyperpression plantaire, pulpaire ou dorsale d’ orteils.

• Elle est entourée d’hyperkératose indolore

• C’est le classique mal perforant plantaire ou encore plus rarement l’ulcération sur pied de Charcot

Exemple de lésion sur neuropathie Pulpaire ,Latérale pied

Exemple de lésion sur neuropathie Mal perforant plantaire

Exemple de lésion sur neuropathie ( pied de Charcot)•Le pied de Charcot est une ostéoarthropathie neurogène

•Touche approximativement 03 diabétiques sur 1000,

•Atteinte destructrice souvent indolore d’une ou plusieurs articulations du pied conduisant à des dislocations articulaires, des fractures pathologiques responsables d’une destruction plus ou moins importante de l’architecture osseuse du pied.

•La plaie est indolore, survient sur une zone d’hyperpression souvent plantaire,

•Elle est entourée d’hyperkératose indolore qui témoigne d’une d’hyperpression ancienne.

•Pas de nécrose et les pouls du pied sont présents.

Lésion neuro-

ischemique

Certaines infections gravesFasciite nécrosante, la cellulite à anaérobies

Le diagnostic de l’infection

• Clinique ++++• Sécrétions purulentes• ± Inflammation ( rougeur,

douleur, œdème et chaleur).

Exploration clinique de la plaie

• Une mesure précise de la plaie (longueur, largeur, profondeur)

• Contact osseux par un stylet (ostéite sous-jacente)

• Orienter le diagnostic entre un pied neuropathique ou ischémique.

Plusieurs classificationsdans la littérature

• WAGNER• UT (Université du Texas)• Consensus international sur le

pied diabétique( IWGDF)

ClassificationsConsensus International sur le Pied Diabétique

• Grade 1 : Infection absentePas de symptôme, ni de signe d’infection

• Grade 2 : Infection légèreAtteinte cutanée uniquement Pas de mise en jeu du pronostic du pied ni vital

• Grade 3: Infection modéréeAtteinte des structures au-delà du tissu sous-cutané.Mise en jeu du pronostic du pied mais pas vital Abcès profond, une ostéite, une arthrite septique …

• Grade 4: Infection sévère.Quelle que soit l’infection locale .Pronostic vital en jeu

Mais en pratique ce qu’il faut retenir:différentes formes cliniques

• Infection pas d’ ischémie• Pas d’ infection Ischémie• Infection et ischémie

Classification .Université du Texas

Ulcère superficiel

Atteinte tendon ou capsule

Abcès , ostéo-arthrite

Gangrène localisée ( talon , avant pied)

Gangrène étendue à tout le piedClassification de wagner

Recherche de signes de gravité

• Des signes généraux :

fièvre, frissons, altération de l’état général, syndrome septique ;

• De signes locaux inflammatoires ou septiques :

plaie profonde, écoulement purulent, contact osseux, odeur nauséabonde, rougeur, œdème ;

• De signes locaux extensifs :

œdème du membre inférieur, caractère fluctuant, crépitation localisée, signes de lymphangite, érysipèle, fasciite nécrosante. nécrose superficielle ou localisée ou gangrène extensive.

Examens radiologiques• Des radiographies standard centrées

sur la lésion permettent le plus souvent d’identifier une ostéite.

• Les signes radiologiques étant souvent en retard sur les signes cliniques,

• Il faudra souvent les renouveler dans les trois semaines

• Parfois il sera difficile de faire la part entre les images d’infection osseuse et d’ostéo-arthropathie du diabétique neuropathique.

• Permet de visualiser des images bulleuses dans les tissus mous (gangrène gazeuse)

Que faut il faire ?Infection est légère

Plaie superficielle récente

• Soins locaux• décharge

Que faut il faire ? infection est modère

Plaie chronique

• Soins locaux et décharge• Facteurs de croissance hématopoïetiques (G-CSF )

Herberprot-PStimuler la granulation et la ré-epithelisation des ulcères diabétiques

• Chirurgie conservatrice– excision,– nettoyage osseux– Possibilité de plastie locale pour les pieds neuropatiques

• VAC (Vacuum Assisted Closure)

Recommandations pour la pratique clinique Prise en charge du pied diabétique infecté

Médecine et maladies infectieuses 37 (2007) 26–50

Les soins locaux• But: obtenir une cicatrisation dirigée• Les pansements quotidien. Si suintement abondant→

biquotidiens. • Une toilette minutieuse au sérum physiologique• excision à minima et l'application de compresses

imbibées d'antiseptiques améliorent la croissance du tissu de granulation et la fermeture de la plaie.

La déchargePlâtre de décharge

orthèse

La surélévation du membre et la proscription de l'appui sont très importants. Permet:

→de lutter contre l'œdème

→éviter les traumatismes minimes répétés causés par la marche

• Cicatrisation par pression négative• Augmentation du flux sanguin local• Drainage des exsudats• Permet l’angiogénèse, l’attraction centripète des

bords et l’occlusion

Le VAC (Vacuum Assisted Closure)

Que faut il faire ?Infection sévère, Ischémie associée, Décompensation du

diabète

•Hospitalisation en urgence• Prise en charge du diabète et réanimation• Mise en décharge• Traitement anticoagulant préventif (HBPM)• Vaccination antitétanique

Le traitement chirurgicalConservateur

• A pour objectifs le drainage du pus et l'excision des tissus nécrosés.

• Le débridement large de tous les tissus nécrotiques et infectés requis.

• Effectué à la curette, au bistouri, ou à la pince gouge le débridement jusqu’en zone saine

• Drainage par lames souples• Nécessité dans certain cas de faire plusieurs

pansement au bloc opératoire pour compléter l’excision

La chirurgie d'amputation• reste parfois encore la seule option en cas d’infection profonde

et sévère, notamment si elle s’associe à une ischémie.

• Le choix du niveau d’amputation est fonction de l’état vasculaire en mettant tout en œuvre une amputation la plus distale afin de faciliter l ’appareillage

• Aucune amputation ne doit être effectuée sans au préalable des examens complémentaires à visée vasculaire.

• Les amputations majeures (jambe ou cuisse) devraient être exceptionnelles (en cas d’infection non contrôlée mettant en jeu le pronostic vital ou de gangrène étendue ou de troubles trophiques extensifs irréversibles).

Ne jamais fermer les moignons d’amputation de première intention

Amputation partielle d’orteil

Amputation de Lisfranc et de Chopart

Amputation majeure (jambe et cuisse)

Le problème de l’ostéite

• L’ostéite du pied est associée aux IPD, notamment en casde plaie chronique siégeant en regard d’une proéminenceosseuse, ce qui est la majorité des situations

• Une telle association est décrite jusque dans 60 % des cas avec une large prédominance pour l’avant-pied.

• Il s’agit d’une ostéite correspondant à l’extension d’une infection des tissus mous aux structures osseuses sous-jacentes à travers la corticale puis jusqu’au canal médullaire: il n’y a pas d’ostéite du pied diabétique sans plaie préalable.

• Nettoyage osseux, sequéstrectomie ,résection osseuse …..

Traitement de l’ischémie

• L’ischémie est un facteur d’infection et entrave la disponibilité des antibiotiques au niveau de la plaie.

• Tout pied diabétique infecté doit être exploré sur le plan vasculaire

• en cas de lésion significative, l’avis d’un chirurgien vasculaire s’impose en vue d’un geste de revascularisation.

Le traitement de l’ischémieIl ne se conçoit que lorsque

l’infection est contrôlée et après évaluation

•Angioplastie transluminale percutanée(ATP)

•Pontages distaux

Artériopathie diabétique des membres inférieursA. Fredenrich et al. EMC-Endocrinologie 1 (2004) 117–132

ANTIBIOTHERAPIEMicrobiologie

• La microbiologie des IPD est dominée par les cocci à Grampositif (CGP), en particulier Staphylococcus aureus et streptocoques β-hémolytiques notamment du groupe B,

• D’autres variétés peuvent être isolées comprenant desbacilles à Gram négatif (BGN) tels que Escherichia coli, Klebsiella spp. et Proteus spp., voire des anaérobies (ANA) tels que Peptostreptococcus spp. et Bacteroides spp.

• La répartition des CGP et des BGN est respectivement de 2/3 et 1/3,

• La proportion des anaérobies dans les études dépend de la technique de prélèvement, de transport des échantillons et des méthodes de culture utilisés.

AntibiothérapieInfection légère

Staphylocoque +++

• Monothérapie ambulatoire• Per os• Antistaphylococcique ( Amoxicilline- acide clavulanique, acide fucidique…)

Choix de l’antibiothérapieEn cas d’infection sévère ou chronique modérée extensive

infection poly microbienne

• Commencer par une antibiothérapie à large spectre couvrant les Cocci à Gram + (SAMR inclus) Bacilles à Gram – Anaérobies

• Préférer, au début, une administration parentérale et avec une association type Amoxicilline- acide clavulanique ou fluoroquinolones + Aminoside +Metronidazole

• Adapter l’antibiothérapie aux résultats bactériologiques

Contrôle métaboliquepasser tout diabétique hospitalisé pour infection du pied

sévère ou chronique modérée extensive sous insuline

• Insulinothérapie optimisée par voie IV • Associée à l’auto surveillance glycémique• Visant la normo glycémie jusqu’à cicatrisation

Surveillance de l’efficacité du traitementRéévaluation clinique et biologique à 48-72 heures

• Si bonne évolution pas de changement d’ ATB

• Si évolution défavorable:− inadéquation entre ATB et bactério? − inobservance? − recherche d’extension, d’ischémie ?− Insuffisance du geste chirurgical?

LA PREVENTION

Quelle démarche de prévention ?

• L’examen systématique des pieds et du chaussage +++

• L’évaluation du niveau de risque lésionnel grade de risque podologique

(neuropathie/artérite/déformations)

• Mettre en décharge dès l’apparition d’une lésion et traiter rapidement l’infection

• Le traitement des anomalies à risquecallosités (cor, durillon, kératomes interdigitaux), sécheresse cutanée qui favorise l’apparition de fissures ou de crevasses au niveau des talons.

• Elaborer des programmes et des formations à l’éducation aux soins des pieds pour les personnes atteintes de diabète et les professionnels de la santé

Examen podologique chez un sujet diabétiqueRecherche d’une neuropathie :• Hyperkératose aux points

d’appui• Abolition des ROT• Test au monofilament• Hypoesthésie• Suppression de la douleur

Recherche d’une artérite :

• Claudication habituellement absente (neuropathie)

• Peau fine, luisante, dépilée,

• Diminution ou abolition des pouls

•Index cheville/bras

• Mesure TcPO2

• Doppler artériel

La chirurgie préventiveQuelles déformations corriger ?

Les déformations non diabétiques (les plus courantes)• griffe d’orteil , conflit latéral entre les orteils• luxation métatarso-phalangienne• hallux valgus et quintus varus (équivalent au 5 ème orteil)

Les déformations dues au diabète• le pied de Charcot et ses séquelles• hyper appui sous la tête de M1 (premier métatarsien ; évolution vers le mal perforant plantaire)

Quintus varus +metatarsus varus

Hallux valgus

Griffe d’orteil

Traitement :

resection arthroplastique +++

Ténoplastie

Le mal perforant plantaire Hyper appui sous la tête du premier métatarsien

Recommandations thérapeutiques pour le patient1. Inspection quotidienne des pieds (miroir)

2. Signaler immédiatement toute lésion ou coloration suspecte

3. Ne jamais marcher pieds nus ou en chaussures sans chaussettes

4. Se laver les pieds chaque jour à l’eau tiède (> 37°C) et au savon de Marseille, bien essuyer les espaces interdigitaux

5. En cas de peau sèche appliquer une crème hydratante neutre (vaseline simple) en évitant les espaces interdigitaux

6. Garder les ongles suffisamment longs et les limer plutôt que de les couper (ne pas les couper à ras)

7. Ne pas traiter soi même durillons, cors ou ampoules

8. Changer de chaussettes tous les jours (éviter le nylon)

9. Etre attentif au choix des chaussures (larges, pas de talons supérieur à 5 cm) et les vérifier régulièrement en passant la main à l’intérieur (plis, affaissement, objets incongrus);

10. Prendre garde au risque de brûlures

11. Sécher les espaces inter orteils après les ablutions

12. Eviter le henné

Indications– Grade 1 : Infection absente

→ Prévention générale ,locale et vasculaire

– Grade 2 : Infection légèreAtteinte cutanée uniquement

→ Soins locaux décharge

– Grade 3: Infection modéréeAtteinte des structures au-delà du tissu sous-cutané.Mise en jeu du pronostic du pied mais pas vital Abcès profond, une ostéite, une arthrite septique …

→ Traitement chirurgical conservateur Amputation si ischémie ou extension

– Grade 4: Infection sévère.Pronostic vital en jeu

→ Traitement chirurgical conservateur ---Amputation +++

CONCLUSION• Les infections du pied chez le diabétique témoignent

de l'échec de la prise en charge de la maladiemétabolique par le patient et de son équipesoignante.

• Les facteurs ayant causé l'infection n'ont pas étédécelés et corrigés à temps.

• Seule une approche multidisciplinaire permet deréduire l'incidence des amputations chez lediabétique.

CardiologueMédecin interniste

DiabétologueGénéraliste

Assistante sociale

rééducateur

infirmière

ChirurgienGénéraliste

OrthopédisteVasculaireplastique

Radiologue

Diététicienne

Podologue

Pédicure

Le pied diabétique Prise en charge pluridisciplinaire

Préventive et curative

Merci